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LES PROCEDURES COLLECTIVES D’apurements du passif

Présenté par Mohamed DIAKITE

Enseignant chercheur et Doctorant

INTRODUCTION

I. L’objet du droit des procédures collectives

Les entreprises sont en des espèces commerciales, des individus du monde des affaires qui, a l’instar
des hommes, naissent, vivent, et meurent .Dynamiques, elles s’épanouissent sans grand
encombre .Fébriles, elles sont souvent victimes de pathologies internes et externes dont le
traitement à titre préventif ou curatif, a de tout temps appelé l’intervention constante du
législateur.

Ainsi, lorsque l’entreprise réalise des bénéfices, elle rencontre des difficultés avec des salariés qui
réclament leur part du profit collectif ainsi réalisé ; cela donne lieu le plus souvent à des grèves .Ce
genre de difficultés parce que l’Etat dans sa trésorerie est tel qu’elle ne peut faire face à ces ses
échéances. Il ne fait pas de doute que si certaines de ces difficultés peuvent être réglées aisément,
d’autre relèvent très sérieuses soit parce que l’environnement n’est pas favorable, soit parce que le
chef d’entreprise ne bénéficie pas de la confiance ses créanciers. Face à une telle situation que faut-il
faire. Il y’a une solution qui consiste à laisser le débiteur seul face à ses créanciers. Il y’a aussi celle
qui conduit à imposer à tous les créanciers les mêmes sacrifices. C’est à cette dernière solution que
se sont ralliés les rédacteurs de l’acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif. On peut déceler, à la lecture des dispositions de cet acte uniforme une
volonté de soumettre tous les créanciers à une discipline collectives afin d’éviter l’anarchie des
poursuites individuelles.

Donc les procédures collectives écartent les initiatives individuelles et poursuivent les objectifs
multiformes vis-à-vis des trois (3) acteurs intéressés et concerne soit le redressement, soit la
liquidation.

Si l’objectif prioritaire est le paiement du créancier ce sera alors une procédure collective
d’exécution. Dans ce type de procédure, on permet au créancier hypothécaire de saisir et faire
vendre l’immeuble même si il est nécessaire a la survie de l’entreprise. Si l’on autorise la
continuation de l’activité ou de l’exploitation c’est principalement pour trouver le meilleur moyen
d’assurer le paiement des créanciers a travers un concordant.

Si l’objectif prioritaire est le redressement de l’entreprise dans ce cas, il n’y a pas de saisie ; les biens
de productions nécessaires à l’exercice de l’activité de l’entreprise sont conversés. La continuation de
l’activité est autorisé pour permettre la suivie de l’entreprise et la résolussions de plein droit des
contrats est exclus, même pour les contrats conclus intuitu persona dès lors que de tels les contrats
sont nécessaires à la poursuite de l’exploitation.

Les procédures collectives constituent donc le traitement prescrit aux entreprises en difficulté. Ce
sont l’ensemble des mécanismes judiciaires permettant de réunir les créanciers en vue de régler les
difficultés financières et économiques de leur débiteur. Ces procédures sont dites collectives en ce
qu’elles conduisent à réunir les créanciers en une masse d’une part et qu’elles visent à satisfaire
collectivement les intérêts en péril par les difficultés de l’entreprise débitrice d’autres part. Aux
termes de la législation en vigueur, il existe quarte types de procédures collectives : la conciliation, le
règlement préventif, le redressement judiciaires et la liquidation des biens.

Les procédures collectives d’apurement du passif ne sont pas à confondre avec les sanctions qu’elles
peuvent générer. Elles portent sur les personnes physiques exerçant une activité professionnelle
indépendante civile, commerçante, artisanale ou agricole, sur les personnes morales de droit privé
commerçantes ou non, les entreprises publiques ayant la forme d’une personne morale de droit
privé. Sont exclus, en principe, du bénéfice des procédures collectives : les acteurs du secteur
informel ; les sociétés de fait, les sociétés créées de fait ainsi que les personnes morales de droit
public.

Dans l’espace OHADA, le terme de «faillite « » n’est plus employés depuis l’entrée en vigueur de
l’AUPC/AP : l’expression officielle est celle de « procédures collectives d’apurement du passif ».
II .L’évolution de la législation

Le code de commerce de 1807 en France est la première étape, la faillite seule sanctionnait la
cessation des paiements et entrainait la liquidation de l’entreprise et le failli finissait en prison. Cette
méthode rigide sera assouplie au fil des années grâce à des législations plus réalistes et opportunes.

Les Etats Africains seront influencés, avant l’entrée en vigueur de L’AUPC/AP, par ces différentes
législations. Ainsi, dès l’indépendance, on aura trois (3) grandes familles :

- La famille des pays qui appliquent le code de commerce tel qu’il a été reçu pendant la
période coloniale et modifié par la loi du 04 mars 1889. Ici coexistent deux (2) types de
procédures : la faillite et la liquidation judiciaire ( Congo, Cameroun, Bénin ).

- La famille des pays qui ont adopté un texte après l’indépendance en s’inspirant de la lois
française du 13 juillet 1967 ici, le règlement judiciaire coexiste avec la liquidation des biens
( Sénégal , Mali ).

- La famille des pays qui ont adopté un texte après l’indépendance e, s’inspirant des lois
françaises du 1er mars 1984 et du 25 janvier 1985. Ces lois prévoient les mesures préventives
et le règlement amiable des difficultés des entreprises et le redressement judiciaire et la
liquidation coexistent ( Guinée, Gabon ).

- Après la signature du traité de l’OHADA, et l’adoption de l’AUP /AP le 10 avril 1998, le


législateur OHADA, en modifiant récemment sa législation sur les procédures collectives
d’apurement du passif n’a pas manqué de moderniser les règles applicables en matières qui
se traduit par le renforcement des mesures préventives et une meilleure organisation des
mesures curatives. CAR le diagnostic posé laissait apparaitre que les objectifs fixés à savoir le
sauvetage des entreprises viables , la liquidation des entreprises non viables, le paiement
substantiel des créances , le tout de manière rapide et transparente, n’étaient pas atteints
dans des proportions significatives.

- Ainsi, dans le cadre des procédures de liquidation des biens ,il apparait que, dans les Etats
de l’espace OHADA , les dividendes reçus par les créanciers sont de faibles montants, les
couts d’administration excessifs du fait des honoraires exorbitants des syndics et de la durée
des procédures trop longue.

- Pour y remédier le législateur OHADA a procédé à une révision des textes en s’inspirant des
bonnes pratiques judiciaires internationales en la matière et en s’appuyant sur l’analyse
économique du droit.

- Il en résulte qu’une législation efficace en matière de procédures collectives doit satisfaire à


trois exigences principales, conformément à l’analyse économique du droit :

- 1/ Réhabiliter les entreprises viables et liquider rapidement les entités non viables ;

- 2/ Maximiser les montants recouvrés par les créanciers, sur la base de la valeur du marché
du patrimoine de l’entreprise débitrice ;

- 3/ Etablir un ordre précis de paiement des créances garanties ou non garanties.

Ce sont ces préoccupations qui sont prises en charge a travers la nouvelle législation dont l’étude à
travers ce cours s’articulera autour de ces idées avec le plan suivant :

Première partie : La prévention des difficultés des entreprises


Titre 1 : La prévention extrajudiciaire de la CP

TITRE 2 : La prévention judiciaire des difficultés

Seconde partie : Le traitement des difficultés des entreprises

Titre 1 : Condition d’ouverture du R.J et L.B

Titre 2 : Les effets du jugement déclaratif

Titre 3 : La période préparatoire à la solution du R.J et L.B

Titre 4 : Les solutions di R.J et L.B

Première partie : LA PREVENTION DES DIFFICULTES DES ENTREPRISES

Les mesures préventives sont destinées à détecter très rapidement les signes annonciateurs des
difficultés afin d’éviter l’évolution vers une situation irrémédiablement compromise. Elles sont de
plusieurs ordres et ne se trouvent pas toutes dans l’acte uniforme portant organisation des
procédures collectives ; certaines de ses mesures ont leur siège dans l’acte uniforme relatif au droit
des sociétés commerciales et groupement d’intérêt économique ainsi que l’acte uniforme
organisation et harmonisation de la comptabilité des entreprises.

En effet, les associés versent fréquemment des sommes en compte-courant afin d’améliorer la
trésorerie de l’entreprise ou souscrivent à une augmentation du capital pour accroitre ses fonds
propres ou ont recours à des techniques financières comme la défaisance. A titre individuel, les
associés peuvent renoncer à certains de leurs droits au sein de l’entreprise tels que l’abandon d’une
créance d’un dividende ou de solde d’un compte courant.

Les salariés ne sont pas du reste dans la mesure où ils renoncent parfois à une partie de leurs
revenus afin d’alléger les charges salariales et sauver les emplois.
Le passage de la logique sanction à celle de la protection de l’entreprise a permis au législateur
d’agir sur le plan comptable. En effet, la comptabilité a pour fonction de faire apparaitre la situation
financière et patrimoine de l’entreprise d’où le renforcement de l’information rétrospective à
travers l’extension du domaine des entreprises assujetties à la comptabilité et l’exigence de
l’information complémentaire afin d’apprécier le crédit de l’entreprise. Au surplus, le recours à
l’information prévisionnelle permet d’anticiper l’évolution de la situation de l’entreprise et à éviter
au besoin toute difficulté à l’entreprise. Ces mécanismes, qu’ils soient externes ou internes à
l’entreprise relèvent en principe du droit commun des sociétés ou du crédit. Ces mécanismes ont la
caractéristique d’être tantôt extrajudiciaires.

Titre 1 : LA PREVENTION EXTRAJUDICIAIRE DE LA CESSATION DES PAIEMENTS

Il s’agit pour l’essentiel des modes conventionnels de règle de difficultés qui se traduisent par
l’intervention d’un tiers dans la vie des entreprises. C’est ainsi que le législateur OHADA prévoit la
faculté de designer un conciliateur dans le cadre d’une procédure de conciliation. Cette faculté vient
de s’ajouter à la procédure d’alerte déjà organisée dans le cadre des entreprises sociétaires.

Chapitre I : LES PROCEDURES D’ALERTE

Elles sont prévues par l’AUDSC-GIE et l’AUDSCOO et ne concernent que les entreprises constituées
sous forme de société commerciale ou coopérative. Il faut examiner les différentes procédures
prévues avant d’étudier leurs régimes.

Section 1 : LES DIFFERENTES PROCEDURES PREVUS

Il y’a deux types d’alerte :

- L’alerte déclenchée par le commissaire des comptes, le conseil de surveillance ou la


commission de surveillance, selon le type de société coopérative concernée (article 119
AUDSCO) :

- L’alerte déclenchée par les associés.

En France, d’autres personnes peuvent déclencher l’alerte, par exemple les comités d’entreprises, les
institutions représentatives du personnel.

Le président du Tribunal peut lui aussi se saisir lui-même pour convoquer le dirigeant de l’entreprise.

Section 2 : Le déroulement des procédures d’alerte

Paragraphe 1 : L’alerte déclenchée par le commissaire aux comptes

L’Acte uniforme relatif au droit des sociétés distingue selon qu’il s’agit d’une Société par actions ou
d’une société d’un autre type. Cela s’explique probablement parce que dans les sociétés par actions,
tout au moins celles qui comptent un conseil d’administration, il y a trois 3 niveaux de prise de
décision : Organe de direction ou de représentation ( Président Directeur Général ou Président du
conseil d’administration, Président et Directeur Général ) , organe d’administration ( conseil
d’administration) et assemblées d’actionnaires, alors que dans les autres types de sociétés il n’y a
que deux niveaux : gérant et assemblée d’associés ; pour cette raison d’ailleurs, nous estimons que la
société anonyme avec administrateur général ainsi que la société par actions simplifiée devrait être
soumise au même régime que les société d’un autre types.
A. Dans les sociétés par actions : société anonymes S.A les sociétés par actions simplifiées
S.A.S

Si le commissaire découvre lors de l’examen des documents qui lui sont communiqués ou à
l’occasion de l’exercice sa mission, l’existence d’un fait qui est de nature à compromettre la
continuation des activités de l’exploitation , il demande des explications, selon le cas, soit au
Président du conseil d’administration ou au Président Directeur Général ou encore au Président , soit
à l’administrateur général. Le dirigeant qui reçoit cette demande doit répondre au délai de quinze 15
jours. Deux situations peuvent être envisagées :

. Soit le dirigeant destinataire répond ; dans ce cas il donne une analyse de la situation et indique le
cas échéant les mesures qui sont envisagées ;

 Soit il ne répond pas dans le délai ou s’il donne une réponse non satisfaisante, le problème
est déplacé vers un autre organe ; en effet le commissaire aux comptes invite selon le cas le
présent, le Président Directeur général ou le Président du conseil d’administration à faire
délibérer le conseil ; s’il s’agit d’une société anonyme avec administrateur général il invite
l’administrateur à se prononcer.

Là aussi deux cas de figure peuvent se présenter :

1. Soit le dirigeant convoque le conseil d’administration dans quinze jours ; dans le cas le
Commissaire aux comptes est convoqué à la délibération ; s’il s’agit d’un Administrateur
Général qui décide de se prononcer le Commissaire aux comptes est convoqué pour assister
à la séance au cours de laquelle l’administrateur va se prononcer sur les faits relèves ;

2. Soit le dirigeant ne convoque pas le conseil ou l’administrateur général ne se prononce pas ;


le commissaire aux comptes établit un rapport qui va être présenté à la prochaine assemblée
ou en cas d’urgence à une assemblée qu’il convoque ; la même solution est retenue lorsque,
malgré les décisions prises le commissaire aux comptes constate que la continuité de
l’exploitation reste compromise.

B. Dans les sociétés d’un autre type (SARL, SNC, SCS, SCOO)

Si, dans les sociétés d’un autre type, le commissaire aux comptes découvre l’existence des faits de
nature à compromettre la continuité de l’exploitation, il demande les explications au gérant qui est
tenue de répondre dans un délai de quinze 15 jours. Deux situations peuvent se présenter :

 Soit le gérant décide de répondre ; dans ce cas il donne une analyse de la situation et précise
le cas échéant les mesures envisagées ; si la réponse est satisfaisante la procédure s’arrête ;

 Soit il ne répond pas dans le cas, le commissaire aux comptes établi un rapport ; il peut
demander la présentation de ce rapport à la prochaine assemblée ou sa communication aux
associées ; il en est de même lorsque, malgré les mesures prises, le commissaire constate
que la continuité de l’exploitation reste compromise.

Dans les sociétés coopératives, l’ article 119 AUDSCOO reconnait au conseil de surveillance ( pour les
sociétés coopératives avec conseil d’administration ) ou à la commission de surveillance ( pour les
sociétés coopératives simplifiées ) la possibilité de demander par écrit ou oralement des explications
au comité de gestion ( pour les sociétés coopératives avec conseil d’administration) sur les faits de
nature à comprendre la continuité de la société coopérative qu’il a relevé à l’occasion de l’exercice
de sa mission. L’organe interpellé doit, au cours d’une réunion spéciale, répondre dans le mois qui
suit la réception de la demande d’explication. Il doit donner une analyse de la situation et préciser, le
cas échéant, les mesures envisagées. En l’absence de la réponse ou en cas de propositions peu
satisfaisantes le conseil ou la commission de surveillance établit un rapport spécial qu’il soumet à la
plus proche assemblée générale ou en cas d’urgence une réunion spéciale est convoquée à cet effet.

Paragraphe 2 : L’alerte déclenchée par les associés

Là aussi, on distingue les sociétés par action et les sociétés d’un autre type.

A. Dans les sociétés par actions

Chaque actionnaire ou associé a la possibilité de poser des questions sur tout fait de nature à
compromettre la continuité de l’exploitation. L’actionnaire ou l’associé ne peut poser les questions
que deux fois par exercice. Le destinataire de la question est, selon le cas soit le Président Directeur
Général, soit le Présent du conseil d’administration, soit l’administrateur Général ou le Président.

Lorsque le dirigeant reçoit la question, il a quinze jours pour répondre par écrit et dans le même délai
il transmet une copie de la question et de la réponse au commissaire aux comptes. Aucune sanction
spécifique n’est prévue lorsque le dirigeant ne répond pas.

B. Dans les autres sociétés

Dans ces sociétés aussi le législateur OHADA a consacré le droit, pour chaque associé, de poser au
gérant des questions sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation .La
périodicité est là aussi de deux fois par exercice. Le gérant est tenu, lorsque la question lui est
adressée, de répondre dans un délai de quinze 15jours et de communiquer une copie de la question
et de la réponse au commissaire aux comptes.

Il convient d’observer qu’il n’ya pas toujours de commissaire aux comptes dans ce type de société ;
c’est ce qui explique que ce type de mesure préventives est d’une efficacité douteuse ; ceci est
d’autant plus vrai que l’on peut ne peut les envisager lorsqu’il s’agit de commerçant, personne
physique. On comprend dans ces conditions l’importance de la mesure préventive prévue par l’acte
uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif qui peut être mise
en œuvre aussi lorsqu’il s’agit de personne physique que de personne morale.
CHAPITRE 2 : LA PROCEDURE DE CONCILIATION

C’est une des innovations du législateur OHADA de 2015 dont la finalité est de permettre un
sauvetage de l’entreprise en difficulté en dehors de toute décision de justice, de manière rapide
confidentielle. Autrement dit, elle vise à trouver un accord amiable avec les principaux créanciers du
débiteur en vue de mettre fin à ses difficultés.

Cette procédure consiste pour le chef d’entreprise à saisir le président de la juridiction compétente
en matière de procédure collective aux fins de désignation d’un conciliateur dont la mission sera de
rapprocher le débiteur de ses créanciers et de parvenir à un accord selon lequel une contrepartie des
sacrifices financiers consentis par ces derniers le débiteur s’oblige à prendre des mesures de
redressement. Le traitement des difficultés est donc contractuel discret, facultatif et simple. L’accord
amiable qui en résulte est une convention du droit privé, à titre onéreux, un acte collectif marqué par
l’intuitu personae.

L’accord amiable résultant de la conciliation est donc une technique privée de traitement préventif
des difficultés de l’entreprise.

La procédure de conciliation est organisé par l’article 5-1 à 5-14 AUPC/AP qui décrivent la procédure
devant le président de la juridiction compétente en matière de procédure collective. Cette procédure
se veut souple et attractive aussi bien pour le débiteur que pour les créanciers. Le législateur OHADA
précise les conditions d’ouverture de la conciliation (section 1) et organise des effets (section 2).
Section 1 : L’ouverture de la conciliation

Aux termes des articles 5-1 et 1-1 AUPC, la conciliation est ouverte à toute personne physique
exerçant une activité professionnelle indépendante, civile , commerciale, artisanale ou agricole, à
toute personne morale de droit privé ainsi qu’a toute entreprise publique ayant la forme d’une
personne morale de droit privé qui connait des difficultés avérées ou prévisibles mais qui ne sont pas
encore en état de cessation des paiements.

C’est une procédure au domaine très large (parag.1) et au mécanisme d’élaboration bien précis
(Parag.2).

Parag .1 : Le domaine de la procédure de conciliation

Elles tiennent à la personne et à la situation économique et financière. Pour définir le domaine


d’application de la conciliation, article 5-1 fait référence à l’article 1-1 AUPC qui précise les
bénéficiaires (A) qui doivent éprouver une difficulté avérée ou prévisible mais sans être en état de
cessation des paiements (B) et implicitement doivent être susceptibles d’être sauvés (C).

A. Les personnes bénéficiaires de la conciliation

A la lecture des textes, on note une diversité des personnes susceptibles de bénéficier d’un accord
amiable. En effet l’article 5-1 AUPC donne accès à la procédure de conciliation devant le président de
la juridiction compétente en matière de procédure collective à tout débiteur « personne physique
exerçant une activité professionnelle indépendante, civile, commerciale, artisanale ou agricole, à
toute personne morale de droit privé ainsi qu’a toute entreprise publique ayant la forme d’une
personne morale de droit privé » . La formule est donc très large et elle présente une certaine
redondance. Une fois visé l’exercice d’une activité professionnelle indépendante, il n’était a priori
pas nécessaire d’ajouter « civile, commerciale, artisanale ou agricole ». Cette précision présente
toutefois l’avantage de lever toute ambigüité sur le champs d’application de l’AUPC révisé et s’inscrit
dans la vocation pédagogique du texte c’est particulièrement vrai pour les professions civiles dont
l’entrée dans le champ de la commercialité a toujours été discutée.

En d’autres termes, toute personne qui exerce une activité commerciale peut désormais bénéficier
des dispositions de l’AUPC, qu’elle ait ou non souscrit aux formalités imposées pour avoir la qualité
de commerçant et s’en prévaloir. Ainsi, l’entreprenant, mais également un professionnel exerçant
dans le secteur informel est visé.

Par ailleurs, le champ d’application de l’AUPC n’est donc plus limite aux commerçants puisque sont
désormais concernées les activités civiles, artisanales et agricoles. Le droit des procédures
collectives dans l’espace OHADA s’applique désormais à tout le secteur «  économique » les
avocats, médecins, architectes, etc. mais aussi les artisans et les agriculteurs sont concernés. En
évoquant une activité indépendante, le texte exclut bien sur tous les salariés et plus généralement
toute personne qui exercerait une activité dans le cadre de laquelle elle est soumise à un lien de
subordination.

Par conséquence peu importe la forme de l’entreprise concernée, entreprises individuelles, sociétés
commerciales ou civiles, associations, groupement d’intérêt économique et sociétés coopératives.

Peu importe la taille des entreprises dans la mesure où la loi n’a pas prévu de seuil particulier pour
accéder à la procédure de conciliation.

B. Les difficultés rencontrées


La procédure de conciliation suppose que la personne qui en demande le bénéfice «  connaisse des
difficultés avérées ou prévisibles  » mais ne se trouve pas encore en état de cessation des paiements.

La conciliation est ouverte à des personnes qui rencontrent des difficultés avérées et non pas
simplement prévisibles. Ces difficultés financières peuvent être d’ordre économique, ou même
juridique .Les difficultés financiers peuvent être liées aux retards de paiements, à l’absence de
trésorerie. Sur le plan économique, ces difficultés peuvent tenir, notamment, à la nature des
marchandises achetées ou livrées ou aux délais de livraison. Elles peuvent aussi être d’ordre juridique
et résulter, par exemple, des modalités d’exécution ou de modification de certains contrats.

C. Les mesures de redressement

La conciliation n’est envisageable que si la personne qui en demande le bénéfice entend prendre des
mesures de redressement, ce qui suppose qu’elle ne se trouve pas dans une situation de cessation
des paiements. La mission du conciliateur étant de favoriser la conclusion d’un accord amiable
destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise » , le débiteur doit pouvoir persuader le président
qu’avec un financement adapté, l’entreprise pourra être remise sur pied et pourra surmonter des
difficultés qui demeureront passagères. C’est pourquoi certains documents sont exigés à l’appui de la
demande afin d’obtenir la désignation d’un conciliateur. IL est indispensable que le débiteur présente
lui-même les moyens de faire face aux difficultés rencontrées, afin d’effectuer en tout ou partie sa
restructuration financière ou opérationnelle pour la sauvegarder. Cette restructuration s’effectue par
le biais de négociations privées et de la conclusion d’un accord de conciliation négocié entre le
débiteur et ses créanciers ou au moins ses principaux créanciers grace à l’appui d’un tiers neutre,
impartial et indépendant dit é « conciliateur »

Le conciliateur désigner par le tribunal aura pour mission de favoriser la conclusion d’un accord
amiable entre le débiteur et ses principaux créanciers, destiné à mettre fin aux difficultés de
l’entreprise.

Parag.2 : La mise en œuvre de la procédure de conciliation

L’AUPC prévoit des règles de forme assez libérales pour la procédure de conciliation qui doit
intervenir avant la cessation des paiements. La désignation du conciliateur est subordonnée à la
communication de certains documents au president du tribunal (A) devant favoriser la conclusion
d’un accord (B).

A. La saisine du président du tribunal

L’ouverture de la procédure de conciliation exige une initiative du débiteur seul ou conjointement


avec un ou plusieurs créanciers. Ce qui veut dire que le débiteur n’a pas le monopole de l’initiative.
La demande doit être formulée par voie de requête, donc par écrit. Elle doit être accompagnée d’un
certain nombre de documents signés et certifiés conformes et sincères par le requérant et datant de
moins de trente 30 jours. Dans le cas ou l’un des documents ci-dessus exigés ne peut être fourni, ou
ne peut l’être qu’incomplètement, la requête doit contenir l’indication des motifs de cet
empêchement. Il s’agit des documents suivants :

1) Une attestation d’immatriculation, d’inscription ou de déclaration d’activité à un


registre ou à un ordre professionnel ou, à défaut, tout autre document de nature à
prouver la réalité de l’activité exercée par le débiteur ;

2) Le cas échéant les états financiers de synthèse comprenant le bilan, le compte de


résultat, un tableau financier des ressources et emplois, l’état annexé et en tout état
de cause, le montant du chiffre d’affaire et des bénéfices ou des pertes des trois
derniers exercices ;

3) Un état de la trésorerie et un état chiffré des créances des dettes avec indication des
dates d’échéance ;

4) Un document indiquant le nombre de travailleurs déclarés et immatriculés à la date


de la demande

5) Une attestation émanant du débiteur par la quelle il déclare sur l’honneur ne pas
être en état de cessation de paiement et précise en outre qu’il n’est pas soumis à
une procédure de règlement préventif de redressement judiciaire ou de liquidation
des biens qui ne serait pas clôturée ;

6) Si le débiteur propose un conciliateur un document indiquant les noms, prénoms,


qualités et domicile de la personne proposée et une attestation de cette dernière
indiquant ses compétences professionnelles.

7) Le cas échéant, un document indiquant les noms, prénoms, domicile des créanciers
qui se joignent à la demande du débiteur et le montant de leurs créances et des
éventuelles suretés dont elles sont assorties.

La requête est adressée au président du tribunal compétent en matière de procédure collective du


lieu du siège social ou du principal établissement du débiteur.

Dès sa réception, le président instruit la demande et fait convoquer, par le greffier, le débiteur pour
une audience à huit clos au cours de la quelle il prend la décision de désigner ou non un conciliateur.

Avant de prendre sa décision, le président du tribunal, pour apprécier la situation du débiteur, ne


peut se renseigner sur la situation économique du débiteur qu’à travers les éléments figurant dans la
requête.

B. La désignation du conciliateur.

Aux termes de l’article 5-3 AUPC, le président de la juridiction compétente peut désigner un
conciliateur pour une durée n’excédant pas 3 mois ,mais qu’il peut par décision motivé, proroger
d’un mois au plus à la demande du débiteur , après avis écrit du conciliateur. A l’expiration de ces
délais, la conciliation prend fin de plein droit et il ne peut être ouvert une nouvelle procédure de
conciliation avant l’expiration d’un délai de trois 3 mois.

La décision ouvrant ou rejetant la conciliation n’est pas publiée afin de préserver le caractère
confidentiel qui constitue un sérieux avantage pour le débiteur. La décision du président intervenant
en l’absence de litige, la demande est gracieuse par conséquent, le président qui est saisi par une
requête ouvre la procédure de conciliation par une ordonnance sur requête à travers laquelle le
conciliateur est désigné.

Cependant, le président de la juridiction n’est pas totalement libre de son choix de la personne du
conciliateur car le débiteur peut lui en proposer un.

Il résulte de l’article 5-4 AUPC que le conciliateur doit avoir le plein exercice de ses droits civils,
justifier de sa compétence professionnelle et demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties
concernées par la conciliation.
Le conciliateur qui accepte sa mission doit porter cette acceptation à la connaissance du président de
la juridiction compétente, sans délai. S’il suppose en sa personne une cause de récusation, il doit
informer le président de la juridiction et ne peut accepter cette mission qu’avec l’accord unanime et
écrit des parties concernés par la conciliation. Aucun parent ou allié du débiteur jusqu’au quatrième
degré inclus ne peut être désigné. Il en va de même pour tout magistrat en fonction ou ayant quitté
ses fonctions depuis moins de cinq ans.

Les modalités de rémunération du conciliateur sont déterminées par le président de la juridiction


compétente avec l’accord du débiteur au jour de l’ouverture de la conciliation. Les critères sur la
base desquels elle est arrêtée, son montant maximal et le montant des provisions sont précisés dans
un document signé par le débiteur et conciliateur et annexé à la décision d’ouverture. Si au cours de
sa mission, le conciliateur estime que le montant initialement déterminé est dépassé, il doit en
informer sans délai le président de la juridiction qui fixe les nouvelles conditions avec l’accord du
débiteur. A défaut d’accord, il est mis fin à la mission du conciliateur. La rémunération du
conciliateur est à la charge du débiteur et fait l’objet d’une ordonnance de taxe. Cette
réglementation de la rémunération du conciliateur, sauf son caractère contractuel, parait assez
confuse et de mise en œuvre difficile. Si l’on ne peut pas être plus, il serait peut-être préférable de se
limiter à indiquer qu’elle est convenue entre les parties tant dans son montant que dans ses
modalités de paiement.

Le conciliateur peut obtenir du débiteur tout renseignement utile à la réalisation de sa mission. Il


n’est pas une partie à la procédure. Il n’exerce aucune fonction d’assistance ou de représentation du
débiteur, mais sa mission est importante et consiste à « favoriser la conclusion entre le débiteur et
ses principaux créanciers ainsi que, le cas échéant ses contractants habituels, d’un accord amiable
destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise ».

Le conciliateur rend compte de sa mission au président de la juridiction compétente. Il informe celui-


ci immédiatement de l’éventuelle survenance de la cessation des paiements afin de mettre fin à la
conciliation sans délai. Le président doit y mettre fin dès qu’il apprend que le débiteur est en
cessation des paiements, quelles que soient ses sources d’information : ministère public, créancier,
débiteur, etc. Il est également mis fin à la conciliation sur rapport écrit de ce dernier adressé, sans
délai au président en cas d’impossibilité de parvenir à un accord.

En principe, la participation à la conciliation n’emporte pas de restriction aux droits des créanciers.
Toutefois, si le débiteur est mis en demeure ou poursuivi par un créancier appelé à la conciliation
pendant la période de recherche de l’accord , le président du tribunal peut à la demande du débiteur
et après avis du conciliateur, reporter le paiement des sommes dues et ordonner la suspension des
poursuites engagée par le créancier qui négocierait de mauvaise foi.

Section 2 : Les effets de la conciliation

L’ouverture d’une procédure de conciliation, tant qu’elle est cours fait obstacle à l’ouverture d’une
procédure judiciaire.

L’ouverture d’une conciliation tend à obtenir un accord amiable entre le débiteur et ses créanciers.

Le débiteur ne parviendra à la conclusion d’un accord de conciliation que s’il se présente un plan
solide pour mettre fin à ses difficultés.

L’accord amiable ne concerne pas nécessairement tous les créanciers ; l’accord peut simplement
réunir les principaux créanciers ainsi que si le conciliateur l’estime utile ses contractants habituels. La
détermination de ceux-ci dépendra, à l’évidence, de l’activité et du secteur économique dans lequel
évolue le débiteur. Rien n’empêcherait aussi des salariés de participer a l’accord en renonçant, par
exemple, a une partie de leur énumération ou à des avantages acquis.

L’accord de conciliation oblige les parties a l’accord et a ne produit pas d’effet à l’égard des tiers
(parag 1). Son l’inexécution produit également des effets (parag 2)

Paragraphe 1 : les effets relatifs et obligatoire de l’accord de conciliation

L’accord amiable ne produit ses effets qu’a l’égard de ses seuls signataires (A) et ces effets
deviennent fort en cas de formalisation de l’accord (B).

A. Les effets entre les parties

La conclusion de l’accord engage les parties signataires dans les termes de ce qui a été conclu. Les
créanciers renoncent à exercer des poursuites en recouvrement des créances portées dans l’accord.
L’article 5-12 AUPC énonce en effet, que « pendant la durée de son exécution, l’accord interrompt ou
interdit toute action en justice et arrête ou interdit toute poursuite individuelle, tant sur les meubles
que les immeubles du débiteur, dans le but d’obtenir le paiement des créances qui en font l’objet ».

En d’autres termes, la situation des créanciers, parties à l’accord, est gelée : ils s’interdisent de
poursuivre le débiteur en paiement. En contrepartie, l’article 5-12 AUPC ne prévoit que « les délais
impartis aux créanciers parties à l’accord a peine de déchéance ou de résolution des droits afférents
aux créances mentionnées par l’accord ».

Peu importe l’objet des poursuites envisagées et, notamment, qu’elle porte sur les meubles ou sur
les immeubles du débiteur. Mais l’article 5-12 AUPC n’arrête expressément que les actions en
paiement des créances qui font l’objet de l’accord.

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