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Les notions de structure et d’adaptation sont des caractéristiques propres aux êtres vivants (Konrad
Lorenz, 1973). L’appareil manducateur, comme tous les éléments constitutifs de l’être humain,
n’échappe pas à cette règle. L’anatomie de l’occlusion et de l’articulation dentodentaire doit être
analysée selon l’aspect fonctionnel de la manducation. Les propriétés remarquables des organismes
vivants sont étroitement conditionnées par leurs structures. Toute modification structurelle entraîne des
variations, voire la perte de l’activité biologique. Certains organes, bien que faisant partie d’un système
complexe, sont des unités structurées et peuvent être étudiés en dehors de leur contexte systématique. La
dent, en tant qu’organe, peut être divisée en unités structurales, dont l’étude permet d’éclairer le
fonctionnement. L’occlusion s’établit à la fin du mouvement de fermeture ; lors de la mastication et de la
déglutition. L’articulation dentodentaire fonctionne au début et pendant le mouvement de fermeture lors
de la section du bol alimentaire par exemple. Enfin, l’articulation dentodentaire fonctionne lors de ce que
l’on a encore coutume d’appeler parafonctions comme les crispations, bruxismes ou mâchonnements.
Elle implique par conséquent des relations de contacts dentodentaires. L’ensemble de ces relations doit
être étudié tant du point de vue statique (intercuspidie) que sur le plan de la cinématique mandibulaire
(intercuspidation). L’occlusodontologie est un domaine complexe qui ne peut pas se restreindre à la seule
étude des contacts dentodentaires. Un grand nombre de principes tentent et participent à la
compréhension de ce domaine. L’analyse de ces principes montre leur faible niveau de preuve.
L’articulation dentodentaire n’est pas figée. Elle s’établit avec la dentition, et fonctionne avec la denture.
C’est une caractéristique intrinsèque de l’individu. Toute introduction d’un élément interférant avec
l’occlusion entraîne un dysfonctionnement de l’appareil manducateur, voire une adaptation. L’étude, à
partir de l’anatomie dentaire présentée ici, est effectuée par rapport à une normalité idéalisée qui peut
servir de base à la compréhension de l’occluodontologie.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
¶ Organisation des arcades 5 L’intercuspidie est réalisée lorsque toutes les unités dentaires
Agencement dans le plan horizontal 6 mandibulaires entrent en contact avec les unités dentaires
Agencement dans le plan sagittal 6 antagonistes maxillaires. C’est l’occlusion habituelle ou occlu-
Agencement dans le plan frontal 6 sion de fonction. Ainsi, toutes les morphologies se trouvent
¶ Relations statiques interarcades 7 impliquées dans ce type de relation.
Relations antérieures 7
Relations postérieures
Relations maxillomandibulaires
7
8 ■ Anatomie incisive et canine [5-7]
Relations mandibulomaxillaires 9
Le groupe incisivocanin est caractérisé par l’existence d’un
¶ Relations cinématiques 10 bord libre qui, au niveau canin, se dédouble pour créer les
Mouvement de propulsion 10 versants d’une cuspide [8-11]. Il est intéressant de noter que ces
Mouvements de latéralité 10 dernières structures au niveau mandibulaire sont concernées par
Stomatologie 1
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Figure 1. Les crêtes marginales des faces linguales sont de plus en plus
convexes à partir de la crête marginale mésiale de l’incisive centrale
jusqu’à la crête marginale distale de la canine maxillaire. Figure 2. L’aire occlusale est limitée par l’arête marginale. M : versant
mésial ; D : versant distal.
Topographie et définitions
Figure 4. L’affrontement de deux surfaces convexes n’assure aucune
Constituée par la conjonction de structures convexes, l’aire
stabilité.
occlusale d’une unité cuspidée est limitée par l’arête marginale
(le terme « table occlusale » suppose des surfaces planes, ce qui
est impropre à la notion de convexité qui préside à la compo-
sition des faces occlusales) [13, 14]. Cette ligne fictive réunit les un versant distal et un versant périphérique (unité fonctionnelle
sommets cuspidiens par l’intermédiaire des versants cuspidiens de Payne [15]) (Fig. 3). Sur le plan fonctionnel, il est possible de
mésiaux et distaux, et par la ligne faîtière des crêtes marginales distinguer deux types de cuspides : les cuspides primaires et les
(Fig. 2). Toutes les structures appartenant à l’aire occlusale sont cuspides secondaires [16-20].
dites centrales. Les autres structures sont par conséquent Les cuspides linguales maxillaires et les cuspides vestibulaires
périphériques (les termes « internes » et « externes » sont mandibulaires constituent le groupe des cuspides primaires,
improprement utilisés dans le langage courant : en effet, aucune appelées également cuspides d’appui ou encore cuspides de
des structures concernées ne se trouve à l’intérieur de la dent centrée. Lorsque les arcades dentaires sont en intercuspidie, ces
[« internes »]. Elles se situent toutes à la surface de celle-ci. Elles structures établissent des relations avec des zones réceptrices
sont donc toutes « externes »). antagonistes : fosses centrales, fossettes proximales ou embrasu-
res occlusales. Elles ont essentiellement un rôle de stabilisation
et de calage des arcades dentaires au cours de la déglutition
Anatomie descriptive (Fig. 4–6) et participent à l’écrasement du bol alimentaire au
Les aires occlusales peuvent être considérées comme consti- cours de la mastication. Cette dernière fonction nécessite, en
tuées de deux types de structure : les cuspides et les crêtes dehors d’une grande efficacité, une possibilité d’échappement
marginales. du bol alimentaire. Pour répondre à la mise en œuvre de ces
Les cuspides sont des éminences à caractère pyramidal : elles fonctions, les cuspides primaires sont, à cet égard, éminemment
comportent un sommet, un versant central, un versant mésial, convexes (Fig. 7).
2 Stomatologie
Articulation dentodentaire et fonction occlusale ¶ 22-003-P-10
Les cuspides secondaires, ou cuspides de préhension ou Figure 9. Au cours de la mastication, la cuspide secondaire maintient le
encore cuspides de guidage, sont les cuspides vestibulaires bol alimentaire sur l’aire occlusale (d’où le terme de « cuspide de préhen-
maxillaires et les cuspides linguales mandibulaires. Elles sion » qui lui est également donné).
présentent une pointe cuspidienne qui se situe toujours en
dehors de l’aire occlusale antagoniste lors de l’intercuspidie.
Elles contribuent à la protection des lèvres, des joues (arcade
maxillaire) et de la langue (arcade mandibulaire), par l’intermé-
diaire de leur portion périphérique (Fig. 8). Elles participent au
maintien du bol alimentaire sur l’aire occlusale au cours de la
mastication, par l’intermédiaire de leur portion centrale (Fig. 9).
Leur morphologie est plus acérée, à peine convexe (Fig. 10). Les
versants cuspidiens mésiaux et distaux, tout en demeurant
convexes, ont tendance à être rectilignes (Fig. 10).
Les crêtes marginales limitent dans les régions proximales l’aire
occlusale. Ce sont des structures hémicylindriques, allongées
dans le sens vestibulolingual (Fig. 11). Elles comportent un
versant central qui forme la paroi de la fossette proximale et un
versant périphérique qui constitue l’une des limites de l’embra- Figure 10. Le caractère fondamental de la cuspide secondaire est de
sure occlusale. Les crêtes marginales de deux dents contiguës présenter des formes de contours peu convexes, à tendance rectiligne et
présentent un caractère de symétrie par rapport à un plan développée.
tangent passant par la zone proximale de contact (Fig. 12).
Ainsi, toutes les structures décrites sont convexes dans leur
ensemble. Leur juxtaposition donne naissance aux dépressions sur les molaires maxillaires et mandibulaires. Elles se situent au
importantes de l’aire occlusale. Les sillons sont formés par la centre de l’aire occlusale et constituent les zones réceptrices
conjonction d’une ou de plusieurs surfaces convexes (Fig. 13). spécifiques de certaines cuspides primaires lors de l’occlusion.
La conjonction de trois surfaces convexes induit une fossette D’autres structures convexes, appelées bulbes secondaires ou
(Fig. 14). Une fosse centrale est le résultat de la conjonction de bulbes accessoires, se situent de part et d’autre des versants
trois ou de quatre convexités (Fig. 15). Les fosses n’existent que centraux des cuspides (Fig. 16). Il s’agit de petites coulées
Stomatologie 3
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4 Stomatologie
Articulation dentodentaire et fonction occlusale ¶ 22-003-P-10
Figure 18. L’aire occlusale est déportée dans son ensemble vers la face
vestibulaire (V) à l’arcade maxillaire et vers la face linguale (L) à l’arcade Figure 21. Au niveau des unités dentaires, le bol alimentaire est défléchi
mandibulaire. sur les versants périphériques des cuspides.
Figure 19. Sur une même arcade, toutes les aires occlusales des unités
cuspidées ont sensiblement le même diamètre vestibulolingual.
Figure 23. Les pressions appliquées sur la face occlusale d’une dent se
transmettent aux tissus de soutien, d’abord à l’intérieur de la dent
concernée, mais également, grâce aux zones proximales de contact, aux
unités dentaires adjacentes. Chaque dent est « épaulée » par ses voisines
dans les charges qu’elle subit.
Figure 20. Le bol alimentaire est d’abord écrasé entre les aires occlusa-
les antagonistes. ■ Organisation des arcades
Bien qu’il soit possible d’établir une relation particulière à la
fonction pour chaque structure constitutive des unités dentaires
s’écouler par l’embrasure occlusale en direction de l’embrasure
et une corrélation individuelle de l’anatomie des dents avec leur
vestibulaire ou en direction de l’embrasure linguale pour se physiologie, à l’évidence, les unités dentaires ne peuvent pas
défléchir sur la papille interdentaire (Fig. 22). fonctionner séparément les unes des autres. L’agencement intra-
Ainsi, la fonction « passive » de la zone interproximale de arcades permet d’établir l’« unité fonctionnelle unimaxillaire »,
contact n’a, entre autres, de rôle à jouer que dans la protection constituée d’unités travaillant de façon solidaire. La continuité
des tissus parodontaux. Ces phénomènes fonctionnels sont des arcades est induite par l’existence de zones interproximales
révélateurs de l’importance de la réhabilitation morphologique de contact. Elle répartit les efforts subis par une dent aux unités
des embrasures en odontologie restauratrice. collatérales (De Stefanis) (Fig. 23).
Stomatologie 5
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Figure 24. Dans le plan horizontal, les cuspides primaires, les cuspides
secondaires et les sillons de coalescence sont organisés selon des courbes Figure 25. Dans le plan sagittal, la courbe de Spee concerne, pour
sensiblement parallèles (a à f). certains auteurs, les cuspides vestibulaires maxillaires, pour d’autres les
cuspides vestibulaires mandibulaires. Spee n’a en fait décrit qu’une
courbe intéressant les cuspides linguales maxillaires.
Agencement dans le plan horizontal
En raison de la relative équivalence des dimensions vestibu- théorie de la sphère développée au siècle dernier par George
lolinguales des aires occlusales d’une même arcade [20], il est Monson et d’autres. Dans la réalité clinique, il semble que cette
possible d’en déduire l’existence de courbes sensiblement courbe et l’orientation axiale des unités cuspidées dans le sens
parallèles dans le plan horizontal : courbe des cuspides primai- mésiodistal soient le résultat des forces appliquées au cours de
res, courbe des cuspides secondaires et courbe des sillons de la fonction après que chaque unité dentaire a effectué son
coalescence (Fig. 24). Cette vision est toutefois réductrice, car la éruption et pendant que le tiers apical radiculaire effectue sa
courbe des cuspides linguales maxillaires subit une légère calcification [23].
convergence vers la courbe des cuspides vestibulaires au niveau
des prémolaires (Fig. 24 D). À la mandibule, cette convergence Agencement dans le plan frontal
est même nettement plus prononcée en raison de la réduction
du diamètre vestibulolingual des aires occlusales des prémolaires Dans ce plan, la théorie de la sphère a voulu que se retrou-
(Fig. 24 C). vent des courbes concentriques dont les centres se trouveraient
au niveau de l’apophyse crista-galli. En fait, l’organisation des
unités dentaires dépend du niveau de la coupe étudiée. En
Agencement dans le plan sagittal regard des premières prémolaires, la ligne reliant les pointes
Partant de la cuspide vestibulaire de la première prémolaire, cuspidiennes maxillaires peut être plane ou concave vers le bas.
et se terminant en regard de la cuspide distale de la dernière En regard des secondes prémolaires maxillaires, la ligne reliant
molaire, les cuspides des deux arcades s’organisent selon une les pointes cuspidiennes est droite ou convexe. Puis, la conve-
courbe, appelée courbe de Spee, dont la concavité est dirigée xité s’accroît en regard des premières, puis des secondes
vers le haut [22] (Fig. 25). Cet agencement ordonne une relative molaires maxillaires (Wilson) [24] (Fig. 26).
convergence des axes coronoradiculaires des unités cuspidées L’orientation des axes coronoradiculaires des différentes
vers le centre de cette courbe. Cette notion est héritée de la unités cuspidées est donc conditionnée par l’existence de ces
Figure 26. Dans le plan frontal, la convexité de la courbe passant par les pointes cuspidiennes va en diminuant depuis les deuxièmes molaires jusqu’aux
premières prémolaires où elle peut s’inverser. L’association de la courbe dans le plan sagittal et des courbes dans le plan frontal répond au concept hélicoïde
d’Ackermann.
6 Stomatologie
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Stomatologie 7
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Figure 32. La relation d’une cuspide décentrée peut se faire avec une
fossette proximale de l’arcade antagoniste : c’est la relation d’une dent à
une dent.
Figure 33. La relation d’une cuspide décentrée peut se faire avec une
embrasure occlusale opposée : c’est la relation d’une dent à deux dents.
Verrous d’occlusion
Chaque verrou d’occlusion est mis en œuvre par la relation
des cuspides mésiolinguales des molaires maxillaires avec les
fosses centrales des molaires mandibulaires antagonistes. Les
contacts sont obtenus par l’intermédiaire des versants mésiaux,
Figure 31. La relation d’une cuspide distovestibulaire mandibulaire distaux et centraux des cuspides. Les versants mésiaux et distaux
avec une fosse centrale antagoniste établit un verrou d’occlusion mandi- des cuspides maxillaires entrent en relation avec les versants
bulomaxillaire. centraux des cuspides linguales mandibulaires. Le versant
central maxillaire est, quant à lui, en relation avec le versant
que, à aucun moment, la pointe des cuspides n’est concernée central de la cuspide distovestibulaire mandibulaire (Fig. 34, 35).
par des relations de contact avec les structures antagonistes.
L’observation clinique permet de distinguer des cuspides
Autres cuspides primaires
primaires de qualité différente selon les zones réceptrices Relation cuspide-embrasure
antagonistes. Ainsi, les cuspides primaires qui entrent en
Dans ce type de relation, chaque cuspide primaire maxillaire
relation avec une fosse centrale constituent avec ces dernières
entre en relation de contact, par l’intermédiaire de son versant
structures les verrous d’occlusion. Il s’agit des cuspides mésio-
mésial et de son versant distal, avec les versants périphériques
linguales des molaires maxillaires (verrous d’occlusion maxillo-
des crêtes marginales qui limitent l’embrasure occlusale antago-
mandibulaires) (Fig. 30) et des cuspides distovestibulaires des
niste (Fig. 34). Cette relation est également appelée « relation de
molaires mandibulaires (verrous d’occlusion mandibulomaxil-
une dent à deux dents ». Elle représente plus de 85 % des cas
laires) (Fig. 31).
rencontrés en denture naturelle.
Toutes les autres cuspides primaires : cuspides linguales des
La relation cuspide-embrasure est très souvent controversée
prémolaires maxillaires, cuspides distolinguales des molaires
en raison du risque d’injection d’aliments dans l’espace inter-
maxillaires, cuspides vestibulaires des prémolaires mandibulaires
dentaire au cours de la mastication. Cette assertion est démentie
et cuspides mésiovestibulaires des molaires mandibulaires,
par les faits cliniques. En fait, cette relation est parfaitement
peuvent se trouver dans deux situations :
viable dans la mesure où existent une continuité de l’arcade,
• soit en relation avec une fossette proximale antagoniste : la
grâce à l’existence de zones proximales de contact, et un calage
relation est alors de type cuspide-fossette (Fig. 32) ;
lié à la présence de verrous d’occlusion (cf. supra) (Fig. 23).
• soit en relation avec une embrasure occlusale antagoniste : la
relation est alors de type cuspide-embrasure (Fig. 33). Relation cuspide-fossette
Dans ce type de relation, la cuspide primaire maxillaire entre
Relations maxillomandibulaires en relation avec la fossette proximale mésiale mandibulaire
Elles concernent l’articulation des cuspides primaires maxil- antagoniste. Les contacts s’effectuent entre le versant cuspidien
laires avec des zones réceptrices antagonistes. distal maxillaire et le versant central de la crête marginale
8 Stomatologie
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Figure 35. Relations statiques maxillomandibulaires : les cuspides pri- Figure 37. Relations statiques mandibulomaxillaires : les cuspides pri-
maires maxillaires, non concernées par les verrous d’occlusion, sont en maires mandibulaires, non concernées par les verrous d’occlusion, sont en
relation avec des fossettes triangulaires distales mandibulaires. relation avec des fossettes triangulaires mésiales maxillaires.
mandibulaire d’une part, et entre le versant cuspidien mésial intercuspidie, les versants cuspidiens mésiaux et distaux
maxillaire et le versant central de la cuspide linguale mandibu-
maxillaires entrent en contact avec les versants centraux des
laire antagoniste d’autre part (Fig. 35). Cette situation dite de
cuspides vestibulaires maxillaires (Fig. 36, 37). Les versants
« une dent à une dent » se rencontre dans les relations de classe
centraux des cuspides vestibulaires mandibulaires entrent en
II d’Angle.
contact avec les versants centraux des cuspides mésiolinguales
maxillaires.
Relations mandibulomaxillaires
Elles concernent l’articulation des cuspides primaires mandi- Autres cuspides primaires
bulaires avec les zones réceptrices maxillaires.
Relation cuspide-embrasure
Verrous d’occlusion Dans ce type de relation, les cuspides sont dirigées vers les
Les verrous d’occlusion sont créés par la mise en relation des embrasures occlusales antagonistes, et les contacts sont du
cuspides distovestibulaires des molaires mandibulaires avec les même type que ceux décrits pour les relations maxillomandibu-
fosses centrales des molaires maxillaires antagonistes. En laires (Fig. 36).
Stomatologie 9
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Mouvement de propulsion
La mandibule est projetée en avant suivant une trajectoire
Figure 38. Les relations cuspide-fossette et cuspide-embrasure peuvent sensiblement parallèle au plan sagittal médian, guidée par le jeu
coexister sur une même arcade à condition qu’existent des verrous neuro-musculo-articulaire. Lorsque ce mouvement s’effectue
d’occlusion. avec des contacts dentodentaires, on parle alors de protrusion
ou de proclusion [27]. Le mouvement physiologique de l’incision
s’effectue en sens inverse. Au cours de la partie terminale du
Relation cuspide-fossette mouvement fonctionnel, les bords incisifs des incisives mandi-
bulaires glissent sur les crêtes marginales des faces linguales des
Dans ce type de relation, les cuspides primaires mandibulaires
incisives maxillaires (Fig. 39).
s’orientent vers les fossettes mésiales des unités cuspidées
Contrôlé par la proprioception desmodontale, conduit par les
maxillaires. La relation de contact s’effectue entre versant mésial
relations interincisives, le mouvement se termine en position
de la cuspide vestibulaire mandibulaire et versant central de la
d’intercuspidie.
crête marginale maxillaire, entre versant distal de la cuspide
Durant ce trajet, seules les incisives sont en contact, les dents
vestibulaire mandibulaire et versant central de la cuspide
cuspidées n’intervenant qu’au moment ultime de l’intercuspi-
vestibulaire maxillaire, et, enfin, entre versant central de la
die. Ce type de relation cinématique dentodentaire peut être
cuspide vestibulaire mandibulaire et versant central de la
considéré comme une protection incisive.
cuspide linguale maxillaire (Fig. 37).
Du fait du contexte anatomophysiologique qui préside à la
Il n’existe pas de règle impérative concernant les relations de
mise en œuvre de ce déplacement particulier, le corps mandi-
ces cuspides : la relation cuspide embrasure et la relation
bulaire n’effectue pas une translation homothétique. L’analyse
cuspide fossette sont physiologiquement acceptables et accep-
géométrique du mouvement de propulsion montre, dans une
tées. De plus, elles peuvent parfaitement cohabiter sur une
première phase, un abaissement rapide de la trajectoire condy-
même arcade [19] (Fig. 38).
lienne alors que le trajet incisif est moins incliné : l’ensemble du
corps mandibulaire effectue une rotation autour des bords
■ Relations cinématiques incisifs mandibulaires (Fig. 40).
Dans la seconde phase du mouvement de propulsion, la
trajectoire condylienne devient moins pentue alors que le trajet
Dès qu’une partie du corps humain entre en mouvement, le
antérieur devient plus vertical : le corps mandibulaire effectue
contrôle et la régulation du déplacement s’effectuent grâce au
alors une rotation globale en sens inverse. (Fig. 41). C’est la
phénomène de rétroaction (feedback). En effet, le système
rotation de la première phase du mouvement de propulsion qui
nerveux central est informé pas à pas de la position spatiale de
impose la nécessité de l’angle fonctionnel décrit par Wirth
l’os en mouvement et des diverses contractions et décontrac-
(Fig. 42, 43).
tions qu’il doit faire subir aux muscles moteurs, par une série de
« capteurs » nerveux variés : les propriocepteurs. L’ensemble de
l’appareil manducateur n’échappe pas à cette règle. Tous les Mouvements de latéralité
éléments de l’ensemble musculo-odonto-articulaire sont pourvus Au cours de la mastication, la mandibule effectue d’abord un
de nombreuses terminaisons nerveuses, spécifiquement dévolues mouvement sensiblement vertical d’abaissement, se déplace
à la régulation de la cinématique mandibulaire. Parmi les ensuite latéralement du côté du bol alimentaire, puis le retour
capteurs nerveux, certains sont plus particulièrement chargés de vers l’intercuspidation se réalise. Là encore, c’est dans la partie
renseigner le système nerveux central sur la position spatiale de terminale du cycle qu’interviennent les différentes morpholo-
la mandibule lorsque les dents ne sont pas en contact : proprio- gies dentaires en antagonisme fonctionnel. Le côté impliqué est
cepteurs des articulations temporomandibulaires, fuseaux celui vers lequel s’effectue le déplacement mandibulaire (côté
neuromusculaires, etc. D’autres interviennent plus spécifique- travaillant). Du côté opposé, il n’existe aucune relation de
ment dans la phase terminale de la mise en occlusion : les contact interarcades (côté non travaillant). En dehors de la
propriocepteurs desmodontaux. En effet, il a été montré que la canine, les incisives ne sont jamais impliquées dans ce déplace-
proprioception desmodontale va en décroissant de l’incisive ment. Quelquefois, elles peuvent accompagner la canine.
médiale à la dernière molaire [18, 25]. Si les travaux récents sur
la mastication [26] sont examinés à la lumière des incidences
proprioceptives vues précédemment, le rôle du secteur antérieur ■ Rôle des canines
permet de définir les différents types de relation cinématique
mandibulomaxillaire. En raison de la hauteur importante de leur couronne, de leur
Ainsi, l’anatomie dentaire occlusale n’est impliquée que dans implantation radiculo-osseuse singulièrement puissante, de leur
la partie terminale des mouvements physiologiques. situation au changement d’orientation de l’arcade, de leur
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Stomatologie 11
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12 Stomatologie
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situations qui en résultent, si elles sont tolérées, sont stricte- mouvement de latéralité, avaient permis l’élaboration d’une
ment adaptatives. Le rôle prépondérant des canines ne peut, en règle dont l’énoncé peut se résumer ainsi : « les trajectoires des
Stomatologie 13
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(Fig. 58). Cette différence de résultat est due au fait que les
études antérieures ne tenaient aucun compte du rôle du groupe
incisivocanin dans l’appareil manducateur et attribuaient la
prépondérance à l’influence des guides condyliens. Certains
auteurs ont essayé d’intégrer l’apport du guidage dans leur
concept sans pourtant en donner toute l’importance [32, 33,
37-44]. Une réflexion, effectuée sur des données mathématiques,
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■ Références
.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Tavernier B., Romerowski J., Boccara E., Azevedo C., Bresson G. Articulation dentodentaire et fonction
occlusale. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Stomatologie, 22-003-P-10, 2007.
16 Stomatologie