par Charles Pomerleau, B. Sc.
, MBA
La cartographie
de la chaîne de valeur
P our demeurer compétitif, faire face
aux nouvelles réalités de l’industrie
et ainsi assurer sa survie, modifier
ses habitudes est souvent la clé du suc-
cès. Parce qu’il est souvent pris dans sa
routine, le gestionnaire peut difficilement
cibler les éléments à améliorer. Pour ce
faire, il existe plusieurs outils d’analyse
tels que la cartographie de la chaîne de
valeur (en anglais, value stream mapping
ou VSM).
Cet outil a été développé par Toyota au
début des années 80. Il permet de visua-
liser les trajets (flux) empruntés par la
matière et l’information, des fournisseurs
jusqu’à la réception du produit fini par le
client. C’est un outil couramment utilisé
dans les processus d’analyse de produc-
tion allégée (ou lean manufacturing). Très
visuelle et simple d’utilisation, la carto-
graphie de la chaîne de valeur s’effec-
Productivité
tue en trois étapes et prend moins d’une
journée à réaliser. Prenons ici l’exemple
d’une usine de sciage de feuillu.
Étape 1 : État actuel
Commençons par reproduire à l’aide de
symboles (FIGURE 1) l’état actuel du
processus à analyser. Cela peut représen-
ter le processus de production en entier
ou le travail effectué par un service. Ici,
nous avons inclus le processus de pro-
duction depuis l’approvisionnement en
billes jusqu’à la livraison de planches
aux clients. L’état actuel doit représen-
ter (1) l’ensemble des processus à ana-
lyser, (2) diverses données pertinentes
pour chacun de ces processus (nom-
bre d’opérateurs, temps de cycle (T/C),
temps de mise en course (set-up ou T/S),
taux d’efficacité des équipements (T/E),
etc.), (3) les stocks et, finalement, (4)
Figure 1 – Symboles utilisés
Le bois et sa transformation • Septembre - Octobre 2006 / 35
l’information sur les clients et les four-
nisseurs. Dans l’exemple (figure 3), nous
comptons trois processus principaux,
à savoir le sciage, le séchage et la fini-
tion. On ajoute au diagramme le flux
d’information nécessaire pour réussir
à produire les bons produits dans les
bonnes quantités et au bon moment.
Dans ce cas-ci, la compagnie obtient de
ses clients une prévision mensuelle ainsi
qu’une commande hebdomadaire. Cette
information est intégrée au système ERP
qui génère un calendrier de production
et un autre de commandes.
Finalement, on trace la ligne de temps
qui permet de différencier le délai de
production du temps de traitement
d’une pièce (FIGURE 2). Dans le cas
de la figure 3 (page 34), nous remar-
quons un délai de production de plus
de 18 jours pour un temps de traite-
 Productivité

du séchage peuvent être l’indice d’un

goulot d’étranglement. Une solution
de rechange, comme la sous-traitance,
pourrait être envisagée.

Figure 2 – Symboles utilisés pour la ligne de temps
ment de 22,8 secondes. L’objectif est
de rapprocher le plus possible le temps
de production de la valeur du temps de
traitement.
Étape 2 : État futur
Que peut-on détecter à l’aide de cet
outil ? La cartographie de la chaîne
de valeur permet de cerner les sources
potentielles d’amélioration. Souvent,
une analyse plus poussée permettra de
valider et de prioriser les actions à entre-
prendre.
Nous devons d’abord calculer le
cycle de production (ou temps takt),
qui tient compte du temps de travail
disponible et de la demande du client
pour définir le rythme idéal de produc-
tion (FIGURE A).
En se basant sur l’exemple de la figure 3
(page suivante), voici quelques données
qu’il est possible d’en tirer.
1) Rythme de production et goulot
d’étranglement
Une activité dont le temps de pro-
duction est supérieur au cycle de pro-
duction (6,8 secondes) signifie que
l’entreprise n’est pas en mesure de
répondre à la demande des clients.
C’est le cas du séchage. Au contraire,
un temps de production inférieur au
cycle de production signifie que la
capacité de production est supérieure
à la demande. Il y a un risque de sur-
production, qui est un type de gas-
pillage et doit être évité si possible.
Des stocks importants avant l’étape
2) Besoin d’indicateurs de
performance
Beaucoup de données sont transmises
au cours du processus. Cela peut signi-
fier un surplus ou un manque de con-
trôle de l’information. Dans ce cas, des
indicateurs de performance adéquats
permettraient d’améliorer la qualité de
l’information disponible et faciliter la
prise de décisions.
3) Besoin en maintenance préventive
Le taux d’efficacité de l’équipement
du service de sciage est de 55 %. Cette
valeur signifie que près de la moitié du
temps, le service de sciage n’est pas
en production. Cela peut mettre en
lumière un système de maintenance
préventive déficient.
Une fois les améliorations ciblées, il
est possible de concevoir une nouvelle
cartographie représentant l’état futur
désiré pour le processus.

Cycle de production = Temps de travail disponible par quart de travail Étape 3 : Plan d’intervention
Cette étape est primordiale afin d’as-
Demande de la clientèle par quart de travail surer le suivi du processus d’améliora-
Exemple : tion. Un bon plan d’intervention devrait
7,5 heures/quart = 27 000 secondes = 6,8 secondes/PMP contenir les points à améliorer, la façon
80 000 PMP/mois 4 000 PMP/quart choisie pour mesurer les améliorations,
la stratégie privilégiée pour atteindre les
Le client achète ce produit au rythme d’un PMP objectifs d’amélioration et des échéan-
toutes les 6,8 secondes. ciers réalistes.
Figure A En conclusion, la cartographie peut
s’avérer utile dans l’analyse d’un proces-

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sus. Bien qu’elle ne permette pas de
résoudre les problèmes, elle permet
de diriger les efforts dans la bonne
direction. De plus, en réunissant plu-
sieurs intervenants dans la réalisa-
tion de cette démarche, on s’assure
Photo : Autolog
Figure 3
qu’ils aient tous la même vision de charles.pomerleau@forac.ulaval.ca
l’organisation. Pour plus d’informa-
tion sur la cartographie de la chaîne
de valeur, je vous invite à consulter
les sites suivants ou à contacter un
de nos conseillers.
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