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dossier en
santé publique
5
décembre 1993
Protection sanitaire et
1 lutte contre les fléaux sociaux
éaliser un dossier dans l’esprit des dossiers l’intervention auprès de populations ciblées (enfants,
Sommaire R que nous vous proposons dans cette revue
c’est-à-dire un esprit de synthèse et de
clarification, sur le thème des collectivités locales et la
femmes enceintes, personnes handicapées,
personnes âgées, ou encore bénéficiaires du RMI ou
jeunes en difficultés d’insertion) fera l’objet d’un
II Rappels
juridiques santé publique est rapidement apparu comme une deuxième dossier (à paraître en juin 94) ;
gageure. D’abord le champ est immense, les limites lire attentivement les textes, le code de la santé
III Au regard des de la santé publique mal définies et l’intervention en publique en particulier bien entendu, et éclairer le
textes, des santé publique à facettes multiples. Ensuite, le droit lecteur quand cela est possible mais laisser parfois
compétences est infiniment complexe, voire inextricable : textes pendantes les questions qui peuvent subsister même
limitées anciens plus ou moins tombés en désuétude, après cette lecture attentive ;
compétences se chevauchant, flou juridique… Enfin, proposer une approche des interventions locales,
III Les communes
l’intervention des collectivités locales a une ampleur non pas par un recensement (infaisable), des chiffres
VII Les départements
et une variété largement reconnues, sans être (introuvables ou ininterprétables), ni même par une
véritablement connues et aucune statistique, typologie qu’il aurait été trop ambitieux de chercher à
XIII Au regard des
enquête,… ne permet pour le moment de l’évaluer ou faire dans le temps qui nous était imparti, mais
réalisations, un
d’en dessiner précisément les contours. simplement en tentant de clarifier les logiques qui
investissement
Pourtant, ce sujet est au cœur de nombreux débats amènent les collectivités locales à développer des
certain
actuellement, et il nous a semblé important d’y apporter politiques de santé publique, au-delà de leurs seules
XIV La volonté
une contribution, notamment en cherchant à clarifier obligations légales. Les quelques exemples cités, le
politique des
les fondements de cette intervention, c’est-à-dire le sont seulement à titre d’illustration.
collectivités
droit d’une part, les logiques politiques d’autre part. C’est ainsi que cette gageure a été relevée, avec
locales
Ainsi, pour tenter cette synthèse malgré les difficultés l’approbation du comité de rédaction. Mais les
XVIII Les politiques soulevées ci-dessus, trois idées ont été retenues : développements de ce dossier n’engagent que leur
d'impulsion de partager le sujet et en faire deux dossiers, en auteur. Ils ne sauraient être considérés, en particulier,
l'État traitant d’abord la santé publique au sens étroit et en comme l’analyse du Haut Comité de la santé publique.
XXII Le volet santé de renvoyant à un autre dossier l’intervention médico- Enfin ce dossier, comme les précédents, est constitué
politiques sociale auprès de populations spécifiques. Il s’agit d’une partie « état des lieux » (avec ses limites…) et
globales ou donc ici d’un premier volet qui s’attache à l’intervention d’une partie « tribune ». Nous avons cherché à donner
transversales dans le domaine de la surveillance, de l’hygiène du la parole pour cette deuxième partie aux différents
milieu, de la lutte contre les épidémies (ce que le code niveaux de l’administration, à des politiques et des
XXIV Tribune de la santé publique regroupe dans son livre 1er sous administratifs. Malheureusement, un représentant de
le titre « protection générale de la santé publique ») et l’État et un élu, après avoir donné leur accord dans un
XXX Annexes
à la lutte contre « les fléaux sociaux » (livre III du code premier temps, se sont désistés. À reprendre dans le
de la santé publique). Tout ce qui concerne prochain dossier…
l est difficile de retrouver la logique qui a services. Quant aux régions, elles n’ont pas de
I présidé aux choix qui ont été faits pour les
transferts de compétences dans le cadre de la
compétence spécifique en santé publique. Mais
il convient de relever que l'article 59 de la loi du
décentralisation. Les communes ont essentiel- 2 mars 1982 donne une compétence au conseil
lement conservé des compétences que les mai- régional « pour promouvoir le développement
res exerçaient déjà assez largement en matière économique, social, sanitaire, culturel et scien-
de salubrité publique et les départements se tifique de la région […]. »
sont vus attribuer la responsabilité de quelques
Les communes
essentiel des compétences des commu- plus particulièrement le rôle des communes en
L’ nes concerne l’hygiène du milieu. Cette
compétence n’est d’ailleurs pas nouvelle, les
matière d’hygiène du milieu et de salubrité
publique :
lois de décentralisation ayant peu modifié la l’article L 131-2 du code des communes
répartition des compétences dans ce domaine. qui définit le pouvoir de police générale du
Elle est par contre extrêmement intriquée avec maire,
celle de l’État (préfet et services déconcentrés). l’article L 2 du code de la santé publique
qui définit son pouvoir réglementaire en matiè-
re de règles générales d’hygiène,
l’article L 772 qui définit le rôle des
Hygiène du milieu services communaux d’hygiène et de santé.
De nombreux autres articles du code la santé
publique mentionnent explicitement le rôle du
Trois articles, du code de la santé publique maire ou de ses services dans le processus
(CSP) ou du code des communes, définissent d’application ou de contrôle de « protection
générale de la santé publique » (livre I du code positions des articles L 1, L 2, L 48, L49 et L
de la santé publique), rôle qui concerne aussi 772 du code de la santé publique, prise après
bien les questions d’eau potable, de salubrité l’avis rendu par le Conseil d’État le 8 novembre
des immeubles ou des agglomérations, de dé- 1988, est essentielle pour comprendre la répar-
sinfection, etc. (cf. liste des articles en annexe). tition des rôles de l’État et de la commune en ce
Par ailleurs, la circulaire du 14 juin 1989 rela- domaine (JO du 26 juillet, voir annexes).
tive aux règles d’hygiène, application des dis-
Le pouvoir de police
le
point Les services communaux d’hygiène et de santé
sur
Services de santé
L’article D 285 du code de procédure pénale pré- La prophylaxie de la tuberculose dans les établisse-
voit une visite médicale systématique pour les arri- ments pénitentiaires n’est pas, par contre, expres-
vants dans les établissements pénitentiaires : « dans sément prévue dans le code de la santé publique.
les délais les plus brefs, le détenu est soumis à un Mais l’article D 394 du code de procédure pénale la
examen médical destiné à déceler toute affection prévoit et précise que ce dépistage doit être assuré
de nature contagieuse ou évolutive qui nécessite- par les services départementaux d’hygiène sociale.
rait des mesures d’isolement ou des soins urgents. » Il revient donc aux départements, dans le cadre de
Or le département est responsable de la prophy- l’application du chapitre 1er « prophylaxie » du titre
laxie de deux affections contagieuses ou évoluti- sur la lutte contre la tuberculose du CSP, d’assurer
ves : les maladies vénériennes et la tuberculose. ce dépistage. De fait, ce dépistage systématique
La prophylaxie des maladies vénériennes dans les des entrants en prison constitue une bonne partie
établissements pénitentiaires est expressément vi- de l’activité des dispensaires antituberculeux.
sée par le code de la santé publique, article L 273 : Il convient de mentionner également le dépistage
« l’examen et le traitement prévus par les disposi- du sida : après plusieurs années d’initiatives va-
tions en vigueur relatives à la prophylaxie des riées, les départements acceptant parfois de pren-
maladies vénériennes sont obligatoires pour tous dre en charge le dépistage du VIH quand il était
les détenus. Les prévenus ne sont soumis à cette proposé aux détenus, la circulaire du 29 janvier
obligation que si l’autorité sanitaire et l’administra- 1993 relative au dépistage anonyme et gratuit ou au
tion pénitentiaire les considèrent, en raison de pré- dépistage gratuit du sida a préconisé le couplage
somptions graves, précises et concordantes, com- de chaque établissement pénitentiaire avec une
me atteints de maladie vénérienne. » consultation de dépistage anonyme et gratuit. C’est
L’article D 393 du code de procédure pénale re- donc dans ce cadre que certains dispensaires
prend ces dispositions et précise « à cet effet les antivénériens interviennent pour le dépistage du
médecins, infirmières et assistantes sociales des sida dans les établissements pénitentiaires, mais le
services spécialisés ont accès aux établissements coût en est supporté par l’État et par la Sécurité
pénitentiaires. » Malgré les restrictions concernant sociale.
les prévenus, la majorité des entrants en prison est
soumise à ces dispositions qui se concrétisent
essentiellement par un dépistage de la syphilis.
ailleurs elle a modifié l’article L 304 du CSP qui affaires sanitaires du conseil général (art. L 257
stipule dorénavant « les établissements antivé- à L 260 du CSP). La transmission de ces décla-
nériens sont des établissements du départe- rations à l’État n’est pas prévue. Il ne s’agit
ment ». Ceci appelle différentes remarques. donc pas du même système de déclaration obli-
Comme pour la lutte contre la tuberculose, le gatoire que celui prévu par l’article L 11 du
transfert des compétences n’a pas concerné CSP. Ces déclarations ne semblent plus être
l’organisation médico-administrative (le cha- que rarement effectuées.
pitre II), mis à part le changement de statut des Ce système de déclaration se rattachait à une
dispensaires antivénériens. Mais qu’en est-il législation très coercitive en matière d’obliga-
des services de lutte antivénérienne (section III tion de soins : le chapitre 1er prévoit une obli-
du chapitre II, article 307 et suivants) ? Dans les gation de se soigner pour tout individu atteint
faits, le personnel de ces services est passé aux d’une maladie vénérienne ou pour tout individu
départements. présumé contaminateur (art. L 255 et L 261),
Les dispositions du chapitre 1er « prophy- l’hospitalisation d’urgence décidée par l’auto-
laxie » porte essentiellement sur la déclaration, rité sanitaire ou l’hospitalisation d’office (art. L
nominale ou simple, et l’obligation de se soi- 274, L 275 et L 278) ou encore l’interdiction
gner. d’exercer sa profession si cela comporte un
Les quatre maladies vénériennes sont sou- risque de contamination (art. L 277)… Il fau-
mises à une obligation de déclaration qui peut- drait encore citer l’intervention de la force
être « simple » (diagnostic sans nom du patient, publique (art. L 261) et les dispositions pénales
ou « nominative » si le patient refuse de se (art. L 285 à L 292). Ces mesures sont très
soigner). Ces déclarations doivent être envoyées largement tombées en désuétude. On pourrait
à « l’autorité sanitaire départementale », aller jusqu’à dire qu’elles sont inapplicables et
c’est-à-dire dorénavant au médecin chargé des inappliquées.
le Structures départementales et
point
sur dépistage du sida
Trois types de structures gérées par les départements Les centres de planification familiale
sont concernés par le dispositif de dépistage Les centres de planification familiale habili-
anonyme et gratuit ou seulement gratuit mis en place tés, après déclaration auprès du préfet,
progressivement par l’État depuis 1988. peuvent également proposer le dépistage
du VIH à l’occasion des consultations con-
Les dispensaires Les consultations de PMI traceptives. Une procédure de gratuité est
antivénériens Elles peuvent, dans les mêmes prévue dans le cas où une mineure ou une
Ils peuvent être désignés conditions, être désignées par le femme sans couverture sociale en fait la
par le préfet pour être con- préfet pour être consultations de demande, les frais sont alors pris en charge
sultation de dépistage ano- dépistage gratuit (décret no 92- par l’assurance maladie (70 %) et l’État
nyme et gratuit au sens du 691 du 17 juillet 1992). (30 %). (décret no 92-784 du 6 août 1992).
dispositif mis en place en
1988 (décret no 88-61 du
18 janvier 1988 modifié par Dans les trois cas, la prestation offerte doit être la même :
le décret n o 92-691 du consultation médicale d’information conseil personnalisé avant et après
17 juillet 1992). Ils peuvent l’examen biologique lui-même ;
aussi être désignés par le le coût des consultations médicales et des examens biologiques est pris en
préfet pour être consulta- charge par l’assurance maladie (85 %) et par l’État (15 %) ;
tion de dépistage gratuit les départements se font rembourser sur présentation d’état de frais.
(décret n o 92-691 du
17 juillet 1992). (circulaire DGS, division sida, no 09 du 29 janvier 1993, BO affaires sociales no93-14 du 8 juin 1993)
rôle nouveau dévolu à la CNAM dans les mars 1965 relatif à l'organisation des centres
actions de dépistage des cancers du sein, du col agréés de vaccination puisque l'article L 50
de l’utérus et colo-rectaux, dans le cadre des nouveau stipule que le conseil général en assure
programmes annuels du Fonds national de pré- l'organisation. De même, on s'interroge sur
vention, d’information et d’éducation sanitaire l'identité et la fonction du chef départemental
fixés par arrêté depuis 1989. des vaccinations mentionné dans cet arrêté et
On s’interroge alors sur la compétence ef- dans le décret du 28 février 1952 (cf. article 1er
fectivement dévolue aux départements par la de ce décret).
loi de juillet 1983 : compétence générale en
matière de dépistage et de suivi des anciens
malades ou gestion des consultations avancées Désinfection
dont l’activité s’est progressivement étiolée ?
Par ailleurs, aux termes de l’article L 14 du
CSP, les départements devraient organiser un
Lutte contre la lèpre service de désinfection (désinfection obligatoi-
re dans le cas de certains maladies contagieu-
Enfin citons pour mémoire la lutte contre la ses) pour les communes de moins de 20 000
lèpre dans quelques territoires ou départements habitants. Ces dispositions semblent rarement
d’outre-mer (article 37-6° de la loi du 22 juillet appliquées. On voit mal également l’applica-
1983). tion du dernier alinéa de cet article L 14 : « À
défaut par les villes et les départements d’orga-
niser les services de la désinfection et d’en
assurer le fonctionnement, il y est pourvu par
des décrets en forme de règlement d’adminis-
Autres compétences tration publique ».
La décentralisation en retard
P cées : d’abord juridiquement on a vu les
larges zones de flou dans la répartition des
compétences qui laissent la place à des inter-
« La société locale est certes débloquée — pour reprendre la prétations diverses. Conjugué au principe de la
formule de Michel Crozier — mais au prix d’un sentiment d’anomie compétence générale des collectivités locales
et d’une impression de confusion. Les règles du jeu local se sont sur les affaires qui intéressent leur territoire (cf.
trouvées obscurcies jusqu’à devenir imprévisibles ». Certains ont encadré en page II), ce flou permet toutes, ou
pu les qualifier de « jungle institutionnelle » où les trois niveaux de pratiquement toutes, les initiatives locales ou
structures se soucient peu de déborder de leurs compétences au contraire une certaine inertie. Les services
déterminées par la loi pour empiéter sur celles des autres ; même de l’État de leur côté n’ont pas toujours claire-
l’État remet en cause les « blocs de compétences » qu’il avait ment établi les règles du jeu et ont rencontré
institués en 1983. Les partenaires se sont multipliés — volontaires quelques difficultés à redéfinir et recentrer leurs
ou imposés — comme partie prenante des opérations menées à missions. L’histoire des collectivités locales,
tous les échelons territoriaux. Croisements et enchevêtrements leur tradition plus ou moins importante d’inter-
sont répétitifs dans la mise en œuvre de l’action publique ; vention dans ce secteur, la perception politique
processus sectoriels et territoriaux se mélangent dans l’accom- qu’ils ont de la santé, ont dès lors largement
plissement des politiques publiques et leurs prolongements lo- décidé de leur investissement plus ou moins
caux… Le transversal est roi dans la régulation du système local : important dans des actions de santé publique.
financements croisés et procédures contractuelles vont de pair Il est impossible aujourd’hui de recenser, ni
avec les tentatives de recentralisation pour encadrer les interven- même d’estimer, les interventions des collecti-
tions de l’État, des régions, des départements et des villes. » vités locales dans les domaines que couvre
notre dossier. Les statistiques qui doivent être
A. Mabileau, la décentralisation en retard, in l’état de la décentralisation, fournies par les départements sur l’activité de
Cahiers français, no 256. certaines de leurs structures ne sont que peu
exploitées et ne peuvent couvrir la diversité des
interventions de terrain. A fortiori, on ne dispo-
de vaccination rougeole-oreillons-rubéole en
mettant à disposition gratuitement les vaccins. Les régions
Plus souvent, les départements sont partenaires
des comités de pilotage locaux de la campagne
nationale de promotion de cette vaccination, Les régions ne sont pas totalement absentes des
financée par le Fonds national de prévention politiques locales de santé bien qu’elles n’aient
d’éducation et d’information sanitaire. pas de compétence particulière dans ce domai-
Enfin l’intervention des départements dans ne. Rarement promoteurs ou initiateurs, elles
la lutte contre la tuberculose est quelque peu sont assez souvent sollicitées comme partenai-
erratique, certains départements appliquent en- res financiers. Cet investissement est donc en-
core une circulaire de 1972… Mise à part core plus diffus et difficile à repérer.
l’intervention dans les établissements péniten- On peut citer leur participation relativement
tiaires pour laquelle les départements ont à fréquente dans le financement des Observatoi-
nouveau activement été sollicités en 1993, la res régionaux de la santé. On peut relever
politique de lutte contre la tuberculose prend également l’intérêt que certaines portent à la
souvent la forme de tests tuberculiniques et lutte contre le sida : le conseil régional
vaccinations BCG régulièrement proposés dans d’Île-de-France est largement intervenu dans la
les écoles. mise en place du premier centre régional d’in-
Au-delà de ces compétences plus ou moins formation et de prévention du sida dès 1987 (le
largement interprétées, quelques départements CRIPS) et le finance encore pour plus de 50 %.
mènent des politiques volontaristes de santé. Plus récemment des conseils régionaux ont
Celles-ci vont plus souvent concerner l’accès accepté de financer les antennes régionales de
aux soins (carte santé) ou la santé de certaines sida-info-service, mises en place par l’Agence
populations (mère, enfants, adolescents,… voir française de lutte contre le sida, ou encore les
le prochain dossier). Cette politique est alors quelques systèmes régionaux d’évaluation de
souvent, comme dans les départements de la la contamination par le VIH mis en place par
région parisienne, de longue tradition. des ORS et subventionnés par la DGS.
en 1990 et 1991, 76 % ont été cofinancés. Ces « le soutien des élus aux missions de l’Agence
cofinancements représentent 46 % du coût total est indispensable pour assurer une diffusion
des projets. Mais là non plus on ne connaît pas permanente des messages. […] L’engagement
précisément la part prise par les collectivités des maires a une dimension essentielle pour
locales qui, là encore, peut provenir d’une com- rappeler les valeurs de tolérance et de solidarité
mune, d’un département ou d’une région. face aux exclusions qu’engendre la maladie.
Depuis 1992, l’AFLS a franchi une nouvelle L’autorité qu’ils exercent sur des institutions
étape dans l’implication des collectivités loca- ayant compétences sociales ou sanitaires leur
les : elle s’adresse directement (par la voie permet d’impulser des actions de prévention. »
écrite mais aussi, pour les plus importantes, par À la suite de quoi, l’AFLS a pu faire valoir, à
relance téléphonique) aux 925 communes de partir d’un échantillon de 200 communes, les
plus de 9 000 habitants pour qu’elles s’asso- actions de 178 d’entre elles (cf. encadré) ; cet
cient à l’organisation de la journée annuelle appel direct aux communes est renouvelé pour
mondiale de lutte contre le sida, en ces termes : la journée du 1er décembre 1993. Dans son plan
Projet né en 1986, cette recherche-action inté- socio-anthropologique, les deux volets as-
grée par la suite au programme développe- sez indépendants au départ pour croiser
ment social du quartier, avait comme objectifs les résultats et rechercher une cohérence
d’une part la connaissance des pratiques et d’ensemble ;
des problèmes de santé à l’échelle du territoire, des groupes de travail : santé mentale,
d’autre part la recherche des moyens pour santé des jeunes, suivi des femmes encein-
optimiser la réponse aux problèmes diagnosti- tes, accès aux soins, hôpital dans la ville,
qués. maison médicale, habitat et santé qui après
Recherche-action aux multiples dimensions, une étape de questionnement précis, de-
elle s’est notamment appuyée sur vaient également avancer des propositions
un partenariat très actif entre les responsa- d’action concrètes.
bles institutionnels, une équipe de recherche, Au-delà des premiers objectifs, le groupe
des acteurs de terrain (institutionnels ou libé- de pilotage s’est beaucoup attaché à :
raux) ; primo créer les conditions d’une action col-
des rencontres régulières avec la popula- lective, secundo analyser le vécu mais aus-
tion ; si le ressenti, notamment le ressenti large-
une double enquête, épidémiologique et ment partagé d’un profond « mal être ».
triennal 1993-1995, l’AFLS reprend cette idée : quotidienne… L’État cherche à laisser aux ser-
« les collectivités territoriales sont des parte- vices locaux leur responsabilité, tout en ayant
naires privilégiés dans la lutte contre l’infection un rôle d’impulsion, et en prenant en charge les
par le VIH. Plus particulièrement, les commu- surcoûts liés au sida.
nes des moyennes et grandes agglomérations
ayant des quartiers défavorisés, les conseils
généraux et les conseils régionaux doivent ins-
crire, tant en moyens humains que financiers, la Ou encore…
lutte contre l’infection à VIH au cœur de leur
action ». Enfin, pour conclure sur ces cofinancements,
La participation des collectivités locales dans on relève que l’engagement financier des col-
la prise en charge des personnes infectées par le lectivités locales est parfois la conséquence des
VIH relève d’une logique assez différente. Très contraintes budgétaires de l’État. Ainsi, le dis-
vite il est apparu, que la prise en charge des positif spécialisé de lutte contre l’alcoolisme
patients devait être globale, c’est-à-dire au- (centres d’hygiène alimentaire et d’alcoologie
delà du suivi médical intégrer une dimension et centres départementaux de lutte contre l’al-
psychologique et sociale. Par ailleurs, l’épidé- coolisme) devrait être entièrement financé par
mie touche de plus en plus des populations l’État. Mais les dotations budgétaires de l’État
défavorisées qui, pour certaines, nécessitaient ne suffisant plus à leur fonctionnement, ces
déjà un soutien social. Or l’aide et l’action structures ont elles aussi cherché à diversifier
sociale relèvent largement de la compétence leur financement, en se faisant subventionner
des départements et dans une moindre mesure des actions précises. Les collectivités locales
des communes. C’est à partir de cette analyse ont là également été sollicitées. Le rapport du
que l’État se tourne vers ceux-ci pour être groupe TEN sur ce dispositif (voir dossier d’Ac-
partenaires des services mis en place pour la tualité et dossier en santé publique n° 4) estime
prise en charge extra-hospitalière des patients à 12 % la part du budget de ces structures
infectés par le VIH : hébergement, aide à la vie qu’elles financent.
Contrats État-région
Le volet santé de
Dans le cadre de la politique de planification et
politiques d’aménagement du territoire, l’État au moment
de la préparation des plans, négocie des enga-
globales ou gements réciproques avec les régions : les con-
trats État-région. Ces contrats ont plutôt voca-
tion à favoriser le développement économique.
transversales Ils n’ont qu’assez peu souvent comporté un
volet santé publique. Mais les quelques rares
cas méritent d’être relevés parce qu’ils repré-
sentent un engagement sur le moyen terme
a santé est de plus en plus perçue comme d’une région dans un programme santé. Ainsi
L un élément déterminant pour l’insertion et
le développement en général. Aussi est-elle de
dans le Xe plan deux contrats État-région com-
portaient un volet santé : le contrat avec la
plus en plus présente dans des politiques dont région Nord - Pas-de-Calais pour la promotion
elle n’est pas a priori l’objet premier. L’exem- de la santé et le contrat avec la région Provence -
ple le plus évident est la place qu’elle occupe Alpes - Côte-d’Azur pour le financement de
dans les politiques d’insertion des populations l’ORS.
défavorisées (bénéficiaires du RMI , jeunes en Deux ou trois contrats État-région du XIe
difficultés d’insertion). Cet aspect fera l’objet plan vont également inclure un engagement sur
d’un développement dans le dossier 7. Mais le financement de l’ORS.
elle acquiert également progressivement sa place Mais du côté de l’État, ce type de négocia-
dans la politique de développement social ur- tions a ses limites car la DGS ne dispose pas de
bain. On rappellera également sa (modeste) crédits spécifiques pour ces contrats. Les enga-
place dans le cadre des contrats État-région. gements qu’elle prend, viennent donc consom-
mer d’avance ses crédits d’intervention an-
nuels.