Vous êtes sur la page 1sur 23

Dossier

actualité et
dossier en
santé publique

5
décembre 1993

Protection sanitaire et
1 lutte contre les fléaux sociaux

éaliser un dossier dans l’esprit des dossiers l’intervention auprès de populations ciblées (enfants,
Sommaire R que nous vous proposons dans cette revue
c’est-à-dire un esprit de synthèse et de
clarification, sur le thème des collectivités locales et la
femmes enceintes, personnes handicapées,
personnes âgées, ou encore bénéficiaires du RMI ou
jeunes en difficultés d’insertion) fera l’objet d’un
II Rappels
juridiques santé publique est rapidement apparu comme une deuxième dossier (à paraître en juin 94) ;
gageure. D’abord le champ est immense, les limites lire attentivement les textes, le code de la santé
III Au regard des de la santé publique mal définies et l’intervention en publique en particulier bien entendu, et éclairer le
textes, des santé publique à facettes multiples. Ensuite, le droit lecteur quand cela est possible mais laisser parfois
compétences est infiniment complexe, voire inextricable : textes pendantes les questions qui peuvent subsister même
limitées anciens plus ou moins tombés en désuétude, après cette lecture attentive ;
compétences se chevauchant, flou juridique… Enfin, proposer une approche des interventions locales,
III Les communes
l’intervention des collectivités locales a une ampleur non pas par un recensement (infaisable), des chiffres
VII Les départements
et une variété largement reconnues, sans être (introuvables ou ininterprétables), ni même par une
véritablement connues et aucune statistique, typologie qu’il aurait été trop ambitieux de chercher à
XIII Au regard des
enquête,… ne permet pour le moment de l’évaluer ou faire dans le temps qui nous était imparti, mais
réalisations, un
d’en dessiner précisément les contours. simplement en tentant de clarifier les logiques qui
investissement
Pourtant, ce sujet est au cœur de nombreux débats amènent les collectivités locales à développer des
certain
actuellement, et il nous a semblé important d’y apporter politiques de santé publique, au-delà de leurs seules
XIV La volonté
une contribution, notamment en cherchant à clarifier obligations légales. Les quelques exemples cités, le
politique des
les fondements de cette intervention, c’est-à-dire le sont seulement à titre d’illustration.
collectivités
droit d’une part, les logiques politiques d’autre part. C’est ainsi que cette gageure a été relevée, avec
locales
Ainsi, pour tenter cette synthèse malgré les difficultés l’approbation du comité de rédaction. Mais les
XVIII Les politiques soulevées ci-dessus, trois idées ont été retenues : développements de ce dossier n’engagent que leur
d'impulsion de partager le sujet et en faire deux dossiers, en auteur. Ils ne sauraient être considérés, en particulier,
l'État traitant d’abord la santé publique au sens étroit et en comme l’analyse du Haut Comité de la santé publique.
XXII Le volet santé de renvoyant à un autre dossier l’intervention médico- Enfin ce dossier, comme les précédents, est constitué
politiques sociale auprès de populations spécifiques. Il s’agit d’une partie « état des lieux » (avec ses limites…) et
globales ou donc ici d’un premier volet qui s’attache à l’intervention d’une partie « tribune ». Nous avons cherché à donner
transversales dans le domaine de la surveillance, de l’hygiène du la parole pour cette deuxième partie aux différents
milieu, de la lutte contre les épidémies (ce que le code niveaux de l’administration, à des politiques et des
XXIV Tribune de la santé publique regroupe dans son livre 1er sous administratifs. Malheureusement, un représentant de
le titre « protection générale de la santé publique ») et l’État et un élu, après avoir donné leur accord dans un
XXX Annexes
à la lutte contre « les fléaux sociaux » (livre III du code premier temps, se sont désistés. À reprendre dans le
de la santé publique). Tout ce qui concerne prochain dossier…

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page I


Rappels
juridiques
Collectivités locales ou Compétences générales
collectivités territoriales Les collectivités locales disposent d’une com-
C’est la Constitution de 1958 qui a consacré pétence dite compétence générale. Celle-ci
l’existence des collectivités territoriales, appe- est ancienne pour les communes : article L
lées également collectivités locales (titre IX de 121-26 du code des communes « le conseil
la constitution et articles 24 § 3, 34 § 4). municipal règle par ses délibérations les affai-
La loi no 82-213 du 2 mars 1982 relative aux res de la commune ». Elle est beaucoup plus
droits et libertés des communes, des départe- récente pour les départements et les régions :
ments et des régions, loi socle du processus de article 23 et 59 de la loi du 2 mars 1982 « le
décentralisation, a profondément modifié l’or- conseil général règle par ses délibérations les
dre juridique entre l’État et les collectivités affaires du département […] le conseil régional
locales. règle par ses délibérations les affaires de la
région. »
Le champ de cette compétence générale est
défini par deux principes : la territorialité et
l’intérêt à agir . Trois critères peuvent détermi-
ner l’existence d’un intérêt à agir : absence
Caractéristiques principales d’une compétence exclusive d’une autre col-
Les collectivités locales se caractérisent princi- lectivité ou autorité ; absence d’interdiction lé-
palement par : gale d’intervenir, existence d’un lien assuré
leur personnalité juridique, ce sont des per- avec la commune (ou le département) ou l’un
sonnes morales ; de ses éléments constitutifs (d’après Y. Luchai-
leur création par la Constitution ou par la loi ; re dans les collectivités territoriales, Cahiers
l’existence d’affaires propres ; français, no 239,1989).
le principe de libre administration ;
une administration par un organe collégial
élu au sein duquel est élue la personne investie
du pouvoir exécutif ;
une représentation nationale par le Sénat.
Compétences d’attribution ou compétences
spécifiques
Traditionnellement, des compétences spécifi-
ques sont attribuées aux collectivités locales
par des textes législatifs ou réglementaires
Trois types de collectivités locales régissant sur le fond des domaines particuliers
La France connaît trois types de collectivités de l’intervention administrative.
locales : la région, le département, la commune La loi 82-213 du 2 mars 1982 a posé un principe
qui sont administrés respectivement par un nouveau : celui de la répartition des compéten-
conseil régional, un conseil général et un con- ces : « des lois détermineront la répartition des
seil municipal. Il convient de mentionner égale- compétences entre les communes, les dépar-
ment les collectivités territoriales à statut parti- tements, les régions et l’État ». Deux lois princi-
culier (Mayotte et St Pierre-et-Miquelon) et les pales, la loi no 83-8 du 7 janvier 1983 et la loi no
territoires d’outre-mer. 83-663 du 22 juillet 1983 ont déterminé les
Au 1er janvier 1989, il existait 36 757 commu- nouvelles compétences ; mais l’ensemble des
nes, 100 départements et 26 régions (pour les champs de l’intervention publique est très vas-
communes (voir la répartition par régions et te et difficile à répartir entièrement et précisé-
strates démographiques en annexes p. XXX). ment ainsi.

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page II


Au regard des textes
des compétences limitées

Si l’on s’attache à rechercher les compétences spécifiques des collectivités


locales en matière de santé publique, c’est-à-dire celles qui leur ont été dévolues
par les lois de décentralisation ou qui leur ont été attribuées par d’autres lois
régissant l’intervention en santé publique, on s’aperçoit que ces compétences
sont relativement peu importantes. La santé publique a été peu concernée par le
transfert des compétences aux collectivités locales de la décentralisation, beaucoup
moins que l’aide et l’action sociale par exemple.

l est difficile de retrouver la logique qui a services. Quant aux régions, elles n’ont pas de
I présidé aux choix qui ont été faits pour les
transferts de compétences dans le cadre de la
compétence spécifique en santé publique. Mais
il convient de relever que l'article 59 de la loi du
décentralisation. Les communes ont essentiel- 2 mars 1982 donne une compétence au conseil
lement conservé des compétences que les mai- régional « pour promouvoir le développement
res exerçaient déjà assez largement en matière économique, social, sanitaire, culturel et scien-
de salubrité publique et les départements se tifique de la région […]. »
sont vus attribuer la responsabilité de quelques

Les communes
essentiel des compétences des commu- plus particulièrement le rôle des communes en
L’ nes concerne l’hygiène du milieu. Cette
compétence n’est d’ailleurs pas nouvelle, les
matière d’hygiène du milieu et de salubrité
publique :
lois de décentralisation ayant peu modifié la l’article L 131-2 du code des communes
répartition des compétences dans ce domaine. qui définit le pouvoir de police générale du
Elle est par contre extrêmement intriquée avec maire,
celle de l’État (préfet et services déconcentrés). l’article L 2 du code de la santé publique
qui définit son pouvoir réglementaire en matiè-
re de règles générales d’hygiène,
l’article L 772 qui définit le rôle des
Hygiène du milieu services communaux d’hygiène et de santé.
De nombreux autres articles du code la santé
publique mentionnent explicitement le rôle du
Trois articles, du code de la santé publique maire ou de ses services dans le processus
(CSP) ou du code des communes, définissent d’application ou de contrôle de « protection

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page III


Au regard des
textes, des
compétences
limitées

générale de la santé publique » (livre I du code positions des articles L 1, L 2, L 48, L49 et L
de la santé publique), rôle qui concerne aussi 772 du code de la santé publique, prise après
bien les questions d’eau potable, de salubrité l’avis rendu par le Conseil d’État le 8 novembre
des immeubles ou des agglomérations, de dé- 1988, est essentielle pour comprendre la répar-
sinfection, etc. (cf. liste des articles en annexe). tition des rôles de l’État et de la commune en ce
Par ailleurs, la circulaire du 14 juin 1989 rela- domaine (JO du 26 juillet, voir annexes).
tive aux règles d’hygiène, application des dis-
Le pouvoir de police

L’article L 131-2 du code des communes, en


Santé publique et définissant le pouvoir de police générale du
R pouvoirs de police maire, lui donne une responsabilité générale
quant à « assurer le bon ordre, la sûreté, la
sécurité et la salubrité publique ». Cet article
La police municipale générale
mentionne ensuite dans ses « notamment » :
Elle se rattache à une police d’ordre public local. On
« 2° le soin de réprimer les atteintes à la tran-
distingue trois éléments « certains » composant d’une
quillité publique, telles que […] les bruits y
police d’ordre public local : la tranquillité, la sécurité et la
compris les bruits de voisinage, […] et tous
salubrité publique. D’autres éléments sont plus « dou-
actes de nature à compromettre la tranquillité
teux » (c'est-à-dire qui ne sont pas unanimement recon-
publique, […] 6° le soin de prévenir, par des
nus par les auteurs ou la jurisprudence) : l’esthéthique, la
précautions convenables, et de faire cesser, par
moralité ou la bonne gestion du domaine.
la distribution de secours nécessaires, les acci-
Ainsi on distingue trois types de police d'ordre public
dents et les fléaux calamiteux ainsi que les
local :
pollutions de toute nature, tels que […] les
La police de la salubrité publique maladies épidémiques ou contagieuses, les épi-
Elle peut être définie comme « la réglementation édictée zooties, de pourvoir d’urgence à toutes les
en vue de protéger la santé des citoyens ; les mesures mesures d’assistance et de secours […]. »
prises à l’avance afin de lutter contre les sources et les
L’application de cet article sur les problèmes
foyers d’insalubrité, les supprimer ou les réduire. » S’y de bruit est un peu complexe puisque dans les
rattachent, entre autres, la police de la vente des den- communes où la police est étatisée, elle revient
rées alimentaires, celle des abattoirs et celle des eaux
à l’État sauf en ce qui concerne les bruits de
stagnantes. voisinage qui dans tous les cas restent au maire
La police de sécurité publique (art. L 132-8 du code des communes modifié
Dans celle-ci, certaines interventions se rattachent à des par la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990)
préoccupations sanitaires : ainsi l’intervention de la com- Le maire assure en fait un large pouvoir de
mune en matière de secours médicaux d’urgence ou police locale dont plusieurs formes ont à voir
l’intervention à l’égard des malades mentaux dangereux. avec la santé publique (cf. encadré) sans comp-
La police de tranquillité publique ter son rôle pour les baignades et les activités
La lutte contre le bruit s’y rattacherait. nautiques (art. 131-2-1 du code des commu-
nes), la circulation (art. 131-2-2) ou les inhu-
Les polices sanitaires spéciales mations (art. 131-6).
D’autres interventions du maire se rattachent à des Le préfet peut cependant se substituer au
polices sanitaires spéciales : c’est le cas plus particuliè- maire dans l’hypothèse où celui-ci serait dé-
rement de son pouvoir réglementaire (article L 2 du CSP). faillant dans l’exercice de ses fonctions (art. L
Dans d’autres polices, il n’exerce qu’un rôle secondaire 131-13 du code des communes).
(police des établissements dangereux incommodes et
insalubres, police des cours d’eau non navigables ni
flottables, police des débits de boissons, police du Le pouvoir réglementaire
camping et caravaning).
Le deuxième niveau important d’intervention
(d’après Jacques Moreau « police municipale », dans les « collectivités locales », juris- du maire quant aux questions d’hygiène publi-
prudence générale, Dalloz, volume III, sauf en ce qui concerne la lutte contre le bruit) que, se situe au niveau de la réglementation. En
effet si le code de la santé publique, revu par la

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page IV


loi n° 86-17 du 6 janvier 1986, prévoit un
règlement sanitaire national élaboré par décrets
Champs couverts par les articles L 1 et L 2 du
pris en conseil d’État (art. L 1 du CSP), l’article
L 2 du CSP prévoit que le représentant de l’État csp code de la santé publique
(le préfet) ou le maire peuvent compléter ces
textes « en vue d’assurer la protection de la La prévention des maladies transmissibles
santé publique dans le département ou la com-
mune ». Le rôle de l’État et celui de la commu- La salubrité des habitations, des agglomérations et de
ne sont donc étroitement imbriqués, mais la tous les milieux de vie de l’homme
circulaire du 14 juin 1989 précitée nous précise
que les décisions réglementaires doivent res- L’alimentation en eau destinée à la consommation hu-
pecter une hiérarchie : « Il en est de même pour maine
les maires qui, dans les arrêtés municipaux pris
L’exercice d’activités non soumises à la législation sur
en application de l’article L 2, ne peuvent que
les installations classées pour la protection de l’environ-
renforcer, comme les préfets, les dispositions
nement
des décrets de l’article L 1 et ne doivent pas
contredire les arrêtés préfectoraux. Il en résulte L’évacuation, le traitement, l’élimination et l’utilisation
que le préfet peut seulement prendre des déci- des eaux usées et des déchets
sions plus rigoureuses que les décrets prévus
par l’article L1 et que le maire ne peut que La lutte contre les bruits de voisinage et la pollution
renforcer les dispositions des décrets et de atmosphérique d’origine domestique
l’arrêté préfectoral. »
La préparation, la distribution, le transport et la conser-
vation des denrées alimentaires
L’application des règles

Pour faire appliquer ces règles, le maire peut


disposer, en application de l’article L 772 du relatifs. » J. Moreau dans le recueil de jurispru-
CSP, d’un service communal d’hygiène et de dence Dalloz (cf. bibliographie) prend pour
santé. Ces services, dont l’appellation a rem- exemple l’enlèvement des ordures ménagères :
placé en 1986 celle de bureau municipal d’hy- « la première certitude qui se dégage du droit
giène, « sont chargés sous l’autorité du maire, positif est qu’aujourd’hui comme hier, l’enlè-
de l’application des dispositions relatives à la vement des ordures ménagères concerne direc-
protection de la santé publique énumérées no- tement la salubrité publique et que de ce fait
tamment au titre 1er du livre 1er du présent code l’inaction prolongée du maire constitue à la fois
et relevant des autorités municipales. » Mais la une illégalité et une faute de nature à engager la
création de ces services par la commune n’est responsabilité de la commune. »
pas obligatoire (auparavant, elle l’était pour les
communes de plus de 20 000 habitants). Il en
existe cependant un peu plus de deux cents. Contrôle administratif et technique
Dans les cas où la commune n’a pas créé ce
service, l’application de ces « dispositions rela- Enfin la commune et ses services sont chargés
tives à la protection de la santé publique » dans des conditions variées selon leur histoire
revient aux services techniques de la commune. d’un pouvoir de contrôle administratif et tech-
Ce rôle des communes dans l’application nique de l’application des règles d’hygiène. Sur
des règles d’hygiène publique tient aux dispo- la définition et les conditions d’exercice de ce
sitions de l’article L 772 du CSP mais égale- contrôle administratif et technique, il convient
ment au pouvoir de police du maire dont il de se reporter à la circulaire du 14 juin 1989
constitue un aspect important (cf. art. 131-2 déjà citée (cf. annexe). On peut retenir quant au
précité, et art. L 131-1 « le maire est chargé, rôle respectif de l’État et de la commune que
sous le contrôle administratif du représentant l’article L 49 du code de la santé publique
de l’État dans le département, de la police donne une responsabilité générale à l’État en la
municipale, de la police rurale et de l’exécution matière : « sous réserve des compétences re-
des actes de l’autorité supérieure qui y sont connues aux autorités municipales, le contrôle

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page V


Au regard des
textes, des
compétences
limitées

administratif et technique des règles d’hygiène services communaux d’hygiène et de santé


relève de la compétence de l’État qui en déter- exerçaient effectivement des attributions en
mine les modalités et en assure l’organisation et matière de contrôle administratif et technique
le financement. » Mais il existe deux excep- des règles d’hygiène et qui continuent de les
tions à cette compétence de l’État. Une qui exercer par dérogation à l’article 49 (art. L 772
s’applique à l’ensemble des communes : les troisième alinéa). Dans ce cas, la commune agit
communes sont chargées du contrôle des règles en quelque sorte comme un prestataire de ser-
fixées par les arrêtés municipaux pris en appli- vice pour l’État (elle reçoit une dotation budgé-
cation de l’article L 2 du CSP. Une seconde taire de décentralisation à cet effet) mais cette
exception s’applique dans un nombre limité de situation n’est pas sans poser le problème de la
communes, celles où au 1er janvier 1984 les séparation des rôles : application et contrôle,

le
point Les services communaux d’hygiène et de santé
sur

Les services communaux d’hygiène et 1 2


de santé (SCHS) sont prévus et leurs La commune n’a pas de ser- La commune a créé un SCHS
attributions définies par l’article L 772 vice communal d’hygiène et depuis 1984. Ce SCHS « ap-
du code de la santé publique (modifié de santé et elle n’a pas d’obli- plique les règles d’hygiène »,
en 1983, 1985 et 1986). En 1993, il gation d’en créer. sous l’autorité du maire et
existait environ 200 services commu- contrôle l’application des ar-
naux d’hygiène et de santé. Une rêtés municipaux en la ma-
association regroupe leurs médecins tière. L’initiative de créer ces
directeurs. services appartient au maire
Compte tenu du texte actuel et de 3 qui en assure l’organisation
l’interprétation consensuelle qui en est La commune avait un bureau et le financement.
faite, on peut distinguer 5 cas de municipal d’hygiène avant
figure présentés ci-contre. Dans les 1984 mais qui n’exerçait pas
faits, les situations se regroupent en des fonctions de contrôle
trois cas de figure, les cas de figure 2 particulières. La situation est 4
et 3 ne se retrouvant pas (ou pratique- la même que dans le cas de La commune avait un bureau
ment pas). figure 2. municipal d’hygiène avant
Des décrets étaient prévus pour 1984 qui exerçait effective-
l’application de l’article L 772 du CSP, ment un contrôle technique
pour déterminer les conditions et administratif des règles
requises pour exercer les fonctions de d’hygiène. Elle continue
directeur de ces services, et pour les 5 d’exercer ce contrôle et re-
autres conditions d’application (article Ce bureau municipal assu- çoit la dotation générale de
L 775 du CSP et circulaire du 18 fé- rait des fonctions de désin- décentralisation correspon-
vrier 1986 relative à la loi no 86-17 du fection (compétence dévo- dante. Elle est alors presta-
6 janvier 1986 adaptant la législation lue au département pour les taire de service pour le comp-
sanitaire et sociale aux transferts de communes de moins de te de l’État. La liste des
compétence en matière d’aide sociale 20 000 ha) et/ou des fonc- communes concernées a été
et de santé, JO du 9 mars), mais ils tions de vaccination. Le ser- limitativement fixée par l’ar-
n’ont pas encore été pris. Par contre vice communal d’hygiène et rêté du 9 septembre 1985
un arrêté du 14 mai 1962 fixant les de santé peut continuer à le (voir également l’annexe de
attributions des directeurs des faire, agissant alors comme la circulaire du ministère des
bureaux municipaux d’hygiène (JO du prestataire de service pour le Affaires sociales du 14 juin
31 mai) est toujours en vigueur. compte du département. 1989).

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page VI


soit « juge et partie ». Le Conseil d’État dans Surveillance
son avis du 8 novembre 1988 a précisé que « le
troisième alinéa de l’article L 772 n’exclut pas On peut citer également une fonction en matiè-
la possibilité, pour le représentant de l’État de re d’observation et de surveillance qu’exercent
faire usage des pouvoirs définis par l’article 49 certains services communaux d’hygiène et de
lorsqu’un service communal d’hygiène et de santé : le recueil et l’analyse des déclarations de
santé fait preuve de carence dans l’exercice des décès en application de l’article 1er de l’arrêté
attributions qu’en vertu dudit alinéa il a conser- du 14 mai 1962 fixant les attributions des direc-
vées. » teurs des bureaux municipaux d’hygiène.

Services de santé

Autres compétences En matière de gestion, notons pour mémoire


que les maires sont présidents des conseils
d’administration des hôpitaux communaux (qui
Protection générale représente la très grande majorité des hôpitaux
de la santé publique généraux) et que certains gèrent et financent
des centres de santé (parfois appelés dispensai-
En matière de protection générale de la santé res). Enfin les communes peuvent par applica-
publique, les communes de 20 000 habitants et tion de l’article 33 de la loi du 22 juillet 1983
plus sont également, en principe, responsables gérer des services de PMI ou d’autres services
de prendre des mesures de désinfection dans les de compétence départementale. Le départe-
cas de maladies contagieuses (art. L 11 et L ment délègue alors une partie de ses compéten-
14) : « les mesures de désinfection sont mises à ces à la commune dans des conditions qui
exécution, dans les villes de 20 000 habitants et doivent être définies par convention.
au-dessus, par les soins de l’autorité municipa-
le suivant des arrêtés du maire approuvés par le
préfet. »
Enfin, des textes anciens leur confèrent un
rôle dans la politique de vaccination : le décret
n° 52-247 du 28 février 1952 qui prévoit qu’il
« est tenu dans chaque commune un fichier
spécial dit fichier de vaccination », l'arrêté du
19 mars 1965 qui mentionne également des
listes dressées par le maire quant à la vaccina- Les départements
tion anti-poliomyélitique et l’arrêté du 14 mai
1962 sur les attributions des directeurs des
bureaux municipaux d’hygiène qui leur donne
« l’organisation des vaccinations préventives ». es départements se sont vus confier par les
L lois de décentralisation, à côté de larges
compétences dans le domaine social, quelques
Lutte contre les fléaux sociaux compétences en matière de santé publique. La
plus importante concerne leur responsabilité
Les communes n’ont pratiquement aucune com- sur les services de PMI qui sera traitée dans le
pétence qui leur soit expressément dévolues prochain dossier. Mais la loi du 22 juillet 1983
par la loi en matière de lutte contre les fléaux dans ses articles 37 à 40 leur a donné quelques
sociaux, à l’exception du rôle du maire dans la autres compétences, notamment en matière de
procédure d’hospitalisation d’office des mala- lutte contre les fléaux sociaux. Sont concernées
des mentaux (art. L 131-2 du code des commu- la lutte contre la tuberculose, la lutte contre les
nes et art. L 343 du CSP) et dans celle d’auto- maladies sexuellement transmissibles et la lutte
risation des débits de boissons (art. L 31 du contre le cancer. Ils se sont également vus
code des débits de boissons et mesures de lutte attribuer une compétence en matière de vacci-
contre l’alcoolisme). nation.

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page VII


Au regard des
textes, des
compétences
limitées

Lutte contre les fléaux sociaux Les dispositions concernant le traitement


(chapitre II) et l’organisation administrative
(chapitre III) n’ont pas fait l’objet d’un transfert
Lutte contre la tuberculose de compétence (ce qui n’est pas sans poser
question quant au dernier point puisque les
En matière de lutte contre la tuberculose, la loi services de lutte contre la tuberculose quand ils
du 22 juillet 1983 a transféré au département la existaient encore ont été transférés aux départe-
responsabilité et le financement de l’applica- ments).
tion du chapitre 1er titre 1er du livre III du CSP Pourtant, au sein du chapitre III, l’article L
(article 37-4°), c’est-à-dire le chapitre concer- 247 a été modifié par l’article 40 de la loi pré-
nant la prophylaxie qui comprend une section I citée et dispose que les dispensaires antituber-
« vaccination par le BCG et dispositions péna- culeux et les services de vaccination de la
les », une section II « les dispensaires antitu- population civile par le vaccin anti-tuberculeux
berculeux », une section III « les placements BCG sont des services du département.
familiaux surveillés ». Le département a donc une responsabilité

le L’intervention des départements dans


point
sur les établissements pénitentiaires

L’article D 285 du code de procédure pénale pré- La prophylaxie de la tuberculose dans les établisse-
voit une visite médicale systématique pour les arri- ments pénitentiaires n’est pas, par contre, expres-
vants dans les établissements pénitentiaires : « dans sément prévue dans le code de la santé publique.
les délais les plus brefs, le détenu est soumis à un Mais l’article D 394 du code de procédure pénale la
examen médical destiné à déceler toute affection prévoit et précise que ce dépistage doit être assuré
de nature contagieuse ou évolutive qui nécessite- par les services départementaux d’hygiène sociale.
rait des mesures d’isolement ou des soins urgents. » Il revient donc aux départements, dans le cadre de
Or le département est responsable de la prophy- l’application du chapitre 1er « prophylaxie » du titre
laxie de deux affections contagieuses ou évoluti- sur la lutte contre la tuberculose du CSP, d’assurer
ves : les maladies vénériennes et la tuberculose. ce dépistage. De fait, ce dépistage systématique
La prophylaxie des maladies vénériennes dans les des entrants en prison constitue une bonne partie
établissements pénitentiaires est expressément vi- de l’activité des dispensaires antituberculeux.
sée par le code de la santé publique, article L 273 : Il convient de mentionner également le dépistage
« l’examen et le traitement prévus par les disposi- du sida : après plusieurs années d’initiatives va-
tions en vigueur relatives à la prophylaxie des riées, les départements acceptant parfois de pren-
maladies vénériennes sont obligatoires pour tous dre en charge le dépistage du VIH quand il était
les détenus. Les prévenus ne sont soumis à cette proposé aux détenus, la circulaire du 29 janvier
obligation que si l’autorité sanitaire et l’administra- 1993 relative au dépistage anonyme et gratuit ou au
tion pénitentiaire les considèrent, en raison de pré- dépistage gratuit du sida a préconisé le couplage
somptions graves, précises et concordantes, com- de chaque établissement pénitentiaire avec une
me atteints de maladie vénérienne. » consultation de dépistage anonyme et gratuit. C’est
L’article D 393 du code de procédure pénale re- donc dans ce cadre que certains dispensaires
prend ces dispositions et précise « à cet effet les antivénériens interviennent pour le dépistage du
médecins, infirmières et assistantes sociales des sida dans les établissements pénitentiaires, mais le
services spécialisés ont accès aux établissements coût en est supporté par l’État et par la Sécurité
pénitentiaires. » Malgré les restrictions concernant sociale.
les prévenus, la majorité des entrants en prison est
soumise à ces dispositions qui se concrétisent
essentiellement par un dépistage de la syphilis.

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page VIII


générale quant au respect de l’obligation vacci-
nale contre la tuberculose telle qu’elle est défi- le
nie par les articles L 215 et suivants du CSP. point
Maladies sexuellement transmissibles et
Il a l’obligation de proposer une vaccination sur planification familiale
gratuite dans des centres qui sont des services
du département (art. L 217 et L 247 du CSP). Il L’activité des centres de planification familiale relèvent de la
gère les dispensaires anti-tuberculeux « desti- compétence des départements (article L 149-3o du CSP). Or
nés à assurer dans le cadre du département la la loi no 90-86 du 23 janvier 1990 (article 50) a prévu que les
prophylaxie individuelle, familiale et collecti- centres de planification ou d’éducation familiale peuvent
ve de la tuberculose » (art. L 219 du CSP). assurer le dépistage « de MST ». La liste de ces MST a été
Ces compétences sont à évaluer au regard de précisée par le décret no 92-784 du 6 août 1992 : chlamidyo-
l’organisation actuelle de la lutte contre la tu- se, gonococcie et vaginite aiguës (et infection par le VIH
berculose : vaccination pratiquement générali- pour le seul dépistage). Mais la loi n’a pas établi jusqu’au
sée avant l’âge de 6 ans et largement pratiquée bout la responsabilité des départements puisque les cen-
en médecine libérale, le cas échéant en service tres doivent pour exercer cette activité en faire la déclaration
de PMI, rôle accru de la médecine de ville auprès du préfet et sont soumis à un contrôle de la DDASS
compte tenu des traitements actuellement em- (art. 9 du décret précité). Par ailleurs, la loi a prévu une
ployés (cf. « le praticien et la tuberculose », possibilité d’anonymat et de gratuité pour les mineures et les
brochure du ministère des Affaires sociales de femmes sans couverture sociale qui en feraient la demande.
1987), abandon progressif de l’obligation d’un Les dépenses de ce dépistage ou traitement sont à la
dépistage par examen radiographique ou radio- charge de la patiente qui pourra se faire rembourser par
photographique qui était prévue dans des textes l’assurance maladie, ou à la charge de l’assurance maladie
définissant des examens de santé systémati- (70 %) et de l’État (30 %) dans le cas où la gratuité a été
ques ou obligatoires, sachant que ces examens sollicitée. Ce dispositif sous contrôle de l’État apparaît
radiographiques systématiques ont constitué et complexe d’autant qu’il se situe dans des établissements
constituent pourtant encore le gros de l’activité financés par les départements et concerne la lutte contre les
des dispensaires antituberculeux. MST à l’égard de laquelle beaucoup de départements se
Cependant compte tenu des nouvelles don- sentent, par une interprétation large des textes, investis
nées épidémologiques concernant la tuberculo- d’une responsabilité.
se, qui montrent une relative recrudescence de
cette maladie ainsi que des régions et des popu- Loi no 90-86 du 23 janvier 1990, JO du 25 janvier 1990. Décret no 92-784 du
lations plus touchées, le gouvernement a pré- 6 août 1992, JO du 23 août 1992. Circulaire du 26 mars 1993, BO affaires
senté un projet de loi pour renforcer la lutte sociales no 93/17 du 25 juin 1993.
contre la tuberculose. Cette loi (ou plus exacte-
ment cette partie d’une loi plus générale « santé
publique et protection sociale ») permettra une
toilette de ces textes largement obsolètes mais crelle et maladie de Nicolas-Favre), que les
ne confiera pas de nouvelles responsabilités deux autres sont en nette diminution et que, par
aux départements. Elle est actuellement en dé- contre, la surveillance épidémiologique nous
bat au Parlement. alerte depuis plusieurs années sur l’apparition
et la fréquence de nouveaux germes (candida,
trichomonas, chlamydia, herpès, mycoplasme,
Maladies sexuellement transmissibles papillomavirus,…), on mesure le caractère to-
talement inadapté de notre législation à l’épidé-
Au regard du code de la santé publique actuel, miologie et aux formes d’intervention actuel-
il n’existe pas de maladies sexuellement trans- les.
missibles mais des maladies vénériennes dont C’est pourtant à partir de cette législation
quatre seulement font l’objet d’une législation qu’a été et est encore définie la compétence des
au sein du titre II du livre III : la syphilis, la départements.
gonoccie, la chancrelle et la maladie de Nico- La loi du 22 juillet 1983 (art. 37-4°) a trans-
las-Favre. Cette définition remonte à 1942 et à féré aux départements la responsabilité de l’ap-
la situation épidémiologique de l’époque, mais plication du chapitre 1er du titre II sus-visé (soit
quand on sait que deux de ces maladies ont les articles L 255 à L 292) qui concerne la
pratiquement disparu à l’heure actuelle (chan- prophylaxie des maladies vénériennes. Par

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page IX


Au regard des
textes, des
compétences
limitées

ailleurs elle a modifié l’article L 304 du CSP qui affaires sanitaires du conseil général (art. L 257
stipule dorénavant « les établissements antivé- à L 260 du CSP). La transmission de ces décla-
nériens sont des établissements du départe- rations à l’État n’est pas prévue. Il ne s’agit
ment ». Ceci appelle différentes remarques. donc pas du même système de déclaration obli-
Comme pour la lutte contre la tuberculose, le gatoire que celui prévu par l’article L 11 du
transfert des compétences n’a pas concerné CSP. Ces déclarations ne semblent plus être
l’organisation médico-administrative (le cha- que rarement effectuées.
pitre II), mis à part le changement de statut des Ce système de déclaration se rattachait à une
dispensaires antivénériens. Mais qu’en est-il législation très coercitive en matière d’obliga-
des services de lutte antivénérienne (section III tion de soins : le chapitre 1er prévoit une obli-
du chapitre II, article 307 et suivants) ? Dans les gation de se soigner pour tout individu atteint
faits, le personnel de ces services est passé aux d’une maladie vénérienne ou pour tout individu
départements. présumé contaminateur (art. L 255 et L 261),
Les dispositions du chapitre 1er « prophy- l’hospitalisation d’urgence décidée par l’auto-
laxie » porte essentiellement sur la déclaration, rité sanitaire ou l’hospitalisation d’office (art. L
nominale ou simple, et l’obligation de se soi- 274, L 275 et L 278) ou encore l’interdiction
gner. d’exercer sa profession si cela comporte un
Les quatre maladies vénériennes sont sou- risque de contamination (art. L 277)… Il fau-
mises à une obligation de déclaration qui peut- drait encore citer l’intervention de la force
être « simple » (diagnostic sans nom du patient, publique (art. L 261) et les dispositions pénales
ou « nominative » si le patient refuse de se (art. L 285 à L 292). Ces mesures sont très
soigner). Ces déclarations doivent être envoyées largement tombées en désuétude. On pourrait
à « l’autorité sanitaire départementale », aller jusqu’à dire qu’elles sont inapplicables et
c’est-à-dire dorénavant au médecin chargé des inappliquées.

le Structures départementales et
point
sur dépistage du sida

Trois types de structures gérées par les départements Les centres de planification familiale
sont concernés par le dispositif de dépistage Les centres de planification familiale habili-
anonyme et gratuit ou seulement gratuit mis en place tés, après déclaration auprès du préfet,
progressivement par l’État depuis 1988. peuvent également proposer le dépistage
du VIH à l’occasion des consultations con-
Les dispensaires Les consultations de PMI traceptives. Une procédure de gratuité est
antivénériens Elles peuvent, dans les mêmes prévue dans le cas où une mineure ou une
Ils peuvent être désignés conditions, être désignées par le femme sans couverture sociale en fait la
par le préfet pour être con- préfet pour être consultations de demande, les frais sont alors pris en charge
sultation de dépistage ano- dépistage gratuit (décret no 92- par l’assurance maladie (70 %) et l’État
nyme et gratuit au sens du 691 du 17 juillet 1992). (30 %). (décret no 92-784 du 6 août 1992).
dispositif mis en place en
1988 (décret no 88-61 du
18 janvier 1988 modifié par Dans les trois cas, la prestation offerte doit être la même :
le décret n o 92-691 du consultation médicale d’information conseil personnalisé avant et après
17 juillet 1992). Ils peuvent l’examen biologique lui-même ;
aussi être désignés par le le coût des consultations médicales et des examens biologiques est pris en
préfet pour être consulta- charge par l’assurance maladie (85 %) et par l’État (15 %) ;
tion de dépistage gratuit les départements se font rembourser sur présentation d’état de frais.
(décret n o 92-691 du
17 juillet 1992). (circulaire DGS, division sida, no 09 du 29 janvier 1993, BO affaires sociales no93-14 du 8 juin 1993)

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page X


Un article fait pourtant encore l’objet d’une suivants : « le département est responsable des
application concrète : l’article L 273 qui pré- services et actions suivants et en assure le
voit l’examen et le traitement des maladies financement : […] 6° le dépistage précoce des
vénériennes dans les établissements pénitenti- affections cancéreuses et la surveillance après
aires (cf. encadré). traitement des anciens malades prévus à l’arti-
Les dispensaires antivénériens sont donc cle 68 de la loi n° 63-1241 du 19 décembre 1963
depuis 1983 des établissements départemen- portant loi de finances pour 1964. »
taux. Leur fonction est définie par l’article Cette compétence s’analyse donc au regard
L 295 du CSP, « les dispensaires antivénériens du dispositif mis en place par cette loi de 1963.
sont destinés à assurer dans le cadre du dépar- Son article 68 prévoyait « la lutte contre le
tement la prophylaxie et le traitement ambula- cancer est organisée dans chaque département
toire des maladies vénériennes. Ces dispensaires dans le cadre du service départemental d’hy-
sont ouverts gratuitement à tous les consultants giène sociale, pour exercer le dépistage précoce
ou spécialisés à certaines catégories de consul- des affections cancéreuses et la surveillance
tants. » Plusieurs dispositions des articles sui- après traitement des anciens malades. » Le dé-
vant sont obsolètes (catégories de dispensaire, cret n° 65-13 du 6 janvier 1965 pris pour son
rôle du préfet dans l’autorisation, participation application précisait les interventions à mettre
financière de l’État,…). L’article L 303 prévoit en place (« le dépistage des affections précan-
une participation financière des caisses de sé- céreuses et des lésions cancéreuses en liaison
curité sociale qui est devenue exceptionnelle. avec les organismes chargés d’effectuer des
Aujourd’hui, l’activité des dispensaires se examens de santé ou de prévention polyvalents
partage entre les examens systématiques (dé- ou spécialisés, la surveillance médicale des
pistage de la syphilis), les consultations médi- personnes qui ont été précédemment traitées
cales avec ou sans dépistage et/ou traitement et pour une affection cancéreuse, l’orientation
pafois la recherche de sujets contacts. Cette des malades… ») dans « des centres de consul-
activité est très inégale et directement liée à la tation », chaque département étant tenu d’avoir
prise en charge ou non, au delà des quatre au moins un centre de consultation. Cette légis-
maladies vénériennes, d’autres maladies sexuel- lation est à l’origine de la création des « consul-
lement transmissibles. tations avancées » qui ont, à l’époque, dévelop-
Une modification a cependant été apportée pé une fonction complémentaire aux centres de
récemment à la législation quant aux MST : lutte contre le cancer en offrant gratuitement
l’article 50 de la loi du 23 janvier 1990 portant des consultations plus particulièrement axées
diverses mesures d’ordre social a prévu que les sur le dépistage et sur le suivi médico-social. En
centres de planification familiale peuvent assu- 1989, les statistiques du SESI dénombraient
rer le dépistage et le traitement de MST. Ces 280 lieux de consultations mais ce chiffre cache
établissements relèvent de la compétence du dorénavant des plages horaires étroites (une
département mais ce dispositif a été placé sous demie ou une journée par mois) et une activité
contrôle de l’État (cf. encadré). réduite.
Enfin, en lien avec la lutte contre les MST, Cette compétence s’analyse également au
rappelons que les départements n’ont pas de regard de l’organisation actuelle de la lutte
compétence propre, au sens des lois de 1983, en contre le cancer :
matière de lutte contre le sida, mais ils sont rôle des centres de lutte contre le cancer
partie prenante dans le dispositif de dépistage : qui constitue la base du dispositif de lutte contre
dépistage anonyme et gratuit ou seulement gra- le cancer tel que prévu par le code de la santé
tuit, dans des structures qu’ils gèrent : dispen- publique au livre III — lutte contre les fléaux
saires antivénériens, centres de planification sociaux — (art. L 312 à L 325) et qui couvre
familiale ou encore centre de PMI (cf. encadré). aussi bien le dépistage, les traitements, la sur-
veillance prolongée des essais thérapeutiques,
la recherche (art. L 312) ;
Lutte contre le cancer place de l’ensemble du dispositif hospita-
lier mais aussi de la médecine libérale (la majo-
C’est encore l’article 37 de la loi du 22 juillet rité des dépistages du cancer du col de l’utérus
1983 qui a donné un rôle aux départements ou du cancer du sein sont prescrits et effectués
dans la lutte contre le cancer, dans les termes « en ville ») ;

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XI


Au regard des
textes, des
compétences
limitées

rôle nouveau dévolu à la CNAM dans les mars 1965 relatif à l'organisation des centres
actions de dépistage des cancers du sein, du col agréés de vaccination puisque l'article L 50
de l’utérus et colo-rectaux, dans le cadre des nouveau stipule que le conseil général en assure
programmes annuels du Fonds national de pré- l'organisation. De même, on s'interroge sur
vention, d’information et d’éducation sanitaire l'identité et la fonction du chef départemental
fixés par arrêté depuis 1989. des vaccinations mentionné dans cet arrêté et
On s’interroge alors sur la compétence ef- dans le décret du 28 février 1952 (cf. article 1er
fectivement dévolue aux départements par la de ce décret).
loi de juillet 1983 : compétence générale en
matière de dépistage et de suivi des anciens
malades ou gestion des consultations avancées Désinfection
dont l’activité s’est progressivement étiolée ?
Par ailleurs, aux termes de l’article L 14 du
CSP, les départements devraient organiser un
Lutte contre la lèpre service de désinfection (désinfection obligatoi-
re dans le cas de certains maladies contagieu-
Enfin citons pour mémoire la lutte contre la ses) pour les communes de moins de 20 000
lèpre dans quelques territoires ou départements habitants. Ces dispositions semblent rarement
d’outre-mer (article 37-6° de la loi du 22 juillet appliquées. On voit mal également l’applica-
1983). tion du dernier alinéa de cet article L 14 : « À
défaut par les villes et les départements d’orga-
niser les services de la désinfection et d’en
assurer le fonctionnement, il y est pourvu par
des décrets en forme de règlement d’adminis-
Autres compétences tration publique ».

Outre ces compétences en matière de « lutte Statistiques


contre les fléaux sociaux », les départements
ont quelques compétences de l’ordre de « me- Pour clore avec les compétences des départe-
sures sanitaires générales ». ments, il convient de noter qu’en application du
décret n° 85-894 du 14 août 1985, les départe-
ments sont tenus de transmettre à l’État les
Vaccination statistiques d’activités des services et structu-
res qui leur ont été transférés en 1983. Ces
Ainsi pour les vaccinations, depuis 1983, « les statistiques établies sur des formulaires dont le
services départementaux de vaccination relè- modèle est fixé par arrêté, sont traités par le
vent de la compétence du conseil général qui en service d’études et statistiques du ministère
assure l’organisation » (article 50 du CSP). chargé des affaires sociales (SESI). Leur ex-
Le problème est que les missions de ces ploitation est relativement difficile ; mais elles
services de vaccination ne sont pas définies. On peuvent constituer des indicateurs parmi
peut penser qu’elles se rattachent aux vaccina- d’autres dans la surveillance, notamment des
tions obligatoires prévues par les articles L 5 à MST et de la tuberculose.
L 10-2 du CSP, d’autant que ces dispositions
figurent dans le même titre (titre II du livre 1er
du CSP). Ces centres de vaccination devraient
donc proposer gratuitement les vaccinations
obligatoires (diphtérie, tétanos et poliomyéli-
te). La vaccination BCG relève d’autres articles
(art. L 215 et art. L 247 qui parle de « services
de vaccination de la population civile par le
vaccin BCG ») mais dans les faits ces services
sont le plus souvent les mêmes.
On s'interroge sur la portée de l'arrêté du 19

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XII


Au regard des réalisations
un investissement certain

Dix ans après la mise en place de la décentralisation, malgré les difficultés


rencontrées pour mesurer l’investissement effectif des collectivités locales dans
la santé publique, on peut cependant avancer une double hypothèse : une grande
diversité et même disparité dans les politiques des collectivités locales ; des
initiatives souvent bien au delà des seules obligations légales.

lusieurs explications peuvent être avan-

La décentralisation en retard
P cées : d’abord juridiquement on a vu les
larges zones de flou dans la répartition des
compétences qui laissent la place à des inter-
« La société locale est certes débloquée — pour reprendre la prétations diverses. Conjugué au principe de la
formule de Michel Crozier — mais au prix d’un sentiment d’anomie compétence générale des collectivités locales
et d’une impression de confusion. Les règles du jeu local se sont sur les affaires qui intéressent leur territoire (cf.
trouvées obscurcies jusqu’à devenir imprévisibles ». Certains ont encadré en page II), ce flou permet toutes, ou
pu les qualifier de « jungle institutionnelle » où les trois niveaux de pratiquement toutes, les initiatives locales ou
structures se soucient peu de déborder de leurs compétences au contraire une certaine inertie. Les services
déterminées par la loi pour empiéter sur celles des autres ; même de l’État de leur côté n’ont pas toujours claire-
l’État remet en cause les « blocs de compétences » qu’il avait ment établi les règles du jeu et ont rencontré
institués en 1983. Les partenaires se sont multipliés — volontaires quelques difficultés à redéfinir et recentrer leurs
ou imposés — comme partie prenante des opérations menées à missions. L’histoire des collectivités locales,
tous les échelons territoriaux. Croisements et enchevêtrements leur tradition plus ou moins importante d’inter-
sont répétitifs dans la mise en œuvre de l’action publique ; vention dans ce secteur, la perception politique
processus sectoriels et territoriaux se mélangent dans l’accom- qu’ils ont de la santé, ont dès lors largement
plissement des politiques publiques et leurs prolongements lo- décidé de leur investissement plus ou moins
caux… Le transversal est roi dans la régulation du système local : important dans des actions de santé publique.
financements croisés et procédures contractuelles vont de pair Il est impossible aujourd’hui de recenser, ni
avec les tentatives de recentralisation pour encadrer les interven- même d’estimer, les interventions des collecti-
tions de l’État, des régions, des départements et des villes. » vités locales dans les domaines que couvre
notre dossier. Les statistiques qui doivent être
A. Mabileau, la décentralisation en retard, in l’état de la décentralisation, fournies par les départements sur l’activité de
Cahiers français, no 256. certaines de leurs structures ne sont que peu
exploitées et ne peuvent couvrir la diversité des
interventions de terrain. A fortiori, on ne dispo-

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XIII


Au regard des
réalisations, un
investissement
certain

se d’aucunes statistiques sur les activités des


communes ou des régions. Une enquête qui va
être menée par le CREDOC dans les mois à La volonté
venir, auprès des communes, devrait nous ren-
seigner très utilement pour ce niveau d’admi- politique des
nistration (cf. encadré).
Le parti pris retenu dans ce dossier pour
chercher à appréhender cet investissement, a
collectivités
été d’identifier des logiques qui amènent les
collectivités locales à intervenir dans le domai- locales
ne de la santé et de les illustrer par quelques
exemples (choisis par définition de façon arbi-
traire…) évocateurs des champs étudiés dans
notre étude.
Trois logiques ont été identifiées : la volonté a demande de santé est un fait bien connu
politique des collectivités locales, les politi-
ques d’impulsion de l’État, l’introduction d’un
L de notre société que des élus peuvent
difficilement ignorer. De plus, il était bien dans
volet santé dans des politiques plus globales. l’esprit de la décentralisation de rapprocher le
niveau d’administration des préoccupations des
citoyens.
Aussi n’est-ce pas étonnant que les collecti-
vités locales aient souvent développé de nom-
i Une enquête auprès des communes breuses initiatives en matière de santé. Elles
l’ont fait soit à partir de leurs compétences
Le département évaluation des politiques sociales du légales, soit par tradition, soit dans un nouvel
CREDOC se propose de recenser et de décrire les actions élan politique et bien entendu, dans certains
et les services existants ou envisagés dans les communes cas, selon ces trois processus.
en matière de santé publique. Ce projet financé sur le Fonds
d’intervention en santé publique, prendra la forme d’une
enquête auprès des élus municipaux chargés de la santé. Les communes
Cette étude, qui portera sur les communes de plus de 5 000
habitants, comprendra des entretiens en face-à-face auprès Ainsi les communes, pour 200 d’entre elles, ont
des élus chargés des questions de santé dans un quart des gardé un service communal d’hygiène et de
communes de plus de 15 000 habitants. Les élus des autres santé. Ce service a pu conserver un simple rôle
communes recevront un questionnaire par voie postale. d’application et de contrôle des règles d’hygiè-
L’enquête devrait permettre de recueillir quatre types d’in- ne (cf. première partie). Mais souvent il a éga-
formations : les actions menées dans la commune au cours lement conservé et même développé et amélio-
de l’actuelle mandature, le réseau partenarial de la commu- ré des fonctions qu’il assumait avant la
ne en matière de santé publique, les cadres de l’intervention décentralisation, en application de textes an-
municipale (CCAS, SCHS, centres de promotion de la santé, ciens en particulier l'arrêté du 16 mai 1962. La
etc.), les opinions des élus sur ce sujet. politique de vaccination que mènent plusieurs
Lancés au mois de février 1994, les travaux permettront de grandes villes en est un exemple (cf. encadré
constituer une base de données de responsables locaux, de sur Nancy). D’autres villes ont voulu se posi-
réalisations et de projets en matière de santé publique tionner sur des champs nouveaux, promotion
locale. Ultérieurement, les indications portant sur l’état de de la santé et lutte contre les dépendances : lutte
l’offre de soins dans la commune viendront enrichir la base contre l’alcoolisme (ex. « le défi brestois »),
de données. On pourra également y inclure des informa- lutte contre le tabac (ex. « Besançon, ville sans
tions, extraites du dernier recensement, sur les caractéristi- tabac ») ou encore lutte contre la toxicomanie.
ques socio-démographiques de la population communale. La lutte contre le sida est dorénavant aussi
souvent un thème abordé (cf. encadré page
Pour toute information complémentaire concernant l’enquête, contacter
Isabelle Groc, CREDOC, département évaluation des politiques sociales,
XX). D’autres encore se sont clairement posi-
142, rue du Chevaleret, 75013 Paris, tél. : 40 77 85 79, fax : 40 77 85 09 tionnées sur le thème de l’environnement, liant
leurs politiques de santé et d’environnement.
Dans ces conditions, les services communaux

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XIV


d’hygiène et de santé sont parfois devenus des
services importants, porteurs de toute une poli-
tique santé et environnement (cf. à titre d’illus-
À Nancy, le système PASTEUR au service
tration, l’organigramme du service de Nantes). d’une politique active de vaccination
Dans d’autres communes, c’est à partir des La ville de Nancy, comme d’autres villes françaises, a
centres de santé et selon une longue tradition
adopté depuis 1984 le programme PASTEUR (Programme
que la politique de santé s’attache à protéger la Automatisé de Surveillance des maladies Transmissibles
santé, notamment celle des populations défa- chez l’Enfant en milieu Urbain et en milieu Rural), système
vorisées (à voir dans le prochain dossier).
informatique de pilotage de la situation vaccinale d’une
Enfin, certaines communes ont, plus récem- population (système conçu par l’unité INSERM de recherche
ment, engagé une démarche de promotion glo- sur les maladies transmissibles et les accidents toxiques).
bale de la santé. L’exemple des villes qui se Ce programme a trois objectifs :
sont inscrites dans le programme « ville-santé » connaître précisément et immédiatement la situation vac-
de l’OMS est à cet égard évocateur. Lancé en cinale des générations sous surveillance,
1986 par le bureau régional européen de l’OMS
améliorer la couverture vaccinale,
qui voyait dans les villes un lieu privilégié pour
modifier le comportement vaccinal de la population.
expérimenter et diffuser la politique de santé
Pour atteindre ces objectifs, ce système propose de façon
pour tous de l’an 2000, ce programme rencon-
systématique et personnalisée, l’information des familles sur
tre un succès certain en France. Pas moins de 34
les vaccinations obligatoires ou recommandées, le rappel
villes étaient en octobre 1993 « ville-santé ».
des dates des vaccinations, l’envoi des certificats de vacci-
Le programme OMS se caractérise par la
nation. Il est donc vécu par les familles et par les médecins
promotion d’une approche très large de la santé
traitants comme un service rendu.
(référence à la charte d’Ottawa), et dans cet
Ainsi en 1992, le service « hygiène et santé » de la ville de
esprit par la place importante qu’il fait aux
Nancy a envoyé : 1 628 lettres à la suite d’une naissance,
questions d’environnement (physique et
10 325 conseils vaccinaux aux parents, 3 601 certificats
psychosocial), aux relations sociales (« com-
après enregistrement des actes vaccinaux.
munauté solidaire ») et à l’équité. Il propose
des indicateurs santé (cf. annexe), il a ses critè-
res d’éligibilité,… Dans les faits, ce label re-
couvre des démarches et des réalisations diver-
ses et provoque aussi bien enthousiasme et
admiration que critique et scepticisme… Dans À Nantes, la direction de la protection de
tous les cas, ce mouvement est intéressant à l'environnement et de la santé publique
analyser au regard des évolutions qu’il illustre :
investissement politique des communes, diver-
sification des approches de la santé, collabora- Bains douches Direction
tion nationale et internationale… Administration
Protection de l’environnement
et du cadre de vie générale

Les départements Département hygiène Rédaction


alimentaire
Les départements, de leur côté, ont développé Département contrôle de la
Santé publique
des politiques de santé le plus souvent à partir qualité des eaux
d’une interprétation extensive de leurs compé- Département promotion
Département prévention et lutte
santé scolaire
tences, parfois même au-delà. contre les nuisances sonores
La lutte contre les MST constitue un bon Département habitat
Département promotion
exemple de lecture différenciée des textes. Cer- santé des sportifs
tains départements, appliquant de façon restric- Département prévention et lutte
Département vaccinations
contre la divagation des
tive leurs obligations légales n’ont gardé qu’une
animaux et gestion de l’animal Département épidémiologie
ou deux consultations dans des dispensaires où dans la ville et promotion de la santé
continuent à n’être dépistées et traitées que les
quatre maladies vénériennes. Quelques uns ont Recherche sur les bâtiments Centre d’examen étude
floqués à l’amiante vieillissement artériel
même supprimé la consultation en dispensaire
et passé convention avec un ou deux médecins

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XV


Au regard des
réalisations, un
investissement
certain

libéraux qui donnent quelques consultations


gratuites aux patients (prises en charge par le
i Les « villes-santé » de l'OMS département). Ailleurs, une consultation est
assurée dans les centres de planification fami-
Réseau européen des « villes-santé » liale.
Il rassemble les villes dites « villes du projet » de l’OMS qui D’autres départements, par contre, ont déve-
ont été chargées d’expérimenter des politiques « villes- loppé une politique très active de lutte contre
santé », de favoriser la diffusion de l’information, de susciter les MST, prenant en quelques sorte l’esprit du
la constitution de réseaux nationaux. texte et s’attribuant une responsabilité générale
En France, trois villes ont joué ce rôle : Rennes, Montpellier, dans la lutte contre les MST : ces départements
Nancy. ont alors gardé plusieurs points de consulta-
tions où sont dépistées et traitées l’ensemble
Réseau français des « villes-santé » des MST. Mais ils ont souvent par ailleurs
Il est un l’un des 18 réseaux nationaux européens. également mis en œuvre toute une politique de
Il rassemblait en octobre 1993 34 villes regroupées dans une prévention : campagnes d’information et ac-
association « l’association réseau français des “villes-santé” tions d’éducation pour la santé avec les parte-
de l’OMS » créée en janvier 1990. La ville de Rennes en naires locaux.
assure la présidence. En 1991, il existait 247 dispensaires antivé-
L’adhésion au réseau « villes-santé » français sous-tend un nériens ou points de consultation, contre 328 en
certain nombre d’engagements dont celui d’établir un plan 1981. La moitié des départements ne proposait
« ville-santé », et celui de s’attacher à ce que la santé soit plus qu’un lieu de consultation, un tiers entre
prise en compte dans l’ensemble des décisions municipales. deux et quatre et quatorze en proposaient plus
de quatre.
Réseau francophone des « villes-santé » La place des départements dans la lutte con-
Certains réseaux se sont constitués sur des bases linguisti- tre le cancer est plus en retrait. Les départe-
ques ou culturelles. ments ont généralement gardé une ou deux
Le réseau francophone a été lancé à Rennes en 1988 à « consultations avancées » mais avec des pla-
l’occasion du colloque francophone « ville-santé ». ges horaires souvent restreintes.
Ils sont le plus souvent partenaires des pro-
grammes de dépistage de masse mis en œuvre
dans le cadre du Fonds national de prévention
d’éducation et d’information sanitaire de la
CNAM. Le dépistage du cancer du sein étant
Dans l'Hérault, celui qui a le mieux démontré son efficacité (cf.
travaux de l’Europe contre le cancer et de
le dépistage du cancer l’OMS) ce sont dix sites expérimentaux qui ont
été retenus depuis 1989 pour des actions expé-
Paradoxalement, c’est une municipalité (ou plus exactement rimentales, auxquels ont été ajoutés trois sites
un groupe de municipalités), Montpellier et son district, qui en 1993. La participation des départements se
a mis en place le premier programme de dépistage de situe sur le plan financier et/ou logistique. Elle
masse du cancer du sein en France. L’expérience, lancée est très inégale d'un département à l'autre. Mais
en 1989, repose sur la circulation d’un camion, un « mammo- la CNAM reste toujours le maître d’œuvre
bile ». L’investissement (2,8 MF) et le fonctionnement (envi- général. Alors qu’elle pourrait « apporter son
ron 3,6 MF par an) ont été financés par les communes et des concours à la mise en œuvre d’actions expéri-
sponsors privés. Les résultats encourageants (participation mentales […] », elle a choisi de maîtriser l’en-
de 60 % des femmes, doublement du nombre de cancers semble du processus de l’action et de l’évalua-
précocement dépistés) ont plaidé en faveur de l’extension tion. Le rôle des départements est donc plus ou
de l’expérience. Un deuxième « mammobile » a été acquis moins important mais toujours secondaire.
avec le concours financier du conseil général dans cette On a peu d’informations sur l’activité, très
deuxième étape. Mais ce programme de dépistage ne diverse semble-t-il, des départements en ma-
concerne encore que les femmes des communes engagées tière de vaccination. L’investissement, quand il
financièrement. existe, porte plutôt sur les vaccinations recom-
mandées. Ainsi en Seine-Saint-Denis ou dans
l'Isère le conseil général mène une campagne

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XVI


Dans les Bouches-du-Rhône,
priorité à la lutte contre les MST

Le département des Bouches-du-Rhône a fait Le nombre de consultations est passé de


de la lutte contre les MST l’une de ses priorités 2 857 en 1987 à 21 566 en 1992.
de ses interventions médico-sociales. Au-delà, les équipes des consultations partici-
Dix centres proposent des consultations : 3 pent aux différentes actions de formation du
centres sont spécifiquement des dispensaires personnel social et sanitaire, et aux actions
anti-vénériens, 7 centres médico-sociaux pro- d’information pour public ciblé (lycées, foyers,
posent également des consultations MST. etc.) et grand public, sur la prévention de
Dans ces centres, des équipes (médecins, l’infection VIH et des MST .
biologistes, infirmières, assistantes sociales, Enfin depuis 1991, les services du conseil
psychologues et secrétaires médico-sociales) général ont mis en place un dispositif d’infor-
proposent le dépistage clinique et biologique, mation et de prévention de l’infection VIH et
le suivi et le traitement des MST : MST « clas- des MST dans toutes les prisons du départe-
siques », infections à papillomavirus, hépati- ment : dépistage volontaire, consultations mé-
tes B et C, sans compter l’infection à VIH pour dicales, prise en charge par une assistante
le dépistage. sociale ou un psychologue à la demande du
La gratuité et l’anonymat sont généralisés. détenu.

de vaccination rougeole-oreillons-rubéole en
mettant à disposition gratuitement les vaccins. Les régions
Plus souvent, les départements sont partenaires
des comités de pilotage locaux de la campagne
nationale de promotion de cette vaccination, Les régions ne sont pas totalement absentes des
financée par le Fonds national de prévention politiques locales de santé bien qu’elles n’aient
d’éducation et d’information sanitaire. pas de compétence particulière dans ce domai-
Enfin l’intervention des départements dans ne. Rarement promoteurs ou initiateurs, elles
la lutte contre la tuberculose est quelque peu sont assez souvent sollicitées comme partenai-
erratique, certains départements appliquent en- res financiers. Cet investissement est donc en-
core une circulaire de 1972… Mise à part core plus diffus et difficile à repérer.
l’intervention dans les établissements péniten- On peut citer leur participation relativement
tiaires pour laquelle les départements ont à fréquente dans le financement des Observatoi-
nouveau activement été sollicités en 1993, la res régionaux de la santé. On peut relever
politique de lutte contre la tuberculose prend également l’intérêt que certaines portent à la
souvent la forme de tests tuberculiniques et lutte contre le sida : le conseil régional
vaccinations BCG régulièrement proposés dans d’Île-de-France est largement intervenu dans la
les écoles. mise en place du premier centre régional d’in-
Au-delà de ces compétences plus ou moins formation et de prévention du sida dès 1987 (le
largement interprétées, quelques départements CRIPS) et le finance encore pour plus de 50 %.
mènent des politiques volontaristes de santé. Plus récemment des conseils régionaux ont
Celles-ci vont plus souvent concerner l’accès accepté de financer les antennes régionales de
aux soins (carte santé) ou la santé de certaines sida-info-service, mises en place par l’Agence
populations (mère, enfants, adolescents,… voir française de lutte contre le sida, ou encore les
le prochain dossier). Cette politique est alors quelques systèmes régionaux d’évaluation de
souvent, comme dans les départements de la la contamination par le VIH mis en place par
région parisienne, de longue tradition. des ORS et subventionnés par la DGS.

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XVII


Au regard des
réalisations, un
investissement
certain

On peut prendre pour illustrer ce processus


Les politiques deux exemples : celui de la politique d’obser-
vation et de promotion de la santé et celui de la
d’impulsion politique de lutte contre le sida.

de l’État Observation et promotion

es services de l’État, de leur côté, n’ont L’observation et la promotion de la santé, tout


L pas toujours cherché à confirmer le prin-
cipe des blocs de compétence. Sur certains
en étant maintenant différenciées, ont beau-
coup de points communs. Elles sont très liées
champs ils ont recherché le partenariat avec les dans leur histoire, ces deux formes d’une même
collectivités locales, en particulier par le biais politique de promotion locale de la santé, ont
des politiques d’impulsion. L’État sur un champ été lancées conjointement par l’État en 1982.
donné annonce sa volonté d’impulser la mise Elles ont bénéficié au départ d’un apport de
en œuvre de nouvelles actions (voire de struc- crédits substantiels, qui a, par contre, rapide-
tures) par la mise à disposition de crédits mais ment diminué. Surtout elles n’ont jamais acquis
pour un financement partiel, les cofinance- de fondements juridiques : l’observation ou la
ments devant être recherchés localement. Or promotion de la santé n’existent pas au regard
ces cofinancements locaux ne peuvent se trou- du code la santé publique (sauf en ce qui con-
ver pratiquement qu’auprès des organismes de cerne la promotion de la santé, dans les mis-
protection sociale (fonds d’action sanitaire et sions des établissements hospitaliers). Ce sont
sociale,…) ou des collectivités locales. Il re- deux circulaires de 1985 qui sont généralement
vient alors le plus souvent au promoteur d’un considérées comme leur texte de référence (en-
projet d’aller lui-même rechercher un soutien core que la circulaire du 28 juin 1985 concer-
financier auprès d’un conseil municipal, d’un nant les ORS ait été abrogée par une lettre-
conseil général ou d’un conseil régional (par- circulaire du 22 septembre 1992 en même temps
fois les trois), sans que le lien avec une compé- qu’un grand nombre de circulaires).
tence spécifique soit obligatoirement établi. On En 1985, l’État écrit « l’éducation pour la
rejoint alors l’aspect volonté politique d’une santé ne peut constituer une compétence exclu-
collectivité locale de souhaiter s’afficher com- sive soit de l’État, soit de la collectivité territo-
me partenaire d’un projet. riale, compte tenu, d’une part de sa nature,
d’autre part, du rôle technique spécifique d’un
comité d’éducation pour la santé, qui est au
service de l’ensemble des partenaires concer-
En Mayenne, nés par l’éducation pour la santé. Le finance-
Carrefour santé ment des comités doit donc continuer à être
multiple » (extrait circulaire du 31 octobre 1985
L’engagement du conseil général de la Mayenne sur la santé relative aux propositions d’orientation pour la
publique, au-delà de ses strictes compétences dévolues promotion de la santé).
par la loi, est relativement récent et encore discret, mais il Par la suite les financements de l’État ont
prend une forme originale : un bulletin trimestriel édité par le d’abord beaucoup diminué, pour finir par se
conseil général, avec l’aide technique de l’ORS des Pays de stabiliser en valeur absolue. Le souhait de cofi-
la Loire. Carrefour santé est un support de communication nancements locaux est devenu une exigence,
pour favoriser la collaboration de tous les professionnels de une condition au financement par l’État. À
santé, y compris les libéraux, aux démarches de santé partir de 1990, quand l’État affirme sa volonté
publique, pour faire comprendre les structures et l’interven- de consolider le réseau des comités départe-
tion publiques, pour permettre un retour de l’information. mentaux ou régionaux d’éducation pour la san-
Un sommaire pris au hasard (no 11, juin 1993) té, en finançant des postes d’animateurs ou de
Un généraliste pour 1 200 habitants en Mayenne conseillers en méthodologie, il ne le fait que
Assistant (e) maternel (le) : un métier partiellement (un demi voire un quart de poste)
Naissances 1992 et temporairement.
Certificats de santé : résultats 1992 Malheureusement on ne dispose pas de sta-
tistiques nationales pour connaître la participa-

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XVIII


tion des collectivités locales au financement
des projets locaux de promotion de la santé.
Elle est certainement importante et provient
En Seine-St-Denis,
aussi bien des communes, départements ou la prévention bucco-dentaire
régions. On peut rappeler l’exemple bien con-
nu de la maison régionale de promotion de la La santé dentaire constitue un problème de santé publique
santé, dans le Nord - Pas-de-Calais, structure de important (3e fléau mondial selon l’OMS) alors que les
coordination essentiellement : le soutien de la moyens de prévention sont connus et ont montré leur effica-
région se manifeste financièrement bien enten- cité.
du, mais plus formellement aussi par la prési- Le département de Seine-St-Denis a une longue tradition
dence de l’association gestionnaire. d’intervention dans le domaine sanitaire et social.
La situation des Observatoires régionaux de Fort de cette tradition et de son expérience, le conseil
la santé a évolué de façon assez parallèle. « En général a lancé depuis 1983 un programme de prévention
raison de la vocation régionale de l’observatoi- bucco-dentaire dont les résultats apparaissent probants.
re, il serait souhaitable qu’en complément du En 1983, une première enquête épidémiologique dévoile
financement de l’État, d’autres participations une situation préoccupante : à 3 ans, 34 % des enfants
financières soient recherchées et obtenues, avaient des caries sur leurs dents de lait ; à 11 ans, en
[…] » (extrait circulaire du 28 juin 1985). Les moyenne 5 dents de toute nature étaient cariées ; 71,5 % des
observatoires sont au cœur des conséquences enfants atteints n’étaient pas soignés.
contradictoires de la décentralisation. L’État a En 1984, une mission bucco-dentaire est chargée de la mise
voulu qu’ils soient tout à la fois à la base de en œuvre d’un programme dont l’objectif est une diminution
politiques régionales déconcentrées, tout en de 45 % des caries en 8 ans.
étant les têtes de pont d’un dispositif national de Les axes de prévention retenus sont simples : le brossage
connaissance de l’état de santé. Parallèlement il des dents quotidien, la consommation de fluor, des visites
les a engagés à rechercher des financements régulières chez le dentiste, une alimentation variée et équi-
locaux, les poussant ainsi dans le rôle de pres- librée.
tataires de services des responsables locaux, La mission développe interventions directes et campagne
notamment les collectivités locales. de sensibilisation. Les partenaires privilégiés sont les écoles
On ne dispose pas non plus de statistiques et les chirurgiens dentistes. Les communes sont sollicitées
nationales sur la part que représentent les sub- pour une collaboration et une participation financière.
ventions des collectivités locales dans le finan- Le programme s’étend progressivement à de nouveaux
cement des ORS. On sait seulement que, en publics : femmes enceintes, enfants plus âgés…
moyenne, la subvention annuelle de l’État re- Les résultats d’une enquête épidémiologique en 1989 sont
présente environ un tiers du budget des ORS, très encourageants : 30 % de caries en moins.
les autres subventions de fonctionnement entre
10 et 15 %, le reste des recettes provenant de
contrats. La participation des collectivités loca-
les intervient par des subventions de fonction- cle L 355-22 qui dispose « la définition de la
nement mais plus encore par la passation de politique de lutte contre l’infection par le virus
contrats d’études. de l’immuno-déficience humaine appartient à
l’État ». Cette formulation permet à l’État (ou
ses satellites) de solliciter largement le partena-
Lutte contre le sida riat des collectivités locales dans le montage de
projets locaux de lutte contre le sida.
Pour aboutir à une situation équivalente, l’his- En 1989, est créée l’Agence française de
toire de l’implication des collectivités locales lutte contre le sida (AFLS) association financée
dans la lutte contre le sida n’en est pas moins à 90 % par l’État (le reste provenant du Fonds
très différente. D’une part, l’épidémie du sida national de prévention de la CNAM)) et dotée
dans son ampleur et ses conséquences ne sont dès la première année d’un budget de 80 MF qui
apparues qu’après la mise en place de la décen- a régulièrement fait l’objet d’augmentations
tralisation, d’autre part un titre « lutte contre le substantielles depuis. L’AFLS a lancé plusieurs
sida » a été introduit relativement rapidement appels d’offre pour des actions de terrain et le
(en 1987) dans le code de la santé publique. Ce cofinancement des projets a été systématique-
titre ne comporte que deux articles dont l’arti- ment demandé : ainsi sur 227 projets financés

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XIX


Au regard des
réalisations, un
investissement
certain

en 1990 et 1991, 76 % ont été cofinancés. Ces « le soutien des élus aux missions de l’Agence
cofinancements représentent 46 % du coût total est indispensable pour assurer une diffusion
des projets. Mais là non plus on ne connaît pas permanente des messages. […] L’engagement
précisément la part prise par les collectivités des maires a une dimension essentielle pour
locales qui, là encore, peut provenir d’une com- rappeler les valeurs de tolérance et de solidarité
mune, d’un département ou d’une région. face aux exclusions qu’engendre la maladie.
Depuis 1992, l’AFLS a franchi une nouvelle L’autorité qu’ils exercent sur des institutions
étape dans l’implication des collectivités loca- ayant compétences sociales ou sanitaires leur
les : elle s’adresse directement (par la voie permet d’impulser des actions de prévention. »
écrite mais aussi, pour les plus importantes, par À la suite de quoi, l’AFLS a pu faire valoir, à
relance téléphonique) aux 925 communes de partir d’un échantillon de 200 communes, les
plus de 9 000 habitants pour qu’elles s’asso- actions de 178 d’entre elles (cf. encadré) ; cet
cient à l’organisation de la journée annuelle appel direct aux communes est renouvelé pour
mondiale de lutte contre le sida, en ces termes : la journée du 1er décembre 1993. Dans son plan

Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre 1992


Les communes s’engagent

P lacée sous l’égide de l’Organisation


mondiale de la santé, la journée mondiale
de lutte contre le sida a lieu chaque année depuis
L’événement a été créé pour 35 % d’entre elles
autour de ces supports par la signature du livre d’or
et la distribution de documents de l’AFLS […]
le 1er décembre 1988.
En 1992, les organisateurs ont souhaité mettre Campagnes d’information
l’accent sur l’engagement des communautés : Sur la transmission de l’information, 22 % des
la communauté, qu’il s’agisse du quartier, de l’école municipalités ont organisé des conférences-débats
ou du collège, d’une entreprise, d’une association sur la prévention et les modes de contamination.
professionnelle ou de réseaux de soutien plus […] Autre mode de sensibilisation du public, des
modestes composés de la famille et des amis, est expositions ont été organisées par 15 des commu-
une force particulièrement puissante dans toutes nes répertoriées. L’ampleur et les thèmes abordés
les sociétés, qu’il faut absolument exploiter si l’on sont sensiblement différents d’une commune à
veut maîtriser la pandémie de sida. l’autre. […] En outre de nombreuses distributions
Dans le cadre de ce thème, l’Agence française de de préservatifs, des ventes parfois, ont eu lieu à
lutte contre le sida a lancé une opération de l’occasion de la journée mondiale. […] Le public
sensibilisation des maires pour souligner l’importan- jeune a également été mobilisé par le biais de
ce de la communauté de proximité par excellence : projections de films ou d’animations-vidéo. […] Une
la commune. […] banalisation du test de dépistage a en outre eu lieu
dans certaines communes. […] Enfin, certaines
Actions menées communes ont conçu ou soutenu l’élaboration de
La nature et l’ampleur des actions réalisées pour la supports spécifiques. […]
journée du 1er décembre ont été très variables
d’une commune à l’autre. Événements symboliques
La ville de Paris par la diversité et l’importance des La journée du 1er décembre a été marquée par la
moyens mis en œuvre occupe une place particuliè- tenue d’événements de nature symbolique (concert,
re : campagne multimédia, journées portes ouverte jeux,…). […]
dans les CIDAG, opération « info quartiers »,
information des scolaires, soutien à des opérations Actions pour pérenniser la lutte contre le sida
d’associations ou d’institutions, stand au village des La journée du 1er décembre a été l’occasion de
associations, implication personnelle du maire. lancer des actions de lutte contre le sida destinées
Le manifeste de l’AFLS et ses supports (guide, à se poursuivre à l’avenir. […]
affiches, cartes postales, livre d’or)

(Extraits d’une brochure de l’Agence française de lutte contre le sida)

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XX


Au quartier Franc-Moisin Bel-Air (St Denis),
cinq années de recherche-action

Projet né en 1986, cette recherche-action inté- socio-anthropologique, les deux volets as-
grée par la suite au programme développe- sez indépendants au départ pour croiser
ment social du quartier, avait comme objectifs les résultats et rechercher une cohérence
d’une part la connaissance des pratiques et d’ensemble ;
des problèmes de santé à l’échelle du territoire, des groupes de travail : santé mentale,
d’autre part la recherche des moyens pour santé des jeunes, suivi des femmes encein-
optimiser la réponse aux problèmes diagnosti- tes, accès aux soins, hôpital dans la ville,
qués. maison médicale, habitat et santé qui après
Recherche-action aux multiples dimensions, une étape de questionnement précis, de-
elle s’est notamment appuyée sur vaient également avancer des propositions
un partenariat très actif entre les responsa- d’action concrètes.
bles institutionnels, une équipe de recherche, Au-delà des premiers objectifs, le groupe
des acteurs de terrain (institutionnels ou libé- de pilotage s’est beaucoup attaché à :
raux) ; primo créer les conditions d’une action col-
des rencontres régulières avec la popula- lective, secundo analyser le vécu mais aus-
tion ; si le ressenti, notamment le ressenti large-
une double enquête, épidémiologique et ment partagé d’un profond « mal être ».

(« Quartier, démocratie et santé », M. Joubert, F. Bertolotto, P. Bouhnik, éditions l’Harmattan, 1993)

triennal 1993-1995, l’AFLS reprend cette idée : quotidienne… L’État cherche à laisser aux ser-
« les collectivités territoriales sont des parte- vices locaux leur responsabilité, tout en ayant
naires privilégiés dans la lutte contre l’infection un rôle d’impulsion, et en prenant en charge les
par le VIH. Plus particulièrement, les commu- surcoûts liés au sida.
nes des moyennes et grandes agglomérations
ayant des quartiers défavorisés, les conseils
généraux et les conseils régionaux doivent ins-
crire, tant en moyens humains que financiers, la Ou encore…
lutte contre l’infection à VIH au cœur de leur
action ». Enfin, pour conclure sur ces cofinancements,
La participation des collectivités locales dans on relève que l’engagement financier des col-
la prise en charge des personnes infectées par le lectivités locales est parfois la conséquence des
VIH relève d’une logique assez différente. Très contraintes budgétaires de l’État. Ainsi, le dis-
vite il est apparu, que la prise en charge des positif spécialisé de lutte contre l’alcoolisme
patients devait être globale, c’est-à-dire au- (centres d’hygiène alimentaire et d’alcoologie
delà du suivi médical intégrer une dimension et centres départementaux de lutte contre l’al-
psychologique et sociale. Par ailleurs, l’épidé- coolisme) devrait être entièrement financé par
mie touche de plus en plus des populations l’État. Mais les dotations budgétaires de l’État
défavorisées qui, pour certaines, nécessitaient ne suffisant plus à leur fonctionnement, ces
déjà un soutien social. Or l’aide et l’action structures ont elles aussi cherché à diversifier
sociale relèvent largement de la compétence leur financement, en se faisant subventionner
des départements et dans une moindre mesure des actions précises. Les collectivités locales
des communes. C’est à partir de cette analyse ont là également été sollicitées. Le rapport du
que l’État se tourne vers ceux-ci pour être groupe TEN sur ce dispositif (voir dossier d’Ac-
partenaires des services mis en place pour la tualité et dossier en santé publique n° 4) estime
prise en charge extra-hospitalière des patients à 12 % la part du budget de ces structures
infectés par le VIH : hébergement, aide à la vie qu’elles financent.

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XXI


Au regard des
réalisations, un
investissement
certain

Contrats État-région
Le volet santé de
Dans le cadre de la politique de planification et
politiques d’aménagement du territoire, l’État au moment
de la préparation des plans, négocie des enga-
globales ou gements réciproques avec les régions : les con-
trats État-région. Ces contrats ont plutôt voca-
tion à favoriser le développement économique.
transversales Ils n’ont qu’assez peu souvent comporté un
volet santé publique. Mais les quelques rares
cas méritent d’être relevés parce qu’ils repré-
sentent un engagement sur le moyen terme
a santé est de plus en plus perçue comme d’une région dans un programme santé. Ainsi
L un élément déterminant pour l’insertion et
le développement en général. Aussi est-elle de
dans le Xe plan deux contrats État-région com-
portaient un volet santé : le contrat avec la
plus en plus présente dans des politiques dont région Nord - Pas-de-Calais pour la promotion
elle n’est pas a priori l’objet premier. L’exem- de la santé et le contrat avec la région Provence -
ple le plus évident est la place qu’elle occupe Alpes - Côte-d’Azur pour le financement de
dans les politiques d’insertion des populations l’ORS.
défavorisées (bénéficiaires du RMI , jeunes en Deux ou trois contrats État-région du XIe
difficultés d’insertion). Cet aspect fera l’objet plan vont également inclure un engagement sur
d’un développement dans le dossier 7. Mais le financement de l’ORS.
elle acquiert également progressivement sa place Mais du côté de l’État, ce type de négocia-
dans la politique de développement social ur- tions a ses limites car la DGS ne dispose pas de
bain. On rappellera également sa (modeste) crédits spécifiques pour ces contrats. Les enga-
place dans le cadre des contrats État-région. gements qu’elle prend, viennent donc consom-
mer d’avance ses crédits d’intervention an-
nuels.

i Contrats-ville : la place de la santé


Concevoir un programme d’action pour des habi-
Politique de la ville

Depuis une quinzaine d’années des plans d’ac-


tants et des territoires qui concerne : tion se sont mis en place pour tenter d’apporter
les services au public une réponse aux déséquilibres observés dans
l’action sociale certains milieux urbains. Programmes « habi-
la santé tat et vie sociale », ou « développement social
l’école des quartiers » ou encore « développement so-
la culture cial urbain », les plans et procédures se sont
le sport succédés pour constituer ce que l’on dénomme
la police communément maintenant « la politique de la
la justice ville ». Cette politique ne pouvait ignorer que la
l’intégration des immigrés santé est un facteur d’insertion et qu’à ce titre,
l’accueil et l’aide à l’insertion « elle doit être prise en compte dans les politi-
professionnelle et sociale ques de lutte contre l’exclusion et plus spécia-
la gestion des quartiers au quotidien lement dans les territoires urbains les plus fra-
giles. » (Santé et développement social urbain,
l’habitat, l’urbanisme et les déplacements outils et méthode).
l’action économique La délégation à la ville et au développement
social a donc cherché à favoriser le développe-
la prévention de la délinquance ment d’un volet santé dans ces programmes :
circulaires conjointes avec le ministère des
(d’après « les contrats villes » du XIe plan, dossier ressource, mai 1993) Affaires sociales (circulaires du 7 septembre
1989 et du 23 mars 1991), rencontres nationa-

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XXII


les, supports méthodologiques, formation (sé-
minaire ville et santé)… et quelques initiatives
locales peuvent être montrées en exemple. 7
Pourtant les premiers bilans montrent que la
santé est encore un domaine négligé dans ces
opérations. Deux études, entre autres, nous
éclairent sur ce point. La première étude a été
commanditée par la préfecture d’Île-de-France
et réalisée par l’association Santé et communi-
cation (cette étude est parue en janvier 1993
mais les entretiens ont été réalisés en 1991).
Cette étude « de repérage », à partir de l’analy-
se du discours des élus, chargés municipaux de
la santé et chefs de projets, nous renseigne sur
la faiblesse et l’inadéquation des réponses ap-
portées aux besoins de santé exprimés. Les
problèmes de santé repérés concernent la toxi-
comanie, l’abus d’alcool, le sida, la malnutri-
tion (très souvent citée),… mais aussi l’isole-
ment, le déséquilibre affectif, le « mal de vivre ». Intervention médico-sociale
Face à ces besoins plus ou moins bien définis, 2 auprès des populations

les intervenants des projets ont des difficultés à


ISSN 1243-275X

trouver les réponses. Les actions santé, quand


elles existent, sont souvent ponctuelles et mar-
ginales. Elles sont thématiques (sida, toxico-
manie,…) ou ciblées sur une population (les Le second
enfants, les jeunes, les femmes,…) et les équi-
pes DSU en ont rarement pris l’initiative même volet de ce
si elles les soutiennent quand elles sont en ce urbanistique,…), enfin le manque de partici- dossier
cours. Le manque d’information des responsa- pation des habitants.
paraîtra le
bles, la difficulté de travailler en partenariat, la On peut ajouter à cette liste d’obstacles,
faible participation des habitants (« les usa- l’absence de crédits spécifiques : alors que les 15 juin 1994
gers ») expliqueraient ce manque de prise en autres ministères apportent leur obole dans
compte. l’enveloppe globale des crédits affectés à ces
La deuxième étude a fait un constat proche opérations, le ministère des Affaires sociales
mais s’est plus attaché à en rechercher les n’a pu intervenir qu’à la marge par le finance-
causes. Il s’agit d’un rapport écrit par des étu- ment, via ses services extérieurs, d’actions tout
diants de l’ENA en 1992. Dans le constat ils à fait ponctuelles.
relèvent des pathologies non spécifiques mais Aujourd’hui, les contrats de ville rempla-
plus graves et plus fréquentes, des conditions cent ces anciennes procédures et deviennent le
de vie défavorables, des problèmes d’insertion, protocole unique d’engagement entre l’État et
des difficultés d’accès aux soins. Quant aux les collectivités locales pour la durée du XIe
obstacles, les auteurs ont identifié : des obsta- plan. La santé est explicitement citée dans le
cles liés à la nature du sujet (difficultés de contenu des contrats, dans le volet « services au
définir des objectifs, d’évaluer, manque de vi- public » (voir en annexe un extrait de la fiche
sibilité immédiate des résultats), le cloisonne- thématique du dossier-ressources de la Déléga-
ment, voire le clivage, entre les services et le tion interministérielle à la ville).
foisonnement des acteurs de la santé qui rend Le ministre des Affaires sociales est égale-
difficile le travail en partenariat et la coordina- ment ministre de la Ville et la Délégation inter-
tion, le mode d’intervention des acteurs institu- ministérielle à la ville lui est rattachée. Ceci
tionnels (le faible poids des DRASS et des peut être considéré comme un signe favorable
DDASS par rapport à d’autres services, notam- pour une meilleure prise en compte des problè-
ment les DDE, l’absence des services du con- mes de santé dans ces nouveaux contrats de
seil général, des bureaux d’études à compéten- ville.

actualité et dossier en santé publique n°5 décembre 1993 page XXIII

Vous aimerez peut-être aussi