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Chapitre 1

Introduction à la gouvernance
de l'entreprise
Dans ce chapitre nous allons présenter les notions de base et les notations utilisées dans la suite du cours1 ,
en commençant par le rôle et le but de l’entreprise (section 2), les aspects théorique de la gouvernance de
l’entreprise (section 3) et la théorie de l’agence comme cadre théorique et explicatif de la séparation de la
propriété et du contrôle (section 4). Il n’en demeure pas moins que nous abordons dès le départ dans un
première section une analyse épistémologique afin de fournir aux étudiants (es) une idée sur la thématique de
la gouvernance à l’échelle mondiale et plus particulièrement dans les pays en voie de développement comme
celui le cas de la Tunisie.

Dans ce premier chapitre, nous allons donner aux étudiants (es) les bases nécessaires théoriques et les
mécanismes pratiques mis pour renforcer le système de contrôle et les moyens d’atténuer l’opportunisme
des dirigeants et actionnaires au détriment des autres parties prenantes de l’entreprise. Les étudiants (es)
peuvent à partir de ces notions procéder à :

(1) Se familiariser avec la thématique de la gouvernance


(2) Connaître les différentes approches sous-jacentes
(3) Identifier des pistes de recherche pour faire des études sur la gouvernance
(4) Ce procurer les moyens pour tester empiriquement et procéder à la vérification du bien fondé de
cette question
(5) Des extensions sur des contextes autres que ceux de l’entreprise2.

Il est important de noter qu’à la fin de chaque chapitre les étudiants (es) trouveront des exercices portant
sur des questions à choix multiples (QCM) qui vont leurs permettre de faire une bonne connaissance avec
le contenu du chapitre 1 et de se familiariser avec la question de la gouvernance tant sur le plan de la
théorie que sur le plan de la pratique. A ce titre on peut noter le rôle que tient le droit des sociétés sur le
plan institutionnel. Ce dernier définit les exigences en matière de règles juridiques tant au niveau de la
constitution des sociétés et principalement celles par actions en définissant le rôle des actionnaires et celui
des dirigeants qu’au niveau de la répartition du pouvoir et du contrôle. Par exemple, le commissaire aux
comptes joue un rôle déterminant en matière de contrôle tant pour les administrateurs au conseil
d’administration que pour la justice lorsqu’il observe des actes frauduleux commis par le dirigeant ou les
administrateurs de la société anonyme. Les mêmes règles ne sont pas appliquées dans le cas de la
société de personnes. Or, comme nous pouvons le remarquer, ces dernières années plusieurs actes ont
été commis et qui montrent que les mécanismes de gouvernance juridiques sont insuffisant pour contrer
les déviations malveillantes des dirigeants et des administrateurs.

1
Dans les chapitres qui suivent.
2
Ces extensions peuvent porter sur le contexte Tunisien ou sur le contexte International. Par exemple, dans le cadre actuel, il y
a une grande faiblesse au niveau des conflits ce qui laisse à présager la mise en place d’institutions qui auront pour mission de
régler ces conflits.
Section 1 : Analyse épistémologique de la gouvernance

Sur le plan épistémologique3, le thème de la gouvernance a commencé et s’est développée dans le


contexte de la séparation de la propriété et du contrôle au sein de l’entreprise ; toutefois il s’est étendue à
d’autres contexte ou il y a absence de séparation de la propriété et du contrôle telle que l’entreprise
familiale ou dans la gouvernance territoriale, la gouvernance des entreprises publiques, des ministères et
de toutes formes de séparation entre ceux qui gouvernent et ceux qui sont gouvernés. A ce titre on peut
juger l’assemblée du peuple comme le moyen efficace pour gérer les conflits d’intérêts qui naissent entre
les gouvernants et les gouvernés. Cette forme de gouvernance peut-être étendue à des territoires tels que
les gouvernorats, les municipalités et toutes autres formes d’entités publiques qui utilisent les biens
financés par les agents économiques.

Autrement, le vocable gouvernance des organisations ou, plus particulièrement le gouvernement de


l’entreprise, exprime la manière de conduire les affaires d'une entité. Dans le cadre d'une entreprise,
c’est la mise en place d'une structure de pilotage digne de ce nom impliquant une définition précise du
processus de décision et des parties prenantes concernées par cette question de pilotage. Nous
étudierons dans ce chapitre, les principes d'une bonne gouvernance ainsi que les dispositifs à mettre
en œuvre pour fédérer et orienter les pouvoirs détenus par chacune des parties prenantes dans un
esprit de création de valeurs durable.

La forte médiatisation de la gouvernance d’entreprise pourrait laisser imaginer qu’il ne s’agit que
d’un effet de mode. Ses origines peuvent cependant remonter aux débuts de la séparation de la
propriété et du pouvoir dans les entreprises. Dès la fin du XVIIIème siècle, Adam Smith (1776)
relève déjà que la diffusion extrême du capital dégrade les performances économiques de
l'entreprise et que les gestionnaires non propriétaires sont moins attentionnés que ceux qui gèrent
leur propre entreprise.

L’importance actuelle de la gouvernance d’entreprise peut cependant être attribuée à plusieurs


raisons ou événements ayant eu lieu au cours des vingt dernières années. Becht et al. (2002)
proposent ainsi cinq éléments, tant politiques, qu’économiques.

• Tout d’abord la vague de privatisation qui a touché l’Amérique latine, l’Europe de l'Ouest, l’Asie et
naturellement l’ex-URSS a provoqué un besoin important de développement de méthodes pour le
contrôle et la détention de ces sociétés nouvellement privatisées. En effet, le fait que leurs

3
L'épistémologie traite de la connaissance en général2 et peut donc se pencher sur des objets non scientifiques. . Le mot est
également employé parfois pour désigner telle ou telle théorie de la connaissance censée porter sur la connaissance en
général. Beaucoup plus rarement, le terme « épistémologie » est utilisé comme synonyme de «philosophie des sciences »
. Hervé Barreau considère que l'épistémologie est l'étude des sciences et que ce terme récent (début du XXe siècle) vient
« remplacer l'expression antérieure de philosophie des sciences qu'avaient employée Auguste Comte et Augustin
Cournot […]». Il ajoute plus loin : «L'épistémologie se distingue surtout de la théorie de la connaissance, telle qu'elle était
entendue par les philosophes des XVIIe et XVIIIe siècles, qui s'étaient préoccupés déjà d'élargir, au contact de la science
moderne, les anciennes doctrines sur la connaissance humaine». Jean Piaget proposait de définir l’épistémologie « en première
approximation comme l’étude de la constitution des connaissances valables », dénomination qui, selon Jean-Louis Le Moigne,
permet de poser les trois grandes questions.
• Qu’est ce que la connaissance (la question gnoséologique) ?
• Comment est-elle constituée ou engendrée (la question méthodologique) ?
• Comment apprécier sa valeur ou sa validité ?
nouveaux actionnaires soient initialement constitués en majorité de petits investisseurs du pays
concernés, a obligé les états à jouer un rôle important pour leur offrir une protection adéquate,
aboutissant ainsi à la mise en place de règles de gouvernance.

• L’augmentation de l’importance financière des fonds de pension, principalement d’origine anglo-


saxonne, leur a permis d’exercer une influence forte sur les sociétés et de jouer un rôle important
dans l’pplication à un niveau mondial de mécanismes de protection des actionnaires.

• La vague des offres publique d’achat (OPA) durant les années 1980 aux Etats-Unis et durant
les années 1990 en Europe, a également alimenté le débat sur la gouvernance d'entreprise,
notamment au niveau politique, en raison de l’ampleur et de l’impact de ces transactions.
• La gouvernance d'entreprise a également été fortement encouragée dans les pays de l'Europe de
l'Est, d’Asie et dans d'autres marchés en émergence pour attirer de nouveaux investisseurs
étrangers. Comme les principaux investisseurs visés par ces mesures étaient les fonds de pension
américains et anglais, cette situation a permis d'étendre leurs visions et leur culture dans ces
différents pays.

• Pour finir, les scandales financiers ou faillites intervenus à la fin des années 1990 au sein de
sociétés d’envergure internationale, dus principalement à des manipulations comptables en vue
notamment d’augmenter la rémunération ou le prestige des dirigeants, ont permis de mettre en
évidence le besoin d’amélioration des systèmes de contrôle existants.

Ces différents éléments permettent également de mettre en évidence la raison de l’intérêt porté à
l’amélioration de la protection des actionnaires et surtout créer un climat propice pour le
développement des places financières.

En effet, à partir de la seconde moitié des années soixante dix, les implications organisationnelles et
comportementales liées aux droits de propriétés sont étudiées au niveau des contrats liant
propriétaires et dirigeants. Jensen et Meckling (1976), en se basant sur les premiers travaux de Ross
(1973) vont contribuer à l'émergence de la théorie de l'agence. L’entreprise y est représentée
comme un nœud de contrats entre ses différentes parties prenantes (ou stakeholders), composés
des actionnaires, créanciers, employés, fournisseurs. La théorie de l'agence ne s'intéresse que
partiellement à la définition des objectifs de la firme comme entité, mais principalement à l'analyse
des objectifs personnels de chaque partie intervenant dans l'entreprise, chacune cherchant à
maximiser sa propre fonction d'utilité.

Parmi l’ensemble de ces stakeholders 4, les actionnaires (les principaux) et les dirigeants (les
agents) y jouent un rôle central. Les actionnaires, car leurs droits patrimoniaux ne sont exerçables
qu’en dernier ressort, après que les créances des autres stakeholders, tels que les créanciers ou
salariés, ne soient remboursées. Ce risque de dépossession doit alors être compensé par
l’appropriation du profit de l’exercice et l’actif résiduel en cas de cessation d’activité. Les dirigeants,
ayant une position privilégiée dans l’entreprise, disposent d’informations pouvant les inciter à retirer

4
Les parties prenantes dans la littérature en langue française.
des avantages particuliers, ou à gérer l’entreprise dans leurs intérêts et non dans celui des
actionnaires, ce qui à un effet direct sur le développement des places financières.

Sous-section 1 : Qu'est-ce que la Gouvernance

La gouvernance d'entreprise est un système, d'autres diront un processus, par lequel l'entreprise est
dirigée et contrôlée afin de gérer et protéger les intérêts de toutes les parties prenantes. L'enjeu étant
d'améliorer la performance au sens de chacune des parties prenantes sans pour autant déroger aux
règles juridiques et aux statuts établis par l'entreprise. Ses origines peuvent cependant remonter aux
débuts de la séparation de la propriété et du pouvoir dans les entreprises. Dès la fin du XVIIIème
siècle, Adam Smith (1776) relève déjà que la diffusion extrême du capital5 dégrade les
performances économiques de l'entreprise et que les gestionnaires non propriétaires sont moins
attentionnés que ceux qui gèrent leur propre entreprise.

En 1932 Berle et Means (1932) reprochent aux gestionnaires d’être à l’origine du jeudi noir de 1929 6
et soulignent que le crash financier est le résultat de cette séparation de la propriété et du contrôle
mettant en jeux l’idée que les managers n’œuvrent pas au sens de la théorie économique à la
maximisation de la richesse des actionnaires. Cette idée à été reprise par les théoriciens de la théorie
managériale. Elle reflète les évolutions du système capitaliste dans lequel de nombreuses entreprises
se trouvent maintenant confrontées à une distinction de fait entre d’une part la propriété de l’entreprise
(détenue par les actionnaires) et d’autre part la gestion de l’entreprise (dévolue au «manager»).

En conséquence, les actions de l’entreprise sont maintenant analysées comme étant le fruit d’une
coalition de groupes d’agents économiques n’ayant pas nécessairement les mêmes objectifs : les
actionnaires recherchent le profit et les managers ont des motifs différents : obtention de la
rémunération (revenu) la plus importante possible, recherche du pouvoir, recherche de
reconnaissance (prestige), recherche de la sécurité. Cette approche se traduit par des effets qui
éloignent l’entreprise de son objectif premier définit par le courant classique : Baumol avance alors
l’idée que les managers recherchent avant tout la maximisation du chiffre d’affaire au détriment de la
maximisation du profit. Williamson (1985) reconnaît que certaines dépenses de l’entreprise vont s’en
trouver augmentées : dépenses de personnel administratif (source de pouvoir et de prestige pour le
manager) ; les émoluments des managers (partie discrétionnaire de la rémunération : avantages en
nature, prêts…) qui représentent leur pouvoir et leur prestige, des dépenses d’investissement qui
représentent des opérations de prestige sans rapporter de profit.

Sous-section 2 : Les principes de gouvernance déclinés à l'entreprise


La mise en œuvre de la gouvernance dans l'entreprise permet de garantir un processus durable et
efficace de création de valeurs conforme à l'ensemble des parties-prenantes internes et externes et
en respect des règlements légaux, des statuts internes et des principes éthiques. Cette phrase

5
Parcellement du capital entre plusieurs parties (plusieurs mains).
6
La crise économique qui s’est répandue des Etats-Unis vers l’Europe.
introductive est un peu lourde il est vrai, mais cet ambitieux projet n'est pas des plus simples. En effet,
ce projet rencontre plusieurs obstacles qui dérivent de l’interprétation juridiques des textes de lois
aussi bien de la tendance à libéraliser les produits financiers en créant l’ingénierie financière et les
produits dérivés qui en découlent.

Sous-section 2.1 : La gouvernance, les ressources


Dans cette sous-section, nous analysons les mécanismes actuels mis en place en partant de la
définition de la gouvernance (2.1.1) vers les divers mécanismes institutionnels mis en place qui ont
été instaurés suite à l’affaire Enron qui a été à l’origine des lois Sarbanes-Oxley et des IFRS tant au
niveau des Etats-Unis qu’au niveau mondial.

Source :

Sous-section 2.1.1 : La gouvernance, Définition


Qu'est-ce que la gouvernance ? Définition du principe de gouvernance. Gouvernance mondiale des
états, de l'entreprise. Le rôle des stakeholders, la concertation face aux dérèglementations. Depuis
une bonne décennie, le terme de gouvernance, vocable de l'ancien vocabulaire français revenu par
l'anglais Governance est de plus en plus souvent cité. Que se cache-t-il donc derrière ce concept
particulièrement important ?

Les débats sur les rémunérations excessives des dirigeants, le cumul des fonctions de président
du conseil d’administration et de directeur général, l’exercice des droits de vote aux assemblées
générales ou encore la responsabilité des membres du conseil d’administration ont permis de
promouvoir certains aspects de la gouvernance d’entreprise. Mais qu’est-ce que la gouvernance
d’entreprise et quel est son objectif ?

Différentes définitions permettent d’apporter des premiers éléments de réponses à ces questions.
La Porta et al. (2000) définissent la gouvernance d’entreprise comme l’ensemble des dispositions,
des institutions et des règles de droit conçues pour empêcher l’éviction des investisseurs
minoritaires par les dirigeants, le conseil d’administration et les actionnaires majoritaires. Cette
première définition, bien que très globale, met en évidence l’objectif principal de la
gouvernance d’entreprise : la protection des intérêts des actionnaires minoritaires dans les sociétés
anonymes.
Le «Rapport final du groupe d’experts sur le gouvernement d’entreprise en Suisse» définit la
gouvernance selon une double approche : au sens large, comme l’ensemble «des questions
d’organisation et de structures qui sont en rapport direct ou indirect avec la protection des
actionnaires» et au sens étroit, comme l’ensemble des «questions d’organisation et de contrôle des
principaux organes dirigeants des entreprises, c'est-à-dire essentiellement des questions
d’équilibre et de transparence». Cette deuxième définition met également en évidence la place
centrale de l’actionnaire et son besoin de protection, mais introduit deux éléments clés pour y
parvenir : l’équilibre des pouvoirs entre les différents intervenants de l’entreprise et l’amélioration
de la transparence.

Une troisième définition, proposée par Pérez (2003), intègre l’importance du comportement des
personnes impliquées dans l’application de la gouvernance, afin de déterminer son efficacité finale :
«La gouvernance d’entreprise se réfère aux dispositifs institutionnel1 et comportemental régissant
les relations entre les dirigeants d’une entreprise et ses stakeholders». Il définit ainsi la
gouvernance en fonction de deux types de composantes : le contenu institutionnel et le
comportement des personnes physiques qui sont chargées de l’appliquer.

Ces définitions permettent d’indiquer que l’objectif de la gouvernance d’entreprise est de protéger les
intérêts des actionnaires minoritaires, en minimisant et contrôlant les conflits d’intérêts provenant
de la délégation du pouvoir des actionnaires aux gestionnaires de l’entreprise (le conseil
d’administration et la direction générale). La gouvernance d’entreprise peut ainsi être perçue
comme un ensemble de mécanismes permettant de minimiser les coûts globaux, découlant de la
séparation de la propriété (les actionnaires) et de la gestion (le conseil d’administration) dans
les sociétés anonymes.

Ces mécanismes7 peuvent, soit permettre de concilier les intérêts des différents intervenants, tels
que l’application d’une politique de rémunération des dirigeants basée sur la performance boursière
des sociétés, soit de contrôler et de sanctionner un comportement déviant des gestionnaires,
grâce par exemple à l’élection de membres du conseil d’administration représentant les intérêts
de l’ensemble des actionnaires.

Cependant, dans la continuité de Jensen et Meckling (1994) qui rappellent combien il est
essentiel de comprendre la nature humaine pour saisir le fonctionnement des organisations,
la définition de Pérez (2003) met en évidence que comme dans tout système humain, l’efficacité du
système de gouvernance dépend fortement du comportement des personnes impliquées dans sa
mise en œuvre et son fonctionnement. Ainsi, afin d’évaluer la qualité de la protection des intérêts
des actionnaires minoritaires dans les entreprises, il est nécessaire de prendre en
considération non seulement l’ensemble des mécanismes de gouvernance, mais également le
pouvoir des différents intervenants de l’entreprise, formant un système de gouvernance propre à
chaque entreprise.

7
Plusieurs mécanismes sont mis en place pour réduire l’opportunisme des dirigeants et des actionnaires majoritaines qui
cherchent à s’approprier les revenus de l’entreprise au détriment des autres parties prenantes comme les créanciers et les
petits porteurs d’actions.
Sous-section 2.1.2 : Gouvernance d'entreprise en pratique

Pourquoi la gouvernance d'entreprise est elle indispensable ? Comment garantir un pilotage


d'entreprise moins sensible aux ambitions personnelles individuelles ainsi qu'aux puissances
financières ? Comment établir un pilotage orientée stratégie en accord avec les parties prenantes ?
Autant de thèmes qui exigent des réponses précises.

1- L'affaire ENRON8

L'affaire Enron et de ses dirigeants Kenneth Lay et Jeffrey Skilling, le plus grand scandale financier
des 20 dernières années. Pour bien apprécier l'urgence de la mise ne place d'une gouvernance et
comprendre l'origine des lois Sarbanes Oxley et des normes comptables IAS-IFRS l'affaire Enron est
incontournable.

Il est à noter que cette affaire à débuter au cours des années 1990 et avec l'arrivée de Jeffrey Skilling,
ancien consultant de McKinsey, la société Enron adopta un nouveau model avec la création de la
"Gas Bank", une chambre de compensation pour le commerce du gaz où Enron est la contrepartie de
toutes les transactions et, grâce à cette plate-forme, offre des produits financiers dérivés comme des
swaps, options, ... à ses clients. Par la suite, la société a entrepris une large diversification en
agrandissant son marché à l'ensemble des matières premières et en offrant des dérivés sur un grand
nombre de sous-jacents. Cette politique sera suivie en 2000 par le lancement du site EnronOnline,
une plate-forme de trading où seront négociés jusqu'à 2 100 produits.

Parmi les nouveaux produits lancés par Enron, on trouve :


• Enron Broadband : une plate-forme de négoce pour la bande passante.
• Azurix : une société gérant des infrastructures de distribution d'eau dont le but était de
reproduire le model de la "Gas Bank" pour l'eau.
• des dérivés climatiques développés et commercialisés par Enron dans le milieu des années
1990.
Ce développement se fit sous la tutelle du sénateur texan Phil Gramm, dont l'épouse était présidente
de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC, l'organe de contrôle des produits financiers
dérivés, en particulier pour les matières premières). Dans le même temps, une vaste campagne de
communication fut lancée auprès des consommateurs, notamment pour les persuader
qu'une dérégulation du marché (cf. déréglementation) réduirait leur facture de 43 %.

En 1999, le magazine Fortune place Enron à la septième place des entreprises américaines et lui
décerne cinq années consécutives le titre d'entreprise la plus innovante des États-Unis. En janvier
1999, Human Rights Watch accuse Enron de complicité dans de « graves violations » des droits
humains en Inde. La centrale de Dabhol, détenue à 50 % par Enron, « emploie des forces de sécurité

8
L’affaire Enron a été l’effet déclencheur de plusieurs autres affaires qu’a connu le monde capitaliste. D’autres ont eu lieu
comme WorldCom, Parmalat, Permalat, etc., soit de manière concomitantes soit de manière indépendantes avant ou après
l’affaire Enron.
qui agressent régulièrement les personnes qui manifestent pacifiquement contre la centrale », écrit
l'organisation, qui accuse les gouvernements indien et américain de tolérer ces pratiques

Autrement, en créant plus de 3 000 sociétés offshores, Enron a mis en place des sociétés dans le
premier but était de permettre à des investisseurs de cofinancer des infrastructures longues à
rentabiliser grâce à la titrisation. Ces sociétés permettaient aussi d'externaliser certains risques
importants de la société mère pour éviter de la mettre en péril. Enron utilisait largement ce type de
sociétés non consolidées dans ces buts et par la suite pour sortir des actifs ou des passifs du bilan.
Ces sociétés, dont les sièges sociaux étaient installés dans les îles Caïmans, les Bermudes ou
les Bahamas, rendaient ainsi le bilan plus "présentable". Toutefois, de succinctes informations sur ces
filiales étaient indiquées dans des notes en bas de page des documents d'information financière.

L'entreprise poursuivait simultanément une politique de communication agressive. «Je crois en Dieu
et je crois dans le marché », déclare Kenneth Lay, le charismatique président de Enron. Il envoya aux
salariés un courrier leur annonçant qu'il pensait que le cours de l'action gagnerait 800 % avant
l'année 2010. Une forme de montage financier est d'emprunter de l'argent pour Enron sans que cela
apparaisse dans ses comptes. L'opération implique trois acteurs : Enron, une filiale offshore d'Enron
(comme Jedi, LJM ou Mahonia) et une banque (appelons-la banque A). Tous sont complices du
montage. L'opération est ici largement simplifiée.

D'abord la filiale vend pour un million de dollars de gaz à la banque A. La filiale, contrôlée par Enron,
reçoit alors un million de dollars de la part de la banque A (un contrat de livraison de gaz est signé
mais cette livraison n'a pas lieu ; seul son paiement est effectué). Enron vend ensuite pour un million
de dollars de gaz à sa filiale. Enron reçoit donc un million de dollars de cette dernière. Enfin Enron
achète à la banque A pour un million cinquante mille dollars de gaz, et paie en plusieurs fois. La
banque A recevra, au terme du processus, un million cinquante mille dollars (les cinquante mille
dollars sont, en réalité, des intérêts).

Quel est le résultat ? L'opération équivaut pour Enron à contracter un prêt d'un million de dollars
auprès de la banque A et le rembourser progressivement avec des intérêts. Mais cela apparaît dans
les comptes comme une opération commerciale, et permet à Enron de se surendetter sans éveiller les
soupçons. D'autre part sur les résultats comptables, Jeff Skilling demanda comme condition à sa prise
de la direction, de tenir une comptabilité sur la base des prix du marché et non pas sur des valeurs
historiques, ce que le cabinet Arthur Andersen accepta. Il faut savoir qu'aucune pratique ne
réglemente encore le nouveau business model d'Enron. Cette méthode de comptabilité à la valeur du
marché qui est la règle dans le domaine de la finance est appliquée pour la première fois hors de ce
milieu. Cela permet d'inscrire en comptabilité non pas les bénéfices réels, mais les bénéfices à la
valeur du cours du gaz au jour de la signature du contrat.

2- Principe de gouvernance d'entreprise

Dans le sillage de l'explosion de la bulle Internet en 2000-2001, les actions Enron baissent fortement.
Comme ces actions servent de garantie à de nombreux montages financiers réalisés entre Enron et
les banques, celles-ci demandent le remboursement de ces emprunts camouflés qui, dès lors,
réapparaissent dans le bilan d'Enron. Le 20 août 2001, son PDG, Kenneth Lay, déclare à Business
Week: «La société est probablement dans sa meilleure forme, la meilleure qu'elle ait jamais eue.» Il a
pourtant vendu toutes ses actions Enron depuis six mois, empochant au passage une dizaine de
millions de dollars de profit net. Le 9 octobre 2001 Goldman Sachs qualifie Enron de «best of the
best». Le 29 octobre 2001, le PDG d'Enron joint le secrétaire au Commerce Donald Evans pour lui
demander s'il peut influencer l'agence de cotation Moody's qui a dégradé la note de la dette à long
terme de sa société. Evans estime qu'il ne peut intervenir. Le 31 octobre 2001, la SEC (le gendarme
de la bourse américaine) ouvre une enquête. Le 2 décembre 2001, la multinationale se déclare en
faillite ; le cours de l'action chute à 1 dollar en quelques mois. En un an, sa valeur boursière a été
divisée par 350. Environ 20 000 salariés sont immédiatement licenciés, tandis que des centaines de
milliers de petits épargnants perdent l'essentiel de leur capital-retraite, car celui-ci était constitué
principalement de parts dans l'entreprise (environ les deux tiers des actifs boursiers d'Enron étaient
détenus par des fonds de pension ou des fonds de mutuelles).

Des procédures pénales sont ouvertes contre les anciens dirigeants de l'entreprise : le trésorier, Ben
Glisan fut condamné à cinq ans de prison. Le directeur financier, Andrew Fastow, à dix ans (son
épouse, Lea, fut elle aussi condamnée pour avoir aidé à masquer les comptes).
Le 25 mai 2006, Kenneth Lay, 64 ans, est reconnu coupable de six chefs d'accusation, dont la fraude
et le complot ; mais il décéda d'un infarctus le 6 juillet avant de commencer à purger sa peine.
L'ancien numéro deux d'Enron, Jeffrey Skilling est également reconnu coupable de 19 des 28
accusations, dont fraude, complot, fausses déclarations et délit d'initié et condamné à vingt-quatre ans
et quatre mois de prison le 23 octobre 2006. La Cour suprême des États-Unis décide le 24 juin 2010
d'annuler la condamnation de Jeffrey Skilling, ancien PDG d'Enron, pour manquement à ses
« obligations morales » lors de la faillite de la société en 2001. Le 21 juin 2013, sa peine initiale de 24
ans de détention est ramenée à 14 années. Les anciens partenaires de l'entreprise sont également
inquiétés par les poursuites judiciaires, notamment : le cabinet d'Arthur Andersen, qui est démantelé
en 2002 suite à la faillite d'Enron, Citigroup, JP Morgan, Merrill Lynch, Deutsche Bank, la CIBC, et la
banque Barclays

L’affaire Enron a lancé donc un débat donnant lieu à plusieurs questions : Quel est le principe de la
gouvernance d'entreprise ou Corporate Governance ? Quelle en est la portée ? Quels en sont les
règlements législatifs et comptables ? Comment la mettre en oeuvre, la loi Sarbanes Oxley, le pouvoir
des stakeholder ou parties prenantes, consensus actif et négociation. Quel rôle doit-on attribuer aux
cabinets d’experts comptables et aux commissaires aux comptes ? Comment doit-on procéder à la
légalisation et au contrôle des produits de l’ingénierie financière ?

3- Les enjeux de la gouvernance d'entreprise

Quelles sont les enjeux de la mise en place d'une gouvernance d'entreprise ? Quel est son rôle,
quelles sont ses missions ? Quelles sont les principales règles d'une gouvernance d'entreprise
efficace ? L'instauration de la gouvernance d'entreprise vise à pallier aux défauts des organisations
traditionnelles qui pénalisent durablement la performance durable de l'entreprise. Etudions de plus
près le rôle, les enjeux, les missions.
Il est évident que les enjeux portent essentiellement sur les mécanismes juridiques et institutionnels
que doit mettre un pays pour mieux couvrir les marchés financiers et l’épargne publique des
manipulations que peuvent conduire les dirigeants et les actionnaires pour s’approprier une part
relativement importante de revenu au détriment des autres partenaires sociaux. Les mécanismes
juridiques ne suffisent pas et doivent être soutenues par la mise en place d’institutions qui disposent
de connaissances et de pouvoirs pour contrer ces manipulations.

En effet, malgré les différences notoires entre le monde anglo-saxon et celui francophone, les règles
juridiques sont plus assouplis dans le monde anglo-saxon que celui francophone. Par contre, au
niveau institutionnel les mécanismes de contrôle sont plus drastiques dans le monde anglo-saxon que
celui francophone. De toutes les manières, l’économie libérale a connu au cours des trente dernières
années plusieurs crises qui pour certains économistes sont dues à la déréglementation des marchés
et l’introduction des nouvelles techniques de l’ingénierie financière portant sur les nouveaux
instruments financiers tels que les options où les produits dérivés. Ces derniers visent à anticiper une
rentabilité ou un risque financier ou monétaire. En France, à titre d’exemple, les instruments
financiers sont définis au code monétaire et financier, qui fourni, certes, une liste limitative, mais
néanmoins suffisamment générale dans ses définitions pour ne pas constituer un frein a priori au
développement des marchés financiers et à la création de nouveaux produits.

Autrement, dans le cas ou certaines institutions ne sont pas en mesure d’anticiper les raisons qui
incitent les actionnaires et leur dirigeant, les écritures comptables et la présentation de l’information
dans les états financiers peuvent leurrer les marchés financiers et les investisseurs en apportant un
coup dur à l’épargne publique. Comme nous l’avons déjà souligné, la titrisation est une forme
d’ingénierie qui porte sur l’embellissement des états financiers en procédant au maquillage du bilan.
En fait, la création des institutions doit être suivie par deux facteurs importants :
• Des règles juridiques drastiques pour éliminer toute forme de manipulation-falsification,
• La formation des acteurs institutionnels dans plusieurs domaine de l’activité économique aux
mécanismes de l’ingénierie financière et aux différentes manipulations et falsifications qui
peuvent être à la base de pertes énormes pour les épargnants et investisseurs.

4- La loi Sarbanes Oxley SOX

La loi Sarbanes Oxley, aussi dénommée Public Company Accounting Reform and Investor Protection
Act of 2002 ou plus simplement SOX ou Sarbox, est la réponse aux multiples scandales comptables
et financiers. La gouvernance d'entreprise, corporate governance. Documents de références à propos
de la LSF Loi de sécurité financière. Création de l'agence indépendante de régulation la Public
Company Accounting Oversight Board, ou PCAOB.

Cette loi a pour objectif d'accroître la responsabilité des entreprises, de rendre la communication de
l'information financière plus fiable et de lutter contre les comportements déviants et frauduleux des
entreprises. Cette loi est d'autant plus importante que c'est une des seules lois fédérales encadrant le
système comptable américain. En effet les principes comptables (les Generally Accepted Accounting
Principles, ou US GAAP) aux États-Unis sont développés par un organisme à but non lucratif et non
gouvernemental, le Financial Accounting Standards Board (FASB). Les US GAAP ne sont qu'un cadre
conceptuel qui donne des objectifs généraux. La loi9 se compose de six parties :
• Certification des comptes : Pour mettre le directeur général et le directeur financier face à
leurs responsabilités, la loi leur impose de certifier les états financiers. Ceux-ci devant être
datés et signés.
• Contenu des rapports : La Securities and Exchange Commission (SEC) oblige les
entreprises à publier des informations complémentaires dans un souci de fiabilité et de
diffusion. Ces informations complémentaires comprennent notamment les engagements hors
bilan, le rapport du commissaire aux comptes et toutes autres informations supplémentaires
nécessitant d'être précisées. Un rapport sur l'audit interne et sur le code éthique adopté par
l'entreprise doivent également être rédigé par le dirigeant.
• Contrôle de la SEC : Cette loi précise que la SEC se chargera de vérifier le bon
comportement des sociétés cotées et cette vérification devra être effectuée au moins tous les
trois ans.
• Comité d'audit et règles d'audit : Un comité d'audit est nommé pour choisir, désigner,
rémunérer et superviser les auditeurs. Il se charge de mettre en place des procédures pour
traiter les réclamations qui remettent en cause la comptabilité, les contrôles internes et l'audit.
Il doit également préserver la confidentialité des observations faites par le personnel sur les
problèmes comptables et audit de l'entreprise. De plus, la loi réglemente l'intervention des
auditeurs externes. Elle précise que ceux-ci ne peuvent intervenir dans un cadre autre que
leur mission principale. L'entreprise ne peut conserver les mêmes auditeurs externes pendant
plusieurs années.
• Création du Public Company Accounting Oversight Board (PCAOB) : C'est un nouvel
organisme de réglementation et de surveillance créé dans le but de superviser les cabinets
d'audit, établir des normes, inspecter et sanctionner le cas échéant les personnes physiques
ou morales aux comportements déviants.
• Sanctions : Cette loi précise également les sanctions pénales retenues contre les personnes
ne respectant pas le cadre de la loi. Par exemple une falsification des états financiers est
passible d'une amende d'un million de dollars ou peut être punie par une peine de dix ans de
réclusion ou plus.

Cette loi oblige aussi à mettre en œuvre un contrôle interne s'appuyant sur un cadre conceptuel. En
pratique le COSO10 est le référentiel le plus utilisé. En d’autres termes, la SOX est d’une portée
institutionnelle qui a donné aux institutions existantes des moyens pour la rendre plus efficace contre
toutes les manipulations et falsifications qui peuvent conduire à la faillite des marchés et au

9
En France : Loi relative aux nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001, Loi de sécurité financière du 17 juillet
2003, Loi pour la confiance et la modernisation de l'économie du 26 juillet 2005. Foreign Corrupt Practices Act (1977, s'applique
également à toute société, américaine ou non, cotée aux États-Unis). En Grande Bretagne, la loi sur les marchés et services
financiers de 2000, la Financial Services and Markets Act 2000.
10
Le COSO est un référentiel de contrôle interne défini par le Committee Of Sponsoring Organizations of the Treadway
Commission. Il est utilisé notamment dans le cadre de la mise en place des dispositions relevant des lois Sarbanes-Oxley, SOX
ou Loi de sécurité financière, LSF, pour les entreprises assujetties respectivement aux lois américaines ou françaises. Le
référentiel initial appelé COSO 1 a évolué depuis 2002 vers un second corpus dénommé COSO 2.
renforcement de l’intervention de l’état pour mieux les réguler qui est un principe contradictoire à
l’économie du marché très chère pour les pays industrialisés.

5- Les normes IAS11 IFRS12

IFRS International Financial Reporting Standard, complément des normes IAS International
Accounting Standard, sont des normes comptables internationales élaborées par l'IASB, International
Accounting Standards Board, au lendemain des scandales financiers. Normes Internationales
d'Information Financière qui visent essentiellement à l’harmonisation sur le plan mondial de
l’information financière transmise aux actionnaires sur les marchés financiers et à adapter l’information
financière à la réalité économique de l’entreprise pour donner une meilleure appréciation (juste valeur)
aux actions émises sur le marché boursier national ou international.

Comme il a été dit auparavant, les scandales financiers du début des années 2000 en Europe et aux
États-Unis (Enron, WorldCom…), puis la crise de 2008 les pouvoirs publics se sont attachés à
renforcer la qualité de la communication financière afin de rétablir la confiance du public,
des épargnants et des investisseurs. Cet important mouvement s’est traduit par l’adoption d’un
ensemble de textes dont l’objectif commun est l’amélioration de la sécurité financière. L’année 2005 a
ainsi vu l’application des normes IFRS (International Financial Reporting Standards, dénommées
jusqu’en 2001 normes IAS pour International Accounting Standards) existant depuis 1973, destinées
à toutes les entreprises faisant appel public à l’épargne. L'adoption et l'application des normes
comptables internationales au sein de l'Union européenne sont régies par le règlement
(CE)1606/2002 du 19 juillet 2002, qui définit notamment les critères d'application d'une norme. Le
règlement européen du 19 juillet 2002, en imposant aux entreprises faisant appel public à
l’épargne de présenter leurs comptes consolidés selon les normes IFRS, vise principalement à
garantir une meilleure transparence comptable. En effet, la présentation des comptes de ces
entreprises selon des normes harmonisées en facilitera la compréhension et surtout la comparaison à
l’échelon européen.

Elles ont nécessité de profonds aménagements informatiques, aussi bien dans les grands groupes
que dans les PME-PMI. Le changement de référentiel comptable qu'ont connu toutes les entreprises a
transformé le fonctionnement des marchés financiers, des entreprises et des économies, d’une part,
et l’élaboration des comptes, d’autre part. Moins médiatisé dans le grand public que le passage à
l’euro, ce changement aux normes internationales IAS/IFRS a pourtant eu beaucoup d’impacts.
L’objectif est en effet d'établir la clarté des comptes des entreprises, consolider la confiance des

11
Normes Américaines ou standards américains qui touchent plusieurs domaines de l’activité économiques. Ces standards
sont développés par les professionnels sous l’ordre de la U.S. Securities and Exchange Commission, communément appelée la
Securities and Exchange Commission, souvent abrégée en «la SEC», est l'organisme fédéral américain de réglementation et
de contrôle des marchés financiers. C'est en quelque sorte le «gendarme de la Bourse» américain, aux fonctions généralement
similaires à celles de l’Autorité des marchés financiers que l'on rencontre dans d’autres États. Ses pouvoirs et sa composition
ont été profondément remaniés par le «Dodd–Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act» de 2010.Les lois et
réglementations financières qui régulent le marché financier aux États-Unis proviennent du principe que tout investisseur,
institutionnel ou privé, doit avoir accès à un minimum d’informations avant d’acheter et pendant toute la durée de détention des
titres.
12
Normes Internationales qui viennent pour harmoniser sur le plan mondial les modes de comptabilisations des opérations
économiques de l’entreprise et de fournir une information pour la prise de décision des investisseurs. Au niveau actuel, peu de
pays font référence à ces normes et d’autres comme la Tunisie ont apportés aux normes internes des modifications qui
s’alignent avec les normes internationales.
investisseurs sur les marchés boursiers. Le travail des veilleurs est plus simple, plus rapide et
relativement accessible au néophyte. Deux nouveaux principes comptables sont ajoutés :
• prééminence de l'économique sur le juridique 13 : les comptes doivent donner une image fidèle
de l'entreprise et de son patrimoine (ainsi, le crédit bail rentre à l'actif du bilan)
• importance relative : une information ne doit figurer dans l'annexe que si elle peut influer sur
les choix futurs des utilisateurs.

Section 2 : Rôle et but de l’entreprise


Une entreprise est une organisation ou une unité institutionnelle, mue par un projet décliné
en stratégie, en politiques et en plans d'action, dont le but est de produire et de fournir des biens ou
des services à destination d'un ensemble de clients ou d'usagers, en réalisant un équilibre de ses
comptes de charges et de produits. Pour ce faire, une entreprise fait appel, mobilise et consomme des
ressources (matérielles, humaines, financières, immatérielles et informationnelles) ce qui la conduit à
devoir coordonner des fonctions (fonction d'achat, fonction commerciale, fonction informatique). Elle
exerce son activité dans le cadre d'un contexte précis auquel elle doit s'adapter : un environnement
plus ou moins concurrentiel, une filière technico-économique caractérisée par un état de l'art, un cadre
socio-culturel et réglementaire spécifique. Elle peut se donner comme objectif de dégager un certain
niveau de rentabilité, plus ou moins élevé. Aucune entreprise ne peut s'exempter de l'équilibre entre le
niveau de ses revenus et de ses charges. En cas d'écart déficitaire, celui-ci doit être réduit ou comblé
par un apport extérieur (par exemple une subvention d'équilibre) sous peine de non-viabilité et de
disparition de l'entreprise à plus ou moins brève échéance.

Dans la suite de cette section nous allons traiter des différents courants économiques et managériaux autour
de l’entreprise en retenant les apports de la théorie économique classique et néoclassique (Sous-section 2.1)
et les théories managériales (Sous-section 2.2).

Sous-section 2.1 : L’entreprise dans la théorie économique classique et


néoclassique
Le traitement qu’a eu l’entreprise diffère selon les courants économiques de la firme. Par exemple, dans le
courant de l’économie classique et malgré que ce dernier s’est développé en même temps que naissent la
société industrielle et le capitalisme moderne, les penseurs et les philosophes ou les praticiens ont
cherchés avant tout à expliquer les phénomènes de croissance, de développement et de répartition
des richesses entre les différentes classes sociales. En d’autres termes l’entreprise en tant qu’agent
économique est apparue avec le courant économique néoclassique avec l’étude de la formation
des prix, de la production et de la distribution des revenus à travers le mécanisme de l'offre et de
demande sur un marché avec l'hypothèse de maximisation de l'utilité qui sous-tend ses calculs
économiques qui se rattachent au courant marginaliste né à la fin du XIXe siècle.

13
Dans cette optique on peut comptabiliser les moyens de production acquis par crédit-bail dans les états financiers en cas
d’acquisition d’un contrat de crédit-bail financement.
Sous-section 2.1.1 : L’entreprise dans la théorie économique classique

Au niveau de la théorie économique classique l’entreprise n’a pas eu de place prépondérante et centrale dans
leur analyse. Beaucoup plus préoccuper par l’offre et la de demande sur le marché, leur intérêt a été orienté
vers la production En fait, l’analyse de la production chez les classiques repose essentiellement sur les
4 piliers suivants : la division du travail ; la théorie de la valeur ; la loi des débouchés de J-B Say ; la
théorie quantitative de la monnaie.

En ce qui concerne la division du travail : chez les classiques, le processus de production est la
combinaison de facteurs de production (terre, travail, capital). Plus la spécialisation des tâches, ou
encore la division du travail est poussée, plus le produit obtenu (la combinaison des facteurs de
production) sera élevé (efficace). Dans son ouvrage, «Recherches sur la nature et les causes de la
richesse des nations», Adam Smith (1776) introduira la division du travail en s’appuyant sur le célèbre
exemple de la manufacture d’épingles : «Un ouvrier tire le fil à la bobine, un autre le dresse, un
troisième coupe la dressée, un quatrième empointe, un cinquième est employé à émoudre le bout qui
doit recevoir la tête. Cette tête est elle-même l’objet de deux ou trois opérations séparées : la frapper
est une besogne particulière ; blanchir les épingles en est une autre ; c’est même un métier distinct et
séparé que de piquer les papiers et d’y bouter les épingles ; enfin, l’important travail de faire une
épingle est divisé en dix huit opérations distinctes ou environ, lesquelles, dans certaines fabriques,
sont remplies par autant de mains différentes, quoique dans d’autres le même ouvrier en remplisse
deux ou trois». La division du travail aurait trois avantages. Premièrement, l’accroissement de
l’habileté de l’ouvrier augmente la quantité de produits qu’il peut réaliser. Deuxièmement, le gain de
temps qui se perd en passant d’un ouvrage à l’autre peut être réutilisé dans une autre activité.
Troisièmement, la division du travail serait à l’origine de l’invention de toutes les machines propres à
abréger et à faciliter le travail.

Par la suite, la division du travail sera à la base de la doctrine du Libre-échange prôné par les
classiques. En effet, Adam Smith (1776) souligne, dans le chapitre II des «Recherches sur la nature et
les causes de la richesse des nations», que c’est «la certitude de pouvoir troquer tout le produit de
son travail qui excède sa propre consommation, contre un pareil surplus du produit du travail des
autres qui peut lui être nécessaire, ce qui encourage chaque homme à s’adonner à une occupation
particulière, et à cultiver et perfectionner tout ce qu’il peut avoir de talent et d’intelligence pour cette
espèce de travail». Ainsi, puisque c’est la faculté d’échanger qui donne lieu à la division du travail,
l’accroissement de cette dernière sera limité par l’étendue de la faculté d’échanger, ou, en d’autres
termes, par l’étendue du marché.

La théorie de la valeur s’interroge sur la richesse qu’il faut produire. C’est également l’une des
questions les plus controversées du 19ème siècle. On distingue généralement deux écoles, l’école
anglaise basée sur la valeur d’échange, et l’école française basée sur la valeur utilité. Adam Smith et
David Ricardo se sont engagés sur la voie d’une théorie objective de la valeur, recherchant au delà de
la valeur d’usage des biens (subjective et variable d’une situation à une autre), les fondements d’une
valeur d’échange acceptable par tous. Selon Adam Smith (1776), «il s’agit d’examiner quelles sont les
règles que les hommes observent naturellement, en échangeant les marchandises l’une contre l’autre,
ou contre de l’argent. Ces règles déterminent ce qu’on peut appeler la valeur relative ou échangeable
des marchandises». Cette approche ne concerne que les biens reproductibles. Pour Smith, à l’état
primitif, il n’existe qu’un seul facteur de production, le travail. Le rapport de valeur de deux biens sera
alors directement en proportion de la quantité de travail nécessaire pour les obtenir : «la valeur d’une
denrée quelconque pour celui qui la possède et qui n’entend pas en user ou la consommer lui-même,
mais qui a intention de l’échanger pour autre chose, est égale à la quantité de travail que cette denrée
le met en état d’acheter ou de commander. Le travail est donc la mesure réelle de la valeur
échangeable de toute marchandise. Dans un état plus avancé, il faut tenir compte du profit du capital
et de la rente foncière incorporés dans chaque produit. Ce n’est plus une théorie de la valeur travail,
mais une expression du coût de production. Smith propose cependant de ne pas abandonner le travail
et d’estimer la valeur des biens en termes de travail commandé ou équivalent salarié.

Ricardo (1817) rappelle que les quantités proportionnelles de travail nécessaire pour obtenir chaque
objet paraissent être la seule règle d’échange possible. La valeur d’échange se ramène à une quantité
de travail incorporé (travail consacré aux outils et aux machines). De son côté, J-B Say, suivant une
tradition déjà bien établie en France par Turgot (1769) et Condillac (1776), revient sur la théorie
subjective de la valeur, l’utilité. Dans son Traité d’économie politique, Jean-Baptiste Say précise que «
si les hommes attachent de la valeur à une chose, c’est en raison de ses usages : ce qui est bon à
rien, ils n’y mettent aucun prix. Cette faculté qu’ont certaines choses de pouvoir satisfaire aux divers
besoins des hommes, qu’on me permette de la nommer utilité… La production n’est point création de
matière, mais une création d’utilité. Elle ne se mesure point suivant la longueur, le volume ou le poids
du produit, mais suivant l’utilité qu’on lui a donnée». Une formulation rigoureuse de l’utilité ne sera
donnée qu’à la fin du 19ème siècle avec l’introduction concomitante de la rareté. La théorie de la
valeur serait alors liée à l’utilité et la rareté d’un bien.

La loi des débouchés de J-B Say souligne que «c’est la production qui ouvre des débouchés aux
produits » (1803). Par la suite, cette loi a donné lieu à quelques polémiques. Certains l’ont assimilé au
précepte «toute offre crée sa demande» et reproché à l’approche classique son incapacité à saisir la
portée de la demande. Or, Jean-Baptiste Say était tout à fait conscient de l’importance de la
demande. En insistant sur les débouchés, il souhaitait simplement rappeler que les produits
s’échangeaient contre d’autres produits et que la monnaie ne remplissait «qu’un office passager dans
ce double échange». Dès lors, l’achat d’un produit ne pouvait être fait qu’avec la valeur d’un autre
produit. Dans ces conditions, «plus les producteurs sont nombreux et les productions variées, et plus
les débouchés sont faciles, variés et vastes».

La théorie quantitative de la monnaie (TQM) rappelle que la monnaie est un voile, elle sert
uniquement à faciliter les transactions économiques. La monnaie est une marchandise comme une
autre, sa seule fonction est de servir d’intermédiaire des échanges. Dans son Traité d’économie
politique, J-B Say note que «la marchandise intermédiaire, qui facilite tous les échanges (la monnaie),
se remplace aisément dans ce cas-là par d’autres moyens connus des négociants, et bientôt la
monnaie afflue, par la raison que la monnaie est une marchandise, et que toute espèce de
marchandise se rend aux lieux où l’on en a besoin».

L’équation de la TQM illustre ce phénomène. Elle se présente de la manière suivante : M .v = p. Y M


désigne la masse monétaire ; v, la vitesse de circulation de la monnaie ; p, le niveau général des prix
et Y, les transactions économiques. Considérer que la monnaie est un voile, revient à accepter le
raisonnement suivant : toute hausse de M doit correspondre à une hausse de Y (c’est parce que les
transactions économiques augmentent, que l’on a besoin de plus de monnaie). Si M augmente
indépendamment de Y, alors c’est p qui augmentera (une augmentation de monnaie qui ne
correspond pas à une augmentation des transactions économiques, génère une hausse des prix, c’est
à dire dans le langage courant, de l’inflation).

Sous-section 2.1.2 : L’entreprise dans la théorie économique néoclassique

La fonction d’une entreprise pour la théorie néoclassique est un objectif simple : maximiser son profit
en situation concurrentielle, avec à sa tête un entrepreneur individuel. A partir de ce postulat de base
et d’hypothèses réductrices (rationalité, pas de progrès technique …) la microéconomie construit son
analyse. Pour autant la réalité ne se limite pas à cela mais la théorie ne va pas beaucoup plus loin
jusqu’à ce que des hétérodoxes s’opposent à la vision néoclassique au début du 20e siècle. Ainsi, les
recherches sur les différents modes de fonctionnement de l’entreprise apparaissent dans la littérature
américaine de la fin du 19e siècle. Auparavant il ne s’agit que d’une vision externe de l’entreprise par
les classiques comme un acteur avec un pouvoir relativement peu important et pour seule fonction
portant intérêt, la fonction productive. Il s’agit en réalité plus d’une théorie de marché que d’une
théorie de la firme. La fonction d’entrepreneur apparait avec Jean-Baptiste Say, mais on ne parle que
de «firme point» ou de «firme automate». Le souci du réalisme amène à une reformulation des
diverses hypothèses précédemment utilisées (fin de l’information parfaite, de la concurrence pure et
parfaite (CPP), de l’objectif unique de maximisation …). Cette orthodoxie doit cependant attendre les
écrits de Ronald Coase (1937) de la fin des années 1930’ avec ses travaux sur la nature de la firme
(qui permet une alternative au marché pour la coordination et fait preuve d’un vrai pouvoir d’autorité et
de hiérarchisation), pour mettre au jour une analyse en termes de centre de décision, de création,
d’innovation concernant l’entreprise. A partir de la remise en cause de postulats de l’analyse
néoclassique l’entreprise apparait comme autre chose qu’un simple agent individuel sans
préoccupations pour les logiques internes. C’est pourquoi la firme est longtemps restée «une boîte
noire» en tant que thématique inexploitée ; amalgamant entreprise et entrepreneur. D’autant que les
juristes américains considèrent que personne ne possède réellement l’entreprise. Or on le sait, les
gros riches industriels américains jalonnent l’histoire économique (Rockefeller, Carnegie, Vanderbilt,
Morgan, Ford, …) et sont le nexus ou lien central de l’économie libérale qui se développe au tournant
du 19é et 20é siècle, faisant muter rapidement les structures industrielles productives de marché et les
mécanismes qui les sous-tendent14.

14
Essentiellement les marchés financiers et le secteur bancaire.
Sous-section 2.1 : L’entreprise dans les théories managériales

Nous reviendrons dans un second temps sur l’intérêt des écrits de Coase (1937), qui n’arrivent
réellement sur le devant de la scène qu’au début des années 1960. En fait, les années 30 on a vu la
révolution managériale. En effet, A partir des années 30 les changements de structures de marché et
les mouvements de concentration du tournant du siècle sont si forts qu’apparait une nouvelle
littérature, hétérodoxe. Parmi eux, Berle et Means vont publier en 1932 un ouvrage The Modern
Corporation and Private Property et vont changer la vision des parties prenantes de l’entreprise.

En réalité l’approche analytique de l’entreprise du début du siècle trouve son fondement dans
l’observation réelle du mode de fonctionnement des entreprises. On parle alors de révolution
managériale donnant lieu son nom à la fameuse théorie managériale ; rendu possible par le
développement des sociétés par actions de grande envergure, impliquant une dispersion, un
éclatement de la propriété auprès de nombreux petits actionnaires, et la séparation des fonctions de
management et de propriété. C’est la première approche moderne de la firme en marge de la théorie
standard ; et ils vont avoir une influence très importante. L’idée principale de séparation des pouvoirs
implique que désormais les modalités décisionnelles ne sont plus dans les mains des actionnaires
mais d’une nouvelle catégorie dirigeante : «les managers». Emergent alors de nouvelles notions
induites de la gouvernance d’entreprise qui réapparaissent en force depuis la fin des années 1980.

Berle et Means (1932) livrent la première théorie de l’entreprise qui se penche sur le comportement de
groupes d’intérêts divergents au sein de l’entreprise (actionnaires, managers, institutions de crédits,
travailleurs). La question est posée de savoir qui contrôle la firme et qui donne un cadre institutionnel
à l’entreprise, puisque son environnement impacte fortement sa structuration (marchés financiers,
type de marché, type de sociétés …). Il y a alors opposition entre les managers et les propriétaires de
l’entreprise. Les premiers ont un objectif pratique de croissance de l’entreprise et de rendements
reflétant un certain prestige industriel alors que les seconds ne sont que des actionnaires à visée
pécuniaire.

Les années 40 voient également apparaitre l’approche directoriale de Burnham (1940) qui, en utilisant
aussi les travaux de Berle et Means, donnera lieu au moment des efforts de synthétisation théorique
des années 70 à l’approche behavioriste. Dans la même lignée, Schumpeter dans son ouvrage de
1942 acte la disparition du concept d’entrepreneur - à l’image de l’industrie - innovant et engagé qu’il
décrivait dans ses travaux précédents. Scitovsky (1943) est le premier à faire reposer la maximisation
du profit sur une psychologie particulière de la part de l’entrepreneur. Il existe tout un courant d’étude
dans la décennie 40 qui cherche à intégrer l’entrepreneur notamment dans le cadre de la création par
AH Cole en 1948 de la Research Center in Entrepreneurial History.

Cependant ces années de réflexion et de travaux permettent d’élargir les définitions d’entreprise et
d’entrepreneur. Il faut attendre 40 ans plus tard pour qu’une première synthèse du fonctionnement
réel de l’entreprise apparaisse, des suites des révolutions des modalités de financement des années
60 qui donnent également naissance à de nouveaux outils d’analyse. L’entreprise est donc restée un
objet marginal d’études jusqu’aux années 60. Les thèses hétérodoxes jusque-là n’ont pas réellement
eu de champ d’application donc n’ont pas débouché sur un réel paradigme. Mais à l’occasion de ce
tournant idéologique, apparaissent une pléthore de nouvelles théories de portée plus générale
concurrençant la théorie standard.

C’est une véritable révolution scientifique dans l’analyse de l’entreprise. La marchandise n’est plus
centrale dans l’activité de l’entreprise, c’est le contrat qui devient le mode de coordination du
fonctionnement de l’échange marchand articulant marché et entreprise. Le travail est désormais vu
comme un objet d’étude à part entière dans l’entreprise : c’est un contrat entre employeur et employé
(Favereau 1996). On s’oriente alors vers le côté organisationnel de la théorie avec l’intérêt pour les
règles contractuelles et de «marchés internes». S’enclenche une réflexion sur les compétences de la
firme ; alors même que la théorie des organisations en fait déjà son objet depuis le début du 20e
siècle. Schématiquement trois courants, qui s’opposent et se complètent, sont à distinguer.

Tout d’abord la théorie des droits de propriété qui émerge durant la décennie 60 avec Alchian et
Demsetz (1972). Ils reprennent notamment l’idée du théorème de Coase4 laissé pourtant de côté au
début du siècle, en s’intéressant à l’entreprise comme une forme d’organisation la plus efficiente face
aux impositions techniques, du travail, des coûts divers. Elle permet la bonne spécialisation et la
bonne incitation. Se pose alors la question de l’autorité dans la firme à partir de la question de la
propriété et du besoin d’établir un marché de ces droits. En complément, l’analyse historique d’Alfred
Chandler (1962) s’aligne sur la vision de Coase (1937) d’une firme institution, d’une organisation
complexe coordonnant administrativement et hiérarchiquement l’ensemble des relations dans laquelle
elle est insérée. La firme apparait pour lui comme la solution institutionnelle pour des problèmes
ciblés. Elle a appris dans la pratique (depuis le milieu du 19e siècle) à coordonner de multiples flux et
a dû inventer des modes de gestion spécifiques. Pour autant l’histoire économique nous montre (avec
les travaux de Patrick Verley (1999) entre autres) que les firmes ont toujours tentées d’infléchir les lois
du marché et de constituer des réseaux dans une visée qui n’est pas toujours conforme au bien-être
collectif et au bon fonctionnement des structures et du marché.

Ensuite nous avons la théorie de l’agence qui vient compléter la théorie précédente. Elle s’inspire de
la représentation de l’entreprise de Berle et Means (1932) mais aussi d’Arrow (1952), d’Akerlof (1970)
et son «market for lemons» avec les questions d’asymétries d’informations qui lui sont chères donnant
lieu à la nouvelle orthodoxie selon Coriat et Weinstein8 (1995). Il faut attendre les travaux de Jensen
et Meckling (1976) pour définir la relation d’agence entre le principal et l’agent dans l’exécution d’une
tâche avec la délégation comme argument central. On prend alors conscience des problèmes de ces
contrats, de leurs coûts. C’est l’émergence de théories telles les contrats implicites, le salaire
d’efficience, le modèle insider-outsider etc. On soulève alors toutes les incomplétudes du modèle
néoclassique standard. Cette théorie renvoie aux comportements divergents de deux groupes
d’agents au sein de l’entreprise, de part des asymétries d’informations. Le principal et l’agent
détiennent des contrats, des informations, des intérêts divergents. Or cela peut faire subir des coûts à
l’organisation qui doit s’atteler à limiter ces écarts entre principal et agents. L’efficience des sociétés
par actions a donc pour base la primauté de l’actionnaire pour gérer entreprise. La position de ces
nouveaux modèles reste cependant très libérale, à l’opposé de Coase (1937). En effet, ils voient
l’entreprise comme un lieu sans relation d’autorité avec des contrats libres et pas d’opposition avec le
marché car la firme est un marché interne, privé. Le contrat de travail n’est alors considéré que
comme un simple contrat commercial sans spécificité. De la même façon, l’approche behavioriste nait
sous la plume de Cyert et March (1963) dans laquelle l’entreprise est perçue comme un lieu
d’apprentissage, un organe complexe, comme un nœud de coopération mais aussi de conflits avec
des intérêts divergents. Réapparait alors l’homo oeconomicus 15 classique pour les deux versants
théoriques qui viennent d’être exposés.

En revanche, la dernière tradition concerne l’économie des coûts de transaction ou nouvelle


économie institutionnelle avec Olivier Williamson (1960). La théorie de Coase (1937) est à nouveau
reprise puisque l’on souligne ici l’importance et le besoin de ressources préalables à l’échange. Cela
donne naissance à l’école directoriale, déjà théorisée par Burnham dans les années 40. L’entreprise
n’est alors qu’un mode de coordination pour permettre de supporter coûts et environnement. Cette
tradition donne lieu à des hypothèses de comportements des agents dans des environnements
complexes, des contrats incomplets et donc des comportements opportunistes possibles. C’est alors
que l’organisation permet de lutter contre ces asymétries donnant lieu à des coûts, notamment quand
des investissements mettent en dépendance les individus entre eux. On préfère alors la coordination
de l’entreprise à celle du marché ; c’est l’internalisation. La firme est un système de compétences (de
capacité collective). Cela est conforme aux nouvelles théories hétérodoxes évolutionnistes. Quoi qu’il
en soit, les firmes sont durablement supérieures à toute autre organisation par accumulation des
compétences et connaissances. Pour reprendre un économiste que nous n’avons pas cité ici,
l’entreprise est une technostructure, centrale et dynamisant l’économie (Galbraith, 1967). Ces trois
approches contractuelles et opposées sont la vision dominante aujourd’hui et reprennent finalement
les travaux pionniers de Coase (1937).

On perçoit dans chacune d’elles toute la nécessité d’avoir des cadres institutionnels et une évolution
de la dynamique dans la pensée de l’objet «firme» même si aucune théorie n’allie encore les deux.
On perçoit bien qu’il est compliqué d’avoir une voie de recherche dans ce sens. La théorisation de
l’entreprise reste une « boite grise » de part la diversité de formes de rationalité, de coordination, de
propriétés, de structures … Le domaine d’étude étant vaste, complexe et évolutif les nouvelles
théories lèvent certaines interrogations de la « boite noire », mais pour autant l’entreprise reste à part
dans l’analyse économique et conserve un statut de «boîte grise». L’effort de synthétisation des
années 70 conserve les conflits dans la définition de la firme. Ces concepts sont très divers et à
l’heure de la mondialisation, de la prééminence des firmes et du marché cela apparait pourtant
comme inévitable et problématique alors même que l’histoire de la pensée économique recèle d’écrits
se concentrant sur les spécificités de l’entreprise et que tous les grands économistes s’y sont
intéressés (Walras, Marx, Schumpeter…). Pourtant au cœur de l’économie industrielle, des théories
de marchés, des théories financières aujourd’hui se sont développées des branches de l’économie
qui lui sont propres : théorie de l’organisation, théorie de la firme, théorie financière de l’entreprise …
mais ce travail est finalement récent.

15
Rationnel et calculateur.
La boite noire a été ouverte à partir 70 permettant de rapprocher théorie et réalité du mode de
fonctionnement de l’entreprise. Aujourd’hui on comprend que la pluridisciplinarité est centrale et qu’il
faut l’utiliser pour entendre l’entreprise comme un réseau, un nœud de contrats et non plus
uniquement un ensemble complexe de techniques et de modes d’organisation. La reconstruction de la
firme peut alors paraitre à jamais utopique, mais elle reste dans un contexte de mondialisation
financière un enjeu stratégique pour l’aiguillage de l’économie.

Section 3 : Aspects théorique de la gouvernance de l’entreprise

La notion de gouvernance s’est constituée autour de plusieurs courants théoriques de


l’économie de l’entreprise qui sont, en premier lieu, les théories contractuelles des organisations
(théorie de l’agence, la théorie des droits de propriété…) et, ensuite, les théories basées sur les
compétences. La diversité de ces théories a générés des courants différents de la gouvernance
d’entreprise en donnant des acceptions différents à cette dernière. En effet, nous allons aborder, dans
cette section 3, les éléments suivants :
a. les théories qui sont à la base de la gouvernance d’entreprise ;
b. les différents courants de la gouvernance d’entreprise inspirés de ces théories

Sous-section 1 : les apports théoriques de la gouvernance d’entreprise


La gouvernance d’entreprise est un cadre d’analyse qui englobe essentiellement les théories
contractuelles des organisations (théorie de l’agence et théorie des droits de propriété…) qui
partagent les mêmes hypothèses de l’économie néoclassique (rationalité substantive des
agents, efficience statique..) et les théories basées sur les compétences (théorie évolutionniste,
théorie basée sur les ressources…) qui visent à dépasser ces hypothèses et proposer d’autres
fondement de l’efficience de l’organisation. Cette section a pour objet de
traiter : les différentes théories managériales des organisations et les courants théoriques et
empiriques qui la soutiennent.

Sous-section 1.1 : Théorie Classique des organisations ou la théorie scientifique du


travail

Autrement dit, en cherchant à abandonner la vision de l’entreprise «boîte noire», les théories
managériales des organisations ont cherché à s’immiscer à l’intérieur de l’entreprise pour la
décortiquer. Cette forme de décortication a commencé avec l’école scientifique du management
représentée par l’ensemble des théoriciens de l’organisation qui, inspirés de Taylor (1856-1915) et
Fayol (1841-1925), ont étudié l’organisation en se référant à plusieurs principes listés ci-dessous : Le
principe hiérarchique qui décrit l’entreprise comme une succession d’échelons, dont le niveau
supérieur détient l’autorité qui se décline dans des échelons subordonnés par délégation : «l’autorité
descend par une ligne continue et nette, une échelle bien définie de poste» (B. Lussato, 1977).
Le principe de l’unité de commandement, énoncé par Fayol, qui subordonne l’autorité fonctionnelle à
l’autorité hiérarchique, contrairement à Taylor qui soutient la seule autorité de compétence. Le
principe d’exception, très proche du principe de subsidiarité, selon lequel les tâches habituelles ou
routinières (programmées) doivent être confiées à au niveau le plus bas, seules remontant au
supérieur hiérarchique les tâches exceptionnelles.

L’optimisation de l’éventail de subordination, c'est-à-dire la recherche du nombre optimum de


subordonnés qui limite le pouvoir hiérarchique et l’importance de la délégation. Un éventail étroit
conduit à des structures bien coordonnées et étroitement contrôlées, réputées efficaces mais propices
à l’initiative, alors que des structures dites plates demandent des hiérarchiques de qualité et stimulent
la créativité. Le principe de la spécialisation organisationnelle appliqué par Taylor à l’organisation des
postes de travail et sujet de nombreuses discussions par la suite. L’application d’une méthode
scientifique qui s’inspire de la méthode expérimentale de Claude Bernard.

Max Weber (1864-1920) est un des pères de la Sociologie et un auteur majeur de la théorie des
organisations. IL trace le chemin menant à la rationalisation des organisations, caractérisées par une
logique obéissant au calcul, à la prévision, à l'évaluation et à la volonté d'efficacité. Il montre ainsi que
le type le plus pur de domination légale est la domination par le moyen de la direction administrative
bureaucratique garante d'une utilisation efficace des ressources organisationnelles. En effet, M.
Weber affirmait que l'existence de règles et de marches à suivre bien définies et respectées à la lettre
profiterait tant aux membres d'une organisation qu'à ses clients. Ainsi, il a contribué à l'élaboration des
règles visant à éliminer les sources d'inefficacité organisationnelle. A cet effet, il propose l'application
des principes suivants :
1- Division du travail : le poste, les tâches et les responsabilités de chacun doivent être
clairement définis.
2- Structure hiérarchique : la relation entre un patron et ses subordonnés doit être définie d'une
manière explicite et les limites de l'autorité de chacun, établies avec précision.
3- Sélection du personnel : le choix d'un nouvel employé doit être fondé sur sa formation et ses
connaissances techniques, que l'on aura vérifiées à l'aide de tests.
4- Règles et règlements normalisés : des règles et des règlements précis doivent être appliqués
pour garantir l'uniformité du travail et la normalisation des actes accomplis.
5- Caractère impersonnel des relations : les relations entre les différents membres de
l'organisation doivent être impersonnelles. L'application de règles et de règlements est de
nature à éviter tout conflit de personnalités.
6- Avancement : les employés doivent recevoir un salaire à taux fixe et obtenir de l'avancement
d'après leur compétence et leur ancienneté.

Sous-section 1.2 : L’école des relations humaines

Malgré les apports théoriques et empiriques de l’école scientifique de travail, il n’en demeure pas
moins qu’elle à fait l’objet de plusieurs critiques dont la plus importante est celle qui s’appuie sur le
seul élément physiologique du travail qui se rapporte à la fatigue. L’école des relations humaines
regroupe les travaux de Mayo, Lewin, Liker, Mc Gregor et Maslow. Elle s’est constituée pour réagir
contre les principes classiques et bureaucratiques. Elle a centré son analyse sur les relations entre les
individus et leur motivation en dehors de la perspective de récompenses pécuniaires.

Les principes de cette école peuvent être résumés ainsi : l’organisation doit tenir compte, non
seulement de l’enchainement logique des opérations, mais aussi du désir des employés vivant
comme des êtres humains dans l’entreprise. Les deux types d’organisation formelle et informelle
cohabitent dans l’entreprise. L’organisation est considérée comme une forme de société qui a une
identité propre, distincte du projet pour lequel elle a été identifiée.

MAYO est considéré comme l’inventeur du mot «relations humaines». On lui doit les principes
suivants : (1) les employés sont gérés par la logique de sentiment : étudier la relation entre
productivité et moral de l’individu ; (2) La direction est motivée par une logique de coût et d’efficacité.
(3) A défaut de compromis entre ces deux logiques, le conflit est inévitable. Autrement MAYO est le
premier à avoir identifié les fondements non économiques de la satisfaction au travail (le désir d’être
bien avec les collègues de travail) et qui constituent des facteurs motivationnels pour l’augmentation
de la productivité des travailleurs.

A cet apport on peut ajouter celui de LEWIN. Ce dernier a étudié les phénomènes de groupes
humains restreints, de leadership, du climat social et des valeurs et standards de groupe. D’après
plusieurs expériences menées par cet auteur allemand, il a pu distinguer trois types de leadership : Le
leader autoritaire qui se tient à distance du groupe et donne des ordres pour diriger les activités du
groupe. Le leader démocratique qui fait des suggestions, encourage les individus du groupe et
participe pleinement à sa vie. Le leader «laisser-faire» qui apporte son expertise, mais ne manifeste
que très peu d’implication et participe faiblement aux activités.

L’apport de LIKERT en tant que psychologue américain a mis en évidence un principe majeur de
l’organisation appelé principe de relations intégrées. Ce principe signifie que chaque membre doit se
sentir important et nécessaire au sein de l’entreprise, car personne ne peut travailler efficacement s’il
n’a pas conscience d’être utile. On lui doit sa célèbre grille qui permet de situer le management de
l’organisation dans l’un des quatre grands types suivants : Les besoins individuels sont au centre de
l’organisation. Le but est d’améliorer les qualités de vie au travail.

Enfin, l’apport de Maslow considéré comme le père de l'approche humaniste, surtout connu pour son
explication de la motivation par la hiérarchie des besoins, qui est souvent représentée par une
pyramide des besoins. Il a souligné qu'il était préférable, en thérapeutique, de promouvoir les qualités
et les réussites individuelles, plutôt que de considérer les patients comme des « sacs de symptômes
». La hiérarchie des besoins. L’individu agît en fonction de besoins innés, les besoins sont
hiérarchisés. Quand certains besoins sont satisfaits, des besoins de niveau supérieur apparaissent.
Un besoin non satisfait a des conséquences négatives sur le salarié. La pyramide de Maslow, nous
donne l’ordre, des besoins physiologiques, de sécurité, sociaux ou d’appartenance, d’estime, de
développement personnel. Cette théorie est très influente et met en évidence l’impact du contenu du
travail pour le salarié et montre qu’il n’y a pas que la motivation financière. Des vérifications
expérimentales ont montré l’existence de besoins mais l’échelle de ces besoins a été mise en doute
ainsi que leur hiérarchie.

Sous-section 1.3 : L’école néo-classique ou empirique

Cette école s’efforce de réaliser une synthèse des écoles précédentes : de l’école classique, elle
retient la valeur d’une approche scientifique de l’école des relations humaines, la place donnée à
l’homme. Sloan est considéré comme un dirigeant professionnel, vu son expérience en tant que
directeur général de General Motors (1923-1946). Les grands traits de sa pensée peuvent être
résumés ainsi : La décentralisation est un moyen efficace pour développer l’initiative, la responsabilité
et la flexibilité. Il insistait fortement sur une nouvelle conception de la coordination, l’idée est la
suivante : il ne s’agit pas d’appliquer des ordres mais plutôt de «vendre» des idées au système de
management : chaque division doit prouver qu’elle est rentable ; créer des comités composés de
différents représentants pour donner des avis aux Président sur toutes les questions importantes ;
mettre en place un comité exécutif pour discuter de toutes les grandes idées.

Selon Drucker, l’objectif de maximisation du profit est un concept minimal dénué de sens. L’objectif
premier de l’entreprise est de créer une clientèle (développer deux fonctions de base : markéting et
innovation). Donc le profit un résultat du management, de l’innovation et de la productivité. Les
objectifs représentent la stratégie fondamentale de l’entreprise, en conséquence ils doivent être
opérationnels et motivants. Concentrer les ressources et les efforts ; établis dans les fonctions-clés
(RH, production, finances et organisation) permettre la répartition du travail, et être déterminants de la
structure de l’entreprise.

Drucker a défini le manager à partir des tâches qu’il doit accomplir : fixer les objectifs, analyser et
organiser le travail en une structure adéquate, motiver et communiquer, mesurer par des normes,
former les gens. IL estime qu’il est nécessaire d’avoir une nouvelle conception organisationnelle
tenant compte du passé et de l’expérience, qu’il résume ainsi : une mauvaise structure entraîne de
mauvais résultats, la construction de la structure vient après la définition des activités, la structure fait
suite à la stratégie, il n’existe pas d’organisation parfaite.

Gelinier ingénieur et économiste français, a réalisé une synthèse empirique de l’organisation


scientifique du travail et de l’école des relations humaines. Il conserve l’idée fondamentale de l’école
classique que la science de l’organisation doit aboutir à formuler des principes clairs, simples
pratiques et valables pour tout système organisationnel avec la prise en compte de la dimension
humaine de l’école des relations humaines qui consiste à introduire des facteurs motivationnels
nécessaires pour l’amélioration de la productivité. Selon lui, les principes du management moderne
sont : L’efficacité est largement déterminée par la structure et non plus par les techniques de
production. Faire confiance à la concurrence. Admettre que la confiance en l’homme est à la base de
sa participation à la production et qu’elle permet de déléguer et de motiver. Apprécier les situations
sur la base des faits et des résultats. Le management moderne est avant tout assis sur l’objectivité.
Rejeter l’approche microéconomique classique statique. Mettre en place des organisations flexibles
pour pouvoir gérer le changement.

Sous-section 1.3 : l’école socio – technique

Représentée par les auteurs britanniques des années 60, cette approche a montré que tout système
organisationnel peut être analysé sous la double perspective sociale et technique, et c’est l’ajustement
entre les systèmes obéissant à cette double logique qui détermine l’efficacité de l’organisation.
Woodward, professeur de science et technologie à l’université de Londres, a analysé les rapports
entre l’organisation et la technologie en faisant le constat suivant : hiérarchies plus longues, avec un
management par comité, proportion faible de personnel de production et importante de personnel
administratif se constatent dans les entreprises à technologies de production continue. Les lignes de
commande les plus courtes, avec moins de managers et d’employés, plus de personnel de production
et des relations inter divisions complexes, se trouvent dans les entreprises à technologies de
production en grandes séries. Hiérarchie plus courte, au sens où aucun manager n’est loin d’un
opérateur et le contrôle administratif est le plus faible, se trouve dans les entreprises à technologies
de production unitaire ou de petites séries. En résumé, le grand intérêt de Woodward (1111) a été de
montrer qu’il n y avait pas de structure qui soit la meilleure pour toutes les organisations, puisque
cette structure dépend de la technologie employée.

Eliot Jaques psychologue et médecin canadien, est considéré comme l’initiateur de l’application de la
psychanalyse aux organisations. Selon lui, l’entreprise est le lieu d’interactions constantes entre la
structure sociale qui définit les rôles et les relations de rôle au sein de l’organisation. la culture comme
mode de pensée de l’organisation (méthodes, coutumes et modes de communication) la personnalité
des membres de l’organisation les groupes qu’elle suscite de fait de sa structure.

Sous-section 1.4 : Les approches socio – économiques

L’approche socio–économique considère l’entreprise comme un ensemble complexe dans lequel se


rencontrent différents types de situations organisationnelles, matérielles, technologiques et culturelles.
Dans son fonctionnement, l’entreprise connaît un certain nombre de dysfonctionnements et de
perturbations qui se manifestent sous forme d’écarts avec ce qui était souhaité. Ces écarts sont
regroupés en familles qui constituent autant de variables explicatives et de domaines de solutions.
Cette approche est très intéressante à divers titres, en particulier parce qu’elle permet de chiffrer
économiquement l’impact des ressources humaines selon qu’elles sont bien ou mal gérées. L’école
systémique Les premiers travaux de cette école ont été présentés par Chester et Barnard en 1938.
Le concept du système a connu plusieurs définitions dont les principales sont les suivantes : C’est un
ensemble de parties interdépendantes, agencées en fonction d’un but, et on appelle structure des
relations non fortuites liant les parties entre elles et au tout.

C’est un ensemble d’organes, de procédures, d’idées, organisé en vue de la réalisation d’un objectif
commun et distinct de son environnement. L’approche systémique ne voit pas l’entreprise comme un
ensemble de services ou de fonctions mais comme un ensemble de sous-systèmes organisés pour
assurer l’exercice des activités de l’organisation : l’entreprise est un système ouvert, finalisé, régulé et
composé d’un ensemble de sous-systèmes en interaction. Un système ouvert : l’entreprise est en
relation avec son environnement. Un système finalisé : l’entreprise a des buts précis, des objectifs
propres distincts de ses membres. Un système régulé : l’entreprise s’adapte en permanence pour
atteindre des objectifs précis, par autorégulation ou en raison de l’existence d’organes de commande.
Un ensemble de sous systèmes en interaction parmi lesquels on peut citer le système d’information,
le système de décision et le système opérationnel (Mintzberg).

Sous-section 1.5 : Les approches les plus récentes

La théorie des coûts de transaction est apparue en 1975 et se propose de traiter des relations existant
entre le marché et l’organisation, et de leurs influences sur des questions relatives à l’intégration
verticale, le processus d’internationalisation ou la structure financière des entreprises. Les principaux
auteurs sont R. Coase et O. Williamson. Cette théorie stipule que les marchés fixent les prix et les
agents économiques se réfèrent à eux pour leurs transactions commerciales : la réalité est plus
compliquée et coûteuse, puisqu’il faut trouver les clients, négocier, assurer une certaine qualité de la
prestation, livrer la marchandise…Ces opérations impliquent des coûts, consomment du temps et sont
empreintes d’incertitude. Selon ces auteurs la raison d’être de l’entreprise est la réalisation des
économies sur ces coûts appelés coûts de transaction. L’origine et la formation des coûts de
transaction peuvent être résumées ainsi :
1- Le recentrage exprime le regroupement physique d’activités dispersées par l’abandon ou le
transfert d’entités jugées risquées ou peu rentables : il s’agit d’une mesure adéquate contre
une stratégie de diversification excessive.
2- Le recentrage des entreprises apparaît comme une évolution stratégique majeure des années
1980. Ces entreprises ont du redéfinir leur métier de base, leur portefeuille d’activités devant
la turbulence et les risques qui pouvaient être rencontrés dans les domaines où aucune
chance sérieuse n’existait de développer un avantage concurrentiel ou une position de leader.
Le concept de stratégie du point de vue étymologique, le mot stratégie vient du grec strategos
qui signifiait chef d’armée. Plus généralement, stratos signifie armée et agein signifie
conduire. Donc l’origine est militaire. Au total, la stratégie signifie l’ensemble des actions
coordonnées, de manœuvres, de tactiques en vue d’une victoire. La stratégie concerne donc
la mobilisation et la programmation d’une armée avant le combat. Cette définition comporte
généralement deux éléments :
• un élément de dissuasion qui consiste à déterminer la meilleure façon de vaincre ou de
provoquer le retrait de l’adversaire sans combattre ;
• un élément de tactique qui signifie les manœuvres à exécuter lors du combat.

Cependant, dans le domaine des sciences sociales le rapprochement avec le domaine militaire
n’est pas juste. En réalité, le champ de la concurrence ne peut pas être comparé à un champ de
bataille où les entreprises se livreraient à un combat pour gagner des parts de marché. En
effet, chaque entreprise en concurrence développera un argumentaire qui sera un produit, un
prix et une image pour provoquer des achats par des clients moyennant une contrainte de
rentabilité minimum. De plus, la concurrence est limitée ; les entreprises recherchent
généralement l’entente, la coopération avec fournisseurs, clients, sous traitants, d’autres
entreprises concurrentes. Elles cherchent aussi l’évitement notamment par la segmentation,
les barrières à l’entrée, la différenciation, l’image,… D’autre part, les entreprises mènent la guerre
psychologique par des menaces pour éviter une confrontation directe avec les concurrents. La liberté
de l’entreprise est tout à fait relative, l’entreprise est aussi encadrée par un certain nombre de lois, de
règles établies par la société, de plus le stratège est loin d’être un héros.

En guise de conclusion sur la section 3, toutes les théories et les démarches empiriques que nous
venons d’énumérer et de commenter plus haut ont eu une influence prépondérante sur les travaux
menés par Jensen et Meckling (1976) et le développement de la théorie de l’agence et l’ensemble des
démarches théoriques et empiriques qui la soutiennent et que nous allons développer dans la section
4 de notre premier chapitre.

Section 4 : la théorie de l’agence


La théorie de l’agence vise à étudier les problèmes des coûts d’agence entre les différents acteurs de
l’entreprise et plus essentiellement entre les actionnaires propriétaires de l’entreprise et
leurs agents (managers) et, plus généralement, entre l’entreprise et ses parties prenantes. Cette
théorie repose sur une représentation contractuelle de l’entreprise qui propose que les parties
prenantes sont en relation conflictuelle en raison des contrats qui les lient (incomplétude des
contrats) et que certaines parties aux contrats disposent d’un accès privilégier à l’information mieux
que d’autres (asymétrie d’information).

Sous-section 1 : La relation d’agence et les coûts d’agence

La délégation des droits décisionnels aux agents non propriétaires qui gèrent l’entreprise dans
un sens non conforme aux intérêts des propriétaires conduit à une relation d’agence principal-
agent. Cette relation d’agence peut être étendue à tous les efforts de coopération (il n’ya pas
essentiellement de relation principal-agent) et à l’ensemble des relations entre l’entreprise et ses
parties prenantes (partenaires sociaux).

Sous-section 1.1 : Éléments fondamentaux :

L’allocation des droits décisionnels crée des relations d’agence et des problèmes d’agence
source de conflits d’intérêt et des coûts d’agence. La relation d’agence est «un contrat par
lequel une ou plusieurs personnes (le(s) principale(s)) engage une autre personne (l’agent)
pour effectuer un service en leur nom qui consiste à déléguer certains pouvoirs de prise de
décision pour l’agent». Ce problème existe dans toutes les organisations et à tous les
efforts de coopération (pas nécessairement l’existence d’une relation principal-agent) à tous les
niveaux de gestion dans l’entreprise, dans l’université, dans les sociétés mutuelles, les
coopératives, les autorités et les agences gouvernementales, dans les syndicats…etc. Selon Jensen
et Meckling (1992), les coûts d’agence représentent les coûts résultant des conflits d’intérêts dans
les situations de coopération et sont égaux à la somme des coûts de conception, de mise en
œuvre et de maintenance des systèmes d’incitation et de contrôle et de la perte résiduelle, c'est -à-
dire du manque à gagner lié à la résolution imparfaite de ces conflits.

Sous-section 1.2 : La relation dyadique de l’agence

Selon Charreaux (1998), la relation d’agence n’est plus nécessairement une relation d’autorité
(principal-agent). Aucune des deux parties n’est subordonné à l’autre (il n’ya plus
de principal et d’agent) dans des cas chaque acteur peut être considéré successivement et
réciproquement comme le principal et l’agent de la relation d’agence. Par exemple, on peut
considérer une relation symétrique à la relation principal-agent traditionnelle, une relation
selon laquelle le dirigeant (principal) loue son capital humain aux actionnaires (agents).

Le problème posé ne l’est pas plus uniquement en termes de maximisation de l’utilité pour le
principal sous une contrainte du seuil minimal d’utilité pour l’agent. il s’agit de trouver des
mécanismes qui permettent de maximiser la rente de la coopération entre ces deux parties pour
assurer la pérennité de la relation contractuelle.

Sous-section 1.3 : L’élargissement de l’analyse relationnelle à l’ensemble des parties


prenantes

Certainement en dépassant la relation entre principal et son agent il y a lieu de prendre en


considération l’ensemble des relations avec toutes les parties prenantes de l’entreprise. Cela peut
expliquer, par exemple, que le conseil d’administration des entreprises inclut simultanément les
représentants des dirigeants, banquiers, voire certains clients et fournisseurs.

Sous-section 1.3.1 : La firme comme «nœud de contrats»

Selon Jensen et Meckling (1976) : «les organisations (y compris les entreprises) sont des
fictions juridiques qui servent comme nœud pour un ensemble de relations contractuelles
entre les individus. Cela comprend les entreprises, les institutions à but non lucratif … ». Cette
représentation de l’entreprise implique les conséquences suivantes :
1- les questionnements sur l’objectif de la firme, sa responsabilité sociale…sont trompeuses
car l’entreprise est une fiction juridique (et non pas un individu) qui sert un point central de
nœuds de contrats dont les objectifs sont contradictoires. selon Fama (1980), «propriété du
capital ne doit pas être confondue avec la propriété de l'entreprise. Chaque
facteur dans une entreprise est détenu par quelqu'un. L’entreprise est tout simplement
l'ensemble des contrats portant sur la façon dont les entrées sont reliées à créer sorties et
les recettes et de la façon dont les sorties sont partagées entre les entrées » ;
2- il est peu ou n’a pas de sens d’essayer de distinguer les choses qui sont da ns l’entreprise
des choses qui sont dehors.
Sous-section 1.3.1 : La théorie positive de l’agence et l’explication des formes organisationnelles

La théorie positive de l’agence est une branche de la théorie de l’agence qui vise à expliquer
l’efficacité des différentes formes organisationnelles. Pour parvenir à cela, elle s’appuie sur
plusieurs composantes qui sont cohérents et interdépendant entre eux. Ces composantes, réunies,
vont conduire à des formes organisationnelles efficientes en s’appuyant sur la notion de la rationalité
des individus.

Sous-section 1.3.2 : Les composantes de la théorie positive de l’agence

Sous-section 1.3.2.1 : La modélisation du comportement humain dans la La théorie positive de


l’agence

Jensen et Meckling (1994) proposent un modèle de comportement humain qui est le modèle
REMM (Resourceful, Evaluative, Maximizing Model), ce modèle repose sur les postulats suivants :

1- les individus sont des « évaluateurs » : ils se soucient de toute chose qui est source
d’utilité et il est toujours prrt à faire des arbitrages et des substitutions entre les différentes
sources d’utilité ;
2- les besoins d’individus sont illimitées ;
3- les individus sont des maximisateurs : les éléments qui maximisent leurs utilité sont de
nature pécuniaire ou non, et ils sont contraint par le cout d’acquisition de l’information et
de la connaissance ;
4- les individus sont créatifs : ils sont capables de prévoir les changements dans leur
environnement, évaluer leurs conséquences et créer de nouvelles opportunités on en
répondant.

Sous-section 1.3.2.2 : Les coûts de transferts de la connaissance entre acteurs

La connaissance est au centre de la théorie positive de l’agence pour la construction de la


performance organisationnelle à travers la capacité des membres de l’organisation à utiliser la
connaissance pertinente pour la décision. Il faut donc tourner les moyens pour mettre la
connaissance pertinente à la disposition des décideurs. Deux solutions sont envisageables : soit
de façon centralisée par le transfert de la connaissance à ceux qui détiennent les droits
décisionnels, soit décentralisée, en transférant les droits décisionnels à ceux qui possèdent la
connaissance. La véritable question porte sur la nature des droits décisionnels à centraliser
ou à décentraliser.

Sous-section 1.3.2.3 : La relation d’agence et les coûts d’agence

Cette relation résulte à la centralisation des droits décisionnels aux agents non propriétaires qui
disposent de compétences spécifiques nécessaires. Cette centralisation les conduit à agir de façon à
maximiser leur fonction utilité. Selon Jensen et Meckling (1976), le dirigeant a tendance à s'approprier
une partie des ressources de la firme sous forme de privilèges pour sa propre consommation
(dépenses discrétionnaires). Les développements ultérieurs ont mis en évidence la volonté des
dirigeants de renforcer leur position à la tête de l'entreprise. Ils peuvent ainsi préférer la croissance du
chiffre d'affaires à celle du profit, employer plus de personnel que nécessaire (…). Leur but est de
servir l'intérêt social de l'entreprise avant de satisfaire les intérêts des actionnaires (distribution de
dividendes ou revalorisation des titres) ou des salariés.

En substance, l'aspiration du dirigeant consiste à maximiser sa rémunération et à minimiser son effort.


Un tel agissement conduit les propriétaires à faire des dépenses qui visent dans toute situation à
susciter l’agent à faire un effort coopératif, même s'il n'y a pas de relations claires principal/agent.
Comme précédemment établi, il est impossible pour "le principal" d'assurer à coût nul que l'agent
prendra des décisions optimales du point de vue du principal. Dans la majorité des relations d'agence,
le principal et l'agent subiront des coûts de surveillance et d'obligation. Jensen et Meckling (1976)
distinguent trois types de coûts :

• Les coûts de surveillance supportés par le principal pour limiter le comportement opportuniste
de l'agent et les coûts d'incitation (systèmes d'intéressement) engagés par le principal pour
orienter le comportement de l'agent.

• Les coûts d'obligation ou coûts d'engagement que l'agent peut avoir lui-même encouru pour
mettre le principal en confiance (coût de motivation). «Les coûts d'engagement résultent de la
rédaction par la firme de rapports financiers et de la réalisation d'audits par des experts
extérieurs à la firme» Gabrié et Jacquier (2001).

• Le troisième type de coût est un coût d'opportunité, dénommé "perte résiduelle", qui s'assimile
à la perte d'utilité subie par le principal par suite d'une divergence d'intérêt avec l'agent,
comme le coût subi par le principal suite à une gestion par l'agent défavorable aux intérêts de
celui-ci. Ainsi, malgré le contrôle et l'engagement, il subsistera toujours une certaine
divergence entre les décisions prises par l'agent et celles qui maximiseraient le bien-être du
principal.

Cette définition des coûts d'agence s'apparente au problème de la tricherie et de la surveillance d'une
équipe de production. Les coûts d'agence varient selon la firme, ils dépendent des goûts des
managers, des coûts de surveillance de la performance du manager et enfin du coût de la conception
et de l'application d'un index pour indemniser le manager qui satisfait le bien-être du propriétaire. Afin
de lutter contre ces déviations, la gouvernance d'entreprise met en jeu des leviers d'alignement du
comportement des dirigeants. Dès lors que la théorie de l'agence considère la firme comme une
fiction légale servant de nœuds pour un ensemble de relations contractuelles interindividuelles, on
peut l'appréhender comme un système d'incitation où la direction joue un rôle charnière.

Sous-section 1.3.2.4 : L’aliénabilité et les règles du jeu organisationnel

Les droits décisionnels font référence à l’utilisation des actifs, des ressources. Il s’agit, en fait, de
droits de propriété, que Jensen et Meckling (1992) démembrent en deux composantes : le droit
décisionnel proprement dit (le droit d’utiliser les actifs de la firme) et celui d’aliéner ce droit décisionnel
et de s’approprier le produit de la cession («aliénabilité» du droit). L’aliénabilité est à la base de
l’existence du système de marché qui s’interprète comme un système de droits aliénables. Sur un
marché, la colocalisation de la connaissance et de la décision se fait par la voie d’une transaction
dirigée par les prix, par l’aliénation du droit décisionnel associé à un échange volontaire. En l’absence
d’effets externes à l’échange, la colocalisation par le marché est efficiente ; nul n’a besoin d’introduire
un mécanisme de contrôle. La seule aliénabilité résout le problème du contrôle via le prix lequel
représente simultanément une mesure de performance et un système incitatif. Inversement, l’absence
d’aliénabilité fait resurgir le problème du contrôle.

L’aliénabilité est à la base de l’existence du système de marché qui s’interprète comme un système
de droits aliénables. Sur un marché, la Co-localisation de la connaissance et de ma décision se fait
par la voie d’une transaction dirigée par les prix, par l’aliénation du droit décisionnel associée à un
échange volontaire. L’aliénabilité résout le problème de contrôle via le prix, lequel représente une
mesure de performance et un système incitatif, et l’absence de l’aliénabilité fait resurgir le problème
de contrôle.

Pour les transactions intra-firme, le transfert des droits décisionnels ne s’accompagne pas de celui
de l’aliénabilité, ce qui entraine deux conséquences :
a- la colocalisation ne se fait pas plus de façon spontané et décentralisé ;
b- il n’existe pas des systèmes automatiques de mesure de performance et d’incitation
conduisant l’agent à utiliser leurs droits décisionnels dans l’intérrt de l’organisation.

Dans cette situation, il faut recourir à l’autorité hiérarchique ainsi qu’à différents mécanismes
organisationnels pour résoudre le problème. L’organisation ne s’explique alors que si les
handicaps liés à l’absence d’aliénabilité est compensé par un certain nombre d’avantages comme
: la réduction des coûts de transactions par les agents indépendants… Partant de modèle de
rationalité individuelle permettant de rendre compte du comportement des individus, les règles
organisationnelles représentent une solution alternative au mécanisme de l’aliénabilité associé au
marché pour assurer le comportement et parvenir à allouer la connaissance de façon optimale, en
tenant compte des coûts de transfert de la connaissance et des coûts d’agence.

1.3.2. L’efficience et la répartition des formes organisationnelles

Il s’agit de proposer une théorie de l’architecture organisationnelle qui se base sur l’allocation des
droits décisionnels à l’intérieur de l’entreprise en faisant un arbitrage entre les couts d’agence liés
à la décentralisation des droits décisionnels et la diffusion des connaissances spécifiques, et les
coûts au manque d’utilisation des connaissances spécifiques (décentralisation insuffisante).

1.3.2.1. L’architecture organisationnelle

Selon Fama et Jensen (1983), les contrats dans n’importe quel type d’organisation précise :
a- les créances résiduelles dont les créanciers résiduels (porteurs du risque) sont ceux qui
supportent le risque du résultat final de l’entreprise, car la plupart des formes
d’organisation limitent les risques assumés en spécifiant leurs contrepartie ;
b- le processus de décision dont on peut à travers ce processus expliquer la survie des
organisations. Ce processus comporte les étapes suivantes :
1- initiation : génération des propositions pour l’utilisation des ressources et la structuration
des contrats ;
2- ratification : choix des initiatives à mettre en œuvre ;
3- la mise en œuvre : le choix des initiatives à mettre en œuvre ;
4- contrôle : mesurer la performance de décisions des agents et mise en œuvre des
récompenses.

3.2. La répartition des formes organisationnelles

Selon la théorie positive de l’agence, les formes organisationnelles qui survivent sur le long terme
constituent les meilleures formes organisationnelles. Fama et Jensen (1983) ont proposé une
explication de la répartition des formes organisationnelles en s’appuyant sur le concept de la
« complexité organisationnelles » qui nécessite des connaissances et compétences
spécifiques et , par conséquent, la décentralisation des droits décisionnels, ce qui induit des couts
d’agence dus à cette décentralisation. En insistant sur les élément de : gestion de la décision
(initiation de la décision et sa mise en œuvre), le contrôle de la décision (ratification et contrôle de la
décision) et en associant à ces élément la notion de la complexité organisationnelle, Fama et Jensen
(1983) ont aboutit aux résultats suivants :
1- la combinaison des fonctions de gestion et de contrôle de la décision par un nombre limité
d’agents entraine des titres de créances résiduelles qui sont, en grande partie,
limités à ces agents : en effet, dans certaines activités, l’organisation optimale de
l’organisation est non complexe et les informations spécifiques relatives aux décisions
sont concentrées dans les mains de quelques agents, et il est efficace d’allouer également
le contrôle des décisions aux mêmes agents. pour protéger les créanciers résiduels contre
l’opportunisme des agents, la solution est de restreindre les créances résiduelles à ces
agents. une telle combinaison est efficace dans les organisations non complexes parce que
les avantages perdus du partage du risque (parce que le capital de l’entreprise est fermé à
un nombre limité d’agents qui ne partagent pas le risque avec d’autres détenteurs) et de la
spécialisation de la fonction de décision sont inférieures aux couts de contrôle des
problèmes d’agence.
2- la séparation des fonctions d’assomption du risque et de gestion de la décision conduit à
des systèmes décisionnels caractérisés par une séparation des fonctions de gestion et de
contrôle de ma décision : en effet, dans les organisations complexes, les connaissances
spécifiques sont diffuses entre un grand nombre d’agents (décentralisation), ce qui
implique des relations d’agence entre les propriétaires et les dirigeants. pour limiter les
coûts d’agence résultant, il faut séparer les fonctions de gestion et de contrôle de la
décision. en plus, les titres de créances résiduelles sont le plus souvent diffus entre un
grand nombre d’agents qui vont déléguer d’autres agents (les administrateurs indépendant
par exemple) pour exercer le contrôle sur les dirigeants.
2. la théorie des droits de propriété

La théorie des droits de propriété est une théorie qui s’interroge sur l’effet des droits de propriété
sur la performance de l’entreprise en montrant comment la structure de ces droits influent le
comportement des dirigeants.

2.1. Les hypothèses de la théorie

La théorie des droits de propriété repose sur les postulats suivants :


a. les agents économiques maximisent leurs fonction d’utilité et sont motivés par la
recherche de leurs intérêt individuel quel que soit leurs système économique ou leurs
droits de propriété ;
b. les préférences d’un individu sont révélés par un comportement sur le marché ;
c. l’information n’est jamais parfaite et les couts de transactions ne sont pas nuls ;
d. les agents sont soumis à des contraintes imposées par la structure de système dans lequel
ls opèrent. les agents ne sont pas passifs et cherchent à maximiser leurs utilité qui,
réunies, expliquent le comportement de la firme ;
e. la fonction d’utilité d’un individu peut comporter d’autres arguments que la maximisation
de profit ou de la richesse.

Ces hypothèses insistent sur le rôle primordial de l’incitation des agents qui explique ensuite la
performance de la firme.

2.2. La fonction et la définition des droits de propriété

Le but de la théorie des droits de propriété est de montrer comment les différents systèmes de
droits de propriété influent sur le comportement des agents individuels (incitation des agents)
et, par conséquent, sur le fonctionnement et l’efficience de l’entreprise et du système
économique.

Le point de départ de la théorie des droits de propriété consiste à considérer que toute échange entre
agents, et en fait toute relation de quelque nature quelle soit, peut être comme un
échange de droits de propriété. La notion de droits de propriété retenue par les théoriciens
classiques va au delà d’une conception purement juridique : la détermination des droits de
propriété peut inclure les coutumes, les normes…qui délimitent les usages autorisés sur les
actifs.

Vu l’exhaustivité de la notion des droits de propriété à tous les échanges entre les individus, les
définitions suivantes ont été proposés à la notion de droits de propriété :

Selon H. Demsetz (1967): « …les droits de propriété permettent aux individus de savoir à priori ce
qu’ils peuvent espérer raisonnablement dans leurs rapport avec les autres membres de la
communauté. Ces anticipations se matérialise par les lois, coutumes et mœurs d’une
société ». Selon Coriat et Weinstein (1995) «les droits de propriété est un droit socialement validé à
choisir les usages d’un bien économique ». Selon Furubotn et Pejovitch (1972) «les droits de
propriété ne sont pas des relations entre les hommes et les choses, mais des relations codifiées
entre les hommes qui ont rapport à l’usage des choses ».

Ces trois définition sont très convergentes et définissent les droits de propriété comme les droits
d’utiliser des biens et d’en bénéficier. Les droits sur ces biens sont assurés par la loi, les
coutumes…ces droits naissent des relations entre individus en échangeant des objets
(matérielles ou non) qui ont de la valeur. La fonction principale des droits de propriété, dés lors qu’ils
sont correctement spécifiée et garantis, est de fournir aux agents des incitations à créer, à conserver,
et à valoriser des actifs, bref à utiliser plus efficacement les ressources.

Dans le but d’inciter les agents économiques à utiliser plus efficacement les ressources, il
découle une fonction essentielle des droits de propriété qui est l’internalisation des
externalités. Une externalité, c’est l’effet secondaire consécutif à la jouissance d’un droit et que l’on
fait subir à autrui. Cette externalité pourra être positive (un individu bénéficie de la jouissance
d’un droit dont seul le propriétaire devrait bénéficier) ou négative (un individu exerce son
activité en faisant subir à autrui des couts auxquels ils n’ont pas consenti). La notion
d’internalisation signifie que chacun va supporter le cout de ces actions et va jouir des
bénéfices de celle-ci.

2.3. Contenu des droits de propriété

Pour être efficaces, les droits de propriété doivent remplir les conditions suivantes :

1. Exclusivité : cet attribut fait référence au caractère absolu du droit. Le propriétaire pourra
librement jouir de ses biens (utiliser, changer la forme, appropriation des revenus…). cette
exclusivité est restreinte par les dispositions légales. cet attribut s’articule avec l’effet
incitatif des droits de propriété ;
2. Transférabilité : c’est le droits de céder le bien définitivement à travers la vente ou
partiellement (à travers la location par exemple) ;
3. Partitionabilité : dans la mesure ou une ressource peut être détenue par un ou plusieurs
personnes.

2.4. Structure de propriété et comportement des dirigeants


La théorie des droits de propriété distingue trois attributs de droits de propriété :

a. l’usus : c’set le droit d’utilisation d’un actif ;

b. le fructus : c’est le droits de bénéficier de cet actif ;

c. l’abusus : c’est le droit de le céder.

Selon la présence ou non de ces attributs, on peut faire la distinction entre plusieurs types de
propriété (propriété publique, propriété privée, propriété communale, propriété collective…..). Pour les
théoriciens des droits de propriété, le fait de décomposer les droits de propriété (usus, fructus et
abusus) entre les mains de plusieurs personnes tend à réduire l’efficacité de la firme. En effet, seul un
manager qui est aussi propriétaire peut avoir intérêt à réduire le gaspillage et à améliorer ses efforts
au sein de son entreprise parce qu’il bénéficie de la totalité du profit réalisé grâce à ses efforts.

Cette théorie a pour objectif de démontrer la supériorité des droits de propriété privés parce
qu’ils assurent l’incitation des dirigeants et ‘par conséquences, la performance de l’entreprise.
Par contre, elle montre l’inefficacité de l’entreprise publique et l’entreprise coopérative. Les deux
premiers exemples de formes organisationnelles efficientes montrent la supériorité des droits de
propriété privés. Les deux autres montrent l’inefficacité de l’entreprise publique et coopérative :

2.4.1. La firme capitaliste classique

Alchian et Demsetz (1972) présentent tout d’abord une certaine vision de la nature de la firme : la
firme est une forme d’organisation de la production en équipe. Selon ces deux auteurs, la production
en équipe est un type de production dans lequel :
1. plusieurs types de ressources sont utilisées;
2. la production n’est pas la somme des outputs séparés de chaque type de ressources ;

3. les ressources utilisées dans la production en équipe n’appartiennent pas à la même


personne.

Selon Alchian et Demsetz (1972), la production en équipe est une source de gain parce que
la production de l’équipe est supérieure à la somme des contributions individuelles ( effet de
synergie), donc les inputs individuels ne rapportent pas des productions séparées qui vont être
additionnés pour obtenir l’output total. Dans la production en équipe c’est difficile, en
observant l’output total, de déterminer la contribution de chaque membre de l’équipe de
production. Les individus peuvent se comporter en «passager clandestin» car la
rémunération n’est pas liée à la productivité individuelle. Selon Alchian et Demsetz 26 (1972),
la solution est de spécialisé un contrôleur (membre de l’équipe de production) dans le contrôle
des inputs en lui attribuant les gains nets de l’équipe pour qu’il sera incité à contrôler les
autres membres.

Selon ces auteurs, il faut lui attribuer les droits suivants : (1) être le «créancier résiduel» (residual
claimant) ; (2) le droit d'observer et contrôler le comportement des détenteurs de ressources membres
de l'équipe ; (3) le droit exclusif à être dans un rapport contractuel avec tous les détenteurs de
ressources ; (4) le droit de changer la composition de l'équipe, c'est à-dire de renégocier le contrat
avec chaque membre indépendamment des contrats passés avec les autres ; (5) le droit de vendre
ces droits, c'est-à-dire de vendre le statut particulier qu'il détient.

2.4.2. La grande entreprise moderne

Dans cette situation, le problème posé est la séparation entre la propriété et le contrôle des droits de
propriété. Dans cette situation, trois éléments peuvent expliquer l’atténuation des droits de propriété
privés :
• le coût de détection par les actionnaires des pratiques discrétionnaires des managers qui ne
maximisent pas la valeur de la firme est très élevé ;

• la mise au pas des managers est sinon impossible du moins difficile et très coûteuse ;

• la maximisation de la richesse des actionnaires est un objectif difficile à imposer aux


managers.

Coriat et Weinstein à l’instar des tenants de la théorie des droits de propriété, soutiennent l’idée que la
grande entreprise moderne est une forme d’organisation efficiente et même la plus efficiente pour
exploiter les gains potentiels de spécialisation à grande échelle et de la surveillance des équipes de
grande taille. Cette organisation ne remet pas en cause les fondements de droits de propriété privés
car elle permet d’aliéner et de partitionner les droits de manière à permettre une spécialisation
avantageuse entre :

1. ceux qui exercent les droits de prendre les décisions ;


2. ceux qui en supportent les conséquences.

2.4.3. L’entreprise publique

Dans ce type d’entreprise, l’usus est collectivement possédé par les salariés alors que le fructus
et l’abusus appartiennent à l’état. Dans cette situation le salarié n’est pas incité à fournir l’effort
parce que l’augmentation de son effort bénéficie à toute la collectivité alors qu’il est le seul à
supporter le cout de son effort.

2.4.4. L’entreprise coopérative

Dans cette situation, la propriété est de type collectif et n’est pas cessible. Le fructus
appartient collectivement aux salariés et aux dirigeants. Il est probable donc que ces derniers
chercheront à maximiser leur fonction d’utilité. Les pouvoirs de contrôle sont en outre peu efficaces
car effectués par des représentants des salariés cooptés par ces derniers. 29

Sous-section 3 : Les théories alternatives

Sous-section 3.1 : Les théories basées sur la compétence

Selon Coriat et Weinstein (2010), l’approche basée sur les compétences représente un ensemble de
constructions qui ne sont pas toujours homogènes, mais partagent une série de traits et
fondements communs qui permettent d’identifier cette approche et de la distinguer des approches
contractuelles.

Sous-section 3.1.1 : Les trois origines et les trois sources de l’approche

Cette approche s’est construite à partir de trois sources :


(1) l’approche behaviouriste : cette vision rejette l’hypothèse de rat ionalité substantielle et
celle qui lui est attaché de la maximisation de comportement. cette vision écarte la
capacité de la firme de produire des réponses automatiques et rationnelle à leur
environnement ;
(2) la contribution de Penrose (1952) qui est la première à poser qu’au delà de la seule
gestion des informations, la firme est une collection de ressources. Le management doit les
créer, les gérer, les combiner pour permettre une meilleure performance.
(3) l’approche évolutionniste : les contributions des auteurs de ce courant (Nelson et Winter,
Dosi…) insistent que la firme doit être posée comme «répertoire» de connaissances et de
compétences. ils mettent en avant le rôle des routines définis comme « savoir faire » des
organisationnel conçus comme «dispositifs de résolution des problèmes». la firme est
donc représentée comme «nœud de compétences».

Sous-section 3.1.2. : Les oppositions entre approches contractuelles et approches par les compétences

On peut résumer la différence entre les approches contractuelles (la théorie de l’agence, la
théorie des droits de propriété, la théorie des contrats incomplets…) et les approches par les
compétences dans les points suivants :
• rationalité substantive versus rationalité limitée : selon les approches par les
compétences, les firmes n’ont pas la possibilité de réaliser des calculs optimaux. Les
décideurs recourent à des solutions satisfaisantes. dans ce contexte, les notions de routines
et habitudes guident les comportements humains dans des contextes particuliers
• allocation des ressources versus création des ressources : on abandonne dans les
approches par les compétences que les entreprises ont accès aux mêmes facteurs de
production. par contre, les ressources sont largement spécifiques à la firme et ne peuvent
être acquis directement sur le marché. la croissance de la firme repose sur un processus
endogène de création des ressources (conditions d’apprentissage, routines…). donc, la
création des ressources ne peut faire l’objet d’un contrat.
• efficience statique versus efficience dynamique : alors que les approches contractuelles
privilégient l’efficience statique, les approches par les compétences se focalisent sur
l’efficience dynamique parce que les connaissances et les compétences, qui diffèrent
d’une entreprise à une autre, sont à la base de la performance de ces dernières.
• information versus connaissance : les conceptions contractuelles mettent l’accent sur
les problèmes informationnels au détriment des connaissances grâce à l’hypothèse de la
rationalité substantive des individus (la connaissance est envisagée comme un stock qui
résulte de l’accumulation des informations). dans les approches fondées sur les
compétences, l’accent mis sur ces dernières est centrale. la connaissance est une capacité
d’apprentissage et une capacité cognitive. donc, elle représente un ensemble subjectif qui
résulte de l’interprétation de l’information (la connaissance diffère entre les individus qui
n’ont pas une rationalité substantive), par exemple : l’accroissement d’un dividende qui
constitue une information produira un élément de connaissance différent selon
l’interprétation des individus.
On peut rajouter l’élément suivant qui différencie l’approche par les compétences des approches
contractuelles :
• une théorie de la production : l’approche par les compétences met l’accent sur les
problèmes de la production. cette dernière n’est pas réduite à une simple combinaison
supposée efficace des facteurs de production. cette approche analyse la production selon
deux dimensions essentielles :
➢ La prise en compte des caractères spécifiques du travail humain : on s’intéresse à la
manière dont le travail est effectivement mis en œuvre et sur les conditions de
favoriser les compétences. Cela conduit à s’interroger sur les conditions de l’apprentissage
dans l’organisation ;
➢ Le problème de coordination des différents agents de la production. Dans cette approche
(contrairement aux approches contractuelles), le problème est d’assurer la coordination entre
des individus qui ont des connaissances différentes. Donc le problème est un problème
cognitive et n’ont pas un problème d’asymétrie de l’information.
M. JENSEN ET W. MECKLING «Theory of the firm: managerial behavior, agency cost, and
ownership structure» Journal of Financial Economic, 1976, pp. 305-360.
H. GABRIE ET J.L. JACQUIER «Les théories modernes de l'entreprise: l'approche
institutionnelle» Economica, 2001, 329 pages.

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