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Le droit à la santé:

Le droit à la santé
Les questions de santé sont en permanence au cœur de l’actualité et les sujets qui y
mènent particulièrement nombreux : pandémies, épidémies, accidents sanitaires,
responsabilités médicales, accès aux soins, maitrise des dépenses de santé, progrès
de la science… les exigences sécuritaires étant de plus en plus grandes, il devient
impératif de s’interroger sur ce principe du « droit à la santé » maintes fois affirmé
dans les textes internationaux et affiché au plus haut niveau de la hiérarchie des
sources en droit interne, article 31 de la constitution : « l’Etat , les établissement
publics et les collectivités territoriales œuvrent à la mobilisation de tous les
moyens disponibles pour faciliter l’égal accès des citoyennes et des citoyens aux
conditions leur permettant de jouir des droits : - aux soins de santé…»
Le droit à la santé est un droit essentiel mais il souffre d’un manque d’effectivité.
Les circonstances exceptionnelles que nous vivons tous, nous imposent d’apporter
un regard sur la question, même si la matière peut paraitre aux yeux de certains, un
peu décalée. Il faut se rendre à l’évidence, l’affirmation des droits fondamentaux
ne suffit pas, c’est leur activation qui compte.
Qu’est ce que la santé ? La célèbre définition et certainement celle de
l’organisation mondiale de la santé (OMS) crée lors de la conférence internationale
de la santé à New York le 12 juillet 1946 dans le but « d’amener tous le peuples
au niveau de santé le plus élevé possible » (article premier de sa constitution). La
santé y définie non pas comme absence de maladie ou d’infirmité, mais comme «
un état de bien-être physique, mental et social ». Il est clair qu’une définition aussi
extensive et subjective ne contribue guère à l’intégration de la santé dans les
concepts dotés de valeur juridique. Son effectivité s’en trouve d’emblée
controversée.
La santé peut elle être définie autrement qu’en terme subjectif ? Des efforts sont
réalisés en médecine pour distinguer santé « observée » et santé « perçue »,
autrement dit, de distinguer regard des soignants et vécu des patients. La recherche
d’une définition unique du mot « santé » parait vaine. Il n’est pas sur qu’une
définition soit nécessaire pour s’interroger sur le principe du droit à la santé.
Combien de droits donnent vie à des concepts dont la définition est plurielle, la
liberté, la dignité, l’égalité, la sureté…parfois c’est la mise en œuvre du droit lui-
même qui permet d’affiner les concepts voire d’en adapter les définitions
différentes.
Ces dernières années ont vu se développer une multitude de « droit à » : droit au
logement, droit à la vie privée, droit au respect de la présomption d’innocence…De
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façon générale, c’est l’importance des droits fondamentaux que l’on redécouvre
sans réussir à les ordonner, sans s’être suffisamment interrogé sur la signification
de chacun d’eux.
I/ Le sens et la valeur du principe
C’est au lendemain de la seconde guerre mondiale, période féconde par les droits
fondamentaux, qu’un droit relatif à la santé s’est trouvé solennellement proclamé.
D’abord par la déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée par
l’assemblée générale des nations unies le 1er décembre 1948 : « Toute personne a
droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa
famille, notamment pour l’alimentation, le logement, l’habillement, les soins
médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires » (article 25-1). Cette
déclaration ne consacre cependant qu’indirectement un « droit à la santé », posant
surtout le droit à un niveau de vie décent permettant d’accéder à la satisfaction des
besoins essentiels (alimentation, habillement, logement…)
On admet en effet, si importante soit elle, que cette déclaration ne constitue pas
une recommandation, ne crée pas d’obligation à la charge des Etats et ne peut être
considérée comme une source de droit.
Le droit à la santé est également affirmé dans le pacte relatif aux droits sociaux,
économiques et culturels ouverts à la signature des Etats par les Nations Unies en
1966 : « Toute personne a le droit de jouir du meilleur état de santé physique et
mental qu’elle est capable d’atteindre » article 12-1. Cette fois, il s’agit bien de
droit à la santé et la source est bel et bien créatrice d’obligations. Se pose alors la
question du contrôle du respect des engagements des Etats. Les normes
internationales formulées par ces pactes s’accompagnent de l’aménagement
d’un contrôle qui n’est pas juridictionnel. Les Etats s’engagent seulement à
présenter des rapports sur les mesures adoptées et les progrès accomplis en vue
d’assurer le respect des droits reconnus. De la même façon l’OMS affirme dans le
préambule de la constitution de 1948 : « la possession du meilleur état de santé
qu’il est capable d’atteindre constitue l’un des droits fondamentaux de tout être
humain, quelle que soit sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa conduite
économiques ».
Le sens du droit à la santé recèle des difficultés quel que soit l’organe qui
entreprend de le faire respecter. Le conseil constitutionnel français n’échappe pas à
cette fatalité. Une seule certitude, le texte du préambule ne garantit pas la santé, il
garantit « la protection de la santé », ce qui est bien différent. La constitution
marocaine est allée dans ce sens, en garantissant aux citoyens, non pas la santé,
mais l’accès aux soins de santé…Les constitutions des Etats voisins font preuve de
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la même sagesse en garantissant seulement la protection de la santé. Le « droit à la


santé » n’existe donc pas… !
Le droit à la protection de la santé est évidement la formulation la plus juste, à
condition de ne pas la confondre avec le droit à la sécurité sociale. Le risque est
d’autant plus grand que ces droits sont indiscutablement liés. Le droit à la
protection de la santé suppose en effet, que chaque membre de la collectivité soit à
même de faire face au cout de l’accès aux soins, et là nous rejoignons la
formulation de la constitution marocaine. Le droit à la sécurité sociale n’est autre,
qu’une condition d’effectivité du droit à la protection de la santé.
Cependant, la distinction est plus délicate entre « droit de la santé » et « droit à la
santé ». Le vocabulaire des juristes oscille entre les deux pour s’arrêter le plus
souvent sur le droit « de la santé », certainement par crainte que trop d’incertitude
conduirait à une santé indéfinie et par conséquent à « un droit de santé parfaite ».
« La santé en effet, est un don ou un prêt de Dieu ou de la nature, selon que l’on
est croyant ou non. Aucun texte, aucun tribunal national ou international, ne peut
donner ce qui ne peut être donné et garantir l’ingarantissable. Il faut donc parler
plutôt d’un droit de la santé… » L.BAUDOUIN
En vue de la déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948,
l’UNESCO avait crée en 1947 un comité préparatoire chargé de réfléchir sur les
fondements théoriques des droits de l’homme. Par « droit », il faut entendre, selon
ce comité : « une situation ou condition sans laquelle l’homme, quelle que soit
l’époque historique, ne peut pas donner le meilleur de lui-même comme membre
de la communauté parce qu’il est privé de moyens de se réaliser en tant qu’être
humain ». Qui peut nier que la santé est une de ces conditions, si ce n’est la
condition par excellence ? La santé est donc, au même titre que la vie, une
condition essentielle de la jouissance des autres droits de l’homme.
Le droit à la protection de la santé est-il un droit-créance ou un droit-liberté ? Si
l’on retient le principe de la distinction, il est certainement un droit –créance. En
revanche, il ne l’est peut-être pas exclusivement. Sans doute, les droits-créances
n’ont-ils juridiquement ni le même statut ni la même portée que les droits-libertés,
les premiers se réalisent indirectement à travers l’accomplissement par le débiteur
d’une prestation (intervention active de l’Etat ou des services publics notamment),
tandis que les seconds sont des pouvoirs directs de la personne qui se réalisent
immédiatement sans passer par un intermédiaire. La distinction est cependant loin
d’être absolue. D’une part elle ne recoupe qu’imparfaitement la distinction droits
civils et politiques/droits économiques et sociaux (le droit de grève par exemple est
un droit-liberté bien plus qu’un droit-créance), mais surtout de nombreux droits
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fondamentaux sont à la fois, de façon indissociable, des droits-créances et des


droits-libertés (par exemple. droits d’accès au service publics). Les droits-créances
supposent enfin, dans bien de cas, la participation active des bénéficiaires à la mise
en œuvre de leurs droits. Le droit à la santé parait bien relever d’une catégorie
mixte, qui n’exclut pas une certaine part de liberté, même s’il présente
fondamentalement la nature d’un droit-créance.
Le droit à la santé est –il un droit subjectif, une prérogative individuelle reconnue
et sanctionnée par le droit objectif qui permet à son titulaire de faire, d’exiger ou
d’interdire quelque chose dans son propre intérêt ou, parfois, dans l’intérêt d’autrui
? Là encore, le principe se prête mal à une réponse générale, exclusive. Oui, il l’est
pour partie, mais il n’est certainement pas que cela. Au demeurant, la distinction
des droits subjectifs et des libertés publiques ou droit fondamentaux n’et pas
toujours aisée.
En réalité, la question la plus juste ne consiste pas tant à se demander si le « droit à
la santé » est en lui-même un droit subjectif, question à laquelle se prête mal un
principe à facettes multiples, que de savoir si l’énoncé solennel du principe trouve
prolongement dans les droits subjectifs, constituant autant de prérogatives
sanctionnées par le droit objectif. La réponse alors s’impose davantage, à condition
de préciser les déterminants de ces droits subjectifs : débiteurs, titulaires des droits,
sanctions. Que la nature du droit soit envisagé sous l’angle constitutionnel (droit de
créance) ou qu’elle soit envisagé sous l’angle civil (droit subjectif, droit de
créance), les deux analyses se rejoignent en tout cas sur une même difficulté : celle
de l’identification du débiteur. « Qu’est ce qu’un droit subjectif ? Un pouvoir de
vouloir, un intérêt juridiquement protégé, répondaient autrefois les théoriciens du
droit… Le risque, c’est que tout besoin demande à être reconnu comme droit
subjectif. Ce sera un faux droit si, en vis-à-vis, n’est pas défini un débiteur qui y
satisfasse. Beaucoup de droits économiques et sociaux de la seconde génération
ont échoué sur cet écueil »
Quels sont les débiteurs du « droit à la santé » ?
« La nation garantit à tous… la protection de la santé ». Voilà le principal débiteur
identifié par le texte : la nation… et non l’Etat. Une théorie existe en droit français
qui assimile l’Etat à la nation, et partant du principe de la souveraineté nationale,
affirme que les prérogatives dont l’Etat est le sujet ne sont que les droits et les
pouvoirs de la Nation elle-même. La formule est connue : « L’Etat est la
personnalisation juridique de la nation » (Carré de malberg, contribution à la
théorie générale de l’Etat). En 1946 cependant, les constituants n’ont pas tranché
entre les deux interprétations de la souveraineté, nationale ou populaire, d’où le
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compromis : « La souveraineté nationale appartient au peuple français ». Poser


d’emblée l’équation nation = Etat, est donc abusif, restrictif.
Qu’est ce que la nation ? s’il n’en existe pas d’acception universelle, du moins
peut-on admettre que la Nation constitue « la collectivité des individus qui forment
un même peuple et sont soumis à l’autorité d’un même gouvernement ; la
communauté généralement fixée sur un territoire déterminé dont la réalité résulte
de caractéristiques ethniques, linguistiques, culturelles… tous facteurs qui
développent un sentiment d’appartenance et des aspirations politiques trouvant
leur manifestation essentielle dans la volonté de s’ériger en corps politiques
souverain au regard du droit international ». Cette conception de la nation ouvre
le champ des possibles en même temps qu’elle introduit le sentiment d’une
solidarité qui unit les individus dans leur volonté de vivre ensemble. Il résulte de
cette collectivité que le « droit à la santé » ne va pas solliciter un seul débiteur,
mais qu’il va dans l’intérêt de tous d’attribuer à chacun la part qui lui revient en
regard de l’objectif que l’on cherche à atteindre. Partant de là, les débiteurs du «
droit à la santé » sont au moins au nombre de quatre :
- L’Etat bien sur, dans toutes ses composantes, l’Etat-providence… On
rappellera à cet égard le préambule de la constitution de l’OMS : « les
gouvernements ont la responsabilité de la santé de leurs peuples ; ils ne
peuvent y faire face qu’en prenant les mesures sanitaires et sociales
appropriées ». En France, la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé
publique (loi n° 2004-806, JO 11 AOUT p. 14277) affirme clairement la
responsabilité de l’Etat en matière spécialement de politique de santé
publique, ainsi que le rôle du parlement dans ce domaine : « La nation définit
sa politique de santé selon des objectif pluriannuels. La détermination des ses
objectifs, la conception des plans, des actions et des programmes de santé
mis en œuvre pour les atteindre ainsi que l’évaluation de cette politique
relèvent de la responsabilité de l’Etat » (Nouvel art. L. 1411-1 CSP)
- Les professionnels de santé, lesquels ne se limitent pas aux seuls médecins.
Les solutions légales et jurisprudentielles actuelles en matière de faute
médicale par exemple, d’obligation d’information des patients sur les risques
des actes médicaux, ne traduisent-elles par la préoccupation d’assurer la
protection de la santé de chacun ?
- Les entreprises sont également très concernées par le « droit à la santé », à
double titre. D’abord, en tant que producteurs de biens et services. N’est-ce-
pas la santé notamment, que l’on cherche à protéger, lorsqu’est posée la
responsabilité de tout producteur, au sens large, qui intervient d’une façon ou
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d’une autre, dans la mise sur le marché d’un produit « qui n’offre pas la
sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre ». En tant qu’employeurs
ensuite : L’imposante réglementation sociale relative à l’hygiène et à la
sécurité dans l’entreprise est bien la traduction d’un droit à la protection de la
santé spécialement aménagé pour les salariés qui mette leur force de travail à
la disposition de l’employeur ?
- L’individu enfin, qui ne peut pas ne pas être sollicité. Si la catégorie n’existe
pas, elle est peut-être à inventer : le « droit à la santé » est aussi un droit
créance… sur soi-même, à moins qu’il ne s’agisse ici de liberté. Ce « droit à
la santé » ne peut entièrement reposer sur autrui dès lors qu’il a pour Object
l’individu lui-même, son propre corps. Le « droit à la santé », Le droit-
créance, a ceci de dangereux qu’il peut inciter à n’exiger la prestation que
d’autrui, alors que le sujet lui-même, parfois en premier, peut contribuer à la
satisfaction de l’objectif visé. C’est bien cet aspect du droit qui est sous-
entendu dans la déclaration universelle des droits de l’homme ( toute
personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé), tandis que
certaines constitution étrangères y insistent plus nettement : « chacun a droit
à la protection de sa santé, et le devoir de la préserver et de l’améliorer » (
article 64 Constitution de la république portugaise du 2 avr. 1976), ce qui
n’est pas le cas du droit français.
II - L’effectivité du principe
La portée d’un principe mesure son aptitude à produire des effets, l’effectivité
intéresse plutôt la réalité de ceux-ci. C’est ici que se situe le mal déjà évoqué dont
souffrent trop de droits fondamentaux solennellement proclamés : un manque
d’effectivité. Que reste-t-il d’un « droit à la santé » lorsqu’il est privé d’effet ? Est-
ce même encore un droit ?
La question posée est celle de l’intégration, de l’infiltration dans le droit positif «
ordinaire » de ces principes à haute densité normative. Deux voies principales
permettent de traduire la norme primaire en normes secondaires, de rapprocher le
principe fondamental des sujets de droit qu’il intéresse : la loi d’abord ; le juge
ensuite pour faire respecter cette loi, au besoin anticiper son évolution.
- L’effectivité par la loi
« Il incombe au législateur comme à l’autorité réglementaire, selon leurs
compétences respectives, de déterminer, dans le respect des principes posés…leurs
modalités concrètes d’application ; il leur appartient de fixer des règles
appropriés tendant à la réalisation de l’objectif défini par le préambule ». Cette
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décision du conseil constitutionnel français (déc. Numéro 89-269 DC du 22 janv.


1990) rendue à propos du droit à la santé invite la loi à s’inscrire directement dans
le prolongement des principes constitutionnels, lui reconnaissant ainsi qu’au
règlement une fonction de mise en œuvre de ces principes, chacun dans leurs
domaines respectifs de compétence.
Les droits fondamentaux sont finalement un peu comme les directives
communautaires en Europe, ils nécessitent « transposition », ce qui est le cas de la
plupart des droits issus du préambule perçus à l’époque comme des droits à
effectivité relative conditionnée par une confirmation législative ultérieure ». Le
législateur s’efforce depuis longtemps de concrétiser le droit à la protection de la
santé, sans d’ailleurs que le lien entre lois et principes constitutionnels mis en
œuvre soit toujours formellement établi.
Le droit à la protection de la santé suppose l’accès aux soins, la qualité des soins et
leur prise en charge. Sans le droit à la sécurité sociale, le principe du droit à la
santé est condamné, au moins dans sa dimension « curative » à n’être pas
effectif…ou bien à engendrer des inégalités, les soins étant alors réservés à ceux
dont la situation économique le permet. « Le droit à la santé » supporte mal de
contredire cet autre principe constitutionnel qu’est le principe d’égalité. Les
inégalités d’accès aux soins, pour différentes raisons (frais laissés à la charge des
patients, localisation géographique des offres de soins…) sont pourtant
nombreuses.
- L’effectivité par le juge
Lorsque le juge intervient dans la mise en œuvre du droit à la protection de la
santé, il est déjà trop tard. La santé est endommagée et il s’agit alors d’obtenir
réparation et condamnation des auteurs du dommage. Le juge n’en contribue pas
moins à l’effectivité du principe …à postériori. National ou international,
administratif ou judiciaire, il s’efforce notamment au gré des contentieux de mieux
cerner les obligations de chaque débiteur de « droit à la santé » et d’influencer par
là même sur les comportements. Son rôle est important à la fois dans le domaine
de la santé publique et dans celui de la santé individuelle. Si le principe
constitutionnel du « droit à la protection de la santé » est extrêmement présent
dans ses décisions, il y est rarement fait expressément référence.
A l’occasion de la crise de « la vache folle » ( affaire de l’ESB encéphalopathie
spongiforme bovine) la cour de justice des communautés européennes a pris par
exemple une décision extrêmement intéressante en matière de santé publique, suite
aux mesures d’embargo prononcées contre l’importation, dans les autres pays de la
communauté européenne, de la viande bovine en provenance du Royaume-Uni : «
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la maladie de Creutzfeld-Jacob et plus particulièrement la variante découverte


récemment n’est encore qu’imparfaitement connue des scientifiques…Vu le fait
que l’explication la plus probable de cette maladie mortelle est une exposition à
l’ESB, aucune hésitation n’est permise. Tout en admettant les difficultés d’ordre
économique et social engendrées au royaume uni par la décision de la
commission, la cour ne fait que reconnaitre l’importance prépondérante à
accorder à la protection de la santé » (ordonnance de référé du 21 juillet.1996).
Un législateur n’aurait pu mieux l’écrire. Les deux arrêts rendus sur le fond le 5
mai 1998 sont encore plus nets :
« Lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à la portée de
risques pour la santé des personnes, les institutions peuvent prendre des mesures
de protection sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques
soient pleinement démontrées. Cette approche est corroborée par l’article 130-R,
paragraphe 1 du traité de la communauté européenne selon lequel la protection
de la santé de la personne relève des objectifs de la politique de la communauté
dans le domaine de l’environnement »
Ces décisions mettent directement en œuvre un droit à la protection de la santé, par
le biais du principe de précaution qui trouve ainsi reconnaissance en droit
communautaire de sa valeur normative. L’activation du « droit à la protection de
la santé » peut certainement aggraver la responsabilité de ses débiteurs en cas d’un
non respect, mais elle doit surtout contribuer à rendre ce droit plus effectif dans sa
dimension préventive, contribuer à ce que chacun règle ces actes pour une véritable
protection de la santé, et pas seulement pour une réparation lorsqu’il est trop tard,
lorsque le mal est fait. Faire surtout que la santé, face aux valeurs économiques,
soit davantage reconnue comme un paramètre à part entière, que la technologie et
l’économie ne soient pas seules à dicter les décisions.
La santé qui a besoin de médecins, a aussi besoin d’avocats.
- LISE CASAUX-LABRUNEE
- JEAN MORANGE
- REMY CABRILLAC

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