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Diphtérie

Objectifs

1. Définir la diphtérie
2. Décrire les signes cliniques de la diphtérie commune
3. Citer les complications de la diphtérie
4. Citer les éléments du diagnostic différentiel
5. Décrire le traitement de la diphtérie
6. Donner le calendrier vaccinal selon le PEV national

Plan
I.Introduction
I.1 Définition
I.2 Epidémiologie
I.3 Historique
I.4 Réservoir du virus et mode de transmission
II. Physiopathologie
III. Diagnostic
III.1 Diagnostic positif
III.1.1. Arguments épidémiologiques
III.1.2 Signes cliniques
III.1.3 Signes paracliniques
III.1.4 Evolution
III.1.5 Formes cliniques
III.2 Diagnostic différentiel
III.2.1 Mononucléose infectieuse 
III.2.2 Autres angines 
III.2.3 Candidose oropharyngée 
III.2.4 Impétigo :
III.2.5 La paralysie des membres inférieurs
IV. Traitement
IV.1 Isolement 
IV.2 Sérothérapie antidiphtérique 
IV.3 Antibiothérapie 
IV.4 Réanimation 
IV.5 Surveillance du traitement
V. Traitement préventif
VI. Stratégie de prise en charge des épidémies
VII. Conclusion

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I.Introduction
I.1 Définition
La diphtérie est une toxi-infection hautement contagieuse, grave et immunisante due à un
bacille Gram positif : Corynebacterium diphteriae encore appelée bacille de Klebs-Löeffler.

I.2 Epidémiologie: maladie très contagieuse, la diphtérie est caractérisée par un potentiel
épidémique extrême. La diphtérie est rare en Afrique noire. Au Sénégal, le dernier cas de
diphtérie a été notifié en 1985. En Europe occidentale elle a été éradiquée grâce à la
généralisation de la vaccination.
Elle a été déclarée par l’OMS « urgence sanitaire internationale » en 1994.

I.3 Historique
La diphtérie a été décrite en 1826 par Pierre BRETONNEAU. C. diphteriae a été découvert
par Théodor KLEBS en 1883 et isolé par Friedrich LOFFLER en 1884 puis Emile ROUX en
1889. Elle était la plus grande cause de mortalité infantile à la fin du 19 ème siècle. En 1888
Roux et Yersin découvre que la maladie est due à la toxine produite par C. diphteriae. Grâce
aux travaux de BEHRING, ROUX et ses collaborateurs mettent au point en 1894 la
sérothérapie qui fera tomber la mortalité de 40% à 2%. Le vaccin est l’œuvre de Gaston
RAMON en 1923.

I.4 Réservoir du germe et mode de transmission :


L’homme est le seul réservoir de Corynebacterium diphteriae.
La transmission est directe de personne à personne par les gouttelettes respiratoires.

II. Physiopathologie
C. diphteriae est une bactérie toxinogène. Il pénètre dans l’organisme en général par voie
respiratoire et parfois cutanée. Il se multiplie au niveau du site de pénétration (rhinopharynx),
provoquant la survenue de fausses membranes extensives et la production d’exotoxine.
Cette toxine agit localement au niveau du rhinopharynx où elle entraîne une angine pseudo-
membraneuse. La toxine peut diffuser par voie sanguine pour atteindre le cœur, les reins et le
système nerveux entraînant une paralysie.
Les fausses membranes peuvent obstruer le rhinopharynx et causer la mort par asphyxie.

III. Diagnostic
III.1 Diagnostic positif
III.1.1. Arguments épidémiologiques
Absence de vaccination et en cas de séjour en zone d'endémie.
III.1.2 Signes cliniques
TDD: angine diphtérique commune du jeune enfant non vacciné
- Incubation : silencieuse, de 1 à 5 jours, 7 jours au maximum.
- Invasion : installation progressive
o Malaise général
o Fièvre modérée de 38°C à 38,5°C

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o Dysphagie modérée avec des amygdales rouges, tuméfiées recouvertes d’un enduit
opalin.
- Phase d’état : 24 à 48 heures après la phase de début
Maître symptôme : l’angine à fausses membranes.
Le tableau clinique associe :
o Une fièvre peu élevée
o Un coryza séreux ou muco-purulent, unilatéral, avec érosion narinaire
o Des amygdales recouvertes de fausses membranes blanches nacrées ou grisâtres,
fortement adhérentes, cohérentes et reproductibles qui en l’absence de traitement
envahissent rapidement les piliers du voile, la luette en « doigt de gant ».
o La muqueuse sous-jacente est simplement congestive.
o Des adénopathies rétro et sous-angulo-maxillaires parfois volumineuses et
douloureuses.

angine à fausses membranes tuméfaction cervicale (buffalo neck)

III.1.3 Signes paracliniques


Isolement de Corynebacterium diphteriae après prélèvement de gorge à l’aide d’un écouvillon
au niveau de la lésion puis examen direct et ensemencement sur milieux spécifiques au
laboratoire.
III.1.4 Evolution
 Non traitée, l’évolution se fait précocement vers l’extension des fausses membranes
associée à un important œdème de la muqueuse sous-jacente. Ensuite, ces fausses
membranes vont se détacher pour se localiser dans le pharynx et les voies aériennes
accentuant l’obstruction de celles-ci et entraînant une détresse respiratoire mortelle.
Les complications toxiniques graves peuvent également survenir et provoquer le décès
du patient.
 Traitée précocement (sérothérapie et antibiothérapie) l’évolution peut être favorable. Les
fausses membranes peuvent continuer à s’étendre pendant les 24 premières heures qui
suivent l’administration de l’antitoxine. Au bout d’une semaine elles vont devenir
molles, moins adhérentes et elles se fragmentent pour disparaître.

III.1.5 Formes cliniques


 Formes symptomatiques :
- Formes asymptomatiques (porteurs sains)
- Formes nasales pures avec écoulement purulent et fausses membranes

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 Formes compliquées
Elles sont provoquées par l’effet de la toxine et surviennent en l’absence d’une prise en
charge appropriée notamment une sérothérapie précoce.
- Angine diphtérique grave : début aigu, très extensive, accompagnée d’adénopathies
importantes et d’hyperthermie (40°C).
- Angine diphtérique maligne : Elle peut réaliser :
o le syndrome précoce de MARFAN sous forme de myocardite survenant 7
jours après l’angine. Elle est une complication majeure qui se caractérise par
une bradycardie, des palpitations, des lipothymies. L’électrocardiogramme
systématique montre des troubles de conduction ou du rythme.
o le syndrome tardif de GREVET et MEZARD qui apparaît vers le 35ème jour
et se manifeste par une paralysie de l’accommodation et du voile du palais
ainsi qu’une polyradiculonévrite bilatérale et symétrique des membres
inférieurs.
o la diphtérie laryngée (croup) impose une intubation ou la trachéotomie en
urgence. Le croup associe une dysphonie, une toux et une voix rauques puis
éteintes, une dyspnée intermittente puis permanente avec cornage, tirage et
accès de suffocation témoignant d’une obstruction des voies aériennes
inférieures.
- Les complications neurologiques : Sur le plan clinique, les paralysies peuvent être
précoces ou tardives, partielles ou généralisées. Survenant dans un ordre
chronologique immuable, elles intéressent le voile du palais (paralysie vélopalatine),
les membres, les muscles respiratoires (diaphragme, muscles intercostaux) parfois
certains nerfs crâniens (paralysie de l’accomodation).
- Atteinte rénale : rare, associe protéinurie, hématurie et insuffisance rénale oligo-
anurique.

 Formes topographiques
- La diphtérie cutanée : forme clinique primitive ou complication parfois. Elle
semble fréquente en Afrique centrale et orientale. Elle se manifeste par une
ulcération cutanée impétiginée ou eczématiforme contenant le bacille diphtérique.
Elle n’est pas grave et est susceptible d’induire une immunité.
- Autres localisations rares : oculaires, articulaires ou génitales.

 Formes selon le terrain


- Les patients vaccinés peuvent développer une forme frustre de la maladie.
- Les nourrissons, les personnes âgées de plus de 60 ans et les alcooliques sont
exposés à des formes graves.

III.2 Diagnostic différentiel


III.2.1 Mononucléose infectieuse : Elle est due au virus d’Epstein Barr (EBV). Elle survient
surtout entre 18 et 25 ans.
Clinique : adénopathies diffuses, asthénie intense, éruption cutanée, splénomégalie.
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III.2.2 Autres angines :
Dans les angines érythémato-pultacées d’origine streptococcique ou virale, les amygdales sont
recouvertes d’un enduit blanchâtre ponctiforme.
III.2.3 Candidose oropharyngée : survient sur un terrain particulier (immunodépression) et
l’inflammation locale est moins importante avec des dépôts blanchâtres qui se détachent en
général facilement.
III.2.4 Impétigo :
III.2.5 La paralysie des membres inférieurs
Poliomyélite aiguë antérieure : l’atteinte est asymétrique et purement motrice.

IV. Traitement
IV.1 Isolement : Tout cas avéré ou suspect de diphtérie doit être isolé du fait de la
contagiosité extrême de la maladie.
IV.2 Sérothérapie antidiphtérique : Les doses à administrer dépendent de l’âge, du délai de
prise en charge et de la sévérité du tableau clinique. Elles varient de 20 000 à 100 000 unités.
Elle fait appel à du sérum antidiphtérique d’origine équine administré par voie sous-cutanée
et/ou intramusculaire selon la méthode de BESREDKA : 0,1 ml de sérum puis 0,25 ml 15
minutes plus tard. La quantité restante sera administrée après un temps d’observation de 15
minutes, en l’absence d’effet secondaire, la moitié en SC et l’autre moitié en IM.
La voie intraveineuse lente (60 minutes) après dilution dans du sérum physiologique peut
également être utilisée dans les formes graves.

Doses 20 000 à 40 000 UI 40 000 à 60 000 UI 60 000 à 100 000 UI


Circonstances - Prise en charge avant 48 h - Atteinte naso- - Prise en charge après 72 h
- Fausses membranes pharyngée - Maladie évolutive
localisées au pharynx et - Gonflement diffus du cou.
larynx

IV.3 Antibiothérapie : Le traitement antibiotique est indiqué aussi bien pour les malades que
les sujets contacts. L’antibiothérapie permet de raccourcir le portage de la bactérie. Elle fait
appel aux pénicillines ou aux macrolides.
o Pénicilline G : 100 000 UI/kg  ou pénicilline A: 50 mg/kg
o Erythromycine : 50 mg/kg/jour en cas d’allergie à la pénicilline.
La durée de l’antibiothérapie sera de 14 jours pour les malades et de 7 jours pour les
contacts.
IV.4 Réanimation : Elle est indiquée dans les formes graves et/ou compliquées.
o Intubation nasotrachéale ou trachéotomie et ventilation en cas de croup.
o Assistance respiratoire en cas de paralysies des muscles respiratoires.

IV.5 Surveillance du traitement


- Constantes : température, fréquence respiratoire, tension artérielle et pouls.
- Examen :

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 de l’oropharynx pour apprécier les signes locaux, en particulier l’extension des fausses
membranes,
 du cœur (clinique et ECG),
 du système nerveux.

V. Traitement préventif
La prophylaxie repose sur le dépistage, le traitement des porteurs sains (gorge et peau) et la
vaccination.
Les personnes contacts des cas peuvent être soumises à une antibioprophylaxie à base de
benzathine-pénicilline par voie intramusculaire en dose unique : 600 000 unités avant l’âge de
6 ans et 1 200 000 unités au delà de cet âge. Une surveillance clinique des contacts est
également recommandée pendant 7 jours.
La vaccination incluse dans le PEV, lancée par l’OMS depuis 1974.
Les anatoxines antidiphtériques et antitétaniques sont souvent associées ensemble. Elles sont
parfois combinées au vaccin contre la coqueluche (DTC).
L’anatoxine diphtérique est administrée par voie SC ou IM à raison de 3 doses de 0,5 ml à 4
semaines d’intervalle. Le rappel est effectué un an après, puis tous les 5 ans (2 à 3 fois en
général).

VI. Stratégie de prise en charge des épidémies


La diphtérie étant une maladie grave et à potentiel épidémique élevé, sa survenue a conduit à
l’adoption des mesures appropriées suivantes :
1. Diagnostic précoce et traitement des cas en milieu hospitalier
2. Identification et administration d’antibiotiques aux sujets contacts
3. Vaccination de masse de la population.
Afin de faciliter cette prise en charge, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a adopté
en1995 les définitions opérationnelles ci-dessous :
- Cas suspect : naso-pharyngite, amygdalite ou laryngite pseudo-membraneuse
- Cas probable : cas suspect associé en plus à au moins l’un des 9 éléments suivants :
contact récent avec un cas confirmé (< 2 semaines), épidémie de diphtérie dans la zone
géographiquement considérée, stridor, œdème du cou, insuffisance rénale, pétéchies, choc
toxinique, myocardite ou paralysie motrice dans les 6 semaines suivantes, décès.
- Cas confirmé : cas probable avec isolement d’une souche de Corynebactérium
diphtheriae toxinogène à partir d’un site habituel de la maladie ou augmentation d’au
moins quatre dilutions du titre d’anticorps anti-diphtériques en l’absence de vaccination.

VII. Conclusion
La diphtérie est une maladie grave et très contagieuse autrefois pourvoyeuse d’une grande
mortalité en particulier dans la population infantile. La généralisation de la vaccination l’a fait
reculer dans bien des régions du globe. Cependant la survenue des épidémies récentes en Asie
et en Europe de l’Est renvoie à plus tard l’échéance de son éradication et impose une
vigilance permanente et le maintien voire l’intensification de la politique vaccinale en cours.

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