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FINANCE
ISLAMIQUE
Jamal El Bakouchi
Directeur de mémoire :
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PLAN
INTRODUCTION
SECTION 1 : HISTORIQUE
CONCLUSION.
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Introduction :
Depuis le début de la Finance Islamique moderne en 1975, le nombre
d’institutions financières islamiques et leurs chiffres a connu une croissance
fulgurante. Peut être en raison de l’expansion des avoirs des Financiers
Islamiques, mais aussi parce que, musulmans et non musulmans, s’accordent
pour voir dans la Finance Islamique un choix éthique qui permet d’éviter les
dérives de la spéculation à outrance tout en réinstaurant certaines valeurs
négligées par la finance conventionnelle… comme la confiance et la solidarité.
Les chiffres confirment qu’il y a plus qu’un engouement pour les produits de la
Finance Islamique qui pourraient devenir des produits courants. Ce secteur
pourrait représenter 4.000 milliards de dollars US d’ici cinq ans.
Par ailleurs grâce à ces principes fondamentaux (partie 1) : des produits licites
dont le profil de rentabilité est adossé à des actifs tangibles, un fort de gré de
transparence et l’interdiction de spéculer et de payer des intérêts, ont permis
d’atténuer le choc la dernière crise économique. En effet tous les cours boursiers
mondiaux ont chuté, mais grâce à une exposition moindre à la crise des crédits, le
repli des indices conformes à la ‘Chariâ’ a été moins prononcé que celui des
indices traditionnels.
Relativement parlant, la Finance Islamique n'en est qu'à ses débuts, et ce mode
de financement qui était destiné au départ à être une solution alternative pour les
musulmans, est peu à peu apparu comme un phénomène qui intéresse le monde
entier et s’intègre de plus en plus à l’économie globale. Ce phénomène peut
paraître paradoxal dans un contexte ou l’Islam réprouve la pratique de l’usure et
de l’intérêt, piliers du système financier international.
Pourtant l’absence de recul, de taille critique, de standardisation et d’expérience
constituent ses principaux handicaps. Les spécialistes admettent la nécessité de
développer des méthodes spécifiques de gestion des risques et de controle, qui
viendraient compléter les outils de gestion utilisés en finance classique. En plus il
y a nécessité d’harmonisation les différentes cultures, normes, pratiques,
interprétations de la charia et des principes de supervision est une autre
condition à la poursuite de la croissance :
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Figure 1 : Evolution des fonds de la Finance Islamique en milliard $
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1ère PARTIE
FINANCE ISLAMIQUE ;
ENJEUX ET PROBLEMATIQUES
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Section 1 : Principes Généraux
de la Finance Islamique
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L’argent n’est donc pas reconnu comme un bien susceptible de générer par
lui-même des revenus. Le seul prêt d’argent ne peut donc pas être rémunéré
entant que tel.
Le fait générateur de cette rémunération doit être les revenus par le bien et
non pas l’écoulement du temps car le passage du temps n’appartient qu’à
Allah. En d’autres termes le prêteur obtiendra une rémunération uniquement
si il y a réellement un revenu.
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3- Prohibition de l’aléa (al gharar)
Le ‘Gharar’ consiste en la vente d’articles dont l’existence ou les
caractéristiques ne sont pas certaines. Dans un échange commercial, le
‘Gharar’ se réfère à une tromperie ou à une ignorance de l’objet du contrat. Le
‘Fiqh’ donne des exemples du ‘Gharar’ telle que la vente d’un poisson en mer,
d’un œuf non encore pondu, ou plus généralement la vente d’une chose qui
n’est pas suffisamment identifiée.
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5- Prohibition de la prise de participation dans des entreprises dont l’activité
n’est pas jugée éthique par l’Islam (haram) :
Les techniques de financement islamique ne peuvent pas servir de support à
des investissements réalisés dans des entreprises de commerce d’alcool,
d’élevage de porc, les casinos, l’armement ou les discothèques.
Toutefois quelques hôtels dans les pays du Golfe ont eu recours à des
financements islamiques bien que de l’alcool y soit servi et vendu ce qui
prouve une certaine flexibilité du raisonnement en matière commerciale.
Conclusion de la Section 1:
Il est vrai qu’à bien des égards la Finance Islamique apparaît comme éthique:
l’intérêt des différentes parties est pris en compte, le système s’appuie sur un
principe de solidarité et d’entraide et il est interdit d’investir dans des activités
considérées dans le monde entier comme nuisibles.
Néanmoins il subsiste de nombreuses zones d’ombres en ce qui concerne
l’application des principes énoncés ci-dessus. En effet, il n’est pas clairement
défini ce qu’est un partage équitable du profit et de quel profit cela peut s’agir. Il
est également difficile d’évaluer le degré de ‘gharar’ acceptable.
Par ailleurs malgré l’interdiction d’investir dans du ‘haram’, certains fonds
« islamiques » servent à financer des structures s’appuyant sur des activités
prohibées pour générer des profits. Il semble donc que le manque de clarté et de
précision dans les définitions des principes fondamentaux de la Finance
Islamique peut mener à des dérives où la logique commerciale l’emporte sur la
dimension éthique.
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Section 2 : Les instruments de base
de la Finance Islamique
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1-1 La Moucharaka :
Il s’agit de l’équivalent d’un capital investissement ou, une joint-venture et l’un
des outils de financement les plus couramment utilisés par les banques
islamiques, notamment dans le cadre de financement de projet. C’est un
partenariat sur la base duquel l’institution financière comme l’entreprise
investissent dans le projet. L’institution financière et son partenaire partagent
les profits et les pertes selon des propositions prédéfinies.
Alors que les profits sont répartis selon une clé de répartition fixée à l’avance,
les pertes sont obligatoirement réparties au prorata des apports.
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1-2 La Moudaraba :
Il s’agit de l’équivalent d’une société en commandite. Le capital est
entièrement fourni par la banque (commanditaire) à l’entrepreneur
(commandité) pour le financement du projet. La banque choisit
l’entrepreneur, appelé ‘Moudarèb’, qui sera chargé de gérer les fonds investis.
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2- Financements en l’absence de partage des profits et des pertes :
2-1) La ‘Mourabaha’ :
La ‘Mourabaha’ est le produit le plus utilisé dans la Finance Islamique et
représente 60% des contrats de financements émis.
Il s’agit d’un mode de financement d’actifs par achat/revente. La banque
islamique achète un bien à un tiers à la demande du client puis le lui revend
moyennant un paiement différé et une marge forfaitaire. Cette marge
forfaitaire couvre le risque pris par la banque en jouant le rôle de
l’intermédiaire.
Le prix de revente, fixé par la banque, doit être approuvé par le client à
l’avance et celui-ci doit connaître le prix d’achat initial.
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2-2) L’Ijara :
C’est un moyen de financement à long terme. Il s’agit de la location, d’actifs
acquis par la banque, au client.
Au terme du contrat, trois cas de figure peuvent se présenter :
- Le client est obligé d’acheter le bien, soit
- Il a le choix d’acheter ou de restituer le bien, soit
- Il opte pour une seconde location de ce bien
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2-3) Le ‘Salam’ :
Il s’agit d’un achat de biens à terme et d’un accord à court terme. L’acquéreur
achète le bien en payant le prix en totalité et le vendeur s’engage à le lui
transférer à une date ultérieure fixée à l’avance.
Le ‘Salam’ présente l’avantage de permettre à la banque d’avancer
directement des fonds à son client, en se positionnant en tant qu’acquéreur
vis-à-vis de lui et en lui concédant un délai pour la livraison des marchandises
achetées. C’est un instrument semblable à un forward.
2-3) L’Istisna :
Cette technique de financement est similaire à un contrat EPC (Engineering
Procurement Construction). En effet, comme dans les contrats EPC, une partie
demande à une autre de lui fabriquer ou construire un ouvrage moyennant une
rémunération payable d’avance. Concrètement la banque islamique finance le
fabriquant pendant la phase de construction du bien, en acquiert la propriété à
l’achèvement, puis le transfert à l’entrepreneur du projet moyennant un
paiement différé, ou le lui loue.
L’Istisna fournit donc un financement à moyen long terme pour couvrir les
besoins de financement pour la fabrication, la construction ou la fourniture des
produits finis.
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Conclusion de la Section 2:
A l’exception de la ‘Moudaraba’ et de la ‘Moucharaka’, les autres modes de
financement n’impliquant aucun mode de partage se rapproche davantage des
techniques de financement conventionnelles : vente à paiement différé, vente à
livraison différé, location avec possibilité d’achat… par conséquent, seules les
deux premières techniques sont réellement considérées, par les orthodoxes,
comme strictement conformes à la ‘‘Chariâ’ ’.
Néanmoins, celles-ci ne représentent que 17% de l’activité de la Finance
Islamique (figure 7), les 83% restant sont des produits qui ne font pas l’unanimité
au vu de leur conformité par rapport aux règles de la ‘‘Chariâ’ ’.
Par ailleurs, dans l’ensemble de ces techniques, il apparaît qu’il existe bel et bien
un substitut qui est un moyen détourné de percevoir des intérêts.
Ainsi, dans la pratique, dans un contrat d’’Ijara’ par exemple, les loyers perçus
par la banque sont calculés de la même manière qu’un taux d’intérêt classique
s’appuyant sur la révision périodique du loyer permettant de s’aligner sur les prix
du marché des taux plus que celui de la location immobilière. Le montant de cette
révision annuelle n’est pas prédéterminé d’une manière certaine, il semble donc
bien exister un élément d’incertitude quant au fait si le loyer sera augmenté ou
non et de combien.
Il semble que dans une finance qui se définit et se distingue par l’application
stricte de certaines règles religieuses, il existe des zones d’ombre et des moyens
qui permettent de détourner habilement ces règles afin de toucher un large public
et d’obéir à une logique de bénéfices et de gains semblables à celle de la finance
dite conventionnelle.
Istinsaa
2% Moudaraba/
Divers Moucharaka
13% 17%
Ijara
9%
Mourabaha
59%
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Section 3 : La Titrisation Islamique ;
Les Sukuk
Ainsi, si au départ les Sukuk étaient émis exclusivement par les Etats (tels que les
gouvernements de Malaisie, Qatar, Pakistan, Bahrayn, Dubaï), des compagnies
privées y ont récemment eu recours.
1- Principes :
1-1) Définition :
Le terme Sukuk (pluriel de Sak) signifie certificat de créance ou obligation.
L’Organisation des Comptables et des Vérifications des Institutions
Financières Islamiques AAOFI les définissent comme : des certificats de valeur
représentant une part de copropriété d’actifs tangibles, de service ou
d’usufruits résultant d’un projet ou d’une activité d’investissement.
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1-3) Conformité à la loi islamique :
L’adossement à un actif admis par la ‘Chariâ’ et dont seule la performance
permet de rémunérer le placement, est conforme aux interdictions de riba
(intérêt) et du haram, fait des Sukuk des instruments conformes à la loi
islamique.
2- Classification :
Les Sukuk reposent sur les techniques de base de la Finance Islamique tels que
les contrats de location Ijara, les contrats de partenariat (Moucharaka et
Mourabaha), les contrats de financement classique ‘Mourabaha’ ou à terme
‘Salam’. En vertu de la définition retenue, les Sukuk peuvent être adossés à des
actifs tangibles, des services ou des usufruits, et également sur des contrats de
partenariat ‘Moucharaka’ et ‘Moudaraba’. L’ AAOIFI reconnaît 14 types de Sukuk
selon la nature de leurs sous-jacents.
Les plus émis sur le marché sont ceux qui posent le moins de difficultés quant à
leur conformité à la ‘Chariâ’ sont détaillés ci-après :
Par exemple l’Etat du Pakistan a émis un emprunt sous forme d’un Sukuk afin
de financer la construction d’une autoroute ; les recettes des péages ont servi
à garantir le remboursement du prêt.
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Figure 8 : Schéma d’une opération de Sukuk Al Ijara
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2-2) Sukuk adossé à un portefeuille d’actif :
Afin de mobiliser davantage de fonds, les Sukuk peuvent être adossés à un
pool d’actifs comprenant des contrats d’Istisna, de Mourabaha et d’Ijara.
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Figure 9 : Schéma d’une opération Sukuk A’Ssalam
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3- Conditions de cotation :
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Les émissions de Sukuk sont appelées à augmenter rapidement. Les
estimations les plus conservatrices les placent à environ 20 milliards $ au
cours des 5 prochaines années. La dernière en date fut celle de Nakheel
Group (à Doubaï) pour un montant de 3,52 milliards $ (cotée à Doubaï et
Londres).
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Section 4 : Evolution
de la Finance Islamique
1- Historique :
Source: Making the transition from niche to mainstream KPMG report 2006
Bien que la première banque à suivre les principes islamiques a été crée en
Egypte dans la ville de Mit Ghamr en 1963 sous forme de caisse d’épargne rurale,
les banques islamiques ont réellement vu le jour en 1974, lorsque l’Organisation
de la Conférence Islamique décida, lors du sommet de Lahore, de créer la
Banque Islamique de Développement BID.
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La première banque privée islamique fut crée un an plus tard en 1975 à Dubaï,
suivie en 1978 par l’ouverture de la Bahreïn Islamique Banque. Dès lors le nombre
d’institutions islamiques n’a cessé de croître à travers le monde.
En 1979 le Pakistan devint le premier pays à décréter l’islamisation de son
secteur bancaire et fut suivi en 1983 par le Soudan et l’Iran.
Au milieu des années 1990’s les banques occidentales ont commencé à établir
leur propres filiales islamiques dans la région du Golf. Ainsi en 1996 Citibank a
installé sa filiale à Bahreïn suivie très rapidement par la création de ‘HSBC
Amanah’ par HSBC. L’Etat du Bahreïn devenu le centre de la Finance Islamique
dans la région du Golf, a vu les actifs consolidés des banques islamiques doubler
en moins de trois ans en raison de l’installation de ces filiales occidentales.
Depuis le début des années 2000 les institutions financières islamiques ont
également fait leur apparution dans des pays occidentaux où vivent des minorités
musulmanes (Etats-Unis, Danemark, Canada, Royaume Uni).
Sheikh Hussein Hamid Hassan, qui siège au comité ‘Chariâ’ de plusieurs
institutions financières (comité qui se charge de vérifier la conformité des
produits proposés avec les lois islamiques) a déclaré au ‘Financial Times’ que :
« nous recevons des délégations de Chine, de Russie, du Japon et du monde
entier qui viennent nous demander comment mettre en place des banques
islamiques. Nous sommes très très occupés ».
La situation est bien loin d’avant 1973 pour la Finance Islamique où il existait
quelques cas isolés de caisses d’épargnes rurales islamiques. De nos jours les
institutions financières islamiques sont présentent dans le monde entier et ont
réellement diversifié leurs activités. Elles offres un large panel de produits et
services couvrant l’essentiel des domaines de la finance que l’on retrouve dans le
circuit « conventionnel » : banque commerciale, banque d’investissement,
activités de marché, fonds islamiques…
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2- La croissance en chiffres:
Le secteur de la Finance Islamique connaît une croissance importante
et exceptionnelle :
La croissance s’appuie sur 1,3 milliard de musulmans à travers le monde
L’actif total géré par les institutions financières islamiques à travers le
monde est évalué à 360 milliards $ en 2006, soit quarante fois que durant
les années 1980’s
200 milliards $ sont également gérés par des filiales dites islamiques de
banques conventionnelles
Il existe actuellement plus de 270 institutions financières islamiques dans le
monde réparties dans plus de soixante quinze pays
La croissance de ces institutions est supérieures dans les pays arabo-
musulmans, berceau de la Finance Islamique, à celle des institutions
conventionnelles : figure 10. Cette tendance n’est pas uniquement le fait
des pays arabo-musulmans mais de l’ensemble des institutions concernées
dans le monde entier
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Figure 10 : Répartition institutions financières islamiques dans le monde
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3- Croissance soutenue par d’importantes transactions :
Depuis le début du 21ème siècle, d’importantes transactions ont été financées,
entièrement ou en partie, par une tranche islamique, les banques recherchant de
plus en plus d’opportunités pour investir l’afflux de liquidités résultant
essentiellement de l’expansion des recettes des produits énergétiques.
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Ce financement a été réalisé entièrement de manière « islamique ». Cela
démontre que les offres issues de la Finance Islamique sont capables de
s’imposer dans des deals de télécommunication, deals nécessitant de la rapidité
et de concision, et ce malgré la complexité et la documentation supplémentaire
nécessaire pour les financements islamiques.
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Afin d’attirer ces épargnants et de donner un nouvel élément de croissance au
secteur bancaire, les autorités ont finalement autorisé le lancement de produits
islamiques en 2007. Ce qui se passe au Maroc est loin d’être une exception. Dans
la région du Golfe les experts s’accordent à dire que 50% de la population est en
faveur de l’option Finance Islamique et on estime qu’en moyenne 20% de la
clientèle du Golfe et de l’Asie musulmane choisiraient spontanément un produit
financier islamique plutôt qu’un produit conventionnel offrant les mêmes
caractéristiques de rendement et de risque.
Une autre raison de l’essor de la Finance Islamique est l’augmentation de la
manne pétrolière qui a fait exploser la demande d’investissements acceptables
dans la région du Golfe. Il est en conséquent essentiel de convaincre ces
populations, attachées à leur religion, d’investir leurs fonds. Ainsi il y aurait
1 500 milliards $ de capitaux au Moyen Orient pouvant alimenter les réseaux de
financement islamique.
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Les perspectives de profit très attractif qu’offrent les institutions islamiques sont
également une raison de taille. Ainsi selon les analystes de ‘Standard and Poors’,
« les institutions islamiques bénéficient d’une part de produits plus chers que le
marché, d’un marché de ‘retail’ bien maîtrisé et d’un levier du crédit activement
exploité ; ce qui permet de dégager des rendements élevés et profitent, d’autre
part, d’un accès à de vastes gisements de dépôts bon marché et stables, ce qui a
comme conséquence des coûts de refinancement faibles ».
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Section 5 : La Finance Islamique
en Occident
1- Importantes transactions :
Comme évoqué précédemment, le développement de la Finance Islamique ne se
limite pas aux pays musulmans. Ainsi de nombreuses compagnies occidentales
sont également impliquées entant qu’actionnaires dans les gros financements de
projets ayant lieu dans la région du Golfe et comportant une tranche islamique
(Dolphin Gas, Qatargas II, Qatargas III…). Les produits de la Finance Islamique
peuvent être une solution alternative qui permet de lever les sommes
complémentaires et d’attirer des investisseurs et épargnants aux profils variés.
Aux Etats-Unis une compagnie d’exploitation de gaz texane ‘The East Cameron
Gas Company’ a été la première entreprise américaine à émettre en 2006, des
Sukuk pour un montant de 165 millions $ et ceci également afin d’attirer les
demandes d’investissements prevenant du monde arabe.
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L’engouement pour la Fiance Islamique semble gagner de plus en plus l’Occident
qui cherche ainsi à attirer les pétrodollars en provenance des pays Arabo-
musulmans ; un enthousiasme intimement lié à l’abondance des capitaux dans
cette région et à la volonté des institutions occidentales de canaliser l’épargne
provenant des populations musulmanes installées dans les pays occidentaux et
représentant une part importante de leur clientèle.
Par ailleurs l’adoption de Finance Islamique par ces institutions peut également
être perçue comme un moyen de diversifier l’offre et de proposer une gamme
toujours plus étendue et plus élaborée de produits dans une époque où il est de
bon augure de toujours chercher de nouvelles sources de profits.
2-1 L’Angleterre :
L’Angleterre a vu naître la première forme du banking islamique dans les
années 1990’s sous forme de produits financiers de détail. Durant les cinq
dernières années le secteur islamique du marché de blocs et de détail a
connu une forte croissance. Avec plus de 18 milliards $ dans les actifs
‘Chariâ Compliant’.
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Cinq facteurs principaux expliquent la croissance de la finance islamique au
Royaume Uni:
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2-2) La France :
La commission des finances a organisé le 14 mai 2008 deux tables rondes sur
la Finance Islamique afin d’étudier les opportunités qu’offre un tel système
financier. Ces tables rondes ont abouties aux constatations suivantes :
- Une inertie relative dans le domaine de la Finance Islamique : malgré
une attention des pouvoir publique sur le sujet, le secteur bancaire
français ne montre pas une forte pro-activité en dépit du fait que
certaines institutions françaises telles que la BNP PARIBAS et la
SOCIETE GENERALE qui ont ouvert des fenêtres islamiques.
La première avait ouvert sa filiale ‘Najmah’ dans le Royaume de
Bahreïn en 2003 avec la mission de fournir des solutions islamiques
dans le monde entier. Son rôle est de couvrir les banques islamiques
et accompagner les autres lignes de métiers bancaires en proposant
des produits islamiques à leurs clients. Cette inertie parait
paradoxale car la France possède une place financière compétitive et
d’autre part la présence d’une communauté musulmane importante.
- La législation française ne pose pas d’obstacle au développement de
la Finance Islamique : le droit permet la création et la distribution des
produits ‘‘Chariâ’ Compliant’ d’autre part, que certains dispositifs
juridiques et fiscaux français existants étaient, dans leur mécanisme,
proches des principes requis par la Finance Islamique.
2-3) Allemagne :
La banque ‘Kuveyt Türk’ filiale du groupe Koweitien ‘Kuwait Finance House’
KFH, a entamé en association avec des actionnaires turcs, des démarches
auprès du gouvernement fédéral allemand pour développer des services
islamiques via sa filiale allemande.
2-4) Le Japon :
Le Japon envisage de devenir le premier grand pays industrialisé à émettre
des obligations publiques respectant à la lettre les préceptes de l'Islam.
La Banque Japonaise de Coopération Internationale (JBIC), un organisme
d'Etat, avait lancé les premiers "Sukuk", ou obligations coraniques sans taux
d'intérêt, en coopération avec la Malaisie en 2004.
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La JBIC a levé entre 300 millions et 500 millions $. Le souscripteur perçoit un
revenu tiré du bien dans lequel son argent a été investi (puits de pétrole,
mines, loyers immobiliers, etc.) et récupère sa mise à l'échéance de
l'obligation, généralement cinq ans, sans aucune majoration.
2-5) Luxembourg:
En avril 2008, Le Gouvernement a chargé un groupe de travail d’identifier les
obstacles potentiels au développement de la Finance Islamique au
Luxembourg ainsi que les pistes de développement. Le Gouvernement a
demandé également aux autorités fiscales d’examiner les caractéristiques des
transactions de la Finance Islamique et de proposer des solutions pour que
ces transactions bénéficient d'un traitement fiscal équivalent à celui appliqué
aux transactions bancaires et financières traditionnelles.
Le Gouvernement de Luxembourg soutient la candidature de la Banque
Centrale du Luxembourg pour devenir le premier membre associé « non
régional » de L’Islamic Financial Services Board, le régulateur des marchés
Financiers Islamiques.
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Il est destiné à suivre la performance de ces certificats dans la mesure où ils
présentent une taille supérieure à 250 millions $, une maturité supérieure ou
égale à une année et un rating d’au moins BBB- / Baa3 (investment grade). A fin
mai 2006, le DJCSI mesure la performance de 7 émissions de Sukuk pour une
valeur de 4 milliards $.
De plus, et bien que ces indices soient actuellement publiés dans le monde entier,
ils ne pèsent pas lourdement dans le système financier puisque ils n’en sont qu’à
leurs débuts et jouent un rôle limité sur les marchés financiers islamiques.
Conclusion de la Section 5:
La création des indices DJIM et DJCSI ainsi que celle de la banque EIIB montrent
la volonté qu’ont les marchés occidentaux de s’impliquer de plus en plus dans la
Finance Islamique ainsi que leur désir de reconnaître ses produits comme des
produits uniques requerrant leurs propres standards et indices tout en intégrant
ces produits à l’économie mondiale.
Toutefois la Finance Islamique demeure un marché limité dont la taille est peu
importante proportionnellement à celui de la Finance Conventionnelle dans ces
pays, étant donné que les actifs de banques islamiques ne représentent que 1,7%
des actifs bancaires globaux.
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Figure 15 : Surface financière des principales banques islamiques
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Section 6 : Les difficultés
de la Finance Islamique
Ce sujet est sans doute le point de faiblesse le plus important des banques
islamiques. Les instruments de gestion de la liquidité sont souvent des
instruments de taux (les politiques d’intervention des Banques Centrales sont
toutes basées sur les taux directeurs), interdits par la Charia.
En effet les ‘Chariâ Board’ définissent les ressources financières des banques
islamiques, outre le capital et leurs fonds propres, dans les opérations ci-après:
1-1) Les dépôts: à ce niveau, les banques islamiques assument tous les
risques et les détendeurs de ces comptes ne perçoivent ni bénéfice ni
revenus, quel qu'en soit le solde du compte
1-2) Les comptes d'épargne
1-3) Les comptes d'investissements: Les dépôts à des fins d'investissements
constituent la principale source de fonds pour les banques et ils
ressemblent bien plus à des actions d'une entreprise qu'à des dépôts à
terme ou d'épargne
1-4) Le Zakat : ou compte de service social qui sont des fonds collectés et
dépensés conformément à la loi islamique et ils ont pour fonction réelle
de permettre aux pauvres de se suffire à lui-même par ses propres
moyens de telle sorte qu'ils aient une source de revenu fixe qui les
dispense de recourir à l'aide d'autrui
1-5) Les autres services bancaires rémunérés offerts par la banque
islamique sont identiques à ceux proposés par les banques classiques.
Cette limitation interdit l’accès aux liquidités offertes par les marchés monétaires
classiques, d’où la genèse de substituts ad hoc comme en Arabie saoudite qui a
développé un marché interbancaire local très personnalisé qualifié mais qui reste
en général en phase de développement.
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L’innovation financière est extrêmement cruciale dans ce domaine et c’est à quoi
le ‘Liquidity Management Center’ (à Bahreïn) s’emploie. Les experts de ce centre
ont adapté les doctrines des théoriciens fondateurs pour en sortir un mécanisme
conforme aux exigences actuelles. Celui-ci se base sur une monnaie ayant une
valeur intrinsèque indexée à un sous-jacent comme l’Or. Les banques bâtissent
sur cette base un marché monétaire où elles échangent leurs liquidités. Cela leur
permet de financer l’économie par les biais des formules prescrites par la Charia.
En retour, les entreprises remboursent leurs dettes et versent aussi la Zakat.
3- La réglementation et le contrôle:
Le deuxième problème consiste à créer un cadre pour la gestion, le contrôle et la
réglementation des banques islamiques. Tout d’abord, les pays où il existe des
banques islamiques n’ont pas tous la même approche.
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Selon l’une des deux principales démarches — appliquée par les autorités de
Malaisie et du Yémen, par exemple — les banques islamiques doivent être
soumises à un régime de contrôle et de réglementation par la banque centrale
entièrement différent de celui qui est appliqué aux banques classiques.
Plusieurs pays et institutions ont adopté les normes comptables élaborées par
l’AAOIFI, qui complètent celles des normes internationales d’information
financière. L’IFSB vise à faciliter le développement d’un secteur islamique des
services financiers prudent et transparent et donne des conseils sur le contrôle et
la réglementation des institutions qui offrent des produits financiers islamiques.
L’IFSB a élaboré des normes sur le niveau de fonds propres requis et la gestion
des risques et il avance dans la conception de normes sur la gouvernance des
établissements.
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Quand ces normes internationales seront élaborées et acceptées, elles aideront
les contrôleurs à vérifier la solidité, la stabilité et l’intégrité des établissements
financiers islamiques.
Par exemple, une Banque Islamique qui agit en tant que ‘Moudarib’ (agent dans le
cadre d’un contrat ‘Moudaraba’, instrument de partage des bénéfices et des
pertes (PBP)) pourrait être considérée davantage comme un gestionnaire de
fonds que comme une banque. Dans ces cas, certains contrôleurs appliquent
donc la même méthode qu’aux gestionnaires de fonds classiques (ratios
prudentiels, encadrement du risque…).
Parfois, les divers risques sont regroupés dans un seul instrument islamique
offert par une seule institution (par exemple un Salam) et, dans ce cas, le principe
de la mise en commun de l’épargne et du partage des risques s’applique.
Toutefois, pour que le contrôle soit vraiment efficace, il faut examiner de plus
près la nature de la transaction sous-jacente.
À cause des risques liés aux activités de ces institutions et aux contrats qui
régissent la mobilisation de leurs capitaux, certains prétendent que leur contrôle
et leur réglementation doivent porter sur un domaine beaucoup plus large que
celui du seul secteur bancaire.
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Cet argument se fonde sur le caractère particulier du profil de risque dans
l’intermédiation financière islamique.
En effet, si les financements déplacent le risque direct vers les déposants, ils
peuvent aussi exposer les banques islamiques à des risques qui sont
normalement supportés par les investisseurs en actions et non par les détenteurs
de titres de dette.
Les financements islamiques impliquent les établissements dans des activités qui
vont au-delà de la banque traditionnelle, comme la détermination des ratios de
partage des bénéfices et des pertes pour les projets d’investissement.
Si un projet, financé par un contrat ‘Moudaraba’, par exemple, accuse une perte,
la banque sera dans l’incapacité de recouvrer son prêt puisqu’elle supportera
toutes les pertes.
4-1) Remplois :
Un enjeu important pour les banques islamiques réside dans la nécessité de
diversifier davantage les emplois, en dehors du seul marché ‘retail’.
Les remplois sont rares, notamment au sein des secteurs Corporates alors
que les PME peuvent constituer une alternative intéressante. Les crédits
hypothécaires, quand le cadre législatif le permet, sont aussi explorés.
En matière de portefeuille d’investissement, les classes d’actifs éligibles sont
peu nombreuses et intrinsèquement risquées: portefeuilles actions, et
investissement direct en capital ou dans des projets immobiliers.
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4-2) La collecte des données :
Le manque de données agrégées rend pratiquement impossible la
comparaison des Banques Islamiques d’un pays à l’autre, difficulté qui,
conjuguée à l’absence de normes communes de déclaration et de
comptabilité, complique la tâche des contrôleurs.
On ne dispose pas de données sur les activités des Banques Islamiques, le
montant des transactions islamiques ou les investissements immobiliers
fondés sur les principes de l’Islam dans les pays développés.
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Conclusion de la Section 6:
Un système financier islamique sain et efficient peut ouvrir la voie à une
intégration financière régionale des pays concernés.
Il peut aussi contribuer à leur développement économique et social en finançant
l’infrastructure économique et en créant des emplois.
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2ème PARTIE
FINANCE ISLAMIQUE
AU MAROC ;
PRODUIT ALTERNATIF
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Section 1 : Historique
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«Accorder à Untel et non à Untel aurait pu créer des problèmes politiques. C’est
pour cela que nous avons jugé bon d’ouvrir plutôt des fenêtres consacrées aux
produits alternatifs dans les différents guichets des banques classiques», avait-il
souligné.
A signaler aussi que ce comité regroupe, outre les représentants de BAM, ceux
du Groupement Professionnel des Banques du Maroc GPBM, du Ministère des
Finances et de l’Association Professionnelle des Sociétés de Financement APSF.
Ce comité lui-même qui a été chargé de valider le schéma comptable proposé par
BAM pour le traitement de ces nouveaux produits.
2-1) Ijara:
L'objet principal de ce contrat n'est autre que l'usufruit généré par
l'exploitation du matériel acquis dans le cadre du contrat de leasing. Ce profit
est vendu à la société de leasing à un prix prédéterminé «Le bailleur garde la
propriété du bien avec tous les droits et les responsabilités qui en découlent».
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2-2) Ijara wa Iqtinaa :
Similaire à l’Ijara, à cette différence près que le client a la possibilité d’acheter
le bien à la fin du contrat.
2-3) Murabaha :
La banque achète un bien pour le compte d’un client puis le lui revend avec
une marge de bénéfice définie à l’avance.
Dans ce contrat, le client donne l'ordre à la banque d'acheter pour son compte
une marchandise au comptant. Il s'engage ensuite à reprendre ce bien par le
biais d'un paiement différé moyennant une marge bénéficiaire versée à la
banque. Ce paiement peut faire l'objet d'un seul versement ou être réparti sur
plusieurs échéances.
La banque est amenée à signer deux contrats dans cette formule. Le premier
avec le fournisseur de la marchandise et le second avec le client qui doit
auparavant donner un ordre d'achat. A noter que le premier contrat doit
indiquer le nom du donneur d'ordre d'achat. Cette dernière clause génère pas
mal de coûts supplémentaires.
’’La première offre de produits alternatifs en 2007, a été conçue sur la base des
règles édictées par The Accounting and Auditing Organization for Islamic
Financial Institutions, organisme basé à Bahreïn qui compte 115 membres
représentant 27 pays et chargé d’édicter les standards conformes aux préceptes
de la ‘Shariâ’, applicables aux produits et aux institutions financières islamiques’’.
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Objectif : attirer des milliers de Marocains qui évitent la banque classique
Le lancement des produits islamiques au Maroc vient en réponse aux différentes
demandes et exigences des partenaires locaux et étrangers, mais aussi dans un
objectif stratégique à moyen et long terme d’attirer davantage d’épargne (surtout
de long terme, dont le Maroc a grandement besoin pour financer ses différents
plans sectoriels).
En effet des milliers de personnes repoussent les offres classiques proposées par
les banques et ne traitent avec ces dernières qu’en cas de besoin extrême, les
jugeant non conformes aux préceptes de l’islam. Du coup, elles se retrouvent en
dehors des circuits formels. Ces personnes trouvent parfois réponse à leurs
besoins dans des circuits parallèles avec tous les dangers que cela représente.
La prise de conscience chez les responsables du secteur bancaire, quoique
tardive, est louable telle que cité sur une note interne de BAM «L’introduction des
modes de financement alternatifs devrait permettre de répondre aux vœux de
certaines catégories de la population et de contribuer à une meilleure
bancarisation de l’économie».
Réseau de distribution :
Parmi les trois banques marocaines qui ont investi le créneau, Attijariwafa Bank
disposait d’une longueur d’avance puisqu’elle a hérité de l’expérience de
Wafabank, et a travaillé déjà depuis 2006 sur le développement de produits
islamiques.
Pour leur part, les responsables de la BMCE affirment que la gamme de produits
alternatifs avait nécessité des procédures et des montages spécifiques «Nous
avions travaillé sur plusieurs scénarios et nous offrons un panel de produits
diversifiés».
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A la Banque Populaire les responsables sont moins bavards et adoptent une
attitude réservée. Ce qui est certain c’est que les équipes de la banque travaillent
sur plusieurs montages dans l’objectif d’élargir la gamme de produits.
Pour Ijara wa Iqtinâa : «Miftah Al Fath», il s’agit d’un contrat selon lequel la
banque met à la disposition du client, à titre locatif, un bien immobilier (logement
ou local professionnel), assorti de l’engagement ferme du client (locataire)
d’acquérir le bien au terme du contrat. Un mode de financement qui s’apparente
au traditionnel Leasing. Aucun changement donc par rapport au crédit-bail
classique.
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Section 2 : Limites et bilan de
l’expérience de 2007
1- Conformité à la ‘Chariâ’ :
Les organismes de la ‘Chariâ Board’ s’accordent sur les différentes ressources
‘halal’ pour le financement des instruments de financement islamique qui sont :
• Les dépôts non rémunérés
• Les comptes d'épargne
• Les comptes d'investissements
• Le Zakat
• Les recettes des autres services rémunérés
Les ressources utilisées dans la première version de 2007 sont des ressources
puisées des banques commercialisations qui sont en bonne partie des dépôts à
terme rémunérés par des intérêts ou des pensions de la Bank Al Maghrib,
également contracté sur la base de rémunération par taux fixe.
Ce caractère de non-conformité des ressources à la ‘Chariâ’ a significativement
pénalisé ces produits.
2- Régime fiscal :
Sur le plan fiscal, le double paiement des droits d’enregistrement sur les
acquisitions de biens immeubles financés par ‘Mourabaha’ n’a été supprimé
qu’en 2009 (2 ans après).
La TVA sur la ‘Mourabaha’ était calculée sur la base de la totalité de la redevance
jusqu’à janvier 2010 où elle sera appliquée uniquement sur la marge de la banque
– et non sur la totalité de l’échéance – et au taux de 10% seulement contre 20%
auparavant. La même chose pour la question de la déductibilité de la marge
payée à la banque par le client, de son impôt sur revenu IR dans le cas du
financement du logement principal.
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Toutefois la double imposition de la plus value est toujours en vigueur alors
qu’elle pourra être fiscalement assimilée à des intérêts versés à la société pour
ne pas supporter la taxe sur la plus value.
Il faut en effet savoir que les établissements bancaires calculent en interne leur
marge commerciale pour les produits alternatifs sur la base d’un taux d’intérêt,
exactement comme s’il s’agissait d’un prêt classique.
Etant donné que le client supportera une marge fixe et qu’il payera une
mensualité invariable dans le temps, les banques appliquent un taux fixe pour le
calcul de leur gain, majoré d’une prime fiscale et ce, pour se prémunir contre le
risque de renchérissement du coût des ressources (hausse des taux d’intérêt) et
la hausse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les produits financiers.
Exemple :
Pour bien montrer cette différence de coût et son impacte sur les prix, nous
présentons cette étude comparative entre un crédit logement classique
d’Attijariwafa Bank qui est Miftah Classique, avec les deux formules alternatifs
commercialisés par la même banque: Miftah Al Kheir, basée sur le principe de la
‘Mourabaha’ et Miftah Al Ftah sur le principe ‘Ijar wa Iqtina’.
Une personne qui souhaite acquérir un appartement d’une valeur 200 000 DH
sans aucun apport personnel, sur une durée de 20 ans.
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Dans le cas de Miftah Al kheir, la marge commerciale de la banque sera de l’ordre
de 253 165 DH. Son calcul a été fait sur la base d’un taux d’intérêt fixe de 7,19%
(Barème ‘Mourabaha’ 15 à 20 ans) qui comprend un taux de 5,07% (taux variable
minimum), et une majoration de 1,35% pour rendre le taux fixe ainsi qu’une prime
de 0,7% pour le risque fiscal.
Ensuite, les clients auront à supporter la TVA sur toute la mensualité et non sur la
partie marge commerciale seulement et ce, sans bénéficier d’aucun avantage
fiscal, ce qui augmente considérablement la traite mensuelle.
Pour conclure, les produits alternatifs reviennent plus chers par rapport à un
crédit classique. Et cela a dissuadé de nombreux particuliers de souscrire à ces
derniers malgré que les clients manifestent de l’intérêt raconte un chargé de
clientèle d’une agence située en plein centre de Casablanca et ajoute-il en
commentant la différence de prix que c’est de « l’arnaque pur et simple ».
4- Manque de Compétences :
En raison du démarrage assez récent de la finance alternative au Maroc, Les
établissements de crédit rencontrent en général des difficultés pour trouver les
compétences nécessaires aux postes qu’elles offrent.
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L’une des solutions adoptée est la sélection des candidats non plus sur les
compétences acquises mais sur le potentiel d’apprentissage.
Avec une politique de formation et de certification associée à des missions
longues et motivantes, ces établissements pourraient attirer de nouveaux
candidats. Néanmoins, l’un des freins identifiés est la difficulté d’anticiper la
demande et l’environnement où évolue la Finance Islamique locale.
5- Communication :
Dites «alternatifs» pas islamiques ! Banque Al Maghrib est catégorique.
L’appellation adoptée pour les produits islamiques et les campagnes marketing
organisées par les établissements de crédit ne devront pas faire de mentions
ayant une connotation ou un caractère religieux. «Les établissements de crédit
procéderont à la commercialisation de ces produits via leurs réseaux ou filiales.
Chacun conduira sa propre communication sur ces produits dans le cadre du
respect des principes directeurs». Selon une note de Bank Al-Maghrib.
Conclusion de la Section 2:
En raison de ces différentes difficultés, les produits alternatifs ont été condamnés
à un échec assuré. En effet depuis leur commercialisation en 2007, le volume
global des produits contractés n’a pas dépassé les 700 millions de dirhams.
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Section 3 : Première Banque Islamique Marocaine ;
DAR ASSAFA
1- Présentation :
Après seulement 18 mois du lancement des produits alternatifs, Bank Al Maghrib
donna son aval le 13 mai 2010 pour la création de «Dar Assafaa»; société de
financement spécialisée dans les produits alternatifs au Maroc.
Dans son démarrage, «Dar Assafa », dotée d'un savoir-faire spécifique dans les
services financiers alternatifs, cible les particuliers et les professionnels désireux
de financer leurs projets immobiliers et l'acquisition de leurs biens de
consommation par le biais de produits alternatifs.
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2- Produits :
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Toutefois, Charkani El Hassani confirme que les fonds qui seront déposés par les
clients n’appartiennent pas à Dar Assafaa mais à Attijariwafa Bank : «Nous avons
créé une fenêtre entre les deux établissements de manière à ce que ce soit Dar
Assafaa qui dispose et gère ces dépôts, à l’image des pratiques à l’international».
Pour ce faire, la fille et la mère ont signé un contrat ‘Moudaraba’ par lequel
Attijariwafa Bank apporte les fonds, et Dar Assafaa, l’expertise métier. «Par ce
contrat, Attijariwafa Bank accepte le gain comme la perte», souligne le président.
Hissab Assafaa :
Grâce à son nouveau statut Dar Assafa a élargit son offre dans le domaine de la
Finance Islamique, en proposant un compte «Hissab Assafaa» associé à une
carte Assafaa. «Au-delà du financement, les clients demandeurs, qui ont été
nombreux, nous ont interpellés sur la possibilité d’élargir notre gamme de
produits à l’ouverture de comptes et la collecte de dépôts», explique le président.
A ce titre, «il assure que ces mêmes clients sont en demande d’une nouvelle
manière d’épargne et de financement sans plus ni moins qui soit conforme à leurs
convictions».
Par ailleurs, pour pouvoir distribuer des crédits, Dar Assafaa a besoin de
refinancement. Celui-ci se fait premièrement par le biais du capital social qui est
détenu à 100% par Attijariwafa Bank. «Ce capital qui a totalement été consommé
provient des dividendes relatifs aux participations d’ Attijariwafa Bank dans
Sonasid et dans des filiales financières spécialisées du groupe, notamment
Attijari Finances Corp. et Attijari intermédiation», explique Charkani.
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Pour mettre en place cette nouvelle offre, la filiale d’ Attijariwafa Bank s’est dotée
d’un système d’informations conforme aux produits islamiques. Ainsi, ce système
ne prend pas en compte les dates de valeur, le calcul de taux d’intérêt et la notion
de découvert qui n’existe pas dans ce type d’établissement.
3- Limites :
Pourtant la société est toujours pénalisée par le caractère de non-conformité à la
Shariâ en raison de l’origine des ressources utilisées pour les opérations de
financement et essentiellement les fonds propres en prevenance à 100%
d’Attijariwafa Bank et qui ouvre un long débat entre les acteurs de la finance
marocaine.
Conclusion de la Section 3 :
Peut-on affirmer pour autant que le Maroc a définitivement opté pour une
ouverture tous azimuts au profit de la Finance Islamique ? Rien n’est moins sûr
puisque les Banques Islamiques étrangères ne sont pas encore autorisées à
opérer directement sur le territoire national. Pourtant, le gouvernement marocain
a été à plusieurs reprises approché ces dernières années par des fonds
islamiques qui ont émis le souhait d’opérer sur le marché marocain.
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CONCLUSION
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Depuis l’événement du 11 septembre, des milliards de pétrodollars ont migré
depuis les Etats-Unis et les places européennes. A en ajouter les revenus du
surenchérissement du baril depuis plusieurs années. Toutes ces fortunes sont en
quête d’opportunités d’investissements. Des financiers arabes et orientaux, à
travers beaucoup d’institutions et différentes natures de fonds, sont toujours à la
recherche d’occasions en adéquation avec leur «éthique islamique» et
essentiellement dans les économies émergentes arabo-musulmanes.
Au courant du mois d’avril 2010 Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu
L'assiste, a inauguré l’ambitieux projet financier de la grande Place financière de
Casablanca qui sera réalisée sur une superficie de 100 ha. Sa Majesté le Roi, a
donné Ses Hautes orientations pour que cette future place financière soit dotée
des infrastructures indispensables à la promotion et à la pérennisation de ce
projet dont l'envergure internationale nécessite des mesures propres afin de lui
assurer l'attractivité souhaitée à l'égard des investisseurs étrangers.
Ce projet s'appuie sur les potentialités du Royaume qui constitue, de l'avis des
organisations internationales, que ce soit le Fonds monétaire international ou la
Banque Mondiale, une référence dans la région Mena, a souligné M. Jouahri dans
une déclaration à la presse « Nous allons capitaliser tous les acquis engrangés
par le Maroc depuis plus d'une décennie », a-t-il ajouté, notant que «le Royaume
est aujourd'hui en mesure de faire de Casablanca, dans un premier temps, un
centre financier régional pour devenir ensuite un centre financier international»,
confirme toujours M. Jouahri.
Toutefois la première réaction enregistrée par rapport à son déroulement, était la
réserve émise par le GPBM qui exige et insiste que les opérateurs financiers
internationaux qui souhaiteraient s’installer à Casablanca sont les bienvenus,
mais ne doivent pas avoir le droit d’approcher la clientèle des marocains
résidents. Aussi naturellement qu’automatique, le GPBM a eu l’accord de BAM
pour cette réserve qui, à notre avis, abuse:
- des droits des consommateurs marocains en leur primant d’offres
financières peut être plus adaptées, comme les produits islamiques, ou
structurés…
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- des opportunités de développement de l’économie nationale en terme de
promotion d’investissement et de création de valeur et d’emploi et
- de l’image de notre pays, en assimilant un pseudo verrouillage de notre
système financier contre les messages d’ouverture et de libéralisme que le
Maroc persiste à confirmer.
Bibliographie :
- ‘’La Finance Islamique’’ Michel Ruimy 2008
- ‘’Sukuk Guidebook’’ Dubai International Financial Guide
- ‘’Dossier documentaire sur la Finance Islamique’’ BCP mars 2007
- ‘’Guide de la Finance Islamique’’ Herbert Smith 2009
- ‘’La finance islamique : une alternative au service de l’économie réelle ?’’
Jihane FASSI & Nadia LERICOLAIS
- Annexe au procès-verbal de la séance du 14 mai 2008 du SÉNAT français sur la
Finance Islamique. - www.senat.fr/bulletin/20080513/fin.html#toc4
- Dossier spécial consacré à la finance islamique dans la Revue Banque : La
finance islamique, l’ouverture européenne - novembre 2007
- Numéro spécial de la revue « Techniques Financières et Développement »
(publiée par l’association Epargne Sans Frontière) : La mondialisation financière
islamique est-elle au service du développement ? - mars 2008
- ‘Les habits neufs de la Finance Islamique’ Anouar Hassoune & Mohamed Damak
mai 2007
- ‘La finance islamique : valeur d’ajustement pour consolider les marchés et la
croissance de l’économie réelle’ par Mokdadi Hamadi, Tunisie
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