Vous êtes sur la page 1sur 101

I. & J.

N’GORAN

DROIT CIVIL
NOTIONS GENERALES

- Droit et Règles de droit


- Organisation juridictionnelle ivoirienne
- Personnalité juridique et Patrimoine du sujet de droit
- Capacité et Incapacité juridiques des personnes
- Régime juridique des obligations

NIVEAUX :

 PREPA Commercial 1ère A


 LICENCE PRO. 1ère Année
……

Année Académique : 2014/2015

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 1


PROGRESSION

PREMIERE PARTIE : NOTIONS GENERALES DU


DROIT…………………………………………………………………………………… 5

CHAPITRE I : ELUCIDATION DES TERMES DROIT ET REGLE


DE DROIT……………………………………………………………………………………………………… 6

SECTION I : SIGNIFICATION DES NOTIONS DE DROIT ET


DE REGLE DE
DROIT……………………………………………………………………………………... 6

Paragraphe 1 : Définition du vocable droit…………………………………… 6

Paragraphe 2 : Définition de la règle de droit……………………………….. 7

Paragraphe 3 : Les branches du droit………………………………………………….. 10

Paragraphe 4 : La preuve des droits subjectifs…………………………………. 14

SECTION II : LES SOURCES DU DROIT…………………………... 14

Paragraphe 1 : Les sources directes ou formelles………………………... 15

Paragraphe 2 : Les sources indirectes ou complémentaires…………….. 28

SECTION III : LES SOURCES ET LA PREUVE DES DROITS


SUBJECTIFS …….......................................................................................................... 30

Paragraphe 1 : Les sources des droits subjectifs………………………………

Paragraphe 2 : La preuve des droits subjectifs…………………………………….

CHAPITRE II : L’ORGANISATION DES JURIDICTIONS


IVOIRIENNES ………………………………………………………………………………………………………… 31

SECTION I : LES PRINCIPES DE LA MISE EN PLACE DES


JURIDICTIONS ET LES PRINCIPALES JURIDICTIONS ……… 31

Paragraphe 1 : Les principes de base de l’organisation …………………. 31

Paragraphe 2 : Les principales juridictions …………………………………. 36

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 2


SECTION II : LA PROCEDURE CIVILE ET LE PERSONNEL
JUDICIAIRE …………………………………………………………………………. 45

Paragraphe 1 : La procédure civile …………………………………………….. 45

Paragraphe 2 : Le personnel judiciaire ………………………………………. 54

DEUXIEME PARTIE : LES PERSONNES JURIDIQUES,


SUJETS DE DROIT ………………………………………………………….. 59

CHAPITRE I : LA PERSONNALITE JURIDIQUE ET LE


PATRIMOINE DU SUJET DE DROIT …………………………………… 60

SECTION I : LA PERSONNALITE JURIDIQUE …………………… 60

Paragraphe 1 : Les personnes physiques ……………………………………. 60

Paragraphe 2 : Les personnes morales ………………………………………. 82

SECTION II : LE PATRIMOINE DU SUJET DE DROIT ……….. 91

Paragraphe 1 : Notion de patrimoine …………………………………………. 91

Paragraphe 2 : Les éléments du patrimoine : les droits et les biens.93

CHAPITRE II : LA CAPACITE ET L’INCAPACITE JURIDIQUES


DU SUJET DE DROIT…………………………………………………………….98

SECTION I : LA CAPACITE JURIDIQUE ……………………………...98

Paragraphe 1 : La notion de capacité ………………………………………… 98

Paragraphe 2 : Les degrés de la capacité juridique ……………………...98

SECTION II : L’INCAPACITE JURIDIQUE ………………………….. 99

Paragraphe 1 : L’incapacité du mineur ………………………………………...99

Paragraphe 2 : l’incapacité des majeurs………………………………………100

TROISIEME PARTIE : LES OBLIGATIONS ET LA


RESPONSABILITE CONSECUTIVE A LEUR
EXECUTION………………………………………………………………………. 101

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 3


CHAPITRE I : LES OBLIGATIONS ………………………………………..

SECTION I : CARACTERES ET CLASSIFICATION DES


OBLIGATIONS ………………………………..........................................................

Paragraphe 1 : Caractères de l’obligation ……………………………………

Paragraphe 2 : Classification des obligations ……………………………..

SECTION II : LES SOURCES DE L’OBLIGATION …………………

Paragraphe 1 : Les obligations nées d’actes juridiques …………………

Paragraphe 2 : Les obligations nées de faits juridiques …………………

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 4


PREMIERE PARTIE : NOTIONS
GENERALES DU DROIT

L’étude des concepts de droit et de règle de droit d’une part


(CHP.I), et d’autre part, la connaissance des juridictions ivoiriennes
chargées d’appliquer les règles de droit, et de sanctionner au besoin,
les personnes qui n’observent pas lesdites règles (CHP.II),
constituent les axes essentiels qui guideront les prochains
développements.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 5


CHAPITRE I : ELUCIDATION DES
TERMES DROIT ET REGLE DE DROIT
SECTION 1 : SIGNIFICATION DES NOTIONS DE DROIT ET
DE REGLE DE DROIT

PARAGRAPHE 1 : DEFINITION DU VOCABLE DROIT

On attribue deux sens au mot ‘‘droit’’. Cela permet de distinguer le


Droit (A) des droits (B).

A- LE DROIT OU DROIT OBJECTIF

Le Droit, est l’ensemble des règles de conduite édictées par les


pouvoirs publics, auxquelles sont soumises les personnes vivant dans
une société donnée dans leurs rapports avec leurs semblables, et
dont la violation est sanctionnée par l’autorité publique.

Suivant cette définition, le Droit ou encore, droit objectif de la


République de Côte d’Ivoire, est l’ensemble des règles de conduite
édictées par les autorités ivoiriennes et qui, régissent les relations
qui se développent entre les individus qui vivent en Côte d’Ivoire et
quelques fois aux ivoiriens vivant à l’étranger.

Le droit objectif est généralement suivi d’un qualificatif ou d’un


complément de nom qui précise l’objet de cet ensemble de règles de
conduite. Dans ce sens, on peut parler du Droit béninois, du Droit
français, du Droit japonais, du Droit indien, du Droit civil, forestier,
pénal, minier, du Droit de l’Informatique…

B- LES DROITS OU DROITS SUBJECTIFS

Les droits ou les droits subjectifs, sont des prérogatives, des


pouvoirs reconnus à un individu ou à un groupe d’individus par le Droit
objectif et dont, celui-ci ou ceux-ci peuvent s’en prévaloir dans leurs
relations avec les autres.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 6


En termes plus clairs, lorsque l’on veut désigner la ou les
prérogatives accordées à une personne déterminée, on parle de son
ou ses droits.

Dans cette perspective, le mot ‘‘droit’’ désigne le privilège, la


possibilité d’action garantie par l’Etat dont dispose cette personne
et qui est garantie par l’Etat. Dans ce sens, le mot ‘‘droit’’ est
envisagé sous l’angle de son bénéficiaire. On parle alors de droit
subjectif.

NB : Les droits subjectifs sont divers et variés.

Par exemple : Le droit de voter, le droit de vivre dans un


environnement sain, le droit de propriété reconnu à une personne sur
une parcelle de terre ou sur une chose, le droit dont dispose le
créancier à l’égard de son débiteur, le droit à la vie, la liberté
d’association, le droit à l’image, etc.

En somme, retenons que le Droit est l’origine de laquelle tous les


droits subjectifs prennent naissance. C'est-à-dire, c’est le Droit
objectif qui détermine les droits subjectifs. Autrement dit, les
droits subjectifs découlent du Droit objectif. C’est ce qui fait dire
que : sans le Droit, il n’y a pas de droits.

Par ailleurs, le ‘‘droit’’ est une notion abstraite. Il se réalise, c’est-à-


dire, il ne devient concret, matériel, palpable, visible qu’à travers la
règle de droit qu’il convient de définir.

PARAGRAPHE 2 : DEFINITION DE LA REGLE DE DROIT

La règle de droit ou encore, règle juridique est une règle de


conduite établie par les pouvoirs publics, qui gouverne les rapports
des hommes en société et dont la violation est sanctionnée par l’Etat.

En effet, le droit étant une notion abstraite, c’est la règle de droit


qui reconnaît ou prescrit telle prérogative ou interdit tel
comportement.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 7


NB : Toutes les règles de la vie en société ne sont pas des règles
juridiques.

Par exemple : Les règles de politesse, les règles de jeux, les règles
religieuses, les règles de courtoisie, les règles de bienséance, les
règles morales,…. ne sont pas des règles de droit.

Certains caractères spécifiques permettent de distinguer la règle


de droit des autres règles sociales.

A- LA REGLE DE DROIT EST GENERALE ET ABSTRAITE

La règle juridique s’applique de façon uniforme à tous les individus


dans une société donnée ; et sans exception. On dit qu’elle est
générale. En clair, la règle de droit s’applique à tous sur toute
l’étendue du territoire ivoirien.

NB : La règle juridique ne s’applique que sur l’ensemble du territoire


de l’Etat qui l’a édictée. On dit pour cela que la règle de droit a un
caractère national. En Côte d’Ivoire, les règles juridiques
s’appliquent sur tout le territoire national. Il n’y a donc pas de lois
propres à des zones géographiques données.

C’est ainsi que les règles de droit ivoiriennes s’appliquent aux


Ivoiriens ainsi qu’aux étrangers qui résident en Côte d’Ivoire.

Mais, parfois, la règle de droit peut s’appliquer aux Ivoiriens qui


sont à l’étranger. Conformément à l’article 3 al.3 du Code civil,
« Les lois concernant l’état et la capacité des personnes régissent
les Ivoiriens, même résidant en pays étranger. »

En ce qui concerne le caractère abstrait de la règle de droit,


retenons que la règle de droit régit toutes les situations qui
correspondent à ses prévisions. Mieux, la règle juridique s’applique à
toute personne qui fait partie de la catégorie juridique définie à
l’avance : La qualité d’époux, de salarié, de mineur, de commerçant,
etc. Au surplus, l’on ne tient pas compte des particularismes
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 8
individuels lors de l’établissement de la règle de droit. On dit dans ce
sens que la règle de droit est impersonnelle.

Par exemple : Les règles de droit qui prescrivent de payer l’impôt, de


ne pas voler, de mener une concurrence légale sur le marché, etc
s’appliquent sans distinction à tous ceux qui entrent dans les
prévisions de ces règles juridiques, sans que ces individus soient
nommément désignés. On dit que la règle de droit est objective.

B- LA REGLE DE DROIT EST OBLIGATOIRE ET


PERMANENTE

La règle de droit s’impose à tous les individus de la société qui l’a


édictée. Ceux-ci doivent se conformer à la règle de droit édictée par
les pouvoirs publics. On dit que la règle de droit est obligatoire.
Ainsi, sa violation est sanctionnée et la sanction est prononcée par
l’autorité habilitée à le faire (Autorité compétente). C’est ce
caractère obligatoire de la règle juridique, renforcé par la sanction
étatique qui permet de faire régner l’ordre social et qui permet
d’assurer l’égalité des citoyens.
 Les sanctions en droit

Il existe plusieurs types de sanctions en droit :

Il y a des sanctions civiles : Les dommages et intérêts, la nullité


de l’acte accompli en violation d’une règle de droit, etc. Des sanctions
pénales : Emprisonnement ou privation de liberté, amendes,
confiscation, interdiction, etc. Des sanctions sociales : La mise à
pied, le blâme, le licenciement, etc. Des sanctions administratives :
L’Annulation, ou la reformation d’une décision administrative, la mise
sous scellée de l’entreprise qui ne paie pas ses impôts, etc.

Il est utile de savoir que, la règle de droit, une fois en vigueur,


s’applique sans interruption aux personnes qui en sont les
destinataires, tant qu’elle n’a pas été abrogée, c’est-à-dire,
supprimée. On dit que la règle de droit en vigueur est permanente.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 9


Elle est permanente en ce sens qu’elle continue d’être appliquée, tant
qu’elle n’a pas été supprimée de l’ordonnancement juridique.
C’est l’abrogation qui fait perdre à la loi sa force obligatoire pour
l’avenir. Elle revêt deux (2) formes :
- L’abrogation expresse, c’est lorsqu’une loi nouvelle dispose
formellement que, tel ou tels textes juridiques antérieurs sont
abrogés.
- On parle d’abrogation tacite lorsque les dispositions de la loi
nouvelle sont logiquement incompatibles, inconciliables avec
celles de la loi ancienne, alors même qu’aucune disposition
n’affirme formellement qu’elles sont abrogées.

NB : Seul le législateur est habilité à abroger la loi, par souci de


parallélisme des formes. Et, l’abrogation de la règle de droit doit
être distinguée de la désuétude qui frappe cette loi. Une loi peut
être désuète (vieille, non appliquée) mais, sans être abrogée.
La non-application d’une loi, même pendant une très longue période,
n’est pas un mode d’abrogation de cette loi.

PARAGRAPHE 3 : LES BRANCHES DU DROIT

Les personnes vivant en société entretiennent de nombreux et


complexes rapports. En fonction de ces rapports sociaux, on peut
classer les règles de droit qui les règlementent en deux (2) grandes
branches : Le Droit public et le Droit privé.

A- LE DROIT PUBLIC

Le DROIT PUBLIC est l’ensemble des règles de droit qui régissent


l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics (L’Etat, les
Départements, les Communes….) ainsi que les rapports des individus
(Les administrés) avec l’Etat et les autres collectivités publiques.

Par exemple : La détermination des pouvoirs du Président de la


République, des Députés, l’organisation des collectivités locales
relèvent du droit public.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 10


Le droit public se subdivise et donne naissance à plusieurs matières :

1- LE DROIT CONSTITUTIONNEL

Les règles du droit constitutionnel sont prévues par la loi n° 2000-


513 du 1er août 2000 portant Constitution de la République de Côte
d’Ivoire. Elles règlementent l’organisation et le fonctionnement des
institutions de l’Etat et fixe la forme de son gouvernement.

Par exemple : Le droit constitutionnel pose les règles relatives à la


conquête, à l’exercice, à la transmission et à la participation des
citoyens à l’exercice des pouvoirs étatiques.

2- LE DROIT ADMINISTRATIF

Les règles du droit administratif organisent les services publics de


l’Etat ainsi que les rapports des administrés avec ces services.

Par exemple : Le recours pour excès de pouvoir contre les décisions


illégales des autorités administratives, relève de ce droit.

3- LE DROIT PENAL

Il est prévu par la loi n° 81-640 du 31 juillet 1981, instituant le Code


Pénal, modifiée par les lois : n° 95-522 du 6 juillet 1995, n°96-764 du
3 octobre 1996, n°97-398 du 11 novembre 1997, n°98-716 du 23
décembre 1998.

Les règles du droit pénal déterminent les infractions


(Comportements qui troublent l’ordre public) ainsi que les sanctions
applicables à ces infractions.

Par exemple : L’article 392 du Code pénal qualifie de vol ‘‘la


soustraction frauduleuse de la chose d’autrui’’ et prévoit une peine
applicable à quiconque commet un tel acte.

4- LE DROIT DES FINANCES PUBLIQUES

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 11


Les règles du droit des Finances publiques définissent les finances
des Administrations publiques, c’est-à- dire, les finances de l’Etat,
des collectivités locales, des Etablissements publics nationaux…

NB : Le Droit fiscal qui étudie les questions relatives à la fixation


et au recouvrement de l’impôt et autres taxes est un complément
indispensable du droit des Finances publiques.

5- LE DROIT INTERNATIONAL PUBLIC

Encore appelé droit des gens : il contient les règles applicables dans
les rapports des Etats entre eux, d’une part et d’autre part, avec les
Organisations Internationales.

Par exemple : Les relations de la Côte d’Ivoire avec l’ONU, l’OMS,


etc.

Les règles du Droit international public sont essentiellement


composées de Traités, de Conventions, de chartes, etc.

B- LE DROIT PRIVE

Le droit privé est l’ensemble des règles juridiques qui régissent les
rapports des particuliers entre eux.

Par exemple :

M. SEFON se marie avec Mlle CHOCOBI LAROSETTE,

M. MOISICO doit de l’argent à M. WARI-DABA,

M. TIKANDI est employé par M. KATASSOU,

M. KOKOHI MAMER passe un contrat de livraison de noix de petit-cola


avec Mme KENEUR.

NB : Les relations ci-dessus mentionnées qui se développent entre


des particuliers, sont régies par le droit privé.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 12


Le droit privé est subdivisé en plusieurs matières en fonction des
différents types de rapports privés qui s’entretiennent entre les
hommes. Ainsi, le droit privé comprend :

1- LE DROIT CIVIL

Il détermine les règles générales qui s’appliquent à toutes les


relations entre particuliers qui ne sont pas régies par une matière
spécifique. Aussi, c’est le droit civil qui édicte les principes généraux
des autres matières du droit privé. C’est le cas du régime juridique
des contrats.

En effet, on se réfère aux règles du droit civil en l’absence de règles


spéciales qui régissent les rapports privés qu’entretiennent des
particuliers. On qualifie pour cela le Droit civil de droit commun.

Par exemple : La règle relative à la résolution de la vente prévue


par l’article 1654 du Code civil, selon laquelle : « Si l’acheteur ne
paye pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la
vente. », s’applique aussi bien dans la vente civile que commerciale.

En Côte d’Ivoire, les règles de droit civil portant sur les personnes
et la famille ainsi que celles se rapportant à la publication, aux
effets et à l’application des règles de droit en général, sont
consignées dans le Code civil I. Il convient de préciser que la
nationalité des personnes physiques fait l’objet d’un code distinct :
le Code de la nationalité.

Le régime juridique des biens et des obligations est contenu dans le


Code civil II.

2- LE DROIT COMMERCIAL

Le Droit commercial est défini comme l’ensemble des règles


juridiques qui organisent l’exercice d’activités économiques par les
commerçants. On y inclut diverses disciplines de droit. C’est ce qui
lui a valu l’appellation de DROIT DES AFFAIRES.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 13


En effet, le Traité de l’Organisation pour l’Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A) fixant le domaine du
Droit des Affaires en son article 2, dispose que : « Pour l’application
du présent traité entre dans le Droit des Affaires l’ensemble des
règles relatives au droit des sociétés et au statut juridique des
commerçants, aux recouvrements des créances, aux sûretés, au
régime du redressement des entreprises et à la liquidation
judiciaire, au droit de l’arbitrage, au droit du travail, au droit
comptable, au droit de la vente et du transport, etc. »

3- LE DROIT DU TRAVAIL

C’est la subdivision du droit privé qui règlemente les rapports


individuels ou collectifs de travail qui se développent entre les
employeurs et leurs employés, ainsi que les rapports sociaux dans
l’entreprise privée.

NB : Dans le secteur public, les relations de travail sont


généralement régies par le Droit de la Fonction publique.

4- LE DROIT INTERNATIONAL PRIVE

C’est l’ensemble des règles juridiques applicables aux relations entre


personnes privées, qui se développent au-delà des frontières
étatiques, c’est-à-dire à l’étranger.

Par exemple : Une société japonaise passe un contrat de vente de


noix de cajou avec une société ivoirienne implantée à SIKENSI. Ou
encore, Mlle DJOUSSOUBA FLOTO, une jeune Ivoirienne se marie avec
M. GIOVANI un Italien.

SECTION 2 : LES SOURCES DU DROIT

On entend par source du droit (objectif), les différentes manières


dont les règles juridiques sont établies ; autrement dit, comment se
forment les règles de droit ? D’où proviennent-elles ?

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 14


En clair, étudier les sources du droit consiste à déterminer comment
se forment les règles de droit, et à dire d’où elles procèdent.

En effet, le Droit procède de diverses sources. Certaines sources


formalisées sont dites directes ; d’autres non formalisées sont
qualifiées d’indirectes.

NB : Les sources des droits subjectifs seront étudiées


ultérieurement. (Cf. Section 3).

PARAGRAPHE 1 : LES SOURCES DIRECTES OU FORMELLES

Les sources directes ou formelles du droit sont les sources écrites,


codifiées, c’est-à-dire, consignées dans un code et directement
applicables.

Par exemple : Le Code du travail, le Code de la nationalité, le Code


pénal, le Code civil, le Code de l’environnement, les Actes uniformes
de l’OHADA…etc.

De ces sources écrites émanent diverses catégories de textes


juridiques : Les Lois et les Règlements.

En Côte d’Ivoire, il appartient au Pouvoir législatif (L’Assemblée


Nationale) de faire les lois et au Pouvoir exécutif (Pouvoir
règlementaire) d’édicter les règlements.

Ainsi, l’article 71 de la Constitution détermine les matières


réservées à la loi. C’est-à-dire, seul le pouvoir législatif est
compétent pour créer un texte de loi dans ces domaines.

En effet, aux termes de l’article 71 ci-dessus cité, « L’Assemblée


Nationale détient le pouvoir législatif ; elle vote seule la loi.
La loi fixe les règles concernant :
- La citoyenneté, les droits civiques et les garanties fondamentales
accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ;
- La nationalité, l’état et la capacité des personnes, les régimes
matrimoniaux, les successions et les libertés ;

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 15


Le statut général de la Fonction publique (…) ».etc.

En ce qui concerne les règlements, ils regroupent l’ensemble des


règles de droit édictées par le Pouvoir Exécutif ainsi que les
autorités administratives compétentes. L’article 72 de la
Constitution établit de façon élargie le domaine d’intervention du
pouvoir règlementaire en ces termes : « Les matières autres que
celles qui sont du domaine de la loi relèvent du domaine
règlementaire ».

NB : Les textes juridiques de nature législative ainsi que ceux de


nature règlementaire, sont classés suivant un ordre hiérarchique
ayant au sommet la Constitution. En clair, c’est au regard de la
Constitution que tous les autres textes de droit sont édictés.

A- LA HIERARCHIE DES TEXTES JURIDIQUES DE


NATURE LEGISLATIVE

Il existe une hiérarchie entre les divers textes identifiés sous le


nom générique de la loi. La classification des textes de loi par ordre
d’importance s’établit comme suit :
-La loi constitutionnelle,

-Les traités internationaux,

-Les lois.

1) LA CONSTITUTION OU LOI CONSTITUTIONNELLE

La Constitution est la loi qui détermine dans l’Etat l’organisation et le


fonctionnement des institutions. Elle fixe les modes de dévolution et
d’exercice du pouvoir politique, ainsi que le régime politique de l’Etat.

La Constitution est la loi à partir de laquelle toutes les autres règles


de droit sont édictées. C’est-à-dire, qu’elles sont élaborées en
harmonie avec elle. On dit qu’elle est la loi fondamentale de l’Etat.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 16


 LE CONTRÔLE DE LA CONFORMITE DES LOIS A LA
CONSTITUTION DIT CONTRÔLE DE LA
CONSTITUTIONALITE DES LOIS.

Pour vérifier la conformité des autres normes juridiques, c.à.d. les


Traités, les lois ordinaires… à la Constitution, il est prévu un contrôle
de constitutionnalité des lois exercé par le Conseil Constitutionnel,
conformément à l’article 88 de la Constitution « Le Conseil
Constitutionnel est juge de la constitutionnalité des lois. »

Une disposition déclarée non conforme à la Constitution, c’est-à-dire,


qui lui est contraire à l’issue du contrôle, est nulle. Dès lors, elle ne
peut plus être considérée comme source du droit.

D’où procède la Constitution ? Comment s’élabore la Constitution ?

La Constitution est élaborée suivant deux (2) modes :

a) ADOPTION PAR REFERENDUM

Le référendum est une consultation populaire par laquelle le peuple,


chaque citoyen est amené à se prononcer directement par vote sur
un texte ou une question d’importance nationale.

Avant d’être soumis au peuple, le texte constitutionnel est écrit par


une commission spéciale.

Par exemple : Le texte de la Constitution ivoirienne du 1er août 2000,


a été rédigé par la Commission Consultative Constitutionnelle et
Electorale (C.C.C.E.) avant la tenue du référendum.

Ainsi, c’est du référendum des 23 et 24 juillet 2000 que sont issues


la loi n° 2000-513 du 1er août 2000 portant Constitution de la
République de Côte d’Ivoire et la loi n°2000-514 du 1er août 2000
portant Code électoral. Ces 2 textes de loi sont des lois dites
référendaires.

b) ADOPTION PAR UN POUVOIR CONSTITUANT


ORIGINAIRE (P.C.O)

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 17


Le Pouvoir Constituant Originaire est composé de personnes élues
par le peuple et qui reçoivent mandat, en tant que représentants du
peuple pour rédiger la constitution. Le Pouvoir constituant originaire
est investi pour doter le nouvel Etat d’une constitution.

Une fois la Constitution est adoptée, certaines de ses dispositions


peuvent faire l’objet de modification. On parle de la révision de la
constitution.

NB : En Côte d’Ivoire, « l’initiative de la révision de la


Constitution appartient concurremment au Président de la République
et aux membres de l’Assemblée Nationale » suivant les dispositions
de l’article 124 de la Ct°. Toutefois, selon les termes de l’article
127 de la Ct°, « Aucune procédure de révision ne peut être engagée
ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire. »

C’est le Pouvoir constituant dérivé ou institué (P.C.D ou P.C.I) qui


est juridiquement habilité à procéder à la révision d’une constitution
déjà en vigueur, selon les règles posées par celle-ci.

2- LES TRAITES ET ACCORDS INTERNATIONAUX

Le régime juridique des traités et accords internationaux est prévu


par le Titre VI de la Constitution ivoirienne de 2000, en ses
articles 84 à 87.

Le traité est défini comme une convention, un pacte ou un accord


conclu entre des sujets de la société internationale (Etats,
Organisations internationales) par écrit, et qui fait naître des
obligations réciproques entre les parties.

Le domaine du traité international est large.

Par exemple : Les traités internationaux peuvent régir des questions


politiques, économiques, la paix, le travail, les enfants, le commerce,
la Cour pénale internationale, l’Environnement…

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 18


NB : Les traités et accords internationaux sont conclus
conformément à la constitution.

Pour être considéré comme une source de droit valable en Côte


d’Ivoire, le traité international et l’Accord international doivent être
négociés et ratifiés par le Président de la république, selon les
conditions prévues par la Constitution.

Exceptionnellement, la ratification (Acte qui engage l’Etat à


respecter l’Accord ou le Traité international) de certains traités est
soumise à l’autorisation préalable de l’Assemblée Nationale,
exprimée à travers l’adoption d’une loi.

C’est le cas pour les traités ou accords internationaux qui modifient


les lois internes de l’Etat, qui ont pour objet la paix ou qui portent
sur une organisation internationale.

NB : Conformément à l’article 87 de la Constitution, « Les Traités


ou Accords régulièrement ratifiés ont dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois (…) ».

3- LA LOI
a) NOTION DE LOI

Le terme « LOI » a deux (2) sens :


-Au sens strict, la loi est l’acte qui émane du législateur, en
l’occurrence l’Assemblée Nationale. En termes plus simples, la loi est
une règle de droit écrite, de portée générale, permanente et
impersonnelle, adoptée par le Parlement (Assemblée Nationale).

-Au sens large, le mot ‘‘loi’’ recouvre toute règle de droit formulée
par écrit, et établie par un organe étatique compétent eu égard à la
constitution.

On distingue la loi organique de la loi ordinaire.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 19


- La loi organique est celle qui a pour objet de fixer les
modalités d’organisation et de fonctionnement des Institutions,
structures et systèmes prévus par la constitution.

Par exemple : La loi organique fixant les règles d’organisation et de


fonctionnement du Département, du Conseil constitutionnel, de la
Cour des comptes…etc.

- La loi ordinaire : est celle qui règlemente toutes les matières


prévues par la Constitution, autres que les domaines
d’intervention des lois organiques.

Par exemple : La loi n° 61-415 du 14 Décembre 1961 portant Code de


la Nationalité ivoirienne, modifiée par la loi n° 72-852 du 21
Décembre 1972. La loi n° 60- 315 du 21 Septembre 1960, relative
aux associations.

Il est convenable de préciser que toutes les lois n’ont pas la même
autorité. On distingue de ce point de vue, les lois impératives des
lois supplétives.

- La loi impérative ou loi d’ordre public :


Elle s’impose à tous, même aux ivoiriens vivant à l’étranger. Ce sont
des lois dont l’objectif principal est de protégé l’intérêt public ou
l’intérêt général.
NB : On ne peut déroger par des conventions particulières aux lois
qui protègent l’ordre public.
Par exemple : Les époux ne peuvent déroger aux règles
d’organisation de la famille.

*Les lois de police sont celles dont l’application immédiate dans les
situations internationales s’avère nécessaire en raison de l’objectif
poursuivi par le législateur.
Par exemple : L’article 15 du Code civil qui stipule qu’« Un Ivoirien
pourra être traduit devant un tribunal de Côte d’Ivoire, pour des
obligations par lui contractées en pays étranger, même avec un
étranger. »
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 20
- La loi supplétive ou loi interprétative:
C’est la loi qui ne s’impose aux individus que s’ils n’ont pas manifesté
de volonté contraire. Elle supplée le silence des contractants.
Par exemple : La règle qui déclare le régime de la communauté de
biens pour les époux qui n’ont fait aucun choix de régime matrimonial
lors de leur mariage.
C’est aussi la loi qui se borne à préciser le sens obscur, ambigu, ou
contesté, d’une loi antérieure, sans créer de droits nouveaux. Cette
loi est naturellement rétroactive, puisqu’elle s’incorpore à la loi qu’elle
interprète.

NB : Le caractère impératif de la loi résulte des formules telles


que : « Le présent texte est d’ordre public » ou « toute clause
contraire est nul ».
Le caractère supplétif apparait lorsque la loi déclare qu’elle
s’applique « sauf clause contraire ».

b) L’ELABORATION DE LA LOI

La loi est créée suivant une procédure bien déterminée. Il faut


entendre par procédure, une succession d’étapes au bout desquelles
la loi connaît le jour.
 LA PROCEDURE D’ELABORATION DES LOIS ORGANIQUES

Elles sont votées et modifiées suivant des conditions particulières


que sont :

- Le projet ou la proposition de loi n’est soumise à la délibération


et au vote de l’Assemblée Nationale saisie, qu’à l’expiration d’un
délai de quinze (15) jours après son dépôt ;
- Le texte ne peut être adopté par l’Assemblée Nationale qu’à la
majorité des 2/3 de ses membres ;
- Les lois organiques ne peuvent être promulguées qu’après la
déclaration par le Conseil Constitutionnel de leur conformité à
la Constitution.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 21


 LA PROCEDURE D’ELABORATION DE LA LOI ORDINAIRE

En effet, la création de la loi ordinaire comporte trois(3) phases :

1ère phase : L’ADOPTION DE LA LOI

Elle se décompose en 3 étapes : L’initiative, la discussion et


l’adoption proprement dite de la loi.

• L’INITIATIVE DE LA LOI

C’est le droit reconnu concurremment aux parlementaires et au


gouvernement de proposer une loi. Selon les dispositions de l’article
42 alinéa 1er de la Constitution, « Le Président de la République a
l’initiative des lois, concurremment avec les membres de l’Assemblée
Nationale. »

Lorsque l’initiative de la loi relève des Députés, on parle de


proposition de loi. Par contre, lorsque cela est du fait des membres
du gouvernement, on la qualifie de projet de loi.

• LA DISCUSSION DE LA LOI

Le projet ou la proposition de loi est porté devant les Députés au


Parlement pour être discuté.

Le texte en discussion passe d’abord devant une commission


spécialisée dans le domaine de cette loi ; ensuite, il passe en séance
plénière devant toute l’Assemblée Nationale.

NB : Il y a six (6) commissions spécialisées au Parlement :

-Commission Affaires générale et Institutionnelle,

-Commission Economie et Finances,

-Commission Affaires Sociale et culturelle,

-Commission Affaires Extérieures,

-Commission Sécurité et Défense,

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 22


-Commission Environnement, Cadre de vie…

• L’ADOPTION PROPREMENT DITE DE LA LOI :

C’est le vote en séance plénière du texte final de loi par les Députés.

Le vote, fait à main levée ou au bulletin secret est acquis à la


majorité simple. C’est-à-dire, une seule voix de différence est
suffisante pour que le texte de loi soit adopté ou non.

2è phase : LA PROMULGATION DE LA LOI

La promulgation est un acte par lequel, le chef de l’Etat constate


officiellement l’existence de la nouvelle loi, puis ordonne sa
publication et son exécution sur toute l’étendue du territoire.

NB : Le Président de la République doit procéder à la promulgation


de la loi dans les 15 jours qui suivent sa transmission qui en est faite
par le Président de l’Assemblée nationale, ou dans les 5 jours en cas
d’urgence, selon les termes de l’article 42 de la Constitution.

Une loi non promulguée jusqu’à l’expiration des délais ci-dessus


mentionnés, ne peut être mise à exécution que si:

-Elle est conforme à la Constitution,

-Elle est déclarée expressément exécutoire par le Conseil


Constitutionnel sur la demande du Président de l’Assemblée
Nationale.

3è phase : LA PUBLICATION DE LA LOI

Elle consiste à porter le texte de loi à la connaissance des citoyens.

 Le principe : La publication par le Journal officiel

La publication se fait dans le Journal Officiel de la République de


Côte d’Ivoire (J.O.R.C.I).

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 23


L’adage ‘‘Nemo censetur ignorare legem’’ qui signifie : ‘‘Nul n’est
censé ignorer la loi’’, trouve ici tout son sens.

En effet, le fait qu’un individu ignore l’existence d’une loi


formellement publiée, n’altère point l’autorité de cette loi. Ainsi, son
application ne dépendra pas de la connaissance ou non de ladite loi par
ce dernier.

Ainsi, Trois (3) jours francs après sa publication, la nouvelle loi


devient opposable à tous, c’est-à-dire, obligatoire pour tous : on dit
que la loi est entrée en vigueur. « Les lois, ordonnances, décrets,
arrêtés sont exécutoires sur le territoire de la République de Côte
d’Ivoire trois jours francs après leur publication au Journal officiel
de la République de Côte d’Ivoire. » (Article 1er Décret n°61-175 du 18
mai 1961 relatif à la publication des lois et actes règlementaires)

Il convient de souligner que la loi peut prévoir la date de sa mise en


vigueur ou subordonner sa mise en application à la publication d’un
décret d’application.
C’est dans cette dynamique par exemple que, l’article 1er du Décret
n°64-381 du 7 août 1964 portant application de la loi sur le
mariage dispose que : « Les lois nouvelles concernant le nom, l’état
civil, le mariage, le divorce (…) prendront effets, dans un délai
maximum de deux années, à compter de leur promulgation, … »

 L’exception : La publication d’urgence par l’affichage


Le nouveau texte de loi peut aussi être publié par le moyen de son
affichage dans chacune des Préfectures du pays. Le procédé de
l’affichage du nouveau texte de loi n’est autorisé qu’en cas
d’urgence. A partir de son affichage, le texte de loi devient
applicable et donc, obligatoire pour tous. (Article 4 Décret n°81-894 du
28 octobre 1981 relatif à la publication des lois et actes règlementaires.)

c) LA CESSATION DES EFFETS DE LA LOI


La loi peut être retirée des règles de droit en vigueur. On dit qu’elle
est abrogée. (Cf. supra. l’abrogation des règles de droit, PP.9-10).
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 24
d) L’APPLICATION DE LA LOI DANS LE TEMPS

Dès qu’une loi nouvelle entre en vigueur, il faut déterminer à quelles


situations juridiques elle doit s’appliquer. Cette détermination est
faite par un principe auquel certaines exceptions sont apportées.

 LE PRINCIPE DE LA NON-RETROACTIVITE DE LA LOI

Le principe ci-dessus mentionné veut dire qu’une loi ne doit pas être
appliquée à des actes ou à des faits qui se sont passés avant son
entrée en vigueur. On dit pour cela que la loi n’a pas d’effet
rétroactif.

En clair, la loi nouvelle ne s’applique pas lorsqu’elle entre en vigueur


après la survenance d’une situation juridique donnée ; Autrement dit,
elle ne s’applique pas aux effets passés d’une situation juridique
existant avant son entrée en vigueur.

Ce principe est prévu par l’article 2 du Code Civil en ces termes :


« La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet
rétroactif. »

Pour l’application de ce principe, les juges distinguent entre les


droits acquis et les simples expectatives.

En effet, la loi nouvelle ne peut pas s’appliquer aux situations


juridiques définitivement nées ou à des droits totalement acquis. Ils
restent régis par l’ancienne loi. A contrario, elle s’applique
immédiatement aux simples expectatives.
Par exemple : La loi de 1964 sur le mariage qui a instauré le mariage
légal, ne s’applique pas aux mariages déjà faits conformément à la
tradition, antérieurement à son entrée en vigueur.

Il y a droit acquis, lorsque le droit est définitivement entré dans le


patrimoine de son destinataire, ou encore, lorsque la situation
juridique est définitivement créée. Une expectative au contraire,
n’est qu’une simple espérance de droit non encore réalisé.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 25


C’est ainsi par exemple que le fils, héritier présomptif du père, avant
la mort de celui-ci n’a qu’une expectative sur le patrimoine de son
père. Après le décès du père, il a un droit acquis sur ledit patrimoine.

Le principe ci-dessus exposé connaît des exceptions dans lesquelles


la loi peut rétroagir.
 LES EXCEPTIONS AU PRINCIPE DE LA NON-
RETROACTIVITE DE LA LOI
Le principe de la non-rétroactivité de la loi ne s’applique pas dans les
cas ci-après énumérés. Pour dire simplement que la loi peut rétroagir
dans les situations suivantes :
-Les lois expressément rétroactives : Ce sont des lois que le
législateur a qualifié comme étant des lois rétroactives par nature.
La formule consacrée est la suivante : « (…), la présente loi
rétroagira.»
Le plus souvent, c’est dans l’intérêt supérieur de la nation, qu’une loi
nouvelle peut exceptionnellement rétroagir.

-Les lois interprétatives : Ce sont des lois qui interprètent une


autre loi ancienne, obscure, ou imprécise. Elles font corps avec la loi
ancienne et sont par conséquent rétroactives.

-Les lois pénales plus douces, les lois pénales qui suppriment ou
atténuent une peine, conformément à l’article 20 al.1 du Code
Pénal, s’appliquent aux infractions commises antérieurement à leur
entrée en vigueur : C’est la rétroactivité in mitius.
Toutefois, ces lois pénales moins sévères ne s’appliquent qu’aux faits
en cours de jugement, c’est-à-dire, qui ne font pas encore l’objet
d’une décision définitive du juge : Les faits non encore
définitivement tranchés par le juge.

-Les lois de procédure et de compétence : Ces lois ont pour objet


de réaliser une meilleure administration de la justice. En effet, elles
permettent un meilleur éclaircissement de la procédure à suivre par
les juridictions ainsi que leurs attributions et compétences.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 26


Par exemple : La loi de procédure pénale, la loi de procédure civile,
administrative, etc.

B- LA HIERARCHIE DES TEXTES JURIDIQUES DE


NATURE REGLEMENTAIRE

Les règlements sont l’ensemble des actes de portée générale et


impersonnelle édictés par le Président de la République ainsi que
certaines autorités compétentes du pouvoir exécutif.

En effet, aux termes de l’article 44 de la Constitution, « Le


Président de la République prend les règlements applicables à
l’ensemble du territoire de la République. » En plus du Président de
la République, il y a des autorités relevant du pouvoir exécutif à qui
pouvoir est reconnu de prendre des règlements.

Ainsi, il existe plusieurs catégories de règlements en fonction des


autorités qui les prennent. Aussi, sont-ils pris conformément aux
textes qui leurs sont supérieurs.

Les textes de droit de nature règlementaire ne sont pas promulgués.


Mais, ils sont exécutoires sur le territoire de la République de Côte
d’Ivoire trois (3) jours francs après leur publication au J.O.R.C.I,
par la presse ou par affichage.

Les textes juridiques de nature règlementaire sont classés selon la


hiérarchie suivante :
-1) L’ordonnance présidentielle,
-2) Le décret,
-3) L’arrêté.

1- LES ORDONNANCES

L’ordonnance est un acte fait par le Président de la République avec


l’autorisation du Parlement dans les matières qui sont normalement
du domaine de la loi.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 27


Cette autorisation est obtenue par une loi d’habilitation qui précise
la matière et le délai d’intervention de ladite ordonnance,
conformément aux dispositions de l’article 75 de la Constitution.

L’ordonnance est un règlement administratif lorsqu’elle n’a pas été


ratifiée par l’Assemblée Nationale.
Pour être valablement élaborée, l’ordonnance doit :
- être obligatoirement délibérée en Conseil des ministres,
- être proposée à la ratification du parlement. Après sa validation
par le Parlement, elle a valeur de loi, et ne peut donc être modifiée
que par une loi votée par le parlement.

2- LES DECRETS
Le décret est un acte juridique exécutoire à portée générale ou
individuelle signée soit par le Président de la République, soit par le
Premier Ministre.

On distingue les décrets autonomes pris dans le cadre de l’article


72 de la Constitution et les décrets d’application qui comportent
les détails d’application d’une loi.

3- LES ARRETES

L’arrêté est une décision prise par une autorité administrative.

Les arrêtés sont pris conformément aux décrets. Et, ils sont
hiérarchisés en fonction du rang de l’autorité qui les édicte.

Ainsi, l’on peut les classer par ordre d’importance de la façon


suivante :

- Les arrêtés ministériels ;

- Les arrêtés préfectoraux ;

- Les arrêtés municipaux.

PARAGRAPHE 2 : LES SOURCES INDIRECTES OU


INFORMELLES
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 28
Encore désignées par sources d’interprétation, les sources
indirectes sont tirées de la nécessité de compléter et d’interpréter
les sources directes. Et, contrairement aux sources directes qui sont
des règles écrites et directement invocables, celles-ci ne le sont pas.
On en distingue trois (3) : la jurisprudence, la coutume et la
doctrine.

A- LA JURISPRUDENCE

Au sens large, la jurisprudence peut-être définie comme l’ensemble


des décisions rendues par les tribunaux. Le sens restreint limite
cette notion à l’ensemble des décisions rendues par les juges sur une
question juridique donnée.

Les juges ne sont pas en principe formellement des autorités qui


élaborent des règles de droit, mais ils appliquent le droit. Alors,
comment peuvent-ils créer la règle de droit ?

En effet, à l’occasion d’un procès qui est soumis au magistrat, alors


qu’il n’y a pas de règle juridique édictée en la matière, celui-ci peut
décider par exemple que l’enfant simplement conçu au moment du
décès de son père, bénéficie des biens laissés par ce père. Ou
encore, qu’un particulier peut engager la responsabilité de
l’administration devant la justice, … Une telle solution qui peut être
retenue par d’autres juges, devient une jurisprudence.

NB : Le magistrat ne peut pas refuser de juger une affaire qui lui


est soumise, aux motifs que la loi n’a prévu aucune disposition, ou
qu’elle est obscure. Il est obligé de rendre une décision, sinon, il peut
voir sa responsabilité engagée pour déni de justice.

Par ailleurs, les tribunaux ne sont pas liés par les solutions qu’ils ont
précédemment adoptées. C’est-à-dire, ils peuvent juger autrement
une question de droit qu’ils ont déjà tranchée. On parle dans ce cas
de revirement de jurisprudence. Aussi, leurs décisions ne
s’appliquent qu’aux parties au procès : on dit qu’elles sont
inopposables aux tiers.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 29


B- LA COUTUME

La coutume au sens juridique, est définie comme la règle qui nait d’un
long usage que la pratique habituelle a rendu obligatoire dans un
milieu social déterminé. La coutume est donc un droit non écrit qui
implique un usage général, c’est-à-dire, suffisamment répandu et
prolongé dans le temps.

NB : Une coutume peut-être conforme à la loi (Coutume secundum


legem) ; elle constitue dans ce cas, une source de droit.

Par exemple : Le fait de porter le nom de son père.

Par contre, la coutume qui est contraire à la loi (Coutume contra


legem) n’est pas source de droit.

Par exemple : L’exigence de la dot en vue du mariage est une


coutume contraire à la loi. Il en est de même, de la donation réalisée
par le transfert d’un bien mobilier de la main à la main sans avoir
recours à un notaire selon les termes de l’article 931 du Code civil.

C- LA DOCTRINE

La doctrine peut être définie comme l’ensemble des opinions émises


sur le droit par des spécialistes de la matière, c'est-à-dire, ceux qui
ont pour fonction d’étudier le droit.

Par exemple : Les ouvrages des Professeurs de droit.

NB : La doctrine joue un rôle indirect dans l’élaboration des règles


de droit en influençant par exemple le juge dans les motifs de sa
décision.

SECTION 3 : LES SOURCES ET LA PREUVE DES DROITS


SUBJECTIFS

PARAGRAPHE 1 : LES SOURCES DES DROITS SUBJECTIFS

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 30


CHAPITRE 2 : L’ORGANISATION DES
JURIDICTIONS IVOIRIENNES

Il est connu et su de chaque individu vivant en société, que la


violation de la règle de droit, (le non respect de la règle de droit) est
sanctionnée.

En vue de la mise en œuvre de la sanction consécutive au non respect


de la règle de droit, des institutions étatiques propres existent : Ce
sont les juridictions. Il s’agit d’organes chargés de dire le droit, de
rendre la justice entre les citoyens et d’appliquer la sanction
juridique idoine.

Les juridictions de Côte d’Ivoire sont implantées sur toute l’étendue


du territoire national, suivant une certaine organisation fondée sur
des principes, qu’il convient d’étudier (Section 1).

La sanction en droit n’est pas spontanée. Elle est l’aboutissement,


l’achèvement d’une procédure qui fait intervenir un ensemble de
personnel dont la connaissance est nécessaire. (Section 2)

SECTION 1 : LES REGLES DE MISE EN PLACE ET DE


FONCTIONNEMENT DES JURIDICTIONS ET LES
PRINCIPALES JURIDICTIONS

PARAGRAPHE 1 : LES PRINCIPES DE BASE DE


L’ORGANISATION DES JURIDICTIONS IVOIRIENNES

Ce sont les principales règles sur lesquelles l’Etat ivoirien s’est basé
d’une part pour mettre en place l’appareil judiciaire, et d’autre part,
pour baliser puis guider la fonction-même de juger. Ces principes
directeurs sont nombreux. Toutefois, on peut les regrouper en deux
catégories selon que soit, ils se rapportent à la structure de l’appareil
judiciaire et à l’accès à la justice, soit ils s’intéressent à la fonction
de juger.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 31


A- LES REGLES CONCERNANT LA STRUCTURE DE
L’APPAREIL JUDICIAIRE ET L’ACCES A LA JUSTICE.

1- LE PRINCIPE DE L’UNITE DE JURIDICTION

Depuis son accession à l’indépendance, la Côte d’Ivoire a choisi le


système d’unité de juridiction qui signifie que toutes les juridictions
sont regroupées dans un seul et unique ordre de juridiction avec une
seule et même instance supérieure : la Cour suprême, qui
comprenait quatre (4) Chambres :

- La Chambre constitutionnelle ;
- La Chambre judiciaire ;
- La Chambre administrative ;
- La Chambre des Comptes.

Avec la création du Conseil constitutionnel en 1994, et la mise en


place de la Cour des Comptes en 2014, la Cour suprême ne compte à
ce jour que deux (2) chambres.

Dans le système d’unité de juridiction, tous les tribunaux et cours


d’appel sont compétents pour juger tous les litiges en toute matière :
civile, commerciale, pénale, administrative, au premier et au second
degré. On dit qu’en Côte d’Ivoire, la compétence relative à la matière
(compétence ratione materiae) de l’affaire à trancher est identique
pour tous les tribunaux.

Toutefois, il convient de préciser que la Constitution ivoirienne de


2000 a prévu en son article 102, un système juridictionnel mixte,
avec deux ordres de juridictions, en disposant que : « La justice est
rendue sur toute l’étendue du territoire national au nom du peuple
par des juridictions suprêmes : Cour de cassation, Conseil d’Etat,
Cour des comptes et des Cours d’Appel et des tribunaux. »

Dans la pratique, ce sont des lois organiques qui doivent fixer la


composition, l’organisation et le fonctionnement des juridictions
suprêmes, que sont le Conseil d’Etat et la Cour de cassation.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 32


Lorsque ces lois seront votées, alors la Côte d’Ivoire aurait deux (2)
ordres juridictionnels autonomes en lieu et place du système d’unité
de juridiction. Dès lors, le système de dualité de juridiction se
présenterait comme suite :

a) LES JURIDICTIONS DE L’ORDRE ADMINISTRATIF

C’est l’ensemble des juridictions qui connaissent des affaires


relevant du droit public et qui opposent les personnes publiques
d’une part entre elles, et d’autre part, les personnes publiques et les
particuliers. Ici, les Tribunaux administratifs (1er degré) et les
Cours d’appel administratifs (2nd degré), sont soumis au contrôle du
Conseil d’Etat, instance supérieure.

b) LES JURIDICTIONS DE L’ORDRE JUDICIAIRE

Cet ordre est composé de l’ensemble des tribunaux qui tranchent les
litiges relevant du droit privé et qui mettent aux prises des
personnes privées exclusivement. Parfois, ils connaissent des
affaires dans lesquelles une personne publique (Etat, Commune,
Département, etc) est partie.

C’est le cas par exemple d’un accident causé par un véhicule de l’Etat,
il en est de même des activités commerciales exercées par une
personne publique.

Les Tribunaux de Première Instance et leurs Sections détachées, (1er


degré) ainsi que les Cours d’appel judiciaires (2nd degré), sont soumis
au contrôle de la Cour de cassation, instance supérieure.

2- LE DOUBLE DEGRE DE JURIDICTION

Le double degré de juridiction est le principe qui permet à une partie


au procès, après un premier jugement, de porter l’affaire devant
une juridiction supérieure.

En clair, le plaideur a la possibilité de faire appel du jugement de


première instance, devant une cour d’appel. C’est là une véritable

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 33


garantie des droits des justiciables qui peuvent ainsi faire juger à
nouveau leur procès par d’autres magistrats.

Ce principe connaît des exceptions dans lesquelles le double degré de


juridiction ne s’applique pas.

En effet, en matière de contentieux électoral les décisions du


Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours. On dit
qu’il statue en premier et dernier ressort. En matière civile et
commerciale, les Tribunaux de première instance et leurs Sections
détachées statuent en 1er et dernier ressort sur toute demande dont
le taux n’atteint pas 500 000 FCFA, selon les termes de l’article 6
du Code de procédure civile.

NB : Les juridictions suprêmes ne constituent pas un troisième


degré de juridiction.

En fait, les juridictions suprêmes ne sont pas en principe juges des


faits, mais juges du droit. C’est-à-dire, qu’elles ne font que vérifier
l’application du droit effectuée par les juridictions inférieures. De
plus, elles ne rendent que des arrêts de rejet ou de cassation, sans
reformer les décisions des juridictions inférieures. On dit pour cela
que l’organisation juridictionnelle ivoirienne comprend deux (2)
degrés de juridiction, avec trois (3) niveaux de compétence.

Exceptionnellement, dans l’application du Droit des Affaires, la Cour


Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), peut juger une 3e fois
sur le fond du litige, selon que certaines conditions sont réunies.

3- LE PRINCIPE DE L’EGALITE DEVANT LA JUSTICE

Les justiciables doivent être jugés suivant les mêmes lois sans
distinction et sans considération de leur situation personnelle.
L’égalité porte à la fois sur les procédures et les sanctions
applicables. Ce principe connaît des dérogations.

C’est ainsi qu’en raison de l’immunité liée à l’exercice de la fonction


de Député, conformément aux dispositions de l’article 67 de la

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 34


Constitution : « Aucun député ne peut être poursuivi, recherché,
arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou des votes émis par
lui dans l’exercice de ses fonctions. »

Il en est de même pour le membre du Conseil constitutionnel, selon


les termes de l’article 93 de la Constitution : « Aucun membre du
Conseil Constitutionnel ne peut, pendant la durée de son mandat, être
poursuivi, arrêté, détenu ou jugé en matière criminelle ou
correctionnelle qu’avec l’autorisation du Conseil. »

En mots plus simples, il est impossible d’engager une poursuite


pénale contre un député ou un juge du conseil constitutionnel, pour
des infractions commises dans l’accomplissement de leurs tâches.

Il en est de même pour le Chef de l’Etat qui ne peut être poursuivi


que pour haute trahison devant la Haute Cour de justice.

4- LA GRATUITE DE LA JUSTICE

Il ne faut pas d’emblée percevoir le principe de la gratuité de la


justice, dans le sens d’avoir accès gracieusement aux juridictions.
C’est ce qui explique le fait qu’il faut payer une certaine somme
d’argent pour enrôler sa plainte à la justice.

La gratuité est perçue ici, dans les rapports entre les usagers de la
justice et les magistrats. Les usagers des services de la justice ne
doivent pas payer les juges avant de rendre la justice.

B- LES REGLES RELATIVES A LA FONCTION DE JUGER

1- LE PRINCIPE DE LA SEPARATION DES POUVOIRS

Le principe de la séparation des pouvoirs amène à distinguer dans


l’Etat trois fonctions indépendantes les unes des autres. La fonction
de gouverner, la fonction de faire la loi et celle de juger, qui sont
respectivement assumées par : le pouvoir exécutif, le pouvoir
législatif et le pouvoir judiciaire.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 35


Aussi, la Constitution ivoirienne proclame t- elle l’indépendance du
pouvoir judiciaire vis-à-vis des autres.

Relativement à la fonction de juger, ce principe crée pour le compte


des juridictions, des droits et des obligations.

Par exemple : La séparation des pouvoirs interdit au juge de prendre


des mesures administratives, de s’opposer à l’exécution des lois et
de s’ériger en législateur.

La portée de cette dernière obligation est quelque peu limitée quand


on sait l’importance accordée à la jurisprudence comme source de
droit.

2- LA COLLEGIALITE ET DE LA TERRITORIALITE

La collégialité signifie que la décision de justice est rendue par un


collège, c’est-à-dire un ensemble d’au moins trois (3) magistrats.

Ce principe a été étendu aux Tribunaux de première instance (TPI)


depuis 1997. Mais, il n’est pas encore appliqué dans les Sections
détachées de tribunaux.

Quant à la territorialité, elle veut dire que les magistrats exercent


leurs fonctions sur un territoire, une circonscription judiciaire
délimitée.

Par exemple : La compétence territoriale de la Section détachée de


Tribunal de Toumodi s’étend aux Départements de Toumodi,
d’Attiégouakro et de Yamoussoukro.

PARAGRAPHE 2 : LES PRINCIPALES JURIDICTIONS

Le mot ‘‘juridiction’’ signifie le pouvoir de dire le droit. Pris au sens


organique, ce mot désigne l’ensemble des services étatiques qui
sont dotés du pouvoir de dire le droit. Ainsi, peut-on dire la ou les
juridictions de Côte d’Ivoire, pour désigner les organes de l’Etat
chargés de dire le droit dans le pays.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 36


Les juridictions peuvent faire l’objet de plusieurs classifications.
Ainsi, selon le critère de l’ordre auquel elles appartiennent, on a les
juridictions administratives, et les juridictions judiciaires. Selon le
critère du degré qu’elles occupent dans la hiérarchie judiciaire, on a
les juridictions de premier degré, telles que les juridictions de
première instance et leurs sections détachées et celles de second
degré, les Cours d’Appel.

La Constitution ivoirienne a consacré en son article 102, la


classification ‘‘Juridictions suprêmes et juridictions inférieures’’.

Et enfin, selon leur nature, il y a les juridictions de droit commun


et les juridictions d’exception ou spécialisées.

Afin de mieux rendre compte de la complexité du système


juridictionnel ivoirien, il paraît essentiel d’axer les prochains
développements sur la classification : Juridictions de droit commun,
caractérisées par leur aptitude générale à connaître de toutes les
affaires et Juridictions spécialisées ou d’exception, celles qui ne
connaissent que des litiges qui leur sont expressément confiés par la
loi.

A- LES JURIDICTIONS SPECIALISEES

Encore qualifiées de juridictions d’exception, ce sont des juridictions


qui ne siègent pas la plupart du temps en permanence et dont la
compétence est spécialisée, avec un objet souvent précis. Elles ne
sont compétentes qu’en vertu d’un texte de loi formel. Ce sont :

1- LA HAUTE COUR DE JUSTICE

Prévue par le Titre IX de la Constitution, la Haute Cour de Justice


est composée de députés que l’Assemblée Nationale élit en son sein,
dès la 1ère session de la législature. Elle est présidée par le Président

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 37


de la Cour de Cassation, actuellement Chambre judiciaire de la Cour
suprême.

Elle a pour objet de juger d’une part, le Président de la République


pour des faits de haute trahison qui lui sont imputables, (Par
exemple : La trahison de son serment), et d’autre part, les membres
du Gouvernement lorsqu’ils se sont rendus coupables de faits
qualifiés crimes ou délits, commis dans l’exercice de leurs fonctions.

Il convient de souligner qu’au niveau interne, le Chef de l’Etat ne


peut être poursuivi devant la Haute Cour de justice, dans l’exercice
de ses fonctions que pour haute trahison de son serment.

2- LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel, organe de régulation du fonctionnement


des Pouvoirs publics, est réglementé par les articles 88 et suivants
de la Constitution.

C’est une juridiction d’exception dont le président est nommé pour


une durée de six ans, non renouvelables. Le Professeur Agrégé de
Droit public Francis VANGAH WODIE en était le Président. Mais, il
a été remplacé depuis le 03 Février 2015 par le Magistrat KONE
MAMADOU, qui en est l’actuel Président. Il est aidé dans sa
fonction par 6 Conseillers, dont trois (3) sont désignés par le Chef
de l’Etat, et les trois autres, par le Président de l’Assemblée
Nationale, pour une durée de six ans non renouvelables.

A toutes fins utiles, il convient de préciser que le Conseil


Constitutionnel est renouvelé par moitié tous les 3 ans. Et, ses
décisions sont insusceptibles de recours. C’est-à-dire qu’elles
s’imposent aux Pouvoirs publics, à toute autorité administrative,
juridictionnelle, militaire et à toute personne physique ou morale
nationale ou internationale.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 38


Les attributions du Conseil constitutionnel sont de deux (2) ordres.
Il est juge et consultant.

En effet, en tant que juge, le Conseil constitutionnel est :

-juge du contentieux électoral : A ce titre, il statue sur l’éligibilité


des candidats aux élections présidentielles et législatives, puis,
statue sur toutes les contestations et réclamations relatives à ces
élections et en proclame les résultats définitifs. En définitive, il
contrôle la régularité des opérations du référendum et en proclame
les résultats définitifs.

-juge du contrôle de constitutionnalité : A ce titre, le Conseil


contrôle la conformité à la constitution des lois et règlements d’une
part, et des traités et accords avant leur ratification d’autre part.

-juge de la continuité de l’Etat : A ce titre, il constate la vacance


de la Présidence de la République pour empêchement absolu du
président, conformément à l’article 40 de la Constitution.

En tant que consultant, le Conseil constitutionnel est :

-Consultant quant à l’élaboration des textes de loi : Ici, il ne


donne que des avis, pour éclairer ou conseiller les pouvoirs publics
lors de l’édiction d’un texte de loi. Ses avis ne sont que consultatifs ;
ils ne sont pas obligatoires.

Ainsi, aux termes de l’article 97 de la Constitution, « Les projets ou


propositions de loi et les projets d’ordonnance peuvent être soumis
pour avis au Conseil Constitutionnel. »

1- LA COUR DES COMPTES

Elle est chargée du contrôle des Finances publiques. En pratique, elle


vérifie la régularité des recettes et des dépenses publiques, puis

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 39


juge les comptes des comptables publics et sanctionne leurs fautes
éventuelles. Elle correspond à la Cour des Comptes.

NB : Les juridictions répressives ou pénales spécialisées sont


celles qui sanctionnent les infractions aux règles de droit pénal. Ce
sont : la Cour d’assise, le Tribunal militaire.

3- LA COUR D’ASSISES

C’est une juridiction itinérante et donc non permanente, qui se tient


annuellement deux ou trois fois. Les sessions ou assises de cette
cour se tiennent dans un Tribunal de Première Instance. La Cour
d’Assises est compétente pour juger tous les crimes sans
distinction. Le crime est une infraction sanctionnée d’une peine
d’emprisonnement de 10 ans au moins.

Il existe deux types de Cours d’assises :

a) LA COUR D’ASSISES DES MAJEURS,

Elle est instituée pour juger les personnes âgées de 18 ans révolus
et auxquelles est imputé un crime.

Elle est composée :

-D’un magistrat de siège relevant d’une Cour d’Appel, président de


session.

-De deux (2) autres magistrats du parquet, conseillers.

-Des jurés, qui sont des citoyens de l’un ou l’autre sexe de la


société civile, choisis pour écouter les parties et rendre le verdict.

b) LA COUR D’ASSISES DES MINEURS,

Elle est instituée pour juger les mineurs âgés de 16 ans au moins,
accusés de crime.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 40


Elle se compose de : Trois (3) magistrats, dont l’un assure la
présidence, et de Six (6) jurés.

5- LE TRIBUNAL MILITAIRE

Le tribunal militaire est une juridiction répressive à caractère


particulier qui est chargé de juger les infractions commises par les
militaires et assimilés.

Prévus initialement au nombre de quatre, seul le Tribunal militaire


d’Abidjan, exerce effectivement jusqu’à ce jour. Il a donc une
compétence territoriale nationale. Le tribunal militaire comprend :

-Un magistrat de l’ordre judiciaire, président du tribunal ;

-Un procureur militaire, appelé Commissaire du Gouvernement.


Actuellement, c’est le Capitaine de Corvette Ange KESSY KOUAME
Bernard qui exerce cette fonction.

-Des jurés militaires.

Les sanctions appliquées sont identiques à celles infligées aux civils.


Toutefois, certaines sanctions complémentaires telle que la radiation
du corps, peuvent s’ajouter.

B- LES JURIDICTIONS DE DROIT COMMUN

Ce sont celles qui sont normalement compétentes, sauf lorsqu’un


texte exclut expressément cette compétence. Elles regroupent :

1- LES TRIBUNAUX DE PREMIERE INSTANCE ET LEURS


SECTIONS DETACHEES

a) LES TRIBUNAUX DE PREMIERE INSTANCE –TPI-

Ce sont les tribunaux de première instance qui connaissent pour la


première fois les affaires civiles, commerciales, pénales, de travail,

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 41


administratives, etc. On dit qu’ils constituent le premier degré de
juridiction. Selon la diversité des matières à connaître, chaque
Tribunal de Première Instance est composé de plusieurs chambres
ou sections : Civile, correctionnelle, administrative, travail, etc.

La Côte d’Ivoire compte actuellement neuf (9) Tribunaux de


Première Instance répartis sur le territoire national dans les villes
suivantes : à Abidjan, (TPI Plateau et TPI Yopougon), à Bouaké,
Daloa, Abengourou, Man, Gagnoa, Korhogo et à Bouaflé.

Les Tribunaux de Première Instance ont une compétence territoriale


qui s’étend à plusieurs Départements.

Par exemple : Le Tribunal de Première Instance de Bouaké s’étend


jusqu’à Yamoussoukro, Tiébissou, Toumodi, etc.

b) LES SECTIONS DETACHEES DE TRIBUNAL

La Section détachée de Tribunal est en quelque sorte ‘‘un service


déconcentré’’ des Tribunaux de Première Instance. Aussi, connait-
elle les mêmes affaires que les TPI.

Les décisions rendues par les Sections détachées de Tribunal tout


comme celles des Tribunaux de Première Instance sont appelées
jugements. Toutefois, la section détachée a une compétence
territoriale restreinte. La Côte d’Ivoire compte actuellement 23
Sections détachées de tribunal.

Par exemple : Les Sections détachées de Tribunal de Toumodi, de


Tiassalé, d’Oumé, de Dimbokro, de Sassandra, etc.

Lorsqu’une affaire est jugée une première fois par un Tribunal de


Première Instance ou sa section détachée, cette affaire peut être
portée une seconde fois, devant une juridiction supérieure pour
respecter le double degré de juridiction. Il s’agit de la Cour d’appel.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 42


2- LA COUR D’APPEL

En effet, lorsque l’une des parties au procès n’est pas satisfaite du


jugement rendu par le Tribunal de Première Instance ou sa section
détachée, elle peut exercer un recours devant la Cour d’appel,
juridiction de second degré. On dit que cette partie interjette ou
fait appel.

En pratique, toutes les décisions rendues en première instance sont


en principe, susceptibles de recours devant la Cour d’appel.
Toutefois, pour les affaires civiles et commerciales dont le taux du
litige n’atteint pas 500 000 FCFA, ce principe ne s’applique pas.

Tout comme le TPI, la Cour d’appel est composée de plusieurs


chambres. Mais à la différence des Tribunaux de Première Instance,
la Cour d’appel a une compétence territoriale plus étendue.

En effet, son ressort renferme plusieurs Tribunaux de Première


Instance et leurs sections détachées.

Il existe trois (3) Cours d’appel en Côte d’Ivoire. Elles sont situées
à Abidjan, à Bouaké et à Daloa.

Ces juridictions statuent avec un collège de trois (3) magistrats


dont l’un est président et deux assesseurs. Leurs décisions sont
appelées arrêts et sont susceptibles de recours portés devant la
juridiction supérieure : la Cour suprême. On parle de pourvoi en
cassation.

3- LA COUR SUPRÊME

Les lois organiques devant fixer la composition et le fonctionnement


des nouvelles juridictions suprêmes prévues par la Constitution
ivoirienne en son article 102, notamment : la Cour de Cassation, le
Conseil d’Etat, etc, n’ont pas encore été votées. Ainsi, c’est la Cour

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 43


suprême qui continue de statuer sur les recours en cassation dirigés
contre les décisions rendues par les juridictions de second degré,
notamment par leurs différentes chambres.

Lorsqu’elle est saisie, la Cour suprême apprécie l’application de la loi


faite par les juridictions inférieures. Si elle estime que la loi n’a pas
été bien appliquée, elle annule cette décision. On dit qu’elle la casse.
A contrario, lorsqu’elle réalise que le droit a été bien appliqué, elle
rejette le pourvoi en cassation. Les décisions de la Cour suprême
sont des arrêts.

La Cour suprême est actuellement formée de deux (2) chambres,


ayant des compétences spécifiques :

- La Chambre judiciaire,

Elle juge toutes les décisions des juridictions inférieures qui ne sont
pas dévolues à une autre chambre et, contre lesquelles, pourvoi a été
formé. Elle correspond à la future Cour de cassation.

- La Chambre administrative,

Elle est saisie pour les recours formés contre les décisions rendues à
l’égard d’une personne morale de droit public. Elle est aussi saisie en
premier et dernier ressort, du recours pour excès de pouvoir (REP),
ouvert aux citoyens contre les décisions contestées de certaines
autorités administratives. Elle correspond au futur Conseil d’Etat
selon les dispositions de la Constitution de 2000.

L’actuel Président de la Cour suprême est le Magistrat APHING-


KOUASSI RENE FRANÇOIS.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 44


SECTION 2 : LA PROCEDURE CIVILE ET LE PERSONNEL
JUDICIAIRE

La procédure judiciaire d’une part et le personnel judiciaire d’autre


part, feront successivement l’objet d’étude.

PARAGRAPHE 1 : LA PROCEDURE CIVILE

La procédure, c’est l’ensemble des formalités qui doivent être


suivies pour parvenir à une solution de justice de nature civile, pénale
ou administrative, etc selon le cas. Ainsi, en droit, les plaideurs
disposent d’une variété de procédures : pénale, fiscale, civile,
administrative, commerciale,… pour faire valoir leurs droits auprès
des juridictions. On dit qu’ils exercent une action en justice.

De toutes ces procédures, celle qui est généralement appliquée c’est


la procédure civile, pour la simple raison qu’en Côte d’Ivoire, l’on fait
application de cette procédure non seulement en matière civile, mais
également dans les domaines du travail, des affaires, en matière
administrative, rurale, etc. Une personne dont les droits sont
menacés, peut saisir la justice. Dans une telle initiative, elle peut se
poser les questions suivantes :

-Quelle est la juridiction compétente ? Et quelles sont les


conditions exigées pour la saisir ? (A)

-Quelle voie juridique faut-il suivre pour porter le litige devant


cette juridiction ? Enfin, quels sont les moyens ou voies de
recours qui me sont accordés pour obtenir un nouvel examen du
litige qui fait déjà l’objet d’une décision d’un juge ? (B)

A- LA JURIDICTION COMPETENTE ET LES CONDITIONS


D’EXERCICE DE L’ACTION EN JUSTICE

1- LA JURIDICTION COMPETENTE

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 45


La juridiction compétente est définie comme étant celle qui est
juridiquement revêtue du pouvoir de dire le droit.

En effet, certaines règles répartissent les litiges entre les


différents tribunaux en fonction de leur compétence liée à la
matière du litige d’une part, et d’autre part en considération de leur
compétence territoriale.

a) LA COMPETENCE MATERIELLE OU RATIONE MATERIAE

C’est le critère de détermination de la compétence d’une juridiction à


connaître d’un litige en fonction de la nature du problème juridique
posé.

En Côte d’Ivoire, la procédure civile commence devant les tribunaux


de première instance et leurs sections détachées. Ceux-ci ont une
compétence matérielle presque générale. En fait, ils peuvent juger
en premier ressort des affaires en toute matière : civile,
commerciale, administrative, fiscale et travail, à moins qu’un texte
particulier n’en décide autrement. (Cf. Art.5 et 6 du Code de
procédure civile).

Les Cours d’appel connaissent en second ressort les jugements


rendus par les Tribunaux de Première Instance et leurs sections
détachées, en toutes matières, sauf texte contraire, conformément
aux dispositions de l’article 8 du Code de Procédure civile.

b) LA COMPETENCE TERRITORIALE OU RATIONE LOCI

Du point de vue géographique ou territorial, la répartition des


compétences des juridictions est faite par une règle générale
assortie d’importantes exceptions.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 46


Ainsi, en principe, le tribunal de première instance ou la section
détachée de tribunal territorialement compétente est celui du
domicile du défendeur.

Ce principe s’énonce sous la forme latine suivante : « Actor sequitur


forum rei » et signifie que : ‘‘Le demandeur doit porter son action
devant le tribunal du défendeur’’.

Mais, exceptionnellement, cette règle est écartée. C’est ainsi qu’en


matière de responsabilité civile délictuelle, (le cas d’un accident de
la route, par exemple), le tribunal à saisir est celui du lieu où s’est
produit l’acte dommageable. Il en est de même du litige qui concerne
un immeuble, le tribunal compétent est celui du lieu où est situé cet
immeuble.

En matière internationale, la loi attribue compétence aux tribunaux


ivoiriens dans tout litige où un Ivoirien est demandeur ou défendeur.
Ainsi, un ivoirien peut poursuivre son débiteur étranger devant les
tribunaux ivoiriens, quels que soient son domicile et le lieu où
l’obligation a été contractée.

Aussi, un Ivoirien peut être poursuivi devant un tribunal ivoirien pour


ses obligations contractées, même envers un étranger, sur le
fondement des articles 14 et 15 du Code Civil. On dit que ces
dispositions instituent au profit des ivoiriens un privilège de
juridiction.

Le privilège de juridiction fondé sur les articles 14 et 15 ci-dessus


mentionnés, peut être écarté en cas de renonciation à ce privilège
par son bénéficiaire, c’est-à-dire l’ivoirien.

Une fois le tribunal compétent identifié, certaines conditions sont


exigées pour porter son action devant lui.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 47


2- LES CONDITIONS DE L’ACTION EN JUSTICE

L’action en justice est un droit reconnu aux sujets de droit de


s’adresser à la justice pour obtenir le respect de leurs droits ou de
leurs intérêts légitimes.

Aussi, faut-il souligner que n’importe qui ne peut saisir le tribunal : on


dit que le droit d’ester en justice est subordonné à des conditions
de recevabilité.

En effet, pour exercer une action en justice, trois (3) conditions


sont exigées par la loi : l’intérêt pour agir, la qualité pour agir et la
capacité d’ester en justice.

a) L’INTERÊT POUR AGIR

Aux termes de l’article 3 du Code de Procédure civile, celui qui


agit en justice doit avoir subi un préjudice ; il doit avoir un droit à
faire valoir, un intérêt à défendre.

Ainsi, il doit justifier d’un intérêt légitime juridiquement protégé. La


célèbre maxime qui pose : ‘‘Pas d’intérêt, pas d’action’’ trouve ici tout
son sens.

Cet intérêt doit présenter certains caractères dont l’absence peut


amener le tribunal à rejeter l’action en justice.

En fait, l’intérêt doit être :

- Légitime, c’est-à-dire qu’il doit être permis par le droit ;


conforme aux bonnes mœurs et à l’ordre public.

Par exemple : M. KOKAN saisit la justice parce que M. KODAN a


déraciné tous les plants de drogue qu’il a cultivé sur leur parcelle
commune. Son action sera rejetée car elle n’est pas légitime.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 48


- Certain, né et actuel. En principe pour être fondée en droit,
une prétention doit reposer sur un intérêt réel. De ce fait,
l’intérêt qui est simplement éventuel ou qui est prescrit par la
loi, ne suffit pas pour fonder une demande à la justice.

NB : IL convient de préciser que les actions en justice se


prescrivent. La prescription civile est régie par les articles 2219 et
suivants du Code civil.

La prescription se définit comme la consolidation d’une situation par


l’écoulement d’un certain délai. La prescription est dite acquisitive
(on l’appelle aussi usucapion) lorsque l’écoulement du délai a pour
effet de faire acquérir un droit réel à celui qui l’exerce. Par contre,
elle est qualifiée d’extinctive lorsqu’elle fait perdre un droit réel ou
un droit personnel du fait de l’inaction prolongée du titulaire du droit.
On l’appelle encore prescription libératoire.

Ainsi, en matière civile et commerciale la prescription de l’action est


respectivement de 30 ans et 5 ans. En effet, la prescription des
créances commerciales est de 5 ans, conformément aux dispositions
de l’article 16 de l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial
Général qui stipule que : « Les obligations nées à l’occasion de leur
commerce entre commerçants, ou entre commerçants et non-
commerçants, se prescrivent par cinq ans (…) ». Alors que la
prescription de l’action civile est de 30 ans pour les créances civiles.
« Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites
par trente ans (…) » selon les termes de l’Article 2262 du Code civil.

En matière de crime contre l’humanité, l’intérêt demeure toujours


actuel. On dit de ce crime qu’il est imprescriptible.

- Direct et personnel. En principe seule la victime directe du


dommage, c’est-à-dire corporellement atteinte, est habilitée à
agir. Mais exceptionnellement, les proches d’une victime
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 49
(victime indirecte) d’un accident mortel peuvent prétendre à la
réparation de la douleur morale née de la disparition tragique
d’un être cher.

Par ailleurs, en principe seul le titulaire du droit bafoué est fondé à


initier un procès, car on ne peut agir en justice pour le compte
d’autrui. Cependant, la loi permet que l’enfant mineur soit représenté
par son tuteur légal pour la défense de ses intérêts.

b) LA QUALITE POUR AGIR

C’est le titre en vertu duquel on agit en justice. Le pouvoir de


défendre le droit en cause. Généralement, cette qualité est
déterminée par la loi. Il s’agit de la qualité d’héritier, de
propriétaire, de créancier, etc.

Par exemple : Seuls les époux ont la qualité pour agir au tribunal en
divorce ou en séparation de corps.

c) LA CAPACITE D’ESTER EN JUSTICE

C’est l’aptitude que la loi reconnaît à une personne d’agir en justice en


raison de son âge ou de son état mental. Ainsi, n’ont pas la capacité
juridique d’agir en justice, les mineurs et certains majeurs déclarés
incapables.

B- LES MODES DE SAISINE DU TRIBUNAL ET LES VOIES


DE RECOURS

Pour porter une affaire à la connaissance du tribunal, il faut saisir ce


tribunal. La loi permet aux parties en procès de faire

1- LA SAISINE DU TRIBUNAL

Le tribunal est saisi par un acte spécifique, appelé acte de saisine. Il


y a deux actes de saisine : l’assignation et la requête.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 50


Le tribunal est saisi par une assignation ou une plainte lorsque la
procédure est contentieuse, c’est-à-dire, lorsqu’un litige oppose
deux personnes.

L’assignation est l’acte par lequel la partie qui veut faire reconnaître
son droit, invite son adversaire à comparaître devant le tribunal.
L’assignation est établie par un huissier de justice. On dit que
l’assignation est un acte d’huissier.

Par exemple : La procédure de divorce.

Le tribunal est saisi par une requête encore appelée demande,


lorsque la procédure est gracieuse. C’est-à-dire, qu’elle intervient en
dehors de tout conflit. La requête est une simple demande adressée
au juge.

Par exemple : La procédure de changement de nom, la procédure


d’adoption, la procédure de règlement préventif des dettes d’une
société commerciale, etc.

NB : Pour qu’une affaire passe à l’audience, elle doit être enrôlée.

L’enrôlement c’est l’inscription de l’affaire au rôle ; c’est-à-dire, dans


un répertoire général (Un registre) tenu au greffe du tribunal.
L’enrôlement est subordonné au versement entre les mains du
Greffier en chef, d’une somme d’argent suffisante à garantir le
paiement des frais de la procédure jusqu’à la fin du procès. Cette
somme est appelée consignation.

NB : Au jour et à l’heure préalablement fixés sur l’acte


d’assignation, l’audience s’ouvre par l’appel des parties devant le
juge.

Le plaideur peut s’expliquer oralement ou par écrit. Les documents


écrits contenant les arguments du plaideur sont appelés conclusions

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 51


lorsque la partie est représentée par un avocat. Par contre, on les
appelle mémoires, lorsque ces arguments relèvent des parties elles-
mêmes.

La décision du juge est obligatoire et exécutoire. Toutefois, elle est


susceptible de recours porté devant une juridiction supérieure.

2- LES VOIES DE RECOURS

Les voies de recours sont des ‘‘voies et moyens’’ accordées à un


plaideur et exceptionnellement à des tiers, pour obtenir un nouvel
examen du litige tranché ou pour faire valoir les vices de procédure.

Les voies de recours sont nombreuses. On les regroupe en deux


catégories. Les voies de recours ordinaires et les voies de recours
extraordinaires.

a) LES VOIES DE RECOURS ORDINAIRES

Il s’agit de l’appel et de l’opposition.

a-1) L’APPEL, c’est la voie de recours ouverte à la partie


mécontente du jugement pour attaquer ladite décision devant une
Cour d’appel.

Les délais pour interjeter appel sont de vingt (20) jours en matière
pénale et d’un (1) mois en matière civile, à compter de la date de
signification de la décision attaquée.

a-2) L’OPPOSITION, est un recours contre le jugement rendu par


défaut, c’est-à-dire sans le plaideur. Il permet de saisir le tribunal
qui a déjà statué, en lui demandant de juger à nouveau l’affaire. Les
délais de l’opposition sont identiques à ceux de l’appel.

b) LES VOIES DE RECOURS EXTRAORDINAIRES

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 52


Ce sont : la tierce opposition, le recours en révision et le pourvoi en
cassation.

b-1) LA TIERCE OPPOSITION : C’est une voie de recours


extraordinaire, de rétractation ou de reformation, ouverte à toute
personne qui, se sentant lésée ou menacée pour avoir subi un
préjudice par le fait d’un jugement auquel elle n’a été ni partie, ni
représentée.

La tierce opposition a pour effet de rendre inopposable au tiers qui a


exercé le recours, le jugement attaqué. Mais ce jugement reste
opposable aux parties au procès.

b-2) LE RECOURS EN REVISION : C’est une voie de recours


extraordinaire par laquelle on revient devant les juges qui ont déjà
statué en leur demandant de modifier leur décision, en prétendant
qu’elle a été rendue en raison d’une erreur involontaire de sa part. Ce
recours n’est possible qu’en cas de rétention de pièces décisives, de
jugement rendu sur pièces reconnues ou déclarées judiciairement
fausses, de témoignages ou serments mensongers.

b-3) LE POURVOI EN CASSATION : C’est un recours contre une


décision passée en force de chose jugée porté devant la Cour
suprême et fondé soit sur la violation de la loi, l’excès de pouvoir,
l’incompétence de la juridiction dont est issue ladite décision,
l’inobservation d’une règle relative à la forme, etc.

En clair, c’est un moyen permettant de soumettre à la Cour suprême


les décisions rendues par les juridictions inférieures (Arrêt de la
cour d’appel, verdict de la cour d’assises, jugement en dernier
ressort) afin de vérifier leur conformité à la loi.

La décision déférée en cassation, est soumise en principe à l’une des


chambres de la Cour suprême. Celle-ci rend un arrêt de rejet

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 53


lorsque ladite décision est conforme à la loi, au cas contraire, elle
rend un arrêt de cassation. On dit qu’elle casse ou annule la décision
critiquée.

PARAGRAPHE 2 : LE PERSONNEL JUDICIAIRE

Le personnel judiciaire se compose strictement parlant des


personnels de justice. Par extension, on y inclut tous les auxiliaires
de justice.

A- LES PERSONNELS DE JUSTICE

Ce sont essentiellement, les magistrats assistés dans


l’accomplissement de leurs tâches quotidiennes par des greffiers.

1- LES MAGISTRATS

Encore appelés juges, les magistrats sont des fonctionnaires chargés


de rendre ou de requérir la justice entre les citoyens dans l’Etat.

Il convient de relever qu’il y a 2 types de magistrats :

a) Les magistrats de carrière : Ils sont recrutés par concours


sur titres ou diplômes ; ce sont des magistrats professionnels.
Ils forment le corps judiciaire. Les magistrats de carrière
siègent en principe dans les juridictions de droit commun.

b) Les juges élus ou nommés : Ils ne sont pas des professionnels ;


mieux, ce ne sont pas des magistrats au sens premier du terme.
Ils siègent dans les tribunaux d’exception. C’est le cas pour le
Conseil constitutionnel.

NB : La nomination de certains juges dans les tribunaux spécialisés,


n’entame pas leur statut de juges de carrière.

Dans les juridictions de droit commun, on distingue deux (2)


catégories de magistrats :

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 54


-Les juges du siège ou encore juges assis, chargés de diriger les
audiences et de rendre les décisions. Ils restent assis pour
prononcer leurs jugements et arrêts.

Les magistrats du siège sont indépendants et inamovibles, c’est-à-


dire, qu’ils ne peuvent être suspendus, rétrogradés, révoqués et
même mutés à un nouveau poste, que dans certaines conditions
prévues par la loi.

-Les juges du Parquet ou juges du Ministère Public, représentent


la société. Ils ne rendent pas la justice, mais la requièrent au nom de
l’Etat, donnent leurs avis sur les solutions à apporter aux litiges. Ils
ont un rôle plus important en matière criminelle qu’en matière civile.

On les nomme ‘‘magistrats debout’’ parce qu’ils se tiennent toujours


debout pour exposer leurs réquisitions et conclusions.

Ils ont un statut dépendant dès lors qu’ils sont des agents du
pouvoir exécutif, hiérarchiquement placés sous l’autorité du
Ministre de la Justice. Celui-ci peut donner des ordres aux
Procureurs généraux (Magistrats placés à la tête du Ministère Public
d’une Cour d’appel), lesquels ont autorité sur les Procureurs de la
République (Magistrats placés à la tête du Ministère Public près le
TPI ou la Section détachée).

Le Parquet général, est composé de l’ensemble des magistrats qui


exercent les fonctions du Ministère public auprès des Cours d’appel.
L’Avocat général, est un membre du Parquet général qui a pour
fonction de porter la parole au nom du Procureur général devant les
chambres auxquelles ils sont affectés.

NB : Quand les magistrats sont saisis d’un litige, ils ont l’obligation
de rendre une décision sous peine de déni de justice. En plus, ils ne
peuvent pas connaître des litiges dans lesquels leur conjoint, parents

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 55


ou alliés sont parties. S’ils siègent au mépris de ce principe, ils
peuvent être récusés.

Par ailleurs, les magistrats sont frappés d’une interdiction d’exercer


certaines fonctions incompatibles avec leur profession. Il s’agit
notamment du commerce, des fonctions politiques, etc.

2- LES GREFFIERS

Les greffiers sont des fonctionnaires ou agents de l’Etat qui


collaborent directement avec les juges. En effet, ceux-ci assistent
les magistrats dans leurs tâches en écrivant les actes et décisions
des juges, en gardant les originaux de ces documents, qu’on appelle
minutes, puis en délivrant des copies aux intéressés qui en font la
demande. Ces copies sont appelées expéditions ou grosses.

Par exemple : C’est au greffe du tribunal que sont délivrés certains


actes (documents) comme le Casier judiciaire, le Registre de
commerce, le certificat de nationalité, l’acceptation de succession, le
certificat d’individualité, etc. On dit que ce personnel est la plume
du tribunal.

Toujours, en tant qu’assistant des juges, les greffiers prennent note


à l’audience. Leur présence est une condition de validité de certains
actes du juge.

Ils sont également dépositaires des effets mobiliers et deniers qui


leur sont confiés en exécution des lois et règlements et en exécution
des jugements.

Le Service des greffes est hiérarchisé. Le Greffier en chef qui est


un Attaché des greffes et parquets, en est le responsable. Il est
aidé par des Secrétaires et des Assistants des Greffes et
Parquets.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 56


c) LES AUXILIAIRES DE JUSTICE

Les auxiliaires de justice sont toutes les personnes qui concourent à


titre professionnel à l’œuvre de la justice. Autrement dit, ce sont
des praticiens qui apportent leur concours au déroulement de
l’activité judiciaire. Certains agissent généralement dans le cadre
d’une procédure judiciaire, d’autres interviennent en dehors de tout
procès.

1- LES AUXILIAIRES INTERVENANT DANS LA PROCEDURE


JUDICIAIRE
a) LES AVOCATS

L’Avocat est un professionnel dont la fonction est d’assister, de


représenter les personnes physiques ou morales devant toutes les
juridictions, organismes juridictionnels ou disciplinaires à l’effet
d’assurer leur défense. Il importe de préciser que l’avocat n’est pas
un fonctionnaire. Il travaille pour son propre compte. On dit que la
profession d’Avocat est libérale et indépendante.

Pour exercer en tant qu’avocat, il faut être admis dans un Barreau et


être inscrit au Tableau de l’Ordre des Avocats. L’ensemble des
avocats exerçant dans le ressort d’une Cour d’Appel est appelé
barreau. Le barreau est administré par un Conseil de l’Ordre,
présidé par le Bâtonnier.

b) LES HUISSIERS DE JUSTICE

L’Huissier est un Officier public (Personne titulaire d’un office ayant


qualité pour dresser des actes authentiques) qui rédige les actes de
procédure tels que l’assignation qui saisit le tribunal et les actes de
saisie. Il a qualité pour signifier ou notifier, c’est-à-dire porter à la
connaissance des parties les actes de procédure. L’huissier est aussi
chargé de faire procéder à l’exécution des décisions de justice et au
recouvrement amiable des créances.
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 57
Par exemple : Un huissier ne peut procéder à l’expulsion d’un individu
d’une maison, qu’en application d’une décision de justice.

c) L’EXPERT et LE SEQUESTRE

L’expert est un spécialiste d’une matière ou d’une discipline non


juridique dont le concours est requis par le juge en vue d’un éclairage.
De façon pratique, les experts sont des personnes à qui les tribunaux
confient la mission de procéder à des constatations techniques et
d’en faire un rapport. Celui-ci peut être un comptable, un médecin, un
mécanicien, un spécialiste en markéting, etc.

L’expert doit être agréé par le Ministère de la Justice et prêter


serment avant d’exercer sa mission.

Le séquestre est une personne désignée par la justice ou par des


particuliers pour assurer la conservation d’un bien qui fait l’objet d’un
procès. En clair, il assure la garde d’objets litigieux.

2- LES AUXILIAIRES AGISSANT EN DEHORS DE LA


PROCEDURE
a) LE NOTAIRE

Le Notaire est un officier public, dont la fonction essentielle est


d’authentifier les actes instrumentaires, c’est-à-dire donner la
preuve de leur existence. Ainsi, il intervient dans le partage des
successions, la création des sociétés, la vente de terrain, ou
d’immeuble, etc. Dans ce dernier cas, l’intervention du notaire est une
condition de validité de l’opération de vente.

b) LE COMMISSAIRE PRISEUR

Le Commissaire priseur est un Officier ministériel chargé de


procéder à l’estimation et à la vente publique aux enchères des
meubles et effets mobiliers corporels saisis par les huissiers.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 58


DEUXIEME PARTIE : LES
PERSONNES JURIDIQUES,
SUJETS DE DROIT
On appelle personnes juridiques ou sujets de droit, des personnes
envisagées par le droit comme ayant ou pouvant avoir des droits
(sujets actifs) et supporter des obligations (sujets passifs). Et de
ce fait, elles participent aux activités juridiques. On dit que ces
personnes ont la personnalité juridique.

Les personnes au sens du droit se divisent en deux catégories : les


personnes physiques et les personnes morales. Toutefois, la
personnalité juridique de ces personnes, c’est-à-dire, leur aptitude à
être titulaire de droits et à assumer des obligations, a un contenu
différent selon qu’on est en présence d’une personne physique ou qu’il
s’agisse d’une personne morale.

Par ailleurs, l’ensemble des biens et des obligations appartenant aux


personnes juridiques sont protégés par le droit. Il s’agit de leur
patrimoine.

C’est pourquoi, il convient d’étudier la personnalité juridique et le


patrimoine des personnes juridiques. (CHAP.I).

La personnalité juridique donne à son titulaire certains droits,


notamment la capacité. La capacité juridique est la possibilité et la
faculté d’accomplir tous les actes de la vie civile. En raison d’une
incapacité, certaines personnes ne sont pas juridiquement aptes à
accomplir certains actes de la vie civile qui leurs sont reconnus.

Ainsi, la capacité et l’incapacité juridiques des sujets de droit


seront examinées. (CHAP.II).

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 59


CHAPITRE I : LA PERSONNALITE
JURIDIQUE ET LE PATRIMOINE DU
SUJET DE DROIT
SECTION 1 : LA PERSONNALITE JURIDIQUE

La personnalité juridique est l’aptitude à être titulaire de droits et à


assumer des obligations. Ou simplement, c’est l’aptitude à être sujet
de droit.

Il est utile de préciser que seules les personnes physiques (Les


Hommes exclusivement), et les personnes morales, sous certaines
conditions variables selon leur nature, ont la personnalité juridique.

Ainsi, ni le chat, ni le chien, ni le singe, ni le cheval, ni la voiture,


etc n’a la personnalité juridique, en ce sens qu’ils ne sont pas des
sujets de droit. Ils font partie des biens qui forment le patrimoine
des personnes juridiques auxquelles ils appartiennent.

La personnalité juridique des personnes physiques (&1) est distincte


de celle des personnes morales (&2).

PARAGRAPHE 1 : LES PERSONNES PHYSIQUES

En droit ivoirien, tous les êtres humains sans exception, sans


distinction de sexe, de race, de nationalité, d’ethnie ou de religion,
sont des personnes juridiques. En conséquence, ils ont tous la
personnalité juridique. Toutefois, certaines questions méritent
d’être posées :

- Quand commence la personnalité juridique des personnes


physiques ? (A)
- A quel moment prend-elle fin ? (B)

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 60


La personnalité juridique est une spécificité commune à tous les
êtres humains. Mais en droit, certains éléments permettent de
distinguer un individu des autres.

- Quels sont les éléments juridiques qui permettent


d’identifier les individus les uns des autres ? (C)

A- LE COMMENCEMENT DE LA PERSONNALITE
JURIDIQUE DES PERSONNES PHYSIQUES

1- LE PRINCIPE : LA NAISSANCE

En principe, la personnalité juridique des personnes physiques débute


à leur naissance. En fait, tout être humain acquiert la personnalité
juridique à sa naissance. Mais, la naissance seule ne suffit pas.

Ainsi, pour qu’une personne physique ait la personnalité juridique, il


faut que les trois (3) conditions cumulatives suivantes soient
réunies :

- L’enfant doit naître : La naissance, c’est lorsque l’enfant sort


du fœtus de sa génitrice. La naissance matérielle de l’enfant
doit être prouvée juridiquement en établissant son extrait de
naissance. Sans ce document, bien que l’enfant possède la
personnalité juridique par sa naissance, il ne pourra pas exercer
certains droits qui lui sont reconnus.

- Il doit naître vivant : Est né vivant l’enfant qui respire après


l’accouchement. Ainsi, le mort-né n’a pas la personnalité
juridique.

- Il doit naître viable : Est viable l’enfant qui dispose des


organes nécessaires à la vie suffisamment constitués pour lui
permettre de vivre après sa naissance.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 61


En somme, il faut dire que la naissance est le point de départ de la
personnalité juridique des personnes physiques. Toutefois, la
personnalité juridique peut remonter à la période prénatale, c’est-
à-dire avant la naissance biologique.

2- L’EXCEPTION : LA FORMATION DE L’EMBRYON HUMAIN

Le droit valide l’hypothèse de la personnalité juridique anticipée à


la naissance. L’embryon humain désigne le produit de la conception
humaine pendant les 3 premiers mois de la grossesse.

En effet, le droit admet qu’exceptionnellement l’enfant simplement


conçu a la personnalité juridique, quand il y va de son intérêt. Cette
exception est traduite par la règle ‘‘Infans conceptus pro nato
habetur quoties de commodis ejus agitur’’.

La règle Infans conceptus…, signifie que l’enfant simplement conçu


est considéré comme né chaque fois que cela peut lui apporter un
avantage. Cet avantage peut être par exemple : Recueillir la
succession de son père décédé avant sa naissance.

NB : La loi fait remonter le début de la personnalité juridique à la


conception, uniquement dans l’intérêt de l’enfant. C’est-à-dire,
l’existence d’un avantage que doit avoir l’enfant non encore né,
constitue la condition essentielle pour appliquer la règle Infans
conceptus.

De ce qui précède, la question de la preuve de la date de conception


de l’enfant se pose.

- Comment détermine t- on le moment de la conception de


l’enfant ?

La conception, ou fécondation c’est l’union des cellules mâles et


femelles pour produire l’embryon humain qui devient fœtus à partir
du 4e mois de la grossesse.
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 62
Pour déterminer la période de conception d’un enfant, la loi présume
que la durée normale de la grossesse est enfermée dans la période
qui va du 300ème jour, jusqu’au 180ème jour avant la naissance.

Il faut retenir que cette présomption est simple et non irréfragable.


Est irréfragable la présomption contre laquelle on ne peut apporter
aucune preuve contraire.

Ainsi, la période légale de conception (PLC) de l’enfant se situera


dans la période de 120 jours située entre le 300ème et le 180ème jour
avant sa naissance. C’est-à-dire, la loi présume que c’est à une date
dans l’intervalle des 120 jours que l’enfant a été conçu.

En pratique, pour déterminer les 120 jours, considérés comme étant


la période légale de conception, il faut partir de la date de naissance
de l’enfant puis, compter à reculons jusqu’à 180 jours et 300 jours,
avant la naissance. Il faut ensuite compter 120 jours dans cette
période, en partant du 300e jour jusqu’au 180e jour.

CAS PRATIQUE : Sieur KENEUR, est décédé le 15 octobre 2013.


Ses enfants ont résolus de se partager les biens qu’il a laissés après
les fêtes de fin d’année 2014. Le partage de ces biens a eu lieu le 03
janvier 2015.

KENEUR GUTEMBERT, l’aîné de la Famille KENEUR a demandé à ses


frères de réserver la BMW glauque, familiale, break, double
échappement, avec 2 portières, à leur benjamin, SCHIPPEUR
KENEUR, non encore né. Cette demande a été contestée par la
plupart des membres de la Famille KENEUR.

TAF : En tant que juriste, un des contestataires, KENEUR COLARD


vous pose la question suivante : Le jeune SCHIPPEUR KENEUR né le
15 janvier 2015 peut –il juridiquement avoir droit à une partie des
biens laissés par notre père défunt ?

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 63


Comme toute chose a une fin, la personnalité juridique en a une.

B- LA FIN DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE

La personnalité juridique prend fin en principe à la mort de l’être


humain. Toutefois, il peut arriver que la mort de l’individu soit
incertaine, compte tenu des circonstances et évènements qui
entourent cette situation, pouvant laisser à la personne la possibilité
de survie. Ainsi, il est intéressant d’envisager la fin de la
personnalité juridique en cas d’incertitude sur l’existence de la
personne.

1- LE PRINCIPE : LE DECES

La personnalité juridique de la personne physique prend fin au décès


de la personne. Ainsi, c’est la mort physique, biologique qui marque la
fin de la personnalité juridique. La mort est définie comme la
cessation de la vie, manifestée par l’arrêt cardiaque et respiratoire
complet et définitif. La preuve juridique de la mort est donnée par
l’établissement d’un certificat de décès.

NB : La mort entraîne sans conteste la perte de la personnalité


juridique, mais le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la
mort. C’est pourquoi, les restes des personnes décédées, doivent être
traités avec respect et dignité ; et que, la loi prévoit des sanctions
pénales contre ceux qui portent atteinte à la mémoire des morts.

2- LA FIN DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE EN CAS


D’INCERTITUDE SUR L’EXISTENCE DE LA PERSONNE

Des doutes sur l’existence d’une personne naissent lorsqu’en raison


de certains évènements, on ne sait pas si elle est encore vivante ou si
elle est morte. Ces incertitudes se présentent en cas d’absence ou
de disparition de la personne.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 64


Il importe d’examiner comment le droit envisage la fin de la
personnalité juridique dans ces deux (2) cas de figure.

a) L’ABSENCE

L’absence est régie par les articles 112 et suivants du Code civil.

Selon les termes de l’article 115 du Code Civil, l’absence, c’est la


situation d’une personne qui a cessé de paraître à son domicile ou à
sa résidence, depuis quatre (4) ans, et dont on n’a aucune nouvelle,
alors même qu’aucun évènement particulier ne présume sa mort, de
sorte que l’on ignore si elle est encore en vie où elle est décédée.

La situation juridique d’absence se distingue de la non-présence qui


est le cas d’une personne dont on est sûr de son existence, mais qui,
pour une quelconque raison, reste éloignée de chez elle. Ainsi, les
situations d’exil ne correspondent pas à l’absence au sens du droit.

Lorsque la situation d’une personne correspond à l’absence juridique


telle que précédemment définie, les parties intéressées (les
héritiers) peuvent par une requête saisir le tribunal de première
instance, afin que son absence soit déclarée.

Pour constater l’absence du supposé absent, le tribunal ordonne une


enquête, menée de façon contradictoire avec le Procureur de la
République au lieu du domicile et dans celui de la résidence du
présumé absent, s’ils sont distincts l’un de l’autre. Le jugement de
déclaration d’absence du T.P.I ne sera rendu qu’un an après le
jugement qui a ordonné l’enquête.

Certains effets juridiques font suite au prononcer de la déclaration


d’absence par le tribunal. Ils sont relatifs au sort de la famille de
l’absent (a1) d’une part, et d’autre part, à la condition de ses biens
pendant son absence (a2).

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 65


a1) LES EFFETS DE L’ABSENCE RELATIVEMENT A LA FAMILLE
DE L’ABSENT

- Le mariage de l’absent : Si l’absent est marié, son mariage


n’est pas dissout. Ainsi, son mariage durera aussi longtemps que
durera l’absence. Son conjoint ne peut pas divorcer, et donc il
ne peut pas se remarier : On dit que l’absence n’est pas une
cause légale de divorce.

De ce qui précède, si l’absent revient et que son conjoint s’est


remarié, il demandera et obtiendra du juge l’annulation de cette
nouvelle union pour bigamie, conformément aux dispositions de
l’article 139 de la loi civile sur l’absence.

- La situation des enfants : Les enfants nés pendant l’absence,


bénéficient en général, de la présomption de paternité,
traduite par la règle ‘‘Pater is est quem nuptiae demonstrant’’
(Littéralement, « Le père est celui que les noces démontrent »),
selon laquelle tous les enfants nés d’une femme mariée, ont pour
père, le mari de leur mère. Ainsi, ces enfants sont considérés
comme les enfants de l’absent à titre putatif; sauf s’il intente
une action judiciaire en désaveu ou en contestation de
paternité à son retour.

Toutefois, les enfants nés du second mariage du conjoint, conservent


la légitimité issue de ce nouveau mariage.

Qu’en est-il de la situation des biens de l’absent ?

a2) LES EFFETS DE L’ABSENCE RELATIVEMENT AUX BIENS


DE L’ABSENT

Le sort des biens de l’absent diffère selon la durée de l’absence.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 66


En fait, la loi prévoit trois (3) périodes ou étapes à observer dans la
gestion des biens d’une personne présumée absente :

-La période de présomption d’absence,

-La période après le jugement déclaratif d’absence,

-La période d’envoi en possession définitif.

 La période de présomption d’absence :

C’est le temps qui court depuis les dernières nouvelles du présumé


absent jusqu’à dix (10) ans, suivant les termes de l’article 121 de la
loi civile sur l’absence, si celui-ci a laissé un mandataire pour gérer
ses biens. Cette période est réduite à quatre (4) ans, s’il n’a prévu
personne pour le faire. Dans ce dernier cas, c’est le Tribunal de
Première Instance qui désigne un mandataire chargé de gérer les
biens du présumé absent.

NB : Pendant cette période, des mesures conservatoires sont prises


pour protéger les biens du présumé absent, dans l’attente d’un
éventuel retour.

Au terme de ces délais, (4 ans et 10 ans) selon le cas, le tribunal de


première instance peut, à la demande des intéressés (Les membres
de la famille) ou du Ministère public (Le Procureur de la République),
prononcer un jugement déclaratif d’absence, qui constitue en
réalité, le point de départ de la seconde étape de la gestion
juridique de l’absence.

 La période d’absence déclarée :

Le jugement déclaratif d’absence produit les effets du décès.


Ainsi, cette période laisse libre cours au tribunal de procéder à une
répartition des biens de l’absent entre les personnes qui, s’il était
mort, auraient été appelées à sa succession.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 67


Ces héritiers présumés ne reçoivent que la jouissance de ces biens ;
à charge pour eux de les gérer et de les restituer au retour de
l’absent : On parle d’envoi en possession provisoire des biens de
l’absent.

 La période d’envoi en possession définitif :

Suivants les dispositions de l’article 129 du Code civil, « Si


l’absence a duré pendant trente (30) ans depuis l’envoi provisoire, ou
s’il s’est écoulé cent (100) ans révolus depuis la naissance de l’absent,
les ayants-droit pourront demander le partage des biens de
l’absent, et faire prononcer l’envoi en possession définitif par le
tribunal de première instance. »

En termes plus simples, 30 ans après le jugement déclarant l’absence


ou 100 ans, après la naissance de l’absent, si celui-ci ne fait pas
signe de vie, ses biens sont définitivement répartis par le tribunal
entre ses ayants-droits, à leur demande. On parle d’envoi en
possession définitif des biens de l’absent. Les héritiers deviennent
définitivement propriétaires des biens de l’absent.

NB : Si l’absent réapparaît, ou si son existence est prouvée, même


après l’envoi définitif, il recouvrera ses biens dans l’état où ils se
trouveront, le prix de ceux qui auraient été aliénés, ou les biens
provenant de l’emploi qui aurait été fait du prix de ses biens vendus.

Le régime juridique de l’absent est différent de celui du disparu.

b) LA DISPARITION

La disparition est, selon les dispositions de l’article 64 de la loi


relative à l’état civil, la situation d’une personne que l’on a plus revue
dans des circonstances de nature à mettre sa vie en danger, mais
dont le corps n’a pu être retrouvé.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 68


Par exemple : Le cas d’un individu qui n’est plus réapparu lors d’une
baignade dans un cours d’eau dans lequel se trouvent des caïmans.
C’est aussi le cas d’une personne dont le corps n’a pu être retrouvé
après un tremblement de terre, un crash d’avion, etc.

De ce qui précède, il faut retenir que pour qu’il y ait disparition, les
deux (2) conditions suivantes doivent être réunies :

- Les évènements qui entourent la disparition doivent être de nature


à mettre gravement en danger de mort la vie du disparu.

- Le corps du disparu ne doit pas avoir été retrouvé.

En cas de disparition, tout membre de la famille du disparu ou le


Procureur de la République peut soumettre une requête au juge, afin
d’obtenir un jugement déclaratif de décès.

Il convient de préciser que c’est le tribunal du lieu de la disparition


qu’il faut saisir, si la victime réside en Côte d’Ivoire. Si l’évènement
s’est plutôt produit à l’étranger, c’est le tribunal de son domicile ou
de sa dernière résidence, qui est saisi de l’action.

Par ailleurs, le jugement déclaratif de décès tient lieu d’acte de


décès. Dès lors, il ouvre la succession du disparu et entraîne la
dissolution de son mariage. Son épouse pourra donc se remarier.

NB : Le droit envisage un éventuel retour du disparu. Ainsi, en cas


de réapparition du disparu, celui-ci demandera l’annulation du
jugement déclaratif de décès en vue de rétablir sa personnalité
juridique. Après quoi, il pourra recouvrer la propriété de ce qui
reste de ses biens ; ses héritiers ont l’obligation de lui restituer les
biens reçus. De même, il peut demander l’annulation du second
mariage de son conjoint, si elle s’est remariée, puis reprendre sa vie
conjugale.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 69


Dans toutes ces démarches, le disparu devra donner la preuve de
son identité.

C- L’IDENTIFICATION DES PERSONNES PHYSIQUES

Le droit prévoit essentiellement trois (3) éléments qui permettent


d’identifier un individu des autres. Ce sont :

- Le nom et le ou les prénoms,


- Le domicile,
- La nationalité.

1- LE NOM ET LE PRENOM
a) LE NOM

Le nom est l’appellation qui sert à désigner une personne et à


l’individualiser dans la vie sociale.

Tout individu possède un nom. Généralement, on assimile le nom à


celui de la famille ou nom patronymique. La plupart du temps, à sa
naissance, l’enfant porte le nom patronymique. En effet, selon les
dispositions de l’article 6-1 de la Charte Africaine sur les Droits
et le Bien-être de l’Enfant, adoptée en juillet 1990, « Tout enfant a
droit à un nom dès sa naissance. » Le nom est dès lors, un droit
subjectif pour celui qui le porte. A cet égard, il bénéficie d’un régime
de protection.

Le nom est en principe immuable, c’est-à-dire, qu’il ne peut être


changé. Toutefois, cela n’est possible que dans des hypothèses
exceptionnelles.

-Quelles sont les règles d’attribution du patronyme ?

-Dans quelles circonstances le changement du patronyme est –il


possible ?

-Quel est le régime juridique de protection du nom ?


J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 70
a1) L’ATTRIBUTION DU NOM PATRONYMIQUE

On porte le nom de la famille à laquelle on appartient. Ce nom


s’attribue normalement par la filiation, c’est-à-dire au regard du lien
de paternité ou de maternité.

Ainsi, l’enfant né dans une famille où les 2 parents sont légalement


mariés, (Enfant légitime) porte le nom du mari de sa mère. En ce qui
concerne l’enfant né hors mariage, (Enfant naturel), il porte le nom
du père, si celui-ci l’a reconnu. Dans le cas où il n’a été reconnu que
par sa mère, il portera le nom de sa mère, auquel s’ajoutera celui du
père, s’il venait à le reconnaître par la suite. Dans ce cas, l’enfant
portera un nom patronymique double.

Ces situations se rencontrent dans les relations entre concubins ou


entres fiancés.

Par exemple : Mlle Parfaite a pour mère ALOMA Hélène. Puisqu’elle n’a
pas été reconnue par son père, elle porte le patronyme de sa mère.
Elle s’appelle ALOMA Parfaite. Si par la suite, M. ZAZOU, son géniteur
la reconnaît, alors, elle s’appellera ALOMA ZAZOU Parfaite.

Mlle Parfaite ne peut porter le seul nom de son père, après sa


reconnaissance, qu’avec l’accord de sa mère. Dans ce cas, elle
s’appellera ZAZOU Parfaite.

NB : Lorsque l’enfant naturel est adultérin, d’un adultère de sa


mère, (Enfant adultérin a matre) il est fait application du principe
pater is est quem nuptiae demontrant. Il porte en principe le nom du
mari, à moins que celui-ci désavoue cet enfant.

Lorsque l’enfant est adultérin par son père, (Enfant adultérin a


patre), il ne pourra porter le nom de celui-ci que s’il obtient le
consentement exprès de son épouse pour qu’il le reconnaisse.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 71


a2) LE CHANGEMENT DU PATRONYME

Le nom patronymique peut être changé dans les situations


suivantes :

- En cas d’adoption plénière. L’adopté prend le nom de


l’adoptant.
- En cas de désaveu de paternité. L’enfant désavoué prend le
nom de sa mère.
- En cas de mariage. La femme mariée a droit d’usage du nom
de son mari.

Par exemple : Mme KOKOTA née GARBA Coqueline ou GARBA


Coqueline épouse KOKOTA.

a3) LA PROTECTION DU NOM

Le titulaire d’un nom patronymique a le droit de le défendre contre


l’usurpation des tiers et contre son usage commercial, littéraire ou
artistique. La loi prévoit que le porteur d’un nom patronymique ou ses
descendants, même s’ils ne portent pas eux-mêmes ce nom, puissent
s’opposer à ce qu’il soit utilisé par un tiers à quelque titre que ce soit.

b) LE PRENOM

Le prénom est librement choisi. Toutefois, en Côte d’Ivoire, seuls les


prénoms qui figurent sur les calendriers ou ceux qui sont consacrés
par les usages et la tradition, sont admis.

Par exemple : Mireille, Fatou, Kipré, Affoué, Yapo, Kousso, Michelle,


etc.

Le prénom peut être changé lorsqu’un intérêt légitime le justifie.


Cet intérêt peut résulter soit, d’une adoption, ou d’un changement de
sexe (cas de pratique transsexualiste), ou encore en raison du
caractère ‘‘ridicule’’ du prénom.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 72


Par exemple : Dagobert, Rigobert, Camembert, Gutembert, etc.

Le prénom n’est protégé que lorsqu’il est usurpé en même temps que
le patronyme.

b1) LES ACCESSOIRES DU PRENOM

Les accessoires du prénom se composent des particules, des titres


de noblesse, des pseudonymes et des surnoms.

- La particule : c’est un mot qui est placé avant ou après certains


noms patronymiques.

Par exemple : Oi, (N’GOUAN Oi), Bi, (Tra Bi), Lou (Bognon Lou), Kan,
(Koffi Kan), Mah, (Traoré Mah), etc.

- Les titres de noblesse : Ce sont des accessoires honorifiques


du nom patronymique.

Par exemple : Nanan, Sa majesté, Son altesse, l’Honorable, etc.

- Le surnom : C’est l’appellation donnée à une personne par son


entourage et sous laquelle cette personne est en fait connue.

Par exemple : Ouédraogo alias Alcapone, Séry dit le gros, Koffi, dit
Envahisseur.

- Le pseudonyme : C’est un nom de fantaisie ou d’emprunt choisi


par une personne dans l’exercice d’une activité particulière, et
qui est utilisé pour masquer sa véritable identité.

Par exemple : Alpha Blondy, pour masquer Koné Seydou, Molière,


s’appelle Jean-Baptiste Poquelin, etc.

En plus du nom, toute personne a un domicile.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 73


2- LE DOMICILE

CAS PRATIQUE : M. FAROTEUR travaille à Korhogo, puis sa famille


est à KPAPEKOU. Et, pendant ses congés, il va à TIPA-TIPA où il se
repose de toute activité chez son cousin KONGONDET. Il faut savoir
qu’il a une plantation de palmiers à huile à Fresco, où il séjourne des
fois.

TAF : Précisez le domicile, l’habitation et la résidence de M.


FAROTEUR ?

En droit, le domicile revêt certains caractères ; aussi, son choix


emporte t –il des intérêts particuliers qu’il convient d’étudier.

Le domicile est le lieu du principal établissement d’une personne. Il


est différent de la résidence et de l’habitation.

L’habitation est le lieu d’un séjour bref et occasionnel. La résidence


est l’endroit où une personne vit de façon habituelle. Une personne
peut avoir plusieurs résidences.

a) LES CARACTERES DU DOMICILE

Le domicile a deux traits caractéristiques. En effet, le domicile est


obligatoire et unique. En fait, toute personne a nécessairement un
domicile. Et, elle ne peut avoir qu’un seul domicile, même si elle peut
avoir plusieurs résidences.

Par ailleurs, le domicile peut être qualifié d’apparent, de réel ou de


domicile élu. Ainsi, lorsqu’une personne choisit temporairement un
domicile dans un lieu autre que son domicile réel. On parle de domicile
élu. C’est le cas quand, à l’occasion de certains actes (une action en
justice par exemple), une personne peut élire domicile dans une autre
localité.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 74


Le domicile réel est le lieu où une personne a effectivement ses
centres d’intérêts (Sa femme, ses enfants, son travail). Alors que le
domicile apparent est le lieu où, aux yeux des tiers, une personne
semble avoir son domicile.

En définitive, le domicile est librement choisi par chaque personne.


On dit que le domicile est volontaire.

b) LE CHOIX ET LES INTERÊTS DU DOMICILE

En dépit de son caractère libre, la loi impose le domicile à certaines


personnes. C’est le cas des fonctionnaires ou agents de l’Etat, des
magistrats, etc. dont le domicile est fixé par la loi au lieu où ils
exercent leur profession.

C’est aussi le cas pour les enfants mineurs non émancipés. Leur
domicile est celui de leurs parents. En ce qui concerne la femme
mariée, la loi précise que son domicile est celui de son mari. Les
serviteurs et les servantes de maison ont pour domicile, celui de
leur employeur, quand ils vivent avec ce dernier.

Le domicile ainsi défini revêt plusieurs intérêts.

Il permet de rattacher géographiquement une personne à un lieu


précis et de déterminer la compétence territoriale des tribunaux,
ainsi que l’officier de l’état civil compétent.

Par exemple : Pour exercer une action en justice, le tribunal


compétent territorialement est celui du lieu où le défendeur est
domicilié, sauf exception.

Pour la célébration du mariage, c’est l’Officier de l’état civil du lieu


où résident les futurs époux, qui est compétent.

3- LA NATIONALITE

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 75


La nationalité est le lien juridique qui rattache une personne
physique ou morale à un Etat souverain.

Parlant de la nationalité des personnes physiques, retenons qu’en


principe, tout individu doit avoir une nationalité. Mais
exceptionnellement, certaines personnes n’ont pas de nationalité. Ce
sont les apatrides. On les désigne aussi par le terme Heimatlos.
Cette situation résulte généralement de la perte de la nationalité
d’origine, sans acquisition d’une nouvelle nationalité.

Selon la Charte Africaine sur les Droits et le Bien-être de


l’Enfant, en son article 6-3, « Tout enfant a le droit d’acquérir une
nationalité ».

Aujourd’hui, la Nationalité ivoirienne est règlementée par la loi n°


61-415 du 14 décembre 1961 portant Code de la Nationalité,
modifiée par la loi n°72-852 du 21 décembre 1972.

La population qui vit sur le territoire ivoirien est composée de


nationaux et d’étrangers. Les Nationaux sont rattachés à l’Etat de
Côte d’Ivoire par la nationalité ; tandis que les étrangers sont des
personnes ayant la nationalité d’un autre Etat.

Quel est le régime juridique d’octroi de la nationalité ivoirienne ?

Les règles concernant la nationalité ivoirienne distinguent la


nationalité ivoirienne d’origine, des divers modes d’acquisition de
cette nationalité. Il faut aussi souligner que l’on peut perdre la
nationalité ivoirienne sous certaines conditions.

a) LA NATIONALITE IVOIRIENNE D’ORIGINE

Généralement, la nationalité d’origine est établie soit par la


filiation, soit, par le lieu de naissance. Il s’agit-là d’une distinction
traditionnelle entre le droit du sang ou jus sanguinis, qui attribue à

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 76


l’enfant la nationalité de ses parents ou de l’un d’eux, et le droit du
sol ou jus soli, qui lui attribue la nationalité du pays sur le territoire
duquel il est né.

Il peut arriver qu’un Etat applique ces deux systèmes à la fois. C’est
le cas de la France.

En ce qui concerne le droit ivoirien actuel de la nationalité, il ne


retient que le jus sanguinis, c’est-à-dire, l’attribution de la
nationalité d’origine par le sang. Ainsi, la qualité d’ivoirien d’origine
résulte uniquement de la filiation. C’est-à-dire, est ivoirien d’origine
celui qui est né d’un père ou d’une mère ivoirien quelque soit son lieu
de naissance.

Par exemple : Un enfant né en Chine dont le père ou la mère est


ivoirien, est ivoirien d’origine de par le parent qui est ivoirien.

Un individu qui n’est pas ivoirien d’origine peut acquérir la nationalité


ivoirienne selon certains mécanismes juridiques.

b) LES AUTRES MODES D’ACQUISITION DE LA


NATIONALITE IVOIRIENNE

La personne qui n’est pas ivoirienne d’origine, peut acquérir la


nationalité ivoirienne de plein droit ou par décision de l’autorité
publique.

b-1) ACQUISITION DE LA NATIONALITE DE PLEIN DROIT


On distingue ici deux modes d’acquisition de la nationalité
ivoirienne : L’acquisition par l’adoption, et l’acquisition par le
mariage.

 Acquisition par l’adoption


Aux termes de l’article 11 du Code de la nationalité, l’enfant qui
fait l’objet d’une adoption, acquiert la nationalité ivoirienne si l’un au
moins des adoptants est ivoirien.
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 77
 Acquisition par le mariage
Le Code de la nationalité ivoirienne, notamment en ses articles 12,
13 et 14 combinés, prescrit que la femme étrangère qui épouse un
ivoirien, acquiert la nationalité ivoirienne au moment de la
célébration du mariage, à moins qu’elle ne la décline antérieurement
à la célébration du mariage ou que dans les six (6) mois qui suivent
cette célébration, le Gouvernement ne s’y oppose par décret pris sur
rapport commun des ministres de la Justice, de l’Intérieur, de la
Santé et de la Population.

L’article 15 de la même loi stipule que : « Lorsque le mariage a été


célébré à l’étranger, le délai de six mois ne court qu’à dater du jour
de la transcription de l’acte de mariage sur les Registres de l’état
civil des agents diplomatiques ou consulaires ivoiriens. »

Il sied de souligner que le mode d’acquisition de la nationalité par le


mariage, concerne exclusivement la femme étrangère qui se marie
avec un ivoirien. Quant à l’homme étranger, il doit recourir à la
naturalisation pour devenir ivoirien.

La nationalité ivoirienne peut aussi s’acquérir par décision de


l’autorité publique.

b-2) ACQUISITION DE LA NATIONALITE PAR DECISION DE


L’AUTORITE PUBLIQUE
Ce mode d’acquisition de la nationalité s’exerce de deux (2) façons :
la naturalisation d’une part et d’autre part, la réintégration, suivant
l’article 24 du Code de la nationalité.

 LA NATURALISATION

La naturalisation est l’octroi de la nationalité à titre individuel par


décret et de manière discrétionnaire à un étranger qui en fait la
demande et sous certaines conditions exigées par la loi, aux termes

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 78


des dispositions de l’article 25 et suivants du Code de la nationalité
ivoirienne.

NB : C’est une pratique qui a cours en Côte d’Ivoire depuis la loi de


1972. C’est ainsi que le 4 févier 1987, par décret n° 87-148, M.
Camara Moussa et son épouse ont été naturalisés ivoirien.
Cf. JORCI n°43 de la trente-huitième année, paru le 24 octobre 1996, P.988.

La naturalisation emporte généralement l’abandon de la nationalité


d’origine.

C’est le cas pour Monsieur DOLO Adama dit Adama Dahico


(Humoriste) qui, par sa naturalisation a désormais la nationalité
ivoirienne en lieu et place de sa nationalité malienne d’origine.

Les principales conditions exigées par la législation ivoirienne en


vue de l’octroi de la nationalité ivoirienne à l’étranger qui en fait la
demande à l’Etat sont :

- L’intéressé doit avoir sa résidence habituelle en Côte d’Ivoire


au moment de la signature du décret de naturalisation, aux
termes de l’article 25 al.2 du Code de la nationalité.
- Le demandeur doit avoir eu sa résidence habituelle en Côte
d’Ivoire pendant les cinq (5) années précédant sa demande. Cf.
article 26 du Code de la nationalité.

NB : Dans certains cas, le stage de cinq ans est réduit à deux ans.
Notamment, c’est le cas pour l’étranger né en Côte d’Ivoire ou marié
à une ivoirienne ainsi que de celui qui a rendu des services importants
à la Côte d’Ivoire…etc selon les termes de l’article 27 du Code de la
nationalité.

- Le demandeur doit avoir atteint l’âge de 18 ans à la date de sa


demande. (Article.29 Code de la nationalité ivoirienne)
- L’intéressé doit être de bonne vie et mœurs (Article31 Code
Nationalité Ivoirienne.)

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 79


- Le demandeur doit être sain d’esprit et jouir d’un état de santé
physique parfait. (Article 32 al.1et 2 du Code de la
nationalité.)

 LA REINTEGRATION

La réintégration suppose pour l’intéressé qu’il a antérieurement eu la


nationalité ivoirienne et qu’il l’a perdue. C’est donc un retour dans la
nationalité ivoirienne.

c) LA PERTE DE LA NATIONALITE IVOIRIENNE

Il faut d’emblée préciser que, le législateur ivoirien en ce qui


concerne la perte de la nationalité, a fait la distinction entre
l’Ivoirien d’origine et l’Ivoirien qui a acquis la nationalité ivoirienne.

C’est pourquoi, on qualifie de perte de la nationalité, quand il s’agit


d’un Ivoirien d’origine, et on parle de déchéance pour l’individu qui a
acquis la nationalité.

c-1) LA PERTE DE LA NATIONALITE PAR L’IVOIRIEN A TITRE


ORIGINAIRE.
Les articles 48 et suivants du Code de la nationalité traitent de
cette question.

Aux termes de ces dispositions, l’ivoirien d’origine peut perdre cette


qualité dans les cas suivants :

 Abandon volontaire de la nationalité ivoirienne pour acquérir


une nationalité étrangère. (Article 48)
Dans ce cas, la perte de la nationalité ivoirienne est subordonnée à
l’autorisation du Gouvernement par décret, qui intervient au bout d’un
délai de quinze ans à compter de l’inscription du concerné sur les
tableaux de recensement du pays étranger.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 80


 En cas de cumul de nationalité ou encore, double nationalité
(article 49 nouveau). L’intéressé peut être autorisé par décret
à perdre la qualité d’ivoirien.
NB : Même l’enfant mineur qui possède de plein droit une double
nationalité par l’effet d’une loi étrangère, peut aussi être autorisé à
perdre la nationalité ivoirienne.

 Lorsqu’un ivoirien occupe un emploi dans un service public d’un


Etat étranger ou dans une armée étrangère (article 53).
L’intéressé peut être déclaré d’office avoir perdu la nationalité
ivoirienne, s’il n’a obtempéré dans un délai de six mois à l’injonction à
lui faite par le gouvernement de résigner cet emploi.

 La femme ivoirienne qui se marie avec un étranger.


Aux termes de l’article 51 du Code de la nationalité ivoirienne, la
femme ivoirienne qui épouse un Étranger conserve en principe, la
nationalité ivoirienne. Cependant, elle perd la qualité d’ivoirienne si
elle répudie expressément la nationalité ivoirienne avant la
célébration de son mariage avec l’étranger.

c-2) LA DECHEANCE DE LA NATIONALITE IVOIRIENNE

La déchéance de la nationalité ivoirienne est la perte de la


nationalité imposée par l’Etat à titre de peine, uniquement aux
ivoiriens qui ont acquis la nationalité par décision de l’autorité,
dans certains cas d’indignité.

Par exemple : Un individu devenu Ivoirien par naturalisation, porte


une bombe en tant que kamikaze au profit d’une organisation
terroriste pour la faire exploser dans un pays étranger.

PARAGRAPHE 2 : LES PERSONNES MORALES

A- DEFINITION ET CATEGORISATION DES


PERSONNES MORALES

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 81


1- DEFINITION

Les personnes morales sont des groupements de personnes et de


biens auxquels est conférée une personnalité juridique distincte de
celle des membres. En fait, la loi permet à plusieurs personnes de
s’associer dans le cadre d’un groupement auquel pouvoir est reconnu
d’accomplir des actes de la vie juridique. Cela signifie que, du point de
vue juridique, ce groupement est pris comme une personne distincte
des individus qui le composent.

En clair, la personne morale, est un groupement de personnes à qui la


loi reconnaît la personnalité juridique, c’est-à-dire, l’aptitude à être
titulaire de droits et à assumer des obligations. La personnalité
juridique de la personne morale est désignée par personnalité
morale.

En tant qu’acteur de la vie juridique, la personne morale a des biens


qui sont distincts de ceux de chacun de ses membres. Dans la
pratique, la personne morale a nécessairement son patrimoine propre
et partant, un actif et un passif qui lui sont propres et qui ne se
confondent pas avec ceux de ces membres. On parle de l’autonomie
patrimoniale de la personne morale.

Il importe de préciser toutefois, qu’en matière de société


unipersonnelle, (celle dans laquelle une seule personne physique ou
morale apporte toute seule le capital social), on fait application du
principe de l’unicité du patrimoine. C’est-à-dire, le patrimoine de
l’associé unique n’est pas distinct des biens de la personne morale
sociétaire.

NB : La personne morale n’a pas d’existence réelle comme les


personnes physiques. Et, la personne morale accède à la vie par la
volonté des personnes physiques ou d’autres personnes morales.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 82


Par exemple : Les associations, les sociétés, les syndicats, etc.
naissent à travers un artifice juridique selon la volonté de leurs
créateurs.

Il existe plusieurs personnes morales regroupées en différentes


catégories, qu’il convient d’étudier à présent.

2- LES DIFFERENTES CATEGORIES DE PERSONNES MORALES

On sépare traditionnellement les personnes morales qui relèvent du


droit public de celles qui sont soumises au droit privé. Autrement dit,
certaines personnes morales sont de droit public, d’autres sont de
droit privé. De plus en plus, des personnes morales de droit mixte
connaissent le jour.

a) LES PERSONNES MORALES DE DROIT PUBLIC

Ce sont celles qui sont régies par les règles du droit public. Sont
considérés comme personnes morales de droit public :

 L’Etat
 Les Collectivités locales ou publiques : Ce sont les
démembrements de l’Etat. Il s’agit des Régions, des
Départements, des Communes.
 Les Etablissements Publics : Encore, appelés Services Publics,
ce sont des entités juridiques créées spécialement par les
pouvoirs publics, pour gérer des activités d’intérêt général. on
en distingue deux (2) types :

-Les Etablissements ou Services publics administratifs (EPA ou


SPA).

L’EPA ou le SPA est chargé de la gestion d’une activité de service


public administratif.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 83


Par exemple : Les hôpitaux, les Universités, l’Office national des
sports (O.N.S), le Commissariat, les lycées, l’ANADER, le Centre
ivoirien antipollution (CIAPOL), etc.

-Les Etablissements ou Services publics industriels et


commerciaux (EPIC ou SPIC). Ils gèrent les activités publiques à
caractère industriel et commercial.

Par exemple : La SOTRA, service de transport public, La SODECI,


service de production et de distribution d’eau, etc.

b) LES PERSONNES MORALES DE DROIT PRIVE

Les personnes morales de droit privé sont celles qui relèvent du droit
privé, notamment, du droit civil, commercial et d’autres lois
particulières. Certains ont un but lucratif, d’autres non. Ce sont :

 Les personnes morales à but non lucratif : Leur but est autre
que le lucre, l’argent. On les regroupe en deux (2) catégories :

- Les groupements de personnes : On en dénombre plusieurs : Il


y a les groupements d’intérêts moraux (Associations, ONG,
Syndicats), les groupements d’intérêts politiques (Partis
politiques).

-Les groupements de biens : Il s’agit singulièrement de la


Fondation qui est une masse de biens dotée de la personnalité morale
qu’un individu affecte à une œuvre d’intérêt général ou à un but
charitable.

Par exemple : La Fondation Félix Houphouët Boigny pour la


Recherche de la paix, la Fondation NOBEL, la Fondation Didier
DROGBA, etc.

 Les personnes morales de droit privé à but lucratif

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 84


Les groupements à but lucratif sont ceux créés en vue de réaliser un
profit, un gain financier. Leur finalité, leur objectif est
l’enrichissement de leurs membres. Les personnes morales qui ont un
but lucratif sont des sociétés. Il y en a deux (2) types : la société
commerciale et la société civile.

La société est soit commerciale par la forme : la Société


Anonyme (S.A), la société en commandite simple (S.C.S), etc soit
commerciale par son objet.

Dans ce dernier cas, l’on fait référence à la nature commerciale de


l’activité qu’elle exerce. Aussi, faut-il préciser, qu’une société de
forme commerciale peut exercer une activité civile. On dit que cette
société est commerciale par la forme et civile par son objet.

Par exemple : Plusieurs Médecins associés créent une Société à


responsabilité limitée (SARL) dont l’objet est la consultation et
l’administration de soins médicaux aux patients.

La société est civile quand la loi ne lui attribue pas un autre


caractère à raison de sa forme, son objet et de sa nature.

Par exemple : La société civile professionnelle d’Avocats, (SCPA) de


médecins, la société civile agricole, artisanale, etc.

Outre les sociétés, il faut inclure parmi les personnes morales


privées à but lucratif, les groupements d’intérêt économiques.
(GIE). Le GIE est un groupement de personnes physiques ou morales
qui a pour but de faciliter ou de développer l’activité économique de
ses membres, d’améliorer ou d’accroître les résultats de cette
activité.

c) LES PERSONNES MORALES DE DROIT MIXTE

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 85


Ce sont des personnes morales de droit public en principe ; mais,
soumises aux règles du droit privé, en raison de la participation de
personnes privées à leur création. Il s’agit des Sociétés d’Economie
Mixte (SEM).

En effet, les SEM sont des sociétés dont le patrimoine (le capital
social) associe dans des proportions très variables des apports
d’origine publique (l’Etat ou ses organes) et d’origine privée (les
particuliers).

La CIE, la RTI, etc. sont en principe, des Etablissements de droit


public dont les capitaux proviennent de l’Etat et des particuliers. Ce
sont des Sociétés d’économie mixte.

Quels sont les moyens juridiques d’identification de la personne


morale ? Et quel est le régime juridique de leur capacité ?

B- IDENTIFICATION ET CAPACITE JURIDIQUE DE LA


PERSONNE MORALE.

1- L’IDENTIFICATION DE LA PERSONNE MORALE

La personne morale a un nom, un domicile et une nationalité.

a) LE NOM DE LA PERSONNE MORALE

A l’instar de la personne physique, la personne morale a l’obligation de


porter un nom. La désignation des personnes morales change selon
leur nature.

Les associations portent un titre : Croix Verte, FESCI.

Les syndicats ont une étiquette : FESACI, SYNARES, UGTCI

Le nom des sociétés, c’est la raison sociale ou la dénomination


sociale : MTN, GREEN, CI-TELCOM, SODECI.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 86


b) LE DOMICILE DE LA PERSONNE MORALE

Le domicile de la personne morale est appelé siège social. Son


domicile est celui du lieu où est situé son siège social ou son
établissement principal. Généralement, le siège social c’est le lieu où
siègent les organes de direction ou de décisions ainsi que les services
administratifs essentiels de la personne morale.

c) LA NATIONALITE DE LA PERSONNE MORALE

La notion de nationalité des personnes morales est différente de


celle des personnes physiques. Aussi, est – il totalement impossible
de leur appliquer les règles qui résultent de la loi n°61-415 du 14
décembre 1961 modifiée par celle de 1972 portant Code de la
nationalité ivoirienne.

Les règles applicables en matière de nationalité des personnes


morales sont donc autonomes. Elles sont composées de quelques
textes législatifs et essentiellement de mesures jurisprudentielles.

Dans le cadre du présent cours, nous étudierons particulièrement la


nationalité des sociétés commerciales et celle des associations.

 LA NATIONALITE DES SOCIETES COMMERCIALES

La société commerciale est une personne morale de droit privé. Elle


est toujours juridiquement rattachée à un Etat. La société
commerciale n’est internationale qu’en raison de ses activités qui
s’étendent au-delà des frontières étatiques.

Par exemple : Les sociétés Unilever et Nestlé sont juridiquement


rattachées respectivement aux Pays-Bas et à la Suisse, alors même
qu’elles agissent dans plusieurs Etats, notamment la Côte d’Ivoire.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 87


Face à la question de la nationalité des sociétés commerciales, le
Droit ne connaît que des sociétés qui dépendent d’un Etat, dont
elles sont réputées avoir la nationalité.

La jurisprudence, a adopté en la matière, le principe suivant : Une


société commerciale a la nationalité de l’Etat sur le territoire
duquel elle a son siège social.

L’Acte Uniforme de l’OHADA relatif aux sociétés commerciales et


le Groupement d’intérêt économique (GIE), sans préciser
explicitement la question de la nationalité des sociétés commerciales,
affirme en son article 1er que : « Toute société commerciale, (…)
dont le siège social est situé sur le territoire de l’un des Etats
parties au Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en
Afrique (…) est soumise aux dispositions du présent Acte
uniforme ».

On en déduit que cette société commerciale, a la nationalité du pays


de son siège social.

Deux autres questions intéressantes, en rapport avec la nationalité


des sociétés commerciales méritent d’être abordées :

-Quelle est la nationalité de la société commerciale qui délocalise


son siège social ? Et, comment détermine t- on la nationalité des
sociétés faisant partie d’un groupe ?

* LA NATIONALITE DES ASSOCIATIONS

Les associations sont régies en Côte d’Ivoire par la loi n°60-315 du


21 septembre 1960 relative aux associations.

L’article 1er de cette loi définit l’association comme : « Une


convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 88


commun d’une façon permanente leurs connaissances ou leur activité
dans un but autre que lucratif. »

Sur la base de cette définition, toutes les ONG sont des


associations et, elles sont régies par la loi relative aux associations
ci-dessus mentionnée.

Le chapitre 4 de la loi susmentionnée traite des associations


étrangères. « Sont réputées associations étrangères, quelle que
soit la forme sous laquelle ils peuvent éventuellement se dissimuler,
les groupements présentant les caractéristiques d’une association,
qui ont leur siège à l’étranger ou qui, ayant leur siège en Côte
d’Ivoire, sont dirigés en fait par des étrangers ou bien ont, soit des
administrateurs étrangers, soit un des administrateurs étranger, soit
un quart au moins des membres étrangers. »

Suivant les termes de cette disposition, l’association est censée avoir


la nationalité de l’Etat ou est situé son siège, ou encore, la
nationalité de ses administrateurs ou dirigeants.

2- LA CAPACITE JURIDIQUE DE LA PERSONNE MORALE

Comme les personnes physiques, les personnes morales jouissent de la


capacité juridique. Toutefois, à la différence des personnes
physiques qui ont la capacité universelle, la capacité des personnes
morales a un champ limité. On sépare habituellement la capacité de
jouissance de la capacité d’exercice.

a) LA CAPACITE DE JOUISSANCE DES PERSONNES


MORALES

La capacité de jouissance est l’aptitude à bénéficier de droits. Les


personnes morales ont une capacité de jouissance réduite.

En effet, elles ne peuvent effectuer des actes que dans le cadre de


leur objet, tel qu’il est décrit dans les statuts, et suivant
J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 89
l’objectif qui leur assigné par la loi. On dit que les personnes
morales sont soumises au principe de la spécialité en ce qui concerne
leur capacité de jouissance. Selon que les limites sont imposées par la
loi ou les statuts, on parle de spécialité légale ou statutaire.

Par exemple : Une association sportive ne peut effectuer à titre


habituel, des ventes de livres de droit ou des mèches. Une société
dont l’objet est la production de chocolats, ne peut pas vendre des
pièces automobiles ou des ordinateurs.

b) LA CAPACITE D’EXERCICE DES PERSONNES MORALES

La capacité d’exercice est l’aptitude à pouvoir exercer un droit dont


on est titulaire.

Les personnes morales n’ont pas du tout cette aptitude. On dit pour
cela, qu’elles sont frappées d’une incapacité générale d’exercice.

En effet, les personnes morales sont des êtres artificiels sans


existence corporelle. Dans cette logique, elles ne peuvent
évidemment pas exercer les droits dont elles sont titulaires. Toute
personne morale a donc une ou plusieurs personnes qui agissent pour
son compte. On dit qu’elles agissent par la technique de la
représentation.

Le représentant de la personne morale peut être une personne


physique : Un gérant, un directeur général, un président de la
république, …, ou un organe : Un conseil d’administration.

En tant que personne juridique, la personne morale à des biens. Et


c’est son représentant légal qui est juridiquement habilité à défendre
le patrimoine de la personne morale.

SECTION 2 : LE PATRIMOINE DU SUJET DE DROIT

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 90


Tout sujet de droit a un patrimoine. Pour mieux comprendre le
concept de patrimoine, il faut étudier la notion même de patrimoine
(&1), avant d’exposer sa composition, c’est-à-dire ses éléments
constitutifs (&2).

PARAGRAPHE 1 : NOTION DE PATRIMOINE

La notion de patrimoine s’appréhende à travers sa définition (A) et


l’exposé de ses caractères (B).

A- DEFINITION DU PATRIMOINE

Le patrimoine est l’ensemble des biens et des obligations d’une


personne et ayant une valeur pécuniaire, c’est-à-dire évaluable en
argent.

Au sens juridique, le bien est toute chose ou tout droit qui peut
faire l’objet d’un droit patrimonial.

Le patrimoine prend en compte les biens présents et à venir de la


personne. Le patrimoine est distinct des biens qui le composent.

Parmi les biens du patrimoine, il y a ceux qui sont des éléments


matériels (la voiture, l’appartement), que l’on appelle biens corporels
et ceux qui correspondent à des droits (les créances), qualifiés de
biens incorporels.

NB : Les éléments purement personnels (de la personne) sont exclus


du patrimoine, car ils n’ont pas, par nature, de valeur pécuniaire : ce
sont des droits extrapatrimoniaux. Ainsi, le nom patronymique, le
titre professionnel, le nombre d’enfant, les droits des époux, ne sont
pas un élément du patrimoine de leur titulaire. En clair, le corps
humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un
droit patrimonial.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 91


Par ailleurs, soulignons que, le droit a exclu certaines choses de toute
appropriation personnelle, patrimoniale. Ils font partie du patrimoine
commun à l’humanité ou du patrimoine national de l’Etat. « Il est
des choses qui n’appartiennent à personne et dont l’usage est commun
à tous (…) » Art.714 du Code civil

Par exemple : L’air, la lune, le soleil, les cours d’eau, le territoire,


etc.

A- CARACTERES JURIDIQUES DU PATRIMOINE

En droit, plusieurs traits caractéristiques distinguent le patrimoine.


Ainsi :

- Le patrimoine est inhérent à toute personne : Il est


nécessairement lié à toute personne physique ou morale. Ainsi,
l’étudiant, le riche, le vagabond, le célibataire, l’aliéné mental, etc. et
même, le nouveau-né ont un patrimoine. La personne qui n’a aucune
ressource ou qui a des dettes seulement, a un patrimoine.

En un mot, toute personne a un patrimoine. Et, seule la personne


physique ou morale est titulaire de patrimoine. On dit pour cela que
le patrimoine est un attribut de la personnalité.

- Le patrimoine est unique : En effet, une personne ne peut avoir


qu’un seul patrimoine. Ainsi, pour un commerçant on ne distingue pas
son patrimoine commercial de son patrimoine familial.

- Le patrimoine est incessible mais transmissible : Le patrimoine


ne peut être cédé à une autre personne. Souvent, ce sont les
éléments actifs qui le composent qui peuvent être cédés entre des
personnes vivantes. A contrario, il peut être transmis dans son
ensemble à son héritier. Mais, seulement lorsque le titulaire du
patrimoine est décédé.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 92


Le patrimoine forme une universalité de droit : C’est-à-dire, il
constitue un ensemble indissociable. Dès lors, on ne peut séparer
dans un patrimoine, les biens des dettes et obligations. Mieux, il est
impossible de séparer l’actif du passif.

En conséquence, le patrimoine ne peut être transmis à une personne


que, dans son intégralité, en bloc. C’est pourquoi, un héritier ne
peut pas vouloir prendre seulement les biens du défunt : L’actif du
patrimoine et laisser ses obligations et dettes : Le passif du
patrimoine.

- Le patrimoine est évaluable en argent. C’est-à-dire, le


patrimoine ne comprend que des éléments pécuniaires. Ainsi, tous les
éléments non évaluables en argent ne font pas partie du patrimoine.

PARAGRAPHE 2 : LES ELEMENTS DU PATRIMOINE

Tout patrimoine comprend : un actif et un passif. (Cf. schéma ci-


dessous, P. 94).

Le passif du patrimoine est constitué par l’ensemble des obligations


évaluables en argent. Nous étudierons le régime juridique des
obligations dans la 3e partie du présent cours.

Perçu du côté actif, le patrimoine se compose de biens corporels


mais aussi de biens incorporels, c’est-à-dire des droits, qu’il convient
d’examiner tout de suite avant d’aborder les premiers cités.

SCHEMA RECAPITULATIF DES ELEMENTS


CONSTITUTIFS DU PATRIMOINE

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 93


Le Patrimoine
Comprend :

À l’Actif Au Passif

Droits réels Droits personnels Obligations


Droits de créance.

Une chose Un débiteur Un créancier

A- LES BIENS INCORPORELS : LES DROITS

Ce sont des biens qui ne sont pas matérialisés, c’est-à-dire, qu’ils


n’ont pas d’existence physique. Ce sont des droits.

Certains droits subjectifs ne sont pas susceptibles d’évaluation


pécuniaire et donc ne font pas partie du patrimoine de la personne
qui en est le titulaire : Ce sont les droits extrapatrimoniaux.

Par exemple : Le droit au nom, le droit à la famille, le droit à


l’honneur, le droit à la vie privée, le droit à l’image, etc.

1- LES DROITS REELS

Le droit réel est une prérogative qui confère à son titulaire un


pouvoir direct sur une chose, un objet. Ce droit établit un rapport
entre une personne et une chose.

a) LES DROITS REELS PRINCIPAUX

Les droits réels principaux sont : Le droit de propriété, l’usufruit et


la servitude.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 94


A côté des droits réels principaux, il existe des droits réels
accessoires : Gages, hypothèques, privilèges, qui ne sont rien d’autre
que des garanties réelles pour l’exécution d’une obligation.

a) LES DROITS REELS ACCESSOIRES

Encore appelés droits réels de garantie, les droits réels


accessoires sont des droits qui ne peuvent exister de façon
autonome. Ils sont rattachés à un autre droit.

 Les effets des droits réels :

Le droit réel confère les prérogatives suivantes à son titulaire :

-Le droit de rétention, (Art. 2082 du Code civil)

-Le droit de préférence, (Art. 2073 du Code civil)

-Le droit de suite,

2- LES DROITS PERSONNELS

Encore appelé droit de créance, le droit personnel désigne


généralement le droit d’exiger la remise d’une somme d’argent ou
d’une chose. Ce droit permet au créancier d’exiger d’une autre
personne, le débiteur, la restitution de quelque chose ou d’une somme
d’argent.

A l’opposé du droit réel, le droit personnel s’exerce contre une


personne et non directement sur une chose.

A- LES BIENS CORPORELS : LES MEUBLES ET LES


IMMEUBLES

Tous les biens corporels sont meubles ou immeubles.

1- LES BIENS MEUBLES

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 95


La loi civile distingue deux (2) types de biens meubles : Les biens
sont meubles par leur nature, ou meubles par la détermination de
la loi.

« Sont meubles par leur nature, toutes les choses qui peuvent se
transporter d’un lieu à un autre, par elles-mêmes, (…) ou par l’action
d’une force étrangère ». (Article 528 Code civil).

Par exemple : Les choses inanimées : la voiture, l’ordinateur, le


costume, etc, et les choses animées ou vivantes : les animaux.

Selon les dispositions de l’article 529 du Code civil, sont meubles


par la détermination de la loi, les obligations et actions qui ont pour
objet des sommes exigibles ou des effets mobiliers, les actions ou
intérêts appartenant à des compagnies de finance, de commerce ou
d’industrie.

1- LES BIENS IMMEUBLES

Aux termes de l’article 517 du Code civil, « Les biens sont


immeubles, ou par leur nature, ou par leur destination, ou par l’objet
auquel ils s’appliquent. »

De ce texte, on distingue trois (3) types de biens immeubles :

 Les immeubles par nature,


 Les immeubles par destination,
 Les immeubles par l’objet auquel il se rapporte.

TABLEAU DE CLASSIFICATION DES BIENS

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 96


NATURE BIENS CORPORELS BIENS INCORPORELS

Meubles par nature - Droits Mobiliers


Droits incorporels portant
Toutes choses susceptibles de sur des immeubles.
déplacement de leur propre Ex : usufruit d’un Immeuble,
mouvement ou par la main de servitude
l’homme.

Ex : Animal, Voiture. - Créance immobilières


BIENS MEUBLES Ex : Si après la vente d’un
- Meubles par anticipation immeuble la remise de la
Immeubles fictivement chose n’est pas effectuée
considérés comme immédiatement, l’acheteur
meubles devient créancier de la
Ex : récolte vendue sur remise de l’immeuble.
pied.
- Immeuble par nature : - Droits réels immobiliers
Le sol et tout ce qui y Droits incorporels portant
adhère. sur des immeubles.
Ex : usufruit d’un immeuble,
Ex : fonds de terre (Terrain servitude.
nu), construction, Plantation.

- Immeuble par - Créances immobilières


destination : Ex : Si après la vente d’un
Meubles considérés immeuble la remise de la
fictivement comme chose n’est pas effectuée
BIENS immeubles parce que immédiatement, l’acheteur
IMMEUBLES placés par le propriétaire devient créancier de la
du fond pour le service et remise de l’immeuble.
l’exploitation de ce fonds.
Ex : Animaux de labours,
machines industrielles,
matériel d’un hôtel.
- Immeubles par l’objet
auquel ils se rapportent :

L’usufruit et la servitude
sont des droits réels
considérés comme des
immeubles parce qu’ils se
rapportent à un
immeuble.

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 97


CHAPITRE II : LA CAPACITE ET
L’INCAPACITE JURIDIQUES DES
SUJETS DE DROIT
L’étude relative à la capacité et à l’incapacité juridiques se rapporte
en principe aux personnes juridiques, sujets de droit. Toutefois,
nous limiterons la présente, aux seules personnes physiques, pour
avoir consacré certains développements antérieurs à la capacité
juridique des personnes morales.

Ainsi, la capacité juridique des personnes physiques d’une part, et


d’autre part leur incapacité seront séparément étudiées.

SECTION 1 : LA CAPACITE JURIDIQUE DES PERSONNES


PHYSIQUES

La notion de capacité doit être précisée avant d’en examiner le


contenu.

PARAGRAPHE 1 : NOTION DE CAPACITE

Pour participer à la vie juridique, tout individu doit être


juridiquement apte à apprécier l’étendue et la portée de ses actes.
C’est cette aptitude qui est la capacité juridique. Elle se définit
comme l’aptitude, à acquérir des droits et à pouvoir les exercer.

En principe tout individu est présumé capable. C’est-à-dire, chaque


être humain est censé avoir cette faculté. Mais, certaines personnes
sont déclarées incapables,

On distingue deux (2) aspects dans la notion de capacité juridique


qu’il convient d’étudier.

PARAGRAPHE 2 : LE CONTENU DE LA CAPACITE JURIDIQUE

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 98


La notion de capacité renferme deux réalités dont l’une est passive,
c’est la capacité de jouissance et l’autre active : la capacité
d’exercice.

A- LA CAPACITE DE JOUISSANCE

La capacité de jouissance d’une personne physique est son aptitude à


être titulaire de droits.

Par exemple : Le droit de se marier, le droit d’acquérir des biens, le


droit de se plaindre en justice, etc.

A- LA CAPACITE D’EXERCICE

C’est l’aptitude du titulaire d’un droit à accomplir des actes auxquels


se rapporte ce droit.

Par exemple : Pierrot est un jeune homme de 12 ans. Il a hérité de


son père défunt d’un immeuble R+2 dont il est désormais
propriétaire.

Pierrot est titulaire d’un droit de propriété. On dit qu’il a la capacité


de jouissance. Toutefois juridiquement, Pierrot, étant mineur ne
peut ni louer son immeuble, ni le vendre lui-même. On dit qu’il n’a pas
la capacité d’exercice.

SECTION 2 : L’INCAPACITE DES PERSONNES PHYSIQUES

Toute personne physique est présumée capable. Ainsi, il n’y a


d’incapacités que dans les cas prévus par la loi.

PARAGRAPHE 1 : L’INCAPACITE DU MINEUR

Selon les dispositions de l’article 1er de la loi n°70-483 du 2 août


1970 sur la minorité, « Le mineur est l’individu de l’un ou de l’autre
sexe qui n’a pas encore atteint l’âge de 21 ans accomplis. »

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 99


A- LE REGIME JURIDIQUE DU MINEUR NON
EMANCIPE

Le mineur non émancipé est frappé d’une incapacité générale


d’exercice de ses droits. Cela signifie qu’il ne peut accomplir tout
seul les actes de la vie civile. Ainsi, les actes juridiques accomplis par
le mineur sont nuls pour cause d’incapacité.

La loi prévoit deux (2) mécanismes de protection du mineur non


émancipé : La puissance paternelle et la tutelle.

La puissance paternelle est l’ensemble des droits et obligations des


père et mère sur la personne et les biens de leur enfant mineur.

La tutelle est la mesure de protection du mineur lorsque son père et


sa mère sont dans l’impossibilité d’assurer la puissance paternelle
pour cause de décès, d’incapacité ou d’absence.

B- LA SITUATION JURIDIQUE DU MINEUR EMANCIPE

L’émancipation est une technique juridique dont l’effet est


d’accorder par anticipation au mineur la capacité d’accomplir tous
les actes de la vie civile comme s’il était majeur.

Elle s’opère de deux (2) manières :

-Par le mariage du mineur.

-Par la volonté des parents

Le mineur émancipé est désormais responsable des dommages qu’il


cause à autrui. Toutefois, il doit obtenir l’autorisation parentale
lorsqu’il veut se marier, (Art.115 Code civ.) ou faire du commerce.
(Art.114 Code civ.)

Le droit soumet certains majeurs au régime de l’incapacité.

PARAGRAPHE 2 : L’INCAPACITE DES MAJEURS

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 100
En principe, toute personne qui a au moins 21 ans, est pleinement
capable d’exercer tous les droits dont elle est titulaire. Il en résulte
que l’incapacité des majeurs est une situation exceptionnelle.

Est incapable toute personne majeure dont l’état de santé mental ou


physique constaté médicalement, nécessite une protection.

Le législateur a défini deux (2) régimes distincts de protection du


majeur incapable en fonction de la gravité de son état.

A- L’INTERDICTION JUDICIAIRE

C’est le régime de protection destiné au majeur qui se trouve dans un


état habituel d’imbécilité, de démence et de fureur. Il faut
entendre par fureur habituelle, la démence à un haut degré, qui
pousse le sujet à des actes d’agression.

C’est le cas par exemple d’un majeur qui poursuit des passants avec
une machette en main.

B- LE CONSEIL JUDICIAIRE OU LA CURATELLE

Ce régime s’applique aux personnes majeures qui, sans être hors


d’état d’exercer elles-mêmes leurs droits, ont besoin d’être assisté
ou conseillé dans les actes de la vie civile.

TROISIEME PARTIE :
LES OBLIGATIONS ET LA
RESPONSABILITE CONSECUTIVE
A LEUR EXECUTION

J. & I. N’GORAN, COURS DE DROIT CIVIL, HEC-AD, LICENCE 1, 2014 / 2015 101

Vous aimerez peut-être aussi