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Chapitre 4

La décision d’investissement en absence de risque

Parmi les décisions économiques de l’entreprise, la décision d’investissement est primordiale.


Elle est seule à permettre la création de richesse, c’est-à-dire la valorisation du patrimoine.

Section 1 : Définitions des investissements

1.1 Définitions
Deux définitions complémentaires permettent de cerner le concept d’investissement. Selon
l’approche comptable, un investissement est une acquisition de biens ou de services non
consommés au cours d’un exercice.
Cette définition vise aussi bien les biens matériels comme les constructions, terrains,
équipements, titres de participation, que les biens immatériels comme les brevets ou les fonds
de commerce.
Elle englobe également les services tels que les programmes de recherche et développement,
ou encore les investissements commerciaux tels que les campagnes de publicité et la
constitution de forces de vente, dont les effets ont une portée de longue durée.
Selon l’approche financière, l’investissement se définit comme un échéancier de décaissements
et d’encaissements. Cette formule brève s’applique parfaitement à un investissement technique
en équipements de production. Elle s’applique de la même façon à un investissement
commercial ou à un investissement en titres, c-à-d en actifs financiers.
Concrètement, elle signifie ceci : à une succession initiale de dépenses, fait suite une succession
de recettes résultant de ventes plus fortes, de marges améliorées, ou constituées par les
dividendes escomptés.
1.2 Classification
Ces investissements que nous proposons de sélectionner avec discernement, concernent
l’environnement des entreprises comme celui des particuliers. Dans le contexte de l’entreprise,
une classification courante des projets d’entreprise distingue :
- Les investissements d’expansion (accroissement de capacité et/ou développement de
marchés) ;
- Les investissements de productivité (visant essentiellement la réduction des coûts) ;
- Les investissements stratégiques (liés à la diversification, à l’innovation ou à la qualité) ;
- Les investissements de simple renouvellement d’équipements ;
- et les investissements obligatoires dictés par la règlementation (protection de
l’environnement, sécurité) ou par des exigences sociales.
1.3 Méthodologie de choix d’investissement
Il s’agit de présenter une méthodologie susceptible d’être appliquée à l’analyse de toutes les
catégories de projets d’investissement. Elle repose sur l’idée que la performance financière d’un
projet d’investissement doit s’apprécier au regard de sa contribution à la valeur de l’entreprise.
Autrement dit, indépendamment des justifications stratégiques qui président par ailleurs à la
décision d’investissement, un projet ne doit être accepté que si sa réalisation a pour effet
d’augmenter le patrimoine des actionnaires. De même un projet donné ne sera préféré à un
projet concurrent que si contribution à la valeur de l’entreprise est plus importante.
Si l’on se retient aux seuls critères financiers, la question de valeur constitue le nœud central de
la décision d’investissement. L’appréciation de la valeur d’un projet s’avère particulièrement
délicate, car elle doit prendre en compte ces deux dimensions essentielles en finance que sont
le temps et le risque.
Dans un souci de clarté pédagogique, ce chapitre ignore délibérément le problème du risque et
montre comment valoriser les projets en supposant que toutes leurs caractéristiques sont
connues avec certitude.

Section 2 : Actualisation des flux et décision d’investissement

2.1 La valeur temporelle de l’argent


2.1.1 investissement et calendrier des perspectives de gains
Considérons une entreprise dont l’un des produits sera fabriqué et commercialisé pendant
encore 4 ans à compter d’aujourd’hui. Deux propositions lui sont transmises en vue d’améliorer
sa productivité. Dans les deux cas, un investissement de 1 000 doit être effectué immédiatement
pour modifier son matériel de production et au terme de la période de 4 ans le matériel de
production utilisé est supposé sans valeur. Les gains de productivité ou les économies de coûts
se présentent selon les deux propositions suivantes :
Proposition A Proposition B
Investissement immédiat 1 000 1 000
Gains en année 1 300 100
Gains en année 2 300 200
Gains en année 3 300 400
Gains en année 4 300 550
Total des gains 1 200 1 250

Faut-il se lancer dans ces projets d’investissement, et si oui, lequel choisir ?


Apparemment, les gains procurés par la proposition B (1 250 sur 4 ans) sont supérieurs à ceux
de la proposition A (1 200 sur 4 ans) mais les sommes en question seront disponibles beaucoup
plus tard dans le calendrier des 4 années.
Pourquoi cette réalisation tardive des gains constitue-t-elle une préoccupation importante ? tout
simplement parce qu’elle empêche d’avoir plus tôt la disponibilité des sommes correspondantes
qui pourraient être placées et procurer à terme un montant plus élevé.
Le calendrier des perspectives de gains doit donc être analysé en fonction des placements
intermédiaires qu’il permet d’effectuer.
Au niveau financier, un projet d’investissement se définit avant tout par l’échéancier des flux
qu’il engendre à savoir :
- des flux négatifs au début, correspondant à une mise de fonds immédiate pour réaliser
et lancer le projet ;
- des flux positifs par la suite, donnant lieu à des disponibilités futures et correspondant
aux gains procurés par le projet.
2.1.2 Mise de fonds immédiate et disponibilités futures : la capitalisation
Supposons que l’entreprise confrontée aux deux propositions précédentes ait aujourd’hui la
possibilité de placer ses disponibilités à un taux de 10 %, et que cette opportunité de placement
de 10 % continuera d’exister pendant 4 ans.
Dans la mesure où les deux propositions A et B impliquent le même débours initial, une 1ère
méthode de comparaison consiste à déterminer dans les deux cas le montant disponible en fin
d’année 4 en supposant que les gains des années précédentes sont immédiatement placés au
taux de 10 % jusqu’au terme de l’année 4.
La capitalisation est le terme financier utilisé pour désigner l’opération consistant à déterminer
le montant obtenu grâce au placement d’une certaine somme d’argent pendant une période
donnée. Ainsi, la capitalisation d’une somme S0 au taux i pendant un an permet d’obtenir le
montant S1 définit comme suit : S1 = S0 + iS0 = S0(1 + i)
Si la somme S0 est capitalisée pendant 2 ans, on obtient :
S2 = S1 + S1i = S0(1 + i) + iS0(1 + i) = S0(1 + i)2
Et plus généralement, si la somme S0 est capitalisée pendant n années : Sn = S0(1 + i)n
Dès lors, les deux propositions A et B peuvent être aisément comparées en appliquant la
capitalisation. Les résultats sont :
- Proposition A : Disponibilité totale en année 4 = 300(1 + 0,1)3 + 300(1 + 0,1)2 + 300(1 + 0,1)
+ 300 = 1 392,3 ;
- Proposition B : Disponibilité totale en année 4 = 100(1 + 0,1)3 + 200(1 + 0,1)2 + 400(1 + 0,1)
+ 550 = 1 365,1.
Accepter la proposition B revient à se séparer de 1 000 aujourd’hui pour disposer de 1 365,1 à
l’issue de l’année 4. Elle s’avère donc moins intéressante que la proposition A dans la mesure
où l’objectif recherché est de réaliser les gains les plus élevés possibles.
La comparaison est effectuée, il reste une dernière question à trancher : est-il préférable
d’investir 1 000 dans la proposition A ou de placer tout simplement ces 1 000 à 10 % puisque
l’opportunité existe ?
La capitalisation de 1 000 pendant 4 ans donne : 1 000 (1 + 0,1)4 = 1 464,1. Donc A est non
préférée à la capitalisation.
L’investisseur doit comparer ses projets d’investissements à caractère industriel ou commercial
à cette solution de référence.
En résumé, les flux procurés par un projet d’investissement ont d’autant plus de valeur qu’ils
interviennent tôt dans le calendrier du projet, car le placement ou le réinvestissement de ces
gains procurera une disponibilité future ou une valeur future supérieure.
2.1.3 Valeur actuelle des disponibilités futures : l’actualisation
Pour comparer les deux propositions A et B, une méthode alternative à la précédente consiste
à calculer dans les deux cas la "valeur actuelle" des gains escomptés. Autrement dit, au lieu de
calculer le montant total disponible en fin de projet grâce au réinvestissement des différents
gains intermédiaires, on détermine le montant total disponible en année 0 qui, placé pendant 4
ans, donnerait le même montant que celui calculé précédemment.
L’actualisation est la technique qui répond à cet objectif. Elle représente donc l’opération
inverse de la capitalisation.
Ainsi, la valeur actuelle au taux i d’une somme d’argent S1 disponible dans 1 an est définie
1𝑆
par : 𝑆0 = (1+𝑖) .

En effet, la somme S0 placée pendant 1 an permet de disposer dans 1 an la somme S1 ;


S1 = S0(1 + i). Plus généralement, la valeur actuelle d’une somme d’argent Sn disponible dans
n années se détermine comme suit :
𝑆𝑛
𝑆0 =
(1 + 𝑖)𝑛
Appliquons maintenant cette seconde méthode à l’analyse des deux propositions A et B :
- Proposition A : la valeur actuelle des disponibilités futures = 300 (1 + 0,1)-1 + 300 (1 + 0,1)-2
+ 300 (1 + 0,1)-3 + 300 (1 + 0,1)-4 = 950,95 ;
- Proposition B : la valeur actuelle des disponibilités futures = 100 (1 + 0,1)-1 + 200 (1 + 0,1)-2
+ 400 (1 + 0,1)-3 + 550 (1 + 0,1)-4 = 932,39
L’actualisation confirme la supériorité de la proposition A par rapport à la proposition B. Selon
la proposition A, recevoir 300/an pendant 4 ans est équivalent à disposer aujourd’hui d’un
montant de 950,95.
Vérifions que cette démarche d’actualisation est cohérente avec la capitalisation. La
disponibilité future totale de la proposition A s’élève à 1 392,3. Ce montant correspond bien au
montant qui serait obtenu en fin d’année 4 en plaçant la valeur actuelle des flux futurs pendant
4 ans, soit : 950,95 (1 + 0,1)4 = 1 392,3. La valeur actuelle des flux futurs générés par la
proposition B atteint 932,39.
En résumé :
Comparaison des flux totaux sur 4 ans Proposition A Proposition B
Montants instantanés 1 200 1 250
Montants en disponibilités futures 1 392,3 1 365,1
Montants en valeur actuelle 950,95 932,39

- Première conclusion : supériorité de la proposition A par rapport à la proposition B


- Deuxième conclusion : faiblesse de la proposition A par rapport à la simple opportunité
de placement.
En effet, investir dans la proposition A revient à se séparer aujourd’hui de 1 000 pour obtenir
des gains ultérieurs dont la valeur actuelle est de 950. C’est donc une opération négative ou
déficitaire – non pas intrinsèquement – mais compte tenu de l’existence d’une opportunité de
placement à 10 % puisque c’est à ce taux que les différents flux futurs ont été actualisés.
Dans cette démarche de l’actualisation, un point fondamental est évidemment le taux utilisé, et
il convient d’en définir les composantes.
2.2 Les composantes du taux d’actualisation
Le taux, auquel les flux des projets étudiés ont été actualisés, a été introduit comme un taux
d’opportunité de placement, c-à-d le taux dont l’investisseur pourrait bénéficier dès maintenant
s’il souhaitait placer ses disponibilités sur le marché financier plutôt que de les engager dans
un projet d’investissement. Les opportunités de placement sont par exemple :
- un livret d’épargne (faible rémunération)
- des bons de trésor ou des obligations (moyenne rémunération)
- des actions (rémunération élevée)
Pourquoi observe-t-on des différences de taux ?
Le taux de rémunération d’un placement comprend au moins trois composantes qu’il est
commode de dissocier pour l’analyse : le temps, l’inflation et le risque.
2.2.1 Le temps
Le taux de placement rémunère, dans une première étape, la privation des disponibilités pendant
une période de temps. La contrepartie qui en résulte constitue une forme de loyer de l’argent
désigné par le terme "taux d’intérêt réel".
2.2.2 L’inflation
L’indisponibilité des fonds pendant une certaine période de temps expose l’investisseur au
risque de la baisse du pouvoir d’achat. C’est donc, l’absence relative de protection contre
l’inflation qui est rémunérée, dans une deuxième étape, par le taux de placement.
2.2.3 Le risque
Lorsque la rémunération espérée d’un placement n’est pas certaine, on conçoit donc que c’est
la prise de risque qui est rémunérée, dans une troisième étape, par le taux de placement.

Section 3 : Mesure des flux générés par un projet d’investissement

Disposer d’un critère de choix adéquat pour arbitrer entre plusieurs projets d’investissement est
évidemment fondamental. Tous les critères utilisés ont cependant un point commun : ils
combinent les flux générés année après année tels qu’ils ressortent de l’analyse prévisionnelle
de chaque projet d’investissement. La qualité des décisions résultant de l’utilisation de ces
critères est donc directement fonction de la qualité des données retenues pour déterminer les
flux annuels liés à un projet et que l’on désignera de façon plus précise par "flux nets annuels
de liquidité".
Sans même évoquer le problème de l’incertitude qui frappe toute prévision économique, la
détermination de ces flux est une tâche beaucoup plus délicate qu’on pourrait le penser. Il s’agit
d’abord de reconnaître clairement les éléments à prendre en considération et d’en bien
comprendre les raisons. Mais il importe aussi d’identifier les éléments dont il ne faut pas tenir
compte et qu’une appréciation trop rapide ferait considérer à tort comme des flux de liquidité
liés à un projet.
Schématiquement, les flux de liquidité caractéristiques d’un projet d’investissement se
rattachent aux trois périodes suivantes :
- la période initiale qui se caractérise essentiellement par le décaissement des sommes
nécessaires à la réalisation de l’investissement proprement dit ;
- la période intermédiaire, qui s’étend sur la durée de vie du projet, est principalement
marquée par les encaissements et les décaissements liés à l’exploitation courante de
l’investissement ;
- la période terminale, qui intervient à la fin de la durée de vie du projet, est marquée par
les encaissements correspondant à la liquidation des divers actifs qui constituaient
l’investissement (immobilisations, mais aussi stocks, créances clients, etc.).
La typologie définie par ces trois étapes permet déjà de préciser la nature des flux de liquidité
liés à un projet d’investissement.
3.1 Les flux liés à la réalisation de l’investissement
Ils comprennent les décaissements liés à l’acquisition des éléments constitutifs du projet et, le
cas échéant, les encaissements liés à la revente des équipements rendus disponibles du fait de
la réalisation du nouveau projet.
3.1.1 Les dépenses d’acquisition initiales
C’est le montant de l’investissement initial, c-à-d par exemple le prix des immobilisations
(locaux, équipements, matériels) nécessaires au projet. Ce prix d’acquisition s’entend hors taxe
(HTVA), puisque celle-ci – bien qu’effectivement décaissée – est susceptible d’être récupérée
rapidement. Les dépenses directement liées aux acquisitions effectuées, tels que les frais de
transport et d’installation, sont naturellement à prendre en compte. De même, les frais d’étude
qui seront engagés ou encore les dépenses nécessitées par la fabrication de produits prototype
font partie intégrante de l’investissement initial.
Parallèlement, on n’omettra pas de considérer les dépenses que le projet déclenche par
"contrecoup", comme la formation du personnel rendue nécessaire pour maîtriser la nouvelle
technologie impliquée par le projet, ou encore les frais d’agrandissement des installations
sanitaires et sociales de l’entreprise rendus inévitables par le supplément d’effectifs apporté par
le projet.
3.1.2 Les dépenses d’acquisition ultérieures
De même nature que toutes celles évoquées précédemment, des dépenses d’acquisition
complémentaires peuvent être engagées au cours de la durée de vie du projet. C’est le cas
lorsque l’investissement est programmé selon plusieurs tranches annuels, ou lorsque des
remplacements partiels d’équipement doivent être effectuées à intervalles réguliers. Dans cette
hypothèse, les flux correspondants se retranchent simplement du flux d’exploitation de l’année
concernée.
3.1.3 Les dépenses d’acquisition au coût d’opportunité
Lors de la réalisation initiale de l’investissement, il peut s’avérer que certains matériels
disponibles ou certains locaux vacants de l’entreprise soient susceptibles d’être utilisés par le
projet.
On aurait tort de considérer ces différentes ressources comme "gratuites", c-à-d entrainant une
dépense nulle.
En effet, en termes d’opportunité, on se prive de revendre les matériels ou les locaux concernés
ou de les donner en location, ou encore de les utiliser dans le cadre d’un projet concurrent (qui
de fait ne sera pas réalisé). La perte de recettes qui en résulte représente un coût d’opportunité
qui doit venir s’ajouter aux dépenses d’investissement initiales.
Selon les hypothèses envisagées, ce coût correspond au produit de la revente des matériels, au
montant des loyers ou à la valeur actuelle nette du projet concurrent. Dans le cas ou les trois
possibilités d’utilisation des locaux ou matériels existent, c’est bien évidemment le coût
d’opportunité le plus élevé qui doit être pris en considération.
3.1.4 Les recettes provenant de la revente des équipements rendus disponibles du
fait de la réalisation du nouveau projet
Si l’option est prise de revendre les équipements rendus disponibles par la réalisation d’un
projet, les recettes correspondantes viennent compenser en partie les dépenses initiales
d’investissement.
A titre d’illustration, considérons un projet dont les dépenses d’acquisition initiales sont de
10 000. Le prix de revente du matériel rendu disponible est 3 000, acquis 3 ans auparavant pour
4 000 et amorti en linéaire sur 5 ans.
VCN = 4 000 – (4 000 x 3/5) = 1 600 ;
Plus-value sur cession = 3 000 – 1 600 = 1 400 ;
Impôt sur la plus-value = 1 400 x 0,25 = 350.
Le flux de l’année 0 s’établit comme suit :
Année 0
Dépense d’investissement - 10 000
Prix de revente de l’équipement + 3 000
Impôt sur la plus-value - 350
Flux net de liquidité - 7 350

3.1.5 Les dépenses irrécupérables on "Sunk Costs"


Dans le cadre d’un projet, on définit l’année 0 comme étant la période :
- où l’on décide de se lancer ou non dans le projet ;
- et où l’on engage, si le projet est décidé, les dépenses d’acquisition initiales.
Cependant, lorsque des études ou des expérimentations préalables ont été engagés avant cette
date, on peut se demander si les frais correspondants, qui peuvent atteindre des sommes
importantes, sont à inclure dans les dépenses d’acquisition initiales.
La réponse est négative, car ces coûts irrécupérables appartiennent au passé et la décision
d’accepter ou de rejeter le projet ne peut en modifier le montant. En particulier, il serait erroné
d’accepter un projet sous le prétexte que d’importants budgets de recherches préalables ont déjà
été engloutis.
3.2 Les flux liés à l’exploitation du projet pendant sa durée de vie
Ce sont les flux d’encaissements et de décaissements issus de l’exploitation du projet tout au
long de sa durée de vie.
Pour déterminer les flux de trésorerie générés par l’exploitation, il est alors commode de les
décomposer en trois éléments à partir des documents comptables prévisionnels : l’excédent brut
d’exploitation (EBE), l’impôt sur le bénéfice et la variation du besoin en fonds de roulement.
3.2.1 L’excédent brut d’exploitation
L’excédent brut d’exploitation est le solde des produits et des charges d’exploitation se
traduisant tôt ou tard par des encaissements ou des décaissements. Il ne comprend pas la
dotation aux amortissements qui ne correspond ni à une recette ni à une dépense. Les produits
d’exploitation se composent essentiellement du chiffre d’affaires et des revenus accessoires,
alors que les charges d’exploitation comprennent la consommation de matières et marchandises,
les autres charges externes (loyer, entretien et réparation, sous-traitance, publicité, transport,
etc.), les frais de personnel et charges sociales et les charges d’exploitation diverses.
3.2.2 l’impôt sur les bénéfices
Soit l’exemple suivant :
EBE 1 000
- Dotation aux amortissements 200
= Résultat d’exploitation avant impôt 800
- Impôt 200
= Résultat d’exploitation après impôt 600

Ce résultat intermédiaire appelle deux remarques :


- l’impôt sur les bénéfices est chiffré à partir du résultat d’exploitation avant impôt, c-à-d en
ignorant les frais financiers qui viendraient réduire le résultat imposable. En effet, nous ne
tenons pas compte des modalités selon lesquelles l’investissement sera financé, et par
conséquent on ne tient d’aucun frais financier dans le flux d’exploitation. L’impôt ainsi pris en
compte est dénommé "impôt à dette nulle" ;
- le flux d’exploitation, tel qu’il est mesuré par l’excédent brut d’exploitation diminué de
l’impôt sur les bénéfices, correspond seulement à un "flux potentiel". Il est donc nécessaire
d’introduire les décalages occasionnés dans les encaissements et les décaissements par la
constitution des stocks et l’existence de délais de paiements clients et fournisseurs. L’impact de
ces décalages sur la trésorerie est précisément mesuré par la variation du BFR.
3.2.3 La variation du BFR
Avant le démarrage, le BFR = 0. Supposons que pour la 1ère année, les éléments du BFR
prennent les valeurs suivantes :
+ Stocks 500
+ Créances clients 1 000
- Dettes fournisseurs 300
= BFR en année 1 + 1 200
La variation du BFR = 1 200 – 0 = 1 200
En résumé, le flux d’exploitation est donc obtenu en retranchant la variation du BFR des deux
éléments précédents, soit :
EBE
- Impôt sur les bénéfices
- Variation du BFR
= Flux de liquidité lié à l’exploitation
L’application de cette formule générale mérite cependant une précaution de mesure quant à
l’année de référence de la variation du BFR. L’exemple suivant permet d’identifier le
problème :
Année 0 1 2 ………
BFR généré par le projet 0 1 200 1 300
Variation du BFR + 1 200 + 100
L’accroissement du BFR à raison de 1 200 entre l’année 0 et 1 entraine-t-il un décaissement au
titre de l’année 0 ou au titre de l’année 1.
Tout l’impact de la variation du BFR se concrétise en début d’année 1 c-à-d par approximation
à la fin de l’année 0. Le flux de trésorerie correspond à la variation du BFR d’une année par
rapport à l’autre est donc localisé avec les flux de l’année précédente, soit :
Année 0 1 2 …..
BFR généré par le projet 0 + 1 200 + 1 300 …..
Variation du BFR + 1 200 + 100 …..

3.3 Les flux liés à la liquidation finale des éléments constitutifs du projet à la fin de
la durée de vie
A la fin de la durée de vie prévue du projet d’investissement, une valeur finale doit être prise
en compte. On suppose, qu’à la fin de la durée de vie, on arrête l’exploitation de
l’investissement. Cette valeur finale est composée de plusieurs éléments.
3.3.1 La valeur résiduelle des immobilisations
La valeur résiduelle est estimée comme étant égale à la valeur de revente probable des
immobilisations, compte tenu de l’imposition sur les éventuelles plus ou moins-values.
3.3.2 La récupération du BFR
Il s’agit du BFR de la période. A la fin de la durée de vie prévue du projet d’investissement, on
considère que l’ensemble des clients règlent leurs créances, les stocks s’épuisent naturellement,
et les fournisseurs sont réglés.
3.3.3 Montant de la remise en état du "site"
Ce sont les sommes nécessaires et probables pour remettre en état le site tel qu’il était, au départ.
Par exemple :
- l’étude de rentabilité d’un magasin, doit intégrer le coût lié au démontage des rayons ;
- la STEG doit tenir compte du coût de la remise en état du site sur lequel une centrale
électrique a été construite ;
- une société d’exploitation de carrières doit tenir compte du coût de la remise en état du
site en fin d’exploitation.
3.4 Application
La société ABC, spécialisée dans la menuiserie PVC projette de compléter ses activités par le
lancement d’une nouvelle ligne de produits : les éléments de clôture modulaires. L’étude
réalisée courant l’année 0 montre un potentiel de chiffre d’affaires jugé intéressant :
Année 1 2 3 4 5
Chiffre d’affaires 6 000 + 50 % + 45 % + 10 % - 10 %
Les taux de croissance indiqués correspondent à des prévisions de croissance en volume et
ignorent l’évolution possible du prix de vente qui a été fixé pour l’année 0 et sur lequel repose
la prévision du chiffre d’affaires de 6 000 effectue cette même année.
- les coûts de production seraient constitués de matières (40 % du chiffre d’affaires) et les frais
de personnel (40 % du chiffre d’affaires) ;
- les coûts de commercialisation marginaux seraient nuls, tandis que les autres coûts
d’exploitation seraient accrus du fait d’un contrat d’entretien spécifique concernant le nouveau
matériel et dont le coût annuel serait de 500 ;
- le fournisseur de matériel propose un prix de 5 000. Il s’agit d’un matériel amortissable sur 5
ans. A la fin de la 5ème année, il est prévu d’arrêter l’exploitation du projet et de revendre le
matériel pour environ 20 % de sa valeur à neuf.
3.4.1 Les flux liés à l’exploitation
3.4.1.1 L’excédent brut d’exploitation
Le calcule de l’EBE est donné par le tableau suivant :
Année 1 2 3 4 5
Chiffre d’affaires 6 000 9 000 13 050 14 355 12 920
- Matières 2 400 3 600 5 220 5 472 5 168
- Frais de personnel 2 400 3 600 5 220 5 472 5 168
- Contrat d’entretien 500 500 500 500 500
= EBE 700 1 300 2 110 2 371 2 084

3.4.1.2 La variation du BFR


Les données relatives au BFR généré par le projet d’investissement sont les suivantes :
+ stock de PVC : un mois de consommation
+ créances clients : paiement à 60 jours, TVA 19 %
+ TVA à récupérer : 19 % de chaque mois d’achats
- dettes fournisseurs : paiement à 60 jours, TVA 19 %
- TVA due : 19 % de chaque mois de vente
= BFR
A partir de ces données, une première façon de procéder, consiste à déterminer d’abord pour
chaque année le montant du BFR généré par le projet, pour en déduire ensuite les variations
d’une année sur l’autre.
Année 0 1 2 3 4 5
+ Stocks 0 200 300 435 478 431
+ Créances clients 0 1 190 1 785 2 588 2 847 2 562
+ TVA à récupérer 0 38 57 83 91 82
- Dettes fournisseurs 0 476 714 1 035 1 138 1 025
- TVA due 0 95 143 207 227 204
BFR 0 857 1 285 1 864 2 051 1 846
Δ BFR 857 428 579 187 - 205 - 1 846

Une seconde méthode de calcul des variations du BFR consiste à exprimer dans un premier
temps l’ensemble des composantes du BFR en pourcentage du CAHT :
- stocks : 1/12 des consommations annuelles qui représentent elle-même 40 % du CAHT, soit :
1/12 x 0,4 = 3,33 % du CAHT
- créances clients : 1/6 du CATTC annuel, lequel correspond à 1,19 du CAHT, soit :
1/6 x 1,19 = 19,83 % du CAHT
- TVA à récupérer : 19 % d’un mois d’achat HT qui représente lui-même 40 % d’un mois du
CAHT, soit :
0,19 x 1/12 x 0,4 = 0,63 % du CAHT
- dette fournisseurs : 1/6 des achats annuels TTC ou encore 1/6 x 1,19 des achats HT (40 % du
CAHT), soit :
1/6 x 1,19 X 0,4 = 7,93 % du CAHT
- TVA à payer : 19 % d’un mois du CAHT, soit :
1/12 x 0,19 = 1,58 % du CAHT
Le BFR exprimé en % du CAHT s’établit donc à :
3,33 + 19,83 + 0,63 – 7,93 – 1,58 = 14,28 % du CAHT
Il en résulte que la variation du BFR d’une année à l’autre est égale à 14,28 % de la variation
du CAHT pour la même période, soit : Δ BFR = 14,28 % Δ CAHT
Soulignons néanmoins que cette méthode n’est correcte qu’à la condition que toutes les
composantes du BFR varient parallèlement au CAHT.
Année 0 1 2 3 4 5
CAHT 0 6 000 9 000 13 050 14 355 12 920
Δ CAHT 6 000 3 000 4 050 1 305 - 1 435 - 12 920
Δ BFR (14,28 % Δ CAHT) 857 428 579 187 - 205 - 1 846

3.4.1.3 L’impôt sur les bénéfices


Le calcul de l’impôt sur les bénéfices est donné par le tableau suivant :
Année 1 2 3 4 5
EBE 700 1 300 2 110 2 371 2 084
- dot. Aux amortissements 1 000 1 000 1 000 1 000 1 000
= BAI - 300 300 1 110 1 371 1 084
Impôt / bénéfices - 75(*) 75 278 343 271
* il s’agit d’une économie d’impôt
3.4.1.4 Le flux de liquidité lié à l’exploitation
Les flux de liquidité liés à l’exploitation ou cash-flows liés à l’exploitation sont donnés par le
tableau suivant :
Année 0 1 2 3 4 5
EBE 0 700 1 300 2 110 2 371 2 084
- Δ BFR 857 428 579 187 - 205 - 1 846
- Impôt/bénéfices 0 - 75 75 278 343 271
= Flux liés à l’exploitation - 857 347 646 1 645 2 233 3 659

3.4.2 Les flux liés au cycle d’investissement


3.4.2.1 L’investissement initial
Au prix du matériel (5 000) s’ajoutent le transport et les frais d’installation du matériel, soit 200
supplémentaires. Au total, le flux initial de l’année 0 est donc une dépense de 5 200.
3.4.2.2 Les cessions d’actifs nettes d’impôt
Comme indiqué plus haut, la revente du matériel qui intervient fin de l’année 5 rapportera 1 000
(20 % x 5 000). Le matériel étant complètement amorti. La plus-value de cession est donc égale
à 1 000 (1 000 – 0). L’impôt correspondant est 250 (25 % x 1 000). Le prix de cession net
d’impôt est donc égal à 750.
Les flux de liquidité liés au cycle d’investissement se présentent comme suit :
Année 0 1 2 3 4 5
Flux de liquidité liés à l’investissement - 5 200 0 0 0 0 750

3.4.3 Les flux de liquidité liés au projet et décision


Les flux de liquidité liés au projet ou cash-flows sont donnés par le tableau suivant :
Année 0 1 2 3 4 5
Flux de liquidité liés à
l’exploitation - 857 347 646 1 645 2 233 3 659
+ Flux de liquidité liés à
l’investissement - 5 200 0 0 0 0 750
= Flux de liquidité - 6 057 347 646 1 645 2 233 4 409

Supposons que le taux d’actualisation retenu par la société est de 12 %. L’application de la


technique d’actualisation permet de donner les flux suivants :
Année 1 2 3 4 5
Valeur actuelle des flux au taux de 12 % 310 515 952 1 419 2 502

La valeur actuelle des disponibilités futures s’élève à 5 698 qui est inférieure au décaissement
initial : – 6 057 + 5698 = - 359. Par conséquent, le projet devrait être rejeté.
Cependant, une dernière incohérence subsiste dans les données qui ont été rassemblées pour
analyser la rentabilité du projet. Jusqu’à ce niveau d’analyse, le problème de risque est
volontairement ignoré. Dans ces conditions le taux de 12 %, représentant le taux d’opportunité
de placement de la société, est la somme des deux éléments suivants : le taux de rendement réel
correspondant au "prix du temps" et le taux d’inflation prévu pour les années à venir. Donc, le
taux d’actualisation utilisé dans l’exemple est un taux nominal incluant l’inflation. En revanche,
les prévisions du chiffre d’affaires sur lesquelles s’est fondé le calcul des flux de liquidité liés
au projet, ont été exprimées en unités monétaires constantes de l’année 0, date à laquelle l’étude
de faisabilité du projet est effectuée. Ainsi, l’incohérence de la démarche qui a été suivie réside
dans le fait que l’inflation est prise en compte au niveau du taux d’actualisation, mais pas au
niveau des flux de liquidité.
3.5 La mesure des flux de liquidité et l’impact de l’inflation
L’existence de l’inflation modifie sensiblement la valeur nominale des flux de liquidité d’un
projet. Deux approches, cohérentes l’une et l’autre, autorisent une analyse adéquate. La
première consiste à exprimer les flux et le taux d’actualisation en termes courants ou nominaux.
La seconde exprime ces mêmes éléments en termes réels en corrigeant les valeurs nominales
pour l’inflation.
3.5.1 l’approche fondée sur une mesure des flux et du taux d’actualisation en
termes nominaux
Soient les taux d’inflation spécifiques annuels suivants qui s’appliquent aux différentes
composantes des flux de liquidité :
- prix de vente et prix d’achat des matières : + 8 %
- frais de personnel : + 12 %
- contrat d’entretien : + 3 %
- prix du matériel : - 6 %
on suppose par ailleurs que le taux d’inflation général s’élèvera à 8 % par an pour l’ensemble
de la période d’étude.
Les valeurs nominales des flux de liquidité liés à l’exploitation sont données par le tableau
suivant :
Année Taux 0 1 2 3 4 5
spécifiques
Chiffre d’affaires +8% 6 480 10 498 16 439 19 530 18 984
- Matières +8% 2 592 4 199 6 576 7 445 7 593
- Frais de personnel + 12 % 2 688 4 516 7 334 8 610 9 108
- Contrat d’entretien +3% 515 531 546 563 580
= EBE 685 1 252 1 973 2 912 1 703
- dot. aux amortissements 1 000 1 000 1 000 1 000 1 000
= BAI - 685 252 973 1912 703
Impôt/bénéfices - 171 63 243 478 176
Δ BFR +8% 857 462 675 236 - 279 - 2 712
Flux d’exploitation - 857 394 514 1494 2 713 4239
Flux d’investissement(*) - 5 200 0 0 0 0 551
Cash-flows - 6 057 394 514 1 494 2 713 4 790
VA des flux à 12 % - 6 057 352 410 1 063 1 724 2 718

(*) L’investissement initial est déjà exprimé en unité monétaire de l’année courante, c-à-d
l’année 0 : sa valeur nominale reste égale à 5 200. La valeur à neuf du matériel à l’année 5,
année de la cession, aura chuté de 6 % par an soit 3 670. La plus-value est donc égale à 734 (20
% x 3 670) et l’impôt correspondant est 183. La cession d’actif nette d’impôt à l’année 5 s’élève,
en unité monétaire courante, à 734 – 183 = 551.
La valeur actuelle des disponibilités futures s’élève à 6 267 qui est supérieure au décaissement
initial : - 6 057 + 6 267 = + 210. Nous remarquons que la prise en compte de l’inflation modifie
la décision. L’ignorer risque de rejeter des projets rentables ou d’accepter des projets non
rentables.
3.5.2 l’approche fondée sur une mesure des flux et du taux d’actualisation en
termes réels
Avec le même souci de cohérence, il est également possible de calculer les flux de liquidité liés
à un projet en actualisant les flux exprimés en termes réels à un taux d’actualisation également
exprimé en termes réels.
Les flux en termes réels se déduisent des flux exprimés en valeur nominale en divisant ces
derniers par un facteur d’inflation qui est habituellement calculé à partir de l’évolution
prévisible de l’indice général des prix de détail. De la même manière nous déterminons le taux
d’actualisation réel à partir du taux nominal.
- Selon l’approche en valeur nominale, la somme des flux actualisés est donnée par la relation :
𝑛
𝐹𝑡

(1 + 𝑇𝑁 )𝑡
𝑡=1

- Selon l’approche en termes réels, la somme des flux actualisés est donnée par la relation :
𝑛 𝐹𝑡
(1 + 𝐼)𝑇

(1 + 𝑇𝑅 )𝑡
𝑡=1

Avec : 𝑇𝑁 un taux nominal ; 𝑇𝑅 un taux réel et I le taux d’inflation général.


Comme les deux approches sont équivalentes, alors :
𝑛 𝑛 𝐹𝑡
𝐹𝑡 (1 + 𝐼)𝑇
∑ =∑
(1 + 𝑇𝑁 )𝑡 (1 + 𝑇𝑅 )𝑡
𝑡=1 𝑡=1
𝐹𝑡 𝐹𝑡
c-à-d, ∑𝑛𝑡=1 (1+𝑇 𝑡 = ∑𝑛𝑡=1 (1+𝐼)𝑇 (1+𝑇 𝑡
𝑁) 𝑅)

1 1
Pour que cette relation soit vérifiée, il faut que : 1+𝑇 = (1+𝐼)(1+𝑇 , ce qui permet de déduire
𝑁 𝑅)

la relation du taux réel :


𝑇𝑁 − 𝐼
𝑇𝑅 =
1+𝐼
Ce qui donne, pour notre exemple, un taux réel de :
0,12−0,08
𝑇𝑅 = = 3,7 %
1+0,08

La valeur actuelle des flux exprimés en valeur nominale et en termes réels sont donnés par le
tableau suivant :
Année 0 1 2 3 4 5
Flux nominaux en u.m courante (1) - 6 057 394 514 1 494 2 713 4 790
Facteur d’inflation à 8 % (2) 1 1,08 1,1664 1,2597 1,3604 1,4693
Flux exprimés en termes réels (1)/(2) - 6 057 365 441 1 186 1 994 3 260
Valeur actuelle à 3,7 % - 6 057 352 410 1 064 1 724 2 718

La valeur actuelle des disponibilités futures s’élève à 6 268 qui est supérieure au décaissement
initial : - 6 057 + 6 268 = + 211. Nous remarquons que les deux approches (en valeur nominale
– en termes réels) sont équivalentes au niveau du résultat.

Section 4 : Critères de choix d’investissement

Un projet d’investissement ne doit être accepté que si sa réalisation a pour effet d’augmenter le
patrimoine des actionnaires. De même un projet donné ne sera préféré à un projet concurrent
que si contribution à la valeur de l’entreprise est plus importante. La question qui se pose :
comment mesurer cette contribution ? Pour répondre à cette question, l’investisseur a besoin de
critères permettant de décider de réaliser l’investissement ou non ou de pouvoir choisir entre
plusieurs projets concurrents.
En pratique, il existe deux catégories de critères : ceux qui tiennent compte de la valeur
temporelle de l’argent et ceux qui l’ignorent.
4.1 Le critère de la valeur actuelle nette (VAN)
4.1.1 Définition
La VAN d’un projet d’investissement mesure la contribution de ce projet à la valeur de
l’entreprise, c-à-d l’augmentation (ou la diminution) de valeur qui résulterait de la réalisation
du projet. Le calcul de la VAN débouche sur un critère de choix d’investissement : critère
d’acceptation ou de rejet dans le cas d’un projet unique ; critère de classement dans le cas de
projets multiples.
4.1.2 Calcul
La VAN est égale à la somme algébrique des flux relatifs au projet d’investissement exprimés
en valeur actuelle. Les flux sont des flux de liquidité appelés aussi cash-flows et qui peuvent
être négatifs ou positifs.
𝐹 𝐹
𝑉𝐴𝑁 = ∑𝑡=𝑛 𝑡
𝑡=0 (1+𝑘)𝑡 ou 𝑉𝐴𝑁 = −𝐼𝐼 + ∑𝑡=𝑛 𝑡
𝑡=1 (1+𝑘)𝑡

Avec :
- 𝐹𝑡 : le cash-flow de l’année t
- 𝐼𝐼 : l’investissement initial (le signe moins reflète qu’il s’agit d’un décaissement)
4.1.3 Règle de décisions
Le critère de la VAN constitue un critère de choix dans le cas d’un seul projet :
- Un projet est accepté si sa VAN est positive. Ceci signifie que le projet augmente la
valeur de l’entreprise et par conséquent la richesse des actionnaires ;
- Un projet est rejeté si sa VAN est négative.
Le critère de la VAN constitue également un critère de classement : il s’agit de préférer le projet
qui a la VAN la plus élevée.
4.1.4 Comportement de la VAN
Le montant de la VAN d’un projet évolue en fonction du taux d’actualisation utilisé. En toute
logique, plus le taux d’actualisation augmente, plus la valeur actuelle des flux diminue et plus
la VAN diminue. Ceci est parfaitement exact lorsque le projet d’investissement s’effectue
chronologiquement selon la logique courante, c-à-d : une mise de fonds initiale suivie par des
gains retirés de l’investissement tout au long de sa durée de vie, soit un flux négatif suivi par
des flux positifs.
En revanche, il en va tout autrement, lorsque le profil des flux de liquidité de l’investissement
s’écarte du schéma traditionnel qui vient d’être décrit. La VAN évolue alors en fonction du taux
d’actualisation selon des courbes de comportement dont il importe de connaître les
caractéristiques.
4.1.4.1 Le profil de décroissance continue
C’est le cas de l’investissement traditionnel, illustré par l’exemple suivant :
Année 0 1 2 3 4
Flux - 1 000 + 400 + 400 + 400 + 400

Calculons la VAN de ce projet en faisant varier le taux d’actualisation :


Taux VAN
0% + 600
5% + 418
10 % + 268
20 % + 35
25 % - 55
30 % - 134

Graphiquement, l’évolution de la VAN en fonction du taux d’actualisation se présente ainsi :

VAN

600
VAN>0

Taux d’actualisation

20% 25%

VAN<0

Nous remarquons que la VAN diminue à mesure que le taux d’actualisation augmente. Elle
change de signe pour un taux d’actualisation compris entre 20 % et 25 %. La VAN se comporte
selon un profil de décroissance continue.
4.1.4.2 Le profil de croissance continue
Ce deuxième cas est illustré par l’exemple suivant : le projet examiné consiste à construire une
piscine publique et à l’exploiter pendant 4 ans pour en faire don ensuite à une collectivité locale.
L’investissement se monte à 2 000. Il est amortissable sur 4 ans et ne dégagera donc aucune
plus-value lors de la cession finale à titre gratuit.
De son coté, la collectivité locale concernée donne dés le départ une subvention de 3 000. En
contrepartie, elle exige cependant que la piscine fonctionne pendant 4 ans avec deux fois plus
de personnel que nécessaire, si bien que le solde entre les recettes et les dépenses d’exploitation
sera déficitaire tout au long de la période et atteindra – 360 / an. Les données relatives au projet
sont résumées ainsi :
Année 0 1à4
Investissement initial - 2 000
Subvention reçue + 3 000
Recettes d’exploitation 900
Dépenses d’exploitation 1 260
Flux nets annuels + 1000 - 360

Calculons la VAN de ce projet en faisant varier le taux d’actualisation :


Taux VAN
0% - 440
5% - 277
10 % - 141
20 % + 68
25 % + 150
30 % + 220

Graphiquement, l’évolution de la VAN en fonction du taux d’actualisation se présente ainsi :

VAN>0
VAN
15%

Taux d’actualisation

20%

VAN<0
- 440

Nous remarquons que la VAN augmente à mesure que le taux d’actualisation augmente. Elle
change de signe pour un taux d’actualisation compris entre 15 % et 20 %. La VAN se comporte
selon un profil de croissance continue.
4.1.4.3 Le profil cuvette
Reprenons le cas de l’investissement traditionnel et supposons que les fournisseurs proposent
d’accorder un délai de paiement sur 2 ans pour une partie du matériel. Parallèlement, les clients
proposent d’effectuer un paiement d’avance dès l’année 0 pour les produits qui leur seraient
livrés dans les 2 premières années à la condition qu’une réduction de prix leur soit accordée sur
les produits concernés. Les flux relatifs à cette variation du projet sont alors :
Année 0 1 2 3 4
Flux + 805 - 800 - 800 + 400 + 400

Calculons la VAN de ce projet en faisant varier le taux d’actualisation :


Taux VAN
0% +5
5% -8
10 % - 10
15 % -4
20 % +7
25 % + 22
30 % + 38

Graphiquement, l’évolution de la VAN en fonction du taux d’actualisation se présente ainsi :

VAN

VAN>0

5% 15% 20%

Taux d’actualisation
0

VAN<0

Nous remarquons que la VAN diminue puis augmente à mesure que le taux d’actualisation
augmente. Elle change de signe deux fois : une première fois pour un taux d’actualisation
compris entre 0 % et 5 % et une deuxième fois pour un taux d’actualisation compris entre 15 %
et 20 %. La VAN se comporte selon un profil cuvette.
4.1.4.3 Le profil Alpin
Le projet consiste à installer et exploiter un réseau de remontées mécaniques pendant une durée
de 2 ans. Il est entendu qu’au terme de ces deux années, l’investisseur doit démonter les
installations à ses frais, procéder au reboisement des pentes et plus généralement remettre le
site en état. Le projet se caractérise par les flux suivants :
Année 0 1 2 3 4
Flux - 8 000 + 14 000 + 14 000 - 14 000 - 14 000

Calculons la VAN de ce projet en faisant varier le taux d’actualisation :


Taux VAN
0% - 8 000
10 % - 3 783
20 % - 1 465
30 % - 221
40 % + 397
55 % + 675
70 % + 554
90 % + 131
100 % - 125
150 % - 1 414

Graphiquement, l’évolution de la VAN en fonction du taux d’actualisation se présente ainsi :

VAN
VAN>0

30% 100%

Taux d’actualisation
40% 90%

VAN<0

Nous remarquons que la VAN augmente puis diminue à mesure que le taux d’actualisation
augmente. Elle change de signe deux fois : une première fois pour un taux d’actualisation
compris entre 30 % et 40 % et une deuxième fois pour un taux d’actualisation compris entre
90 % et 100 %. La VAN se comporte selon un profil Alpin.
4.2 Le critère du taux de rentabilité interne (TRI)
4.2.1 Définition
Le TRI est un taux d’actualisation pour lequel la VAN du projet est nulle. Il représente le taux
maximal pour lequel le capital investi à ce taux dans le projet n’engendre aucune perte ni aucun
bénéfice.
4.2.2 Calcul
Le TRI est le taux d’actualisation pour lequel la VAN est nulle. Ce qui signifie que le TRI
𝐹
correspond au taux k pour lequel ∑𝑛𝑡=0 (1+𝑘)
𝑡
𝑡
= 0.

Exemple :
Soit un projet caractérisé par les flux suivants :
Année 0 1 2 3 4
Flux - 1 000 + 400 + 400 + 400 + 400

En faisant varier le taux d’actualisation (voir ci-dessus), nous remarquons que la VAN change
de signe pour un taux d’actualisation compris entre 20 % et 25 %. Pour calculer le TRI, nous
allons utiliser la méthode de l’interpolation linéaire :
k = 20 % VAN = 35
k=x VAN = 0
k = 25 % VAN = - 55
𝑥 − 0,2 0,25 − 0,2
=
0 − 35 −55 − 35
Le TRI = 21,94 %.
4.2.3 Règle de décision
Le critère du TRI constitue un critère de choix dans le cas d’un seul projet :
- Un projet est accepté si son taux d’actualisation est inférieur au TRI car ce dernier
constitue un taux limite d’actualisation ;
- Un projet est rejeté si son taux d’actualisation est supérieur au TRI.
Le critère du TRI constitue également un critère de classement : il s’agit de préférer le projet
qui a le TRI le plus élevé.
Cette règle de décision devrait être utilisée avec prudence. En effet, le critère du TRI présente
un certain nombre de faiblesses.
4.2.4 Les faiblesses du TRI
Les faiblesses du TRI sont :
1- Le TRI est insensible aux signes des flux
Considérons deux projets A et B dont les flux sont identiques en valeur absolue, mais de signes
opposés :
Année 0 Année 1 Année 2
Projet A + 1 000 - 1 500 + 100
Projet B - 1 000 + 1 500 - 100

TRIA = 43 % ; supposons que le taux d’actualisation soit égal à 15 %, alors le projet A serait
acceptable. Or, le TRIB = 43 % alors que les flux du projet B sont de signes opposés à ceux du
projet A. Quel projet retenir ?
Représentons graphiquement l’évolution des VAN des projets A et B en fonction du taux
d’actualisation :

VAN

TRIA=TRIB=43%

Taux

15%

Projet A Projet B

Nous remarquons que la VAN du projet B se comporte selon le profil de décroissance continue
alors que celle du projet B se comporte selon le profil de croissance continue. Pour k = 15 %,
c’est le projet B qui sera accepté.
2- Un projet peut présenter plusieurs TRI
C’est le cas du projet dont la VAN se comporte selon le profil cuvette ou le profil Alpin.
Dans l’exemple du projet dont la VAN se comporte selon le profil cuvette, la VAN s’annule
deux fois. Une première fois pour un taux compris entre 0 et 5 %, soit un TRI1 = 1,4 % et une
deuxième fois pour un taux compris entre 15 % et 20 %, soit un TRI2 = 17 %. La VAN est
positive pour des taux d’actualisation inférieurs au TRI1 ou supérieurs au TRI2.
Dans l’exemple du projet dont la VAN se comporte selon le profil Alpin, la VAN s’annule deux
fois. Une première fois pour un taux compris entre 30 % et 40 %, soit un TRI1 = 32,8 % et une
deuxième fois pour un taux compris entre 90 % et 100 %, soit un TRI2 = 95,2 %. La VAN est
positive pour des taux d’actualisation supérieurs au TRI1 ou inférieurs au TRI2.
3- Un projet peut n’avoir aucun TRI
Considérons un projet défini par l’échéancier de flux suivant :
Année 0 1 2
Flux + 1 000 - 3 000 + 2 500

L’évolution de la VAN en fonction du taux d’actualisation se présente ainsi :

VAN

Aucun TRI

Taux

Dans ce cas le projet est accepté quel que soit le taux d’actualisation.
Considérons un autre projet défini par l’échéancier de flux suivant :
Année 0 1 2
Flux - 1 000 + 3 000 - 2 500

L’évolution de la VAN en fonction du taux d’actualisation se présente ainsi :

VAN

Taux

Aucun TRI

Dans ce cas le projet est rejeté quel que soit le taux d’actualisation.
4- Le TRI peut contredire la VAN
Considérons deux projets A et B dont les flux se présentent comme suit :
Projet A B
Coût de l’investissement - 38 100 - 38 100
Flux année 1 18 100 0
Flux année 2 18 100 18 000
Flux année 3 18 100 40 620

1- Quel projet retenir en se référant au critère de la VAN si le taux d’actualisation est égal
à 10 % ?
2- Quel projet retenir en se référant au critère du TRI ?
En se basant sur le critère de la VAN, il faut retenir le projet B car : VANB = 7 292 > VANA =
6 912.
En se basant sur le critère du TRI, il faut retenir le projet A car : TRIA = 20,032 % > TRIB =
17,45 % > k = 10 %.
Nous remarquons que le critère de la VAN et le critère du TRI peuvent aboutir à des décisions
contradictoires. Dans ce cas quel critère retenir ? Et quel projet choisir ?
Afin de pouvoir répondre à ces questions, nous allons présenter sur un même graphique les
courbes d’évolution des VAN des projets A et B en fonction de l’évolution du taux
d’actualisation.

VAN

Projet B

VANA = VANB

TRIA = 20,032 %

Taux

TRIB = 17,45 %
TP : Taux pivot

Projet A

Pour un taux d’actualisation égal à TP, les deux projets ont des VAN égales. Ce taux constitue
ainsi un taux d’indifférence. On est indifférent entre le projet A et le projet B.
Pour un taux d’actualisation inférieur au taux pivot, le projet B est préféré au projet A comme
pour le critère de la VAN.
Pour un taux d’actualisation supérieur au taux pivot, le projet A est préféré au projet A comme
pour le critère du TRI.
Le taux pivot correspond au taux d’actualisation pour lequel les VAN des deux projets sont
identiques, soit : VANA = VANB ; ou encore : VANA – VANB = 0
[18100(1 + 𝑡𝑝 )−1 + 18100(1 + 𝑡𝑝 )−2 + 18100(1 + 𝑡𝑝 )−3 − 38100]
− [18000(1 + 𝑡𝑝 )−2 + 40620(1 + 𝑡𝑝 )−3 − 38100] = 0
−3
18100(1 + 𝑡𝑝 )−1 + 100(1 + 𝑡𝑝 )−2 − 22520(1 + 𝑡𝑝 ) =0
La recherche du taux pivot s’effectue de la même façon que celle pour le TRI, c-à-d en utilisant
la méthode de l’interpolation linéaire. Ce qui nous donne un taux pivot (ou taux d’indifférence)
= 11,28 %.
4.3 Le critère de l’indice de profitabilité
4.3.1 Définition
L’indice de profitabilité (IP) exprime une rentabilité relative par rapport au montant de
l’investissement initial.
4.3.1 Calcul
Le critère de l’indice de profitabilité consiste à rapporter la somme des flux de liquidité
actualisés générés par le projet au montant de l’investissement initial. Soit :
𝐶𝐹𝑡
∑𝑡=𝑛
𝑡=1 (1 + 𝑘)𝑡
𝐼𝑃 =
𝐼𝐼
Ou encore :
𝑉𝐴𝑁
𝐼𝑃 = +1
𝐼𝐼
4.3.3 Règle de décision
Le critère de l’indice de profitabilité constitue un critère de choix dans le cas d’un seul projet :
- Un projet est accepté si son indice de profitabilité est supérieur à 1 et/ou supérieur à une
norme fixée par l’entreprise ;
- Un projet est rejeté si son indice de profitabilité est inférieur à 1 et/ou inférieur à une
norme fixée par l’entreprise.
Le critère de l’indice de profitabilité constitue également un critère de classement : il s’agit de
préférer le projet qui a l’indice de profitabilité le plus élevé. Il est surtout utilisé pour comparer
plusieurs projets d’investissement ayant des montants d’investissements initiaux différents.
4.4 Le critère du taux interne de rentabilité intégré (TIRI)
Certains auteurs préconisent de remplacer la méthode du TRI par la méthode du TIRI. Celle-ci
suppose le placement des cash-flows intermédiaires dégagés par le projet à un taux de
placement donné. Le TIRI est le taux d’actualisation qui donne l’équivalence entre le
décaissement initial et la valeur actuelle de la somme acquise en fin de période du placement
des cash-flows intermédiaires.
Soit g : le taux de placement
La valeur acquise du cash-flow de l’année 1 placé au taux g pendant n-1 périodes est :
𝐶𝐹1 (1 + 𝑔)𝑛−1 ;
La valeur acquise du cash-flow de l’année 2 placé au taux g pendant n-2 périodes est :
𝐶𝐹2 (1 + 𝑔)𝑛−2 ; etc.
Soit A : la somme acquise en fin de période
𝑛

𝐴 = ∑ 𝐶𝐹𝑡 (1 + 𝑔)𝑛−𝑡
𝑡=1

Le TIRI correspond au taux pour lequel :


𝐼𝐼 = 𝐴(1 + 𝑇𝐼𝑅𝐼)−𝑛
Exemple :
Soit un projet caractérisé par les flux suivants :
Année 0 1 2 3 4 5
Flux - 1 096 99 257 379 430 675

Quel serait le TIRI du projet sachant que les cash-flows intermédiaires peuvent être placés au
taux de 10 % ?
A la fin de la 5ème année, les flux de trésorerie obtenus sont :
99(1 + 0,1)4 + 257(1 + 0,1)3 + 379(1 + 0,1)2 + 430(1 + 0,1)1 + 675 = 2094
Le TIRI est le taux auquel il faut placer le montant correspondant à l’investissement initial pour
obtenir 2094 en fin d’année 5, soit :
2094(1 + 𝑇𝐼𝑅𝐼)−5 = 1096
Ce qui donne un TIRI = 13,82 %.
Le critère du TIRI constitue un critère de choix dans le cas d’un seul projet :
- Un projet est accepté si son taux d’actualisation est inférieur au TIRI et/ou inférieur à
une norme fixée par l’entreprise ;
- Un projet est rejeté si son taux d’actualisation est supérieur au TIRI et/ou supérieur à
une norme fixée par l’entreprise.
Le critère du TIRI constitue également un critère de classement : il s’agit de préférer le projet
qui a le TIRI le plus élevé.
Les critères présentés jusqu’à ce niveau tiennent compte de la valeur temporelle de l’argent. En
pratique, il existe également d’autres critères qui ignorent la valeur temporelle de l’argent dont
le délai de récupération et le taux de rendement comptable.
4.5 Le délai de récupération
Appelé aussi : délai ou période de remboursement, délai de recouvrement, pay-back period, …
4.5.1 Définition
Le délai de récupération (DR) d’un investissement est le nombre d’années nécessaires pour que
les encaissements cumulés compensent le montant de l’investissement initial.
Exemple : soit le projet caractérisé par les flux suivants :
Année 0 1 2 3 4
Flux - 1 000 + 500 + 500 + 400 + 400

Les cash-flows cumulés permettent de récupérer le coût de l’investissement initial en 2 ans.


4.5.2 Calcul
Soit le projet caractérisé par les flux suivants :
Année 0 1 2 3 4
Flux - 1 000 + 500 + 400 + 300 + 200

Pour déterminer le délai de récupération, on peut procéder ainsi :


- Calculer les flux de trésorerie cumulés,
Année 0 1 2 3 4
Flux cumulés - 1 000 - 500 - 100 + 200 + 400
- Repérer l’année où le cumul devient positif : Année 3 ;
- Rapporter le montant cumulé observé pour cette année au flux dégagé cette même
année, soit : 200 / 300 = 0,66 ;
- Convertir le ratio obtenu en nombre de mois, soit : 0,66 x 12 = 8 mois ;
- En déduire le délai de récupération, soit : 3 ans – 8 mois, soit encore : 2 ans et 4 mois.
4.5.3 Règle de décision
Le critère du DR constitue un critère de choix dans le cas d’un seul projet :
- Un projet est accepté si son DR est inférieur à une norme fixée par l’entreprise ;
- Un projet est rejeté si son DR est supérieur à une norme fixée par l’entreprise.
Le critère du DR constitue également un critère de classement : il s’agit de préférer le projet
qui a le DR le plus court.
4.5.4 Limites
Le critère du DR souffre des limites suivantes :
- La valeur temporelle de l’argent est ignorée
Soient deux projets caractérisés par les flux suivants :
Année 0 1 2 3 4
Projet A - 1 000 + 400 + 300 + 200 + 100
Projet B - 1 000 + 100 + 200 + 300 + 400

Selon le critère du DR, on indifférent entre les deux projets car DRA = DRB = 4 ans. Or, au taux
d’actualisation de 15 % par exemple, VANA = - 237 > VANB = - 336.
Pour pallier à cette limite, certains auteurs calcul un délai de récupération en utilisant des flux
de liquidité actualisés.
- Les flux postérieurs au DR sont exclus de l’analyse
Soient deux projets caractérisés par les flux suivants :
Année 0 1 2 3 4 5 6
Projet C - 1 000 + 250 + 250 + 250 + 250 0 0
Projet D - 1 000 + 100 + 200 + 300 + 400 + 400 + 350

Selon le critère du DR, on indifférent entre les deux projets car DRC = DRD = 4 ans. Or, au taux
d’actualisation de 15 % par exemple, VAND = + 14 > VANC = - 286.
- Le seuil fixé pour le DR n’est pas un seuil de rentabilité. La VAN du projet ayant un
DR inférieur au seuil fixé par l’entreprise n’est pas nécessairement positive.
4.6 Le taux de rendement comptable
4.6.1 Définition
Le taux de rendement comptable (TRC) mesure la rentabilité générée par unité de capital
investi.
4.6.2 Calcul
Le TRC (appelé aussi : Return On Investment (ROI)) est défini par le ratio des deux grandeurs
suivantes :
- le résultat d’exploitation comptable après impôt que le projet dégage en moyenne sur
l’ensemble de sa durée de vie ;
- la valeur nette comptable de l’investissement mesurée en moyenne sur la durée de vie du
projet.
Exemple :
Considérons un investissement qui nécessite au départ l’acquisition d’un matériel au prix de
10 000 amortissable en linéaire sur 3 ans.
Année 1 2 3
Chiffre d’affaires 6 000 8 000 10 000
- charges d’exploitation (hors
amortissements) 1 576 2 849 4 122
= EBE 4 424 5 151 5 878
- dotation aux amortissements 3 333 3 333 3 333
= Résultat d’exploitation avant impôt 1 091 1 818 2 545
- impôt 272,75 454,5 636,25
= Résultat d’exploitation après impôt 818,25 1 363,5 1 908,75

Le résultat d’exploitation après impôt moyen est don : (818,25 + 1 363,5 + 1 908,75) / 3 =
1 363,5.
L’investissement moyen est déterminé ainsi :
Année 1 2 3
Valeur en début d’année (1) 10 000 6 667 3 334
- dotation aux amortissements 3 333 3 333 3 334
= valeur finale en fin d’année (2) 6 667 3 334 0
Valeur moyenne de l’année [(1) +(2) /2] 8 333 5 000 1 667

La valeur nette comptable de l’investissement, mesurée en moyenne sur la durée de vie du


projet est donc : (8 333 + 5 000 + 1 667) / 3 = 5 000.
𝑅é𝑠𝑢𝑙𝑡𝑎𝑡 𝑛𝑒𝑡 𝑚𝑜𝑦𝑒𝑛 1 363,5
𝑇𝑅𝐶 = = = 27,27%
𝑉𝑎𝑙𝑒𝑢𝑟 𝑁𝑒𝑡𝑡𝑒 𝐶𝑜𝑚𝑝𝑡𝑎𝑏𝑙𝑒 𝑚𝑜𝑦𝑒𝑛𝑛𝑒 𝑑𝑒 𝑙′𝑖𝑛𝑣𝑒𝑠𝑡𝑖𝑠𝑠𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡 5 000
4.5.3 Règle de décision
Le critère du TRC constitue un critère de choix dans le cas d’un seul projet :
- Un projet est accepté si son TRC est supérieur à une norme fixée par l’entreprise ;
- Un projet est rejeté si son TRC est inférieur à une norme fixée par l’entreprise.
Le critère du TRC constitue également un critère de classement : il s’agit de préférer le projet
qui a le TRC le plus élevé.
4.5.4 Limites
Le critère du TRC souffre des limites suivantes :
- ce critère ignore la valeur temporelle de l’argent en raisonnant sur des moyennes ;
- il ignore le taux d’opportunité des placements disponibles ;
- il raisonne sur des résultats comptables qui ne constituent en aucune manière des flux de
liquidité ; en particulier les variations du BFR ne sont pas prises en considération ;
- il ignore la valeur de revente de l’investissement à la fin de la durée de vie ;
- il requiert la fixation d’un seuil qui peut être soit inadéquat soit arbitraire ;
- il peut conduire à de mauvaise décisions la VAN du projet choisi en se basant sur ce critère
n’est pas toujours positive.

Section 5 : Comparaison de projets à durées de vie différentes

Lorsque des projets ont des durées de vie différentes, les critères utilisés précédemment
deviennent moins pertinents. Il est courant de retenir des critères très empiriques pour évaluer
le projet le plus intéressant, tel que :
- Le critère du plus petit commun multiple des durées de vie (PPCM)
Soit un projet A d’une durée de vie de 3 ans et un projet B d’une durée de vie de 5 ans. La durée
sur laquelle les projets devraient être évalués est égale à 15 ans (le PPCM de 3 et 5). On suppose
que le projet A se répètera 5 fois à l’identique et que le projet B se répètera 3 fois à l’identique.
Cette procédure parait irréaliste dans une conjoncture difficilement prévisible sur 15 ans.
- Retenir la durée de vie la plus courte
Retenir la durée de vie la plus courte des deux durées de vie à condition de prendre en compte
la valeur résiduelle de l’investissement le plus long à la fin de l’année d’étude lorsqu’on évalue
le projet ayant la durée de vie la plus longue.
- Retenir la durée de vie la plus longue
Retenir la durée de vie la plus longue des deux durées de vie à condition de considérer que les
sommes provenant de l’investissement le plus court seront placées jusqu’à la fin de l’année
d’étude lorsqu’on évalue le projet ayant la durée de vie la plus courte.

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