Vous êtes sur la page 1sur 8

© Masson, Paris, 1999 Rev. Stomatol. Chir. maxillofac.

1999, 100, n° 5, pp. 257-264

Formation continue

Conduite à tenir... devant une canine incluse


en situation palatine
V. CRINETZ

UFR de Stomatologie et de Chirurgie Maxillo-Faciale, (Pr. F. Guilbert), Département d’Orthopédie Dento-Maxillo-Faciale, (Pr. V. Crinetz), CHU
Pitié-Salpétrière, 75651 Paris Cedex 13.

REu SUMEu SUMMARY

Conduite à tenir... devant une canine incluse en situation pala- How to manage... a palatal impacted canine
tine
The abundance of scientific articles about current dental
La richesse de la documentation scientifique décrivant les movements such as intrusion, space closure, uprighting... is in
dispositifs mécaniques déplaçant les dents selon les mouvements contrast with the rarity of those concerning palatal impacted
habituels : d’ingression, de fermeture d’espaces, de redressement canine.
d’axes... contraste avec la pauvreté de celle concernant la remise The goal of this article is to emphasize upon frequent
en place des canines incluses en position palatine. hasards of this dysmorphosis which often generate litigations and
Cet exposé a pour but d’objectiver les nombreux pièges de to suggest an original classification of favorable and unfavorable
cette dysmorphose, sources de contentieux multiples, puis de clinical situations and a simplified mechanotherapy.
proposer une classification inédite des situations cliniques favo-
rables et défavorables et une mécanothérapie originale simplifiée.
Mots-clés : Orthopédie Dento-Maxillo-Faciale ; Orthopédie Key words: Dento-Maxillo-Facial Orthopedics ; Dento-
Dento-Faciale ; Orthodontie ; Dents incluses ; Canine incluse en Facial-Orthopedics ; Orthodontics ; Impacted teeth ; Palatal im-
position palatine. pacted canine.

BILAN DE LA CANINE INCLUSE (2, 13) trouve sur l’arcade. On apprécie ensuite le degré de
mobilité de la canine de lait lorsque cette dent est
présente.
L’EXAMEN CLINIQUE RECHERCHE LES SIGNES On recherche également une vestibuloversion de
D’ORIENTATION l’incisive latérale adjacente, une voussure palatine
dont on évalue le volume et la disposition, l’égression
Devant tout retard d’évolution dentaire supérieur classique de la canine antagoniste et la qualité de la
à 18 mois d’une canine maxillaire, on doit explorer denture. Très rarement on observe une incisive laté-
les antécédents familiaux, afin d’éviter d’effectuer rale surnuméraire, voire un odontome. Enfin on teste
l’extraction intempestive de la première prémolaire la compréhension et la motivation du/de la patient(e),
homolatérale. Par ailleurs on recherche la déviation y compris sa technique de brossage.
fréquente de la ligne médiane maxillaire du côté de la
canine incluse, et on mesure parallèlement au pied à
coulisse l’espace mésio-distal apparent du site de la LES EXAMENS PARACLINIQUES
canine incluse en le comparant avec le diamètre
mésio-distal de la canine controlatérale, lorsqu’elle se
Ils ont en plus de leur fonction diagnostique, un
rôle concomitant de preuves, destinées à protéger les
Tirés à part : V. CRINETZ, 49, avenue du Général de Gaulle, 94700 Maisons-
praticiens vis-à-vis des contentieux médico-légaux
Alfort. (c.m.l.).

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)
258 V. CRINETZ Rev. Stomatol. Chir. maxillofac.

FIG. 1. —
a) Rétroalvéolaires objectivant les résorptions des apex des incisives maxillaires.
b) Reconstitution 3 D du même patient ne montrant pas d’information supplémentaire.

— Les photos objectivent les anomalies initiales • Trois rétro-alvéolaires pris verticalement, et
de l’émail, en particulier ses dyscolorations (c.m.l.) centrés, le premier sur la canine incluse et les deux
l’aspect de la gencive et l’occlusion de convenance. autres sur les dents adjacentes, sont impératifs (c.m.l.)
Elles permettent surtout de suivre l’évolution du trai- pour noter les malformations radiculaires et les ré-
tement mécanique, en particulier par les vues occlu- sorptions radiculaires initiales de ces dents (fig. 1).
sales. Par ce moyen on peut également identifier la morpho-
— Les moulages servent à l’analyse précise de logie du kyste d’éruption et évaluer son agressivité
l’espace réellement disponible pour loger la canine latente ou patente vis-à-vis des racines adjacentes
incluse en tenant compte des améliorations thérapeu- (c.m.l.). Parfois, mais rarement, on peut distinguer un
tiques possibles, telles que la normalisation de l’en- envahissement haversien ; signe pathognomonique de
grènement des arcades dentaires, des diastèmes et des l’ankylose de la dent (c.m.l.) Par contre, toute inter-
rotations dentaires. Avec les moulages on peut égale- ruption de l’image de l’espace ligamentaire est insuf-
ment prévoir la nature de l’articulé final ; surtout dans fisante pour affirmer cette ankylose. Enfin on doit
les cas d’interférences occlusales dues à des malposi- toujours rechercher très attentivement, non pas tant
tions des dents antagonistes, pour lesquelles il faudra les odontomes volumineux toujours visibles, mais les
soit intervenir par des meulages sélectifs, soit ortho- odontomes faiblement opaques ou les micro-
dontiquement. odontomes (c.m.l.) qui stoppent l’évolution de la dent
— Les radios comprennent une série de clichés incluse, tant qu’ils sont présents (diagnostic différen-
classiques, et ne nécessitant qu’exceptionnellement le tiel avec l’ankylose).
recours à l’imagerie, aussi inutile que coûteuse, dans • Le panoramique a pour but de ne pas négliger
ce type de malocclusion (fig. 1). la possibilité d’une pathologie médicale et/ou den-
• Les téléradiographies de profil et de face, sont taire, mais également d’apprécier la qualité des dents
les seules localisant initialement et comparativement d’ancrage ; en particulier des molaires.
la canine incluse de façon précise, topographique et L’inclusion canine constitue rarement une ano-
positionnelle, en situation vestibulaire ou palatine. De malie isolée du système dentaire, mais plus fréquem-
plus, ces radios apprécient sa dimension, sa forme ment un problème pathologique intéressant la lame
générale, sa direction et ses rapports anatomiques dentaire sur une portion plus ou moins étendue. C’est
avec les dents adjacentes. la raison qui explique les fréquentes anomalies de
• L’occlusal transcrânien, avec le rayon directeur forme des racines de la canine et des dents adjacen-
enfilant les axes des incisives supérieures, préalable- tes, ainsi que les anomalies de nombre, avec la pré-
ment matérialisés sur la téléradiographie de profil, sence possible d’une incisive latérale surnuméraire et
repère la position de l’apex et de la couronne de la d’odontomes.
canine par rapport à l’arcade apicale maxillaire. Avec Bien entendu, l’examen ne doit pas s’arrêter au
un film convenablement contrasté, un peu d’habitude bilan de la canine ou des 2 canines incluses, mais doit
et un bon éclairage on distingue aisément le contour également intéresser les autres anomalies éventuelles,
intégral de la dent incluse. afin de prévoir le traitement complet du/de la pa-

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)
Vol. 100, n° 5, 1999 CONDUITE À TENIR... DEVANT UNE CANINE INCLUSE EN SITUATION PALATINE 259

— L’engrènement des arcades dentaires sera ef-


ficace en fin de traitement.
Dans ces cas le traitement mécanique peut-être
entrepris avec la réserve classique d’une possibilité
faible, mais réelle d’ankylose de cette dent. Le seul
moyen de lever cette hypothèque (c.m.l.) est d’effec-
tuer un traitement d’épreuve de 6 mois. A l’issue, si
l’observation intra-buccale objective un déplacement
canin cliniquement visible, on peut continuer le trai-
tement. En cas de doute, il faut refaire une téléradio-
graphie de profil chez le même radiologue et la com-
parer à la 1re téléradiographie. On dessine un calque
sur la 1re téléradiographie avec les structures environ-
nantes et on repositionne ce calque sur la 2e téléradio-
graphie. Si ce procédé objective un déplacement de la
FIG. 2. — Identification de l’axe de la canine incluse sur le plan
d’occlusion. canine, on continue le traitement mécanique. Dans le
cas contraire, il faut extraire la canine incluse et opter
pour l’alternative prothétique prévue et expliquée
tient(e). L’analyse informatisée de Delaire (9) permet au/à la patient(e) avant de commencer le traitement
conjointement de réaliser un bilan crânio-cervico- (c.m.l.).
dento-maxillaire et de déterminer la situation de la
canine maxillaire par rapport au pilier antérieur de la
face. LES CAS DÉFAVORABLES

Ce sont les cas où l’on met en évidence, une


LES DIFFÉRENTES SITUATIONS CLINIQUES seule ou plusieurs des limites exposées ci-dessous
(c.m.l.) :
— Le/la patient(e) ne comprend pas l’intérêt
Elles sont analysées selon la méthodologie dé- d’un traitement mécanique ; cela se produit parfois
crite, dans « Les 10 principes du M.A.C.S. » (7). dans le cas où la canine de lait subsiste.
— Le signe pathognomonique d’ankylose est
présent.
LES CAS FAVORABLES — La forme de la canine incluse, apparaît très
anormale.
Ce sont les cas où toutes les conditions ci- — Il manque plus de 3 mm pour loger la cou-
dessous sont remplies : ronne de la canine sur l’arcade.
— Le/la patient(e) comprend les explications et — La pointe de la canine incluse est à plus de
exprime une motivation encourageante. 15 mm du plan occlusal dans le sens vertical et son
— Il n’existe pas de signe pathognomonique apex est situé à plus de 9 mm de l’arcade apicale,
d’ankylose. dans le sens vestibulo-lingual, sur le cliché occlusal
— La forme de la canine incluse, couronne et trans-crânien.
racine, apparaît normale. — L’axe de la canine incluse est horizontal.
— La couronne de la canine dispose d’une — Il n’existe pas de molaire utilisable pour
place initialement suffisante pour que l’orthodontiste l’ancrage d’un côté, ou des deux côtés.
puisse la repositionner, ou bien secondairement satis-
Dans ces cas et en application du principe de
faisante à la condition d’être créée par le traitement
précaution (rappelé par Gombault N. dans son exposé
mécanique.
à la société médicale d’O.D.M.F. en juin 1999), le
— La pointe de la canine incluse est à moins de
traitement mécanique est contre-indiqué et une solu-
9 mm du plan occlusal dans le sens vertical, sur la
tion prothétique s’impose avec ou sans implant.
téléradiographie de profil et son apex est à moins de 5
mm en palatin de l’arcade apicale dans le sens
vestibulo-lingual.
— L’axe de la dent incluse fait un angle mini- LES CAS INTERMÉDIAIRES
mum de 45° avec le plan d’occlusion (fig. 2).
— La qualité des dents d’ancrage est satisfai- Dans les cas où il n’existe pas de problème
sante. d’urgence et où la canine incluse est très haut située,

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)
260 V. CRINETZ Rev. Stomatol. Chir. maxillofac.

FIG. 3. — Patiente avec ses 2 canines de lait.

on peut différer le traitement et effectuer une téléra- le ou les segments intéressé(s) par la ou les canine(s)
diographie de profil un an après. Cela présente incluse(s) (6).
l’avantage de lever parfois l’hypothèque de l’anky-
lose en objectivant un début de descente de la dent ;
la rendant par ailleurs, davantage accessible au déga- DÉGAGEMENT CHIRURGICAL DE LA CANINE
gement chirurgical et au collage d’un boîtier. INCLUSE
La décision d’effectuer ou non le traitement sera
en fait prise au cas par cas. En particulier lorsqu’on Selon une procédure parodontologique, en s’abs-
découvre fortuitement une résorption radiculaire ini- tenant de toute action de levier par un syndesmotome,
tiale d’une ou de plusieurs dents sur un panoramique. qui risquerait de freiner la mobilisation thérapeutique
Il est souvent utile de commencer le traitement dès ce de la dent incluse et pourrait même entraîner une
moment, en instaurant un traitement précoce, afin ankylose iatrogène. Ce dégagement nécessite une ex-
d’essayer de sauver l’incisive latérale homolatérale position d’une surface coronnaire d’un minimum de 6
dont la racine est souvent résorbée en premier ; à la mm2 et de préférence de 9 mm2, lorsque cela est
condition que les autres facteurs soient favorables. possible.

NETTOYAGE DE LA SURFACE APPARENTE DE LA


SÉQUENCES THÉRAPEUTIQUES COURONNE DE LA CANINE INCLUSE

Avec une fraise diamantée à grains fins et arron-


MISE EN PLACE DE L’APPAREIL MULTI-ATTACHES die, de façon douce mais soigneuse, afin d’éliminer
tous les débris organiques adhérents à la dent, qui
font généralement obstacle au collage du boîtier.
— Bagues sur les 1res molaires et les 1res prémo-
laires ; éventuellement sur les 2e molaires et les 2e
prémolaires. COLLAGE D’UN BOUTON OU D’UN HÉMI-BOÎTIER
— Boîtiers antérieurs en métal ou en céramique,
placés surtout dans le cas où l’on veut aligner le Effectué le jour même, si le saignement peut être
groupe incisivo-canin. Les bagues et les boîtiers ont maîtrisé, ou dès le lendemain. Le bouton ou l’hémi-
des rainures de .022″ × .028″ (8). boîtier (boîtier coupé en deux avec une grosse pince
— Force extra-orale avec les branches externes coupante) est collé, muni d’une chaînette élastoméri-
passant par les centres de résistance des molaires (7). que à anneaux serrés, attachée passivement à l’aide
La force est active s’il faut parfaire l’engrènement, ou d’une ligature métallique, à l’anse de l’arc palatin
passive si on veut seulement éviter que le site de la coulissant dans le fourreau palatin de la 1re molaire
canine ne se ferme lors de la traction vers l’arrière de homolatérale.
la dent incluse, par effet réciproque (3e loi de New-
ton) (3).
— Arc palatin en Elgiloy jaune .032″ avec 2 TRACTION DE LA CANINE INCLUSE (fig. 3, 4, 5, 6,
prolongements antérieurs (7, 5, 4, 14). 7, 8)
— Deux arcs de stabilisation vestibulaires en
acier .018″ x .025″ des premières prémolaires aux Elle peut commencer dès le lendemain, afin que
molaires, se terminant par une spire horizontale, dans l’adhérence du collage ait atteint son maximum (10,

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)
Vol. 100, n° 5, 1999 CONDUITE À TENIR... DEVANT UNE CANINE INCLUSE EN SITUATION PALATINE 261

FIG. 4. — Avant traitement.


— A gauche, la téléradiographie de profil objective une canine accessible avec une bonne inclinaison.
— Au centre, le panoramique confirme les informations de la téléradiographie.
— A droite, l’occlusal transcrânien indique une position classique de la canine incluse droite avec son apex en palatin de la 1re prémolaire et sa
couronne, en distal et en palatin de l’incisive latérale.
Par ailleurs la canine gauche, bien qu’ayant évolué dans la cavité buccale a son apex en situation distale.

11). Elle doit toujours être dirigée distalement, car la existe un risque important de destruction du mur
plupart du temps l’apex de la canine incluse jouxte en osseux disto-palatin de l’incisive latérale, par frotte-
palatin la 1re prémolaire et sa couronne en palatin et ments excessifs de la couronne de la canine contre
en distal l’incisive latérale. cette paroi et ensuite, celui d’une fragilisation du
La majorité des orthodontistes commettent l’er- parodonte de l’incisive latérale avec possibilité de
reur de tirer la canine d’emblée en dehors (2), cela création d’une poche en distal de cette dent. Certains
présente un double inconvénient. Tout d’abord, il praticiens aggravent encore les risques en plaçant un

FIG. 5. —
— A gauche, rétro-alvéolaire avant traitement. Le kyste de la canine incluse menace la racine de la latérale.
— Au centre, rétro-alvéolaire après remise en place de la canine incluse.
— A droite, occlusal trans-crânien après le traitement, montrant une position correcte des apex des 2 canines.

FIG. 6. — La patiente après remise en place de ses 2 canines définitives.

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)
262 V. CRINETZ Rev. Stomatol. Chir. maxillofac.

FIG. 7. —
— A gauche, avant traitement on distingue bien la voussure palatine correspondant à l’inclusion de la canine supérieure droite.
— Au centre, la chaînette activée, distale la canine incluse.
— A droite, l’extension droite de l’arc palatin commence à vestibulo-verser la canine droite, tandis que l’extension gauche a déjà remis en place la
canine gauche.

ressort de maintien d’espace, actif, entre la prémo- tients. Lorsque cette traction controlatérale n’est pas
laire et l’incisive latérale, qui comprime abusivement possible, l’alternative est de tirer la canine en direc-
cette incisive, constitutionnellement fragile. tion de la molaire homolatérale (fig. 9b). On active la
L’idéal est de tracter la dent en direction de la chaînette en l’étirant de 3 anneaux sur une distance
molaire contro-latérale (fig. 9a). Cette manœuvre a le moyenne de 25 mm ; ce qui correspond à une force
double avantage de faire apparaître la couronne plus d’environ 150 grammes, selon la charte d’Hejazi (7).
rapidement dans la cavité buccale et d’éviter l’effet L’extrémité distale de la chaînette est très facilement
« piquet de tente » bloquant la racine. Elle présente ligaturée en distal de l’anse palatine de l’arc palatin.
l’inconvénient d’être inconfortable pour certains pa- La force décroît dans le temps, mais reste clinique-

FIG. 8. —
— A gauche, le franchissement de l’articulé s’effectue conjointement par l’extension de l’arc palatin et par un elastic thread allant du boîtier canin
à la spire.
— Au centre, une chaînette transpalatine dérote les 2 canines.
— A droite, les 2 canines maxillaires remises en place.

FIG. 9. —
a) Traction contro-latérale de la canine incluse.
b) Schéma des tractions, contro-latérale ou homo-latérale.
c) Schéma de la vestibulo-version canine.

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)
Vol. 100, n° 5, 1999 CONDUITE À TENIR... DEVANT UNE CANINE INCLUSE EN SITUATION PALATINE 263

FIG. 10. —
— A gauche : mise en place de la boucle rectangulaire de Burstone.
— Au centre : dérotation, égression et torque.
— A droite : ajustage fin par ressort de De Angelis.

ment suffisante dans la plupart des cas (1). La réacti- vestibulaire en acier, d’un diamètre minimum de
vation s’effectue en introduisant une nouvelle ligature .020″, avec 2 bosses canines un peu accentuées (7, 8).
métallique dans l’anneau précédent ; cela toutes les 3 Pendant la 1re phase de rétraction, la canine se
semaines environ. Dans la majorité des cas la cou- verticalise selon le mode « version libre », en se re-
ronne dentaire devient tangente ou juxta-tangente à la dressant autour d’un centre de rotation situé entre son
muqueuse palatine en moins de 6 mois. centre de résistance et son apex (3). Ce mouvement
Dès que la couronne est « centrée » par rapport à est bénéfique, car il fait basculer l’apex en position
l’espace : incisive latérale-première prémolaire, on mésiale. Par contre, pendant la seconde phase de
interrompt la traction distale et on vestibuloverse la vestibuloversion coronnaire, il se produit pour les
canine en activant l’extension homolatérale d’un arc mêmes raisons biomécaniques, un mouvement secon-
palatin personnel, dérivé de l’arc de Burstone et de daire indésirable de palato-version de l’apex de la
Crozat, jusqu’à ce que la couronne franchisse l’arti- canine. C’est la raison pour laquelle, la position de
culé (fig. 9c). On peut également utiliser une traction l’apex de la canine, avant traitement, ne doit pas être
relai, par une ligature élastic thread .025 reliant le trop palatin, car le mouvement de palato-version ra-
boîtier canin à la spire mésiale de l’arc sectionnel, diculaire s’aggraverait encore et la situation clinique
solidarisant la 1re molaire et les prémolaires homola- deviendrait mécaniquement irrécupérable.
térales.
A ce moment, on colle un autre boîtier sur la
face vestibulaire de la canine, puis on met en place la FINITION PAR POSITIONNEUR
boucle rectangulaire de Burstone en T.M.A. .017″ ×
.025″, qui s’insère dans le tube accessoire cervical de
la bague molaire homolatérale, et que l’on ligature
conjointement au boîtier vestibulaire de la prémo- ORTHOVIGILANCE
laire, par dessus l’arc de stabilisation. La partie rec-
tangulaire de la boucle est activée dans le boîtier de la LES PRÉCAUTIONS
canine. Cet arc a une triple action très élégante (3). Il
dérote la canine, l’égresse et torque un peu sa racine
dans la direction vestibulaire (fig. 10). Cette boucle Psychologiques
rectangulaire est utilisée dès que l’articulé transversal
est franchi ; ceci pour les canines évoluant en palato- Il faut bien expliquer au/à la patient(e) les avan-
position ainsi que pour les canines incluses en posi- tages et les inconvénients comparés d’un traitement
tion palatine. Parfois un torque plus important néces- orthodontique et d’un traitement prothétique, dans les
site l’emploi de l’arc de torque de Meulien, qui bien différentes situations cliniques, la nécessité d’un trai-
que le plus souvent utilisé sur les incisives, peut l’être tement d’épreuve de 6 mois ainsi que l’impérative
aussi sur les canines (12). « contrainte » d’un brossage parfait, sous peine de
Dans les situations où il existe 2 canines inclu- voir apparaître des alvéolyses et des résorptions radi-
ses, on peut activer une chaînette élastomérique trans- culaires, en particulier au niveau de l’incisive latérale
palatine passant sous les 2 extensions de l’arc palatin, adjacente (10, 11). Par ailleurs il ne faut pas oublier
qui dérote les 2 canines en même temps par action de mentionner qu’en fin de traitement, le/la patient(e)
réciproque, à condition d’avoir mis en place un arc devra accepter une rotation résiduelle de la canine

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)
264 V. CRINETZ Rev. Stomatol. Chir. maxillofac.

ainsi qu’un changement de teinte fréquent, heureuse- — La seconde, dans un contexte défavorable,
ment non lié la plupart du temps, à la perte de vitalité contre-indiquant formellement l’option orthodonti-
de cette dent (c.m.l.). que.
— La troisième, intermédiaire, où l’on peut par-
fois envisager un traitement orthodontique, sous cer-
Techniques taines réserves.
Le bilan méticuleux et approfondi des limites,
La situation clinique « d’ancrage maximum » des contraintes et des risques thérapeutiques (c.m.l.),
des canines incluses, impose une Force extra-orale permet de choisir le traitement personnalisé qui
difficilement acceptée par les adultes. L’alternative convient le mieux à chaque patient, en tenant compte
parfois possible, réside dans la mise en place d’un arc de toutes façons, de la nécessité impérative d’effec-
lingual soudé à deux bagues fixées sur les dents de tuer un traitement mécanique d’épreuve de six mois
six ans mandibulaires avec un ou deux crochets, sup- pour lever l’hypothèque de l’ankylose.
ports d’un élastique, reliant la canine incluse à l’arc L’utilisation d’un dispositif adapté à la trajec-
mandibulaire (15). Cette technique présente cepen- toire nominale de remise en place de cette dent in-
dant le triple inconvénient de produire une tendance cluse, simplifie le traitement et optimise sa durée. A
égressive de la molaire mandibulaire homolatérale, une première phase de rétraction et de verticalisation
une force discontinue et un risque de décollement du de la canine, succède une étape de vestibuloversion,
boîtier fixé sur la couronne de la canine incluse. elle-même suivie d’une phase de remise en place
réalisée avec une très grande précision par la boucle
rectangulaire de Burstone, avant la finition par un
positionneur.
LA SURVEILLANCE REMERCIEMENTS
L’auteur remercie Pierre Meulien pour ses 2 schémas ob-
jectivant les trajectoires souhaitables de la canine incluse maxil-
Elle doit simultanément contrôler : laire en position palatine.
— Les effets primaires recherchés. La dent doit
suivre une trajectoire régulière, sans à-coup et pen-
dant une durée de 18 mois à 2 ans dans la majorité RÉFÉRENCES
1. ANDREASEN GF, BISHARA SE. Relaxation of orthodontic elastomeric
des cas, à condition qu’il n’existe pas de troubles chains and modules in vitro and in vivo. Angle Orthod 1970 ; 40 :
associés. 319-28.
— Les effets secondaires indésirables : 2. BISCHARA S. Impacted maxillary canines : A review Am J Orthod
• Mécaniques ; avec en particulier la redoutable
and Dent fac orthop 1992 ; 101 (2) : 159-71.
3. BURSTONE CJ. Application of Bioengineering to clinical orthodon-
diminution de l’espace nécessaire pour repositionner tics in current orthodontic concepts and technique Vol 1 2nd ed.
la canine, mais aussi les modifications d’axes des Philadelphia : W.B. Saunders Company : 230-58.
4. BURSTONE CJ, KOENIG HA. Precision adjustment of the transpalatal
molaires et des prémolaires. longual arch : Computer arch form predetermination. Am J Orthod
• Parodontaux ; où les douleurs, les mobilités 1981 ; 79 (2) : 115-33.
excessives et les inflammations sont les premiers sta- 5. BURSTONE CJ. Variable modulus orthodontics. Am J Orthod 1981 ;
80 (1) : 1-16.
des d’une destruction parodontale, qui peut rapide- 6. BURSTONE CJ. Rationale of the segmented arch. Am J Orthod 1962 ;
ment devenir irréversible. 48 : 805-22.
• Articulaires, avec une vigilance toute particu- 7. CRINETZ V, HEJAZI H, MEULIEN P. M.A.C.S. Syllabus 1981.
lière de la Force extra-orale qui ne doit pas verser et 8. DE ANGELIS V. The amalgamated technique, a mechanically and
biologically efficient method for controlled tooth movement. Angle
égresser les molaires, ce qui pourrait entraîner un Orthod 1980 ; Vol 1 : 1-15.
dysfonctionnement des articulations temporo-mandi- 9. DELAIRE J, SALAGNAC JM, NOTARI J. Diagnostic des dysmophor-
bulaires. phoses dento-maxillo-faciales — Développement de l’analyse archi-
tecturale informatisée. Act Odont Stomatol 1994 ; 187 : 477-511.
10. FONTENELLE A. Une conception parodontale du déplacement den-
taire provoqué : vers une application clinique raisonnée. Journ de
Paro 1982 ; 1 : 131-55.
11. MELSEN B. La réponse du parodonte au traitement orthodontique.
CONCLUSION Journ de Paro 1989 ; 2 : 207-13.
12. MEULIEN P. Maîtrise de l’axe des incisives dans le sens vestibulo-
lingual par un arc en Titanium Molybdenium Alloy (T.M.A.) Rev
Les canines incluses en situation palatine peu- Stomatol Chir maxillo-fac 1990 ; 91 : 335-43.
vent se présenter selon trois identités cliniques : 13. MOORREES CFA, BURSTONE CJ et al. Research related to malocclu-
— La première, dans un contexte favorable, sion. Am J Orthod 1971 ; 59 : 1-18.
14. OWEN AH. Crozat treatment. J Clin Orthod 1985 ; 19(2) : 109-27.
conduisant à privilégier l’approche orthodontique 15. SINHA PK, NANDA RS. Management of impacted maxillary canine
avec le maximum de chances de succès. using mandibular anchorage. Am J Orthod 1999 ; 115 : 254-57.

© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/11/2011 par SCD UNIVERSITE D'ANGERS - (99124)

Vous aimerez peut-être aussi