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INTRODUCTION

On appelle philosophie moderne la pensée qui, en occident, s'étend sur ce que les historiens appellent
l'époque moderne (1492-1789), incluant une partie de la renaissance, le XVIIe siècle, et le siècle des
lumières.
La philosophie moderne est, d'une part, l'héritière de la pensée antique en bien des points. Les penseurs de
l'époque moderne, comme Spinoza, Descartes, Leibniz ou Hume, sont en effet loin d'avoir rompu tout
lien avec la philosophie des anciens. Ils les connaissaient parfaitement et leur ont notamment emprunté
une partie de leur vocabulaire. Mais, d'autre part, les modernes ont souvent conçu leur propre travail
comme une amélioration ou un dépassement de ce que les philosophes de l'antiquité avaient déjà
accompli, ce qui les conduisit parfois à s'opposer à ces derniers.
Par rapport à la philosophie antique et à la philosophie médiévale, la philosophie moderne, amorcée par la
philosophie de la renaissance, et intimement liée à l'essor de la science moderne, marque un profond
renouveau de la pensée, tant dans le domaine politique, que dans la théorie de la connaissance ou encore
la réflexion sur la religion.

I- PRESENTATION DE RENE DESCARTES

RENE DESCARTES, est un mathématicien, physicien et philosophe français, né le 31 mars 1596 à La


Haye-en-Touraine et mort le 11 février 1650 à Stockholm.
Il est considéré comme l’un des fondateurs de la philosophie moderne. Il reste célèbre pour avoir exprimé
dans son Discours de la méthode le cogito — « Je pense, donc je suis » — fondant ainsi le système
des sciences sur le sujet connaissant face au monde qu'il se représente. En physique, il a apporté une
contribution à l’optique et est considéré comme l'un des fondateurs du mécanisme. En mathématiques, il
est à l’origine de la géométrie analytique. Certaines de ses théories ont par la suite été contestées (théorie
de l’animal-machine) ou abandonnées (théorie des tourbillons ou des esprits animaux). Sa pensée a pu
être rapprochée de la peinture de Nicolas Poussin pour son caractère clair et ordonné, rapprochement qui
semble contradictoire. Le cogito marque la naissance de la subjectivité moderne.
Sa méthode scientifique, exposée à partir de 1628 dans les Règles pour la direction de l'esprit, affirme à
partir du Discours de la méthode (1637), une rupture par rapport à la scolastique enseignée dans
l'Université, qui fait la réconciliation entre la philosophie d'Aristote et le christianisme. Le Discours de la
méthode s'ouvre sur une remarque proverbiale « Le bon sens est la chose du monde la mieux
partagée » pour insister davantage sur l'importance d'en bien user au moyen d'une méthode qui nous
préserve, autant que faire se peut, de l'erreur. Elle se caractérise par sa simplicité et prétend rompre avec
la philosophie scolastique qu'on lui avait enseignée au collège de La Flèche, jugée trop « spéculative ».
Elle s’inspire de la méthode mathématique, cherchant à remplacer la syllogistique aristotélicienne utilisée
au moyen âge depuis le XIIIe siècle.
Comme Galilée, il se rallie au système cosmologique copernicien ; mais, par prudence envers la censure,
il « avance masqué », en dissimulant partiellement ses idées nouvelles sur l’homme et le monde dans ses
pensées métaphysiques, idées qui révolutionneront à leur tour la philosophie et la théologie. L’influence
de René Descartes sera déterminante sur tout son siècle : les grands philosophes qui lui succéderont
développeront leur propre philosophie par rapport à la sienne, soit en la développant
(Arnauld, Malebranche), soit en s’y opposant (Locke, Hobbes, Pascal, Spinoza, Leibniz).
Il affirme un dualisme substantiel entre l'âme et le corps, en rupture avec la tradition aristotélicienne. Il
radicalise sa position en refusant d'accorder la pensée à l'animal, le concevant comme une « machine »,
c'est-à-dire un corps entièrement dépourvu d'âme. Cette théorie sera critiquée dès son apparition mais plus
encore à l'époque des lumières, par exemple par Voltaire, Diderot ou encore Rousseau.
1- Biographie

 Son enfance
Né dans une famille de la petite noblesse, il est le troisième enfant de Joachim Descartes, conseiller
au parlement de Bretagne à Rennes, et de Jeanne Brochard. Il naît à La Haye chez ses grands-parents
maternels, où sa mère effectua tous ses accouchements, son père étant de service à Rennes au moment de
sa naissance. Il est baptisé le 3 avril à l'église Saint-Georges. Son premier parrain, René Brochard des
Fontaines, parent de sa mère, est juge à Poitiers ; le second, Michel Ferrand (frère de sa grand-mère
paternelle), est lieutenant-général du roi à Châtellerault.
Sa mère meurt le 13 mai 1597, 13 mois et demi après sa naissance, quelques jours après la naissance d'un
autre garçon qui ne survit pas. Descartes est élevé par sa grand-mère maternelle Jeanne Sain (morte en
1610), son père et sa nourrice. Son père l'appelle son petit philosophe, car René ne cesse de poser des
questions. En 1599 Joachim Descartes se remarie avec Jeanne Morin , fille de Jean Morin, seigneur de
la Marchanderie (1585), propriétaire du château de Chavagne à Sucé près de Nantes, qui avait été avocat
du roi, président de la Chambre des Comptes et maire de Nantes en 1571/72. La signature de Descartes
apparaît à plusieurs reprises sur les registres paroissiaux de Sucé (1617, 1622, 1628, 1644).
Il apprend à lire et à écrire chez sa grand-mère grâce à un précepteur (avec sa sœur aînée Jeanne). À onze
ans (tardivement, étant considéré comme fragile), il entre au Collège royal Henri-le-Grand de La Flèche,
ouvert en 1604, où enseignent les Jésuites dont le Père François Fournet, docteur en philosophie issu de
l'Université de Douai et le père Jean François, qui l'initiera aux mathématiques pendant un an. Il y reste
jusqu'en 1614. Il y a droit à un traitement de faveur, sans cours le matin en raison de sa santé fragile, de
ses dons intellectuels précoces et de son goût pour la réflexion. Il y apprend la physique et la philosophie
scolastique et étudie avec intérêt les mathématiques ; il ne cesse de répéter, en particulier dans
son Discours de la méthode, combien ces études lui paraissent incohérentes et fort impropres à la bonne
conduite de la raison. De cette période, nous ne conservons qu'une lettre d'authenticité douteuse (peut-être
est-elle de l'un de ses frères), lettre que Descartes aurait écrite à sa grand-mère.

 Sa jeunesse et ses études


En novembre 1616, il obtient son baccalauréat et sa licence en droit civil et canonique à l'université de
Poitiers. Après ses études, il part vivre à Paris. De cette époque date un probable traité d'escrime. Il finit
par se retirer en solitaire dans un quartier de la ville pour se consacrer à l'étude pendant deux années de
vie cachée : Heureux qui a vécu caché est alors sa devise, il aura coutume d'affirmer, rejetant les artefacts
et les prétentions de la reconnaissance sociale ou de la célébrité, qu'il préfère en toute chose avancer
masqué. Il a déjà entrepris d'étudier le grand livre du monde.
Il s'engage alors en 1618 en Hollande à l'école de guerre de Maurice de Nassau, prince d'Orange, et fait
la même année la connaissance du physicien Isaac Beeckman. L'Abrégé de musique (Compendium
musicæ) a été rédigé (en latin) pour lui. Beeckman tenait un journal de ses recherches, et il y relate les
idées sur les mathématiques, la physique, la logique, etc., que Descartes lui communiquait ; ce dernier
consacrait alors ses heures de loisir à l'étude et aux mathématiques.
René Descartes.
En 1619, Descartes quitte la Hollande pour le Danemark, puis l'Allemagne, où la guerre de Trente
Ans éclate, et assiste au couronnement de l'Empereur Ferdinand à Francfort.

 Sa parenthèse militaire

Il s'engage alors dans l'armée du duc Maximilien de Bavière.


Cette année-là, Descartes s'intéresse à l'ordre légendaire de la Rose-Croix dont il ne trouvera jamais aucun
membre. Son appartenance à cette fraternité, de même que l'existence même de cette fraternité à cette
époque, est contestée. Toujours est-il que dans le contexte qui suivit la condamnation des écrits favorables
à l'héliocentrisme (1616), en France et en Allemagne, on parlait beaucoup des idées de cette prétendue
fraternité. Il nia y avoir appartenu. Il émet un projet, Le trésor mathématique de Polybe le Cosmopolite,
dédié « aux érudits du monde entier, et spécialement aux F.R.C. [Frères Rose-Croix], très célèbres en G.
[Germanie] ».
C'est pendant ses quartiers d'hiver (1619-1620) à Neubourg que, dit-il, se révèle à lui une pensée décisive
pour sa vie. Le 10 novembre 1619, il fait en effet trois songes exaltants qui l'éclairent sur sa vocation :
« Le 10 novembre 1619 lorsque rempli d'enthousiasme je trouvai le fondement d'une science
admirable… »
— Olympiques, fragment
Baillet, premier biographe de Descartes, en a fait le récit, dont voici le début :
« La recherche qu'il voulut faire de ces moyens, jeta son esprit dans de violentes agitations, qui
augmentèrent de plus en plus par une contention continuelle où il le tenait, sans souffrir que la promenade
ni les compagnies y fissent diversion. Il le fatigua de telle sorte que le feu lui prît au cerveau, et qu'il
tomba dans une espèce d'enthousiasme, qui disposa de telle manière son esprit déjà abattu, qu'il le mit en
état de recevoir les impressions des songes et des visions.
Il nous apprend que le dixième de novembre mille six cent dix-neuf, s'étant couché tout rempli de son
enthousiasme, et tout occupé de la pensée d'avoir trouvé ce jour-là les fondements de la science
admirable, il eut trois songes consécutifs en une seule nuit, qu'il s'imagina ne pouvoir être venus que d'en
haut. »
Il raconte alors comment il s'enferme dans son poêle et conçoit sa méthode. La légende raconte que, alité,
il regarde le plafond au plâtre fissuré et imagine un système de coordonnées, permettant de décrire lignes,
courbes et figures géométriques par des couples de nombres arithmétiques, dont il ne reste qu'à analyser
les propriétés.
Il fait alors vœu d'un pèlerinage à la sainte Maison de Lorette à Loreto dans les Marches italiennes à la
suite de ses trois songes, vœu qu’il accomplit en 1623 et renonce à la vie militaire.
De 1620 à 1622, il voyage en Allemagne et en Hollande, puis revient en France. Ce qu'il a écrit pendant
cette période se trouve dans un petit registre mentionné dans l'inventaire fait à Stockholm après sa mort,
mais qui est aujourd'hui perdu. Il nous est néanmoins connu par Baillet et par Leibniz qui en avait fait des
copies. Ces copies furent retrouvées par Foucher de Careil et publiées en 1859 sous le titre Cogitationes
Privatae. Mais il se trouve qu'elles ont depuis de nouveau disparu. De cette époque nous possédons
également un De Solidorum elementis.
En 1622, il liquide l'héritage de sa mère et bénéficie alors de 6 000 livres de rente, ce qui le dispense de
travailler ; il règle ses affaires de famille et recommence à voyager, visitant l'Italie. De l'été 1625 à
l'automne 1627, Descartes est de nouveau en France. Il rencontre le père Marin Mersenne à Paris et
commence à être connu pour ses inventions en mathématiques. Il fréquente le monde et cherche la
compagnie des savants.
En novembre 1627, chez le nonce du pape Guidi di Bagno, où il est venu écouter une conférence faite
par Chandoux sur les principes de sa nouvelle philosophie, le cardinal de Bérulle lui fait obligation
de conscience d'étudier la philosophie. Il part alors à la campagne, en Bretagne, pendant l'hiver 1627-
1628.
C'est de cette époque (1622-1629) que datent divers traités de mathématiques (sur l'algèbre, l'hyperbole,
l'ellipse, la parabole) connus par le journal de Beeckman, et d'autres petits traités qui sont perdus. L'œuvre
la plus importante de cette période s'intitule les Règles pour la direction de l'esprit.

 Les provinces unies


Cherchant la solitude, il décide de s'installer dans les Provinces-Unies où il devait passer la majeure partie
d'une vie de travail ; il y fait d'abord un bref séjour à l'occasion duquel il va voir Beeckman, mais il
revient probablement à Paris pendant l'hiver 1628, puis s'installe définitivement en Hollande au printemps
1629. Sa vie est entièrement consacrée à l'étude. Il s'inscrit à l'Université de Franeker. Il continue pourtant
de se déplacer (de 1629 à 1633 : Amsterdam, Leyde, Utrecht, Deventer, Egmond aan den Hoef).
Souhaitant ne pas être dérangé, il n'indique jamais sur ses lettres le vrai lieu où il se trouve, mais donne le
nom de quelques villes.
À Amsterdam, Descartes vit au centre de la ville, dans la Kalverstraat, le quartier des bouchers, ce qui lui
permet de faire de nombreuses dissections. Il rencontre des savants : Hendricus
Reneri, Hortensius, Vopiscus Fortunatus Plempius, Schooten, etc. Ses rencontres, comme sa volonté de
vivre solitaire, sont ainsi toujours subordonnées à sa passion de la recherche. Il commence en 1629
un Traité de métaphysique (aujourd'hui perdu), mais il ne semble pas que ses pensées se soient encore
dirigées vers les thèses des Méditations métaphysiques. S'il formule néanmoins le 15
avril 1630 sa théorie de la création des vérités éternelles, c'est qu'il s'interroge sur la place de la science ;
sa métaphysique se développe ainsi d'après ses réflexions de physique, et il ne tire pas encore au clair tous
les fondements qui seront exprimés dans ses ouvrages ultérieurs.
Mais Descartes s'occupe également de mathématiques : il en réforme le système de notation, introduisant
à la suite de Viète et d'Harriot, l'usage des lettres de l'alphabet latin pour désigner des grandeurs
mesurables. C'est en 1631, quand Jacob Golius lui proposa le problème de Pappus, qu'il découvre les
principes de la géométrie analytique. Il commence les Météores à l'occasion de l'observation
des parhélies (observations faites à Rome, en 1629). Il étudie l'optique, redécouvre les lois de
la réfraction que Snellius a déjà trouvées mais non publiées, et achève la rédaction de la Dioptrique.
Enfin, Descartes veut expliquer tous les phénomènes de la nature : il étudie les êtres vivants et fait de
nombreuses dissections à Amsterdam pendant l'hiver 1631 - 1632. De là viendront le Monde et le Traité
de l'homme. Les observations anatomiques de Descartes nous sont connues par les copies de Leibniz et
des fragments (Excerpta anatomica, Primae cogitaniones circa generationem animalium, Partes similares
et excrementa et morbi, ce dernier daté de 1631). Mais les dates de certains textes sont incertaines (pour
certains jusqu'à 1648 peut-être).
Les lettres de cette période le montrent tout occupées de science ; on trouve néanmoins quelques
remarques d'esthétique sur la musique. Elles nous renseignent également sur son caractère susceptible et
exigeant, méprisant l'irrésolution. Dans sa lettre à Mersenne du 4 novembre 1630, Descartes dit songer à
faire un traité de morale. L'infatigable père Mersenne se trouve au centre d'un réseau de mathématiciens
et de scientifiques de nombreux pays. La biographie du religieux Mersenne montre qu'il est l'animateur
incontournable de la vie scientifique à Paris et un des premiers vigoureux partisans de la pensée de
Descartes en France, alors que ce dernier voyageur n'a publié aucun ouvrage phare.

 Condamnation de Galilée
À la fin de 1633, Descartes quitte Deventer pour Amsterdam.
En novembre 1633, Descartes apprend que Galilée a été condamné. Il renonce par prudence à publier
le Traité du monde et de la lumière qui ne paraîtra qu'en 1664.
Le 24 février 1616 le Saint-Office avait condamné la proposition : Sol est centrum mundi et omnino
immobilis motu. Cependant en 1620, un décret de la Congrégation des cardinaux avait autorisé de
supposer le mouvement de la Terre par hypothèse. Mais l'ouvrage de Galilée, Dialogo sopra i due
massimi sistemi del mondo (le Dialogue sur les deux grands systèmes du monde), fut condamné le 22
juin 1633 : l'hypothèse du mouvement de la Terre selon le modèle copernicien (héliocentrisme) ne
pouvait être prise en compte que s'il était clair que l’analyse était effectuée dans une perspective purement
mathématique.
Descartes reçoit de Beeckman l'année suivante (1634) le livre de Galilée qui lui valut cette condamnation.
Il décide alors de publier des fragments du Traité du Monde, accompagnés d'une préface, le
fameux Discours de la méthode (en 1637).
En 1635, Descartes est à Utrecht. Il passe ensuite à Leyde (où il avait déjà été en 1630) et s'arrête à
Santpoort en 1637.
De 1637 à 1641, Descartes vit principalement à Santpoort. Période heureuse au cours de laquelle il publie
en français — pour « que les femmes mêmes puissent entendre quelque chose, et cependant que les plus
subtils trouvassent aussi assez de matière pour occuper leur attention » — le Discours de la méthode et
polémique avec ses contradicteurs, Jean de Beaugrand, Pierre de Fermat, Gilles Personne de
Roberval, Plempius et Jan Stampioen ; il fait venir auprès de lui Hélène Jans, une simple servante
devenue compagne et amie. En août 1635, il a avec Hélène une fille baptisée Francine qu'il reconnaît.
Mais la fillette meurt en septembre 1640 de fièvres éruptives, laissant un Descartes éploré, montrant sans
fausse pudeur des larmes à ses amis. Un mois plus tard, il perd son père, âgé de soixante-dix-huit ans et
doyen du Parlement de Bretagne. Ces disparitions rapprochées sont à l'origine du « plus grand regret qu'il
eût jamais senti de sa vie ». Le 31 mars 1641, l'auteur reconnu s'installe dans le petit château d'Endegeest,
agrémenté d'un beau jardin, de vergers et de prairies. C'est là qu'il reçoit l'abbé Picot, l'abbé de
Touchelaye, le conseiller Jacques Vallée Desbarreaux et de nombreux amis. Vers 1640, d'après le De
metallorum transmutatione de Daniel Morhof (1637), il fait quelques expériences d'alchimie (ou chimie)
avec son ami Cornelis Van Hogelande, mais il rejette la théorie des trois Substances (Soufre, Sel,
Mercure) de Paracelse.
En 1641, Descartes publie les Méditations métaphysiques, déjà esquissées pendant les neuf premiers mois
de son séjour en Hollande en 1629, et les Principes de la philosophie (1644). En 1641, il répond aux
objections de Hobbes contre ses Méditations métaphysiques, publiées en latin, et il doit subir les premiers
feux d'une longue controverse, dite querelle d'Utrecht, lancée par le prédicateur Voetius. Les partisans de
Voetius, en particulier son élève et prête-nom Schoock, accusent publiquement Descartes et son
correspondant d'Utrecht, Henricus Regius de soutenir Copernic, de nommer l'âme un « accident ». Ils
l'accusent également d'athéisme et ils n'hésitent pas à pourfendre en chaire le philosophe, à réclamer qu'il
subisse le sort réservé à Giulio Cesare Vanini, exécuté à Toulouse en 1619. Descartes fait alors intervenir
l’université de Groningue et l’ambassadeur de France afin que cessent ces menaces.

 Suède et fin de vie


Il rencontre Élisabeth de Bohême, fille de l'électeur Palatin détrôné en exil en Hollande, en 1643, et
commence une abondante correspondance avec la jeune femme, traitant notamment d'éthique.
En 1646, alors que se poursuit la querelle d'Utrecht, il se fâche avec son correspondant, Henricus Regius,
qui offre une alternative matérialiste à la métaphysique et à l'épistémologie cartésienne. Il charge un de
ses élèves, Tobias Andreæ, de développer ses arguments contre Regius. Deux ans plus tard, il publie
contre Regius Notes sur une certaine affiche.
L'intérêt et les incessantes interrogations pertinentes de la princesse Élisabeth stimulent le penseur qui
s'attelle à la rédaction du Traité des Passions (1649). Faisant trois séjours en France (1644, 1647 et 1648),
il rencontre au cours du second, Pascal, et prétendra lui avoir inspiré ses expériences du Puy-de-Dôme sur
le vide.
En septembre 1649, il accepte sur son invitation, de devenir le précepteur de la reine
Christine à Stockholm, résidant chez l'ambassadeur de France, Pierre Chanut. Dès cette époque naît la
rumeur qu'elle a une liaison avec le philosophe, même si cette liaison est peu crédible. La rigueur du
climat et l'horaire matinal de ses entretiens avec la reine avant 5 heures du matin sont inhabituels au
penseur et auraient eu raison, selon la version officielle, de sa santé. Il n'a hâte que de partir au retour du
printemps, mais serait mort le 11 février 1650.
Toute une mythologie sur les circonstances de sa mort voit le jour dès son décès. L'hypothèse la plus
notamment évoquée dès cette époque est celle d'un empoisonnement à l'arsenic. Cette thèse est à nouveau
développée par Eike Pies dans son livre Der Mordfall Descartes (« L'Affaire Descartes »), paru en 1996
puis dans La Mort mystérieuse de René Descartes (« Der rätselhafte Tod des René Descartes », désormais
traduit en français-2012) de Theodor Ebert. Selon cette version, il aurait été empoisonné par une hostie,
contenant une dose mortelle d'arsenic, donnée par l'aumônier François Viogué (père catholique et
missionnaire apostolique de la Propaganda Fide, attaché à l'ambassade de France à Stockholm), qui aurait
craint que l'influence cartésienne — notamment son refus (comme Luther et Calvin) du dogme catholique
de la transsubstantiation — ne dissuade la reine Christine luthérienne de se convertir au catholicisme :
Christine de Suède envoie au chevet du philosophe le médecin Van Wullen qui note les symptômes
suivants dans son compte rendu : coliques, frissons, vomissements, sang dans l'urine. Descartes se fait
préparer comme antidote, un émétique à base de vin et de tabac, ce qui laisse penser qu'il suspectait lui-
même l'empoisonnement.
Le médecin légiste Philippe Charlier procède en 2020 à une enquête sur les restes des ossements
retrouvés à l'église Saint-Germain-des-prés qui exclut la thèse de l'empoisonnement. En cette occasion, il
fait reconstituer le visage de Descartes à partir du crâne conservé au musée de l'Homme, à Paris, et qui en
confirme la certitude.

 Sa dépouille
En 1665, un ami de Descartes, M. Dalibert, trésorier de France, ayant appris que son tombeau, établi au
cimetière de Nord-Malmæ, tombait en ruines, il a écrit à l'ambassadeur de France en Suède, Hugues de
Terlon, pour obtenir du roi Charles XI l'autorisation de transporter en France ses restes. Louis XIV appuie
cette demande. L'autorisation est donnée le 1er mai 1666. Hugues de Terlon, accompagné de Simon
Arnauld de Pomponne désigné pour le remplacer comme ambassadeur, se rendent dans le cimetière.
Constatant lors de l'exhumation le 1er mai que le corps est en état de décomposition avancée, il transfère
les restes dans une boîte de cuivre de 80 cm de longueur. Au passage, l'ambassadeur prélève, pour lui-
même, l'index droit du philosophe qui « avait servi d'instrument aux écrits universels du défunt ». Le
cercueil arrive à Paris dans les premiers jours de janvier 1667. Il est d'abord déposé dans l'église Saint-
Paul.
Le 24 juin 1667, en présence d'une foule nombreuse, le cercueil en cuivre de Descartes a été déposé en
l'église de l'abbaye Sainte-Geneviève de Paris. M. Dalibert a fait réaliser un monument de marbre mis en
place en 1669, portant deux inscriptions, une en latin attribuée au Père Lallemant, l'autre en vers français
composée par Gaspard III de Fieubet.
Il tombe en ruines au fil des décennies. En 1790, l'Assemblée nationale constituante charge Alexandre
Lenoir de choisir les tombeaux et sculptures qui méritent d'être conservés dans l'ancien couvent des
Petits-Augustins. En 1792, l’abbé de Sainte-Geneviève lui demande de sauver les biens de son église.
Le 2 octobre 1793, Joseph Chénier a proposé à la Convention nationale de transférer les restes de
Descartes au Panthéon. Un décret est pris mais n'est pas exécuté. L'église Sainte-Geneviève étant
transformée en atelier, les restes de Descartes en sont retirés. À part le crâne de Descartes qui manque, le
Conservateur du Patrimoine récupère dans un « coffre de bois » les ossements attribués à Descartes
(fragment de tibia et de fémur, de radius et de cubitus, les autres os étant réduits en poussière) qui sont
placés dans une urne antique en porphyre ayant appartenu au comte de Caylus et transférés dans l'ancien
couvent, devenu dépôt des monuments ; au passage il récupère un os plat, afin d'en faire des bagues pour
ses amis. Sous la Restauration, les ossements sont conservés au couvent des Bernardins, puis réinhumés à
l'église Saint-Germain-des-Prés où ils reposent depuis le 26 février 1819.
Mais son crâne supposé a connu de nombreuses vicissitudes : a-t-il été volé par Isaac Planström, un
officier des gardes de la ville de Stockholm chargé de son exhumation en 1666 ? A-t-il été racheté lors
d'une vente aux enchères et ramené en France par le chimiste suédois Berzélius en 1821 ? Ce prétendu
crâne de Descartes, sur lequel est gravé un poème en latin et le nom de ses neuf propriétaires successifs,
est remis par Berzélius à Georges Cuvier qui le confie à la collection anatomique du Jardin des plantes,
puis celle du Musée de l'Homme en 1931. Prétendu parce qu'il existe cinq autres crânes attribués au
philosophe.
Bien que la Convention nationale, en 1793, ait décrété le transfert de ses restes au Panthéon de Paris avec
les honneurs dus aux grands hommes, ses restes sont, deux siècles plus tard, toujours « coincés » entre
deux autres pierres tombales — celles de Jean Mabillon et de Bernard de Montfaucon — dans une
chapelle abbatiale de l'église Saint-Germain-des-Prés, à Paris. Les décrets de la Convention n'ont toujours
pas été appliqués, pas plus que le projet défendu en 1996 par François Fillon de transférer le prétendu
crâne au Collège royal de La Flèche où Descartes a été pensionnaire, ou celui du transfert de ce crâne au
Panthéon en 2010, ce qui peut être expliqué par les doutes sur l'authenticité même des ossements et du
crâne du philosophe. En 1997 Philippe Comar illustre ce jeu de vanités dans un récit intitulé Mémoires de
mon crâne, René Descartes qui en résume l'histoire des pérégrinations.
2- Rationalisme
Le rationalisme est la doctrine qui pose les raisons discursives comme seule source possible de
toute connaissance du monde. Autrement dit, la réalité ne serait connaissable qu'en vertu
d'une explication par les causes qui la déterminent et non par une quelconque révélation ou intuition.
Ainsi, le rationalisme s'entend de toute doctrine qui attribue à la seule raison la capacité de connaître et
d'établir la vérité.
Dans son acception classique, il s'agit de postuler que le raisonnement consiste à déterminer que certains
effets résultent de certaines causes, uniquement à partir de principes logiques ; à la manière dont les
théorèmes mathématiques résultent des hypothèses admises au départ. De plus, et en particulier, les
principes logiques eux-mêmes utilisés dans le raisonnement ont été connus par déduction.
Le rationalisme s'oppose à l'irrationalisme et historiquement (avec en particulier Descartes et Leibniz),
à l'empirisme.
On trouve couramment et identiquement les expressions de « rationalisme moderne » ou de « rationalisme
classique » pour désigner le rationalisme tel qu’il se formule de Descartes à Leibniz, correspondant à peu
près à ce que l’on peut appeler depuis Kant le « rationalisme dogmatique » :

 Le rationalisme est dogmatique, lorsque la raison, considérée comme seule source déterminante de la


connaissance, et par ses seuls principes a priori, prétend atteindre la vérité, particulièrement dans le
domaine métaphysique.

 L'expression « rationalisme moderne » vise à le situer dans l’histoire de la pensée conformément à la


terminologie d’usage (la période moderne commençant au XVIe siècle, après la période du moyen
âge) et le distinguant du statut de la raison dans la philosophie antique, tel qu’on le trouve
chez Platon et Aristote par exemple.

 L'expression « rationalisme classique » vise à le distinguer d’un rationalisme élargi et renouvelé,


« modernisé », par la critique kantienne et l’apport des sciences expérimentales : « rationalisme
critique » pour Kant et Karl Popper, « rationalisme appliqué » chez Gaston Bachelard…

 On trouve également l’expression « rationalisme continental » pour le distinguer et l’opposer à


l’empirisme anglo-saxon (Hobbes, Locke, Hume, etc.).
Nous suivrons ici une terminologie distinguant un rationalisme moderne (de Descartes à Leibniz), d’un
rationalisme critique pour désigner généralement le rationalisme kantien et postkantien, indépendamment
des nuances, parfois sensibles, dont il se compose.
Le mot de rationalisme fut également utilisé avant la renaissance, et pendant le moyen âge : il s'agissait
alors de rationalisme en théologie.

II- PRESENTATION DE DAVID HUME

David Hume, né le 7 mai 1711 à Édimbourg et mort le 25 août 1776 dans la même ville, est


un philosophe, économiste et historien écossais. Il est considéré comme un des plus importants penseurs
des Lumières écossaises (avec John Locke, Adam Smith et Thomas Reid, bien que s'opposant à eux
dans la plupart de ses thèses) et est un des plus grands philosophes et écrivains de langue anglaise.
Fondateur de l'empirisme moderne (avec Locke et Berkeley), l'un des plus radicaux par son scepticisme,
il s'opposa tout particulièrement à Descartes et aux philosophies qui considéraient l'esprit humain d'un
point de vue théologico-métaphysique et il ouvrit la voie à l'application de la méthode expérimentale aux
liens sur les phénomènes mentaux.
Son importance dans le développement de la pensée contemporaine est considérable : Hume eut une
influence profonde sur Kant, sur la philosophie analytique du début du XXe siècle et sur
la phénoménologie. On ne retint pourtant longtemps de sa pensée que son supposé scepticisme. Mais les
commentateurs de la fin du XXe siècle se sont attachés à montrer le caractère positif et constructif de son
projet philosophique. Sa philosophie étant toujours efficiente, il est précurseur de disciplines qui naîtront
bien plus tard comme les sciences cognitives.

1- Biographie
En s'appuyant sur les œuvres de Hume en lien avec la vie qu'il a menée, cette dernière peut être divisée en
trois périodes :

 une période d'études et de premiers essais qui s'étend jusqu'en 1740 ;


 une période active de voyages et de résultats, de 1740 à 1769 ;
 une période de retraite de 1769 à 1776.
Bien que la pensée de Hume reste essentiellement homogène durant toute sa vie, la façon dont il l'a
développée est loin d'être toujours la même. Ainsi, la première période est celle de la rédaction du Traité
de la nature humaine, son livre-phare où sa pensée se trouve déjà presque entièrement concentrée ; la
deuxième, celle où les essais et les livres foisonnent, suivant la route et les objectifs fixés par
le Traité dans plusieurs sujets ; la troisième, celle où Hume se consacre beaucoup à la relecture et à
l'amélioration de ses précédents écrits, ainsi qu'à la rédaction de livres posthumes, tels que les Dialogues
sur la religion naturelle.
Né d'une famille de la petite noblesse des Borders, David Hume est le cadet d'une fratrie de trois. Son
père, avocat, meurt en 1714 alors que David est encore petit. Sa mère part alors vivre à Ninewells avec
ses enfants et les élève avec son beau-frère. David entre en 1722 au collège d'Édimbourg, où il a pour
professeurs des disciples de Newton. Il lit les poètes latins et les écrivains anglais. Sa famille le destine à
faire carrière dans le droit.
Mais, en 1734, Hume traverse une période de crise qu'il évoque dans une lettre à J. Arbuthnot. Il est pris
d'une « insurmontable aversion pour toutes choses, hormis les études de philosophie et le savoir en
général ». Refusant de devenir avocat, souffrant de crises d'exaltation, il gagne Bristol et s'essaye au
commerce, avant de voyager en France pendant près de 3 ans, en séjournant tout d'abord à Reims, puis
au Collège Henri-IV de La Flèche (Sarthe) entre 1735 et 1737. C'est là que, âgé de 26 ans, il achève de
rédiger son Traité de la nature humaine. De retour à Londres en 1737, il publie les deux premiers livres de
cet ouvrage en janvier 1739, anonymement. Cette œuvre est un échec auprès du public. Dans son
autobiographie, Hume dit de ce livre qu'il est « tombé mort-né de la presse ». En réalité, plusieurs
comptes-rendus en ont été effectués, mais aucun de leurs auteurs ne comprend les thèses de Hume ni
l'ampleur de son propos. Par la suite, le philosophe donne une grande importance au fait d'être compris de
son public, d'où la reformulation du Traité et la poursuite de certaines investigations qui y sont pratiquées
dans d'autres livres ou essais. Hume refuse finalement que le Traité fasse partie de ses œuvres complètes :
ce reniement n'empêche pas ce livre d'être aujourd'hui considéré comme l'une des œuvres les plus
importantes de la philosophie occidentale.
Après l'échec du Traité de la nature humaine, Hume rejoint sa famille, en Écosse, en 1739. Il fait la
connaissance de Henry Home et commence une relation épistolaire avec Francis Hutcheson. Il publie
en 1740 un Abrégé du Traité de la nature humaine, puis, à l'automne, le livre III du Traité ainsi
qu'un Appendice. La même année, il fait la connaissance d'Adam Smith. Il publie la première partie de
ses Essais moraux et politiques (composé de 15 textes) en 1741 à Édimbourg. L'ouvrage est un succès. Il
est l'objet d'une seconde édition, en 1742, augmentée de 12 textes.
En 1744, sa candidature à la chaire de morale et philosophie pneumatique de l'Université d'Édimbourg est
repoussée, en raison des ennemis que sa pensée lui a valus. Hume est attaqué en raison de l'athéisme
supposé que contiendraient les thèses du Traité. Le philosophe répond par une Lettre d'un gentilhomme à
son ami d'Édimbourg, dans laquelle il se défend de tout refus de l'existence de Dieu.
La même année, il devient le précepteur du marquis d'Annandale, dont la santé se dégrade peu à peu.
En 1746, il devient secrétaire du général Saint-Clair et rejoint Vienne et Turin. Il publie alors
ses Recherches sur l'entendement humain (plus tard rebaptisées Enquête sur l'entendement humain) qui ne
rencontrent guère de succès.
Il revient en Écosse en 1749, écrit ses Discours politiques et ses Recherches sur les principes de la
morale (plus tard rebaptisées Enquête sur les principes de la morale), ces derniers étant une refonte
partielle et un redéveloppement de certains points déjà abordés dans Traité de la nature humaine. Sa
réputation de philosophe commence alors à se répandre. En 1751, il rejoint Édimbourg et publie
en 1752 ses Discours politiques, ouvrage bien accueilli. La sortie londonienne de ses Recherches sur les
principes de la morale se fait cependant dans une certaine indifférence.
En 1752, il prend la fonction de bibliothécaire du corps des avocats d'Édimbourg. Cette situation lui
inspire le projet d'une Histoire de l'Angleterre. Le premier volume, consacré aux Stuart, est cependant
vivement et unanimement critiqué. En 1757 il publie à Londres son Histoire naturelle de la religion. Le
deuxième volume de son Histoire de l'Angleterre sort en 1756, consacré à la période allant de la mort de
Charles 1er d’Angleterre jusqu'à la révolution, puis en 1759, un troisième volume consacré aux Tudor. La
série s'achève en 1761 par deux derniers volumes, le tout rencontrant un succès mitigé. Il se retire alors à
la campagne, songeant à une retraite paisible.
Il accepte cependant un poste de secrétaire à l'ambassade d'Angleterre à Paris qui lui est proposé
en 1763 par le comte de Hertford. En 1767, il devient chargé d'affaires. Il quitte cette fonction
en 1768 pour être nommé sous-secrétaire d'État à Londres. Il regagne l'Angleterre en compagnie de Jean-
Jacques Rousseau, avec lequel il se brouille : cette querelle défraie la chronique dans toute l'Europe
éclairée. Hume retourne à Édimbourg en 1769.
À partir de 1775, il commence à ressentir les effets d'une tumeur intestinale qui l'emporte un an plus tard,
à l'âge de soixante-cinq ans.
Hume a écrit une courte notice autobiographique peu avant son décès (My own life). Courte, s'efforçant
de rester objective dans le ton, elle décrit notamment l'accroissement progressif de son patrimoine,
passant d'une relative pauvreté à une certaine opulence. Elle se termine par une analyse de son
caractère : « doux, maître de moi-même, d'une humeur gaie et sociale, capable d'amitié mais très peu
susceptible de haine, et très modéré dans toutes mes passions. »

2- Empirisme
L'empirisme désigne un ensemble de théories philosophiques qui font de l'expérience sensible l'origine
de toute connaissance ou croyance et de tout plaisir esthétique. L'empirisme s'oppose en particulier à
l'innéisme et plus généralement au rationalisme « nativiste » pour lesquels nous disposerions de
connaissances, idées ou principes avant toute expérience. L'empirisme est à l'origine de la
théorie associationniste de l'esprit en psychologie, qui explique la formation des représentations mentales
par la conjonction d'idées simples.
Défendu principalement par les philosophes Francis Bacon, John Locke, Condillac, George
Berkeley, David Hume et des scientifiques comme Ibn Al Haytham, l'empirisme considère que la
connaissance se fonde sur l'accumulation d'observations et de faits mesurables, dont on peut extraire des
lois générales par un raisonnement inductif, allant par conséquent du concret à l'abstrait.
L'empirisme a des implications non seulement en philosophie et épistémologie, mais aussi dans divers
domaines d'étude : logique, psychologie, sciences cognitives, esthétique et linguistique en particulier.

III- LA COMPLEMENTARITE DE LA RAISON ET DES SENS DANS L’ELABORATION


DE LA CONNAISSANCE
1- Présentation d’Emmanuel Kant
Emmanuel Kant, né le 22 avril 1724 à Königsberg en Prusse (aujourd'hui
appelée Kaliningrad en Russie), et mort le 12 février 1804 dans cette même ville, est
un philosophe prussien, fondateur du criticisme et de la doctrine dite « idéalisme transcendantal ». Grand
penseur de l'Aufklärung (Lumières allemandes), Kant a exercé une influence considérable sur l'idéalisme
allemand, la philosophie analytique, la phénoménologie, la philosophie moderne, et la pensée critique en
général. Son œuvre, considérable et diverse dans ses intérêts, mais centrée autour des trois Critiques – à
savoir la Critique de la raison pure, la Critique de la raison pratique et la Critique de la faculté de
juger – fait ainsi l'objet d'appropriations et d'interprétations successives et divergentes.

 Biographie
Emmanuel Kant naît, dans un milieu modeste : son père, Johann Georg Kant (né en 1683 à Memel ; mort
en 1746 à Königsberg) d'origine écossaise, est sellier, et sa mère, Anna Regina (né en 1697 à Königsberg,
mort en 1737 ibid), née Reuter, s'étaient mariés le 13 novembre 1715. Il qualifia sa mère de très
intelligente et foncièrement piétiste. Il est le quatrième des onze enfants du couple. Il fréquente durant
sept ans le Collège Fridericianum , dirigé par Franz Albert Schultz, pasteur piétiste qui considère
la piété de l'âme comme supérieure au raisonnement.
En 1740, il entre à l'université de Königsberg pour étudier la théologie. Il suit les cours de Martin
Knutzen, professeur de mathématiques et de philosophie ; ce professeur, lui aussi piétiste et disciple
de Wolff, combat le dualisme et en revient à la pure doctrine de Leibniz, suivant laquelle la force
représentative et la force motrice participent l'une de l'autre et se supposent réciproquement.
C'est là qu'il découvre Newton et la physique, preuve, selon lui, qu'une science a priori de la nature est
possible (c’est-à-dire les mathématiques et la physique). Plus tard, il créditera aussi l'astronomie de nous
avoir « appris bien des choses étonnantes », dont la plus importante est qu'elle nous a « découvert l'abîme
de l'ignorance, dont la raison humaine, sans [cette connaissance], n'aurait jamais pu se représenter qu'il
était aussi profond ; et la réflexion sur cet abîme doit produire un grand changement dans la détermination
des fins ultimes à assigner à notre usage de la raison ».
En 1746, la mort de son père l’oblige à interrompre ses études pour donner des cours : il est engagé
comme précepteur par des familles aisées et il accomplit cette tâche durant neuf ans. C'est également cette
année-là qu'il publie sa première dissertation : Pensées sur la véritable évaluation des forces vives. Le
philosophe n'a jamais été au-delà d'un rayon de soixante kilomètres autour de son lieu de naissance, il ne
s'est jamais marié; même la rumeur d'une aventure amoureuse n'a pas été confirmée. Sa vie était une
routine de conférences, de corvées académiques et de séances d'écriture si exigeantes et si régulières
qu'on raconte que ses voisins réglaient leurs montres sur sa promenade quotidienne destinée à maintenir
sa constitution fragile. Le poète Heinrich Heine alla jusqu'à dire que le récit de la vie de Kant était facile à
faire : il n'y avait ni vie ni récit.
En 1755, il obtient une promotion universitaire et une habilitation grâce à une dissertation sur les
principes premiers de la connaissance métaphysique. Il commence à enseigner à l’université de
Königsberg avec le titre de Privatdozent (enseignant payé par ses élèves).
Kant est le premier grand philosophe moderne à donner un enseignement universitaire régulier. Ses cours,
tout comme ses publications à cette période, sont très diversifiés : mathématiques et physique apprises
chez Newton, morale inspirée de Rousseau, Shaftesbury, Hutcheson et Hume, pyrotechnie, théorie
des fortifications.
À partir de 1760, ses cours ont pour nouveaux objets la théologie naturelle, l'anthropologie, et surtout la
critique des « preuves de l'existence de Dieu » ainsi que la doctrine du beau et du sublime.
En 1766, Kant demande et obtient le poste de sous-bibliothécaire, à la Bibliothèque de la Cour, fonction
qu'il occupe jusqu’en avril 1772. C’est la seule démarche qu’il n’ait jamais faite pour obtenir une faveur.
En 1770, il est nommé professeur titulaire, après avoir écrit une dissertation intitulée De la Forme des
principes du monde sensible et du monde intelligible.
En 1781 paraît la première édition de la Critique de la raison pure. Cet ouvrage, fruit de onze années de
travail, ne rencontre pas le succès espéré par son auteur. Une seconde édition voit le jour en 1787.
En 1786, il devient membre de l'Académie royale des sciences et des lettres de Berlin.
En 1788 est publiée la Critique de la raison pratique et, en 1790, la Critique de la faculté de juger. Toutes
ses autres œuvres majeures (Fondation de la métaphysique des mœurs et Vers la paix
perpétuelle notamment) sont écrites durant cette période.
Kant n'a jamais quitté sa région natale mais il fut très attentif aux mouvements du monde, comme en
témoignent de nombreuses publications qui traitent de sujets variés et contemporains de son époque. Il
recevait également très souvent de nombreux amis à dîner et déjeunait chaque jour avec un inconnu. La
tradition rapporte que Kant ne modifia son emploi du temps immuable et la trajectoire de sa promenade
quotidienne que deux fois : la première en 1762 pour se procurer le Contrat social de Jean-Jacques
Rousseau, la seconde en 1789 afin d'acheter la gazette après l'annonce de la Révolution française. Cette
image apparaît sujette à caution à certains universitaires qui y voient une exagération et un transfert des
habitudes de ponctualité de son ami à partir de 1764, Joseph Green, célèbre pour son rigorisme au point
d'avoir été en son temps le sujet du livre satirique L'homme d'après l'horloge de Theodor Gottlieb
Hippel (un autre ami de Kant).
Favorable à la révolution française, il affirme, après Thermidor, que « les méfaits des Jacobins ne sont
rien comparés à ceux des tyrans du passé ».
D'après le récit biographique de Thomas de Quincey, œuvre littéraire, les capacités mentales du
philosophe se seraient affaiblies de manière importante vers la fin de sa vie : l'un des signes « du déclin de
ses facultés fut que désormais il perdit tout sens précis du temps ». Selon Harald Weinrich, les
« symptômes » décrits par le narrateur Wasianski dans l'ouvrage de Quincey, notamment les pertes de
mémoire de Kant, pourraient faire penser à la maladie d'Alzheimer. Il avance cependant cette hypothèse
médicale avec précaution et sans aucune certitude.
Désormais célèbre, bien qu'incomplètement compris par ses contemporains, Emmanuel Kant meurt
en 1804 à Königsberg. Ses derniers mots furent : « Es ist gut » (« c'est bien » ou « c'est suffisant »). Son
tombeau est situé à l'extérieur nord-est de la Cathédrale de Königsberg (aujourd'hui Kaliningrad).

2- Le criticisme
Le criticisme, ou « philosophie critique », promeut l'idée que toute véritable recherche
philosophique « consiste à commencer par analyser les fondements, l'étendue légitime et les limites de
notre connaissance ». La critique ne s'exerce pas tellement sur les productions de la raison mais sur la
raison elle-même. « Quoique la philosophie critique soit intimement liée au nom de Kant, il ne faut pas
pour autant confondre criticisme et kantisme ».
La philosophie critique s'oppose directement au dogmatisme et au scepticisme. En effet, le criticisme peut
être considéré comme un bouleversement non seulement des manières de penser pour ce qui concerne
la spéculation métaphysique mais aussi dans la manière de se comporter eu égard à la morale et à la
politique. Les successeurs de Kant lui reprochent d'ailleurs une certaine timidité, « pourquoi ne pas se
poser la même question à propos de la musique ou de la poésie, de la chimie ou de l'histoire ? », rapporte
l'historien Émile Bréhier.
Le criticisme postule que si l'être humain ne peut connaître la vérité des choses en soi (noumènes), il peut
connaître la vérité de ce qu'elles sont pour soi (ce qu'elles représentent pour lui - phénomènes).
Toute connaissance serait formée de la combinaison d'observations issues des sens (et donc incertaines) et
de catégories de pensée universelles (identiques pour tout être pensant) a priori (préexistant à toute
expérience), tel que le principe de causalité par exemple. De cette universalité des catégories de pensée
découlerait le fondement « certain » des connaissances (des phénomènes) a posteriori.
Principal représentant français du Criticisme : Léon Brunschvicg.
CONCLUSION

L’époque moderne s’est appuyée sur le développement des valeurs de raison et de progrès (au sens
technique), qui se sont encore largement développées au XIXe siècle avec la révolution industrielle.
Considérant la montée de plusieurs contraintes écologiques, sociales et plus largement sociétales,
quelques chercheurs réexaminent cette notion de progrès à partir des années 1970. Ainsi, le théologien
Fabien Revol voit dans la philosophie de Descartes l’une des causes de la crise écologique, comme étant à
l’origine de la <<globalisation du paradigme technocratique˃˃ évoquée par le pape François dans
l’encyclique Laudato si’.
Cette crise a donné lieu à un ensemble de critiques, de la part d’auteurs divers comme René Guénon,
Alain Finkielkraut, Pierre André Taguieff, Dominique Bourg et bien d’autres. Des essayistes comme
Kühn et Feyerabend incitent même à s’interroger sur la notion de raison. Un autre mouvement nommé
zététique œuvre pour sa part à séparer plus nettement sciences et pseudosciences.

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