Vous êtes sur la page 1sur 10

AMENDE PÉNALE –

JOUR-AMENDE

Cette page ne doit pas être insérée dans la reliure


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE
par
Jean-Yves LASSALLE
Professeur à l’Université de droit, d’économie et des sciences d’Aix-Marseille
Directeur de l’Institut de sciences pénales et de criminologie (ISPEC)

DIVISION
Généralités, 1-12. SECT. 2. – Recouvrement de l’amende, 36-50.
SECT. 1. – Fixation de l’amende, 13-35. ART. 1. – PROCÉDÉS DE RECOUVREMENT, 36-40.
ART. 1. – NATURE DE L’AMENDE, 13-19.
§ 1. – Procédé normal, 36-39.
§ 1. – Amende ordinaire, 13-16.
§ 2. – Procédés particuliers, 40.
§ 2. – Jour-amende, 17-19.
ART. 2. – GARANTIES DE RECOUVREMENT, 41-50.
ART. 2. – MODALITÉS DE L’AMENDE, 20-35.
§ 1. – Amende ordinaire, 20-34. § 1. – Amende ordinaire, 41-48.
§ 2. – Jour-amende, 35. § 2. – Jour-amende, 49-50.

BIBLIOGRAPHIE
J. BORRICAND et A.-M. SIMON, Droit pénal, procédure pénale, – J.-H. ROBERT, Droit pénal général, 2001, coll. Thémis, PUF.
2e éd., 2000, Sirey. – B. BOULOC, Droit pénal général, 17e éd., – P. SALVAGE, Droit pénal général, 5e éd., 2001, PU Grenoble.
2000, Précis Dalloz. – P. CONTE et P. MAISTRE DU CHAM- H. ANGEVIN, Peines criminelles applicables aux personnes phy-
BON, Droit pénal général, 6e éd., 2002, Armand Colin. – F. DE- siques, J.-Cl. pén., art. 131-1 et 131-2, 1995. – J.-M. GON-
SPORTES et F. LE GUNEHEC, Droit pénal général, 9e éd., 2002, NARD, Jours-amendes, J.-Cl. pén., art. 131-25, 1994. – F. LE
Economica. – S. GUINCHARD et J. BUISSON, Procédure pé- GUNEHEC, Peines applicables aux personnes morales, J.-Cl.
nale, 2e éd., 2002, Litec. – P. PONCELA, Droit de la peine, 2e éd., pén., art. 131-37 à 131-49, fasc. 10 et 20. – P. SALVAGE, Peines
2001, coll. Thémis, PUF. – J. PRADEL, Droit pénal général, contraventionnelles applicables aux personnes physiques, J.-Cl.
14e éd., 2002, Cujas ; Procédure pénale, 11e éd., 2002, Cujas. pén., art. 131-12 à 131-18, 2000. – V. aussi Composition pénale ;
– H. RENOULT, Droit pénal général, Manuel, 2002, Paradigme. Contravention ; Peine [Exécution] ; Peine [Nature et prononcé].

Généralités.
1. Définition. — Parmi les sanctions d’ordre pécuniaire figurant tuent pas une sanction pénale mais civile et sont alloués à
dans notre arsenal pénologique, l’amende pénale est la plus im- la victime en réparation du préjudice qu’elle a subi. Ils n’ont
portante. Elle est définie comme l’obligation faite à un condam- donc pas la fonction répressive qu’ont les amendes pénales.
né, en vertu d’une décision de la justice répressive, de payer à Dès lors, il n’est pas étonnant que ces deux catégories de
l’État, plus précisément au Trésor, une certaine somme d’argent. sanctions s’opposent sur bien des points. Seul un texte peut
Ainsi comprise, l’amende pénale se distingue de bien d’autres imposer une amende pénale, alors que la loi ne limite pas les
sortes de versements. cas où les dommages-intérêts sont dus. L’amende pénale ne
peut être prononcée que par une juridiction répressive ; les
2. Distinctions. — De nettes différences conduisent à séparer dommages-intérêts peuvent l’être par une juridiction civile. Une
les amendes pénales des dommages-intérêts et des amendes transaction n’est pas, en principe, possible pour les amendes
civiles, spéciales, administratives, fiscales ou disciplinaires ainsi pénales alors que l’on peut transiger sur les dommages-intérêts,
que des droits fixes et des frais de justice. ceux-ci ne mettant en jeu que des intérêts privés. L’amende
3. Dommages-intérêts. — Les dommages-intérêts, même requiert une culpabilité, alors que les dommages-intérêts sont
quand ils sont octroyés par la juridiction répressive, ne consti- parfois dus en application de la théorie du risque ou de la res-

octobre 2003 - 1 - Rép. pén. Dalloz


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE

ponsabilité de plein droit. En cas de décès du délinquant avant série A, no 132, in V. Berger, Jurisprudence de la Cou euro-
sa condamnation à une amende, l’action publique étant éteinte, péenne des droits de l’homme, 8e éd., 2002, Sirey), et doivent
il ne peut être condamné, tandis que les héritiers d’une personne donc satisfaire aux exigences de l’article 6 de la Convention eu-
responsable pourraient être condamnés après sa mort à payer ropéenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
les dommages-intérêts réparant le préjudice que leur auteur fondamentales du 4 novembre 1950 (JO 4 mai 1974).
avait causé. S’il existe des coauteurs ou complices, il y a autant
d’amendes que de délinquants, alors que le préjudice subi ne 7. Amendes fiscales. — Infligées pour sanctionner le préjudice
peut être indemnisé qu’une fois. Les institutions propres au droit causé à l’État par les violations de la législation concernée, les
pénal (sursis, non-cumul des peines, prescription, amnistie, amendes fiscales s’analysent à la fois comme des peines et des
grâce) ne peuvent pas s’appliquer aux dommages-intérêts. réparations. Elles ont un caractère pénal car elles sanctionnent
un délit fiscal bel et bien constitué. Mais elles ont également pour
4. Amendes civiles. — Tandis que les amendes pénales ré- but de faire récupérer au Trésor public le montant des droits dont
priment des violations de la loi érigées en crimes, délits et contra- le fisc a été privé en raison de l’infraction fiscale, si bien qu’elles
ventions, les amendes civiles sanctionnent l’inaccomplissement ont un caractère indemnitaire et jouent un rôle analogue à ce-
de certaines formalités ou l’adoption de conduites abusives. Il lui des dommages-intérêts. Il est donc logique que le régime
en résulte que celles-ci n’obéissent pas aux règles du droit pé- des amendes fiscales soit à mi-chemin entre celui des amendes
nal. Les dispositions relatives aux sursis, aux circonstances atté- pénales et celui des dommages-intérêts. Comme les amendes
nuantes, au non-cumul des peines, à la complicité, à la récidive, pénales, les amendes fiscales doivent être prévues par une loi ;
à la contrainte par corps et à la prescription ne leur sont pas appli- elles peuvent bénéficier d’une grâce ou d’une amnistie ; le décès
cables. Elles sont soumises, cependant, au principe de la léga- du contrevenant éteint la poursuite et la prescription est identique
lité, car elles ne peuvent être prononcées que si une disposition à celle des peines. Comme les dommages-intérêts, les amendes
légale les prévoit, en fixant leur montant, généralement indépen- fiscales peuvent être prononcées contre des personnes civile-
dant du préjudice causé, ce qui les distingue des dommages-in- ment responsables, se cumuler s’il y a eu plusieurs délits com-
térêts. Enfin, les juridictions tant civiles que pénales ont la faculté mis par la même personne, faire l’objet d’une transaction entre
de les infliger. Dans le premier cas, il s’agira par exemple des administration et contribuable et ne peuvent, à l’inverse, être ac-
amendes frappant un fonctionnaire de l’état civil à l’occasion de compagnées du sursis (V. sur ce thème Vo Amende fiscale).
la tenue des registres (C. civ., art. 50) ou pour non-respect des
formalités du mariage (C. civ., art. 156 et 192), des amendes qui 8. Amendes disciplinaires. — Les amendes disciplinaires sont
frappent un conservateur des hypothèques qui n’aurait pas res- destinées à sanctionner des manquements à des obligations
pecté certaines formalités prescrites par la loi (C. civ., art. 2203), professionnelles. Elles sont prévues par des règlements de ca-
etc. Dans le second cas, ont peut citer l’amende civile infligée par ractère général ou même par les statuts des organisations pri-
le juge d’instruction lorsqu’il rend une ordonnance de non-lieu à vées. Elles sont prononcées par des juridictions disciplinaires
l’issue d’une information ouverte sur constitution de partie civile composées, en général, de membres de la profession. Elles
abusive ou dilatoire (C. pr. pén., art. 177-2, réd. L. no 2000-516 obéissent aux seules règles du droit disciplinaire qui a, de plus
du 15 juin 2000 [D. 2000.253] ; V. Cass. crim. 26 et 27 fé- en plus, tendance à prendre en compte les impératifs imposés
vr. 2002, Dr. pén. 2002, comm. 88, note M. Véron, Rev. sc. par la Convention européenne des droits de l’homme (V. Disci-
crim. 2002.623, obs. A. Guidicelli) ou bien celle prononcée par pline).
les juridictions pour mineurs à l’encontre des représentants lé-
gaux du mineur qui ne défèrent pas à leurs convocations (Ord. 9. Droits fixes. — L’article 1018 A du code général des impôts
Du 2 févr. 1945, art. 10-1, réd. L. no 2002-1138 du 9 sept. 2002 précise que les décisions des juridictions répressives, à l’excep-
[D. 2002.2584]). tion de celles qui ne statuent que sur les intérêts civils, sont sou-
mises à un droit variant en fonction de la juridiction. Ces droits,
5. Amendes spéciales. — En matière pénale, il y a des qui sont recouvrés sur chaque condamné majeur, ne sont pas
amendes particulières qui ne doivent pas être confondues avec des amendes même si certaines des garanties de recouvrement
les amendes pénales. Deux hypothèses sont concernées. Tout leur sont communes, telles que la solidarité, le privilège général
d’abord, il arrive que la grâce accordée au condamné soit subor- sur les meubles (CGI, art. 1920) et l’hypothèque légale sur les
donnée au paiement d’une somme d’argent, laquelle se trouve immeubles (CGI, art. 1929 ter).
substituée à l’emprisonnement : on parle alors, improprement,
« d’amende de substitution », car ce n’est pas une amende 10. Frais de justice. — Pour mémoire, rappelons que depuis
puisque son régime est fort éloigné de celui de l’amende pénale, la loi no 93-2 du 4 janvier 1993 ([D. 1993.134], art. 120), l’ar-
ne serait-ce que parce que la grâce est de la compétence du ticle 800-1 du code de procédure pénale dispose que, nonobs-
chef de l’État. Ensuite, il y a l’amende prévue dans le cadre de tant toutes dispositions contraires, les frais de justice criminelle
la composition pénale (C. pr. pén., art. 41-2, réd. L. no 99-515 correctionnelle et de police sont à la charge de l’État et sans
du 23 juin 1999 [D. 1999.311]) : tant que l’action publique n’a recours envers les condamnés. En conséquence, toutes les ré-
pas été mise en mouvement, le procureur de la République férences des articles de ce code et des autres lois aux frais et
peut proposer, entre autres, le versement d’une amende selon dépens ont été abrogées. Cette réforme trouve sa justification
certaines modalités (C. pr. pén., art. 41-2, 1o ), lequel, s’il est dans la complexité qu’offrait le régime des frais de justice, les
effectif, éteint l’action publique : là aussi le régime de cette difficultés de leur recouvrement et les charges qu’il imposait aux
amende est très différent de celui de l’amende pénale au sens greffes des juridictions. Il va sans dire que ces frais n’ont jamais
strict (V. Composition pénale). été des amendes.

6. Amendes administratives. — Les amendes administratives 11. Intérêt de l’amende pénale. — Les distinctions précédentes
sont prononcées par des administrations contre les contreve- étant faites et la notion d’amende pénale étant appréhendée,
nants à certaines réglementations spéciales : postes et télé- il est possible d’envisager ses avantages et ses inconvénients,
communications, contributions indirectes, etc. Elles sont pré- surtout par rapport à l’incarcération. Ses avantages sont nom-
vues par des textes particuliers et n’obéissent pas au régime des breux : l’amende n’est pas corruptive car elle n’a pas d’inci-
amendes pénales. Cependant, elles sont considérées comme dences morales fâcheuses et doit donc prendre le pas sur la
entrant dans la matière pénale « au sens de la Convention euro- courte peine d’emprisonnement ; elle a une valeur intimidante,
péenne » (CEDH, 29 avril 1988, Belilos c/ Suisse, no 10328/83, notamment en matière d’infraction utilitaire ; elle présente une

Rép. pén. Dalloz -2- octobre 2003


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE

grande souplesse pouvant être facilement fractionnée et adap- de droits (C. pén., art. 131-35, 131-42 et 131-43) qui peuvent
tée ; elle est facilement réparable en cas d’erreur judiciaire ; être prononcées soit à la place de l’amende, soit cumulativement
enfin, elle rapporte à l’État au lieu de lui coûter. Les inconvé- avec celle-ci. Sur ce dernier point, il y a donc une différence entre
nients ne sont pas évidents : elle ne respecterait pas le principe personnes physiques et morales.
de la personnalité des peines parce que la famille du condam-
né en subit les conséquences, mais cela est vrai pour toutes 15. Peine complémentaire. — Dans le domaine des crimes, les
les sanctions ; elle ne serait pas conforme au principe d’égalité personnes physiques peuvent se voir infliger, outre la réclusion
car elle serait plus facilement supportée par le riche que par le ou la détention criminelle, dans certains cas rares, une peine
pauvre, mais il est possible d’en adapter le montant et l’exécution d’amende. A priori, il ne s’agit pas d’une peine complémentaire.
à chaque cas ; elle ne permettrait pas l’amendement du condam- En effet, le législateur pourrait très bien sanctionner une infrac-
né parce qu’elle ne s’attache pas aux causes de la délinquance, tion à titre principal uniquement d’une peine d’amende, quitte
mais on peut douter qu’il y ait des mesures pénales ayant cet ob- à préciser que cette infraction est un crime puisque l’amende
jectif ; enfin, elle serait aléatoire car son recouvrement est très ne détermine pas à elle seule la nature criminelle de l’infrac-
imparfait en particulier dans le domaine des contraventions, ce tion. Toutefois, une telle solution ne serait guère réaliste et serait
qui est vrai et constitue en réalité le seul inconvénient notable. contraire à l’idée que l’on se fait sur la hiérarchie entre les in-
C’est dire que les avantages l’emportent très nettement sur les fractions en fonction des peines qui leur sont attachées (H. RE-
inconvénients. NOULT, Droit pénal général, Manuel, 2002, Paradigme, CPU,
p. 247). De fait, en matière criminelle, l’amende est toujours
12. Plan. — Au fil du temps, l’institution s’est diversifiée. Non prévue en plus de la réclusion ou de la détention criminelle, si
seulement l’amende classique a pris des formes très variées bien qu’en pratique elle est utilisée comme peine complémen-
mais on a vu apparaître une nouvelle technique celle du jour- taire. C’est le cas, par exemple, dans certaines formes de trafic
amende. Malgré les différences qui les séparent, il est possible de stupéfiants (C. pén., art. 222-34 et 222-35).
de les présenter de façon synthétique en présentant les règles
qui les concernent selon qu’elles ont trait à la fixation ou à l’exé- 16. Peine accessoire. — Dans au moins une hypothèse,
cution de l’amende pénale. Dans les premiers développements l’amende peut être analysée comme jouant le rôle d’une peine
seront envisagés sa nature et ses modalités et dans les seconds accessoire. Plus précisément, il s’agit du supplément d’amende
les procédés et les garanties de recouvrement. Cette démarche exigé. En effet, l’article L. 211-16 du code des assurances dis-
synthétique est d’autant plus opportune que, selon la Cour de pose que les amendes prononcées pour violation de l’obligation
cassation, la peine du jour-amende est une modalité de l’amende d’assurance prévue par l’article L. 211-1, y compris les amendes
et de même nature que celle-ci (Cass. crim. 26 sept. 1990, Bull. qu’une mesure de grâce aurait substituées à l’emprisonnement,
crim. no 323, Rev. sc. crim. 1991.75, obs. Delmas-Saint-Hi- sont affectées d’une majoration de 50 % perçue lors de leur
laire ; V. égal. D. ROURE, Les jours-amendes : une sanction à recouvrement au profit du fonds de garantie institué par l’article
redéfinir, D. 1996, chron. 64). L. 421-1. Cette majoration s’applique automatiquement et
son mécanisme fait ainsi penser aux peines accessoires qui
ont tendance à disparaître de notre législation. Comme le
SECTION 1re défaut d’assurance ou autre constitue une contravention de la
Fixation de l’amende. cinquième classe (C. assur., art. R. 211-45) et que les amendes
encourues sont de 1 500 € et en cas de récidive de 3 000 €
(C. pén., art. 131-13), la majoration est donc, respectivement,
ART. 1er. – NATURE DE L’AMENDE. de 750 et 1 500 €. Enfin, signalons qu’une disposition semblable
existait dans l’ancien article 366 ter du code rural aujourd’hui
abrogé (L. no 93-1444 du 31 déc. 1993 [D. 1994.95], art. 20)
§ 1er. – Amende ordinaire.

13. Peine principale : personnes physiques. — L’amende § 2. – Jour-amende.


dite classique ou ordinaire est, à l’égard des personnes phy-
siques, une peine principale en matière correctionnelle (C. pén., 17. Peine alternative imparfaite. — Inspirée de certaines législa-
art. 131-3) et contraventionnelle (C. pén., art. 131-12). C’est, tions étrangères, la peine du jour-amende a été insérée dans le
plus précisément, une peine principale de référence (P. CONTE droit français par la loi no 83-466 du 10 juin 1983 (D. 1983.282) et
et P. MAISTRE DU CHAMBON, Droit pénal général, 6e éd., a été reprise, en étant modifiée, par le code pénal de 1994. Ses
2002, Armand Colin, p. 243 et s.), en ce sens qu’elle permet caractéristiques majeures sont les suivantes : d’une part, elle ne
au juge de qualifier l’infraction de crime, délit ou contravention s’applique qu’aux personnes physiques, aux majeurs et à l’égard
et de déduire les conséquences de fond et de forme qui en des délits punis d’emprisonnement et, d’autre part, elle peut être
résultent. L’amende joue ce rôle dans le domaine des délits en cumulée avec l’incarcération. Il en résulte que c’est une peine
concurrence avec l’emprisonnement quand celui-ci est prévu. alternative très imparfaite (F. DESPORTES et F. LE GUNEHEC,
Ajoutons que, si le cumul du prononcé des peines est possible op. cit., no 790). Par rapport à l’emprisonnement, alors qu’à l’ori-
avec l’emprisonnement, il ne l’est pas avec le jour-amende, le gine cette sanction visait à faire reculer les courtes peines priva-
travail d’intérêt général et les privations et les restrictions de tives de liberté, la possibilité de cumul qui vient d’être indiquée
droits (C. pén., art. 131-9 et 131-15). traduit bien le fait que le jour-amende n’a plus pour rôle unique de
se substituer à l’emprisonnement même si les cas d’application
14. Peine principale : personnes morales. — À l’égard des per- du cumul sont peu nombreux. Par rapport à l’amende ordinaire,
sonnes morales, c’est en toute matière que l’amende ordinaire si le jour-amende peut être infligé à sa place quand elle est en-
est une peine principale, générale peut-on même ajouter car elle courue conjointement avec l’emprisonnement, ce n’est plus le
est systématiquement encourue (F. DESPORTES et F. LE GU- cas lorsque l’amende est seule prévue dans le texte d’incrimina-
NEHEC, Droit pénal général, 9e éd., 2002, Economica, spéc. tion.
no 854 et 861). Elle a même une fonction de référence essen-
tielle car c’est elle qui va déterminer la gravité de l’infraction. Ce- 18. Peine complémentaire. — Exceptionnellement, le
la dit, pour les crimes, les délits et les contraventions, le code, jour-amende est une peine complémentaire. En effet, en
à côté de l’amende, prévoit des peines privatives ou restrictives cas de conduite d’un véhicule automobile sous l’influence de

octobre 2003 -3- Rép. pén. Dalloz


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE

l’alcool, le coupable encourt plusieurs peines complémentaires 38 €, 150 €, 450 €, 750 € et 1 500 € qui peuvent être portés à
parmi lesquelles figure la peine de jours-amendes (C. route, 3 000 € en cas de récidive si le règlement le prévoit. On note-
art. L. 234-2, I, 4o ). ra qu’il n’y a pas de continuité entre le maximum de l’amende
contraventionnelle (3 000 €) et le minimum de l’amende correc-
19. Peine principale ?. — En tout cas, bien que cette mesure soit tionnelle (3 750 €).
qualifiée dans un texte de peine principale générale (V. Circ. du
14 mai 1993, Code pénal, éd. 2002, Dalloz) et qu’elle soit une b. – Personnes morales.
peine générale en ce qu’elle figure dans l’article 131-3 du code
pénal, elle n’est pas principale au sens strict du terme. En effet, 24. Taux. — En toute matière, la peine fondamentale pour les
elle n’est jamais prévue de façon isolée par la loi pour sanction- personnes morales est l’amende (C. pén., art. 131-37 et 131-40).
ner un délit, puisque son prononcé suppose que le délit soit pas- Son montant est fixé par référence à celle prévue dans le texte
sible d’emprisonnement (F. DESPORTES et F. LE GUNEHEC, d’incrimination pour les personnes physiques. Il est multiplié par
op. cit., no 790). cinq (C. pén., art. 131-38, 131-41). Cette règle générale dis-
pense le législateur de préciser dans les dispositions de droit pé-
nal spécial le montant de l’amende encourue par les personnes
ART. 2. – MODALITÉS DE L’AMENDE. morales.

§ 1er. – Amende ordinaire. 25. Difficultés. — Il en résulte qu’une personne morale ne peut
être condamnée à une amende si cette peine n’est pas prévue
A. – Règles générales. à l’encontre des personnes physiques pour l’infraction considé-
rée. Cette hypothèse se rencontrait déjà pour les crimes contre
20. Personnalisation. — L’article 132-24 in fine du code pénal re-
l’humanité mais il est vrai qu’ici existe la confiscation de tout ou
prenant une disposition introduite dans le droit français par la loi
partie du patrimoine. Dorénavant, il y a un autre cas de ce type
no 75-624 du 11 juillet 1975 ([D. 1975.260], art. 19) indique que
car, depuis la loi no 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renfor-
lorsque la juridiction prononce une peine d’amende elle déter-
cer la prévention et la répression des mouvements sectaires por-
mine son montant en tenant compte également des ressources
tant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales,
et des charges de l’auteur de l’infraction. Manifestement, le lé-
la responsabilité pénale des personnes morales a été étendue
gislateur a voulu que la peine d’amende soit la plus équitable
à certains crimes pour lesquels aucune peine d’amende n’est
possible car, a priori, elle peut être lourde pour l’individu de condi-
encourue pour les personnes physiques (crimes d’atteintes vo-
tion modeste et légère pour celui de condition aisée. Mais, pour
lontaires à la vie, de tortures et actes de barbarie, de violences
autant, on peut se demander si le législateur a atteint son but.
volontaires et de viol) : en l’état du droit, aucune amende ne
En effet, il faut se rendre compte qu’en réalité cette disposition
peut être donc prononcée contre une personne morale pour ces
ne présente pas un intérêt considérable puisque, la loi ne pré-
crimes, ce qui constitue une lacune dont le législateur ne semble
voyant qu’un maximum, il est possible d’adapter l’amende aux
pas s’être aperçu et qu’il serait heureux de réparer dès que pos-
ressources du prévenu. À dire vrai, le seul intérêt de cette dispo-
sible (V. Personne morale ; F. LE GUNEHEC, Peines applicables
sition, est, peut être, d’inciter les magistrats à motiver davantage
aux personnes morales, J.-Cl. pén., 2002, fasc. 10, no 11).
leurs décisions en les poussant à faire apparaître le lien entre le
montant de l’amende et la situation du prévenu. Cela dit, cette 26. Sévérité. — Il reste que hormis ces hypothèses, la sévérité
disposition de portée générale intéresse, depuis l’entrée en vi- du législateur ne se dément pas. Par exemple, une escroquerie
gueur du code pénal actuel, les personnes aussi bien physiques commise par une personne morale fait encourir, dans certains
que morales. cas, 3 750 000 €. Cela peut paraître exagéré lorsqu’elle est le
fait d’une société à responsabilité limitée. Mais il est loisible au
a. – Personnes physiques.
juge de choisir un taux adapté à chaque situation.
21. Crimes. — L’article 131-2 du code pénal dispose que les B. – Règles particulières.
peines de réclusion ou de détention criminelle ne sont pas exclu-
sives d’une peine d’amende. Ainsi, c’est une nouveauté du code a. – Amende proportionnelle.
actuel que de prévoir la possibilité d’infliger une amende en ma-
tière criminelle. Mais ce n’est que dans quelques cas, comme 27. Présentation. — L’amende proportionnelle est fondée sur
le trafic de stupéfiants, qu’une telle faculté existe. Par exemple, l’idée d’adapter le quantum de la peine à certaines réalités
elle ne se rencontre pas dans le domaine des infractions contre concrètes (J. PRADEL, Droit pénal général, 12e éd., 1999,
les personnes. On notera que l’article précité ne fixe pas de pla- Cujas, no 606). Elle prend ainsi en considération l’importance
fond général. C’est donc le texte d’incrimination qui indique le du dommage causé à la victime ou le profit retiré par l’agent.
taux de l’amende encourue : 7 500 000 € pour les crimes de tra- C’est en droit des affaires qu’on la rencontre. Le législateur
fic susvisés. utilise diverses sortes de modalités.

22. Délit. — Si l’article 131-3 du code pénal vise l’amende au titre 28. Modalités. — Tantôt le législateur établit un maximum chif-
des peines correctionnelles encourues par les personnes phy- fré et prévoit en outre que ce maximum peut être dépassé se-
siques, il ne précise ni de minimum ni de maximum généraux. lon un système de pourcentage. Ainsi, pour le délit de recel, le
Toutefois sur le premier point, la loi no 92-1336 dite d’adapta- législateur, au lieu de retenir le préjudice de la victime ou le bé-
tion du 16 décembre 1992 (D 1993.40) a fixé le seuil de compé- néfice du délinquant, s’attache à un critère plus neutre, celui de
tence du tribunal correctionnel à 25 000 F soit maintenant 3 750 € la valeur des objets recelés : l’amende normale de 375 000 €
(C. pr. pén., art. 381). Quant au second point, le législateur a fait ou de 750 000 €, selon les cas, pourra « être élevée au-de-
preuve d’une grande sévérité, les taux maximums étant plus éle- là de 375 000 € jusqu’à la moitié de la valeur des objets rece-
vés que par le passé. Elle va jusqu’à 7 500 000 € pour les délits lés » (C. pén., art. 321-3). En pareil cas, c’est donc un système
de trafic de stupéfiants (C. pén., art. 222-36 et 222-37). mixte qui est retenu avec une partie fixe et une partie proportion-
nelle. Tantôt, le législateur établit un minimum chiffré et permet
23. Contraventions. — On sait que les contraventions vont de au juge de le dépasser selon un certain rapport. Par exemple,
la première classe à la cinquième classe (V. Contravention). Ce l’infraction de construction sans permis de construire est punie
sont les taux maximums des amendes indiqués par l’article 131- d’une amende comprise entre 1 200 € et un montant qui ne
13 du code pénal qui servent de frontière à ces cinq catégories : peut excéder, en cas de construction d’une surface de plancher,

Rép. pén. Dalloz -4- octobre 2003


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE

une somme égale à 6 000 € par mètre carré de la construction 34. Amende forfaitaire majorée. — À l’égard des contraventions
(C. urb., art. L. 480-4). Tantôt, le législateur détermine le montant des quatre premières classes (C. pr. pén., art. 529) comme
de l’amende en fonction d’un certain élément qu’il définit. Ainsi, à l’égard des contraventions au code de la route (C. pr. pén.,
l’article 414 du code des douanes précise que les infractions por- art. 529-7) susvisées, si, à l’inverse, le contrevenant ne fait
tant sur des marchandises non prohibées dont la valeur n’excède rien dans le délai de trente jours, il est passible d’une amende
pas 750 € sont passibles d’une amende égale à la valeur des- forfaitaire majorée. Les taux sont les suivants : 33, 75, 180 ou
dites marchandises. Tantôt enfin, le législateur ne prévoit aucun 375 € selon que la contravention perpétrée est de la première,
chiffre et se borne à décider que l’amende sera comprise entre x deuxième, troisième ou quatrième classe et de 7 € pour les
et y fois la valeur de l’objet de fraude ou la somme sur laquelle a contraventions aux prescriptions du code de la route commises
porté l’infraction. Par exemple, l’article 415 du code des douanes par les piétons (C. pr. pén., art. R. 49-7).
indique que l’amende encourue est comprise entre une et cinq
fois la somme sur laquelle a porté l’infraction. § 2. – Jour-amende.
29. Contraventions. — Cela dit, en matière de contraventions,
l’article R. 610-4 du code pénal rattache à la catégorie des 35. Mécanisme. — Lorsqu’il prononce la peine du jour-amende,
contraventions de la 5e classe, celles punies d’une amende dont le juge correctionnel procède à une double opération intellec-
le taux est proportionnel au montant ou à la valeur exprimée tuelle conforme à la logique même de l’institution. Dans un pre-
en numéraire du préjudice, des réparations ou de l’objet de mier temps, il arrête le nombre de jours-amendes qui ne peut
l’infraction. Aux termes de cet article, le maximum de l’amende dépasser trois cent soixante et qui « est déterminé en tenant
susceptible d’être prononcée pour ce type d’infractions ne compte des circonstances de l’infraction » (C. pén., art. 131-5).
peut dépasser les montants fixés par l’article 131-13, 5o , soit Dans un second temps, le juge détermine le montant de chaque
1 500 € au plus, montant qui peut être porté à 3 000 € en cas jour-amende « qui ne peut excéder 300 € » et qui « est déterminé
de récidive. C’est donc l’ensemble des règles prévues pour en tenant compte des ressources et des charges du prévenu »
les contraventions de la 5e classe qui s’applique (V. Circ. du (C. pén., art. 131-5). En pratique, s’il est difficile pour le juge
14 mai 1993, no 55 et s., dans Code pénal Dalloz ; V. égal. de connaître la fortune du prévenu, il importe en tout cas que
Vo Contravention). la somme coïncide avec ce que l’intéressé peut mettre de côté
chaque jour, car la philosophie du système est de ne jamais pri-
b. – Amende forfaitaire. ver le délinquant de ce qui lui est nécessaire pour vivre. Il ne
faut pas que la peine soit désocialisante. Quoi qu’il en soit, une
30. Présentation. — Afin de désencombrer les tribunaux, on fois que le juge a déterminé le chiffre quotidien de l’amende, il lui
sait que le législateur a organisé, en matière de contraventions, suffit de le multiplier par le nombre de jours-amendes. On notera
des procédures simplifiées plus administratives que judiciaires qu’en utilisant cette mesure, le juge peut dépasser le maximum
(J. PRADEL, Procédure pénale, 11e éd., 2002, Cujas, no 831 de l’amende encourue.
et s. ; S. GUINCHARD et J. BUISSON, Procédure pénale, 2e éd.,
2002, Litec, no 831 et s.). Parmi elles, l’une est dite « de l’amende
forfaitaire » et est réglementée par les articles 529 et suivants du SECTION 2
code de procédure pénale. Recouvrement de l’amende.
31. Taux. — Extrayons de cette procédure, qui évite l’interven-
tion d’un juge, ce qui intéresse la fixation de l’amende, plus pré- ART. 1er. – PROCÉDÉS DE RECOUVREMENT.
cisément les taux particuliers que l’on y rencontre. En effet, elle
donne lieu à trois systèmes d’amende forfaitaire : minorée, ordi-
naire et majorée. § 1er. – Procédé normal.

32. Amende forfaitaire ordinaire. — Pour certaines contraven- 36. Mécanisme. — Les poursuites en vue du recouvrement des
tions des quatre premières classes dont la liste est fixée par dé- amendes « sont faites au nom de procureur de la République
cret en Conseil d’État (C. pr. pén., art. 529 ; Décr. no 2002-801 du par le percepteur » (C. pr. pén., art. 707, al. 2). Le greffier de
3 mai 2002, JO 5 mai), si le contrevenant accepte de payer soit la juridiction de condamnation établit un extrait de la décision.
immédiatement, soit dans le délai de trente jours, il encourt une Cet extrait est visé par un magistrat du parquet, puis adressé au
amende forfaitaire dont les montants sont précisés par l’article receveur des finances de l’arrondissement du siège de la juridic-
R. 49 du code de procédure pénale soit, respectivement, 11, 35, tion. Le fonctionnaire procède alors au recouvrement (Décr. du
68 ou 135 €, ce qui constitue des montants très inférieurs à ceux 22 déc. 1964) en notifiant au condamné la somme dont il doit
du droit commun. Ce sont les mêmes taux dont est passible, s’acquitter. Tel est le régime de droit commun.
pour les contraventions des deuxième, troisième et quatrième
classes au code de la route dont la liste est fixée par décret en 37. Exigibilité. — L’amende est exigible une fois la condamnation
Conseil d’État (C. pr. pén., art. 529-7 ; Décr. no 2002-801 du devenue définitive (C. pr. pén., art. 708 et s.). Mais pour la peine
3 mai 2002), le contrevenant qui a refusé de payer rapidement du jour-amende les choses sont différentes. Cette sanction pé-
mais le fait dans les trente jours. Notons incidemment que le cuniaire crée à la charge du condamné, chaque jour pendant
montant est de 4 € pour les contraventions au code de la route une période déterminée, une dette au profit de l’État, le mon-
commises par les piétons. tant global étant exigible à l’expiration du délai correspondant au
nombre de jours-amendes fixé par le juge (C. pén., art. 131-25,
33. Amende forfaitaire minorée. — Dans le domaine des contra- al. 1er). Autrement dit, le condamné « économise » chaque jour
ventions au code de la route qui viennent d’être évoquées, le une somme déterminée pendant une certaine période et verse
contrevenant a la possibilité de s’acquitter de son amende soit tout à l’État à la fin de cette période.
immédiatement entre les mains de l’agent verbalisateur, soit
dans les trente jours à compter de la constatation de l’infraction, 38. Modulation. — Normalement, le condamné doit s’exécuter
soit dans les sept jours qui suivent l’envoi de l’avis (C. pr. pén., en une seule fois. Il est vrai que, par la faveur de l’autorité ad-
art. 529-8). En pareil cas, il encourt une amende forfaitaire ministrative, ce principe de l’acquittement en une seule fois était
minorée dont les taux sont, respectivement, de 22, 45 et 90 € déjà entamé dès avant 1975, le percepteur accordant des fa-
(C. pr. pén., art. R. 49-9). cilités de paiement. Mais, depuis cette date (L. no 75-624 du

octobre 2003 -5- Rép. pén. Dalloz


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE

11 juill. 1975, D. 1975.259, rect. 321), le législateur est allé en- par corps. Celle-ci consiste à emprisonner le débiteur pour l’obli-
core plus loin car il a prévu deux possibilités de modulation, of- ger à payer sa dette. Elle n’est plus applicable, aujourd’hui, qu’en
ficielles en quelque sorte, aujourd’hui insérées dans les codes matière pénale, et encore a-t-elle été écartée pour les infractions
répressifs. politiques et au bénéfice de la victime, ainsi que pour les droits
fixes de procédure (V. Cass. crim. 15 janv. 1997, Bull. crim.
39. Fractionnements. — En premier lieu, l’article 132-28 du code no 12 ; 9 juill. 1997, Bull. crim. no 270 ; 4 mars 2003, Dr ; pén.,
pénal dispose que la juridiction, pour des motifs graves d’ordre comm. 75, obs. J.-H. Robert). En pratique, la contrainte par
médical, familial, professionnel ou social, peut décider le frac- corps est un usage fréquent pour forcer les débiteurs au paie-
tionnement du paiement de l’amende. Cette règle, valable en ment. Au moment d’être incarcéré, le contraignable rassemble
matière correctionnelle et de police, présente l’évident avantage fébrilement les sommes qui lui évitent la prison. S’il ne peut pas
de permettre de tenir compte des situations concrètes d’autant payer tout en une fois, il verse un acompte, obtient un délai et
plus qu’une grande liberté d’appréciation est laissée au juge. Il sait qu’il lui faudra régler le solde, sinon la contrainte resterait
en est de même pour les personnes physiques condamnées à la exécutoire pour le surplus. La durée de la contrainte est pro-
peine des jours-amendes qui pourra être exécutée par fractions portionnelle à l’importance des sommes garanties et est fixée
pendant une période n’excédant pas trois ans. En second lieu, par la juridiction répressive dans les limites légales. C’est l’ar-
l’article 708, alinéa 3, du code de procédure pénale prescrit que ticle 750 du code de procédure pénale qui détermine cette du-
l’exécution d’une peine correctionnelle ou de police non privative rée. Mais, une fois exécutée, la contrainte ne peut plus l’être
de liberté peut être suspendue ou fractionnée pour motifs graves pour la même dette. Ces précisions faites, la jurisprudence de
d’ordre médical, familial, professionnel ou social. Amende et la Cour de cassation a été contredite au plan européen. Elle
jour-amende sont donc concernés. Cette décision, qui est prise considérait, d’une manière générale, que la contrainte par corps
au stade de l’exécution, doit l’être soit par le ministère public, est une voie d’exécution et non une peine (Cass. crim. 6 avr.
lorsque la durée de l’inexécution de la peine ne dépasse pas 1938, DH 1938.358 ; 8 juill. 1958, Gaz. Pal. 1958.1.53, Rev. sc.
trois mois, soit, sur proposition du ministère public, par le tribu- crim. 1959.364, obs. Légal ; 26 juin 1989, Bull. crim. no 271 ;
nal correctionnel ou le tribunal de police, lorsque la durée de 4 janv. 1995, préc. ; V. égal., mais a contrario, 30 juin 1960,
l’inexécution excède trois mois. Cette seconde disposition pré- Bull. crim. no 353 ; 21 déc. 1960, ibid. no 599 ; 30 avr. 1963,
sente, elle aussi, l’avantage de pouvoir prendre en considéra- ibid. no 158, ce qui permettait d’appliquer immédiatement une
tion toutes les données de la situation du condamné. Quoi qu’il loi nouvelle la concernant ; Cass. crim. 26 juin 1989, Bull. crim.
en soit, dans ces deux hypothèses, le percepteur agissant au no 271 ; 18 juill. 1989, no 88-85.485 ; V. cependant, a contra-
nom du procureur de la République procédera au recouvrement rio, reconnaissant le caractère de peine au sens de l’article 7 de
dans les conditions fixées par les autorités judiciaires : date des la Convention européenne des droits de l’homme à la contrainte
échéances, montant de la somme pour chaque échéance, durée par corps, Cass. com. 16 mai 2000, Bull. civ. IV, no 104). Mais la
de la suspension, etc. Cour européenne des droits de l’homme a adopté la position in-
verse et a condamné la France. Il s’agit, selon elle, d’une peine
§ 2. – Procédés particuliers. car non seulement elle est dissuasive, mais en outre elle peut
conduire à une privation de liberté à caractère punitif (CEDH
40. Amende forfaitaire. — Les procédés de recouvrement pour 8 juin 1995, Jamil c/France, série A, no 320, JCP 1996. II. 22677,
les amendes forfaitaires sont spécifiques. Selon ce système, le note Bourdeaux). Par conséquent, le principe de non-rétroac-
montant de l’amende peut être acquitté soit au moment de la tivité doit s’appliquer. Cela dit, la contrainte par corps devrait
constatation de l’infraction entre les mains de l’agent verbalisa- être réformée par l’adoption du projet de loi portant adaptation
teur, soit au moyen d’un timbre-amende expédié au service indi- de la justice aux évolutions de la criminalité (Projet Doc. no 784,
qué dans l’avis de la contravention dans les quinze jours suivant art. 73) et céder la place à la contrainte judiciaire.
la constatation de la contravention ou la date d’envoi de l’avis
(C. pr. pén., art. 529-1 et 529-8). Soulignons que ce procédé
spécial de l’amende forfaitaire est facultatif pour l’intéressé. Il 43. Solidarité. — Au titre des garanties de portée générale, il y a
peut ne pas payer. Dans cette hypothèse, la répression de la enfin la solidarité (V. Solidarité pénale). Elle a pour conséquence
contravention est poursuivie selon les règles de la procédure or- que le Trésor public peut demander, lorsqu’il y a des coauteurs
dinaire (saisine du tribunal de police) ou celles de la procédure ou des complices, le paiement de l’ensemble des amendes pé-
simplifiée (ord. pénale) et l’amende sera alors recouvrée selon nales à l’un d’entre eux. Jusqu’en 1975, la solidarité constituait
le procédé normal. le principe. Depuis la loi du 11 juillet 1975 précitée, c’est devenu
l’exception. En effet, il résulte des articles 375-2, 480-1 et 543
du code de procédure pénale que les personnes condamnées
ART. 2. – GARANTIES DE RECOUVREMENT.
pour un même crime, un même délit ou une même contraven-
tion de la cinquième classe ne sont tenues solidairement que
§ 1er. – Amende ordinaire. des restitutions et des dommages et intérêts. En principe donc,
la solidarité pour le paiement des amendes a disparu, mais il y a
A. – Garanties générales. une exception à ce principe et elle vaut par conséquent garantie
du recouvrement de l’amende lorsqu’elle est appliquée. En effet,
41. Droit commun. — Afin de faciliter le recouvrement des ces textes dans leurs seconds alinéas permettent au juge de dé-
amendes pénales, celles-ci bénéficient, tout d’abord, des ga- cider la solidarité pour les amendes, par une décision spéciale et
ranties du droit commun. À cette fin, l’article 1018 A du code motivée (Cass. crim. 12 nov. 1981, Bull. crim. no 302 ; 14 mars
général des impôts précise, dans son dernier alinéa, que le re- 1989, ibid. no 129 ; 31 mai 2000, ibid. no 209) lorsque le prévenu
couvrement du droit fixe de procédure et des amendes pénales se sera entouré de coauteurs ou complices insolvables. Cela dit,
est garanti, d’une part, par le privilège général sur les meubles cette solidarité exceptionnelle pour les amendes ne doit pas être
prévu à l’article 1920 et, d’autre part, par l’hypothèque légale confondue avec la solidarité pour le paiement des dommages-in-
prévue à l’article 1929 ter. térêts qui elle, au contraire, est un principe général (C. pr. pén.,
art. 375-2, 480-1 et 543), à la condition toutefois que tous les
42. Contrainte par corps. — (V. Contrainte par corps [Contrainte participants soient condamnés (Cass. crim. 10 mai 1998, Bull.
judiciaire]) Il y a, ensuite, les dispositions relatives à la contrainte crim. no 204, Rev. sc. crim. 1989.311, obs. A. Vitu).

Rép. pén. Dalloz -6- octobre 2003


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE

44. Insolvabilité. — On ne peut éviter de rappeler que, depuis commis par autrui. Cela ne veut pas dire qu’elle est responsable
1983, le législateur incrimine le fait d’organiser son insolvabilité pénalement ; elle est seulement chargée du paiement. L’auteur
afin de se soustraire à l’exécution d’une condamnation de na- matériel reste pénalement responsable. L’exemple type est of-
ture patrimoniale (C. pén., art. 314-7 et s. ; V. Insolvabilité frau- fert par l’article L. 121-1 du code de la route. Celui-ci dispose que
duleuse ; M. CULIOLI, Organisation frauduleuse d’insolvabilité, « lorsque le conducteur a agi en qualité de préposé, le tribunal
J.-Cl. pén., art. 314-7 à 314-9, 2002). Ces dispositions qui dé- pourra, compte tenu des circonstances de fait et des conditions
bordent le champ de l’amende peuvent s’analyser comme une de travail de l’intéressé, décider que le paiement des amendes
sorte de garantie indirecte du recouvrement de cette catégorie de police prononcées en vertu du présent code sera, en totalité
de sanctions. ou en partie, à la charge du commettant si celui-ci a été cité à
l’audience » (sur ces points : J.-Y. LASSALLE, La responsabilité
B. – Garanties spécifiques. civile du fait pénal d’autrui, Rev. sc. crim. 1993.19).
45. Trafic de stupéfiants. — Afin de garantir, notamment, le paie- § 2. – Jour-amende.
ment des amendes, il existe, en matière de trafic de stupéfiants,
un moyen très particulier. Au cours de l’instruction préparatoire, 49. Fixation normale. — Si, à l’expiration du nombre de jours-
le président du tribunal de grande instance, sur requête du mi- amendes, une procédure administrative est mise en mouvement,
nistère public, peut ordonner des mesures conservatoires sur un mois au plus tard après la date d’exigibilité ou après envoi
les biens de la personne mise en cause. En cas de condamna- d’un avertissement si celui-ci est postérieur, le comptable du Tré-
tion ultérieure, la saisie conservatoire est validée (C. pr. pén., sor adresse au condamné une mise en demeure. Si le paie-
art. 706-30). ment n’est pas intervenu dans les cinq jours, il avertit le par-
quet qui procède comme en matière de contrainte par corps. En
46. Contraventions. — À l’égard des amendes sanctionnant les effet, l’absence totale ou partielle du paiement entraîne l’incar-
contraventions, la loi no 72-650 du 11 juillet 1972 (D. 1972.375), cération du condamné et la durée de cette mesure correspond
dans son article 7, est venue prévoir que leur recouvrement peut à la moitié du nombre de jours-amendes non payés (C. pén.,
être réalisé par voie d’opposition administrative. Le comptable art. 131-15, al. 2). L’incarcération est automatique. La déten-
du Trésor peut, en effet, faire opposition entre les mains des per- tion est alors soumise au régime des peines d’emprisonnement
sonnes physiques ou morales (en pratique les employeurs) qui (C. pén., art. 131-25). Il est par conséquent possible, en cas
détiennent des fonds pour le compte du débiteur de l’amende. d’évasion, d’appliquer les sanctions édictées par l’article 434-28
du code pénal.
47. Détenus. — Les articles D. 111 et suivants du code de procé-
dure pénale qui régissent la répartition du produit du travail des 50. Fractionnement. — La solution est incertaine (J.-M. GON-
détenus prévoient que l’amende peut être recouvrée sur une par- NARD, Jours-amendes, J.-Cl. pén., art. 131-25, 1994, no 17), s’il
tie de leurs gains (V. Prisons). y a défaut de paiement d’une partie échue de la somme après
décision de fractionnement. On pourrait envisager dans cette
48. Autres. — D’autres garanties peuvent encore jouer. En cer- hypothèse d’appliquer la contrainte par corps à la seule fraction
taines hypothèses, le paiement de l’amende peut être deman- non payée (en ce sens : Circ. application L. du 11 juill. 1975,
dé à une personne dite civilement responsable. Autrement dit, p. 3 ; J. PRADEL, Les nouvelles alternatives à l’emprisonnement
celle-ci endosse les conséquences pénales d’un fait délictueux créées par la loi no 83-466 du 10 juin 1983, D. 1984, chron. 111).

INDEX ALPHABÉTIQUE
Administration 6. Code de la route 33 s. – détenu 47. – complémentaire 15 : jour-amende
Agent verbalisateur 40. Composition pénale 5. – hypothèque légale 41. 18.
Amende Conducteur 48. – insolvabilité 44. – principale 13 s. : jour-amende 19.
– administrative 6. Constitution de partie civile abu- – préposé 48. Permis de construire 28.
– civile 4. sive ou dilatoire 4. – privilège général sur les meubles Personnalisation 20.
– disciplinaire 8. Construction 28. 41. Personnes morales 24 s.
– fiscale 7. Contrainte par corps 42. – solidarité 43. – amende non prévue pour les per-
– forfaitaire. V. ce mot. Contravention 23. – spécifiques 45 s. sonnes physiques (difficultés) 25.
– ordinaire. V. ce mot. – amende proportionnelle 29. – trafic de stupéfiants 45. – taux 24.
– proportionnelle 27 s. – garantie 46. Grâce 5. Personnes physiques 21 s.
– spéciale 5. Contributions indirectes 6. Greffier 36. Poste 6.
– de substitution 5. Crime 21. Hypothèque légale 41. Préposé 48.
Amende forfaitaire 30 s. Définition 1 s. Insolvabilité 44. Privilège général sur les meubles
– code de la route 33 s. Délit 22. 41.
Jour-amende 17 s.
– majorée 34. Détenu 47. Recel 28.
– fixation 17 s.
– minorée 33. Distinctions 2 s. Receveur de finance 36.
– modalités 35 s.
– ordinaire 32. Dommages-intérêts 3. Recouvrement 36 s.
– peine : alternative 17 ; complémen-
– piétons 33. – solidarité 43. – agent verbalisateur 40.
taire 18 ; principale 19.
– taux 31. Douanes 28. – amende forfaitaire 40.
– recouvrement. V. ce mot.
Amende ordinaire 13 s. Droits fixes 9. – amende ordinaire 41 s.
– amende proportionnelle 27 s. État civil 4. Mariage 4. – exigibilité 37.
– fixation 13 s. Évasion 49. Mineur 4. – fractionnements 39.
– modalités 20 s. Exigibilité 37. Modulation 38. – garantie. V. ce mot.
– peine : accessoire 16 ; complémen- Fixation de l’amende 13 s. Montant 20. – garanties de recouvrement 41 s.
taire 15 ; principale 13 s. Fractionnement 39, 50. Nature de l’amende 13 s. – greffier 36.
– personnes morales 14, 24 s. Frais de justice 10. Parent 4. – jour-amende 49 s.
– personnes physiques 13, 21 s. Garanties de recouvrement 41 s. Partie civile (Constitution abusive ou – modulation 38.
– recouvrement. V. ce mot. – civilement responsable 48. dilatoire) 4. – procédé : normal 36 s. ; particulier
– règles particulières 27 s . – conducteur 48. Peine 40.
Charges du condamné 20. – contrainte par corps 42, 50. – accessoire 16. – receveur de finance 36.
Civilement responsable 48. – contravention 46. – alternative 5, 17. – timbre-amende 40.

octobre 2003 -7- Rép. pén. Dalloz


AMENDE PÉNALE – JOUR-AMENDE

Registre 4. Restitution 43. Timbre-amende 40.


Représentant légal 4. Solidarité 43. Trafic de stupéfiants 45.
Ressources du condamné 20. Télécommunication 6. Tribunal correctionnel 22.

Rép. pén. Dalloz -8- octobre 2003

Vous aimerez peut-être aussi