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Volatilité des marchés et finance comportementale

Volatilité des marchés et finance comportementale

François Xavier Fonseca


Centre d'Analyse Théorique et de Traitement des données économiques
Université de Pau et des Pays de l'Adour

La théorie de l’efficience informationnelle des marchés financiers, « signifie normalement que les
rendements et prix d’actif sont déterminés par le résultat de l’offre et de la demande sur un marché
compétitif composé d’opérateurs rationnels ». (Cuthbertson, 1996 ).
L'hypothèse d'efficience informationnelle des marchés financiers suppose que les opérateurs de
marché ont accès à un ensemble complet d'information sur les déterminants des prix et rendements
d'actifs et qu'ils sont capables de les intégrer rapidement dans la structure des prix et des rendements
d'équilibre. Ainsi, aucun opérateur n'aurait d'avantage comparatif dans l'acquisition des informations
déterminantes dans la formation des structures de prix et de rendements d'actifs. D'autre part par la
propriété d'orthogonalité des erreurs de prévision, aucune information courante ou passé n'intervient
dans la prévision des cours et des rendements d'actifs. Comme corollaire, seules les informations
nouvelles, qui par définition ne peuvent être prévues, affectent les cours et rendements d'équilibre.
Ce qui signifie que les erreurs de prévision sont optimales et qu'aucun agent ne peut les améliorer.
Cette assertion est à notre avis très restrictive. La contrainte majeure est celle qui veut que les
agents aient accès à un ensemble d'information complet, ce qui élimine les cas d'incertitude de la
dynamique environnementale. Une façon de voir que cette hypothèse de l'efficience
informationnelle des marchés est une représentation formelle stylisée de l'environnement
dynamique concourant dans la détermination des prix et rendements d'équilibre sont les cas de
violation de l'hypothèse. En effet, nous observons que dans le cas des « effets week-end » et « effet
janvier », la propriété d'orthogonalité des erreurs de prévisions n'est plus active. Il existe d'autre
part, dans notre conception du modèle, une prise en compte limitée de l'incertitude stratégique à
laquelle sont confrontés les opérateurs de marchés. Il se dégage dans notre interprétation de
l'hypothèse, la supposition d'interactions stratégiques entre les agents de type statique, ce qui
correspond à une situation d'information complète et parfaite. Or, il s'avère que dans le réel, nous
sommes confrontés à des interactions stratégiques entre les agents dans des contextes
environnementaux d'information incomplète et imparfaite. Ce qui introduit dans le modèle la prise
de décision dynamique. Ceci complexifie l'analyse.
D'autre part la question des coûts de transaction peut être posée. En effet, la complétude de
l'ensemble d'informations disponibles et pertinentes dans la détermination des cours et rendements
d'équilibre, fait emettre l'hypothèse de coûts de transaction nuls. Or comme l'a montré Ronald coase
dans son article séminal « The theory of the firm », lorsque le coût d'obtention de l'information
nécessaire à la prise de décision s'accroît, l'entreprise se substitue au marché dans l'allocation des
ressources. C'est dans ce sens que sont créées les salles de marché, comme lieu ou se réalisent les
prises de décision concernant les allocations d'actifs et dont les actions sont reflétées en Bourse dans
les cours d'équilibre de marché. La Bourse peut être appréhendée comme l'espace ou se confrontent
les représentations de l'environnement des agents. Elle est le reflet des interprétations sur les
rendements des actifs qui déterminent les cours d'équilibre et par conséquent le lieu où sont
confrontées l'offre et la demande des actifs.
Cette réflexion nous mène à adopter l'hypothèse que la complétude de l'ensemble d'information
dont dispose les agents est inappropriée à une modélisation approximative plus fine de la réalité.

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C'est dans ce sens que nous avançons l'incomplétude de cet ensemble d'information du point de vue
statique et dynamique. Comme corollaire, apparaissent des coûts de transaction positifs qui reflètent
l'incertitude de l'environnement et des interactions stratégiques entre agents.
D'autre part, il est supposé que les opérateurs de marché agissent sur un marché compétitif. Cette
hypothèse peut se discuter sur la base de l'ensemble d'information dont disposent les agents. En
effet, d'après l'hypothèse d'efficience informationnelle des marchés financiers, les agents n'ont pas
d'avantages comparatifs dans l'acquisition des informations déterminantes dans la détermination des
cours et des rendements des actifs. Ce qui signifie, comme nous l'avons remarqué, que l'ensemble
d'information disponible et pertinent est complet. Cette assévération conduit à supposer que le
marché de référence est compétitif. Mais ceci reste vrai tant que les coûts de transaction sont nuls.
Ce qui permet une structure atomistique des intervenants sur les marchés financiers et valide
l'hypothèse de marché compétitif. Or, nous avons vu que l'incomplétude de l'ensemble
d'informations pertinentes et disponibles introduit des coûts de transaction positifs. Cette réalité
conduit à l'hypothèse de marché de concurrence imparfaite où la taille des opérateurs de marché et
leur structure organisationnelle sera une variable de référence en ce qui concerne le comportement
de marché. D'autre part, la question de l'homogéneité des biens peut être discutée. En effet, le bien
de référence est l'entreprise dont les titres sont négociés sur le second marché. Il se dégage de ceci
une absence d'homogéneité qui crée des avantages comparatifs en ce qui concerne les possibilités
de présence sur le marché de référence, par les procédures d'entrée et la disponibilité des
informations pertinentes pour y accéder. Ainsi nous supposons l'existence de barrières à l'entrée. Ce
qui avec l'absence d'homogéneité des titres en ce qui concerne le sous-jacent invalide la supposition
de marché compétitif.
Une hypothèse supplémentaire constitue la structure de la théorie de l'efficience informationnelle
des marchés financiers, celle qui évoque le comportement rationnel des agents.
Qu'entendons-nous par rationalité des agents?
Dans la théorie économique dominante la rationalité en tant que conceptualisation des attitudes et
comportements est véhiculée par la théorie du choix rationnel. Celle-ci suppose un comportement
de maximisation d'un maximant. Ce maximant est l'utilité qui d'autre part, est confondue avec
l'intérêt personnel. Cet intérêt personnel peut être interprété comme centré sur soi même, ce qui
reviendrait à l'égoïsme, ou être considéré comme limité, ce qui dans ce cas introduirait l'altruisme.
Cette conception de la rationalité suppose implicitement que les agents sont en mesure de réaliser
des calculs économiques sur la base des informations disponibles et de réaliser des comparaisons
entre résultats. Ceci implique que l'ensemble d'information soit complet et parfait. Nous sommes
donc dans le cadre explicatif de l'efficience informationnelle des marchés. Or comme nous l'avons
avancé l'hypothèse de complétude informationnelle est restrictive. Dans un environnement
caractérisé par l'incertitude, soit-elle statique ou dynamique, cette assertion devient inappropriée.
Emerge ainsi, le risque.
Le risque peut être considéré comme l'identification et la conceptualisation d'un aléa. De cette
démarche surgissent les situations de risque, de risque statistique et de singularité. Les processus de
prise de décision dans ces trois cas sont caractérisés par des différences fondamentales. Dans les
situations de risque il est possible d'attribuer une distribution de probabilité aux conséquences des
décisions. Ceci dans le cas d'absence d'incertitude stratégique, c'est à dire d'interactions inter-
individuelles. En effet dans ce dernier cas il faudrait évaluer les conséquences des conséquences de
la décision du fait de la réaction aux décisisons de la part des autres agents.
Dans le cas de risque statistique, les agents ne connaissent pas les paramètres des distributions de
probabilité sur les conséquences. Pour cela, ils réalisent des processus d'inférence statistique de

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façon à déterminer les distributions de probabilité empiriques, ce qui implique que la forme
qu'adoptent les distributions théoriques sont connues. Ceci détermine le processus de prise de
décision et la prise de décisison.
Dans le cas de singularités, les distributions de probabilités empiriques et théoriques ne peuvent être
connues. Ainsi, une méthode applicable est l'établissement d'évaluations subjectives, les agents
produisent des « à prioris ». C'est ainsi que peuvent être développées des probabilités épistémiques
associées aux conséquences des prises de décision.

D'autre part,« Savoir si un marché est volatil revient à savoir si ce marché est efficient dans
l’allocation des ressources financières dans des projets d’investissement réels ou de sociétés
possibles. Si les cours des actions ne reflètent pas les fondamentaux économiques alors, les
ressources ne seront pas correctement allouées » ( Cuthbertson, 1996 ).
De cette proposition découlent deux considérations importantes. D’une part nous analyserons le
marché action et d’autre part nous tenterons de déterminer ce que sont les fondamentaux
économiques.
Nous centrerons l’analyse sur le marché actions car ces titres jouent un rôle fondamental dans nos
économies du fait qu’elles expriment le rapport de base de celles-ci qui n’est autre que la propriété
du capital. Tout ce qui à trait à la façon dont ces droits de propriétés sont évalués a des
conséquences directes sur l’ensemble de l’économie.
En ce qui concerne les fondamentaux, la théorie financière considère que le cours des actions a
pour fondement la valeur intrinsèque des entreprises, celle-ci étant leur capacité à engendrer des
profits durant la période de leur existence. Cette grandeur est mesurée par la somme actualisée des
flux de bénéfices anticipés. Celle-ci est considérée comme la valeur fondamentale.
En ce qui concerne la volatilité des marchés nous examinerons la variabilité immédiate du cours des
actifs. Cette variabilité est relative à ce qui serait considéré comme la valeur fondamentale des
entreprises.
Comme celle-ci est mesurée par la somme actualisée des flux de bénéfices anticipés, nous pouvons
émettre l'hypothèse que dans un environnement caractérisé par la dynamique et par l'incertitude des
conséquences des processus de production de valeur sur le résultat des entreprises, la valeur
fondamentale de celles-ci reste indéterminée. Nous sommes en présence donc d'interprétations
inter-subjectives de ce qui est la valeur fondamentale des entreprises. Ainsi, nous supposons que la
valeur fondamentale est une construction inter-subjective et que c'est sur cette base que se produit la
volatilité des marchés.
Comme nous l'avons remarqué dans le cadre de la théorie de l'efficience informationnelle des
marchés l'ensemble d'informations disponibles et pertinentes est complet et parfait ce qui explique
que seules les informations nouvelles sont capables de produire de la volatilité. Ainsi, en absence de
ces « nouvelles » l'allocation des ressources réalisée par les agents intervenant sur les marchés
financiers est efficiente.
Cependant, l'environnement, c'est à dire le réel est fondamentalement dynamique et incertain. Ce
qui se traduit par un ensemble d'informations incomplet et imparfait. Des coûts de transactions
apparaissent et des possibilités d'arbitrages spatiaux et temporels émergent. Ceci signifie que
l'évaluation de la valeur fondamentale n'est pas homogène, les agents produisent des interprétations
divergentes de celle-ci. Dans ce cadre conceptuel la volatilité peut être une caractéristique
intrinsèque des marchés financiers. Celle-ci serait par conséquent produite par les attitudes et

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comportements des agents intervenant sur les marchés financiers.


Les attitudes des agents sont construites sur la base des valeurs et croyances que ceux-ci produisent.
D'autre part, les valeurs peuvent être le résultat d'un processus de découverte et de réflexion
globales par les agents sur eux-mêmes, sur leur positionnement dans le réel d'un point de vue de
l'éthique et par conséquent, de la logique de construction conceptuelle de leurs valeurs en tant
qu'être appartenant à une espèce humaine. Il s'en dégage une succession d'interprétations
conceptuelles qui conduisent en dernier ressort à des comportements et par conséquent à des prises
de décision concernant les allocations de ressources. Il s'ensuit que la manifestation dans la sphère
réelle de l'économie est le résultat d'une conceptualisation de l'Homme dans ses multiples
dimensions et d'un conflit de représentations de celui-ci par lui même. Cependant ces considérations
d'ordre philosophique ne seront pas abordées dans notre travail étant donné la complexité des
questionnements et leur étendue interprétative.

Ainsi, les agents réalisent des anticipations sur les déterminants des rendements et des cours des
actifs, en leur assignant des modèles probabilisés basés sur des interprétations de pans de réalité
observables ou observés.
L'espace dans lequel ses anticipations sont centralisées est le second marché. Celui-ci permet
également la coordination des anticipations qui produira les équilibres des marchés financiers et par
conséquent les équilibres microéconomiques et macroéconomiques.
Il se déduit de ces analyses que les déterminations en termes d'équilibres des marchés, soient-ils
financiers ou réels, sont le résultat d'interactions stratégiques interprétatives et conceptualisées.
C'est dans ce cadre, qu'une tentative d'explication de la volatilité des marchés financiers par
l'analyse des processus cognitifs propres aux agents acquiert une légitimité.
Nous tenterons de présenter quelques considérations sur le sujet.
La vigilance du marché et la perception de celui-ci en termes d’interprétation, détermine
l’établissement de la carte mentale et la construction du modèle explicatif1 par les agents. Ceci
produit les attitudes et par voie de conséquence le noyau de la structure des préférences infra-
individuelles. La validation de celles-ci par la simulation du modèle forme les croyances qui
déterminent la prise de décision et entraînent l’action, ces croyances peuvent être « à priori » ou
historiques2. D’autre part, elles doivent être compréhensibles pour l’agent3. Ce qui alimente à
nouveau la structure des préférences.
Ce processus crée et consolide le comportement des agents intervenant sur les marchés financiers,
générant une base informationnelle4 individuelle et collective sur l’environnement local et global.
Ceci a une incidence sur la perception conçue comme évolutive. Ce processus est à la base de la
représentation de l’environnement par les agents, laquelle se répercute sur les interactions entre les
intervenants. Ces processus micro-économiques déterminent le résultat à l’échelle
macroéconomique et la dynamique macro-économique influence la sphère des décisions au niveau
micro-économique.
Sans entrer dans le détail de l’architecture des agents qui détermine le résultat du processus décrit
antérieurement, posons une différenciation de base qui les classifient en deux types de classes
d’équivalence :
1 F,Von Hayek
2 L,Von Mises : La accion humana
3 R,Boudon : Théorie générale de la rationalité
4 A,Sen : Un nouveau modèle économique

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1. Les agents réactifs


2. Les agents cognitifs

La première se réfère à des agents qui, bien qu’apprenant des erreurs passées, développent une
propension élevée à répéter des schèmes de comportements après identification des paramètres
propres à l’environnement de référence, lesquels peuvent présenter par perception pour l’agent des
caractéristiques stables, que celui-ci soit local ou global.
Ce comportement régulier équivaut à une actualisation imparfaite de la base informationnelle infra-
individuelle et par voie de conséquence à des actions dont la nature est répétitive, avec de légères
variations. Ces variations peuvent être motivées par des accidents, sous la forme d’informations
« nouvelles » qui modifient la perception.
Nous pourrions envisager pour ces individus des anticipations extrapolatives5 dont la mémoire peut
présenter des horizons temporels variables, allant du court terme au long terme, avec une préférence
accentuée pour le court terme.
Ces agents seraient proches d’un processus d’apprentissage propre à une évolution dans un contexte
d’univers certain.
Ces agents emploient dans la formation de leurs anticipations des outils déterministes, tels que par
exemple l’analyse technique. Ceci se traduit par une discrimination des conceptualisations en
termes de régressions linéaires, employant essentiellement des variables historiques. Il peut se
produire des phénomènes cognitifs de reconstruction rationnelle des représentations historiques.
Cette dynamique de formation des anticipations tend vers un état stationnaire de celles-ci.
Ces agents ont une représentation stylisée de l’univers dans lequel ils évoluent. Cette représentation
peut incorporer une forte inertie temporelle et par conséquent produire une réactivité mécanique, ce
qui favorise l’émergence d’une continuité de l’action et par là une possibilité de prévision en termes
de probabilité de leurs comportements.
La deuxième classe d’équivalence, se réfère à des agents qui actualisent par contingence
progressive les erreurs du passé, en fonction des paramètres propres à l’environnement passé,
présent et futur probable. Ils s’inscrivent dans un processus cognitif de rationalité incrémentale. Ces
agents sont conscients des processus cognitifs qui leurs sont propres et se proposent consciemment
d’optimiser leur inscription dans le champ du réel cible. Dans cette démarche, ils configurent leur
perception au travers de l’optimisation de l’acuité de la perception et de la procédure cognitive. Ils
ont une forte propension à une diversification des sources d’informations, de façon à minimiser le
risque de présence de biais informationnels, dans l’intégration des informations dérivées de
l’environnement local et global. Ils recherchent la mise en œuvre de l’action pertinente contingente
à l’environnement de référence. Cette démarche est motivée par l’espérance d’un gain
extraordinaire dérivé de cette procédure.
Les agents de cette classe d'équivalence ont conscience de se mouvoir en univers incertain et sont
par leurs capacités cognitives, capables d’irrégularités du comportement en adéquation plus étroite
avec l’environnement de référence et par voie de conséquence capables de nouveautés.
Ce type d’agents serait plus proche de l’hypothèse d’anticipations rationnelles ( Muth, 1961 ) tout
en sachant qu’ils présentent à un instant donné des démarches cognitives propres de celle de la
5 J M,Keynes

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rationalité limitée ( Simon, 1945 ), laquelle serait d’un point de vue dynamique substituée par la
rationalité incrémentale.
Ces agents emploient des outils non déterministes, pluridisciplinaires et inter-disciplinaires dans la
formation de leurs anticipations. Nous pouvons émettre l’hypothèse que, ces agents ont une capacité
d’abstraction, d’analyse et d’organisation significative.
Ces agents sont capables de représentations complexes de l’univers dans lequel ils évoluent qu’ils
discriminent par arbitrages transversaux spatiaux et temporels.
L’inertie des représentations dans cette classe d’agents, bien qu’existante, est identifiée, isolée et
maîtrisée, ce qui produit des comportements discontinus dans le temps en ce qui concerne la
réactivité aux paramètres environnementaux, au sens large, spatiaux et temporels.
D’autre part, les processus décrits et cela concernant les deux classes d’équivalence d’agents, sont
inscrits dans une démarche stratégique qui découle d’un arbitrage des représentations de
l’environnement établies par les agents. Cet arbitrage peut être modélisé par l’intermédiaire d’un
modèle à variable qualitative binaire incorporant une certaine règle de décision, qui peut incorporer
des variables explicatives spatiales, temporelles ou mixtes. Cette démarche stratégique s’inscrit
dans une analyse probabiliste du résultat poursuivi « à priori », en établissant un éventail de
scénarios en découlant, plus ou moins large suivant la classe d’équivalence d’agents.
En fonction des caractéristiques de chaque classe d’équivalence d’agents, ce modèle à variable
qualitative binaire et latente est reformulé et ré-éstimé de façon dirigée ou involontaire, une fois les
résultats de l’action observés. Cette actualisation s’inscrit dans un intervalle temporel plus ou moins
long suivant la classe d’équivalence d’agents.
Il est possible que cette actualisation ne se produise pas ou peu dans la classe d’équivalence
d’agents réactifs car elle implique une forte composante de destruction de repères et comme
corollaire une création de nouveaux repères, ce qui implique un coût pour l’agent, celui d’une perte
économique probable associée pendant la phase de destruction-création. Citons par exemple une
perte temporaire dans l’activité productive.
Nous pourrions le nommer, coût de transition de phase.
Ce coût de transition de phase peut être encouru individuellement, collectivement ou de façon
mixte. Economiquement, il reflète le risque inhérent à toute modification structurelle de
l’architecture des agents et des processus de destruction-création ( Shumpeter ) des représentations
permettant une ré-orientation des décisions et actions stratégiques. Il est l’expression économique
de l’obsolescence instrumentale des représentations des agents. L’agent peut l’appréhender ou non,
ce qui a une incidence sur son comportement économique et social. Ce coût est d’autant plus élevé
quand le degré d’aversion face au risque est important. Ceci découle du fait que, les agents ayant un
degré d’aversion faible face au risque, développent une propension à adopter des actions propices à
la réduction de l’intervalle de temps pendant lequel le processus de modification structurelle de leur
architecture et de destruction-création des représentations intervient.
D’autre part, ce coût de transition de phase peut être composite. Il est intéressant d’observer que ce
coût, n’émerge que dans le cas où les agents évoluent en univers incertain, ce qui implique
l’incomplétude de l’information qu’ils détiennent. Il est donc inhérent à toute analyse dynamique
des comportements dans l’incertain et associé étroitement au recueil, interprétation, organisation et
exploitation des informations stratégiques que réalisent les agents.
Dans cette démarche stratégique, il est nécessaire de distinguer en fonction de la classe
d’équivalence d’appartenance des agents, la capacité et nature de la prise en compte de

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l’environnement global et local. Cette particularité se fait par l’intermédiaire du modèle à variable
qualitative binaire des classes d’équivalence des agents et est corrélée avec la perception propre à
chaque classe d’équivalence d’agents et sa modification dynamique.
La vigilance du marché et son interprétation fournit les éléments d’informations pour
l’établissement de la carte mentale et du modèle explicatif correspondant par les agents.
La prospection des opportunités de marchés dépend du modèle à variable qualitative binaire établit
par chaque classe d’équivalence d’agents.
L’interprétation et intégration des informations en résultant, produit les anticipations de ces classes
d’équivalence d’agents. Dans cette phase, l’imagination, entendue comme faculté et capacité de
projection spatiale, temporelle ou mixte, intervient de façon déterminante.
Par la nature des processus impliqués, les agents réactifs sont plus enclins à adopter des
comportements de mimétisme que les agents cognitifs. Ces derniers, sont à même de produire de
l’innovation, soit-elle de rupture ou d’incrémentalité.
Cette considération est significative en ce qui concerne la nature et la formation des anticipations.
Elle contribue également à la coordination de ces dernières, pour aboutir à la réalisation d’un
équilibre qui se dégage des équilibres multiples probables ex-ante.
Ainsi, une conjecture qui peut être avancée, consiste à supposer que les agents cognitifs sont des
producteurs d’équilibres sur les marchés financiers et que les agents réactifs, par les processus de
formation de leurs anticipations et le mimétisme qui en découle, sont des réalisateurs de l’équilibre
ex-ante anticipé par les agents cognitifs.
Cette particularité s’est reflétée en 1992 lors de la spéculation sur la livre sterling initiée par le
fonds d’investissement Quantum.
Ainsi, il n’y aurait pas une anticipation des équilibres futurs sur une base objective, mais bien une
production de ceux-ci.
Sur cette base conceptuelle la volatilité en tant que variabilité immédiate des cours des actifs serait
le résultat de l'existence d'un écart type par rapport à un équilibre qui n'est pas forcément la valeur
fondamentale des entreprises. Il s'ensuit que la volatilité peut être le résultat de l'interaction
stratégique sur les marchés financiers entre les agents réactifs et cognitifs, et que des processus
comportementaux organisés de façon consciente et cohérente peuvent être à la base de réalisation de
variabilité immédiate. Cette hypothèse part de la supposition d'incomplétude et du caractère
imparfait de l'ensemble d'informations disponibles et pertinentes accéssible aux deux classes
d'équivalence d'agents ainsi que des attitudes découlant des interprétations.

Mots clés : Efficience informationnelle, volatilité, valeur fondamentale, anticipation,


rationalité incrémentale, agents réactifs, agents cognitifs, coût de transition de phase

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