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« la faculté de rétracter son engagement serait incontestablement une prime à la mauvaise

foi.  » (Marie-Laure Mathieu-Izorche, L'irrévocabilité de l'offre de contrat, D. 2009, p.440).


L’arrêt rendu le 7 mai 2008 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation en est une
illustration.
Dans les faits, le 24 juin 2000, une proposition d’achat d’un immeuble avec remise d’un
dépôt de garantie a été signée par l’intermédiaire d’un agent immobilier. La pollicitante a
retiré son offre le 26 juin 2000, alors que le lendemain l’agent immobilier lui transmettait
l’acceptation de l’offre par les bénéficiaires. La pollicitante a assigné les bénéficiaires en
restitution de la somme versée et au paiement de dommages-intérêts.
Face à cette situation, la Cour d’appel de Pau a fait droit aux demandes de la pollicitante au
motif que la pollicitante est intervenue avant l’émission de l’acceptation des bénéficiaires. La
rétractation est alors considérée comme valide. Les bénéficiaires se pourvoient ainsi en
cassation.
La question qui se posait à la Cour était de savoir si la rétraction d’une offre d’achat par le
pollicitant avant le délai fixé peut-elle être effective ?
A cette question, la Cour de cassation casse et annule la décision rendue en appel. Elle
dispose que « si une offre d’achat peut en principe être rétractée tant qu’elle n’a pas été
acceptée, il en est autrement au cas où celui de qui elle émane s’est engagé à ne pas la retirer
avant une certaine époque ». Cet arrêt est intéressant car il apporte des éclaircissements sur la
rétractation de l’offre contractuelle (I), toute fois la Cour de cassation reste assez vague sur ce
ce qu’encours réellement le pollicitant lors d’une rétractation non respectueuse du délai fixé
(II).

I) La rétractation inconditionnée d’une offre

A. Le rappel de la notion d’offre contractuelle

 Avec cet arrêt nous nous situons dans le domaine du droit des contrats.
 L’offre est la manifestation de volonté par laquelle le pollicitant, celui qui formule l’offre,
propose à un tiers, en l’occurrence le bénéficiaire, de conclure un contrat.
Pour être considérée comme une offre, la proposition de la part du pollicitant doit être à la fois
précise (contenir tous éléments indispensables du contrat) et ferme (manifestation de la
volonté).
 Le plus compliqué à déterminer est de savoir dans quel mesure l’offre engage ou non son
auteur.
 Pour donner naissance au contrat l’offre doit être acceptée par le bénéficiaire.
 La doctrine antérieure à la réforme de 2016, comme c’est le cas dans l’arrêt susvisé,
considère la valeur juridique de l’offre avant l’acceptation par son bénéficiaire tel un
engagement unilatéral de volonté pour lequel, s’il y a rétractation ou caducité, des effets
variables seront appliquées en fonction de leur valeur.
 Nous pouvons diviser l’offre en deux parties, celle assortie d’un délai et celle non assortie
d’un délai. Cette distinction sera, lors de procès liés à ce problème de droit, la clé des
décisions jurisprudentielles.

B. La rétractation spontanée d’une offre non-assortie d’un délai

 Le pollicitant est libre de retirer son offre à n’importe quel moment.


 Les juges de la Cour de cassation, dans cet arrêt rendu le 7 mai 2008, font la différence
entre les offres assortie d’un délai et celles qui ne le sont pas. Pour les offres assorties d’un
délai, il y a l’obligation de maintenir l’offre durant toute la durée convenue. « si une offre
d'achat ou de vente peut en principe être rétractée tant qu'elle n'a pas été acceptée, il en est
autrement au cas où celui de qui elle émane s'est engagé à ne pas la retirer avant une
certaine époque »
 Dans l’arrêt attaqué du 17 octobre 2005 de la Cour de Pau, c’est donc par ce motif de libre
rétractation qu’elle retient « la validité de la rétractation de son offre d'achat par Mme X » car
elle a été faite « antérieurement à l'émission, par les consorts Y..., de leur acceptation par
lettre recommandée expédiée le 27 juin 2000 ».
 La jurisprudence a mis en lumière une nouvelle notion concernant l’offre, en l’occurrence
celle faite à une personne déterminée : le délai raisonnable. Il varie en fonction du contenu et
de la nature du contrat, cela reste aux juges de le déterminer.

II) La rétractation répréhensible de l’offrant

A. La rétractation prématurée au délai par le pollicitant

 Si le pollicitant fixe un délai pour son offre, alors la possibilité de contracter est valable
pendant un certain temps. L’offre a donc une durée de vie obligatoire. La jurisprudence
antérieure à la réforme de 2016 (Cass, 1ère chambre civile, 17 décembre 1958) impose, dans
cette situation, au pollicitant de maintenir son offre pendant le délai conclu.
 La Cour de Cassation, dans son arrêt de 7 mai 2008, précise le principe de liberté de
rétractation mais pose la condition qu’« il en est autrement au cas où celui de qui elle émane
s’est engagé à ne pas la retirer avant une certaine époque ». Par conséquent, la Cour de
Cassation casse et annule la décision des juges du fond qui fait droit à la pollicitante.
 Un délai fixé pour une offre peut donner recours à la recherche d’une obligation
de maintien de l’offre à la charge de la demanderesse.
 La doctrine utilise la théorie de l'engagement unilatéral qui statue sur le fait qu’une
volonté, à elle seule, pourrait être source d'obligation.

B. Les conséquences juridiques de la révocation non règlementaire

 La Cour de Cassation fait, dans cet arrêt, implicitement comprendre que si l’acceptation
intervient dans le délai mais après la rétractation par le pollicitant, ce qui est le cas ici, alors le
contrat sera considéré comme valablement formé.
 L’utilisation de l’article 1134, ancien, du Code civil, dont l’alinéa 1er dispose que « Les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites », indique
l’intérêt de la Cour de cassation pour ce mode de sanction.
 Le visa de l’article 1134 du Code civil à l’air de mettre en avant une probable
condamnation de la responsabilité civile. La responsabilité civile contractuelle est l’obligation
de réparer le préjudice causé qui trouve sa source dans la non-exécution ou bien la mauvaise
exécution du contrat.
 La Cour de cassation, en affirmant que la pollicitante « s'était engagée à maintenir son
offre jusqu'à cette date », met en lumière l’engagement unilatéral de volonté. Non seulement
elle sera soumise au paiement de dommages et intérêts, mais en plus le juge peut l’obliger à
l’exécution forcée du contrat.
 L’article 1134 dépasse le champ du droit civil et peut s’appliquer en droit des sociétés, en
droit de la consommation ou encore en droit du travail.

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