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UNIVERSITE CATHOLIQUE DU CONGO, “UCC”

Faculté de Droit

Cours
de

FINANCES PUBLIQUES
2ème année de Licence LMD

(Introduction Générale – Plan détaillé – Bibliographie et Conclusion)

Par

Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU

Docteur d’Etat en Droit Economique


Professeur des Universités Congolaises (RDC, RC)
Professeur invité des Universités européennes
(Paris 1- Panthéon Sorbonne, Saint Etienne, Luxembourg GB)
Doyen Honoraire

Année académique 2022 – 2023

OBJET DU COURS
2
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Les finances publiques sont étudiées dans leur globalité en


tenant compte de leur pluridisciplinarité, au carrefour de
phénomènes juridiques, politiques, économiques et sociétaux.

Le cours est construit autour de la problématique générale des


interventions financières de l’Etat et autres personnes morales
publiques (collectivités publiques) par les moyens classiques
(fiscalité et parafiscalité) et modernes (trésorerie, emprunt,
dépenses publiques), et leur planification dans le temps à
travers le budget (processus d’élaboration, d’exécution et de
contrôle de l’utilisation des deniers publiques).

SYNTHESE DU COURS
« Les finances publiques sont régulièrement au cœur de
l’actualité politique et économique, et ce n’est pas nouveau :
l’Etat n’a cessé de rechercher les moyens de financer son
action en levant l’impôt et en organisant ses dépenses. Mais
en ce début de XXI siècle, les finances publiques Congolaises
comme celle de la plupart des Etats sont en pleine mutation et
doivent relever de nombreux défis. Défi de l’orthodoxie
budgétaire et de la maîtrise des dépenses publiques, crise
économique et financière oblige. Défi de la « soutenabilité »
de la dette en dépit de l’atteinte du point d’achèvement de
l’initiative des pays pauvres très endettés (IPPTE). Défi de la
transparence aussi, dans la gestion publique et vis-à-vis des
citoyens, défi de la corruption et des détournements de
deniers publics auquel le vote de la loi n°11/011 du 13 juillet
2011 relative aux finances publiques tente d’apporter des
éléments de réponse ».

Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU


Professeur des Universités
3
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

INTRODUCTION

Les finances publiques apparaissent souvent à beaucoup comme une matière qui traite peu des
préoccupations quotidiennes de chacun d'entre nous. La matière est réputée difficile et complexe. La
matière, il faut le reconnaître, ne jouit pas d’une très bonne image dans le public en général, chez les
étudiants en particulier, étant trop souvent pour beaucoup synonyme d’aridité, de techniques compliquées.
Les finances publiques traitent cependant des problèmes familiers intéressant notre vie quotidienne ; l’on
pense ici aux actes que nous posons en rapport notamment avec le paiement des impôts, les souscriptions
aux emprunts et aux certificats du Trésor, l’envoi du courrier, l’introduction d’une action en justice, la
perception des prestations sociales, qui relèvent indiscutablement des finances publiques.

I. NOTIONS ESSENTIELLES – DOMAINE DES FINANCES PUBLIQUES

D’emblée, il faut préciser que dans le domaine des Finances Publiques, l’histoire, la politique et
l’économie sont liées. Historiquement, les finances publiques « modernes » ont succédé aux finances
publiques « classiques », modifiant les conceptions économiques et la répartition du pouvoir budgétaire 1.

A. Finances publiques et institutions financières

1) Finances Publiques et Institutions financières

On a souvent tendance à confondre les finances publiques avec les institutions financières. Celles-
ci sont en fait des structures mises en place pour gérer les affaires financières.

Cependant, pour clarifier la notion de Finances publiques, il faut partir du terme « finance ». Le mot
« finance » a toute une histoire et revêt un sens ambivalent. Au sens ancien, finance dérive du verbe finer
qui signifie payer. Finance a ainsi pour synonyme paiement et désignait ressource pécuniaire. Au sens
moderne, la signification dépend de l’utilisation du mot et varie selon que l’article est au singulier ou au
pluriel. La finance (au singulier) désigne la bourse des valeurs. La bourse des valeurs est le lieu où
s’échangent, par l’intermédiaire des sociétés en bourse, des valeurs mobilières (actions et obligations). Les
finances (au pluriel) désignent l’ensemble des ressources et dépenses de l’Etat. Autrement dit, il s’agit des
activités de l’Etat dans le domaine de l’argent. Par ailleurs, c’est aussi la science régissant cette activité.
Si le mot finance désigne les affaires d’argent, de paiement, l’expression « institutions financières »
serait plus vaste que celle de finances publiques car elle englobe l’ensemble des mécanismes de
financement public et privé des activités économiques.
Il faut signaler que le terme finance a un sens plus profond chez les anglo-saxons.

1
CHANTAIL (C) : Finances Publiques, Paris, Edition Paradigme. Centre de publications universitaires, Manuel 2004-
2005, 6e édition, 2004.
4
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« Fine » en anglais veut dire, couramment, « beau », notamment en parlant du temps qu’il fait. Il veut
aussi dire « une pénalité », c’est-à-dire « une amende » payée à la suite d’une contravention ou infraction à
une loi.
Par extension, l’ensemble de « fines » ou « finance » a désigné l’ensemble du butin pris par un
conquérant sur un ennemi et donc par un souverain sur les vassaux soumis. Le mot anglais « finance » est
repris en français avec le sens noble qu’il a aujourd’hui. C’est ainsi que le verbe « financer » a pris la place
de l’ancien verbe « finer », qui n’était rien d’autre qu’une altération de « finir ».

2) Finances publiques
Pendant longtemps, l’enseignement des finances publiques a été exclusivement juridique. Il
s’agissait d’étudier les règles administratives et constitutionnelles auxquelles doivent se plier l’Etat et les
autres personnes publiques. Les Finances regroupaient le droit budgétaire (règles d’élaboration et de vote
du Budget), le droit de la comptabilité publique (règles d’exécution des dépenses et recettes publiques), le
droit fiscal (règles d’établissement, de recouvrement et de contrôle de l’impôt), enfin le droit applicable à
l’émission d’un emprunt.
Au fur et à mesure que le budget deviendra un outil d’intervention en matière économique et sociale,
la conception purement juridique des finances publiques s’avèrera insuffisante. Ainsi une place de plus en
plus importante est accordée à ses aspects économiques. On s’intéresse notamment à l’impact des
finances publiques en matière économique, par exemple l’effet productif ou improductif des dépenses
publiques, l’utilisation du déficit budgétaire, les effets de la fiscalité sur le comportement des agents
économiques 2. Aujourd’hui l’enseignement des finances publiques revêt à la fois un aspect juridique très
important, en raison de la constitutionnalisation du droit budgétaire et du développement des contraintes
internationales, et aussi un aspect économique considérable compte tenu de l’importance des
prélèvements publics constatés dans la plupart des pays.
Les finances publiques désignent ainsi une double réalité : c’est à la fois un secteur de la réalité de
la vie sociale et une discipline scientifique.

B. Domaine des finances publiques

Dans le domaine des finances, l’histoire, la politique et l’économie sont liées. Historiquement, les
finances publiques « modernes » ont succédé aux finances publiques « classiques », modifiant les
conceptions économiques et la répartition institutionnelle du pouvoir budgétaire. Le glissement de la
période classique à la période moderne date de l’entre-deux-guerres. Il correspond au passage d’un
système libéral, où le budget est économiquement neutre et la procédure budgétaire dominée par le
Parlement, à un système interventionniste, dans lequel le budget influence l’économie et la matière
budgétaire est contrôlée par l’exécutif.

2
Bertoni (P.) : Finances Publiques – L’essentiel du Cours, Paris, Librairie Vuibert, 2001, op. cit. p.4.
5
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Comme on peut le constater, les finances publiques comme discipline scientifique ont pour objet
l’étude des moyens et techniques dont disposent les personnes morales publiques pour se doter des
ressources destinées à couvrir les dépenses nécessaires au fonctionnement de l’Administration de l’Etat et
à l’accomplissement de ses missions.
Le domaine des finances publiques n’est pas aisé à circonscrire. Pendant longtemps, l’étude des
finances publiques s’est limitée aux problèmes financiers des personnes publiques. Parmi celles-ci, l’Etat
occupait, et occupe encore, la place centrale.
Cependant, il ne faut pas confondre les finances publiques ni avec les finances de l’Etat, ni même
avec les finances des personnes publiques. Elles s’intéressent certes à l’Etat, mais également aux
collectivités territoriales, aux établissements publics et aux organismes internationaux et de plus en plus à
des organismes privés chargés des missions de service public tels les ONG. Ce sont, en effet, la notion de
service public et celle connexe de prérogatives de puissance publique qui donnent à la matière sa raison
d’être et son unité.
Pour délimiter le domaine des finances publiques, il faut en comprendre la logique et les distinguer
des finances des personnes purement privées. La logique des finances publiques a évolué suivant les
époques.

1) Les finances publiques classiques 3

Pour assurer le fonctionnement de l’Etat, des dépenses sont nécessaires : il faut payer les
fonctionnaires et les fournisseurs, entretenir les locaux et le matériel, distribuer des subventions et des
secours. Comment l’Etat va-t-il couvrir ces dépenses ? La réponse à cette question forme l’objet même de
la science des finances publiques dans sa conception traditionnelle. En la cherchant, on s’aperçoit
immédiatement que les ressources de l’Etat sont toujours tirées d’un prélèvement sur les citoyens. La
science des finances consiste donc, en dernière analyse, à répartir entre ceux-ci le poids des dépenses
publiques. La portion supportée par chacun s’appelle charge publique.
Dans la notion classique, la définition complète des finances publiques est donc la suivante :
« Science des moyens par lesquels l’Etat et les autres collectivités publiques se procurent et utilisent les
ressources nécessaires à la couverture des dépenses publiques, par la répartition entre individus des
charges qui en résultent ».
Cette définition correspond à la conception classique du domaine des finances publiques. En effet,
l’étude de la science des finances publiques est liée à l’ensemble de la philosophie politique dominante de
l’époque classique. Dans la conception classique, l’Etat devait avoir un rôle limité au maintien de l’ordre :
sécurité intérieure et extérieure, police, justice, défense nationale. Il devait s’occuper des tâches purement
administratives, car on estimait que la meilleure manière d’assurer le profit économique de la société

3
Pour plus de détails, voir M. DUVERGER, Finances Publiques, Paris, P.U.F., Coll. Thémis, 11e édition 1988, p, 14 à
15.
6
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consistait à privilégier l’initiative privée, la concurrence économique, l’Etat devant s’abstenir de toute activité
économique propre. La conséquence sur le plan financier est la limitation de l’objet de la science financière.

2) Les Finances Publiques modernes

La première transformation de la notion classique de finances publiques a consisté à dissocier les


moyens des buts : au fur et à mesure de la substitution de l’interventionnisme au libéralisme, on s’est
aperçu en effet que les techniques financières constituaient pour l’Etat des procédés très efficaces
d’intervention, notamment dans le domaine économique et social, en dehors de toute idée de couverture
des dépenses publiques 4. Ceci a conduit à un élargissement notable du domaine de la science des
finances tels que le définissaient les financiers classiques.
Du même coup, la définition des finances publiques est devenue beaucoup moins précise. On
pourrait dire qu’elle est dans la conception moderne : « la science qui étudie l’activité de l’Etat en tant qu’il
emploie des techniques particulières, dites techniques financières : dépenses, taxes, impôts, emprunts,
procédés monétaires, budget, etc. C’est uniquement une définition par les moyens, les buts n’étant pas
différents de ceux qu’on reconnaît à l’activité de l’Etat en général 5.
Au plan conceptuel, on peut dire qu'à la doctrine classique de l’Etat libéral, s’est succédé au 20 e
siècle celle de l’Etat interventionniste avec pour idée centrale la sauvegarde d’un certain équilibre général
dans la société. On a abouti ainsi à un bouleversement, la tâche de la dépendance publique n’est plus
essentielle. Le capitalisme moderne est un système économique caractérisé par la propriété privée des
moyens de production, le rôle de marché où s’exerce une concurrence entre les agents économiques,
l’importance de l’initiative individuelle (qui n'exclut pas totalement le rôle de l’Etat) et la recherche et le
réinvestissement systématique. L’Etat doit utiliser ses moyens et pouvoirs pour assurer cet équilibre.
Il faut souligner cependant la parenté profonde entre les deux conceptions. En effet, on a constaté
en définitive que toute la politique économique et sociale de l’Etat moderne, dont la politique financière n’est
qu’un des aspects, a pour but d’établir un équilibre social complet, une sorte de « plein équilibre » qui
dépasse en l’englobant la vieille notion d’équilibre budgétaire. Equilibre de la production et des échanges,
équilibre de la répartition des biens et des risques sociaux, équilibre de la monnaie et des prix, équilibre
général du développement de la nation, équilibre des échanges extérieurs, tels sont les buts essentiels de
l’intervention par des techniques financières en particulier.

4
DUVERGER (M.) : op. cit. p.18
5
Ib. : op. cit. p.18
7
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II. EVOLUTION DES TECHNIQUES DE FINANCES PUBLIQUES

Cette évolution parallèle au domaine concerné se caractérise par un ensemble de modalités


techniques.

A. Modalités techniques limitées des finances publiques classiques

Les financiers classiques s’ingéniaient à trouver des méthodes susceptibles de garantir les
dépenses administratives. Ils inventèrent à cet effet un certain nombre de procédés visant un double
objectif :
- d’une part, trouver suffisamment de ressources pour couvrir les dépenses ;
- d’autre part, trouver un ensemble des moyens équilibrés de dépenses.

1) Finances publiques comme science de la couverture des dépenses publiques


Il s’agit de la mise sur pied de procédés ayant pour but de couvrir les dépenses, à savoir les
impôts, taxes et autres moyens de trésorerie. Le budget de l’Etat n’avait ici d’autres fins que d’équilibrer les
dépenses et les recettes. Comme on le verra, ces techniques ont aujourd’hui un rôle transformé.

2) Finances publiques, science de la répartition des charges


Les financiers classiques cherchaient à trouver des solutions pour obtenir un rendement maximum
en même temps qu’une égalité entre les assujettis. Aussi, d'un taux unique de l’impôt pour une égalité de
traitement des contribuables comme premier objectif, on a glissé ensuite vers la proportionnelle pour enfin
opter pour la personnalisation de l’impôt.

B. Progrès de la technique dans les finances publiques modernes


Dans les finances publiques modernes, les techniques ne tendent plus à trouver les moyens de
couverture de dépenses et recettes mais au contraire les meilleures méthodes d’intervention de l’Etat par
les prélèvements discriminatoires non justifiés par les dépenses publiques. Ainsi, l’élargissement de l’objet
a entraîné celui des techniques. Cette conception moderne des finances publiques est le reflet de
l’évolution du système économique capitaliste. Les finances classiques correspondaient au capitalisme
libéral du 19ème siècle ; les finances modernes correspondent au néocapitalisme du 20 ème siècle où l’Etat
dispose des pouvoirs d’intervention et de planification sur l’ensemble de l’économie, où un secteur public
important s’est développé à côté du secteur privé, qui actuellement a pris le pas sur le premier au nom de la
mondialisation financière. Mais l’intervention de l’Etat se manifestera toujours au plan de l’orientation à
donner malgré le mouvement accéléré de déréglementation de l’activité économique.
8
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III. AUTONOMIE DE LA SCIENCE DES FINANCES PUBLIQUES

Les phénomènes financiers publics sont toujours des phénomènes complexes; l’on entend par-là
qu’ils sont le produit d’interactions de tous ordres, faisant intervenir une grande variété de structures et
d’acteurs, ce qui les rend très sensibles aux transformations qui s’opèrent au sein des sociétés. Une telle
hétérogénéité et une telle complexité qui exigeraient une appréhension globale et la mise en œuvre d’une
grande variété de savoir, impliqueraient un travail commun de chercheurs appartenant aux disciplines les
plus diverses. C’est aussi là un des obstacles au développement d’une science financière autonome. En
effet, plusieurs disciplines concourent à la constitution d’une science des finances publiques, ce qui a fait
dire à certains auteurs qu’il s’agit d’une discipline carrefour, un point de rencontre où viennent se retrouver
d’autres sciences.

A. Les sciences concourant à la réalisation de la science des Finances Publiques

Partant de l’évolution même des finances publiques, on peut facilement déceler un nombre
important de disciplines ayant des rapports ou concourant à la réalisation de la science des finances
publiques :
 L’histoire : celle-ci a une place particulière en raison des résistances que les administrations
financières ont toujours opposé aux changements et également de la lenteur avec laquelle les
systèmes fiscaux évoluent. De plus, le conflit entre finances classiques et modernes montre les
étapes de la réflexion en la matière.
 La sociologie : l’apport de la sociologie principalement la sociologie politique a permis de préciser
certaines notions financières, telle que celle de dépense publique. Les finances publiques sont
adaptées à l’environnement social, politique et économique.
 La psychologie : celle-ci permet notamment l’analyse du phénomène de confiance, essentiel en
matière de crédit public (l’emprunt d’Etat n’est possible que si les citoyens font confiance à
l’emprunteur qui est l’Etat à travers ses dirigeants) et la compréhension des réactions du contribuable
devant les prélèvements fiscaux.
 La statistique: elle permet une meilleure vue des phénomènes financiers, ceux-ci se traduisant, pour
la plupart, par des chiffres. En effet, l’établissement des prévisions financières se fonde sur l’étude
des statistiques.
 Les relations internationales et le droit international. Aujourd’hui, il est un fait accepté par tous : les
finances internationales influencent fortement les finances internes et, parfois, les règles
internationales se substituent aux lacunes du droit interne.
Mais outre ces disciplines, il en est trois qui tiennent une place particulièrement importante : le droit,
l’économie et la science politique. Ces trois disciplines se chevauchent.
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B. Rapports entre Finances publiques et Droit

D’emblée, il faut préciser que les finances publiques se situent au centre des enseignements de
Droit public. Les liens entre les finances publiques et le droit public sont tellement étroits que, pendant
longtemps, ils empêchèrent les finances publiques de se constituer en une discipline autonome. Les
Finances publiques étaient considérées comme une branche du droit public, d’où l’expression « législation
financière ». Progressivement, elles se sont dégagées de l’emprise du droit public à travers ses deux
branches principales, le droit constitutionnel et le droit administratif.

1) Finances publiques et Droit constitutionnel

Les liens entre les finances publiques et le droit constitutionnel apparaissent tantôt par la soumission
des mécanismes financiers aux règles constitutionnelles (la perception de l’impôt doit faire l’objet d’une
autorisation législative annuelle, institution de la procédure du vote des lois de finances, bases de la
répartition des impôts dans les Etats à structures fédérales), tantôt par l’influence exercée par les
phénomènes financiers sur l’équilibre constitutionnel (les considérations financières jouent fortement sur la
répartition des pouvoirs entre l’Etat fédéral et les Etats fédérés). De même l’équilibre entre l’exécutif et le
législatif est commandé par la répartition financière entre ces deux pouvoirs. De façon générale, les
pouvoirs du Parlement dans les régimes parlementaires de type britannique sont dus à sa maîtrise sur le
budget.

2) Finances publiques et Droit administratif


Du 19e au milieu du 20e siècle, les finances publiques constituaient encore un chapitre du droit
administratif tel que le révèlent les écrits de Sarigny publiés en 1954.
Quand bien même aujourd’hui, les finances publiques auraient acquis une indépendance par
rapport au droit administratif, elles gardent encore des liens étroits avec le droit administratif qui se
manifestent particulièrement du fait de :
 l’emprunt des règles du droit administratif, par exemple les règles en matière de contentieux fiscal ;
 l’influence grandissante de l’Inspection Générale des Finances qui déborde largement le domaine
de la gestion des finances publiques pour s’étendre à l’administration toute entière 6.

C. Rapports entre Finances Publiques, Science Economique et Science Politique

Pour les financiers classiques, les finances publiques étaient essentiellement de nature
administrative et comptable. Elles posaient surtout des problèmes juridiques d’aménagement des pouvoirs

6
BIBOMBE, ( M.), Eléments de Finances Publiques, Kinshasa, Ed. BIOMETRIX, 1993, p.56.
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des autorités de l’Etat, et des problèmes techniques d’organisation des impôts et de tenue de la
comptabilité.

Pour les financiers modernes, les finances publiques ont un caractère différent et leur objet est plus
vaste ; elles sont à la fois une branche de la science économique et une branche de la science politique.

1) Les Finances Publiques, branche de la Science Economique7


Les moyens financiers sont essentiellement employés par l’Etat pour réaliser des interventions
dans le domaine économique : régulation de la production et des échanges, équilibre des prix, égalité dans
la distribution, maintien du pouvoir d’achat de la monnaie… Ils sont intégrés dans les mécanismes de
l’économie et aménagés en fonction de ceux-ci. Les finances publiques tendent à devenir ainsi, sous un
certain aspect, une branche de l’économie financière. L’économie financière aurait ainsi absorbé
entièrement la science des finances.
Mais, si étroits que soient les liens qui unissent ces deux disciplines, on ne saurait les confondre,
leurs objectifs étant différents.
 L’économie financière étudie les phénomènes financiers sous leur aspect global : elle analyse les
« flux financiers ». Ainsi, recherche-t-elle les effets du prélèvement fiscal sur l’économie ou les
conséquences du déséquilibre budgétaire sur la conjoncture économique ou encore les
répercussions des dépenses publiques d’investissement sur la croissance économique.
 Les finances publiques, au contraire, étudient le mécanisme des opérations financières
individuelles, recherchent les règles suivant lesquelles doit être assis un impôt, déterminent les
voies de recours ouvertes à un contribuable et définissent les techniques de contrôle d’une
opération de dépenses. On l’a dit ci avant, les règles juridiques y tiennent une large place.
Cependant, ces opérations financières ne pourraient être bien comprises si elles n’étaient
replacées dans leur environnement économique qui, seul, peut leur donner pleine signification.
Ainsi, les liens entre l’économie et les finances demeurent étroits ; il est impossible de les séparer
totalement. Ici encore, on doit constater que les données économiques conditionnent les opérations
financières mais aussi que les opérations financières influent sur l’économie. Si la science économique est,
comme on l’a affirmé parfois, la science de la richesse, il est normal que les finances publiques, qui
constituent une fraction de cette richesse, soient conditionnées par l’économie.

2) Les Finances Publiques, branche de la Science Politique


On ne peut réduire cependant les finances publiques modernes à cet aspect économique, si
important soit-il. Tout d’abord, ce n’est pas seulement dans le domaine économique que se produisent les
interventions de l’Etat au moyen des techniques financières : on les rencontre aussi dans le domaine social
(égalisation des revenus), familial (aide à la natalité), intellectuel (subventions aux activités artistiques ou
éducatives) et même très spécifiquement politique (fonds secrets). Ensuite, même dans le domaine
économique, l’Etat ne poursuit pas seulement des objectifs économiques : il agit en fonction du bien-être et
du développement de la communauté nationale dans son ensemble, dont le développement économique
n’est qu’un aspect.
L’utilisation des techniques financières pose essentiellement, en réalité, des problèmes de science
politique. Ces techniques financières sont des formes particulières de l’autorité publique, des
7
LLAU (P) : Economie financière, Paris, P.U.F., Coll. Thémis, 1985.
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aménagements spéciaux du pouvoir de l’Etat; pouvoir et autorité qui sont les objets mêmes de la science
politique8.
Les Finances Publiques sont ainsi une branche de la Science Politique : c’est sous cet angle qu’on
peut les appréhender dans leur totalité, et non pas en saisir seulement un aspect particulier.
En définitive, les Finances publiques sont ainsi à la fois une discipline juridique, une discipline
économique et politique. Cependant, il faut admettre que c’est une discipline autonome qui emprunte à
d’autres sciences.

IV. PLAN DU COURS

Deux parties composeront cet enseignement.


La première partie présentera les moyens d’action financier de l’Etat impliquant d’une part, de
préciser le phénomène financier (Titre I) à travers ses acteurs (chapitre I) et le cadre juridique (chapitre II)
ainsi que les principales ressources publiques (Titre II) qui sont constituées de ressources permanentes
(chapitre I), ressources temporaires (chapitre II) et ressources exceptionnelles (chapitre III).
La deuxième partie est consacrée à la planification de l’action financière de l’Etat à travers le
budget. Ainsi, seront examinées, dans un premier temps, la notion du budget de l’Etat (Titre I) précisant les
différentes catégories des lois de finances (Chapitre I) et les principes qui l’encadrent (Chapitre II).

8
DUVERGER (M.), Sociologie Politique, Paris, P.U.F., Coll. « Thémis », 1973, p.23-26 et surtout 163-193.
12
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PREMIERE PARTIE : LES MOYENS D’ACTION FINANCIERS DE L’ETAT

Il est intéressant, dans un premier temps, d’expliciter le phénomène financier


avant d’examiner les moyens d’action financière de l’Etat constitués principalement,
d’une part, par les dépenses publiques, et d’autre part, par les ressources publiques.

TITRE I : LE PHENOMENE FINANCIER

Il faut partir de la notion de deniers publics pour comprendre le phénomène


financier. En effet, les deniers publics occupent une place centrale en finances
publiques. Le dictionnaire Littré précise, au XIXe siècle, que le denier est une monnaie
romaine d’argent. Le terme s’est répandu avec la langue latine et finit par désigner
l’argent au sens large. Il désigne aujourd’hui, de manière abstraite, l’argent et c’est en
ce sens qu’il faut comprendre le terme « Deniers publics ». Au sens large, il s’agit bien
de l’argent public. Ce terme peut désigner aussi l’ensemble des Fonds et valeurs
possédés par les administrations publiques.
L’intérêt d’identifier la notion des deniers publics réside dans le fait que les
deniers publics sont soumis à un régime juridique particulier. Ils sont insaisissables et
ne peuvent être manipulés que par un comptable public. Les comptes relatifs aux
deniers publics sont, quant à eux, soumis à la juridiction de la Cour des Comptes.

CHAPITRE I : LES ACTEURS DU PHENOMENE FINANCIER

Trois éclairages permettent d’observer les acteurs du phénomène financier. Le


premier entend souligner les problématiques les plus essentiels des administrations
publiques (section 1). Le deuxième éclairage présente les acteurs de terrain
intervenant dans le cadre de l’exécution du budget, qu’il s’agisse des ordonnateurs, des
comptables ou des gestionnaires de crédits. Ils sont alors soumis à des régimes
juridiques très différents et relèvent de responsabilités spécifiques appréciées par des
juridictions particulières (section 2). Le dernier éclairage porte sur les institutions
indépendantes qui interviennent dans le champ des finances publiques, notamment par
la Cour des Comptes (section 3).
13
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Section 1. Les administrations publiques

L’Etat occupe une place centrale en finances publiques. Cette place est justifiée
par sa prépondérance dans l’organisation institutionnelle. Ensuite viennent les
collectivités territoriales bénéficiant de l’autonomie financière telles que les provinces et
les entités territoriales décentralisées.
L’Etat et les collectivités territoriales ont créé des structures administratives
chargées de la perception des recettes. Il s’agit des régies financières.

§1. Les administrations financières relevant du pouvoir central

Le système fiscal congolais est placé sous l’autorité du ministre des finances ; il
est organisé en trois administrations financières.

A. La Direction Générale des Impôts (DGI)

Cette Régie financière a été créée par l'ordonnance n°88/039 du 10 mars 1988,
modifiée et complétée par le décret n° 17/2003 du 02 mars 2003 et le décret n° 11/43
du 22 novembre 2011. Elle a pour mission la gestion, le recouvrement et le contrôle des
impôts cédulaires sur les revenus (impôts sur les revenus locatifs, impôts sur les
revenus mobiliers, impôts sur les rémunérations, impôts sur les bénéfices et profits), de
l’impôt sur le chiffre d’affaire (TVA) à l’intérieur, des impôts réels (impôts sur les
propriétés bâties et non bâties, sur les véhicules, sur les concessions minières et
d’hydrocarbures).

B. La Direction Générale des Douanes et Accises (DGDA)

Cette régie a été instituée par Décret n° 09/43 du 03 décembre 2009 portant
création et organisation de la Direction Générale des Douanes et Accises, en sigle «
D.G.D.A. » en remplacement de l’ancien Office des Douanes et Accises, « OFIDA » en
sigle. Son cadre organique est fixé par le Décret n° 11/06 du 25 janvier 2011. Elleest
chargée de la gestion, du recouvrement et du contrôle des droits de douane, de l’impôt
sur le chiffre d’affaires (TVA) aux frontières et sur les importations et des droits
d’accises.

C. La Direction Générale des Recettes Administratives, Judiciaires,


Domaniales et de Participations (DGRAD)

Cette administration financière a été instituée par le Décret n° 0058 du 27


décembre 1995. Elle assure la gestion, le recouvrement, le contrôle de taxes et
redevances diverses. Il est à préciser que les recettes « à caractère national » ne sont
pas déterminées à l’avance. La DGRAD bénéficie d’une rétrocession représentant 10%
des recettes encaissées dont la moitié est transférée aux services d’assiette. Pour les
14
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redevances minières et forestières, 40% sont déjà ventilés à hauteur de 25% pour la
province et 15% au profit de l’entité où se réalise l’exploitation.

§2. Les administrations financières provinciales

Elles ont été créées, de manière informelle, par les exécutifs provinciaux dans le
cadre de la décentralisation fiscale. Leurs dénominations sont diverses : Direction
Générale des Recettes de Kinshasa, « DGRK » ; Direction Générale des Recettes du
Kasaï Occidental, « DGRKOC » ; Direction Générale des Recettes du Katanga,
« DGRKAT » ; Régie Provinciale d'Encadrement et de Recouvrement des Recettes de la
Province du Kongo-Central, « REPERE » ; Direction Générale des Recettes du Maniema,
« DIREMA » ; Direction Générale des Recettes du Nord-Kivu, « DGR-NK » ; etc.

Section 2. Les acteurs, leurs missions et leurs régimes

§1. Les acteurs de l’exécution budgétaire : les ordonnateurs et les


comptables.

Par acteurs, il faut faire ici la distinction entre les acteurs de l’exécution
budgétaire et les responsabilités encourues.

A. L’ordonnateur

L’ordonnateur est juridiquement défini comme étant la personne habilitée à


déclencher des moyens financiers pour le compte de l’Etat. Les ministres sont les seuls
ordonnateurs principaux des recettes et des dépenses du budget général, des budgets
annexes et des comptes spéciaux, pour les crédits mis à leur disposition.

B. Le comptable

Le comptable est autant une fonction qu’un statut. Les comptables publics sont
des agents de droit public. Leurs missions sont : maniement, comptabilisation et
contrôle des fonds et valeurs.

C. Régime des responsabilités.

Ces acteurs publics sont soumis à des responsabilités particulières. Dès lors que
les comptables et les ordonnateurs exercent des fonctions différentes, ils sont soumis à
des régimes juridiques différents. Au-delà des principes des rigorismes affichés, la
responsabilité personnelle et pécuniaires des comptables autant que la responsabilité
des ordonnateurs présentent des limites à l’heure actuelle.
15
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

§2. Les acteurs du contrôle de l’exécution budgétaire

Les acteurs du contrôle de l’exécution budgétaire sont le Ministère des Finances


(Direction de l’Audit et Contrôle de Gestion), l’Inspection Générale des Finances et la
Cour des Comptes. Nous reviendrons plus tard sur les rôles dévolus à tous ces acteurs
dans le contrôle de l’exécution du budget.

Section 3 : Les institutions indépendantes participant au phénomène


financier

A côté des administrations publiques et des acteurs mettant en œuvre les


mouvements financiers, certaines institutions participent au phénomène financier. Il
s’agit de la Cour des Comptes, de la Banque Centrale du Congo et du Conseil Supérieur
du Portefeuille. Institutions sur lesquelles on reviendra plus loin.
16
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

CHAPITRE II : LE CADRE JURIDIQUE DU PHENOMENE FINANCIER

Le droit public financier est ancré au sein du droit public. Les différentes
constitutions de la République posent des principes fondateurs, mais aussi, un corpus
juridique figurant dans des lois organiques. Ce corpus est complété par des dispositions
législatives.

Section 1. La constitutionnalisation du droit public financier

La Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 —


telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011— consacre dans les
dispositions de l’article 175, la clef de répartition des recettes et des dépenses de l’Etat
en ces termes : « Le budget des recettes et des dépenses de l’Etat, à savoir celui du
pouvoir central et des provinces, est arrêté chaque année par une loi. La part des
recettes à caractère national allouées aux provinces est établie à 40%. Elle est retenue
à la source. La loi fixe la nomenclature des autres recettes locales et la modalité de leur
répartition ».

Section 2. Les sources législatives et réglementaires des finances publiques

Elles proviennent du cadre législatif et réglementaire en vigueur. Ce cadre est


déterminé dans ses grandes lignes par :
 la loi n° 11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques (LOFIP) ;
 le décret n° 13/050 du 06 novembre 2013 portant Règlement Général sur la
Comptabilité Publique (RGCP) ;
 le décret n° 13/051 du 08 novembre 2013 portant Plan Comptable de l’Etat
(PCE) ;
 le Décret n° 13/054 du 11 Novembre 2013 portant règlement d’Administration
applicable aux Comptables Publics ;
 l’Ordonnance 20/017 du 27 mars 2020 fixant les attributions des Ministères ;
 le Décret n°056/2002 du 12 avril 2002 réglementant le paiement des dépenses
de l’Etat, tel que modifié et complété par le Décret n° 011/20 du 14 Avril 2011 ;
 la Convention du caissier de l’Etat du 20 janvier 2004 ;
 l’Arrêté ministériel n° 013/ME/MIN.FP/2017 du 04 août 2017 portant agrément
provisoire du cadre et structures organiques du Secrétariat Général aux Finances.
17
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

TITRE II : LES INSTRUMENTS D’INTERVENTION FINANCIERS : LES DEPENSES


ET LES RECETTES PUBLIQUES

SOUS-TITRE 1 : LES DEPENSES PUBLIQUES

Les dépenses publiques ont pour but d’assurer la marche des services publics et
l’existence même de l’Etat.

CHAPITRE I : NOTION DE DEPENSES PUBLIQUES

La dépense publique est avant tout une intervention publique au sens large : il
s’agit de la prise en charge financière d’une politique initiée par une personne publique.
Il peut s’agir de construire des écoles, des routes, des hôpitaux et, également,
d’accorder des subventions à des organismes publics ou privés.
La notion de dépenses publiques a évolué avec la conception des finances
publiques. Si le principe fondamental de l’équilibre budgétaire tend à être aujourd’hui
abandonné au profit soit du déficit soit de l’excédent budgétaire (on y reviendra plus
loin), c’est en grande partie à cause de la conception nouvelle qu’on se fait des
dépenses publiques, dans leur définition externe (par rapport aux dépenses privées) et
surtout dans leur nature interne qu’il faudra préciser et leurs implications au plan
économique.

Section 1. Notion juridique de la dépense publique

On peut définir juridiquement la dépense publique comme étant celle réalisée par
une personne morale publique dans le cadre du pouvoir de commandement. Cette
définition présente néanmoins des limites car certaines dépenses réalisées par des
personnes privées peuvent revêtir le caractère public en raison de la pluralité des
bénéficiaires de la dépense. Par exemple, la réalisation des travaux sur une avenue par
rassemblement des cotisations des résidents.
En définitive, la définition juridique est complétée par l’approche socio-politique et
principalement de la sociologie politique qui distingue dans une société les gouvernés
des gouvernants.
18
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

§1. Définition classique des dépenses publiques

A. Contenu de la définition

Pour les financiers classiques, les dépenses publiques sont les dépenses des
collectivités publiques. Par collectivités publiques, on désigne l’Etat et les collectivités
locales dotées de la personnalité morale.

Autrement dit, ce qui donne à une dépense le caractère public, c’est la qualité
juridique de l’auteur de la dépense, le fait qu’il s’agit d’un organe ou d’une institution
publique. Le vocable de collectivité publique est synonyme en somme du terme
« personne morale publique ». Toutes les dépenses des collectivités publiques sont des
dépenses publiques, tandis que toutes les dépenses des particuliers et des collectivités
privées (association, société etc.,) sont des dépenses privées. C’est donc la nature
juridique d’une collectivité, son caractère de personne morale publique, qui définit la
dépense publique.

B. Limite de la définition

Cette définition correspondait à la théorie libérale de l’Etat au 19 e siècle, ce qui,


bien entendu, n’est plus le cas aujourd’hui lorsque l’Etat devient lui-même commerçant.
Ainsi, il est difficile de distinguer s’il s’agit d’un intérêt général ou privé. On le voit, sous
toutes ces facettes, la distinction entre dépenses publiques et privées paraît bien
complexe.

§2. Définition moderne des dépenses publiques

Il convient de préciser d’emblée que c’est le progrès réalisé dans le domaine de la


sociologie (politique) qui a permis de compléter la définition juridique par une définition
correcte des dépenses publiques : les dépenses publiques ne sont plus toutes les
dépenses des personnes morales publiques.

A. Caractères fondamentaux des collectivités publiques

La notion de dépenses publiques dépend d’abord du périmètre que l’on assigne à


l’espace public.
19
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

En République Démocratique du Congo, ces dépenses sont regroupées dans le


« compte administrations de la comptabilité nationale ». Le champ des administrations
publiques inclut deux composantes principales :

 Les administrations publiques centrales qui sont définies par une composante
nationale, c’est-à-dire l’Etat et ce qu’on appelle les ODAC – organismes divers
d’administration centrale – qui sont soit des établissements publics, soit des
établissements privés, financés majoritairement par des taxes affectées ou des
subventions de l’Etat.
 Les administrations publiques locales qui comprennent les collectivités locales, les
établissements publics locaux et ce qu’on appelle les ODAL – organismes divers
d’administration locale – qui produisent des services non marchands (centres
communaux d’action sociale, etc.).

B. L’apport de la sociologie politique

C’est ici qu’intervient l’apport de la sociologie politique qui opère une distinction
dans la société politique entre les gouvernants et les gouvernés. Les rapports entre ces
deux partenaires sont ceux de commandement pour les premiers et d’obéissance pour
les seconds. Les relations de commandement se présentent sous la forme d’actes
unilatéraux alors que les rapports entre gouvernés sont des relations de coopération. La
définition actuelle dérive de cette observation.

1) Définition sociojuridique

On a donc défini progressivement une nouvelle notion de dépense publique :

a) Principe : les dépenses publiques sont uniquement celles effectuées par les pouvoirs
publics et les collectivités publiques dans l’exercice de leur pouvoir de
commandement ;
b) Conséquences du principe : toutes les dépenses des collectivités publiques ne sont
plus des dépenses publiques. Il suffit qu’elles ne dérivent pas des pouvoirs publics. Il
en est ainsi de l’Etat industriel, agriculteur, commerçant ou d’une commune
commerçante.

2) Les catégories de dépenses publiques

La notion de dépenses publiques appelle, par ailleurs, une distinction entre plusieurs
types de dépenses, dont l’importance respective, la composition et l’origine contribuent à définir
20
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

le modèle politico-social de l’Etat. La classification économique des dépenses publiques


distingue à cet égard les dépenses de fonctionnement, les dépenses d’investissement ou
dépenses en capital, et également les dépenses de transfert.

Cette situation a amené certains auteurs à distinguer entre :

- les dépenses publiques proprement dites ; et


- les dépenses du secteur public, celles-ci étant toutes les autres dépenses.

Cependant, certaines dépenses des personnes privées peuvent devenir publiques


car de plus en plus, les personnes privées reçoivent l’autorisation d’user du pouvoir de
commandement momentané (dans l’intérêt général).

Section 2. Notion économique de la dépense publique

Ici encore, deux conceptions s’opposent: l’une développée par les auteurs
classiques, l’autre par les modernes. Les classiques estimaient que, du point de vue
économique, les dépenses publiques étaient les dépenses de consommation. Les
modernes, quant à eux, voient dans l’interventionnisme de l’Etat un moyen pour celui-ci
(Etat) de jouer son rôle de distributeur.

§1. La conception économique classique des dépenses publiques

L’attitude négative des classiques vis-à-vis des dépenses publiques dérivait de


leur philosophie du rôle des pouvoirs publics. Ceux-ci ne devaient pas intervenir dans le
domaine économique, sauf en des cas tout à fait exceptionnels.

A. Contenu de cette conception

Les financiers classiques pensaient que les collectivités publiques (collectivités


locales) ne sont que conservatrices des biens et services. En conséquence, leurs actes
de dépense constituaient des prélèvements sur l’ensemble des biens et services
disponibles de l’Etat. Ces actes concouraient ainsi à un appauvrissement économique
pour l’ensemble de la société. D’où les expressions utilisées de l’Etat-engloutisseur,
l’Etat-gouffre pour stigmatiser ces phénomènes.

B. Base socio-économique de cette conception

Au 19e siècle, les activités proprement productives de l’Etat étaient rares. Les
fonctions de l’Etat étaient réduites à des tâches purement administratives. Les dépenses
21
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

publiques se limitaient à celles faites pour le fonctionnement de services publics qui


étaient improductifs. Seule l’initiative privée enrichissait la société par l’accumulation des
biens et services. La conséquence qui en découle, c’est le mouvement de méfiance vis-
à-vis des pouvoirs publics. L’Etat n’assurait aucun type d’action.

Cet état d’esprit est dépassé à l’heure actuelle.

§2. La conception économique positive des dépenses publiques

Celle-ci est l’œuvre des financiers modernes qui estiment que les dépenses
publiques ne sont pas une simple destruction des richesses mais d’éventuels facteurs de
progrès économique et social. Les dépenses publiques sont au service de l’équilibre
économique pour assurer l’expansion économique grâce à la redistribution. C’est la
conception moderne de l’Etat redistributeur.

A. Dépenses publiques comme actes de redistribution9

Une fois de plus, la sociologie vient au secours des finances publiques. On


observe que l’Etat ou les collectivités locales ne sont pas des entités sui generis. L’Etat
n’existe pas en soi ; l’Etat, ce sont les hommes qui le composent et qui vivent sur un
territoire sous l’autorité d’un gouvernement. En tant que personne morale, un être
juridique, l’Etat ne peut pas consommer et ne peut pas dépenser. C’est le fonctionnaire,
le fournisseur de l’Etat qui dépense au moyen des sommes que l’Etat leur a remises et
qu’il a prises à d’autres individus.

Les dépenses des collectivités publiques peuvent être considérées comme des
dépenses des personnes physiques. Ainsi, ces dépenses sont renvoyées dans le circuit
économique. L’Etat est consommateur et distributeur parce qu’il (l’Etat) prélève ici et
réserve là-bas. L’Etat apparaît comme un intermédiaire.

B. Originalité de la redistribution

Il existe deux types de redistribution :

- l’un est analogue à l’acte de dépense des particuliers ;


- l’autre est original.

9
EUVRARD (F.) : « La redistribution des revenus par la fiscalité », projet, février 1952, cité par DUVERGER (M) : Op.Cit., p.73.
22
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

1) Assimilation à la dépense privée

Les actes des collectivités publiques dans leur gestion privée n’ont pas une
caractéristique propre.

Mais, qu’est-ce que donc la redistribution publique ?

- elle est sans contrepartie ;


- elle se fonde sur un système de solidarité sociale englobant toute la collectivité :
les ressources prélevées sur tel groupe social sont réservées à tel autre groupe
social. Exemple d’actes de redistribution : les subventions publiques aux
entreprises, aux associations, l’ensemble des secours public aux groupes en
difficulté.

La redistribution par l’Etat tend à jouer un rôle aussi bien économique


(subventions aux entreprises), social (sécurité sociale) que politique (promesses des
partis politiques).

2) L’Etat peut dépenser en vue de l’expansion économique directe

Ici apparaît la différence entre les conceptions classique et moderne. Les


financiers modernes ont démontré l’utilité directe et indirecte des dépenses publiques :

 Utilité indirecte :

Même les dépenses de consommation peuvent avoir un rôle économique positif


indirect au niveau productif, car ces dépenses assurent les conditions préalables à
l’activité économique productive; l’ensemble de ces dépenses participe à la fonction du
maintien de l’ordre.

Exemples :

- La diplomatie, tâche improductive autrefois, est devenue aujourd’hui


productive. Et comment ? Parce qu’elle permet de développer les relations
économiques et financières dont les Etats ont besoin pour se développer. La
coopération économique et financière est source de progrès.
- L’éducation, autrefois fonction de consommation, est devenue aujourd’hui une
fonction économique et productive. Dans beaucoup de pays, le secteur de
l’éducation constitue une priorité qui est concrétisée par la mise à disposition
des crédits budgétaires conséquents.
23
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

 Utilité directe :

Certaines dépenses publiques ont une utilité directe. Malgré le poids des thèses
classiques, l’histoire économique a prouvé que certaines dépenses sont productives. La
thèse de l’Etat déficitaire n’est donc pas prouvée.

La réalité économique moderne semble pousser l’Etat à intervenir pour accroître


l’efficacité de l’action économique. Les dépenses publiques peuvent être utiles à
l’économie10.
Comme on peut le constater, sur le plan économique, ce n’est pas la qualité de l’auteur
de la dépense qui est prise en considération, mais celle de la personne pour laquelle la
dépense est réalisée. D’où, au niveau des dépenses, la classification ci-après :

CHAPITRE II : LA CLASSIFICATION DES DEPENSES PUBLIQUES

L’intervention de l’Etat est plus ou moins efficace selon la nature des dépenses.
Plusieurs types de classification ont été proposés : les classifications économiques
l’emportent sur les classifications juridiques ou formelles. Elles varient cependant d’un
pays à un autre.

Section 1 : Les types de classification existants

De façon générale, on distingue entre :


- les classifications dites administratives et/ou juridiques ;
- les classifications économiques ;
- la classification fonctionnelle.

§1. Les classifications administratives et/ou juridiques

Elles sont basées sur l’organisation administrative des personnes morales


intéressées de l’Etat. On parle de classifications organiques. Celles-ci peuvent exister sur
une base juridique distinguant des catégories spécifiques.

A. Classifications organiques.

Leur structure est administrative. La définition est basée sur les structures
étatiques: dépenses de l’Etat (Ministères), dépenses communales (municipales),
dépenses provinciales, dépenses des districts.

10
COLSON (J.P.) : Droit public économique, Paris, LGDJ, 1995. Voir aussi P.M. GAUDEMET, J. DE LEUSE, Y. ROLLAND ET PILLOT : Finances
publiques, Paris, 1987.
24
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B. Classifications spécifiquement juridiques.

Le législateur distingue d’autres catégories indépendantes de l’organe utilisateur


et les dote de certains caractères particuliers. On peut citer, par exemple, les dépenses
des services votés, de mesures nouvelles très importantes dans la procédure
d’établissement du budget, celles des dépenses définitives, dépenses provisoires,
annuelles...

§2. Les classifications économiques

On classe ici les dépenses suivant leur fonction économique et le type


d’intervention économique qu’elles permettent à l’Etat de réaliser. Quatre grands types
de dépenses s’opposent 2 à 2.

A. Dépenses de fonctionnement – Dépenses d’investissement ou dépenses en


capital

1° Les dépenses de fonctionnement ont pour objet d’assurer la vie normale des
services. Ces dépenses n’ont pas pour but de déclencher les dépenses
publiques, ni d’augmenter le capital social ou privé. Il s’agit tout au plus de
maintenir le niveau attendu.
2° Les dépenses d’investissement visent à transformer le capital public ou privé,
pour accroître l’efficacité de la production privée ou publique des biens et
services. L’investissement de l’Etat se définit comme comprenant: la
participation de l’Etat aux investissements publics effectués par les entreprises
d’Etat (contributions budgétaires au programme d’investissement ou
participation au capital d’organismes tels que les Banques de développement :
cas de l’ex Société Financière de Développement - SOFIDE) ; les
investissements directs d’infrastructures et services publics ; les dépenses
d’exploitation et d’entretien des administrations publiques et autres organismes
extérieurs contractées par les entreprises d’Etat. L’investissement de l’Etat
inclut souvent les dépenses ordinaires de salaires, de transport, d’études et
autres frais de fonctionnement.

B. Dépenses de transfert – dépenses effectives

Il s’agit d’une distinction à implication économique. L’Etat peut dépenser


directement pour acquérir les biens et services nécessaires à ses missions. On dit alors
que l’Etat fait des dépenses effectives: dépenses avec contrepartie. Dans d’autres cas,
l’Etat fait des dépenses sans contrepartie; il prélève sur un secteur ou l’ensemble de la
collectivité pour reverser sur l’autre; il s’agit, dans ce cas, de dépenses de transfert.
25
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Sur le plan économique, la différence est grande car, dans les dépenses
effectives, l’Etat prélève une partie de la substance économique, ce qui peut avoir pour
conséquence d’entraîner la rareté des biens et services. Dans le cas des dépenses de
transfert, l’Etat ne prélève rien, il se contente d’agir sur le pouvoir d’achat (en le
modifiant) et laisse aux autres agents économiques les moyens d’intervenir sur les biens
de consommation. Le premier moyen peut être le renforcement de l’inflation
économique.

§3. Les classifications fonctionnelles

Cette classification a été mise à la mode par le rapport de la commission


HOOVER, constituée aux USA en 1947 pour étudier la réorganisation de l’exécutif. On
présentera son principe et sa pratique.

A. Principe

Il s’agit de la politique de rationalisation de choix budgétaires. Cette politique exige de


faire des choix efficaces en matière des dépenses publiques. La classification relève à la
fois de deux autres et utilise les techniques de l’analyse systémique: placer l’objet qu’on
étudie dans son environnement physique et social et le connaître à partir de cet
environnement.

B. Mise en œuvre

Celle-ci s’opère en 3 temps :

1° Définir les différentes fonctions de la collectivité publique considérée. Exemples : la


fonction de formation pour un Etat, la fonction de défense, l’action économique,
l’action sociale. On s’aperçoit qu’une fonction est partagée par une multitude
d’organismes.
2° Evaluer le coût en comparant leur performance de fonction à celle d’autres
institutions publiques ou privées.
3° Consacrer les dépenses aux secteurs les moins coûteux et les plus rentables.

On observe un dépassement des classifications économiques et administratives.

Section 2 : Classification congolaise des dépenses publiques

Elle découle de la loi n° 11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques
a finalement procédé à la classification des dépenses publiques dans les dispositions de
l’article 37. Cette classification vient formaliser la pratique dans l’objectif de
rationalisation et de contrôle des dépenses de l’Etat suivant le plan de modernisation de
finances publiques amorcé en début de l’année 2002.
26
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Conformément à la nouvelle nomenclature des dépenses de l’Etat, celles-ci sont


subdivisées en neuf (9) titres ou grandes natures que l’on peut rappeler ici de manière
succincte.

§1. Les dépenses courantes

Elles sont groupées sous six titres ou grandes natures à savoir :

A. La dette publique en capital

Celle-ci comprend :

 La dette intérieure

 La dette extérieure

B. Les frais financiers

Ceux-ci comprennent les Commissions bancaires, toute commission due à une


banque pour son service, les frais de Licence (Licences d’importation), la rétribution aux
institutions financières et les arriérés sur frais financiers consolidés.

C. Les dépenses de personnel

Elles comprennent :
 La rémunération des membres des institutions politiques et coutumières
(traitement du Chef de l’Etat, des membres du Gouvernement, du Parlement, des
cabinets et services de la Présidence, de tous les autres cabinets, des
Commissariats Généraux, des Gouvernorats, des hauts magistrats, des chefs
coutumiers).
 La rémunération du personnel actif de l’Etat : traitement de base des
fonctionnaires du régime général, traitement du personnel contractuel relevant des
organismes auxiliaires (budgets annexes), traitement des enseignants de l’EPSP,
ESURS, ATG , des professionnels de la santé, des professionnels de l’agriculture et
du développement rural, des militaires (salaires du personnel militaire,
fonctionnaire de l’Etat, prévus par la loi sur le budget avec assignation spécifique,
des policiers, du personnel diplomatique, rémunération du corps diplomatique et
consulaire accrédité à l’extérieur, traitement des magistrats civils et militaires (non
compris les hauts magistrats), des agents des services de sécurité.
 Les dépenses accessoires de personnel, celles-ci concernent :
- le transport du personnel (le transport régulier collectif de personnel de l’Etat ;
l’indemnité de logement, l’indemnité de transport, l’indemnité kilométrique,
l’indemnité de rapatriement, de mutation et d’installation (les rapatriements et
mutations ; concerne aussi les dépenses relatives à l’installation d’un cadre ou
27
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

d’une autorité, l’indemnité de sortie des membres des institutions politiques, et de


fin de carrière des fonctionnaires civils et militaires de l’Etat) ;
- les primes et gratifications (toutes les primes, indemnités de motivation et
gratifications, pour récompense de services rendus, rétrocession de recettes
recouvrées, difficulté d’une tâche, intérim, représentation, risque particulier, per
diem et jeton de présence) ;
- les frais de mission (frais de voyage des missionnaires au service de l’Etat, à
l’intérieur et à l’extérieur du pays ( per diem). Ne concerne pas les dépenses de
missions incluses dans le 502) ;
- les frais secret et de recherche (concerne les frais de filature par les services civils
et militaires de sécurité et de justice) ;
- les rencontres locales ; les frais de rencontres locales (menues dépenses de
location de salles, collations, per diem et fournitures administratives à l’occasion de
rencontres locales, de séminaires de formation) ;

D. Les biens et matériels


Il s’agit des dépenses concernant :
 Les fournitures et petit matériel de bureau (achat de fournitures de bureau telles
que : papier, carbone, enveloppes, cartes de visite, gommes à effacer, stylos,
crayons, règles, trombones… et de petit matériel de bureau, tel qu’agrafeuse,
perforateur, cachet, tampon, consommables bureautiques et informatiques) ;
 Les livres, abonnements et bibliothèques (constitution de fonds de bibliothèque,
achat de livres, dictionnaires, revues, journaux et abonnements de presse écrite,
abonnement en bibliothèque).
 Le matériel éducatif, récréation, culturel et sportif (achat de matériel éducatif pour
tous les ministères, sportif, récréatif, culturel et de musée, tel que : jeux éducatifs,
instruments de musique, cartes géographiques, objets d’art de collection. Il
comprend aussi les accessoires de spectacle et de sport).
 Les fournitures et outils médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et vétérinaires,
vaccins (achat de fournitures et outils médicaux, vétérinaires et chirurgicaux
mineurs, tels que médicaments, antibiotiques, vaccins, vitamines, oxygènes,
produits médicaux et pharmaceutiques, produits bactériologiques, seringues,
gazes, coton, matériels de suture, petit outillage chirurgical et lunettes médicales) ;
 Les articles divers et articles d’entretien (achat d’articles et de produits divers non
classés antérieurement, dont pellicules photos et cassettes vidéo, piles, petits
matériels, poids et qualité et mesures, dont produits de nettoyage et d’entretien ;
matériels de nettoyage tels que : balais, poubelles. Comprend les arbustes, plantes
et fleurs destinés à l’entretien des espaces verts ou jardins officiels) ;
 Cadeaux (concerne les cadeaux d’Etat officiels ou de service) ;
 Pièces de rechange pour équipements ;
 Les pièces de rechange pour moyens roulants (pièces de rechange des véhicules et
autres moyens roulants) ;
 Les pièces de rechange pour autres équipements ;
28
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

 Les produits chimiques et fournitures énergétiques : comprennent les fertilisants,


engrais, insecticides, désinfectants, éléments et produits chimiques. (Insecticides,
désinfectants, éléments et produits chimiques, d’engrais, fertilisants d’origine
animale ou végétale, hors produits médicaux et hors carburants) ;
 Les carburants et lubrifiants, bois de chauffage (achat de carburant et lubrifiant :
essence, gasoil, agas, kérosène, huile, graisse, pétrole lampant. Bois de
chauffage) ;
 Les produits alimentaires, agro-alimentaires et accessoires

Il s’agit de :
- L’alimentation (achat de nourriture, aliments, lait, et boissons alcoolisées ou non
pour : personnel civil toutes catégories, personnel militaire, étudiants, incarcérés
dans des lieux de détention, asiles ou centre de correction, malades hospitalisés) ;
- Les produits agro-alimentaires (Produits agro-alimentaires, aliments pour animaux,
sel marin, chlorure de sodium pur) ;
- La vaisselle et ustensiles de cuisine (achat de vaisselle, thermos, et bouilloire,
d’ustensiles pour cantines, cuisines et résidences officielles) ;
 Les textiles, insignes et habillement
- Les tissus (achat de drapeaux, fanions, tapis rouge, moquette, tissus, textiles,
fibres synthétiques, moustiquaires, serviettes, nappes, rideaux et draps) ;
- L’habillement (Uniformes, habillement du personnel civil et militaire, y compris
vêtements sportifs. Vêtements, chaussures et accessoires, y compris musette et
sacoche) ;
- Le matériel de campement militaire (toiles de tentes, bâches, lit de campagne,
nattes) ;
- Les insignes et distinctions (insignes, médailles et distinctions honorifiques, à titre
civil, sportif ou militaire) ;

 Les matériaux de construction et quincaillerie

Il s’agit des matériaux de construction achetés par l’Administration et destinés aux


petits travaux exécutés par le personnel spécialisé de la fonction publique.

E. Les dépenses de prestations

Elles concernent :

 Les fêtes et cérémonies et rencontres publiques

 Les dépenses de base(communications et télécommunications, poste, eau et


électricité)
 La publicité, communiqué, impression, reproduction et reliure
 Le transport.
 Entretien et réparation de matériel et d’équipement.
29
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

 Soins vétérinaires et de protection de l’environnement


 Entretien, décoration et réparation d’ouvrages et d’édifices
 Autres services(Contrat de fonctionnement courant)

F. Transferts et interventions

Il s’agit principalement de subventions, dotations et de rétrocessions et autres


formes d’action de redistribution des fonds publics.
 Les subventions
- Subventions de fonctionnement aux organismes auxiliaires
- Subventions aux provinces. Subventions de fonctionnement destinées aux
services provinciaux
- Subvention du déficit de la Banque Centrale
- Bourses d’études. Il s’agit des bourses accordées par l’Etat aux nationaux
- Subvention de fonctionnement aux entreprises publiques et parapubliques
- Liste civile (Chef de l’Etat)
- Transfert de fonctionnement aux Ambassades et Postes consulaires
- Transfert de fonctionnement aux services publics
- Subvention de fonctionnement aux organismes des fonds spéciaux.

 Les rétrocessions comprennent : la rétrocession aux régies financières, la


rétrocession aux entités administratives décentralisées y compris aussi les Fonds de
Péréquation.
 Les interventions de l’Etat
Il s’agit de :
- Interventions économiques (notamment subvention de fonctionnement aux
entreprises privées)
- Interventions sociales
- Interventions scientifiques et culturelles
- Fonds spécial d’intervention (Fonds pour intervention spéciale)
- Catastrophes naturelles, calamités et accidents majeurs (Fonds destinés à la
réparation des infrastructures, au relogement, à la lutte contre les épidémies). Ne
concerne pas les indemnisations à titre individuel.

 Les prises de participation dans des entreprises et organismes


 Les contributions internationales
 Les charges sociales
 Les pensions et rentes / honorariat et éméritat

§2. Les dépenses en capital

Elles sont groupées sous deux titres ou grandes natures à savoir :


30
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A. Equipements

Il s’agit de :
 Equipements et mobiliers :
 Equipement de santé :
 Equipement éducatif, culturel et sportif.
 Equipement agro-sylvo-pastoral et industriel :
 Equipement de construction et de transport :
 Equipements de communication :
 Equipements militaires :
 Contrat d’études :

B. Construction, réfection, réhabilitation, addition d’ouvrage et édifice, acquisition


immobilière

Il s’agit de :
 Construction d’ouvrage et d’édifice
 Réhabilitation, réfection et addition d’ouvrages et d’édifices
 Acquisition de terrains
 Acquisition de bâtiments

§3. Les dépenses des prêts et avances

C’est le dernier titre arrêté par le législateur.

CHAPITRE III : L’ACCROISSEMENT DES DEPENSES PUBLIQUES

La tendance à l’amplification des dépenses publiques est un phénomène constant


à travers le monde.

Section 1 : Mesures de l’accroissement des dépenses publiques

§1. Techniques de mesure de l’accroissement réel des dépenses


publiques

Il y a des confusions à ne pas faire :


 Tout d’abord, il faut faire la différence entre l’accroissement nominal ou
apparent et l’accroissement réel.
 Ensuite, tenir compte des différentes techniques d’évaluation qui perturbent.
31
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C. Le masque monétaire

Lorsqu’on compare les budgets successifs sur une longue période, on peut vite se
rendre compte, partant du cours de la monnaie, que les différents chiffres ne révèlent
pas une situation correcte des choses, la valeur de la monnaie ayant varié à plusieurs
reprises. C’est ce qu’on appelle « le phénomène global de dépréciation monétaire ». Il
faut donc procéder à la correction monétaire. Il s’agit d’exprimer les différents chiffres
en monnaie constante. Autrement dit, pour chaque année, soustraire le montant des
dépenses dues à la marge de dépréciation monétaire et ajouter à la masse due à une
déflation, le montant de déflation.

D. Perturbations techniques

Certaines différences dans les procédés de comptabilisation des dépenses


publiques créent des difficultés :
- Certaines dépenses publiques ne sont pas inscrites au budget; il en est ainsi par
exemple des dépenses relatives à la sécurité nationale
- De plus, l’unité budgétaire des dépenses publiques n’est pas toujours respectée. Il
existe, en effet, une multitude de budgets (autres personnes morales publiques) :
les budgets des entreprises d’Etat). Or, on ne tient compte que des dépenses de
l’Etat, ce qui fausse la réalité.
Par ailleurs, il est évident que si l’on compare le budget d’un Etat décentralisé à
celui d’un Etat centralisé, des différences d’appréciation qui apparaîtront. D’où la
nécessité de revenir aux dépenses réelles.

§2. Techniques de mesure de l’accroissement relatif des dépenses


publiques

Pour mieux apprécier l’importance des dépenses publiques de l’Etat, il ne suffit


pas de distinguer l’accroissement réel de l’accroissement apparent, nominal ou fictif;
encore faut-il comparer ces dépenses aux dépenses d’autres agents économiques. On
constate alors que la propension prend une large dimension, ce qui est significatif pour
apprécier l’importance de l’interventionnisme étatique dans la vie économique nationale.
Concrètement, il y a lieu d’apprécier la propension des dépenses publiques à la
fois sur les bases de la comparaison par rapport à la conjoncture économique et la
relativité du phénomène.
32
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

A. Les bases de la comparaison

1)Le volume d’ensemble de la production et des revenus

Si on évalue en quantité des biens et des services et qu’on compare cette


fonction avec l’ensemble de la production des biens et des services dans le pays
considéré, on constate que les dépenses publiques sont aussi un prélèvement sur les
revenus monétaires des populations. Si la production et les revenus augmentent, les
dépenses publiques ont tendance à suivre ce rythme.

2) Le volume de la population

Il semble intéressant de rapprocher les dépenses publiques à l’effectif de la


population concernée. L’importance des dépenses publiques est plus ressentie dans les
pays les moins peuplés. Mais, il est trop simpliste de croire en effet qu’un doublement
de la population entraîne un doublement des dépenses gouvernementales, car les frais
généraux par tête d’habitant diminuent à mesure que le nombre d’habitant s’accroît.

3) L’étendue du territoire

Dans un pays peu étendu, les dépenses publiques sont davantage concentrées
dans l’espace et les effets économiques sont différents. Exemple : les problèmes
d’infrastructures entre le Congo Démocratique et le Congo Brazzaville : l’étendue du
territoire de la République Démocratique du Congo impose plus de sacrifices aux
80.000.000 de Congolais alors qu’il pourrait en être autrement sur une étendue
représentant 7 à 10 fois la République Démocratique du Congo. Une population vivant
sur un vaste territoire ressentira moins les effets des dépenses publiques, tellement les
problèmes sont multiples.

B. Les procédés consacrés de mesure de l’accroissement relatif des


dépenses publiques

Tenant compte des difficultés d’appréciation, on tente à l’heure actuelle d’adopter


un critère commun, c’est celui du revenu national considéré comme l’ensemble de
salaires et profits pendant une période donnée, généralement un an.
33
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Mais, cette technique est critiquée et la base de cette critique se fonde sur
l’inégale efficacité des services statistiques dans certains pays.
Un constat s’impose cependant: les dépenses publiques n’ont cessé d’accroître et
c’est là un phénomène universel.

§3. Problème de la limitation des dépenses publiques

La dépense publique, sous toutes ses formes, fait l’objet de nombreuses critiques.
Si celles-ci sont souvent justifiées, elles tendent cependant à sous-estimer les effets
positifs que ces dépenses comportent.
Même s’il est difficile, il y a un problème qui a été posé par les classiques
consistant à ne pas accroître considérablement les dépenses publiques. On arrive
finalement à une attitude relative.

A. Les risques de la dépense publique

Ses détracteurs en premier lieu, les financiers classiques, soulignent toutes les
conséquences économiques négatives qu’un excès de dépenses publiques entraîne, et
ceci à 3 points de vues différentes : elles pèsent sur le développement économique, ont
des effets pervers sur la formation du capital et ne contribuent pas nécessairement à la
solution des problèmes auxquels elles sont censées apporter une réponse 11.
Elles peuvent, en effet, freiner la croissance en favorisant une allocation moins
productive des ressources de la collectivité. Un système monopolistique, faute de la
contrainte des coûts et de la concurrence, est toujours moins efficace qu’un système
animé par la compétition. Toute augmentation de la dépense publique risque donc
d’empêcher un emploi plus productif des ressources disponibles, c’est-à-dire de
constituer un obstacle au développement économique.
Par ailleurs, l’excès de dépenses publiques constitue aussi un handicap parce
qu’elles pèsent sur la formation du capital. Toute dépense supplémentaire doit être, en
effet, financée, soit par de nouveaux prélèvements, soit par l’emprunt. Dans le premier
cas, la capacité d’épargne des ménages et des entreprises est amputée ; dans le second
cas, une partie de l’épargne privée, déjà constituée et en quête d’emploi, sera captée
par la puissance publique. C’est ce qu’on appelle l’effet d’éviction 12.

11
BOUVIER (M.), ESCLASSAN (J.C.) & LASSALE (J.P.):op. cit. 60.
12
Idem : op. cit. 60.
34
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Enfin, elles ne contribuent pas nécessairement, notamment en ce qui concerne


les dépenses de transfert, à résoudre des problèmes sociaux comme le chômage ou
l’exclusion. Certains économistes libéraux estiment au contraire, qu’il existe une
corrélation négative entre la création d’emplois publics et le taux global d’activité. Ils
font remarquer, par exemple, qu’il existe, pour les pays du G7, un parallélisme complet
entre le taux des dépenses publiques par rapport au PNB et le taux de chômage par
rapport à la population active (l’exemple du Danemark, cependant, relativise cette
affirmation). Par ailleurs, les politiques sociales redistributives mises en œuvre dans les
Etats occidentaux ont, selon eux, largement échoué dans le traitement de l’exclusion
proprement dit.

B. Les chances de la dépense publique

A l’inverse, les partisans d’une politique active de dépenses publiques font valoir
des arguments de sens contraire.
 Les dépenses publiques permettent de soutenir la demande et elles ont un effet
contra cyclique en période de stagnation ou de régression de la demande privée,
interne ou externe. La consommation collective a une fonction de substitution et de
régulation.
 La critique portant sur le caractère, par nature improductif, de ces dépenses, et
notamment des dépenses de fonctionnement, est loi d’être toujours convaincante,
car nombre de ces dépenses – par exemple, celles qui concerne la prévention
sociale, l’éducation, la santé, la recherche etc. sont, en réalité, des investissements
immatériels, indispensables pour assurer l’avenir. Le rôle productif de certains
types de dépenses publiques a été mis en évidence par les théories de la
croissance endogène. Un surplus de dépenses publiques peut, dans des secteurs
stratégiques, contribuer à améliorer la productivité des entreprises privées. Mais
cette rentabilité différée de la dépense publique est difficile à mesurer, puisqu’elle
résulte d’effets favorables qui sont exercés sur les autres agents économiques (ce
qu’on appelle les externalité).
 Enfin, l’existence d’un système social avancé, même financé par des transferts, ne
constitue pas fatalement un handicap pour l’économie. Ce qui fait problème, c’est
moins la réponse publique destinée à renforcer une solidarité sociale que les
modalités d’une redistribution qui, se voulant quasi-universelle, est nécessairement
coûteuse, trop lourde à gérer, parfois inefficace ou s’accompagnant même d’effets
pervers.
35
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

C. Le critère économique et politique de la limite relative des dépenses


publiques

On peut retenir qu’il n’y a pas une limite absolue des dépenses publiques. Il est
conseillé d’éliminer les dépenses économiquement inutiles c’est-à-dire improductives.
Il existe des dépenses publiques politiquement utiles et inutiles. Rien n’empêche
l’Etat de considérer que, politiquement, il assure l’ensemble des activités économiques.
C’est une question de choix politique à faire. Le problème de fond, c’est que dans ce
débat apparemment technique de la limite des dépenses publiques, se greffe un
problème d’idéologie politique: c’est le vieux débat entre le socialisme et le capitalisme,
le socialisme prône l’interventionnisme étatique au nom de la justice sociale, le
capitalisme a pour devise le laisser-faire. Mais, on admet aujourd’hui que l’Etat puisse
intervenir. S’il ne le fait pas directement, il exerce un contrôle.
Ceci étant, on doit s’interroger sur les causes de l’accroissement des dépenses
publiques.

Section 2 : Les causes de l’accroissement des dépenses publiques

Trois causes sont à la base de l’accroissement des dépenses publiques :


- l’évolution technique ;
- le développement du rôle de l’Etat ;
- le changement dans la conception des finances publiques en général.

§1. L’évolution technique comme cause de l’accroissement

Le progrès scientifique et technique a un rôle au moins égal à celui qu’il joue


dans les autres activités de l’économie nationale. L’Etat utilise comme les autres agents
économiques des instruments matériels de plus en plus sophistiqués remarquables
notamment dans les domaines militaires (défense nationale) et civil.
Au plan de la défense nationale : le matériel coûtant de plus en plus cher, l’Etat
est amené à dépenser plus pour acquérir ce matériel.
Même au plan civil, la sophistication de la technique utilisée, par exemple
l’informatique justifie la recherche des moyens financiers conséquents. L’Etat doit
dépenser pour s’adapter à ces nouvelles techniques. Même si l’Etat se contentait des
36
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

domaines traditionnels de ses activités, ses dépenses augmenteraient. Mais l’Etat ne se


contente pas de ce rôle.

§2. Développement du rôle socio-économique de l’Etat


On admet aujourd’hui que l’Etat puisse intervenir dans l’économie et le social.

§3. Transformation du concept des finances publiques

Les freins intellectuels qui s’opposaient à la propension de la dépense publique, ce sont


atténués dans la théorie moderne des finances publiques.
37
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

SOUS-TITRE 2 : LES RESSOURCES PUBLIQUES

Pour exécuter le budget, l’Etat doit posséder des ressources suffisantes. Pour
cela, il dispose principalement du produit de l’impôt qui est la principale ressource
publique.

On distingue plusieurs catégories de ressources publiques: certaines sont


qualifiées de permanentes ; il s’agit des ressources fiscales et non fiscales. Il peut
cependant arriver que ces ressources permanentes soient insuffisantes ou qu’elles
entrent irrégulièrement dans les caisses de l’Etat, il est alors recouru à des ressources
dites temporaires, parmi lesquelles on classe le trésor public, l’emprunt et aussi
l’émission monétaire. Une troisième catégorie de ressources est constituée par celles
qu’on qualifie des ressources exceptionnelles, lesquelles proviennent des appuis
financiers et autres interventions financières des bailleurs de fonds bilatéraux et
multilatéraux.

CHAPITRE I : LES RESSOURCES PUBLIQUES PERMANENTES : RESSOURCES


FISCALES ET NON-FISCALES.

Section 1 : Les ressources fiscales

§1. Définition de l’impôt

L’impôt est la principale ressource publique de l’Etat. Il peut être défini, à la suite
de GASTON JÈZE, comme « une prestation pécuniaire, requise des particuliers par voie
d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie en vue de la couverture des charges
publiques »13.
D’autres définitions ont été données par la doctrine et la jurisprudence. Toutes
mettent en évidence les trois éléments stables contenus dans la définition de Jèze :

A. L’impôt est une prestation pécuniaire

Il y a lieu de noter que l’impôt constitue un prélèvement pécuniaire obligatoire


effectué par l’Etat et les collectivités publiques sur les revenus et les biens des

13
JÈZE (G), cité par DUVERGER (M) : Op.Cit., p.29
38
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personnes physiques et morales. Prestation pécuniaire, l’impôt s’acquitte donc en


argent.
Toutefois la possibilité de s’acquitter de l’impôt en nature n’a pas totalement
disparu de notre droit positif. En effet, tout héritier, donateur ou légataire peut acquitter
les droits de mutation à titre gratuit par la remise d’œuvres d’art, de livres, d’objets de
collection ou de documents de haute valeur artistique ou historique, ou d’immeubles
situés dans les zones d’intérêt écologique.
En espèce ou en nature, l’impôt diminue, de façon définitive, la richesse globale
de son débiteur. De ce point de vue, l’impôt se distingue de l’emprunt qui, même
obligatoire, devra un jour être remboursé par le Trésor.

B. L’impôt est perçu par voie d’autorité

L’impôt, acte de puissance publique, est un prélèvement obligatoire perçu par


voie d’autorité.
Ce pouvoir est limité :
- Tout d’abord, le pouvoir d’imposer est de la compétence exclusive du législateur
qui, seul, peut créer, modifier ou supprimer un impôt
- Ensuite, l’impôt est consenti par la nation au travers de ses représentants.
En vertu de ce principe, le peuple souverain consent collectivement et
démocratiquement au prélèvement fiscal.

C. L’impôt est perçu à titre définitif et sans contrepartie, en vue de la


couverture des charges publiques

L’impôt est un prélèvement à finalité collective. En premier lieu, il assure la


couverture des charges publiques. Il peut aussi être utilisé comme un instrument
d’intervention économique et sociale.
L’impôt est prélevé sans contrepartie, il est destiné à couvrir les charges
publiques. Ayant une finalité collective, il ne saurait avoir de contrepartie déterminée
pour le contribuable qui le paie. Chaque fois qu’il existe une corrélation précisément
définie, calculée entre la prestation du redevable et la valeur des services ou avantages
que lui offrent les institutions publiques, on est en présence d’une taxe administrative
ou d’une redevance et non d’un impôt.
39
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

§2. Les fonctions de l’impôt

En partant de la définition proposée ci-dessus, l’impôt remplit à l’heure actuelle


trois fonctions principales, à savoir la répartition des charges publiques,
l’interventionnisme et la redistribution des revenus des richesses.

A. La répartition des charges publiques

La couverture des charges publiques est la raison essentielle de l’impôt. Celui-ci


est le seul procédé permettant de couvrir les dépenses des services publics qui ne
peuvent être vendus (défense nationale, administration générale ou publique).
Déterminé en fonction de la capacité contributive des citoyens et non des
services consommés, l’impôt est en outre, en tant que prélèvement obligatoire, le
procédé permettant de faire fonctionner les services publics qui pourraient être vendus,
sans que personne ne soit privé de ces services pour des raisons d’argent. La gratuité
résulte d’un choix fait par un Etat à un moment donné et est d’ailleurs sujette à
évolution (éducation, usage de la vie publique par exemple).

B. L’interventionnisme

L’impôt est souvent utilisé à des fins :


-d’incitation (natalité, investissement, assurance) ;
- de dissuasion (théoriquement, des droits importants sur l’alcool ou le tabac sont
censés réduire la consommation de ces produits) ;
- de protection des produits locaux (les droits de douane).
Cette fonction peut s’inscrire dans le cadre d’une politique à long terme ou dans
celui de mesures conjoncturelles.

C. La redistribution des revenus ou des richesses

L’impôt est —ou peut-être— employé pour des aides diverses, pour réduire les
injustices sociales, de façon ponctuelle (personnes âgées, titulaires de revenus
modestes) ou plus générale (nivellement des revenus ou des fortunes), voire pour
assurer à tous les citoyens un minimum de ressources (théorie de l’impôt négatif dont
l’application partielle est faite dans la législation française actuelle avec le revenu
minimum d’insertion).
Le niveau des transferts de revenus, dans le budget de l’Etat notamment,
témoigne de l’importance de cette fonction.
40
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

§3. Les principales classifications des impôts et taxes

Les impôts contribuent de manière variable à alimenter les recettes budgétaires de l’Etat
ou des collectivités publiques. La diversité des prélèvements a donné naissance à
différentes classifications des impôts et taxes ; les plus pertinentes sont les suivantes :

Les impôts selon leur nature  L’impôt sur le revenu


 L’impôt sur le capital (taxe sur les véhicules de
société, ISF, impôts locaux ;
 L’impôt sur la dépense (TVA, droits de douane,
taxe sur les tabacs, taxe sur les produits
pétroliers…).
Les impôts directs et indirects  L’impôt direct est périodique. Il est supporté et
payé directement par le contribuable
 L’impôt indirect frappe la dépense, la
consommation. Il est prélevé sur le
consommateur et payé par le vendeur (TVA,
taxe sur les véhicules, droits d’enregistrement et
de timbres…)
Les impôts réels et personnels  L’impôt réel taxe un bien ou un acte (TVA…)
 L’impôt personnel taxe un patrimoine ou un
revenu (Impôt sur le revenu, impôt sur la
fortune…)
Les impôts proportionnels et  L’impôt proportionnel s’obtient par l’application
progressifs d’un taux fixe (TVA, IS…) ;
 L’impôt progressif s’obtient par l’application d’un
barème : plus la base est élevée plus le taux
d’imposition est important (IR, droits de
succession et de donation).

§4. Techniques de prélèvement de l’impôt

L’impôt dû par chaque contribuable est l’aboutissement d’un processus fiscal en


plusieurs étapes.
Il s’agit de la procédure d’imposition. Tout prélèvement fiscal donne lieu à trois
opérations principales : l’assiette, la liquidation et le recouvrement :
41
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A. L’assiette de l’impôt

C’est l’ensemble des opérations administratives qui ont pour but de rechercher et
d’évaluer la matière imposable. Ainsi, asseoir l’impôt aboutit à déterminer la base
d’imposition. Il arrive donc que le terme d’assiette soit utilisé comme un synonyme de
base imposable.

1) La recherche de la matière imposable

La recherche de la matière imposable s’effectue par le procédé du recensement


ou par celui de la déclaration d’existence.
 Le recensement conduit les agents de l’administration à se déplacer pour
rechercher la matière imposable. Ce procédé n’est utilisé que pour les anciens
impôts (impôts directs locaux ou certaines contributions indirectes), qui sont établis
le plus souvent sur des signes extérieurs. La « tournée des mutations » que
l’inspecteur des impôts effectue dans les communes rurales afin de constater les
changements survenus dans la matière imposable est caractéristique du
recensement.

 La déclaration d’existence est plus couramment employée actuellement. Il


appartient alors au contribuable de déclarer l’existence de son activité ou de son
entreprise à l’administration. Les redevables des taxes sur le chiffre d’affaires et
ceux assujettis à l’impôt sur les sociétés sont soumis à cette obligation qui
concerne aussi les redevables des droits de consommation ou de circulation et des
droits de douane.
En matière d’impôt sur le revenu, la déclaration annuelle est à la fois une
déclaration d’existence (renseignements relatifs au contribuable et à sa famille) et
l’évaluation des bases d’imposition du contribuable.

2) L’évaluation de la matière imposable

Trois méthodes peuvent être utilisées pour déterminer les bases d’imposition des
contribuables : l’évaluation indiciaire, l’évaluation forfaitaire et l’évaluation réelle, dite
« déclaration contrôlée ».

 L’évaluation indiciaire
Elle consiste à évaluer les bases d’imposition d’un redevable à partir de signes
extérieurs ou indices, facilement dénombrables et difficiles à dissimuler.
42
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Les impôts indiciaires —dont l’application dépend de la constatation des signes


extérieurs— ne sont plus guère employés dans les systèmes fiscaux modernes. En effet,
en dépit de sa simplicité, de sa clarté et de sa facilité de mise en forme qui évite tout
risque de conflit entre le fisc et le contribuable, ce type d’impôt se révèle peu
satisfaisant. Son rendement est médiocre et, de plus, il peut être profondément injuste
dans la mesure où il n’existe généralement qu’un lien de corrélation très lâche entre le
ou les signes extérieurs retenus et la capacité contributive que l’on veut mettre en
évidence. Cependant, les indices étant par définition difficiles à dissimuler, la
détermination des bases d’imposition par la méthode indiciaire est parfois utilisée à titre
de moyen subsidiaire ou de contrôle (imposition d’après les signes extérieurs de
richesse).

 L’évaluation forfaitaire
Forfait signifie étymologiquement « à pris fait ».
Le forfait fiscal n’est jamais un contrat, pas toujours un accord, mais on
retrouve dans l’évaluation forfaitaire en matière fiscale l’élément d’approximation,
d’aléa, qui caractérise tout forfait.
Le forfait fiscal est un moyen relativement simple pour évaluer les bases
d’imposition d’un contribuable. Bien qu’il tende à disparaître dans les systèmes fiscaux
modernes au profit de l’évaluation réelle, il joue encore dans notre pays un rôle non
négligeable. A titre indicatif, la plupart des commerçants et artisans sont imposés sur
base du forfait
L’évaluation forfaitaire peut être collective et objective, l’administration
répartissant entre chaque redevable les bases d’imposition (v. forfait collectif agricole).
Elle peut être individuelle et subjective, chaque contribuable débattant avec le fisc le
montant de son revenu imposable (v. forfait individuel en matière de bénéfices
industriels et commerciaux).
Cette méthode d’évaluation quasi indiciaire facilitera l’évaluation des bénéfices
des petites entreprises individuelles et permettra à l’administration de consacrer
davantage d’effectifs aux tâches de contrôle.

 L’évaluation réelle ou « déclaration contrôlée »


Cette méthode est la plus couramment répandue dans les systèmes fiscaux des
pays développés.
Dans ce cas, le contribuable doit établir une déclaration dans laquelle il procède,
conformément aux prescriptions de la loi fiscale, à la détermination de sa base
43
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

d’imposition, sous le contrôle de l’administration. Ce procédé, dit de la déclaration


contrôlée, est utilisé en matière d’impôt sur le revenu, de taxes sur le chiffre d’affaires,
de droits d’enregistrement et de douane.
La déclaration contrôlée revêt l’allure d’une « confession fiscale » dont elle
possède les avantages et les inconvénients.
L’avantage fiscal est que le contribuable est mieux placé que quiconque pour
connaître le montant exact de la matière imposable (revenu, chiffre d’affaires ou capital)
qui le concerne.
En revanche, cette déclaration impose au contribuable un travail complexe qui
constitue une charge sur le plan économique et une source de tension sur le plan
psychologique. De plus, les confessions ne sont pas toujours sincères. De ce fait,
l’efficacité de la méthode déclarative dépend surtout de l’efficacité des contrôles. Cela
introduit les inégalités dans la connaissance de la matière imposable entre les catégories
de contribuables pour lesquels les contrôles sont relativement aisés (salaires,
professions réglementées ou conventionnées, propriétaires immobiliers, détenteurs de
capitaux mobiliers) et celles pour lesquelles les « recoupements » sont plus difficiles.

B. La liquidation de l’impôt

La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette fiscale, par


application, à la base d’imposition, du tarif de l’impôt. Elle suppose que soient définis le
fait générateur et les modalités de la taxation :

1) Le fait générateur

 Fait matériel ou acte juridique qui donne naissance à la dette fiscale, le fait
générateur de l’impôt détermine les éléments de l’imposition, le régime applicable
à la liquidation et le point de départ de certaines prescriptions.
 Absolument discrétionnaire pour le législateur, la fixation du fait générateur est
soumise pour l’exécutif, aux règles générales du droit administratif et tout
particulièrement aux principes relatifs à l’application des lois et règlements dans le
temps.
 Exemple de faits générateurs :
- Droits de mutation : date de la mutation
- Droits de succession : décès (date de décès)
- Revenus : clôture de la période de réalisation des revenus.
- Bénéfices des sociétés : clôture de la période de réalisation des bénéfices.
44
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

2) Les modalités de la taxation

 La distinction de l’impôt de répartition et de l’impôt de quotité :

- Dans l’impôt de répartition, le législateur fixe le produit global de l’impôt ; ce produit


est ensuite partagé, selon un système de répartition qui permet de fixer
successivement les contingents au niveau de circonscriptions de plus en plus petites
jusqu’à atteindre les contribuables eux-mêmes (assemblées locales, répartiteurs).
C’est un système sûr (le rendement de l’impôt est connu à l’avance) mais exclusif de
plus-values et générateur d’inégalités et d’injustices: d’où son abandon presque
complet au profit de l’impôt de quotité.

- Dans l’impôt de quotité, le législateur ne fixe pas le produit définitif de l’impôt mais
le taux et les modalités de la taxation. Ce système laisse inconnu le montant exact
de l’impôt ; mais s’il ne permet qu’une évaluation approximative et n’exclue pas les
moins-values, il permet aussi les plus-values. Il permet surtout de fixer le taux de
façon à obtenir le maximum de rendement tout en donnant aux contribuables la
garantie d’un système d’imposition rigoureusement égal à tous.

 La distinction de l’impôt réel et de l’impôt personnel :

- L’impôt réel est calculé à partir de la seule matière imposable et sans prendre en
considération la situation personnelle du contribuable. Simple, adapté à certains
prélèvements (droits de douane, droit de mutation), il est le plus souvent injuste
(impôt sur le revenu, impôt général sur la dépense, droit de succession).

- L’impôt personnel prend au contraire en considération non seulement la matière


imposable mais en outre la situation personnelle de son détenteur. La
personnalisation peut être pratiquée pour adapter la charge fiscale aux facultés
contributives dans une perspective de justice; mais elle peut être aussi un
instrument d’interventionnisme (surtaxation des célibataires, discrimination des
revenus à raison de leur emploi).

 Les divers procédés de personnalisation de l’impôt :

Il existe 3 procédés de personnalisation, à savoir :


(i) La personnalisation d’après la quantité de matière imposable :
a) La proportionnalité :
45
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

L’impôt proportionnel se caractérise par un taux constant, quelle que soit la


quantité de matière imposable ; il personnalise bien la charge fiscale puisque l’impôt
croit régulièrement avec la matière imposable mais il la personnalise incomplètement
puisque la proportion de matière imposable prélevée par l’impôt reste la même.

Impôt proportionnel

Impôt

Revenu

b) La progressivité :

 Technique générale :
Dans l’impôt progressif, le taux lui-même varie; il est d’autant plus élevé que la
matière imposable est plus importante. Ainsi, ce n’est pas seulement la charge fiscale
qui augmente avec la matière imposable mais aussi la proportion de cette matière
imposable qui est prélevée par l’impôt.
La mise en œuvre de la progressivité suppose la fixation de seuils de matière
imposable au-delà desquels le taux s’élève. Cette matière doit donc être divisée en
plusieurs niveaux pour lesquels des taux différents sont édictés.
Ainsi définie, la progressivité peut être appliquée de deux manières:

 Progressivité globale :
La division de la matière imposable peut déterminer des classes de contribuables :
le taux prévu pour la catégorie où se trouve le contribuable sera alors appliqué à la
totalité de son revenu. C’est la progressivité globale.

 Progressivité par tranches :


La division de la matière imposable peut être conçue comme isolant les unes des
autres des tranches de revenu. Chaque taux ne s’applique alors qu’à la tranche pour
laquelle il a été prévu et l’imposition totale du contribuable est constituée par le total
des impôts calculés pour chaque tranche.
46
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Section 2 : Les ressources non-fiscales

§1. Les différentes catégories des ressources non-fiscales

On peut citer pour exemples, les revenus provenant du domaine public et privé
de l’Etat, les revenus tirés des participations de l’Etat dans le capital des entreprises
publiques et privées (dividendes), les frais de justice, les recettes administratives qui
sont recouvrés aujourd’hui par la Direction Générale des Recettes Administratives,
Domaniales, Judiciaires et de Participations (DGRAD).
A ces revenus s’ajoutent les cotisations sociales versées à la caisse nationale de
sécurité sociale.

§2. Un rôle fondamental pour le Trésor Public


Les ressources non-fiscales représentent aujourd’hui plus de 20 % des ressources
publiques.

§3. La parafiscalité

La parafiscalité est une notion floue qui a pris un grand développement ces
dernières années. Il s’agit d’une institution intermédiaire entre celle de taxe
administrative et celle de l’impôt.

A. Conception socio-économique de la parafiscalité

On peut dire que la parafiscalité est presque un impôt sans l’être. Elle n’est
nullement une taxe administrative, celle-ci étant facultative avec contrepartie
immédiate.
Elle est presque un impôt parce qu’elle est obligatoire. Sa différence d’avec
l’impôt provient du fait que les prélèvements opérés le sont au profit de certains
organismes publics ou semi-publics, économiques ou sociaux, en vue d’assurer leur
financement autonome. Il en est ainsi par exemple des cotisations obligatoires versées à
l’Institut National de Sécurité Sociale. Mais, il existe bien d’autres organismes
bénéficiaires de ces taxes: chambres professionnelles, Comités.
Par ailleurs, il n’y a pas de proportionnalité entre la redevance payée et la
contrepartie obtenue: les avantages sociaux ne sont pas donnés en fonction des
cotisations qu’on a payées, mais au besoin qu’on a.
47
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

La parafiscalité est constituée en somme par des sortes d’impôts corporatifs,


perçus au profit d’institutions publiques ou privées ayant le caractère de collectivité, elle
est analogue pour celles-ci à ce que sont les impôts locaux pour les collectivités locales.

B. Les formes de parafiscalité

La notion générale de parafiscalité, telle qu’on vient de l’exposer, n’est pas


admise par tous les auteurs. Un certain conflit existe entre le concept juridique de la
parafiscalité, tel que défini par les différentes lois financières et le concept économico-
financier dont nous nous sommes inspirés précédemment.
En effet, les cotisations de sécurité sociale, qui sont l’exemple type de la
parafiscalité dans le concept économico-financier, n’y rentrent pas dans la définition
juridique stricte. On peut ainsi distinguer deux catégories de ressources parafiscales :
les taxes parafiscales au sens strict et les cotisations sociales.
1° Les taxes parafiscales au sens strict. Il s’agit en fait de la notion juridique de
parafiscalité. Elles sont constituées par les ressources énumérées dans un état
annexé à la loi de finances. Cet état est une simple énumération des organismes qui
ont le droit de percevoir des taxes parafiscales, avec indication du texte créant ces
taxes, de leur taux et de leur rendement escompté.
2° Les cotisations sociales correspondent au concept économico-financier de la
parafiscalité dont on a parlé ci-dessus.
48
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

CHAPITRE II : LES RESSOURCES PUBLIQUES TEMPORAIRES

Elles sont aussi qualifiées de ressources de Trésorerie. Elles sont constituées,


pour le court terme, par le Trésor Public, et le long terme, par l’emprunt public ou
l’emprunt d’Etat.

Section 1 : Le Trésor Public

Trouver les ressources nécessaires au fonctionnement régulier de l'Etat est l'une


des fonctions du Trésor. Celui-ci n'a pas de personnalité juridique distincte de celle de
l'Etat. Il s'agit d'un service de l'Etat qui a des fonctions de caissier et de banquier, mais
il doit également assurer le maintien des grands équilibres monétaires et financiers.

§1. Le Trésor est le caissier de l'Etat et des collectivités territoriales

Son rôle est d'assurer la distribution des fonds dans l'espace et dans le temps. Il
faut s’assurer qu’à chaque point du Territoire et à chaque instant, les différents postes
comptables sont en mesure de faire face aux paiements exigés par les créanciers de
l’Etat. D’où la nécessité d’une meilleure organisation du mouvement des fonds pour
approvisionner les différentes caisses des comptables. La question est résolue dans les
pays où circule bien la monnaie scripturale. Dans notre pays, seule la réforme du
système financier et bancaire permettra de résoudre ce problème épineux.
La trésorerie consiste à aménager les ressources dans le temps, de façon à les
faire correspondre aux dépenses: par des emprunts, on anticipe des ressources futures
pour faire face immédiatement à des dépenses; par des épargnes, on conserve des
ressources passées pour faire face à des dépenses futures.
Enfin, il faut signaler que lorsque l’utilisation du compte courant et l’émission
d’emprunt ne suffisent pas à assurer la Trésorerie, ils ont recouru aux avances de la
Banque Centrale (voir infra : création monétaire).

§2. Les autres fonctions du Trésor Public

Il faut préciser que le Trésor public a par ailleurs une fonction bancaire très
importante. En effet, étant donné la masse des deniers collectés par le Trésor, celui-ci a
la possibilité de les utiliser à d’autres fins que le paiement des dépenses publiques. Le
Trésor agit comme un banquier en fournissant des capitaux ou en octroyant des
avantages à des entreprises dont ils vont assurer le développement.
49
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Par ailleurs, le Trésor a un rôle monétaire. D’abord, il détient le monopole de


l’émission des pièces métalliques ; ensuite, il crée indirectement de la monnaie, comme
d’ailleurs les banques, lorsqu’il utilise les fonds des correspondants du Trésor pour
assurer ses règlements14.

Section 2 : Les emprunts publics

Les emprunts publics sont des charges pour l’Etat qui y recourt. Autrement dit, ils
constituent la dette publique intérieure.
Les emprunts d’Etat sont prévus dans la loi de finances alors que ceux du trésor
ont lieu sous la seule initiative de l’administration des finances. Cette transformation
justifie le recours à l’emprunt d’Etat moderne.
L’emprunt public recouvre des caractères juridiques et économiques distincts des
autres catégories. C’est une manifestation de l’interventionnisme de l’Etat.

§1. Problématique et forme de l'emprunt15

A. Finalité de l'emprunt

Comme on le sait, l'impôt est le procédé normal de financement des dépenses


publiques. Mais il se révèle aujourd’hui quelquefois insuffisant. C’est pourquoi l’Etat
peut être amené à assurer leur financement.
 L'emprunt se distingue de l'impôt en raison de son caractère contractuel et non
obligatoire. L'Etat se procure des ressources sans utiliser la contrainte mais
uniquement par l'engagement qu'il prend auprès des souscripteurs.
 L'emprunt a surtout une finalité financière. Les ressources que l'impôt est
susceptible de fournir sont limitées. La pression fiscale ne peut dépasser une
certaine limite sans susciter des réactions économique et politique graves. L'emprunt
est donc utilisé à titre accessoire lorsque le recours à l’impôt n’est plus possible car
l’emprunt est beaucoup plus onéreux que l'impôt. Il faudra rembourser le capital et
les intérêts. Quelquefois, la technique de l’emprunt est cependant mieux adoptée
que celle de l'impôt. C’est le cas pour les investissements importants qui ne peuvent
être financés que sur une longue période.
 L'emprunt peut être un instrument d'intervention en matière économique ou sociale.
Dans cette hypothèse, l’Etat compte à son profit l’épargne disponible et utilise
14
BERTOLI, (P.) : Finances Publiques, préc. op. cit. p.75.
15
Voir BERTOLI (P.) : précité, p.75 et s.
50
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

l’emprunt pour agir sur les structures économiques « financement d’investissement


dans certains secteurs : infrastructures routières, transport public). Il peut
également être utilisé pour absorber le pouvoir d’achat excédentaire et réduire ainsi
les tendances inflationnistes, à la condition toutefois que les sommes prélevées ne
soient pas réinjectées dans l’économie.

B. Régime juridique de l'emprunt

C'est le Parlement qui est l'organe de l'Etat compétent pour autoriser le recours à
l'emprunt.
L'emprunt engage les finances de l'Etat et influence pour l'avenir le montant de
l'impôt. Il faudra bien financer le remboursement et les intérêts par l'impôt. Le
Parlement vote l'impôt, il est donc logique qu'il consente également à l'emprunt.
L'emprunt est un contrat administratif (d'adhésion) entre l'Etat et le souscripteur,
bénéfique pour chacune des parties. Il offre pour le souscripteur un intérêt de la
sécurité et constitue souvent une valeur refuge. Il est remboursé par l'Etat aux taux
convenus dans le contrat. L'emprunt pose le problème de la dette publique intérieure.
Notre pay recourt rarement à l’emprunt. Des tentatives sporadiques sont néanmoins
menées pour des opérations à court terme par le truchement de la Banque Centrale :
émission de bons de Trésor, Certificat de Dépôts, etc.

§2. Caractères juridique et économique de l’emprunt

L’emprunt public, à la différence de l’impôt, est un contrat; il est basé sur l’accord
du souscripteur; mais ce contrat, à la différence des contrats privés, est limité par le
poids et la position de la puissance publique.

A. L’emprunt comme contrat

Sa réalisation suppose des caractères contractuels mais les limites sont


importantes.

1) Contenu du contrat
Deux composantes: - un accord de volonté ; - une contrepartie.
a) Accord de volonté
51
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

La souscription est tout à fait libre. En principe, l’Etat ne négocie pas les termes
du contrat avec chaque souscripteur. Il s’agit donc d’un contrat d’adhésion. C’est la
différence avec l’impôt. Le prélèvement n’est pour l’emprunt nullement un prix. Il en
résulte des conséquences sociales et psychologiques. Seule une certaine couche sociale
participe à l’emprunt, celle disposant d’une épargne suffisante. Malgré la
démocratisation de l’emprunt public dans de nombreux pays, ce sont les citoyens riches
qui participent à l’emprunt, et certaines couches privées et même publiques. La
conséquence politique de cette liberté est que l’épargne peut ne pas choisir de s’investir
au secteur public. Les gens ne prêtent qu’à un gouvernement en qui ils ont confiance.
Une autre raison est économique, c’est que les souscripteurs n’accordent leur épargne à
l’Etat que s’ils ne peuvent trouver mieux ailleurs d’où l’importance du taux d’intérêts. Par
ailleurs, c’est le caractère pacifique de l’emprunt qui permet d’amortir le jeu social: l’Etat
peut intervenir dans une conjoncture de mécontentement à propos des taxes et des
impôts et ainsi éviter les tensions sociales. L’emprunt qui suppose le libre consentement
peut aussi revêtir un caractère obligatoire pour équilibrer les taxes.
b) La contrepartie
L’argent de l’emprunt n’est pas perdu comme c’est le cas pour l’impôt. Non
seulement la totalité de la somme sera remboursée sauf dans le cas de l’emprunt
perpétuel, mais le souscripteur recevra les intérêts en paiement pour les services
rendus. C’est là une autre différence avec l’impôt et les autres ressources publiques.

B. Les limites du caractère contractuel de l’emprunt

Les nécessités d’intérêt général peuvent justifier l’atteinte au caractère volontaire


et à la contrepartie. Dans ce contexte sont distingués deux types d’emprunts: les
emprunts forcés et les emprunts quasi-forcés. Dans le premier cas, l’Etat décide de la
participation de chaque individu unilatéralement. Ces cas arrivent souvent en période de
guerre. Exemple: au Tchad pendant la dernière guerre civile sous la présidence de
Hisene Habré, le Gouvernement avait procédé à l’emprunt forcé. De même, les 2
derniers Gouvernements de la IIe République dans notre pays ont recouru à une formule
proche de l’emprunt forcé. Il a été décidé de la participation des citoyens congolais et
des entreprises publiques et privées à l’effort de guerre contre l’ex-rébellion armée
« Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo-Zaïre « A.F.D.L. ». La
gestion non transparente des fonds générés, à la suite de cette opération, a été à la
base d’un conflit ouvert entre la hiérarchie militaire et le Gouvernement. La guerre elle-
même a été perdue, l’armée ayant refusé de combattre en réponse à la volonté
52
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

unanime des populations fortement démunies et à qui les Autorités publiques


demandaient plus qu’elles ne pouvaient leur offrir pour améliorer leur condition de vie.
L’état de pauvreté et de misère dans lequel se trouvaient ces populations a favorisé la
progression des troupes de l’Alliance et l’adhésion massive des masses à la cause de
« libérateurs ». C’est pour dire que de tels emprunts qui sont de véritables impôts sont
à éviter pour un Gouvernement qui veut gagner la confiance du peuple.
Les emprunts semi-forcés ont lieu quand les pouvoirs publics arrivent à orienter
l’épargne vers la souscription à l’emprunt public en raréfiant la demande privée des
capitaux et en favorisant les demandes publiques.
L’émission des emprunts s’accompagne toujours d’une propagande patriotique,
tendant à démontrer aux citoyens qu’il y a pour eux un véritable devoir moral à
souscrire à l’emprunt. D’où le recours à la réduction volontaire ou la réduction forcée de
la contrepartie. La réduction volontaire est plus fréquente, elle survient avec l’accord des
particuliers. La réduction forcée est plus rare et peu commandée.

§3. L’emprunt public comme instrument d’interventionnisme socio-


économique
L’emprunt public permet une meilleure répartition des dépenses publiques.

A. L’emprunt comme facteur de mobilisation de l’épargne nationale16

Au niveau macro-économique, l’emprunt permet à l’Etat de diriger l’épargne vers


les secteurs plus productifs de l’économie. Cette épargne peut être utilisée dans les
entreprises publiques ou privées selon les techniques de transfert notamment les
subventions. Une subvention est un transfert réalisé par l’Etat au profit d’une entreprise
ou d’une association. On distingue les subventions :
- d’équilibre, qui compensent un déficit de l’entreprise ;
- d’équipement qui constituent une participation à des frais d’établissement ou
d’immobilisation ;
- d’exploitation, qui ont pour but de compenser une insuffisance de recettes 17.
Au niveau de la micro-économie, les souscripteurs placent avantageusement leur
épargne. Les intérêts et avantages permettent une fructification de leur capital.

16
Cette mobilisation se fait par le biais du marché financier dans l’un de ses compartiments appelé Bourses des valeurs. Pour plus de
détails, consultez les ouvrages de Droit financier dont notamment celui de Bakandeja wa Mpungu, précité.
17
Dictionnaire d’Economie et des Sciences sociales, 6e Edition, sous la direction de ECHAUDEMAISON (C.D), p. 477.
53
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Ainsi, la crainte des financiers classiques de voir l’Etat dilapider les ressources
s’estompe, encore faut-il qu’il s’agisse d’un Etat normal, c’est-à-dire démocratique et
respectueux des engagements qu’il prend envers ses bailleurs tant au niveau interne
qu’envers l’étranger.

B. Les conditions de l’usage de l’emprunt

L’usage de l’emprunt est seulement conditionné par des possibilités matérielles:


quand celles-ci sont remplies, des problèmes d’opportunité se posent.

1) La possibilité de l’emprunt18
Pour recourir à l’emprunt, il faut qu’il soit techniquement possible, c’est-à-dire
que l’Etat trouve des prêteurs. Cela suppose deux choses :
1° qu’il existe une épargne disponible ;
2° que cette épargne soit disposée à s’orienter vers l’emprunt public.

a) La nécessité d’une épargne disponible


L’emprunt suppose qu’une certaine catégorie de citoyens sont disposés à
renoncer à consommer une partie de leurs revenus et à l’épargner.
b) La nécessité d’une épargne bien disposée
Il ne suffit pas qu’il existe une épargne disponible, il faut aussi qu’elle soit
décidée à s’investir en emprunts publics.
Le souscripteur fait une opération de placement de son capital, il faut qu’il trouve
des avantages certains en prêtant à l’Etat, ceux-ci doivent être au moins équivalents à
ceux des placements privés 19.
Deux éléments entrent en ligne de compte à cet égard : la sécurité du placement
et son apport. En matière d’emprunt public, c’est le premier élément qui est essentiel
car le souscripteur n’est pas un spéculateur. L’avantage essentiel qu’offre l’Etat, c’est la
solvabilité, donc la sécurité du placement. Mais, cette solvabilité n’est réelle que si la
valeur de la monnaie est stable. En réalité, on ne peut prêter à l’Etat que lorsqu’on a
confiance en ses dirigeants.

18
DUVERGER (M.) : Finances publiques, op. cit. p.169.
19
L’ensemble de ces opérations se jouent sur le marché financier à travers la bourse. Voir à cet égard:
* STRENS (A. ), Monnaie et Finances, De Boeck Université, Bruxelles, 1988
* Le DUFF (R.), Economie Financière, Dalloz, Paris, 1982
* BAKANDEJA wa MPUNGU (G.), Manuel de Droit Financier, Op. Cit.
54
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On peut retenir que le recours à l’emprunt n’est possible en principe que dans les
périodes de stabilité monétaire (signe de bonne conduite des affaires de l’Etat):
l’inflation ou la peur de l’inflation est un obstacle fondamental à l’émission d’emprunts.
On peut y ajouter aussi l’instabilité politique.

2) L’opportunité de l’emprunt
Supposons qu’il existe une épargne disponible et disposée à s’investir en fonds
publics. Convient-il de recourir de préférence à l’emprunt ou de préférence à l’impôt ?
La réponse est variable dans chaque cas concret.
Le problème est essentiellement un problème de répartition des prélèvements
publics, non pas entre générations comme le croyaient les financiers classiques, mais
entre catégories sociales et individus à l’intérieur de chaque génération. Il faut
considérer la répartition au moment de l’émission et la répartition des charges de la
dette.

a) La répartition des charges au moment de l’émission


Deux éléments sont à considérer : le fait que l’emprunt n’est pas prélevé sur les
mêmes catégories sociales que l’impôt ; le fait qu’il est un procédé moins brutal que
l’impôt.
* Le caractère limité de l’emprunt
L’emprunt n’est prélevé que sur les gens ayant une épargne disponible: l’impôt
peut être prélevé sur toutes les catégories sociales, en principe. En fait, il est difficile
d’imposer les gens qui sont à peine au niveau du minimum vital.

* La légèreté de l’emprunt
L’emprunt est un procédé plus doux que l’impôt, parce qu’il ne prive pas
définitivement le contribuable de son argent. On peut donc plus facilement demander de
très grosses sommes d’emprunt à un contribuable que de très grosses sommes
d’impôts20.

b) La répartition des charges de la dette

20
DUVERGER (M.):Finances Publiques, op. cit. p. 174.
55
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La dette publique n’est pas une charge pour les générations futures, considérées
globalement. Elle n’est qu’un transfert. Mais, ce transfert est obligatoire pour l’Etat, qui
se trouve lié par les engagements pris vis-à-vis des prêteurs.
L’emprunt aboutit donc à imposer dans le futur des transactions au détriment des
contribuables et au profit des prêteurs. Sur le plan économique, de tels transferts ne
sont regrettables que dans le cas où les contribuables, qui supportent les impôts
nécessités par la charge de la dette, auraient fait de leur argent un emploi plus utile que
les prêteurs qui reçoivent intérêts et remboursement. Tel n’est pas nécessairement le
cas. En effet, il est d’ailleurs possible qu’aucune augmentation d’impôt ne se produise,
l’accroissement régulier du revenu national et de la population suffisant à faire face au
service de la dette publique.

§4. La mise en œuvre de l’emprunt21

L’emprunt est une opération en deux phases. L’Etat reçoit d’abord l’argent des
souscripteurs : c’est la phase de l’émission. Ensuite, il doit tenir les promesses qu’il a
faites à ces souscripteurs concernant le service des intérêts et le remboursement
éventuel du capital : c’est la phase dite du service de la dette publique. On se bornera à
les décrire successivement, sans rentrer dans les détails.

A. L’émission de l’emprunt

On l’a dit ci-avant, les émissions d’emprunt sont autorisées par la loi de finances.
En dehors de cette autorisation, c’est le pouvoir réglementaire qui est entièrement
compétent dans ce domaine.
Sur le plan technique, l’emprunt pose deux séries de problèmes aux pouvoirs
publics (gouvernement). Le premier problème concerne la détermination des conditions
faites aux souscripteurs éventuels, c’est-à-dire les avantages à consentir aux prêteurs;
le second est relatif au placement des titres.

1) Les avantages consentis aux prêteurs


L’avantage principal est l’intérêt qui représente le prix du loyer de l’argent prêté à
l’Etat par le souscripteur de l’emprunt. Dans les emprunts entre particuliers, c’est
presque le seul avantage que le prêteur tire de son prêt.

a) L’intérêt de l’emprunt

21
DUVERGER, (M.) p. 178 et 180, Précité. Sur la technique de l’emprunt, outre cet ouvrage, on consultera G. JEZE, La technique du crédit
public (cours de finances publiques professé à la faculté de Droit de Paris),1923, 1924, 1926, 1935 et 1936
56
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

L’intérêt/taux d’intérêt est la rémunération du capital prêté, versé par


l’emprunteur ou prêteur ; il est fixé lors de la conclusion du contrat comme un
pourcentage du capital prêté.
Le problème du taux de l’intérêt est essentiellement un problème économique :
C’est le taux d’intérêt couramment pratiqué sur le marché financier au moment de
l’émission de l’emprunt qui détermine en pratique le taux d’intérêt de l’emprunt. Ce
problème réglé, subsiste un problème de technique financière concernant
l’aménagement du taux.

1° Le problème économique : la fixation du taux


L’emprunt est un placement pour le souscripteur qui agit en fonction des
conditions du marché financier.

2° Le problème technique : l’aménagement du taux


Supposons le taux de l’intérêt fixé. En pratique, des aménagements sont
possibles qui aboutissent à fixer un taux apparent différent du taux réel (on dit un
« taux d’émission » différent du « taux de placement »). Tel est le résultat obtenu par
ce qu’on appelle les émissions au-dessus du pair.
* Emission au pair et émission au-dessous du pair
On dit qu’une émission est faite au pair quand la somme que l’Etat s’engage à
rembourser, celle sur laquelle sont calculés les intérêts, est égale à la somme versée par
le souscripteur: si on lui prête 1.000 US $ à 3%, l’Etat remboursera 1.000 US $ et paiera
30 US $ d’intérêt annuel. Mais, l’Etat recourt parfois au procédé des émissions au-
dessous du pair. Le « pair », c’est la somme sur laquelle sont calculés les intérêts et le
remboursement: l’Etat réclamera de son prêteur une somme inférieure. Par exemple, il
remboursera 1.000 US $ et paiera 30 US $ d’intérêt, s’il a reçu 750 US $.
La technique de l’émission au-dessous du pair aboutit à deux résultats. D’abord,
elle comporte une prime de remboursement, sauf dans le cas des emprunts dits « en
rente perpétuelle » qui ne sont jamais remboursés. Ensuite, elle entraîne un taux
d’intérêt réel supérieur au taux d’intérêt apparent. Dans l’exemple précité, le taux
d’émission ou taux apparent, est de 3%, mais l’Etat donne en réalité 3 pour 75 et non
3%, c’est-à-dire que le taux d’intérêt réel ou taux de placement, est de 4%.
* Motif de l’émission au-dessous du pair
Le motif principal est de permettre à l’Etat de dissimuler le fait que son crédit
auprès du public est inférieur au crédit des emprunts privés. Si l’opinion n’a pas
confiance dans le crédit public, c’est-à-dire dans la stabilité de la monnaie, elle
57
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préférera, à taux égal, confier son argent à des emprunteurs privés plutôt qu’à l’Etat:
celui-ci sera donc obligé d’emprunter à un taux supérieur à celui du marché.

b) Les avantages accessoires


Ils sont très variés. On peut citer les principaux d’entre eux :
1° Les primes de remboursement et lots :
Les primes de remboursement concernent notamment l’émission d’emprunts au-
dessous du pair. Parfois, il peut être procédé au tirage au sort des titres qui
seront remboursés.
2° Les privilèges fiscaux : les exonérations fiscales spécifiques, les exemptions en
constituent des exemples typiques.
3° Les paiements des impôts: certains titres d’emprunts sont admis en paiement
des impôts, ces titres étant assimilables à une monnaie portant intérêts.
4° Les privilèges juridiques : insaisissabilité. Les titres d’emprunts bénéficient
généralement d’un privilège juridique exorbitant. Ils sont insaisissables. C’est-
à-dire que le créancier d’un souscripteur d’emprunt ne peut employer la saisie
contre son débiteur, en ce qui concerne les titres d’emprunts.

c) Les garanties contre les variations monétaires


La dépréciation monétaire (qui se traduit par la hausse des prix) est l’obstacle
essentiel au développement du crédit à l’époque contemporaine, aussi bien du crédit
public que du crédit privé.
A titre indicatif, si la monnaie perd 30% de sa valeur entre le moment où l’argent
est emprunté et celui où il est remboursé, le prêteur perdra 30% de capital prêté, alors
que l’emprunteur voit sa dette diminuée de 30%. De ce fait, la dépréciation pénalise le
créancier et avantage ainsi le débiteur, d’où la préférence des épargnants à
l’investissement en biens matériels (immeubles, bijoux).
C’est ainsi que, pour pallier la difficulté, il est recouru :
 d’une part, à l’offre des taux d’intérêt élevés qui constitue une assurance contre
le risque de dépréciation monétaire. Le risque est que l’emprunt devient onéreux
au cas où la dépréciation ne se produit pas;
 d’autre part, à l’indexation de l’emprunt sur les prix soit à le rattacher à la valeur
d’un bien peu sensible aux variations des prix. Exemple: emprunt à garantie de
change (rattachement de l’emprunt à la valeur d’une monnaie sûre telle que le
Dollar Américain ou l’Euro, emprunt à clause d’or).
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2) Le placement des titres

Une fois déterminée les conditions de l’emprunt et les avantages consentis aux
prêteurs, il s’agit de placer les titres dans le public.
Trois procédés sont alors possibles :
* la souscription publique : Elle se fait par la campagne de publicité annonçant les
dates d’ouverture et de clôture de l’émission. Les titres peuvent être achetés dans les
guichets de l’Etat, auprès des comptables du trésor, et des PTT ou aux guichets des
établissements financiers publics ou privés (banques, institutions financières non
bancaires etc.).
* La vente directe en bourse (sur le marché boursier) 22 : Les bourses de valeurs
sont des marchés où s’achètent et se vendent les valeurs mobilières, actions et
obligations des sociétés privées et emprunts publics.
* La vente aux banques : Les banques interviennent dans la souscription publique en
prêtant ou plutôt en louant leurs guichets. Les opérations qu’elles font alors sont
seulement des opérations de commission. Mais, une intervention plus directe est
possible: des banques groupées en syndicats de banquiers achètent l’emprunt en
quelque sorte, pour le revendre à leurs clients. On dit qu’elles le « prennent ferme ».
Techniquement, cette vente de l’emprunt aux banques peut se faire de gré à gré, par
accord direct entre le Ministère des Finances et les banques ou par adjudication à la
banque la plus offrante.
Le recours aux banques, présente l’avantage de procurer à l’Etat de l’argent
immédiatement, le circuit étant court, la clientèle limitée.
Par contre, la vente des titres en bourse présente l’avantage de la discrétion, le
souscripteur ignorant si son titre est ancien ou nouveau.

B. La dette publique23

L’emprunt ne crée pas une charge pour les générations futures considérées
globalement. Mais, il crée une obligation juridique pour l’Etat de prélever les sommes
nécessaires au service de la dette (intérêts et remboursement) sur l’ensemble des
citoyens. L’emprunt ne crée pas de charges publiques, au sens précis de ce terme; mais
il entraîne des dépenses publiques de transfert et les dépenses de la dette. L’emprunt
assure le financement du solde budgétaire, c’est-à-dire du déficit budgétaire ; ce solde
22
Sur les mécanismes boursiers, se rapporter aux ouvrages spécialisés de Droit financier précités.
23
HANSMEJER (K.H.), « La dette publique comme moyen de reporter les charges sur les générations futures », Revue de science
financière, 1963, pp.544 et suiv. ; M. DUVERGER : Finances publiques, précité, p. 192 à 204.
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représente l’excédent des charges sur les recettes, pour l’ensemble des opérations du
budget général et des comptes spéciaux du Trésor.
Ces dépenses, l’Etat va chercher naturellement à les reproduire et à les aménager
de la façon la plus commode pour lui: c’est vers cette optique de l’allégement des
charges qu’est surtout orientée la politique de la dette. Le moyen le plus direct à cet
égard consiste à diminuer le capital de la dette ; c’est ce qu’on appelle
« l’amortissement ». Mais il est possible aussi, sans toucher au capital, de diminuer les
intérêts ; ce qui allège les charges de gestion de la dette.

1) La gestion de la dette publique


Il est utile de préciser que dans les pays développés, l’accroissement considérable
des besoins de financement et le développement de la dette publique qu’il provoque,
ont conduit les Etats à des modifications profondes de politiques de gestion. On ne
s’attardera pas ici sur les différentes réformes menées, lesquelles s’accroissent toutes
dans le cadre de la globalisation financière.

a) Dette et emprunt
L’emprunt et la dette sont des composantes majeures de l’histoire financière dans
beaucoup de pays. Ils représentent un enjeu cardinal pour les finances publiques. Si
pendant plusieurs décennies ils n’ont pas posé de problèmes pour notre pays, ils
constituent aujourd’hui un casse-tête pour le Gouvernement qui, tant sur le plan interne
que sur le plan international n’est plus en mesure de supporter le poids de
l’endettement consécutif aux engagements financiers non honorés vis-à-vis de ses
créanciers (publics et privés).
La notion d’emprunt a été examinée précédemment. Elle se confond souvent
avec celle de la dette. Il est donc nécessaire de préciser les contours de la notion de la
dette publique pour une meilleure compréhension.
En effet, la dette est une notion plus large que l’emprunt. Elle comprend
généralement :
- la dette à terme (ou dette consolidée) composée elle-même du montant des
emprunts contractés directement par l’Etat à l’intérieur ou à l’extérieur du pays ;
- la dette viagère, née indépendamment de tout emprunt (pensions, retraites) ;
- la dette flottante qui est composée de :
* certificats et bons du trésor ;
* titres à long terme échus (dette exigible) ;
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* avances consenties au trésor par la banque centrale ou par les gouvernements et


organismes extérieurs ;
* dépôts effectués dans les caisses composant le circuit du trésor.

b) Dette publique et dette de l’Etat


La dette publique au sens strict où elle est entendue ci-dessus comprend
uniquement les « engagements de l’Etat ». Elle ne comprend donc pas le montant de
certains emprunts qui pourtant intéressent les finances de l’Etat, soit parce qu’ils servent
à financer des dépenses décidées par le Gouvernement, soit parce qu’ils sont garantis
par l’Etat. Il s’agit des emprunts que l’Etat contracte par l’intermédiaire de personnes
morales distinctes telles que :
- les entreprises de son secteur industriel et commercial. On parle dans ce cas de la
dette rétrocédée.
- les organismes de crédit public (caisse d’épargne) qui empruntent et prêtent pour le
compte de l’Etat et déchargent ainsi le budget d’opérations importantes qui en
souligneraient le déséquilibre. Ce rôle a été joué autrefois par la CADECO (Caisse
d’Epargne du Congo) et encore moins par la SOFIDE (Société Financière de
Développement) au cours de la décennie 70 et pendant les cinq premières années
de la décennie 80. A noter que cette institution financière non bancaire est en phase
finale de liquidation depuis 2002.

c) Les mécanismes de gestion de la dette publique


C’est une phase qui constitue le paiement des intérêts et avantages. On distingue
entre :
- la gestion normale qui consiste à en payer les intérêts et aussi à en
soutenir éventuellement les cours en bourse ;
- et la gestion exceptionnelle qui tend à obtenir une diminution des intérêts.
C’est la conversion.

1° La gestion normale de la dette publique. Celle-ci comprend trois techniques :

2° La gestion exceptionnelle de la dette publique


Deux techniques ont été prévues à cet effet : la technique de la conversion ; et
celle de la consolidation. Ces deux techniques ont pour but de réduire le poids de la
dette publique.
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- La conversion – C’est une opération de transformation d’un titre ancien en titre


nouveau ayant une même valeur en capital comportant un taux d’intérêt faible. On
distingue 3 types de conversion :
 La conversion forcée : elle a lieu lorsque l’Etat oblige le public à accepter un
nouveau titre portant intérêt inférieur.
 La conversion semi-forcée : elle consiste à présenter au porteur l’alternative
suivante: ou accepter le nouveau titre assorti d’avantages moindres que l’ancien
ou être remboursé.
 La conversion facultative : elle est l’inverse de la conversion forcée. Ici, il y a
l’accord du particulier. Elle n’est généralement possible que lorsque le marché
financier est défavorable ou lorsque le taux d’intérêt sur le marché est supérieur
à celui qui prévalait auparavant.
L’Etat peut baisser le taux sans descendre au-dessous du taux du marché. D’une
manière générale, c’est la conversion forcée qui est utilisée : l’Etat donne un nouveau
taux d’intérêt inférieur, baisse unilatéralement le taux d’intérêt.

- La consolidation – Consolider la dette revient à la transformer du court ou moyen


terme en une dette à long terme ou perpétuelle. Dans le cas de la dette perpétuelle,
l’Etat ne remboursera jamais la dette principale mais paiera continuellement les
intérêts. La consolidation peut être forcée ou facultative. L’avantage pour l’Etat, c’est
qu’il négocie.

2) L’amortissement de la dette 24

Autrement dit, il s’agit du remboursement du principal (capital) ou d’une partie du


capital. Il existe trois types d’amortissement :
- l’amortissement obligatoire ;
- l’amortissement facultatif ;
- l’amortissement par la dépréciation monétaire.

3) Les problèmes de gestion de la dette publique


Ils constituent un casse-tête pour tous les Etats.

24
L’amortissement de la dette publique (travaux de l’Institut International des Finances publiques), 1939 ; voir également
DUVERGER (M.): p.199.
62
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Section 3 : L’émission de la monnaie comme ressource de Trésorerie 25

Lorsque l’utilisation du compte courant et l'émission d'emprunts ne suffisent pas


à assurer la Trésorerie, l’Etat peut créer de la monnaie à concurrence de ses besoins.
Cette création de monnaie s’effectue ostensiblement par les avances de la Banque
Centrale. Ces avances ne sont pas sans danger. Du point de vue financier, le recours
aux avances de la Banque Centrale signale la difficulté du Trésor à émettre des
emprunts en quantité suffisante et révèle une crise de confiance dans l’Etat.

§1. L’hostilité des financiers classiques vis-à-vis de la création monétaire

Les classiques n’acceptaient la création monétaire qu’exceptionnellement. Le


principe était l’interdiction.

A. Arguments contre l’émission monétaire

Deux arguments sont généralement avancés contre le recours à l’émission


monétaire. Les détracteurs de cette procédure avancent à cet effet que :
- l’émission est une cause de l’inflation;
- l’émission est une cause de mauvaise orientation de l’économie.

B. Exceptions à l’hostilité des classiques

Malgré leur hostilité à la création monétaire, les financiers classiques admettaient


quelques cas pouvant justifier le recours à la technique de l’émission, c’est notamment
les circonstances de crise grave au cours desquelles les autres moyens de financement
des dépenses publiques s’avèrent inadéquats. On pense ici aux :
- circonstances de guerre (internationales ou autres);
- catastrophes naturelles;
- crise économique.

§2. Rôle positif de l’émission de monnaie dans la théorie moderne

Les financiers modernes reconnaissent les dangers de l’émission monétaire mais


ils estiment que ce danger est conditionnel et, ce faisant, tendent à souligner ses
bienfaits principalement les avantages économiques et sociaux que l’Etat peut tirer de
l’émission.

25
Voir à cet égard : DUVERGER (M), p. 227 à 234 ; GAUDEMET (P.M.) et MOLINIER (J.), Finances publiques, Budget et Trésor,
Précité.
63
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A. Les avantages financiers de la création monétaire


Ces avantages apparaissent dans les cas où tous les autres moyens s’avèrent
insuffisants. Ainsi, la création monétaire paraît plus que les emprunts un moyen
camouflé d’avoir des ressources. Mais ceci n’est qu’apparent par rapport à l’emprunt:
celui-ci permet à l’Etat de rafler ce supplément. En réalité, ces avantages ne constituent
qu’un pis-aller. Avec un peu de recul dans le temps, on peut bien mesurer les
conséquences d’une émission monétaire incontrôlée telle que vécue au Congo
Démocratique au cours de deux dernières décennies du 20 e siècle : une émission
monétaire sans contrepartie et dictée par la propagande politicienne et l’achat de
consciences des acteurs politiques.

B. Les avantages économiques

D’emblée, il faut signaler que les manipulations monétaires ne devraient pas en


général être considérée uniquement comme un moyen pour l’Etat de se procurer des
ressources, mais aussi comme un instrument de l’interventionnisme public dans la vie
économique, par le rôle régulateur qu’il joue dans la société. La création monétaire peut
être un moyen de stimulation économique à la fois de la consommation et de
l’investissement. Stimulation de la consommation par l’augmentation du pouvoir d’achat
des citoyens et de l’Etat lui-même qui achète. Stimulation de l’investissement par la
possibilité qui s’offre de créer des entreprises ou de renflouer certaines d’entre elles en
difficultés par des subventions. Dans l’un et l’autre cas, l’inflation apparaît comme un
élément secondaire et on se préoccupe de la maîtriser.

C. Les avantages sociaux

La création monétaire peut être utilisée comme un moyen de lutte contre le


renforcement des inégalités sociales. Dans beaucoup de pays, l’Etat s’occupe de
diminuer l’emprise de certaines catégories sociales (nationales) sur l’économie. Une
forte concentration des richesses entre les mains d’une classe privilégiée peut avoir des
conséquences imprévisibles dans la société.
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CHAPITRE III : LES RESSOURCES PUBLIQUES EXCEPTIONNELLES : LE


FINANCEMENT EXTERIEUR DES DEPENSES PUBLIQUES

Il s'agit principalement des ressources mobilisées par le recours au financement


des bailleurs de fonds extérieurs qu'il s'agisse des Etats, des institutions financières
internationales (Banque Mondiale, Fonds monétaire International, Banque Africaine de
développement) et des organismes internationaux (Union Européenne, Programme des
Nations Unies pour le Développement - PNUD) qui financent les projets de
développement.

Section 1 : Les ressources publiques extérieures en temps de paix

L’emprunt international reste aujourd’hui la principale ressource publique


extérieure en temps de paix. Cependant, on peut signaler l’existence d’un impôt
international bien que n’étant pas formalisé par les Etats au niveau des Nations Unies.

§1. L’emprunt international

L’emprunt international constitue la principale ressource exceptionnelle en période


de paix. Il traduit la solidarité entre les peuples et permet le partage des richesses de la
planète. Cependant, le recours à l’emprunt international n’est pas sans danger pour les
Etats solliciteurs et aussi pour les Etats créanciers.
A noter que l’emprunt international pose la problématique de la dette publique
extérieure.
Cette ressource peut être mobilisée, à la fois, en temps de paix et en temps de guerre.
Sur le plan technique, la mise en œuvre de l’emprunt international pose à la fois le
problème du choix de monnaie de l'emprunt (dollar, Euro, Yen, etc.) et celui
économique de l'utilisation du pouvoir d'achat supplémentaire procuré par l'emprunt ;la
mauvaise utilisation des fonds empruntés étant à la base de la problématique du
remboursement26.
Si la question semble trouver aujourd'hui des solutions acceptables moralement à
la suite des pressions diverses exercées sur les principaux bailleurs au nom de la
solidarité internationale et de l'équité, il est intéressant de signaler qu’historiquement,
on est parti des mécanismes d’allègement de la dette par rééchelonnement des

26
Notre pays a une dette extérieure évaluée à 13,9 milliards de dollars américains. Cette dette est un problème
colossal qui handicape le développement du pays en raison de l’incapacité de l’Etat à honorer ses engagements vis-à-
vis des bailleurs de fonds. La dette extérieure elle-même comprend :
- le principal : 20% de l’ardoise
- les intérêts et encours, 10%
- les pénalités pour non-respect des échéanciers, 70%.
66
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paiements vers un mécanisme d’annulation et de réduction dans le cadre de l’initiative


des pays pauvres très endettés.
§2. Mécanismes de gestion de l’emprunt international
Il s’agit de gérer la dette extérieure (voir les mécanismes de gestion de la dette
intérieure précédemment examinés auxquels on peut ajouter ceux issus de l’initiative
des pays pauvres très endettés dans le cadre du règlement de la dette extérieure des
pays en développement.

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Les développements qui précèdent ont démontré la complémentarité entre les


ressources publiques et les dépenses réalisées dans le cadre du fonctionnement de
l’Etat.

L’Etat est une personne morale. Il est un être social déterminé à se maintenir en
vie jusqu’à la fin des temps et de faire vivre le pays en paix, moyennant son
assentiment. Dans cette vocation, il a des droits et des obligations.

Il a notamment le droit d’opérer des prélèvements sur la richesse du pays et de


frapper la monnaie, d’une part, et d’autre part l’obligation de couvrir les dépenses mises
à sa charge pour l’acquisition des biens et des services.

Toutefois, l’Etat n’a pas le droit à l’arbitraire. Il n’est pas non plus tenu à
l’impossible. Il est encadré par des lois. Il est tenu de les respecter et celles-ci le
protègent.

Ces lois régissent les prélèvements fiscaux, la création monétaire et les dépenses
publiques. Visant divers équilibres, elles s’imposent à tous et dictent le comportement à
tous, y compris l’Etat.

Les dites lois sont d’autant respectées qu’elles cristallisent des équilibres sur
lesquels sont fondés des consensus qui sont le socle de la paix sociale et le ciment de la
cohésion nationale.

Ainsi :
o il n’est de taxe fiscale que prévue par la loi ; l’arbitraire n’est pas de mise ;
o il est admis que, d’une année à l’autre, les prélèvements fiscaux diminuent alors
que la richesse du pays croît. Le contraire fait problème, vivre de l’endettement
étant une expérimentation de l’agonie ;
o il est admis qu’au cours d’une période donnée, les dépenses publiques s’élèvent
au plus, à la hauteur des recettes fiscales tandis que l’inverse fait problèmes :
tant au niveau global qu’au niveau d’un programme ou d’une ligne budgétaire ;
67
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o il est établi l’unicité de la caisse des recettes fiscales ainsi que l’unicité du centre
d’ordonnancement des paiements tandis que la multiplicité desdits organes fait
désordre, le pire étant la privatisation du fisc ;
o il est impératif, pour la comptabilité publique, de retracer le moindre flux financier
et d’avoir une structure de ventilation des flux financiers selon des critères
variés : par programme, par nature, par région, etc. Toute occultation ou toute
omission du moindre quantum financier participe à l’opacité qui fait gros
problème.

Les ressources et les dépenses constituent donc les deux principaux moyens
d’actions financiers de l’Etat. Les ressources du budget général sont principalement
fiscales et doivent être recouvrées pour répondre aux missions de l’Etat. Les ressources
non-fiscales représentent environ 4% de recettes, ce qui pose un problème sérieux dans
la gestion financière publique. Le montant brut des recettes est toutefois amputé, pour
plus du tiers, de divers prélèvements et remboursements au profit des bénéficiaires
autres que l’Etat (entités administratives décentralisées, services administratifs
d’assiette). Les dépenses du budget général sont supérieures aux recettes et le
financement de cet écart est assuré par l’emprunt. Les marges de manœuvre budgétaire
dont dispose l’Etat pour ses dépenses devraient être limitées par la rigidité de certaines
dépenses qui se caractérisent par une inertie et une croissance spontanée. Cette
propension à la dépense devrait justifier une rationalisation des choix budgétaires.

Si gouverner, c’est dépenser, il faut préciser que c’est dépenser économiquement


utile pour générer de ressources nécessaires au développement de la Nation.
68
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DEUXIEME PARTIE : LA PLANIFICATION DE L’ACTION FINANCIERE DE


L’ETAT : LE BUDGET DE L’ETAT

TITRE I : LA NOTION DE BUDGET DE L’ETAT OU LOI DE FINANCES DE L’ANNEE

Les finances étatiques sont fondées sur une dualité que la loi n° 11/011 du 13
juillet 2011 relative aux finances publiques a réaffirmée. Alors que la loi de finances est
un texte de synthèse qui regroupe les grandes masses des ressources et des charges de
l’Etat, le budget est « constitué par l’ensemble des comptes qui décrivent toutes les
ressources et charges permanentes ». Il comprend la partie descriptive et comptable de
la loi de finances.
Le budget retrace les ressources et charges budgétaires de l’Etat sous forme de
recettes et des dépenses. Le budget est une description des ressources et charges de
l’Etat.
Les finances de l’Etat apparaissent dans le budget à travers les quatre (4) phases
de l’élaboration, du vote, de l’exécution et du contrôle.
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CHAPITRE I : LES DIFFERENTES LOIS DE FINANCES

Les lois de finances de l’Etat résultent de processus préparatoires complexes, en


particulier la loi de finances initiale. Celle-ci est par ailleurs soumise à une procédure
d’adoption parlementaire sophistiquée. Politiquement très sensibles, techniquement
compliqués, la préparation et le vote du budget de l’Etat doivent aujourd’hui intégrer un
degré supplémentaire de complexité avec le cadre financier pluriannuel.

Section 1 : Les quatre catégories prévues par les textes


Conformément aux dispositions de l’article 18 de la loi n° 11/011 du 13 juillet
2011 relative aux finances publiques, ont le caractère de loi de finances :

§1. La loi de finances de l’année


Elle autorise chaque année, les dépenses et les recettes de l’Etat, mais également
la perception des impôts et taxes de toutes natures qui alimentent les finances des
collectivités territoriales.

§2. Les lois de finances rectificatives


Ce sont des lois qui modifient en cours d’exercice les dispositions de la loi de
finances initiales. On les appelle aussi collectifs budgétaires.

§3. La loi portant reddition des comptes


La loi portant reddition des comptes est celle qui retrace les recettes et les
dépenses une fois le budget exécuté.

§4. La loi portant ouverture de crédits provisoires.


Il s’agit d’une loi adoptée par le Parlement en cas de retard du Parlement sur le
vote du budget.

Section 2 : La structure de la loi de finances initiale

La loi relative aux finances publiques détermine pour un exercice, la nature, le


montant et l’affectation des ressources et des charges de l’Etat ainsi que l’équilibre
budgétaire et financier qui en résulte. Elle tient compte d’un équilibre économique défini
ainsi que des objectifs et des résultats des programmes qu’elle détermine.
Le projet de loi de finances de l’année N comprend un article liminaire qui expose
les prévisions de solde structurel et effectif pour l’ensemble des administrations
70
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publiques pour l’année n, la prévision d’exécution pour l’année N-1 et l’exécution de


l’année N-2.

§1. Les ressources

Conformément aux dispositions de la loi relative aux finances publiques (articles


20 et suivants), la première partie est ciblée sur les ressources publiques et contient
notamment :
- l’autorisation de percevoir les ressources de l’Etat et les impositions de toute
nature affectées à des personnes morales autres que l’Etat sert de contenu à
l’article 1er de toute loi de finances initiale (art. 20) ;
- les dispositions relatives aux ressources de l’Etat qui affectent l’équilibre
budgétaire et l’évaluation de chacune des recettes budgétaires (art. 21) ;
- les dispositions relatives aux affectations de recettes du budget de l’Etat, en
particulier les prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales
(art. 22) ;
- les plafonds des dépenses du budget général et de chaque budget annexe, les
plafonds des charges de chaque catégorie de comptes spéciaux ainsi que le
plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’Etat (art. 24) ;
- l’octroi des garanties de l’Etat et leurs conditions (art. 23) ;

§2. Les dépenses


Les dépenses comprennent notamment : pour le budget de l’Etat, les dispositions
affectant directement les dépenses budgétaires de l’année, les modalités de répartition
des concours du pouvoir central aux provinces et entités territoriales décentralisées,
l’approbation des conventions financières et toute disposition relative à l’information et
au contrôle du parlement sur la gestion des finances du pouvoir central.
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Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

CHAPITRE II : LES PRINCIPES ENCADRANT LA LOI DE FINANCES DE L’ANNEE

Cinq principes budgétaires sont consacrés par la loi des finances publiques,
auxquels peuvent s’ajouter d’autres liés à la gestion financière.

Section 1. Le principe de l’annualité

§1. Le contenu du principe

Le principe de l’annualité est énoncé à l’article 5 de la loi relative aux finances


publiques comme suit : « L’exercice budgétaire s’étend sur une année civile allant du 1 er
janvier au 31 décembre. Toutefois, les crédits y afférents découlent d’une budgétisation
pluriannuelle consistant à prévoir les recettes, les dépenses et le financement des
opérations du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées
sur un horizon de trois années. Ce cadrage budgétaire pluriannuel inclut le cadre des
dépenses à moyen terme ».

§2. Les aménagements au principe

Le principe de l’annualité qui impose une périodicité annuelle pour l’élaboration


des budgets publics est soumis à des aménagements.
Des lois de finances rectificatives (appelées également collectifs budgétaires) qui
modifient la loi de finances initiales, peuvent être votées en cours d’année.
Par ailleurs, il faut mentionner la technique de report de crédit sur l’exercice
budgétaire suivant.

Section 2. Le principe de l’unité


L’unité budgétaire exige que l’ensemble des dépenses et des recettes soit retracé
dans un document unique (budget général) de façon à permettre à l’autorité votant le
budget d’en avoir une vision exhaustive.

§1. Signification du principe

Elle se retrouve dans l’énoncé de l’article 6 de la loi relative aux finances


publiques :
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« Le pouvoir central, la province ou l’entité territoriale décentralisée présente


chacun en ce qui le concerne et dans un document unique, toutes les ressources et
toutes les charges afférentes à une année.
Le budget de l’entité territoriale décentralisée est intégré en recettes et en
dépenses dans le budget de la province pour constituer le budget provincial. Les
budgets provinciaux sont consolidés avec le budget du pouvoir central pour constituer le
budget de l’Etat ».

§2. Exceptions au principe

Les budgets annexes et les comptes spéciaux, qui sont rassemblés avec le budget
général dans la loi de finances, constituent des aménagements au principe d’unité.
Quatre comptes spéciaux peuvent être cités ici :
- les comptes d’affectation spéciale qui retracent les opérations budgétaires
financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation
avec les dépenses concernées ;
- les comptes de commerce qui retracent des opérations à caractère commercial et
industriel effectuées à titre accessoire, par des services de l’Etat non dotés de la
personnalité morale ;
- les comptes d’opération monétaire qui retracent les dépenses et les recettes de
caractère monétaire ;
- et les comptes de concours financiers qui retracent les avances et prêts consentis
par l’Etat.

Section 3. Le principe de l’universalité

L’universalité budgétaire veut que l’ensemble des recettes finance l’ensemble des
dépenses et se décline sous deux formes : l’absence de contraction entre recettes et
dépenses et la non-affectation des recettes aux dépenses.

§1. Contenu du principe

Il est repris dans les dispositions de l’article 7 de la loi relative aux finances
publiques, qui dispose : « Le montant intégral des produits est enregistré sans
contraction entre les recettes et les dépenses et, par conséquent, entre les dettes et les
créances. L’ensemble de recettes assure l’exécution de l’ensemble de dépenses sans
aucune affectation de leur produit à des dépenses particulières ».
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§2. Exceptions au principe


Les budgets annexes et les comptes d’affectation spéciale qui prévoient
l’affectation de recettes à certains types d’opérations viennent déroger à la règle de
non-affectation.
Dans le cadre du budget général, on peut citer les fonds de concours (ils
permettent d'ouvrir des crédits et de les affecter à certaines dépenses). Par exemple,
d'intérêts publics (notamment pour les catastrophes naturels) ; les rétablissements des
crédits, les dons et legs. A côté du budget général, on peut citer les budgets annexes,
les comptes spéciaux du Trésor. Il faut aussi signaler les affectations hors budget qui
constituent des dérogations au principe de l'universalité budgétaire. Exemple avec les
taxes parafiscales. C'est le cas pour la RDC avec la taxe RAM (registre des appareils
mobiles).

Section 4. Le principe de spécialité

Ce principe impose d’indiquer précisément le montant et la nature des opérations


qui sont prévus par la loi.

§1. Contenu du principe

L’article 8 de la loi relative aux finances publiques énonce : « Les crédits sont
spécialisés par grande nature de dépenses ou titres tel que précisé à l’article 37 de la
présente loi et par source de financement. Ils sont regroupés par programme. Les
programmes peuvent être regroupés par fonction.
La spécialité et le détail des crédits doivent être conformes à la nomenclature
budgétaire des dépenses en vigueur. Dans le cadre d’un budget programme, la
présentation des crédits par subdivision de la nomenclature budgétaire, chapitre, article
et littera est indicative ».

§2. Dérogation au principe

Le principe de spécialité connaît un certain nombre de dérogations. Par exemple,


les virements de crédit peuvent modifier la répartition des crédits entre programmes
d’un même ministère. Toutefois, le montant cumulé des crédits ayant fait l’objet de
virements, ne peut dépasser 2% de crédit ouvert pour chacun des programmes
concernés.
74
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Section 5 : Le principe de légalité des recettes et des dépenses

Ce principe est énoncé dans les dispositions des articles 9 et 10 de la loi relative
aux finances publiques.

§1. La légalité des recettes

L’article 9 de la LOFIP indique ce qui suit :


« Il ne peut être établi d’impôts que par la loi
Il ne peut être établi d’exemption ou d’allègement fiscal qu’en vertu de la loi ;
La loi fixe la nomenclature des autres recettes locales et les modalités de leur
répartition.
Conformément à l’article 122 point 10 de la Constitution, les règles relatives à
l’assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des impositions de toutes nature
sont fixées par la loi.
Les Assemblées provinciales, les organes délibérantes des entités territoriales
décentralisées ne peuvent créer ni impôt, ni taxe, ni droit ou redevance. Toutefois, dans
les conditions prévues par la présente loi, l’Assemblée nationale et le Sénat peuvent,
conformément à l’alinéa 2 de l’article 205 de la Constitution, habiliter par une loi, les
Assemblées provinciales et les organes délibérants des entités territoriales
décentralisées à fixer, par édit budgétaire ou par décision budgétaire le taux et/ou les
modalités de recouvrement de certaines impôts provinciaux et locaux ».

§2. La légalité des dépenses

L’article 10 indique ce qui suit :


« Aucune dépense ne peut être exécutée :
- si elle ne rentre pas dans les compétences du pouvoir central, des provinces ou
des entités territoriales décentralisées telles que définies dans la Constitution et
la loi ;
- si elle n’a pas été définie par un texte régulièrement adopté et publié par
l’autorité compétente, les obligations financières créées par toute loi, édit,
décision, ordonnance, règlement ou contrat ne deviennent certaines et définitives
qu’avec l’ouverture des crédits correspondant au budget du pouvoir central, de la
province ou de l’entité territoriale décentralisée ;
- si les crédits nécessaires ne sont pas disponibles au budget ;
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Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

- si elle correspond à des opérations financières en tout ou partie sur ressources


extérieures pour lesquelles la mobilisation des fonds y relatifs n’est pas
effective ».

Section 6 : Le principe de la sincérité

Ce principe est plus récent. Il a été dégagé par la jurisprudence du conseil


constitutionnel français. Il repose sur l’idée que la sincérité des prévisions budgétaires
conditionne le respect du principe du consentement à l’impôt. La loi relative aux
finances publiques l’applique au compte de l’Etat et aux lois de finances.
Il est énoncé à l’article 11 de la loi relative aux finances publiques, dans les
termes ci-après :
« Le budget du pouvoir central, de la province ou de l’entité territoriale
décentralisée présente de façon sincère l’ensemble de leurs ressources et de leurs
charges. La sincérité s’apprécie compte tenu des informations disponibles et des
prévisions qui en découlent.
Tout projet de loi, d’édit, de décision, d’ordonnance ou de règlement ayant une
incidence financière doit être accompagné d’une annexe précisant ses conséquences au
titre du budget de l’année d’entrée en vigueur et de l’année suivante.
Les comptes du pouvoir central, de la province et de l’entité territoriale
décentralisée doivent être réguliers, sincères et refléter une image fidèle de leur
situation financière et patrimoniale ».
Notons enfin, à propos de ces principes budgétaires, qu’ils sont inégalement
appliqués. La gestion extrabudgétaire des programmes d’investissement d’avenir
méconnaît les principes d’annualité, d’unité et d’universalité du budget de l’Etat.
76
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TITRE II : L'ELABORATION, L’ADOPTION ET L’EXECUTION DES LOIS DES


FINANCES

CHAPITRE 1 : L’ELABORATION DE LA LOI DE FINANCES DE L’ANNEE

L'élaboration du budget relève de la compétence exclusive du pouvoir exécutif:


dans la mesure où le budget constitue la traduction de la politique du Gouvernement, il
paraît légitime que celui-ci soit chargé de sa préparation, en outre, seul le
Gouvernement dispose des ressources techniques et humaines nécessaires à la mise au
point du budget. La préparation et le vote sont insérées dans des procédures
réglementaires et constitutionnelles.

Section 1 : Les auteurs du Budget

§1. L’aspect politique de la préparation

L’initiative de l’élaboration des textes budgétaire est un monopole du


gouvernement.

A. Le Ministre ayant le Budget dans ses attributions et le Ministre des


Finances

C’est le problème politique de savoir qui des membres du gouvernement a


prééminence et compétence en matière d’élaboration du projet de budget de l’Etat. La
réponse à cette question diffère selon les régimes politiques adoptés par les Etats.
A titre de rappel, les systèmes mis en œuvre tiennent compte de la différenciation
résultant de la nature des régimes institués. En République démocratique du Congo,
c’est par un système de collaboration entre les Ministères du Budget et des Finances
que la question semble être résolue.
B. Le Premier Ministre
L’article 91 de la Constitution dispose : « Le Gouvernement définit, en concertation
avec le Président de la République, la politique de la nation et en assure la
responsabilité ».
L’article 77 de la loi n° 11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques
dispose : « Sous l’autorité du 1er Ministre, le Ministre ayant le Budget dans ses
attributions prépare le projet de loi de finances de l’année qui est présenté au
77
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Gouvernement pour approbation avant sa transmission à l’Assemblée Nationale ». Le


Premier Ministre n’intervient pas dans le processus technique et administratif de
préparation du budget, mais c’est lui qui fixe la stratégie budgétaire, à partir des grands
choix qui lui sont proposés par le Ministre du Budget et lui qui rend les arbitrages sur les
différends pouvant opposer le Ministre du Budget aux « Ministres dépensiers ».

C. Le Président de la République
A la faveur de l’article 77 de la Constitution, qui prévoit la collaboration entre les
deux chefs de l’exécutif, l’influence du Président de la République sur la politique
budgétaire est évidente compte tenu de la place éminente qu’occupe l’institution
Président de la République et que le Gouvernement issu des élections doit
nécessairement appliquer le programme du Président de la République élu au suffrage
universel.

§2. Les problèmes techniques

Ils concernent les procédés employés pour évaluer les recettes et les dépenses
inscrites dans le projet de budget.
Les méthodes d’évaluation des dépenses et des recettes qui ont beaucoup évolué
conservent un caractère administratif ; c’est-à-dire qu’elles se font dans le cadre des
services publics, d’après la nature des dépenses et des recettes.

A. La prévision des dépenses

Celle-ci semble relativement facile : il suffit pour chaque ministère d’évaluer


directement le coût des services publics qui dépendent de lui, compte tenu de leur
extension possible. Techniquement, cela ne présente pas de très grandes difficultés.
Mais, des considérations politiques peuvent conduire quelquefois à fausser
volontairement les prévisions, ce qu’il convient d’éviter.
1. Les dangers d’évaluations majorées ou minorées. Le risque d’évaluation majorée est
le plus naturel : il concerne surtout les services existants. En présentant une
surévaluation de leurs besoins, on sera d’abord à l’aise dans la réalisation des
dépenses, et l’on pourra disposer d’excédents qui seront éventuellement utilisables
ailleurs par voie de transferts ou de virement. Le danger de sous-évaluation semble
plus étrange au premier abord.
78
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

2. La prétendue règle de la priorité des dépenses. On admet traditionnellement que le


Budget de l’Etat se caractérise par la priorité des dépenses sur les recettes. Mais, cette
proposition est de moins en moins admise aujourd’hui car les ressources de l’Etat sont
limitées et toutes les dépenses de l’Etat ne sont pas nécessaires. D’où le recours à des
compressions budgétaires pour établir un pseudo-équilibre.

B. L'évaluation des recettes

Si la prévision des dépenses ne présente guère de difficultés techniques et ne


soulève que des problèmes de sincérité politique, il n'en est pas de même du budget
des recettes. Le rendement des impôts, en particulier, dépend de toute une série de
facteurs plus ou moins délicats à prévoir.
Le rendement des différentes ressources financières est fonction de la conjoncture
économique. Dans ce contexte, il est difficile de faire des projections. Mais, cette
difficulté est surmontée grâce au perfectionnement des techniques financières
permettant l’abandon de la règle de la pénultième année pour le système de l’évaluation
directe.

1) La règle traditionnelle de la pénultième année


C’est une règle classique qui a été inaugurée en France par Villèle en 1823. Il
s’agit d'une évaluation forfaitaire des recettes, sur la base des résultats du dernier
budget exécuté au moment où l’on prépare le projet budgétaire. Comme cette
préparation intervient pendant l’application du budget de l’exercice précédent, c’est
l’avant dernier budget qui sert ainsi de base aux évaluations, le budget de la
« pénultième » par rapport à l’année de budget qu’on élabore.

La règle de la pénultième année a été longtemps prônée comme un modèle de


sagesse financière. Par l'effet de l'accroissement normal du revenu national d'une
année à l'autre, les recettes publiques ont tendance à s'accroître : l'évaluation forfaitaire
sur la base du dernier budget a donc un caractère de prudence, qui devrait entraîner de
légères plus-values de recettes, un léger excédent budgétaire, idéal des finances
classiques.

Cependant, cette règle présente de grandes faiblesses. Les principales sont d'ordre
économique. La règle de la pénultième année ignore le phénomène de cycles
économiques marqué par le niveau économique selon la conjoncture. D'où son
abandon en France depuis 1938.
79
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

2) Le système actuel de l'évaluation directe


Ce système repose sur une analyse aussi précise que possible de la conjoncture
économique et sociale. Il tient compte des progrès et du succès de la statistique qui
permet de tenir compte des flux et reflux économiques. Le calcul de recette se fait ainsi
sur la base de la conjoncture économique immédiate, ce qui n’exclut pas de recourir au
passé.

Section 2 : Le calendrier budgétaire

La préparation du projet de loi de finances initiale peut être décomposée en


plusieurs étapes qui normalement se déroulent sur les neufs premiers mois de l’année.

§1. La phase préliminaire appelée autrement phase des perspectives


(de janvier à juin)

Cette phase concerne :


A. La définition d’une stratégie budgétaire

Il s’agit pour les autorités compétentes de présenter des documents de travail


donnant :

1) L’esquisse budgétaire : janvier – février et mars.

Elle est réalisée par la Direction de la Préparation et du Suivi du Budget, exercice


interne de définition des perspectives budgétaires qui permettront à cette Direction de
proposer au Ministre un certain nombre de grandes options s’inscrivant dans la politique
gouvernementale. Il s’agit en fait de l’élaboration des programmes et l’estimation des
coûts par le gouvernement.
Cet avant-projet est soumis au gouvernement pour examen et approbation. En
cas d’approbation le projet du budget est élaboré suivant les orientations du
gouvernement consignées dans l’exposé des motifs.

2) Le cadrage (avril – mai)

Il est réalisé par le Président de la commission interministérielle économique et


financière, après concertation avec les Présidents des autres commissions
80
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

gouvernementales. Qui invite le ministre ayant le budget dans ses attributions à rendre
compte des perspectives budgétaires pour l’année à venir. A l’issue de ce débat
d’orientation du Gouvernement, sont arrêtés les grands objectifs de la politique
budgétaire. Enfin, des instructions dans une lettre de cadrage sont adressées à
l’ensemble de ministres.

B. La finalisation du projet du budget (mois de juin)

Elle passe par la détermination des recettes. Dans le même temps, les prévisions
des recettes sont affinées car les perspectives économiques sont mieux connues en
juillet-août, même si celles-ci restent éminemment aléatoires.
Après examen et adoption en Conseil des Ministres, le projet est déposé dans la
seconde moitié de septembre sur le bureau de l’Assemblée Nationale.
Les prévisions des dépenses et des recettes permettent de définir une première
esquisse budgétaire permettant au directeur de la préparation et du suivi budgétaire
d'élaborer une stratégie budgétaire à soumettre au Ministre concerné au mois de mars.
En cas d'acceptation de l'ébauche par ce Ministre, une instruction y relative est diffusée.
Lorsque des modifications sont demandées, l’esquisse est soumise à une
commission pour réexamen.

§2. La phase du budget préfiguré (fin juin – début août)

C'est la phase cruciale au cours de laquelle :


A. Le gouvernement décide de l’enveloppe globale des dépenses et des recettes. Les
différents services de l’Etat sont invités à déposer leurs prévisions pour
dépouillement par la commission budgétaire en vue de la défense des prévisions. Il
s’agit de la négociation contradictoire du plafond des dépenses de chaque ministère
et service.
B. Les arbitrages sont réalisés après échanges entre ministères et services publics.
C. Les lettres-plafonds sont adressées aux Ministres
Début juillet, le Conseil des ministres décide des plafonds de dépenses. Des
lettres sont par la suite adressées à chaque ministre fixant l’enveloppe des crédits du
ministère ce qui met donc fin, en principe, à toute discussion : ces lettres rappellent les
81
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

principaux points d’accord et d’arbitrage qui précisent les composantes du budget de


chaque ministère.

§3. La globalisation des données (mi-août – début septembre)

Il s’agit de la mise au point définitive du projet budgétaire.


A cet effet, le travail est réalisé comme suit :
A. La commission budgétaire procède au courant du mois d'août à :
- la rédaction de la synthèse des travaux de défense des prévisions budgétaires ;
- l’élaboration de l’avant-projet du budget de l’exercice.
B. Conformément à la Constitution (art. 126 alinéa 3) et à la loi relative aux finances
publiques (art. 83 alinéa 1), le projet de loi de finances de l’année doit être déposé au
bureau de l’Assemblée Nationale avant le 15 septembre de chaque année.

CHAPITRE II : L'ADOPTION DE LA LOI DES FINANCES DE L'ANNEE

Les règles du parlementarisme rationalisé trouvent une expression renforcée à


l'occasion de la discussion budgétaire : le particularisme de la procédure budgétaire, qui
limite les prérogatives parlementaires, s'explique par des exigences d'efficacité, de
rapidité, de maintien de l'équilibre financier et par la volonté de contenir d'éventuelles
dérives dépensières.

Section 1. L’examen du projet de loi de finances de l’année

Le vote du budget est une prérogative essentielle du Parlement dans un régime


démocratique.

§1. Rôle délibératif budgétaire du parlement


Avant de procéder au vote, le Parlement doit délibérer. Deux étapes sont prévues
à cet effet :
- les discussions au niveau de la commission économique et financière;
- les débats en plénière.

1) Le rôle de la commission économique et financière du parlement


De façon générale, les commissions économiques et financières des deux
chambres jouent un rôle primordial dans l’examen, l'analyse et la discussion du budget.
82
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

2) Les débats en commission


Le système congolais s’inspire du système franco-américain, (avec ses
particularités, justifiées par la nature des régimes politiques institués). Depuis la
promulgation de la Constitution du 18 février 2006, les Commissions économique et
financière de deux chambres avec les sous-commissions instituées, participent
activement à l’analyse de projets budgétaires. C’est devant ces sous-commissions que
passaient les responsables des services et organismes publics pour la défense de leurs
prévisions.

§2. Le Pouvoir budgétaire du Parlement


Les séances plénières du Parlement sont l’occasion offerte à chaque député de
formuler ses critiques négatives ou positives, à la fois vis-à-vis du projet
gouvernemental et vis-à-vis des amendements apportés. Autrefois, le Parlement avait
une souveraineté financière totale, mais aujourd’hui, ce pouvoir s’est considérablement
dégradé. Il ne peut pratiquement pas modifier profondément le budget proposé par le
gouvernement. En plus, sa compétence matérielle est fort limitée : non seulement, il
n'est pas compétent pour l'ensemble des problèmes financiers de l'Etat, mais encore les
délais stricts imposés pour l'adoption du budget constituent une contrainte pour les
députés.

1) Affaiblissement des pouvoirs des députés en matière de dépenses


La tendance à restreindre les pouvoirs parlementaires à ce niveau est
généralement considérable dans tous les pays. Un acte même du Parlement peut limiter
le pouvoir de celui-ci, comme c’est le cas en Grande-Bretagne. En France, depuis la 3 e
République jusqu’à ce jour, les députés gardent l’initiative en matière de suppression de
dépenses, mais ils ne peuvent pas en principe créer des dépenses.

L’expérience révèle qu’en RDC, depuis 2006, le Parlement n’a pas su user des
pouvoirs importants lui conférés par le législateur pour influer sur la gestion des
finances publiques par le gouvernement.

2) Affaiblissement des pouvoirs des députés en matière des recettes


De façon générale, l’évolution est presque identique comme en matière des
dépenses, mais le principe est inverse. Les députés ont perdu l’initiative d’amendements
pour diminuer ou supprimer les recettes, mais ils gardent toute initiative pour créer les
recettes. L’article 127 de la Constitution du 18 février 2006 est assez explicite à cet
égard : « Les amendements au projet de loi de finances ne sont pas recevables lorsque
83
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

leur adoption a pour conséquence, soit une diminution des recettes, soit un
accroissement des dépenses, à moins qu’ils ne soient assortis de propositions
compensatoires ».
Ces contraintes juridiques ont amené les parlementaires à rechercher les moyens
pour agir, d’où la tentative de fait de sauvegarder leurs prérogatives. Ces tentatives
varient selon les régimes politiques.
Dans les régimes à système partisan (comme la Grande-Bretagne), le rôle du
Gouvernement est capital. Mais dans le système partisan souple, le Parlement dispose
d’une influence certaine de fait et d’une capacité de mise en œuvre qui lui permet de
manifester son désaccord par deux techniques. Il s’agit de :
 la réduction indicative des crédits : ne pouvant augmenter une dépense qu’il
désire, le Parlement manifestera son mécontentement en le diminuant de
manière explicite. Le Gouvernement averti, procède par lettre de rectification à
l’augmentation souhaitée par le Parlement ;
 le refus de discuter les crédits : dans ce cas, le Parlement refuse de discuter la
partie contestée du budget tant qu’elle n’est pas modifiée par le Gouvernement
dans le sens souhaité par les députés. En régime parlementaire, c’est la motion
de censure qui constitue une épée de Damoclès pour le Gouvernement qui est
obligé de reculer. A noter que cette possibilité est écartée par notre constitution
de la Transition. En effet, l’article 95 alinéa 2 dispose que pendant toute la durée
de la Transition, l’Assemblée nationale ne peut renverser le Gouvernement ni par
le rejet d’une question de confiance, ni par l’adoption d’une motion de censure.

Section 2. Le rôle de décision du parlement en matière budgétaire

La décision budgétaire revient au Parlement. Que les parlementaires aient ou non


la possibilité de modifier le projet gouvernemental, ce sont eux normalement qui lui
donnent force de loi par leur vote.
Mais le Parlement a perdu beaucoup de son influence en cette matière.
§1. Les techniques d’affaiblissement du Parlement dans la décision
budgétaire

Ces techniques sont nombreuses, certaines ayant été institutionnalisées. A titre


indicatif, dans les régimes présidentiels, l’exécutif peut décider en matière budgétaire à
la place du Parlement dans deux circonstances :

1) Lorsque le Parlement est en retard sur l'examen et le vote du projet :


84
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Dans ce cas, le Président de la République est habilité à reconduire par douzième


le budget précédent jusqu’à l’adoption du nouveau budget par le Parlement. (voir les
dispositions constitutionnelles : alinéa 5 de l'article 126 est libellé comme suit : « Si le
projet de loi de finances, déposé dans les délais constitutionnels, n'est pas voté avant
l'ouverture du nouvel exercice, il est mis en vigueur par le Président de la République,
sur proposition du Gouvernement délibérée en Conseil des Ministres, compte tenu des
amendements votés par l’Assemblée Nationale ».

2) Par la mise en œuvre de prérogatives d’origine législative c’est-à-dire la prise


d’ordonnances ou décrets à valeur législative dans les deux cas suivants :
a) le Parlement est en retard ;
Le projet de lois doit être présenté à l’Assemblée avant un certain délai pour
permettre au Parlement de se prononcer dans un délai variant entre 20 et 40 jours.Si le
Parlement ne se prononce pas, les dispositions des articles 126 alinéa 6 de la
constitution et 83 de la loi relative aux finances s’appliquent et le gouvernement
demande à l’Assemblée Nationale et au Sénat l’ouverture des crédits provisoires.

b) les crédits additionnels et les ressources de trésorerie.


En dehors de l’emprunt public et à long terme autorisé par le Parlement sous
forme de paiement, les autres moyens échappent au Parlement. Il s’agit de la création
monétaire, des emprunts du trésor et des comptes spéciaux. Ces catégories financières
constituent des atteintes à la souveraineté financière du Parlement.

§2. Le cas spécial de la République Démocratique du Congo

Le régime politique congolais présente des particularités propres par rapport aux
régimes classiques (parlementaire et présidentiel).
S’agissant précisément des techniques d’affaiblissement du pouvoir budgétaire du
Parlement, l’article 126 de la Constitution du 18 février 2006 prévoit, dans ses alinéas 8
et 9, les mécanismes suivants :
- Dans le cas où l’Assemblée nationale ne se prononce pas dans les 15 jours sur
l’ouverture de crédits provisoires, les dispositions du projet prévoyant ces crédits
sont mises en vigueur par le Président de la République sur proposition du
Gouvernement délibérée en Conseil des Ministres (alinéa 8) ;
- Si, compte tenu de la procédure ci-dessus prévue, la loi de finances n’a pu être mise
en vigueur au premier jour du mois de février de l’exercice budgétaire, le Président
de la République, sur proposition du Gouvernement délibérée en Conseil des
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Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

ministres, met en exécution le projet de loi de finances, compte tenu des


amendements votés par l’Assemblée nationale (alinéa 9).

§3. Portée du pouvoir budgétaire du parlement

Ces multiples atteintes portées à la souveraineté financière du Parlement sont


connues de tous. On notera que le pouvoir budgétaire de celui-ci est variable dans le
temps et dans l’espace et dépend des limites légales imposées ainsi que de celles de
fait. Mais l’effritement du pouvoir parlementaire transparaît aussi à travers la procédure
d’exécution du budget.

CHAPITRE III : LE PROCESSUS DE L’EXECUTION DU BUDGET DE L’ETAT

L’exécution de la loi de finances comporte deux catégories de tâches :

 assurer l’exécution des autorisations budgétaires contenues dans la loi de finances.


Il s’agit d'un problème essentiellement juridique régi par les règles de la comptabilité
publique ;
 assurer la disponibilité des fonds nécessaires aux dépenses publiques c’est-à-dire
trouver les moyens financiers nécessaires aux objectifs de la loi de finances. Cette
mission est remplie par le Trésor. Il s’agit en fait de déterminer le rôle du Trésor
dans la gestion financière de l’Etat.

Droit applicable aux opérations d'exécution du budget de l’Etat, comptabilisation


des opérations et détermination du rôle du Trésor constituent les questions qui seront
abordées dans ce chapitre.

Section 1 : Les acteurs : La séparation des ordonnateurs et des comptables

Il s’agit de déterminer les modalités de l’exécution administrative et comptable de


la loi de finances. En effet, la mise en œuvre des décisions budgétaires, c’est-à-dire la
réalisation effective des opérations de recettes et de dépenses relève d’un cadre
juridique qui, pour l’essentiel, continue à être régi par le règlement général de la
comptabilité publique.

Le grand principe de la comptabilité publique qui domine l'exécution de la loi de


finances est celui de la séparation des ordonnateurs et des comptables. Ce principe
repose traditionnellement sur l’objectif d’assurer un contrôle de régularité le plus étendu
possible de la gestion financière. Il s’entend d’une division organique et fonctionnelle
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Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

des compétences, renforcée par l’indépendance des autorités et l’incompatibilité des


fonctions.

§1. Les agents d’exécution du budget

Il s’agit de :

A. Les ordonnateurs
L’ordonnateur est, selon la conception héritée du droit franco-belge, un agent
d’autorité, administrateur élu ou nommé, qui, placé à la tête d’un ministère, d’une
collectivité, d’un établissement, d’un service, est amené à exercer, en sus de ses
fonctions administratives principales, des attributions financières en recettes ou en
dépenses. C’est donc seulement en sa qualité de décideur ou de chef de service qu’il est
doté de celle d’ordonnateur ; en d’autres termes, la fonction d’ordonnateur n’est jamais
que l’accessoire d’une mission d’administration exercée à titre principal.

1) Les différentes catégories d’ordonnateurs


Les ministres sont ordonnateurs principaux ; les gouverneurs de province sont
ordonnateurs de province ou ordonnateurs secondaires pour les services déconcentrés
des administrations civiles de l’Etat ; pour certaines opérations, des ordonnateurs
délégués sont nécessaires parce que les ordonnateurs principaux n'ont pas toujours la
possibilité matérielle de se prononcer sur l'ensemble des recettes et des dépenses
relevant de leurs attributions : ils bénéficient ainsi d’une délégation de signature de la
part du ministre (membres du cabinet, hauts fonctionnaires…) ou du gouverneur
(directeur de cabinet, services déconcentrés).

2) La responsabilité des ordonnateurs


La responsabilité des ordonnateurs est délicate à mettre en œuvre, notamment
pour les ordonnateurs principaux. Ces derniers sont dans la situation normale de
responsabilité des agents publics (faute personnelle, faute de service). Les politiques
(ministres) encourent à raison de l’exercice de leurs attributions, les responsabilités que
prévoit la Constitution : cela peut être tantôt la responsabilité politique par la mise en
jeu collective de la responsabilité du Gouvernement ou la révocation du ministre
concerné; tantôt la responsabilité pénale par la mise en accusation du ministre devant la
cour suprême de justice en cas de dépassement de crédits.

Quant aux autres ordonnateurs non politiques (fonctionnaires notamment) ils


encourent une responsabilité disciplinaire, pénale ou civile, sans préjudice des sanctions
qui peuvent être infligées au niveau de l’Administration. En pratique, la responsabilité
des ordonnateurs est très rarement engagée.
87
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

B. Les comptables publics

A la différence des ordonnateurs, c’est à titre principal et en leur qualité d’agents


publics spécialement chargés d’un emploi de comptable que les comptables publics
interviendront dans le processus d’exécution. L’autre différence, non moins notable, est
que les comptables ont l’exclusivité du maniement des fonds publics, laquelle entraîne
une responsabilité pécuniaire personnelle lourde.

Le comptable est l’agent qui assume, sous l’autorité du ministre des finances, les
tâches suivantes :

 L’encaissement de toutes les recettes des organismes publics ;


 Le paiement des dépenses de ces mêmes organismes, généralement sur ordre
des ordonnateurs ;
 La conservation des fonds des organismes publics ;
 La tenue de la comptabilité du poste comptable qu’il dirige.

1) Les différents comptables

Il existe plusieurs sortes de comptables :


Les comptables du Trésor : ils sont dotés d’une compétence générale. Ils relèvent
de la Direction de la Comptabilité Publique du Ministère des Finances et /ou du
Budget.
Les autres comptables n’ont qu’une compétence d’attribution : comptables des
budgets annexes pour les opérations de recettes, de dépenses et de trésorerie des
budgets annexes, comptables spéciaux, comptables des administrations financières
chargés du recouvrement de certains impôts ou taxes qui ne relèvent pas d'un
comptable général (receveurs fiscaux, receveurs des douanes), comptables de fait,
ceux qui n'ayant pas la qualité de comptable d'une gestion de fait (immiscions
dans le maniement de deniers publics sans avoir qualité pour le faire). Ce qui
conduit à la mise en œuvre du régime de responsabilité propre aux comptables.

2) La responsabilité des comptables

Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des


opérations dont ils sont chargés. Cette responsabilité peut être engagée de son fait
personnel ou à raison de faits de ses subordonnés.

§2. Les opérations d’exécution de la loi de finances / loi budgétaire

Non seulement l’exécution des opérations de recettes et de dépenses concerne


l’ordonnateur et le comptable public, mais elle doit en outre s’accomplir selon des
procédures réglementaires. Ces procédures sont caractérisées en bien des aspects d’un
formalisme parfois excessif, source de lenteur et de rigidité de l’action administrative qui
88
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

a conduit notamment en matière de dépenses publiques à l’utilisation du mécanisme de


débition d’office.

A. L’exécution des dépenses

Il existe une procédure de droit commun d’exécution de dépenses publiques (1)


laquelle est assouplie par l’existence des procédures dérogatoires (2).

1) La Procédure de droit commun en dépenses

Elle repose sur la distinction entre deux phases successives : la phase


administrative relevant de l’ordonnateur et la phase comptable qui est de la compétence
exclusive du comptable public.

a) La phase administrative de la dépense

Phase préalable à l’exécution comptable, celle-ci comporte trois opérations :


l’engagement, la liquidation et l’ordonnancement qui sont réalisés par les ordonnateurs
principaux ou secondaires.

1°) L’engagement est l’acte par lequel un organisme public crée ou constate à son
encontre une obligation d’où résultera une charge. C’est l’acte qui va rendre l’Etat
débiteur. L’engagement est un fait générateur de la dépense.
2°) La liquidation consiste à vérifier la réalité de la dette et à arrêter le montant de
la dépense. Elle implique la vérification du service fait. La liquidation a pour effet
de rendre les dettes certaines dans leur principe et dans leur montant. Le
processus de liquidation englobe deux aspects, en premier lieu celui de la
constatation ou vérification de la dette, en second lieu, son calcul proprement dit.
L’obligation de constatation de la réalité de la dette repose sur une règle ancienne,
celle du service fait au terme de laquelle le paiement des dettes des organismes
publics est subordonné à l’exécution matérielle intégrale des prestations par le
créancier et à leur exécution conformément aux stipulations initiales. Ce n’est
qu’ensuite que peut intervenir la liquidation au sein strict du terme, qui consiste à
calculer ou vérifier le montant de la dette.
3°) L’ordonnancement est l’acte donnant l’ordre au comptable de payer la dépense.
Cet ordre de payer est cette fois de la compétence exclusive de l’ordonnateur.

b) La phase comptable de la dépense

Le paiement constitue la phase comptable de l'exécution de la dépense. C'est l'acte


par lequel l'organisme public se libère de sa dette. La phase de paiement n’est pas une
phase de seul décaissement des fonds.
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Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Le comptable procède aux vérifications (disponibilité des crédits, exacte imputation


de la dépense…) et vise ensuite l’ordonnance en s’assurant que le paiement a un
caractère libératoire. Outre le respect de la procédure budgétaire, le comptable vérifie
que les créances sur l'Etat ne sont pas atteintes par la prescription, et ce, pour éviter
une accumulation des dettes de l'Etat.

B. Les opérations d’exécution des recettes

La procédure de droit commun de l’exécution des recettes publiques est structurée


autour d’un découpage de l’opération en trois phases successives : les deux premières
incombent à l’ordonnateur, la 3e est du ressort exclusif du comptable. Elles concernent :

1) Le recouvrement des impôts directs

Les opérations administratives incombant à l’ordonnateur sont réalisées par les


services de la direction générale des impôts : ils constatent les droits, puis liquident
l’impôt et enfin émettent un ordre de recettes représenté par un rôle nominatif. L’ordre
de recettes est pris en charge par le comptable du Trésor Public, rendant celui-ci
personnellement et pécuniairement responsable du recouvrement de l’impôt.

2) Le recouvrement des impôts indirects

Pour les impôts indirects, la séparation entre ordonnateurs et comptables est


pratiquement inexistante et supprime les phases préliminaires d’assiette et d’émission
de titre de perception, le comptable recouvrant directement les recettes.

La Direction Générale des Douanes et Accises recouvre diverses taxes sur les
marchandises, les produits pétroliers.

3) Le recouvrement des autres recettes

Les recettes domaniales sont recouvrées par les comptables de la direction


générale des recettes administratives, domaniales et des participations « DGRAD », en
effet, le recouvrement des condamnations pécuniaires (amendes civiles, pénales,
administratives, fiscales, frais de justice…) est réalisé par les comptables du Trésor.

Section 2 : Le Contrôle de L’exécution du budget de l’Etat 27

La fonction de contrôle est essentielle pour la bonne exécution du budget.


Le contrôle de l’exécution du budget a toujours été ressenti comme une nécessité
primordiale afin d’assurer d’une part le respect de la légalité budgétaire, c’est-à-dire la

27
BOUVIER (M), ESCLASSAN (M.C.), LASSALE (J.P.) : Finances Publiques, précité, p. 409.
90
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conformité de l’exécution administrative et comptable aux règles de droit, d’autre part


celui de l’autorisation budgétaire donnée par le Parlement.
Pour protéger les deniers de l’Etat, plusieurs formes de contrôle ont été mises en
œuvre : le contrôle a priori et le contrôle a posteriori, les contrôles externes et
internes.28
Le contrôle a priori repose sur une intervention préalable à tout acte engageant
les finances publiques. Il est préventif et s’efforce justement de prévenir les
irrégularités. Son inconvénient provient du fait qu’utilisé abusivement, il risque de
paralyser l’action administrative.
Le contrôle a posteriori intervient alors que la procédure de recette et de dépense
est déjà totalement réalisée, en sanctionnant les irrégularités commises. Si ce contrôle
évite la paralysie de l’action administrative générée par le contrôle a priori, il n'en est
pas moins dépourvu d'inconvénient en ce qu’il est moins protecteur des deniers publics,
car les conséquences d’irrégularités budgétaires sont souvent difficilement réparables. A
titre indicatif, en cas de dépenses engagées irrégulièrement, il ne reste, le plus souvent
au Parlement qu’à couvrir ces irrégularités. Le contrôle en matière budgétaire tente
d’instaurer un équilibre entre ces deux types de contrôle.
En s’intéressant aux organes chargés du contrôle des opérations budgétaires, on
peut relever trois types de contrôle : les contrôles administratifs, le contrôle politique et
le contrôle juridictionnel.

§1. Les contrôles administratifs

L'exécution des lois de finances fait l'objet d'un encadrement et d'une surveillance
approfondis de la part de différents services et corps administratifs relevant des
ministères ayant les finances et/ou le budget dans leurs attributions.
Les contrôles administratifs sont des contrôles internes, réalisés a priori par
certains corps, agents ou instances spécialisées de l’Etat et portant à la fois sur les
ordonnateurs principaux ou secondaires et sur les comptables. La direction du contrôle
budgétaire et la Direction de Trésorerie exercent les contrôles internes à l’administration
avant le paiement de la dépense.
Les contrôles administratifs, variés, relèvent soit du pouvoir hiérarchique au sein
d’une même administration, soit du rôle spécial joué par le ministre des Finances et son
administration.
28
BERTONI (P) : Finances Publiques, préc. p.50.
91
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A. Les contrôles hiérarchiques

Le contrôle hiérarchique est le contrôle exercé par le supérieur sur ses


subordonnés.
a) Le contrôle des ordonnateurs résulte de leur position hiérarchique qui donne au
Ministre les pouvoirs nécessaires. Il s’exerce par la vérification des rapports et
documents adressés périodiquement par les ordonnateurs secondaires à
l’Administration Centrale et, éventuellement, par l’intermédiaire des corps de contrôle
(les contrôleurs des dépenses engagées).
b) Le contrôle des comptables est assuré au sein de la hiérarchie. Il est naturellement
diligenté par le Secrétaire Général aux Finances ou le Directeur Chef de Service de la
comptabilité publique et exécuté par les contrôleurs des Finances qui ont un pouvoir
à compétence restreinte.
Un autre contrôle est assuré par les inspecteurs des finances, chargés de vérifier
directement la régularité de leurs opérations et de leurs comptes. Il s’étend aux
comptables relevant d’autres ministères, voire d’organismes spéciaux tels que la
Caisse d’Epargne, Institution Nationale de Sécurité Sociale.

B. Les contrôles exercés sur les ordonnateurs par l’administration des


Finances

Ces contrôles sont réalisés par le Ministre des Finances, les comptables publics et
l’Inspection Générale des Finances.
1) Le ministre ayant les Finances et/ou le Budget dans ses attributions exerce
directement en personne ou par l’intermédiaire des contrôleurs financiers, une
surveillance permanente sur les opérations d’exécution du budget effectuées par
les ministres (visa, comptabilité administrative) et même sur leur activité
réglementaire (contreseing).
S’agissant du contrôle de l’engagement, il est entendu que le contrôleur examine la
régularité des opérations d’engagement qui sont effectuées par l’Ordonnateur. Il
vérifie tous les actes qui se traduisent par une dépense immédiate ou future. Toute
proposition d’engagement doit être soumise au contrôleur avec pièces justificatives
sauf en cas d’engagement automatique pour les dépenses de personnel, pour les
effectifs existants. Il doit s’assurer de l’imputation de la dépense, de la disponibilité
des crédits, de l’exactitude de l’évolution de la dépense.
2) Les comptables vérifient, au moment de régler les dépenses et les recettes, la
régularité budgétaire des opérations qui leur sont ordonnées.
92
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

3) Le contrôle de l’Inspection Générale des Finances29


Le contrôle de l’Inspection des Finances porte sur l’ensemble du secteur public. La
fonction de contrôle, sous la forme d’audit interne est exercée par l’Inspection
Générale des Finances dont la mission consiste à auditer l’ensemble des
administrations financières ainsi que toutes les entreprises bénéficiant, à un titre
ou à un autre, d’un financement de la part de l’Etat. Le statut et surtout les
missions ainsi définies de l’Inspection Générale des finances en font tout autant un
corps d’expertise qu’un corps de contrôle traditionnel ; les méthodes du contrôle
vont de l’approche la plus classique (contrôle sur les comptables) à la plus
moderne (enquêtes et audit).

L’Inspection Générale des Finances est placée, depuis plus d’une dizaine, sous
l’autorité directe du Président de la République.

§2. Le contrôle politique ou parlementaire

Dans le schéma des contrôles de l’exécution des lois de finances, le contrôle


politique opéré par le Parlement tient en principe la première place. Ayant initialement
autorisé la mise en œuvre des opérations de recettes et de dépenses, il doit donc en
suivre le déroulement puis se prononcer sur l’exécution définitive du budget.
Sur le plan strictement juridique, le contrôle parlementaire devrait être le principal
contrôle en raison des prérogatives constitutionnelles conférées au parlement en
matière budgétaire. Dans beaucoup des pays, cette mission de contrôle est devenue
presque l’unique activité du parlement. Or, le contrôle de l’exécution du budget ne
retient guerre son attention. C’est tout d'abord grâce à ses pouvoirs généraux de
contrôle que le parlement pourrait exercer un contrôle de l’exécution du budget, en
recourant notamment aux commissions d’enquête et de contrôle ou par l’interpellation
ou la mise en jeu de la responsabilité du gouvernement.
Par ailleurs, le vote d’une loi de finances rectificative peut être l'occasion de
critiquer l’exécution du budget.
Le Parlement peut également utiliser la procédure des questions écrites.
Enfin, le contrôle du parlement peut s’exercer à l’occasion du vote de la loi de
règlement. Le projet annuel de loi de règlement constate le montant définitif des
encaissements des recettes à des ordonnancements se rapportant à une même année;
Il ratifie en outre les ouvertures de crédits non autorisées par la loi de finances de

29
Ordonnance n°87-323 du 15/09/1987 portant création de l’Inspection Générale des Finances, telle que modifiée et complétée à
ce jour.
93
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

l'année ou une loi rectificative. Il faut noter qu’en général, le projet de loi de règlement
est voté sans discussion au fond alors qu’il aurait dû faire l’objet d’un contrôle efficace.
De façon générale, l’autorité financière du Parlement ne peut être garantie que
dans la mesure où les assemblées elles-mêmes disposent de pouvoirs de contrôle en
cours d’exécution et lorsque le budget est exécuté.

§3. Le contrôle juridictionnel

Il est réalisé par la Cour des Comptes conformément aux dispositions de l’article
178 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée à ce jour. Elle relève de
l’Assemblée Nationale. C'est une juridiction composée en principe, des magistrats
inamovibles recrutés principalement par la voie de concours.

A. Historique de la Cour des Comptes

La création de la Cour des Comptes au Congo remonte à la période coloniale.


L’article 13 de la Charte Coloniale du 18 octobre 1908 soumettait les finances publiques
de la Colonie du Congo Belge à la vérification de la Cours des Comptes de Belgique.
Le législateur colonial confirma dans la loi fondamentale du 19 mai 1960
l’existence d’une Cour des Comptes (article 243) quand bien même dans la pratique les
finances de la jeune République restèrent soumises à la vérification de la Cour des
Comptes de Belgique, du moins pour l’exercice budgétaire de 1960 (article 254).
C’est finalement au courant du 2e trimestre de 1963 que par une loi du 16 avril
1963 portant organisation d’une Cour des Comptes que fut instituée la Cour des
Comptes, existence conformée par la constitution de Luluabourg du 1 er avril 1964.
Supprimée pendant deux ans entre 1965 et 1967, la Cour des Comptes a en
réalité exercé ses missions après la publication des ordonnances-Lois n° 87-005 du 06
février et n°87-032 du 22 juillet 1987.
Il faut noter toutefois qu’auparavant, en janvier 1983, une Commission
Parlementaire instituée par la loi n° 001 du 12 janvier 1983 devait faire office de Cour
des Comptes.

B. Les pouvoirs de la Cour des Comptes


94
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Ils sont définis dans les dispositions de l’article 180 de la Constitution du 18


février 2006 telle que modifiée à ce jour et des articles 24 et suivants de la loi
organique. A cet effet, la Cour des Comptes :

- dispose d'un pouvoir général et permanent de contrôle de la gestion des


finances, des biens et des comptes du pouvoir central, de la province, de
l’entité territoriale décentralisée et de ses organismes auxiliaires ainsi que de
toute personne de droit public ou privé visée à l’article 2 alinéa 2 de la
présente loi organique (Art. 24).
- juge les comptes des comptables publics principaux assignataires des recettes
ou des dépenses. Elle juge aussi les comptes que lui rendent les personnes
qu'elle a déclarées comptables de fait (Art. 25).
- veille au respect des délais de production des comptes par les comptables
publics principaux assignataires. Elle condamne à l’amende les comptables
publics principaux assignataires et les personnes qu’elle a déclarées
comptables de fait pour retard dans la production de leurs comptes. Le
montant maximum de l’amende pour retard dans la production du compte est
égal à un mois de la rémunération du comptable public concerné (Article 26).
- condamne à une amende, pour immixtion dans les fonctions de comptable
public, toute personne déclarée comptable de fait qui n’a pas fait l’objet d’une
condamnation pénale pour les mêmes opérations.
Le montant de l’amende tient compte de l’importance et de la durée de la
détention ou du maniement des fonds et valeurs, sans que ce montant puisse
excéder le total des sommes indûment détenues ou maniées (Article 27).
- vérifie sur pièces et sur place la régularité des opérations des recettes, des
dépenses, de trésorerie et de patrimoine enregistrées dans les comptabilités
publiques. Elle s’assure de la mobilisation optimale des recettes ainsi que de
l’économie, de l’efficience et de l’efficacité des crédits, fonds et valeurs gérés
par les services du pouvoir central, de la province et de l’entité territoriale
décentralisée et par toute autre personne morale de droit public ou de droit
privé soumise à son contrôle (Article 28).
- évalue les politiques, les programmes et les actions publics mis en œuvre et
lui transmis, selon le cas, par le Gouvernement ou le Gouvernement
provincial, l’organe exécutif de l’entité territoriale décentralisée ainsi que les
responsables des entreprises ou établissements publics et les organismes
auxiliaires.
95
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Cette évaluation donne lieu à des observations accompagnées de


recommandations.
A ce titre, le Gouvernement ou le Gouvernement provincial, le collège exécutif
de l’entité territoriale décentralisée et les responsables susvisés sont tenus de
lui transmettre tous les documents y afférents dès leur adoption à leur niveau
et après leur approbation par le Parlement, l’Assemblée provinciale, l’organe
délibérant local, l’assemblée générale, le conseil d’administration ou, le cas
échéant, l’autorité hiérarchique ou de tutelle. La Cour des comptes suit la
mise en œuvre de ses recommandations (Article 29).
- assure, au niveau du pouvoir central, de la province et de l’entité territoriale
décentralisée, la vérification des comptes et celle de la gestion de l’entreprise
du portefeuille, de l’établissement et service publics. Les organismes désignés
ci-dessus transmettent à la Cour des comptes leurs comptes annuels dans les
trois mois de leur adoption par l’assemblée générale, le conseil
d'administration ou l'organe en tenant lieu.

A défaut de production des comptes dans le délai fixé ci-dessus, le principal


responsable de l’entité ou son gestionnaire est passible d’une amende
conformément à l’article 129 de la loi relative aux finances publiques. La Cour
des comptes reçoit dans le même délai les rapports des commissaires aux
comptes de ces entités. En outre, les responsables des corps de contrôle
relevant de l’exécutif du pouvoir central, provincial et de l’entité territoriale
décentralisée, transmettent à la Cour des comptes les rapports dans lesquels
sont consignées des observations relatives à la gouvernance et aux états
financiers de ces organismes (Article 30).
- contrôle les personnes qui bénéficient d'un concours financier du pouvoir
central, de la province ou de l’entité territoriale décentralisée et toute
organisation privée autorisée à percevoir des taxes parafiscales, des
impositions de toute nature, des cotisations légalement obligatoires ou qui
bénéficie d'un mécénat donnant lieu à un avantage fiscal.
Elle contrôle la conformité entre les objectifs de ces organisations et les
dépenses ouvrant droit aux bénéfices des donateurs à un avantage fiscal ou
parafiscal au titre d'impôt, droits, taxes et redevances.
Le contrôle se limite au compte d'emploi du concours financier et/ou du
bénéfice des avantages fiscaux et parafiscaux. Si l'organisme ne produit pas le
compte d'emploi, le contrôle porte sur l'ensemble des comptes et sur la
gestion de cet organisme (Art 31).

C. Les justiciables de la Cour des Comptes


96
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Les justiciables de la Cour des comptes pour faute de gestion en matière de


discipline budgétaire et financière sont :
1. les contrôleurs budgétaires ;
2. les comptables publics ;
3. les ordonnateurs autres que les responsables du Parlement, des Assemblées
provinciales et des organes délibérants des entités territoriales décentralisées,
les membres du gouvernement et des gouvernements provinciaux ainsi que
les membres des exécutifs des entités territoriales décentralisées ;
4. tout responsable ou agent des entreprises publiques, des établissements ou
organismes publics.

Les ordonnateurs responsables du Parlement, des Assemblées provinciales et des


organes délibérants des entités territoriales décentralisées, les membres du
gouvernement et des gouvernements provinciaux ainsi que les membres des exécutifs
de l’entité territoriale décentralisée répondent de leurs fautes de gestion devant les
organes politiques compétents.

La sanction pour faute de gestion réside dans la condamnation de la personne


incriminée, à une amende dont le montant ne pourra atteindre le double du traitement
ou salaire brut annuel alloué à la date de l’infraction sans être inférieur au quart.

Outre la peine ci-dessus, le fonctionnaire encourt une sanction disciplinaire, civile


et/ou pénale.

L’auteur d’une faute de gestion n'est passible d'aucune sanction s'il est établi qu'il
a reçu un ordre écrit, pour autant qu’il ne soit pas manifestement illégal, de sa
hiérarchie ou d'une personne légalement habilitée à donner pareil ordre, après un
rapport circonstancié fait par lui à ce sujet.

L'ordre ou l'autorisation est joint aux pièces ayant fait l'objet du contrôle. Dans ce
cas, la responsabilité du donneur d’ordre, supérieur hiérarchique ou de la personne
légalement habilitée, se substitue à celle de son subordonné.

Le comptable public principal assignataire refuse de payer toute dépense


entachée d’irrégularités. A cet effet, il renvoie le dossier de la dépense à l’ordonnateur
avec ses observations (Article 33).

Aux termes de l’article 34, la Cour des comptes assiste le Parlement, l’Assemblée
provinciale, l’organe délibérant de l’entité territoriale décentralisée, le Gouvernement, le
Gouvernement provincial et l’exécutif de l’entité territoriale décentralisée dans le
97
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

contrôle de l’exécution des lois de finances, des édits budgétaires et des décisions
budgétaires.

A cet effet, elle transmet chaque année au Parlement, à l’Assemblée provinciale


et à l’organe délibérant de l’entité territoriale décentralisée, ses observations sur le
compte général du pouvoir central, le compte général de la province et le compte
général de l’entité territoriale décentralisée.

La Cour soumet chaque année aux institutions et organes précités un rapport


contenant ses observations sur le projet de loi portant reddition des comptes, le projet
d’édit ou de décision portant reddition des comptes du dernier exercice clos.

En outre, à l’occasion de chaque session budgétaire, elle saisit les institutions et


organes susmentionnés de ses observations sur le rapport d’exécution du budget en
cours au premier semestre. A cet effet, il est fait obligation au Gouvernement, aux
Gouvernements provinciaux et aux collèges exécutifs des entités territoriales
décentralisées de transmettre à la Cour des comptes au plus tard le 15 août de
l’exercice considéré les éléments portant sur l’exécution du budget au premier semestre.

Notons également qu’aux termes de l’article 35 de la loi organique, la Cour des


comptes est investie des fonctions de Commissaires aux comptes de l’Etat. A ce titre,
elle certifie la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes du pouvoir central, des
provinces et des entités territoriales décentralisées. Le rapport de certification est joint
au rapport de la Cour des comptes qui accompagne le projet de loi, le projet d’édit ou
de décision portant reddition des comptes.

Elle joue également le rôle de conseiller du Président de la République, du


Parlement, des Assemblées provinciales, de l’organe délibérant de l’entité territoriale
décentralisée, du Gouvernement, du Gouvernement provincial et du collège exécutif de
l’entité territoriale décentralisée, en matière des finances publiques: A ce titre, elle
procède à tout contrôle de la gestion des finances et des biens publics sur requête du
Président de la République, du Parlement, de l’Assemblée provinciale, de l’organe
délibérant de l’entité territoriale décentralisée, du Gouvernement, du Gouvernement
provincial et de collège exécutif de l’entité territoriale décentralisée. Elle peut être
associée aux missions d’évaluation et de contrôle des différentes commissions des
institutions et organes précités.
98
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Comme on peut le constater, il s’agit d’un pouvoir est général et permanent. Les
matières à contrôler ne connaissent aucune limitation légale.
A titre indicatif, on peut citer :
 Le Compte Général du Trésor
 Les Comptes des Comptables Publics ;
 Les Comptes des Etablissements Publics ;
 Les fautes de gestion en matière de discipline budgétaire et financière ;
 Les Comptes d’emploi des organismes privés bénéficiaires du concours de
l’Etat, des Entités administratives décentralisées ou de tout autre
organisme public ;
 Les Comptes relatifs aux sommes dues à l’Etat au titre de prêts et de
garantie d’emprunts ;
 Le service de la dette publique ;
 Les Comptes des organismes des budgets annexes…
Le contrôle de la Cour des Comptes porte essentiellement d’une part sur
l’exactitude, la légalité, la régularité pour les opérations budgétaires et comptables et
d’autre part sur l’efficacité, l’efficience et l’économie pour les opérations de gestion des
Entreprises Publiques.
Les justiciables de la Cour sont notamment :
 Les comptables publics ;
 Le caissier de l’Etat ;
 Les comptables de fait ;
 Les fonctionnaires et agents de l’Etat ou des entités administratives
décentralisées ;
 Les responsables ou agents des établissements publics et organismes
privés subventionnés ;
 Les autorités adjudicatrices.

D. Composition, organisation et fonctionnement

Conformément à l’article 8 de la loi organique n°18/024 du 13 novembre 2018, la


Cour des Compte est composée du Premier président, des présidents des Chambres,
des conseillers maîtres, des conseillers référendaires et des conseillers ; du Procureur
général assisté d’un ou de plusieurs premiers avocats généraux et d’un ou de plusieurs
avocats généraux choisis, selon le cas, parmi les présidents des Chambres, les
conseillers maîtres et les conseillers référendaires.
99
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Conformément aux dispositions de l’article 40 et suivants de la loi organique, les


organes de la Cour des comptes sont :
-le Conseil supérieur de la Cour des comptes ;
-les formations de la Cour des comptes.

E. Procédure devant la Cour des Comptes

1) Une procédure contradictoire


La procédure devant la Cour des Comptes est contradictoire, c’est-à-dire
qu’aucun contrôle de la Cour ne peut être finalisé sans que le contrôlé n’ait pris
connaissance des faits lui reprochés et n’ait eu l’occasion de s’expliquer. C’est pourquoi
les rapports de contrôle se font en deux étapes :
 D’abord un rapport préliminaire est rédigé et transmis au contrôlé qui a l’obligation
de réagir dans un délai maximum de deux mois ;
 Ensuite, ce n’est qu’après avoir pris en compte les réponses au rapport préliminaire
que la Cour des Comptes établit son rapport définitif.
En plus des jugements qu’elle rend, la Cour établit des rapports qui consistent en
des recommandations exigeant des actions correctives de la part des Services de l’Etat
et des entités décentralisées, ainsi que des établissements publics.

2) Le jugement des comptes


La Cour des Comptes peut juger tout fonctionnaire ou agent de l’Etat et des
entités décentralisées, tout responsable ou agent des établissements publics, auteur
d’une infraction de gestion.

3) Mécanisme de contrôle
La régularité du compte est appréciée à partir de l’examen de toutes les
opérations effectuées par le comptable et des pièces justificatives produites à l’appui de
ces opérations.

4) Résultat du contrôle
A l’issue du contrôle, la Cour peut prendre comme décision, selon les cas :
- soit un arrêt de décharge lorsque les comptes sont réguliers ;
100
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

- soit un arrêt de débet en cas d’irrégularité ; cet arrêt condamne le comptable à


payer les sommes manquantes ;
- soit un arrêt déficitaire (compte de débit).
101
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

CONCLUSION
(Tirée de l’ouvrage de Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU, « Les finances publiques ».
Pour une meilleure gouvernance économique et financière en République Démocratique du Congo,
Bruxelles, éd. Larcier, 2006)

Les développements précédents nous ont permis d’avoir une vue d’ensemble sur la gestion des finances
publiques et de mesurer la profondeur de la crise économique et financière qui perdure depuis plus de trois
décennies. En dépit des efforts entrepris au cours de 4 dernières années, la gestion des finances publiques a été et
reste encore à la limite de l’orthodoxie, ce qui montre la dimension de la tâche en vue d’une meilleure gouvernance
devant permettre de relever les défis du développement.
Avant de se pencher sur les pistes à explorer pour retrouver les standards universels en matière de gestion
financière, il y a lieu de cerner les contenus et les contours de la gouvernance.
Qu’entend-on par gouvernance économique et financière pour les pays en développement ?
La gouvernance peut être entendue comme un mode de contrôle, d’organisation et de régulation s’exerçant
au sein d’entités économiques ou géopolitiques complexes plus ou moins étendues 30.
Rappelons que c’est à la fin des années 80 que, face aux mauvais résultats économiques des pays en
développement, les bailleurs de fonds multinationaux et en particulier la Banque Mondiale, ont suggéré aux pays
concernés de procéder à l’ajustement de leurs politiques économiques, notamment par l’assainissement de leurs
finances publiques en vue de résoudre les problèmes de leur endettement. Un rapport de la Banque Mondiale de
1989 soulignait que le redressement économique dans les pays en développement nécessite un « good
governance ». Depuis lors, ces bailleurs exigent des Etats concernés d’améliorer la gestion de leurs finances
publiques par une bonne gouvernance, celle-ci devenant une conditionnalité.
Trois conceptions de la gouvernance doivent être relevées ici :
1° La « bonne gouvernance » prescrite alors aux pays en développement est d’inspiration libérale et se traduit par
la nécessité d’opter pour l’équilibre budgétaire dans la gestion budgétaire (réforme fiscales, réduction des
dépenses publiques, suppression des subventions, libéralisation des échanges extérieurs (marchandises et
capitaux), privatisation des entreprises du secteur public, déréglementation, transparence des organes de
décisions, lutte prioritaire contre l’inflation). Telle est la 1re conception.
2° La deuxième conception de la gouvernance peut être qualifiée d’institutionnaliste. La réforme de l’Etat, de ses
capacités et de ses fonctions est considérée comme la condition du succès économique. Il faut également
accroître les capacités de toutes les institutions qui permettent de promouvoir des processus, des normes et
valeurs favorables au développement.
3° Une troisième conception de la gouvernance – pays tente d’analyser les rapports entre le marché et la
démocratie, afin de déterminer si ces rapports et les arrangements institutionnels qui les caractérisent évoluent
dans un sens favorable au développement, à l’équité et à la justice sociale. C’est dans ce cadre que l’on parle de
la facilité pour la croissance et la réduction de la pauvreté.

30
On distingue principalement la gouvernance globale (au niveau de l’économie mondiale), la gouvernance – pays (au niveau des
Etats-Nations) et la gouvernance – entreprise (même si d’autres niveaux ou domaine de gouvernance sont à mentionner :
gouvernance urbaine, gouvernance de l’internet.
102
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Ces prémisses étant rappelées, la question se pose de savoir comment atteindre une gouvernance
économique et financière favorable au développement, au regard de la persistance des pratiques de mauvaise
gestion (détournements de deniers publics, corruption, concussion, etc.).
Sur la base des données financières examinées ci-avant, lesquelles sont marquées par la gabegie
financière, la corruption et les détournements des deniers publics, les pouvoirs publics congolais se sont engagés,
dès 2001, à mettre de l’ordre dans la gestion des finances publiques, étape nécessaire et condition pour renouer le
dialogue avec les institutions multilatérales de financement du développement.
Pour atteindre cet objectif, des préalables tant au niveau du cadre juridique et institutionnel que de la
programmation de la gestion et du contrôle budgétaire devront être levés.

I. Nécessité d’une adaptation du cadre juridique et institutionnel aux exigences d’une gestion rationnelle

A la lumière des développements précédents, il apparaît évident que le cadre juridique et institutionnel
actuel n’est pas adapté à la gestion des finances publiques modernes, laquelle implique des méthodes de gestion
financière plus élaborées. En effet, la loi relative aux finances de l’Etat qui date des années 1983, modifiée en 1987
constitue encore le texte de référence quand bien même certaines de ses dispositions ne sont plus appliquées. Elle
est devenue obsolète et ne permet pas la transparence des opérations budgétaires ainsi que la fluidité de ces mêmes
opérations. De plus, les administrations méconnaissent le Règlement Général de la Comptabilité Publique « RGCP »,
lui-même datant de plus d’une cinquantaine d’années.
Au niveau des structures d’exécution des finances publiques, il est constaté une quasi-absence des
moyens matériels alliés à l’insuffisance de ressources humaines. On sait que la Fonction Publique congolaise n’attire
pas les jeunes cadres universitaires à la suite de la modicité et la précarité de la rémunération. De plus, l’inflation
réglementaire ne facilite pas la tâche des administrations qui se disputent les attributions (Budget-finances) rendues
difficiles depuis la scission du Ministère des finances et budget en deux départements distincts, l’un chargé des
finances, l’autre du budget. Ce chevauchement des compétences contribue à la perturbation des mécanismes de
gestion..

1. Le Ministère des Finances :


Si le Ministère des Finances continue à être l’ordonnateur unique du budget de l’Etat et assure la gestion
des ressources de l’Etat et l’encadrement des dépenses publiques, de la comptabilité publique et de
l’ordonnancement des dépenses de l’Etat, ses compétences ne s’en trouvent pas moins réduites du fait de
l’intervention du Ministère du Budget qui engage et liquide les dépenses. Le Ministère des Finances joue désormais
plus le rôle de caissier que celui de coordination du circuit de la dépense.
Autre fait à relever, la gestion des finances publiques actuelle est perturbée par des changements de
missions ou compétences de certaines structures, directions et organismes dépendant du Ministère des Finances. A
titre illustratif, deux principales Directions du Ministère des Finances, la Direction de la Comptabilité et celle du Trésor
et de l’ordonnancement, ainsi que la Banque Centrale du Congo sont concernées par ces changements de missions.
En effet, s’agissant des finances de l’Etat, la comptabilisation des opérations financières est normalement
réalisée par voie bancaire, leur exécution étant faite par le caissier de l’Etat, la Banque Centrale, sous la surveillance
de l’Ordonnateur Délégué du Gouvernement par la voie d’un service comptable directement placé à ses côtés, pour
103
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

la tenue et le traitement des écritures comptables tenues sur les opérations et la vérification des modalités
d’exécution par la Banque des ordres de paiement ou d’encaissement lui transmis. Ce service appelé Bureau du
Caissier de l’Etat, est un Agent comptable juridiquement coresponsable avec la Banque Centrale de la validité et
l’exactitude des opérations et écritures comptables tenues sur les opérations exécutées en banque, spécialement
devant l’Ordonnateur Délégué. Cependant, la pratique est toute autre depuis plus de trois décennies. Sous le
prétexte d’efficacité, il a été décidé le détachement de la Division de l’Ordonnancement de la Comptabilité Publique
de services de l’ordonnateur délégué, alors que ce service dispose de toutes les structures de suivi et de contrôle tant
en écritures que sur les espèces, au profit de la Direction de la Trésorerie Générale et des questions monétaires avec
laquelle travaille depuis lors la Banque Centrale. Il s’agit là d’une vision erronée de la fonction Comptable s’agissant
particulièrement des opérations réalisées en banque pour le compte des pouvoirs publics. D’où l’intérêt d’une
meilleure programmation en vue d’une gestion efficace.
La Banque Centrale du Congo, caissier de l’Etat, est pratiquement placée en ce qui concerne les
ressources de l’Etat sous la supervision des régies financières. Concernant les dépenses, elle est entre les mains de
la Direction du Trésor et de l’ordonnancement. Or, il est admis que l’ordonnancement ne fait pas partie de cette
Direction. Par le passé, la Direction du Trésor et de l’ordonnancement s’occupait plus des problèmes monétaires et
bancaires de l’Etat et des questions financières spécifiques (Portefeuille, dette publique). On semble faire de
l’amalgame. L’ordonnancement avec le Trésor forme la Direction du Trésor et s’occupe des paiements quotidiens à
charge du Trésor dans le cadre de l’exécution du budget, en lieu et place de la Direction de la Comptabilité publique.
Ce transfert des compétences entraîne plusieurs conséquences :
 l’absence d’assujettissement véritablement contraignant de la Banque Centrale du Congo aux ordres de
l’Ordonnateur tant des recettes que des dépenses de l’Etat ;
 le grippage des mécanismes de la responsabilité comptable des fonctionnaires du Ministère des Finances
opérant dans la tenue des écritures sur les opérations du caissier de l’Etat aux côtés des Ordonnateurs
recourant à la voie bancaire.
 la mise à l’écart de la Direction de la Comptabilité Publique dans la surveillance, l’organisation et le contrôle des
écritures comptables ainsi que les mouvements de fonds dans les circuits bancaires concernant l’Etat en général
et le caissier de l’Etat en particulier ;
 le changement irrégulier des missions traditionnelles de la Direction de la Trésorerie Générale et des Questions
monétaires, à savoir : la surveillance, la mobilisation et la rentabilisation bancaire et économique de toutes les
ressources financières et monétaires de provenance budgétaire ou non constituant le gage essentiel de la
prospérité de toute nation et justifie l’appellation universelle de Trésor Public.
Le Conseil Permanent de la Comptabilité au Congo (CPCC) a une mission de conception et de gestion du
système comptable, de régulation de la profession comptable, de centralisation de l’information comptable et surtout
de conseil du gouvernement sur toutes les questions se rattachant à la comptabilité.
L’Inspection Générale des Finances(IGF) a pour mission d’auditer l’ensemble des administrations
financières ainsi que toutes les entreprises qui bénéficient, à un titre ou à un autre, de financement de l’Etat.

2. Le Ministère du Budget
Le Ministère du Budget est chargé d’assurer l’élaboration, le suivi et le contrôle de l’exécution du budget
de l’Etat, le règlement définitif du budget de l’Etat, l’encadrement des dépenses publiques et le contrôle de la paie.
104
Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU Cours de Finances Publiques G2 Droit

Dans l’accomplissement de leurs tâches respectives, les Ministère des Finances et du Budget sont
appuyés par une cellule technique.
La cellule informatique interministérielle(CII) est un service interministériel mais conjointement à la
disposition du Ministère des Finances et du Ministère du Budget avec autonomie technique et indépendante de
différents services en charge de l’exécution du budget.

3. Le Ministère du Portefeuille
Le Ministère du Portefeuille n’intervient pas dans le circuit de la dépense publique. Son rôle, en tant
qu’autorité de tutelle sur les entreprises du Portefeuille de l’Etat (entreprises publiques et d’économie mixte) est de
veiller à la rentabilité économique et financière de ces entreprises. Il intervient dans la mobilisation des recettes de
l’Etat, principalement les dividendes attendus lorsque ces entreprises présentent des résultats bilantaires positifs. Ce
qui n’est plus le cas depuis plus d’une vingtaine d’années.
Le Conseil Supérieur du Portefeuille, cellule technique, placé sous sa responsabilité, est chargé d’assister
le gouvernement dans le suivi et le contrôle des entreprises publiques ainsi que la gestion des participations de l’Etat
dans les sociétés d’économie mixte. Cette structure ne nous semble pas à la hauteur des attentes. Au lieu de
contribuer au redressement des entreprises du Portefeuille, le Conseil Supérieur du Portefeuille, fonctionnant sans
moyens matériel et financier, vit aux mamelles de ces dernières en termes de collation pour les séminaires, prise en
charge de ses agents pour les missions à l’extérieur et dans le pays.

4.L’intervention du Parlement
Conformément aux dispositions constitutionnelles, le Parlement assure la mission de contrôle du
gouvernement en matière financière par le moyen du vote de la loi annuelle des finances et des lois de règlement. La
Commission Economique et Financière de l’Assemblée Nationale est chargée d’examiner les projets de loi de nature
financière et d’interroger les membres du gouvernement et les autorités administratives sur la manière dont sont
gérées les finances de la République. Une fois la loi de finances définitivement votée, il appartient au Gouvernement
d’en assurer l’exécution. Les crédits ouverts par les lois de finances sont mis à la disposition des Ministres, une mise
à disposition qui se fait par décrets de répartition pris en Conseil des Ministres.
L’autorisation parlementaire qui découle du vote de lois des finances n’est pas figée et c’est pour deux
raisons. En premier lieu, la nature des différents crédits visés dans la loi des finances permet des variations. En
second lieu, l’autorisation peut faire l’objet de modification de la part du Gouvernement ou du Parlement dans les
conditions fixées par la loi organique. Si ces principes peuvent être maintenus, les conditions de modification doivent
être soumises à un contrôle afin d’une part de renforcer l’efficacité de la gestion publique et d’autre part, améliorer le
contrôle parlementaire. Dès lors, il faut s’interroger sur la portée de cette autorisation. En évoquant la portée de cette
autorisation, on sous-entend que la loi de finances n’est pas une loi impérative, ce qui pourrait constituer un
paradoxe. Cependant, ces termes signifient que les dispositions qu’elle édite sont susceptibles de variations ou d’une
application souple. A condition que l’on n’en fasse pas un usage abusif.
L’expérience au cours de deux dernières années révèle que le Parlement n’a pas su jouer pleinement son
rôle principalement en ce qui concerne les modifications apportées par l’Exécutif dans le domaine de la gestion
financière de dépenses de l’Etat.
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La Cour des Comptes exerce, on l’a vu, un pouvoir général et permanent de contrôle juridictionnel sur la
gestion des finances publiques en assurant la transparence de l’emploi des deniers publics, en éclairant le Parlement,
le Gouvernement et les citoyens sur la gestion publique. Pendant plus d’une vingtaine d’années, elle n’a pas été mise
à contribution pour assurer la transparence dans la gestion des finances publiques.

II. Une programmation et une gestion budgétaire à rationaliser

A. La préparation de la loi des finances

L’expérience révèle que la préparation de la loi des finances de l’année ou loi budgétaire ne fait pas l’objet
d’une attention soutenue de la part des administrations préposées à cette tâche.
On l’a vu, la préparation du budget est lancée au mois de mai avec la diffusion de la circulaire budgétaire.
Il n’existe pas de calendrier formel pour la préparation du budget de l’Etat. Ce qui pose le problème de fiabilité des
données. Les Conférences budgétaires qui devaient être les lieux de discussion et d’échanges entre l’Administration
du Budget et les administrations sectorielles sont rarement organisées. De façon générale, l’administration du budget
ne semble pas prendre à cœur cette étape de discussion. Les raisons sont ailleurs. En effet, très peu de cadres
administratifs comprennent les mécanismes et font plus de la routine que de la réflexion. De plus, le Budget Général
de l’Etat ne présente pas globalement l’ensemble des budgets de la sphère financière. Certains financements
extérieurs destinés aux projets d’investissement gérés par des structures spécialisées ne sont parfois pas repris dans
les documents budgétaires. Par ailleurs, certaines ressources propres des budgets annexes et budgets pour ordre et
les dépenses correspondantes, ne sont pas intégrées ou consolidées dans le budget de l’Etat et les rapports
budgétaires.
Une constante est observée dans le cycle d’élaboration des budgets depuis près d’une décennie : le non
respect du calendrier.
Parfois les prévisions budgétaires sont élaborées sans concertation avec les ministères sectoriels.
Globalement, la nature inefficace de la communication entre la Direction de la Préparation et de Suivi Budgétaire et
les ministères sectoriels dans cette phase limitent l’implication des ministères et des administrations et conduit à la
déresponsabilisation de ces administrations dans l’exécution du budget.

B. L’exécution budgétaire : Celle-ci commence avec la promulgation de la loi des finances et la diffusion
aux administrations de la « Circulaire avec instructions d’exécution du budget de l’Etat » pour l’exercice budgétaire de
l’année en cours. Dans la pratique, l’exécution est différée de deux à trois mois. Les administrations s’en plaignent
puisqu’elles accèdent avec beaucoup de retard aux crédits budgétaires. Les dépenses sur ressources internes sont
exécutées suivant les procédures établies dans le Manuel de procédure de la dépense publique rendu public en 2003
qui décrit les procédures « standard » et les procédures de dépenses par exception. Ce Manuel reprend un circuit de
la dépense classique telle que prévu par le Règlement général de la comptabilité publique à savoir : l’engagement, la
liquidation, l’ordonnancement et le paiement.
Les retards récurrents dans la préparation du budget et sur son exécution entraîne comme conséquence
une accumulation des engagements des dépenses en fin d’année budgétaire, ce qui, bien entendu, conduit à un fort
décaissement de fonds préjudiciables au Trésor. Une situation qui favorise l’inflation en perturbant certains
paramètres macro-économiques. L’incapacité d’absorption de ressources est devenue une gangrène en dépit des
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progrès réalisés au cours de ces 3 dernières années. L’insuffisance des informations sur le service fait, le non-
respect de la réglementation concernant le paiement et le fait que le Ministère des Finances n’est pas connecté au
système informatisé de la chaîne de la dépense introduit des retards dans la phase ordonnancement du circuit de la
dépense.
On déplore la forte tentation à l’utilisation des procédures exceptionnelles et le dépassement devenus
monnaie courante dans le chef de certaines administrations dépendant des ministères de souveraineté (Défense
Nationale, Affaires Etrangères, Intérieures et Sécurité, etc.). Il est à noter que les recours fréquents aux procédures
exceptionnelles (dépenses d’urgence, mise à disposition des fonds) ne permettent pas une bonne traçabilité sur la
nature des dépenses réalisées et affaiblissent le contrôle budgétaire. L’utilisation de ces procédures pose ainsi un
problème structurel à la gestion normale des dépenses budgétaires et constitue un risque majeur de non
transparence dans l’exécution budgétaire.

C. La reddition des comptes : C’est l’une des faiblesses du système de gestion des finances publiques. En
effet, depuis plus de trois décennies, les gouvernements de la République ont pris le plaisir de ne pas se conformer à
cette norme élémentaire de gestion des finances publiques. A la demande des Institutions de Bretton Wood, le
gouvernement a présenté les comptes de 2003 au mois de novembre 2004 sur pression de l’Assemblée Nationale.
Mais ces comptes n’ont pas fait l’objet de discussion au Parlement.
La responsabilité pour la reddition des comptes et l’élaboration de la loi de règlement sont confiées à la
Direction de la Reddition Générale des Comptes. Conformément aux dispositions des articles 162 et 163 de la
Constitution de la Transition et des articles 25, 27, 44 et 45 de la loi financière de 1983, le Gouvernement a rendu
compte en 2005, de l’exécution du Budget de l’Etat du dernier exercice clos en présentant les réalisations des
recettes et l’exécution des dépenses. Dans ses observations relatives au projet de loi portant Arrêt des Comptes et
Règlement définitif du Budget de l’Etat pour l’exercice 2003, la Cour des Comptes émet des doutes sur la fiabilité des
données de la reddition des comptes en raison de discordances entre les données de la Direction des Comptes et
celles fournies par la Direction du Trésor et de l’ordonnancement, de l’OFIDA et de la DGRAD.

D. La gestion de la Trésorerie : Elle est assurée par la Banque Centrale du Congo en tant que Caissier de
l’Etat sous la surveillance de la Direction du Trésor du Ministère des Finances. En matière de dépenses, la Direction
du Trésor réalise toutes les mises en paiement par le biais du système informatisé de la chaîne de la dépense. Le
Compte Général du Trésor, avec huit sous comptes, centralise normalement toutes les opérations financières de
l’Etat tant en recettes qu’en dépenses avec les anomalies signalées dans la comptabilisation. En définitive la Banque
Centrale du Congo n’assure que la consolidation partielle des comptes bancaires qui portent uniquement sur ceux
ouverts à son siège, ce qui bien entendu conduit à des situations nettes négatives du Compte Général du Trésor.
Les autres comptes, nombreux (plus de 700) ouverts auprès des banques commerciales, parfois sans
autorisation du Ministère des Finances, continuaient à être opérationnels jusqu’à la dernière recommandation du
Fonds Monétaire Internationale en 2004 proposant leur suppression dans le cadre de la bonne gouvernance.
L’utilisation des fonds qui se trouvaient dans lesdits comptes n’a pas fait l’objet d’un audit et n’a pas été intégrée dans
le tableau des opérations financières de l’Etat. On peut désormais s’attendre à une rationalisation de la gestion de
ces comptes dans le cadre de la politique d’assainissement des finances publiques.
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E. Les contrôles administratifs : Ils sont ou devraient être organisés par des organes ou organismes
spécialisés de l’Etat. La Direction de la comptabilité & budget (DCB) et la Direction du Trésor et de l’ordonnancement
exercent les contrôles internes à l’administration avant le paiement de la dépense. Or, on a vu que certaines missions
de la Direction de la Comptabilité sont exercées, en matière des dépenses par la Direction de la Trésorerie. Des
contrôles internes sont aussi exercés après le paiement de la dépense par l’Inspection Général des Finances (IGF) le
service d’audit supérieur du Gouvernement sous la tutelle du Ministère des Finances.
Le contrôle de l’inspection Générale, sous la forme d’audit interne, est exercé par l’Inspection des
Finances qui consiste à auditer l’ensemble des administrations financières ainsi que toutes les entreprises qui
bénéficient, à un titre ou un autre, de financement de l’Etat. Il est tatillon. L’IGF ne dispose pas de programme
structuré et détaillé des vérifications ou d’audits à réaliser. Ses missions se limitent à des constats de mauvaise
gestion, non suivis pour la plupart de temps des sanctions. Ses missions sont ponctuelles en réponse à des
demandes exprimées par le Ministère des Finances ou autres. Si depuis 2004 on constate une amélioration sensible
des audits réalisés par l’IGF, il reste à les ramener aux procédures standards de la dépense. Une harmonisation des
contrôles entre le Cabinet du Ministère du Budget et celui du Ministère des Finances s’avère nécessaire. C’est une
conséquence du démembrement des attributions de Ministère des Finances consécutif au partage du pouvoir entre
les composantes politiques qui dirigent actuellement le pays.
Par ailleurs, se pose le problème des capacités des agents de l’Inspection Générale des Finances qu’il
faut renforcer. De même qu’il est urgent de planifier le rajeunissement du personnel pour plus d’efficacité.

F. Le contrôle juridictionnel, celui-ci est assuré par la Cour des Comptes. Elle exerce un pouvoir général et
permanent de contrôle juridictionnel sur la gestion des finances publiques ; elle relève désormais de l’Assemblée
Nationale. Pendant près de deux décennies, la Cour des Comptes n’a pas été en mesure d’exercer son pouvoir de
contrôle sur la gestion des finances publiques, faute de moyens à la fois financier et matériel. Ses contrôles
sporadiques ont été plus pédagogiques qu’administratifs. Depuis 2004, le Gouvernement et les bailleurs de fonds
multilatéraux lui ont accordé d’importantes subventions pour la rendre opérationnelle et efficace dans la réalisation de
ses missions. La Cour a cependant réalisé des rapports montrant certains dysfonctionnements sur la fiabilité des
données, l’absence de contrôle de l’effectivité de la dépense et d’importants dépassements de crédit au niveau de
certains services de l’Etat / Gouvernement – Banque Centrale notamment).

G. Le contrôle parlementaire : Peu efficace au cours de la longue période de monolithisme politique, le


contrôle parlementaire a repris de l’aile depuis l’installation du Parlement / Assemblée Nationale et Sénat après la
formation du Gouvernement de Transition le 30 juin 2003. Depuis 2004, un dialogue s’est progressivement instauré
entre le gouvernement et les deux Chambres du Parlement, à travers les bureaux de leurs Commissions des
Finances. Celles-ci sont désormais associées aux conférences budgétaires et aux discussions sur l’esquisse et les
grandes masses du projet budgétaire. Pour la préparation du budget 2005, la Commission ECOFIN a été associée
aux conférences budgétaires et aux discussions sur l’esquisse et les grandes masses du projet de budget 2005, ce
qui a facilité le dialogue avec l’Assemblée Nationale. L’aboutissement des réformes dans les domaines de l’exécution
budgétaire et de la préparation des rapports doit rendre disponible au Parlement les informations nécessaires et en
temps voulu pour remplir ses fonctions et pour le suivi systématique de l’exécution du budget. Faute de moyens
financiers et matériels, la Commission ECOFIN de l’Assemblée Nationale n’est pas suffisamment outillée pour
exercer son contrôle sur la gestion des finances publiques principalement l’exécution du budget de l’Etat tant en
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dépenses qu’en recettes. Le gouvernement doit favoriser un appui en ressources humaines et le renforcement des
relations entre le Parlement et la Cour des Comptes pour les assister dans leur mission de contrôle.

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