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PRESENTATION

La finance islamique s'appuie sur un modèle d'intermédiation bancaire à taux zéro. C'est par
conséquent une finance dite libre d'intérêt. Elle nécessite en outre l'adossement de toutes les
transactions à un actif tangible tout en étant fondée sur le partage des profits et des pertes. Née
au VIIe siècle, elle est ancestrale dans ses principes, mais a connu un renouveau au XXe siècle
grâce à un certain nombre d'innovations. Cet ouvrage pose sans détour les questions
fondamentales qui préoccupent les gestionnaires et les économistes concernant cette finance
alternative : que recouvre l'expression « finance islamique » ? Quels en sont les défis et les
opportunités ? Quelle place peut-elle occuper dans l'industrie financière mondiale ? Quelles
alternatives en matière de gestion d'actifs propose-t-elle ? Qu'est-ce qui distingue une banque
islamique d'une banque conventionnelle ? Quels sont les risques liés à cette activité ? Telles
sont quelques-unes des questions qui sont abordées dans ce livre.
Mis en ligne sur Cairn.info le 05/11/2012
ISBN 9782707169846
ISBN en ligne 9782707175236
https://doi.org/10.3917/dec.jouab.2012.01
 I. Un panorama de l'industrie de la finance islamique

Bien que cet ouvrage ne vise pas l'étude des fondements religieux sur
lesquels reposent les instruments financiers islamiques, il demeure
indispensable d'aborder ici quelques spécificités importantes du droit
musulman. Cette nécessité permettra de mieux comprendre les
fondements de la finance islamique qui se traduisent dans la pratique par
cinq principes essentiels ayant accompagné la croissance de l'industrie
depuis sa naissance. La mise en pratique de ces principes a permis de faire
émerger des instruments financiers spécifiques déployés par les
institutions financières islamiques.
L'islam repose sur un large corpus de règles, que l'on nomme la charia,
destinées à encadrer tous les aspects de la vie des hommes, y compris
ceux touchant à l'économie et la finance.
Sur le plan juridique, la doctrine musulmane repose sur une hiérarchie des
textes et des sources qui alimentent la jurisprudence islamique. Ces
sources constituent l'origine du droit musulman, une partition de règles
qui instaurent ce qui est permis et ce qui ne l'est pas. Elles sont donc aussi
l'origine des fondements de la finance islamique qui se doit de respecter
les préceptes religieux. Le Coran et la Sunna constituent les bases
essentielles du droit musulman qui reste ouvert aux interprétations et
développements à travers l'Ijtihad.
Livre saint de l'islam, le Coran se place au premier rang du droit
musulman. Il constitue la base juridique du droit musulman et sa
première source, sans aucune possibilité de doute, de changement, de
modification ou de tri…

 I. Les caractéristiques des banques islamiques


 Kaouther Jouaber-Snoussi
 Dans La finance islamique (2012), pages 35 à 46

 La banque islamique, avec ses différents métiers, remplit avant tout


une fonction d'intermédiation financière. Elle est au centre de l'industrie
financière islamique dès lors qu'elle développe et offre des produits, des
instruments et des solutions lui permettant de réaliser les missions qui
sont les siennes. Aux contraintes reconnues au secteur bancaire viennent
s'en ajouter de nouvelles, attribuables à la nécessaire prise en compte par
l'institution islamique d'une certaine dimension morale. Il en résulte des
caractéristiques spécifiques et un mode de fonctionnement singulier.
D'après les standards de l'AAOIFI, chaque banque islamique doit se doter
d'un conseil de conformité à la charia, composé de jurisconsultes et
d'experts en finance islamique (sharia scholars) indépendants désignés
par l'assemblée générale des actionnaires de l'établissement.
Composé au moins de trois savants, le rôle du sharia board est de valider
et de certifier les contrats et les transactions financières de la banque.
Pour ce faire, il est chargé de spécifier les règles de conformité avec les
principes de la jurisprudence islamique et de contrôler leur application. Il
doit ainsi procéder à des vérifications des activités entreprises par la
banque, des procédures et de la documentation qui les accompagnent. Il
est également chargé de l'audit charia de la banque et est tenu de publier
les résultats de ses investigations. Lors du lancement de nouveaux
produits, ces derniers doivent au préalable obtenir l'aval du comité
religieux qui émettra si nécessaire un avis ou une décision…
 III. Les risques dans la banque islamique
 Kaouther Jouaber-Snoussi
 Dans La finance islamique (2012), pages 47 à 68

La banque est souvent présentée comme un portefeuille de risques. La


banque islamique ne fait pas exception face à cette conception. De
manière générale, le risque provient de l'impact adverse sur le résultat que
pourrait avoir un événement ou une action interne ou externe à la
banque. Cet impact adverse pourrait se présenter sous la forme d'un
moindre profit, voire d'une perte, ou de contraintes entravant la banque
dans la réalisation de ses objectifs.
La banque islamique est confrontée à une panoplie de risques communs à
l'ensemble du secteur bancaire. Elle fait de plus face à quantité de risques
qui lui sont propres et qui sont inhérents à son caractère islamique. La
figure  2 présente les risques auxquels est confrontée la banque islamique.
Elle est construite à partir de la représentation du risque bancaire par Van
Greuning et Brajovic Bratanovic [2004], à laquelle nous avons ajouté les
risques spécifiques aux banques islamiques.
En général, les risques bancaires se classent dans quatre catégories : les
risques financiers, les risques opérationnels, les risques d'exploitation et
les risques accidentels. À ces risques s'ajoutent pour la banque islamique
des risques qui lui sont spécifiques.
Comment la banque islamique vit-elle les principaux risques liés à
l'activité bancaire de manière générale ? Quelle est son exposition aux
risques qui lui sont propres ?
Le risque de crédit est aussi souvent qualifié de risque de contrepartie ou
de signature. C'est l'un des risques les plus importants pour une
institution bancaire dont la mission principale est l'intermédiation…

 IV. La gestion d'actifs en finance islamique


 Kaouther Jouaber-Snoussi
 Dans La finance islamique (2012), pages 69 à 94

Le premier fonds islamique a été lancé en Malaisie en 1968 sous la


dénomination Dana Al-Aiman. Comme il apparaît dans le tableau  8, mis à
part quelques exceptions, ce n'est que dans les années 1990 que l'industrie
financière islamique commence sérieusement à développer des fonds. En
1996, on pouvait dénombrer vingt-neuf fonds islamiques pour une valeur
totale de 800 millions de dollars [Hussein, 2005]. Le retard de
développement de ce secteur peut s'expliquer, du moins en partie, par les
exigences spécifiques sur ce type de fonds.
En effet, Usmani [2001] rappelle que deux exigences conditionnent la
validité d'un actif islamique. La première est qu'aucune rentabilité fixe ne
puisse être promise, encore moins obtenue. Par conséquent, le profit des
investisseurs est plutôt strictement et directement lié à la performance
des actifs en portefeuille. La seconde condition impose que les titres
inclus dans le portefeuille soient acceptables du point de vue du droit
musulman. Sont ainsi définis des critères d'exclusion qui doivent être en
permanence respectés.
L'application de ces conditions est contrôlée par les conseils de la charia
des différents fonds. Le trait distinctif des fonds d'investissement
islamiques réside dans les contraintes sur le processus d'investissement et
dans les critères de sélection des titres composant leurs actifs. Ces
derniers restent toutefois également soumis aux exigences en matière de
risque et de rentabilité.
L'univers des titres existants est soumis à une présélection suivant des
critères religieux…

 V. Les sukuk
 Kaouther Jouaber-Snoussi
 Dans La finance islamique (2012), pages 95 à 112

Les sukuk constituent le produit phare de l'industrie financière islamique.


Leur développement est à l'origine de la croissance du marché de capitaux
islamique. Ils offrent une alternative compatible avec les valeurs
musulmanes aux obligations classiques, au point que d'aucuns les
qualifient d'obligations islamiques. Ils donnent en effet la possibilité de
souscrire à des certificats d'investissement et de les échanger par la suite
sur un marché secondaire. Des sukuk sont cotés sur plusieurs Bourses
internationales, à l'instar du NASDAQ Dubai et du London Stock
Exchange. Nyse Euronext est depuis 2008 prêt à accueillir ces titres sur un
compartiment dédié.
L'AAOIFI, dans sa norme charia  17, définit les sukuk comme étant des
certificats ayant une valeur égale et représentant des parts indivises de
propriété d'actifs tangibles, d'usufruits et de services, ou encore de
propriété d'un projet particulier ou d'une activité d'investissement
spécifique.
Les sukuk sont donc des produits financiers adossés à des actifs tangibles
ou à leur usufruit, à échéance fixe, et qui engendrent des flux financiers
permettant la rémunération des porteurs de ces titres. L'émission de ces
certificats revient dans les faits à une opération de titrisation. Chaque
titre représente une quote-part indivise de propriété sur les actifs sous-
jacents générateurs de flux financiers. L'investisseur détenteur du titre est
par conséquent théoriquement associé aux risques inhérents à ces actifs.
En contrepartie, il perçoit une part des profits attachés au rendement de
l'actif sous-jacent…

 Conclusion
 Kaouther Jouaber-Snoussi
 Dans La finance islamique (2012), pages 113 à 116

Les effets des crises successives qu'a connues l'industrie financière


mondiale montrent qu'il y a de la place pour des modèles alternatifs
porteurs de solutions nouvelles et complémentaires. La finance islamique
véhicule des principes éthiques issus de la religion musulmane. Elle
s'appuie sur un système de valeurs afin de proposer des produits
financiers novateurs. Sa résilience au plus fort de la crise des subprimes
l'a érigée en exemple aux yeux de certains observateurs.
La finance islamique est, depuis quelques dizaines d'années, venue
s'insérer dans un paysage financier globalisé. Si elle aspire à jouer un rôle
dans le système financier international, elle n'a d'autre choix que de
s'adapter à un environnement déjà organisé. Pour atteindre ses objectifs
de développement, c'est d'une manière proactive qu'elle doit respecter les
normes et les réglementations internationales, notamment en matière de
gestion des risques et de gouvernance. Sans extraire les institutions
financières islamiques de la réglementation internationale, une
adaptation aux contraintes et aux risques propres à ce secteur devient une
nécessité. Elle a en partie été entreprise par certaines instances comme
l'IFSB ou l'AAOIFI, mais d'autres efforts restent à faire afin de rassurer
définitivement le marché sur la solidité de cette finance. Le
développement de la finance islamique se heurte parfois aussi à des
barrières socioculturelles. Dans certains cas, un effort d'information et de
pédagogie est à fournir…

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