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Séquence 1 : Cadre général des finances publiques

Objectifs :
 Acquérir le concept de finances publiques ;
 Identifier l’importance des FP comme champs d’étude ;
 S’enquérir de la relation des FP avec l’économie politique, sciences
politiques et d’autres disciplines ;
 Identifier l’Intérêt de l’étude des finances publiques.

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I. Introduction générale

1. Définition des finances publiques


L’expression « finances publiques » est peu employée dans les textes
législatifs, mais si le terme de « finances » ne présente pas une difficulté de
définition, l’adjectif « publiques » quant à lui induit de l’incertitude dans la
tentative de définir les finances publiques.
En effet, le mot finance vient du latin finare qui veut dire fixer une
indemnité ou une amende (du saxon fine qui veut dire amende) et qui désigne ce
qui se rapporte à l’argent. Les finances publiques seraient donc « les revenus et
les dépenses de la puissance publique et c’est la science de l’administration de ces
revenus et dépenses »1.
Afin de distinguer entre les finances privées et les finances publiques, il est
possible de constater que celles-ci recouvrent les finances des personnes morales
du droit public (Etat, Collectivités Territoriales et Etablissements publics). Mais
cette expression peut également désigner les finances de nature publique, ou
encore, les finances de l’économie publique.

1.1 Les finances des personnes morales de droit public


Dans leur sens le plus traditionnel, les finances publiques sont, selon un
critère juridique organique, les finances des personnes morales de droit public. Il
peut s’agir de personnes de droit public international (organisations interétatiques)
ou de droit public supranational (union européenne). Il s’agit aussi, et
principalement, de personnes de droit public interne.
L’Etat constitue la première de ces personnes et pendant longtemps, les
finances publiques étaient même largement confondues avec les finances de
l’Etat. Cette confusion est loin d’avoir complétement disparu du langage courant,
de la littérature scientifique et même des textes et de la jurisprudence. Elle peut
ainsi conduire à appeler « finances publiques » ou « dette publique » ce qui est en
réalité finances ou dettes de l’Etat.
Les collectivités territoriales démembrements de l’Etat (Régions,
Préfectures ou provinces et Communes) constituent une deuxième catégorie de

1 2
Lexique de Gestion, Dalloz, 6e édition, 2003, P.242.
personnes morales de droit public et sont, à ce titre, gestionnaires de finances
publiques.
Les établissements publics, nationaux et locaux, constituent également des
personnes morales de droit public mais le droit financier n’en tire pas toujours les
conséquences. Les établissements administratifs ne soulèvent pas, sauf
exceptions, de problèmes sérieux alors que les établissements industriels et
commerciaux suscitent davantage de difficultés.
La notion traditionnelle de finances publiques, née des conceptions de la
société libérale, néglige l’activité d’organisme de droit privé utilisés comme
instruments de gestion publique. Elle est inadaptée au cas d’organismes de nature
juridique incertaine (« mixte »), qui s’insèrent mal dans la dualité juridique
traditionnelle public/privé. Elle procède, enfin, d’un critère exclusivement
organique et exclut donc a priori toute différenciation et toute réflexion fondées
sur la nature, pourtant largement diversifiée depuis un siècle, des opérations que
prennent ou devraient prendre en charge les personnes morales de droit public.

1.2 Les finances de nature publique


Dans une vision parfois qualifiée de politique, sociologique, les finances
publiques peuvent être gérées par des personnes de droit public, des personnes de
droit privé ou des organismes « innomés », ce qui permet de dépasser l’éventuel
arbitraire des catégories juridiques et de prendre en compte la diversité des modes
de gestion des activités financières dans la société contemporaine. Mais le
problème, classique demeure celui de l’identification de la nature publique.
Celle-ci peut, selon le cas, être appréhendée par l’activité ou par l’organe.
Dans une approche matérielle, les finances publiques sont celles des
activités de nature publique, quel que soit l’organisme intéressé et même si cet
organisme doit être déclaré gestionnaire à la fois de finances publiques et de
finances non publiques.
- Selon un premier critère, susceptible de multiples interprétations et
d’infinies nuances, les activités de nature publiques seraient les activités
non marchandes. Seraient ainsi publiques les finances ne correspondant
pas à des opérations industrielles ou commerciales : finances du secteur
« administratif » au sens matériel du droit public ou, selon une
interprétation plus large, finances de l’espace publique » défini par
opposition à « l’espace économique » gouverné par les lois de marché ;
- Selon un deuxième critère serait publiques les activités financées par des
prélèvements obligatoires car ceux-ci constituent la marque, sinon
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exclusive, du moins caractéristique d’une puissance par essence
publique. Une telle approche a pour principal avantage de dépasser les
notions juridiques d’impositions de toutes natures et de taxes
parafiscales, pour inclure, notamment la masse considérable cotisations
sociales obligatoires.

1.3 Les finances de l’économie publique


Dans une approche globale, dite parfois « réaliste » voire « proprement
financière », les finances publiques peuvent être définies comme les finances de
l’économie publique. Celle-ci pourrait être organiquement présentée comme
le secteur des organismes dirigés par les pouvoirs publics (puissance publique) et
communément appelé « secteur public ».
Cette définition large des finances publique peut paraitre reposer sur un
critère bien flou mais elle a le mérite de s’attacher à cerner la réalité du domaine
financier des pouvoirs publics sans se laisser arrêter par des présupposées
philosophiques ou par la diversité , voire l’astuce, des formules juridiques ou des
modes de gestion ; elle cherche ainsi à traduire une vérité politique et économique
essentielle, que perçoit d’ailleurs instinctivement l’opinion publique en imputant
indifféremment aux gouvernant la gestion de plusieurs activités.

2. Domaine des finances publiques


Les finances publiques sont une discipline du droit public, et plus
précisément du droit public financier. Classiquement, en droit, on scinde les
finances publiques en trois branches : le droit fiscal, le droit de la comptabilité
publique et le droit budgétaire.
Le droit fiscal s’intéresse à la question des ressources publiques, et plus
spécifiquement aux règles techniques de détermination et de perception des
recettes fiscales (impôts). La comptabilité publique est l’ensemble des règles
régissant l’encaissement et le décaissement de l’argent public, la tenue des
comptes publics, et, d’une façon générale, les techniques de gestion publique.
Le droit budgétaire est l’ensemble des règles encadrant l’adoption et la mise en
œuvre du budget, c’est-à-dire l’acte de prévision et d’autorisation financière pour
l’exercice à venir.

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Les finances publiques sont soumises à des règles juridiques particulières
qui ont fait d’elles, à partir du XIXe siècle, une branche du droit public à côté du
droit constitutionnel et du droit administratif.
Les auteurs qui, à cette époque, abordèrent ce domaine avaient des
préoccupations strictement financières : ils étudiaient « les moyens par lesquels
l’Etat se procure les ressources nécessaires à la couverture des dépenses publiques
et en répartit la charge entre tous les citoyens ».
Les règles financières doivent donc permettre à l’Etat de disposer de
moyens financiers en quantités suffisantes (règles fiscales et d’emprunts), d’en
aménager les mouvements (règles de trésorerie), d’en assurer un emploi conforme
à la volonté populaire et à l’intérêt général (règles budgétaires).
Dans ce qui suit, nous allons voir les rapports entre d’une part les finances
publiques et le droit constitutionnel et d’autre part entre les finances publiques et
le droit administratif.
2.1 La multiplicité des approches des finances publiques
L'étude des phénomènes financiers constitue le point de rencontre de
multiples disciplines dont quatre jouent un rôle essentiel : le droit, l'économie,
l'histoire et la sociologie.
L’approche juridique est l'approche des finances publiques qui a prévalu
pendant longtemps jusqu'à la première moitié du XXe siècle. Branche du droit
public, le droit budgétaire prend sa source dans le droit constitutionnel. En effet,
toutes les constitutions modernes entendent régir les finances publiques. Les
finances publiques ont également des liens étroits avec le droit administratif. Les
règles du droit administratif commandent la plupart des mécanismes financiers
(ex. contentieux fiscal, comptabilité publique...). L'agencement des opérations
financières influe largement sur le fonctionnement de l'administration (rôle
important du comptable public dans la gestion des services publics malgré son
rang modeste dans la hiérarchie administrative). Les mécanismes financiers
contribuent aussi donner aux institutions administratives leur véritable caractère.
S’est développée avec l'accroissement de l'intervention de l'Etat dans le
domaine économique et social. Les économistes se sont alors intéressés aux
justifications économiques de l'intervention publique, à ses modes de financement
et à son efficacité. Est donc apparue une discipline nouvelle : l'économie publique
qui a pour objet l'étude de l'économie des interventions publiques (c'est-à-dire
l'étude de l'activité économique issue des rapports de contrainte). Les finances
publiques et l'économie publique ont donc des liens étroits dans la mesure où les
interventions publiques ont des implications pour les finances publiques aussi
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bien pour les dépenses publiques que pour les recettes publiques. Toutefois,
l'intervention publique repose également sur d'autres instruments que les finances
publiques telles que la réglementation.
Cependant, en dépit de l'étroitesse des liens entre l'économie publique et les
finances publiques, les deux disciplines ne doivent pas être confondues.
L'économie publique étudie les justifications, les mécanismes et l'efficacité de
l'intervention publique. Les finances publiques étudient au contraire les
mécanismes des opérations financières et notamment les règles suivant lesquelles
doit être assis un impôt, les voies de recours ouvertes à un contribuable et les
techniques de contrôle d'une opération de dépense.
L’approche historique est également importante mais difficile. L'histoire
financière est une discipline négligée dans la mesure où elle nécessite des
connaissances techniques qui rebutent beaucoup d'historiens.
L’approche sociologique privilégie l'étude des processus d'élaboration et
d'exécution des décisions dans les finances publiques. Cette approche a renouvelé
complètement les études de science financière en englobant l'analyse des règles
juridiques, du jeu politique et des impératifs économiques qui pèsent sur la
décision financière comme l'illustre la rationalisation des choix budgétaires.

2.2 Les rapports des finances publiques et du droit constitutionnel


Les liens entre les finances publiques et le droit constitutionnel sont
particulièrement étroits. Ils apparaissent tantôt par la soumission des mécanismes
financiers aux règles constitutionnelles tantôt par l’influence qu’exercent les
phénomènes financiers sur l’équilibre constitutionnel.
Toutes les assises du droit budgétaire reposent sur la Constitution. Le
développement des pouvoirs budgétaires des assemblées est lié, à l’évolution du
régime parlementaire. Le budget est suivant le mot de Benjamin Constant,
« l’arme du peuple contre tous les abus ».
L’équilibre entre l’exécutif et le législatif est commandé par la répartition
des compétences financières entre ces deux pouvoirs. Aussi, la prépondérance de
l’exécutif dans le régime parlementaire britannique est dans une large mesure, due
à sa maitrise sur le budget. Au contraire, la faiblesse des pouvoirs financiers du
président des Etats-Unis explique, que bien souvent, le régime américain soit,
suivant le mot du président Wilson, plus « congressionnel » que véritablement
« présidentiel ».
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2.3 Les liens entre finances publiques et le droit administratif
Les liens qui unissent les finances publiques et le droit administratif ne sont
pas moins étroits que ceux qui le lient au droit constitutionnel. Les règles du droit
administratif, commandent la plupart des mécanismes financiers. Si à bien des
égards, le droit des administrations financières et des opérations financières relève
du droit administratif, l’agencement des opérations financières influe très
largement sur le fonctionnement de l’administration. L’importance croissante
prise par les finances publiques, leur a permis de se détacher du droit administratif.
Les finances publiques constituent désormais une discipline qui complète
les autres branches du droit public ; il convient maintenant de les situer par rapport
à l’économie financière.

2.4 Les liens entre finances publiques et l’économie


Le développement de l’économie financière prouve l’étroitesse des liens
existants entre les finances publiques et l’économie. L’importance prise par les
objectifs économiques dans la politique financière moderne a poussé parfois les
juristes à abandonner l’étude des mécanismes financiers aux seuls économistes.
L’économie financière aurait ainsi entièrement absorbé la science des finances.
Mais si étroits soient les rapports entre les finances publiques et l’économie
financière, ces deux disciplines ne sauraient être confondues ; elles ont en effet
des objectifs différents. L’économie financière étudie les phénomènes financiers
sous leur aspects global, elle analyse ce que le Doyen Barrière appelaient « les
flux financiers ». Ainsi, recherche-t-elle les effets du prélèvement fiscal global sur
l’économie ou les conséquences du déséquilibre budgétaire sur la conjoncture
économique, ou encore les répercussions des dépenses publiques
d’investissements sur la croissance économique. Les finances publiques au
contraire, étudiant spécialement le mécanisme des opérations financières
individuelles, recherchent les règles suivant lesquelles doit-être assis un impôt ;
déterminent les droits de recours couverts à un contribuable et définissent les
techniques de contrôle des opérations de dépenses publiques. C’est dire que les
règles juridiques y tiennent une large place. Cependant, ces opérations financières
ne pourraient être comprises si elles n’étaient replacées dans leur environnement
économique, qui seul peut leur donner leur pleine signification. Force est de
constater que les données économiques conditionnent les opérations financières
mais aussi que les opérations financières influent sur l’économie.

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La frontière entre ces disciplines n’est, selon toute évidence, pas étanche.
À cet égard, les finances publiques sont véritablement une discipline charnière et
carrefour.
2.5 Les liens entre finances publiques et la politique
Gaston Jèze écrivait en 1922 que : « le budget est essentiellement un acte
politique…Le budget est, avant tout, la mise en œuvre d’un programme d’action
politique »2. Ainsi, les finances publiques ont une influence considérable sur la
politique.
Que de révoltes et mêmes de révolutions trouvent leur origine dans les
décisions financières ! On peut prendre comme exemple, les révolutions
françaises sur la IIIe et la IVe République, la révolution américaine de 1776 etc…
Par ailleurs, toute décision politique importante a presque toujours des
conséquences financières.

3. Evolution des finances publiques


La conception libérale de l’Etat, a attribué aux finances publiques une
fonction essentiellement financière qui se limitait à pourvoir les caisses de l’Etat
de moyens nécessaires au financement des services publics administratifs
(l’administration, la justice, la sécurité intérieure et extérieur, la diplomatie…).
Avec l’avènement de l’interventionnisme étatique, ces fonctions se sont
étendues aux domaines économiques et sociaux et les instruments d’actions
financières se sont diversifiés.
3.1 Neutralité financière
La théorie classique des finances publiques se fondait sur la philosophie
libérale du XVII et XIX siècle. Selon cette théorie, l’Etat ne devait d’aucune
manière contrecarrer l’action du secteur privé car toute intervention des pouvoirs
publics pouvait engendrer des effets négatifs sur l’activité économique des
particuliers. L’initiative privée était, en effet, considérée comme le moteur de
développement.
Les classiques soutenaient que toute intervention de l’Etat par le biais des
ses finances se répercutait sur l’équilibre économique réalisé spontanément par
les mécanismes naturels du marché.

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Frank Waserman, Les finances publiques, Coll. Découverte de la vie publique, La documentation française, 8 e 8
édition ,Paris, 2,p.22.
En effet, le prélèvement fiscal engendrait – d’après les classiques- une
diminution de l’épargne et de l’investissement privés, car l’impôt amputerait une
part des revenus que des particuliers auraient pu investir dans des activités
productives. De même l’emprunt public absorberait une part de l’épargne privé la
détournant ainsi de son emploi productif et entrainerait une hausse des taux
d’intérêt.
Les classiques considéraient également que l’accroissement des dépenses
de l’Etat, qui traduisaient une demande de biens et de services, ne pouvaient
provoquer un supplément d’activité, car la demande est déjà satisfaite par le jeu
du marché. En se livrant à une compétition avec le privé, l’Etat risquerait de
compromettre l’équilibre économique.
De même, l’intervention de l’Etat par le biais de ses finances engendrerait
des effets budgétaires non désirables. En effet, e financement de dépenses
publiques de plus en plus importantes pour la satisfaction des besoins pourraient
entrainer le déficit budgétaire, situation où les dépenses dépasseraient les recettes,
notamment d’origine fiscale et domaniale ; ce qui risquerait de présenter un
double danger : celui de la banqueroute et celui de l’inflation.
La banqueroute exprime la faillite de l’Etat, qui en recourant à l’emprunt,
se trouverait dans l’incapacité de rembourser ses dettes ce qui risquerait
d’entretenir le déficit et de déclencher ainsi un cycle d’endettement. Quant à
l’inflation, qui résulterait de l’émission de monnaie, risquerait d’entraîner un
accroissement de la masse monétaire en circulation, sans rapport avec la
production de richesse.
Ces arguments justifiaient les principes financiers défendus par les
théoriciens classiques à savoir ;
- Le respect de l’équilibre budgétaire ;
- La limitation des dépenses publiques ;
- La prohibition de l’émission de monnaie et de l’emprunt.

L’Etat devait se contenter de ses ressources jugées « normales » à savoir,


les recettes fiscales et domaniales, puisque ses fonctions se limitaient aux
missions traditionnelles (maintien de l’ordre public, la justice et la défense). Dans
ce sens, G. Jèze disait : « il y a des dépenses, il faut les couvrir ».
Cette neutralité financière, qui se fondait sur une conception exclusivement
juridique des finances publiques niait toute interaction entre les finances et
l’économie, était contredite par la réalité, le facteur économique n’a jamais été

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ignoré par la politique financière de l’Etat, il était sous-jacent dans les choix
budgétaires.

3.2 Finances fonctionnelle


L’émergence des finances fonctionnelle est liée à l’évolution de
l’interventionnisme de l’Etat.
Timide dans ses premières phases, la politique d’intervention devint plus
hardie sous le poids de facteurs économiques et politiques.
De nouveaux courants de pensées, de nouvelles idéologies, dont le
développement a été favorisé par le contexte économique et politique, ont
progressivement remis en cause les fondements de la théorie classique des
finances publiques.
Tout d’abord la première guerre mondiale était l’occasion pour les
responsables de se rendre compte que toute victoire restait tributaire de la
mobilisation de tous les moyens et de l’accroissement des capacités de production,
ce qui justifiait l’intervention de l’Etat et imposait de ce fait une nouvelle
approche des finances publiques.
Ensuite la crise économique de 1929 a montré que les mécanismes naturels
du marché (l’offre et la demande) n’étaient pas en mesure de réaliser l’équilibre
économique et social auquel les libéraux s’attachaient, ce qui a obligé l’Etat à
intervenir pour remédier aux déséquilibres économiques, faire face au chômage
et aider les entreprises en faillite.
Un rôle plus actif est reconnu aux finances publiques.
Ainsi en matière de dépenses, on constate un accroissement progressif de
son volume, il est mis en évidence en 1880 par l’économiste allemand A Wagner
à travers sa loi relative à la croissance continue des dépenses publiques. Ce
théoricien a constaté que la croissance des dépenses publiques dépassait parfois
celle du produit intérieur brut.
Par ailleurs, les dépenses publiques ne se limitent plus au financement des
charges administratives de l’Etat, mais s’étendent désormais aux secteurs
économiques (dépenses d’investissement) et aux secteurs sociaux (dépenses de
transfert).
En matière de recette, l’impôt ne se limite plus à pourvoir les caisses de
l’Etat, mais il est conçu comme un instrument d’intervention économique et

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social. De même l’emprunt et l’émission de monnaie ne sont plus prohibés, au
contraire ils sont mis au service de la politique économique et financière de l’Etat.
L’interventionnisme budgétaire a ébranlé les bases de la doctrine classique
des finances publiques. Le budget peut être, désormais, utilisé comme moyen
d’action conjoncturelle et structurelle.

4. Genèse des finances publiques marocaines


L'émergence des Finances publiques marocaines est étroitement liée au
développement du système politico administratif. C’est ce qu’on peut déceler à
travers l’analyse du processus d’évolution du système financier.
4.1 Finances publiques avant le protectorat
Le système financier marocain, avant le protectorat se fondait sur des règles
de sources religieuse et Maghzeniène. Le « Bit mal el Mouslimine » institution
introduite sous le règne du Sultan Moulay Slimane, consacrait la séparation entre
les finances privées du Sultan et les Finances de la communauté.
Le « Bit mal el Mouslimine » recevait les impôts d’origine coranique,
notamment, la Zakat et l’achour, alors que le trésor de Dar Adeyel centralisait les
contributions de nature administrative (les meks).
La perception des recettes et le paiement des dpéenses étaient confiés au
corps des « Oumana ». C’est le Sultan Moulay El Hassan 1er qui a réorganisé le
corps des Oumana et a entrepris une réforme de la fiscalité.
En ce qui concerne le corps des Oumana, on distinguait principalement trois
catégories d’Amins (ou administrateurs).
- Amin Dakhal ou administrateur des recettes ;
- Amin El kharaj ou administrateur des dépenses ;
- Amin Lahsab ou comptable suprême chargé de la gestion des finances
et du contrôle des agents.

A la tête du corps des Oumana se trouvait un Amin El Oumana qui jouiat


le rôle du ministre des finances. Il était responsable des services financiers du
Makhzène, assurait le suivi de la situation financière de l’Etat et contrôlait la
gestion de tous les Oumanas. Ces institutions financières qui s’adaptaient au
contexte économique et administratif du Maroc, devaient subir des changements
notables avec l’avènement du Protectorat.

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4.2 Finances publiques sous le protectorat
Sous le protectorat, certaines réformes financières et comptables,
consacrées par les dispositions financières de l’acte d’Algésiras, ont vu le jour.
Il en est ainsi de l’établissement d’un budget prévisionnel à partir de 1914,
de la nomination du trésorier général en 1916, de la mise en place à partir de 1917,
du système de comptabilité publique et de la création du contrôle des engagements
des dépenses à partir de 1921.
Ces mesures ont permis de restructurer les institutions financières de l’Etat
de réglementer la gestion budgétaire et de renforcer le contrôle financier
notamment par le biais du contrôle des engagements des dépenses, de la cour des
comptes française et de la commission locale marocaine des comptes.
Par ailleurs, une réforme de la fiscalité, dont les bases ont été jetées par
l’acte d’Algésiras, s’est traduite par la création de plusieurs impôts, notamment le
nouveau Tertib en 1915, la taxe urbaine en 1918, la patente en 1920, le supplément
des patentes en 1941 et le prélèvement sur les traitements et salaires en 1948.

4.3 Finances publiques depuis l’indépendance


Avec l’avènement de l’indépendance, le Maroc devait assoir les bases de
son développement en réformant ses structures financières, son système
budgétaire et sons système fiscal.
Les réformes entreprises n’ont pas été à l’abri des vicissitudes politiques,
ni des contraintes économiques, elles ont subi la pesanteur des conceptions
financières et celles de l’évolution du rôle de l’Etat.
En utilisant les finances publiques, comme levier du développement, l’Etat
a accru, d’une manière démesurée, les dépenses publiques. Cet accroissement se
justifiant par l’effort de reconstruction, d’équipement et de consolidation des
acquis.
La mise en place du pan quinquennal (1960-64) n’a fait qu’accélérer cette
tendance. De même la politique ambitieuse de croissance économique que
traduisait le plan quinquennal (1973-77), avait entraîné une aggravation du déficit
budgétaire, qui a atteint 17,2 du PIB en 1973. Pour remédier à cette crise
financière, une politique d’ajustement structurelle fut mise en place, qui visait,
notamment la compression des dépenses de fonctionnement (gel des salaires,
rééchelonnement de la dette…), afin de ramener le déficit budgétaire à des
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proportions adaptées à la taille de l’économie. Ce qui s’est traduit effectivement
par une baisse du déficit, qui est passé de 10,4% du PIB en 1983 à 5,4% en 1987.
Un effort a été également déployé en ce qui concerne l’amélioration des
recettes à travers la réforme de la fiscalité et la restructuration des entreprises
publiques afin d’en améliorer la gestion. La poursuite de l’assainissement des
finances publiques a été et reste toujours un souci permanent des pouvoirs publics.

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II. Sources juridique régissant les FP
Comme toutes les branches du droit public, les sources du droit financier
sont diversifiées. Les principes généraux de cette branche trouvent appui dans ce
qui forme le bloc constitutionnel. Il s’agit d’abord de la Constitution puis de
certaines lois organiques fixant des règles en relation avec la loi de finances et qui
constituent de ce fait la Constitution financière.
Ceci n’empêche pas que d’autres textes d’un niveau infra-constitutionnel
ne gardent toute leur importance en tant que source juridique régissant les finances
publiques.
1. Sources relevant du bloc constitutionnel
Dans ce qui suit, nous tenterons d’identifier des textes du bloc
constitutionnel en relations avec les finances publiques.
1.1 Constitution
La Constitution de 2011 dans son article 39 dispose que : « Tous supportent,
en proportion de leurs facultés contributives, les charges publiques que seule la
loi peut, dans les formes prévues par la présente Constitution, créer et répartir ».
L’importance de cet article réside d’une part dans l’obligation, subie par tous, de
supporter dans le financement des charges publiques et d’autre part dans la
consécration du rôle à jouer par le Parlement à travers la loi qui a le monopole de
créer et répartir les charges publiques.
Le fondement juridique de la préparation et de l'adoption de la loi de
finances est posé par :
- Les articles 49, 92, de la Constitution portant respectivement sur la
délibération des orientations générales du projet de loi de finances en
Conseil des Ministres et de la délibération du projet de loi de finances
en Conseil du Gouvernement ;
- les articles 68, 75, 77 de la Constitution définissant les conditions
procédurales légales régissant le vote de la loi de finances par le
parlement.
La constitution dans son titre X réservé à la Cour des Comptes, qualifie
celle-ci d’institution supérieure de contrôle des finances publiques et de ce fait
elle est chargée notamment d’assurer le contrôle supérieur de l’exécution des lois
de finances (Article 147 de la constitution). Il est à noter que conformément aux
dispositions de l’article 148 de la Constitution,, la Cour des Comptes :

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- assiste le Parlement dans le domaine de contrôle des finances
publiques ;
- apporte son assistance aux instances judiciaires ;
- assiste le gouvernement dans les domaines relevant de sa compétence
en vertu de la loi.

1.2 Loi organique de la loi de finances


L’adoption en 2011 de la nouvelle constitution a rendu nécessaire la refonte
de la loi organique n°7-98 relative à la loi de finances afin de prendre en compte
les nouveaux principes constitutionnels encadrant les finances publiques. La
nouvelle loi organique n°130-13 relative à la loi de finances (LOLF) fournit ainsi
un cadre législatif pour consacrer les différentes mesures entreprises dans le cadre
de la modernisation de la gestion des finances publiques. Cette loi organique qui
définit de nouvelles règles budgétaires et comptables consacre les principes de
reddition des comptes et d’évaluation, élargit le droit d’amendement
parlementaire et participe au renforcement de la transparence budgétaire.

La LOLF définit l'objet et le contenu de la loi de finances, ses règles de


présentation, ses modalités de vote ainsi que certaines règles d'exécution de cette
loi quant au décret n° 2-15-426 relatif à l'élaboration et à l'exécution des lois de
finances, il comporte les dispositions relatives à la préparation de la loi de finances
et aux modalités de son application qui sont à la charge du Gouvernement

La LOF représente donc une mutation des processus de la gestion financière


publique et une évolution importante dans les pratiques budgétaires de
l’administration publique marocaine, non seulement en raison des changements
des règles législatives mais aussi parce que la mise en œuvre de la LOF modifie
profondément les pratiques et les comportements.

1.3 Les règlements intérieurs des chambres du parlement


Conformément aux dispositions constitutionnelles en vigueur, les chambres
formant le parlement sont tenues d’établir et de voter leurs règlements intérieurs.
Cependant l’article 69 de la Constitution, précise au sujet de chaque règlement
qu’ « il ne pourra être mis en application qu'après avoir été déclaré par la Cour
Constitutionnelle conforme aux dispositions de la présente Constitution ».

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L’importance de ces règlements en matière de finances publiques, réside
dans les dispositions qui concernent l’exercice du pouvoir financier du parlement.
En effet, ces dispositions portent notamment sur les conditions du dépôt et du vote
du projet de la loi de finances auprès de l’une des deux chambres et par leurs
commissions compétentes.

2. Sources infra-constitutionnelles
Les finances publiques sont régies par une multitude de sources infra-
constitutionnelles dont il y a lieu de distinguer entre les sources législatives et
réglementaires.
2.1 Sources législatives
Au niveau des sources législatives en relation avec les finances publiques, on
peut citer à titre indicatif les textes suivants :
- Le Code Général des Impôts (CGI) objet de la loi ;
- Le Code de recouvrement des créances publiques (CRCP) objet de
la loi n° 15-97 ;
- Le Code de Juridictions financières (CJC) objet de la loi n° 62.99 ;
- La loi relative à la responsabilité des ordonnateurs et comptables
publics.

2.2 Sources réglementaires


Le pouvoir exécutif à des compétences en matière des finances publiques et
c’est lui qui se charge de la préparation et l’élaboration des lois de finances. Il est
à noter que le gouvernement à travers son pouvoir réglementaire édicte un
ensemble de règles qui régissent les opérations liées aussi bien aux ressources
financières dont il dispose qu’aux dépenses publiques qu’il exécute.
A titre indicatif, on peut citer les textes suivants :
- Décret relatif à la préparation et l’exécution des lois de finances ;
- Décret de la comptabilité publique ;
- Textes réglementaires d’application des lois de finances.

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III. Principes des FP

Les finances publiques sont régies par les principes du droit budgétaire
classique (l’unité, l’annualité, l’universalité et la spécialité), auxquels il
conviendrait d’ajouter principes de sincérité consacrés par la LOF du 2 juin 2015
et d’équilibre (inscrit dans l’article77 de la Constitution)3.
Ces principes vont non seulement assurer un assainissement des finances
publiques mais également aboutir à un renforcement du régime parlementaire.

1. Principe de l’annualité
Le principe de l’annualité vise à obliger le gouvernement à se présenter
devant le Parlement de façon périodique afin de confirmer les autorisations qui
lui sont accordées pour lever des fonds publics et rendre compte de l’usage qui en
a été fait. L’année budgétaire commence le 1er janvier et se termine le 31
décembre de la même année.

2. Principe de l’unité
Le principe de l’unité du budget répond à l’exigence de l’appareil législatif
de voir l’ensemble des recettes et des dépenses de l’Etat groupées dans un
document unique de façon à lui permettre d’avoir une vision précise et globale de
la situation des finances publiques.

3. Principe de l’universalité
Le principe de l’universalité exige que les ressources et les charges soient
comptabilisées chacune de son côté de façon à ce qu’il n’y ait pas de compensation
entre les recettes et les dépenses. Ce principe a également pour conséquence la
non affectation des recettes aux dépenses, en vertu duquel les recettes définies ne
devraient pas être affectées à la couverture de dépenses déterminées. Ainsi,
l’ensemble des recettes devrait servir à la couverture de l’ensemble des dépenses.

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Ouafaa Khallouk, "La modernisation des principes budgétaires", Revues des Etudes Multidisciplinaires en 17
Sciences Economiques et Sociales, Vol 4-Numéro 3 , 2019
4. Principe de la spécialité
Ce principe procède du souci du Parlement de ne pas conférer à
l’autorisation de dépenses consentie au Gouvernement un caractère absolu,
permettant à ce dernier de disposer des crédits ouverts en toute liberté. Cette
autorisation est liée à l’obligation d’affecter ces fonds à la couverture de dépenses
déterminées.

5. Principe de la sincérité
Le principe de la sincérité renvoie à la sincérité budgétaire et à la sincérité
comptable :
5.1 La sincérité budgétaire
La sincérité budgétaire exige la pertinence des hypothèses qui président à
la préparation de la loi de finances, et la présentation sincère au niveau de la loi
de finances de l'ensemble des ressources et des charges de l'État. Dans le même
sens, la sincérité budgétaire sollicite l’engagement de procéder à la présentation
des lois de finances rectificatives en cas de modifications significatives des
priorités et des hypothèses de la loi de finances ;
5.2 La sincérité comptable
Les comptables publics sont chargés de veiller au respect des principes et
des règles comptables en s’assurant notamment de la sincérité des enregistrements
comptables et du respect des procédures et de la qualité des comptes publics. En
outre, La cour des comptes certifie la régularité, la sincérité et la fidélité des
comptes de l’Etat

6. Principe de l’équilibre
Le principe malgré sa présence dans la théorie économique et financière, il
n’a pas un fondement juridique très contraignant pour les pouvoirs législatifs et
exécutif. A cet égard, l’article 77 de la Constitution dispose que : « Le Parlement
et le gouvernement veillent à la préservation de l'équilibre des finances de l'État ».
Formulé ainsi, cet article laisse une marge de manœuvre tolérant un déficit lors
du vote de la loi de finances.

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Tableau synoptique des principes budgétaires

Principes Signification Justification Etablissement Exception


L’unité Toutes les recettes et Vision claire des Budgets annexes Budgets autonomes
les dépenses de l’Etat finances SEGMA Budgets extraordinaires
doivent être groupées Contrôle parlementaire Comptes spéciaux du
dans un document trésor
unique
L’annualité Autorisation et Prévision proche de la Douzièmes provisoires Report de crédits
prévision budgétaires réalité Reconduction de Crédits d’engagements
établies pour une Contrôle parlementaire crédits Autorisations de
année LF rectificatives programmes
Mois de programmes
L’universalité Toutes les recettes et Clarté et sincérité des Budgets annexes Fonds secrets
les dépenses de l’Etat opérations budgétaires SEGMA Fonds de concours
doivent être intégrées Contrôle parlementaire Comtes spéciaux du
dans le budget sans évitant toute trésor
aucune compensation dissimulation d’une Rétablissement de
- La non affectation dépense derrière une crédits
recette
La spécialité Les crédits sont Contrôle Le transfert de crédits Le virement de crédits
spécialisés par chapitre parlementaire : les (changement du (changement de la
crédits ne sont pas service responsable de nature de la dépense)
examinés par masse la dépense)
mais par unité
Source : Mohammed SBIHI, Précis de gestion budgétaire, 2007, p.41

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Thèmes des travaux de recherche par groupe
1. Note de présentation du projet de la Loi de Finances ;

2. Rapport économique et financier ;

3. Rapport sur les Etablissements et Entreprises Publics ;

4. Rapport sur les Services de l'Etat Gérés de Manière Autonome ;

5. Rapport sur les Comptes Spéciaux du Trésor ;

6. Rapport sur les dépenses fiscales ;

7. Rapport sur la Dette Publique ;

8. Rapport sur le Budget axé sur les résultats tenant compte de

l'aspect Genre ;

9. Rapport sur les Ressources Humaines ;

10. Rapport sur la Compensation ;

11. Rapport sur le foncier public mobilisé pour l'investissement ;

12. Note sur la répartition régionale de l'investissement ;

13. Note sur les dépenses relatives aux Charges Communes.

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