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UNE "RISĀLA" D'IBN TAIMĪYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION

Author(s): HENRI LAOUST


Source: Bulletin d'études orientales , 1937-1938, T. 7/8 (1937-1938), pp. 215-236
Published by: Institut Francais du Proche-Orient

Stable URL: https://www.jstor.org/stable/41603416

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UNE RISALA D'IBN TAIMlYA

SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION


PAR

HENRI LAOUST.

Nous avons l'occasion de montrer plus longuement ailleurs'1' la place et


l'importance qu'a prise, dans l'œuvre et dans la vie d'Ibn Taimlya, la critique
de la doctrine de la répudiation et des solutions qui étaient traditionnellement
proposées par l'école sâfé'ite. 11 est peu de questions, en dehors de la théo-
dicée et du droit public, qui, dans le domaine des furu, aient été aussi
souvent traitées par Ibn Taimlya. Dans la chronologie encore quelque peu
incertaine de ses œuvres - comme, du reste, de la plupart des auteurs
musulmans même les plus célèbres - il est assez difficile d'établir, avec une
précision satisfaisante, les dates auxquelles se situent les principaux écrits que
le polémiste damascain consacra à cette question avec sa virulence coutumière.
Dans sa réfutation d 'al-Ihnaî^, le cadi mãlékite de Damas avec lequel il eut
ses derniers démêlés, Ibn Taimlya nous dit que ce fut durant son séjour au
Caire, vers 708-710 H., qu'il donna ses premiers Fatãwã. C'est à son retour à
Damas cependant que, selon toute vraisemblance, il dût composer ses risàia
polémiques les plus nombreuses, puisque ses biographes nous racontent
comment le šaili fut, sur l'ordre du Sultan, inquiété une première fois en
718, une seconde fois en 719, pour être finalement emprisonné à la Cita-
delle en 720, pour une durée de cinq mois environ. Nous connaissons les
titres de ses différents ouvrages, dont la plupart même nous sont aujourd'hui

(1) Cf. notre Essai sur les doctrines sociales et kilãb al-istigãta , plus connu sous le titre
Talhîs
politiques d'Ibn Taimlya (sous presse), LedCaire,
"ar-Radd c alã-l-Bakrl , Le Caire , impr. Saiafïya ,
LF.A.O. i346, p. 9.
(2) Kilãb ar-radd c alã-l-lhntfl , en marge du
38.

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accessibles^. L'un d'eux, déjà sign


graphie ou de littérature arabe, a
Iiisãlat al-igtima wa-1-iftirãk fi l-hi
a semblé mériter une traduction,
laquelle l'auteur y résume sa pensée
et juridique qu'elle présente.

I. Ce ne sont pas, en effet, de


simples discussions d'école qui con
des rapports du serment et de la
al-GauzIya<5) que les pratiques a
s'étaient communément établies
inconditionné de répudier sa femm
motifs les plus futiles, et les com
moder de cette situation de fait r
La doctrine sâfé'ite considérait comme licite l'habitude de réunir en une
seule formule les trois répudiations et, comme effective, une répudiation qui
se présentait cependant sous la forme d'un serment. Cette habitude d'une
répudiation inconsidérée et immédiatement définitive s'était d'autre part

(3) Voir à ce sujet la remarque ďlbu Kaiyim b. Abï-n-Nagâ par Takï-d-Dïn fAbd al-Ali b. Abï-1-
al-Gauzïya in al-Kiyâs fï-s-sar al-islamï , LeKâsim al-Gaïarï^ Badr ad-Dïn Hilãl b. 'Ali b.
Caire, i346, p. 175, et, pour Enumeration Hiïâl al-Gafarï; 'Abd as-Samad b. 'Abd al-Azïz
des principaux traités ďlbn Taimïya , Muhammad b. Ibrâhïm as-Sanhâgï, at-Tufï Sams ad-Dïn
b. Ahmad b. cAbd al-Hâdl, al-Uküd ad-durrïya Sawãb b. 'Abd Allah al-'Izzï; Muhammad b. fAbd
min manãkib saih al-Islãm Ahmad b. Taimïya , Allah b. Ahmad sibt lbn Rasïk al-Mâlikï. Cette
Le Caire, 1 356/i 9З8 , p. 34 et suiv. séance d'enseignement eut lieu le 27 rabf I de
(4) Cette risala a été publiée au Caire, en l'année 7 1 8. lbn Taimïya donna au cadi Kamãl
i34-i à l'imprimerie du Manar, par Muhammad ad-Dïn cUmar b. al-Ansarï la licence ( igãza ) de
ťAbd ar-Razzäk Hamza. On pourrait en traduire reproduire cette dissertation. Une signature d'Ibn
le titre : Bu serment de répudiation; rapports des Taimïya lui-même certifie l'authenticité du texte
deux notions (plus exactement de la réunion et de celte risala et de Yigãza.
(5) Ibn Kaiyim al-Gauzïya, at-Turtik al-hik -
de la distinction des deux notions). Cetle disser-
tation est un falwti. Elle fut lue et commentée mlxja fï-s-siyâsa as-sariya, Le Caire , 1 3 1 7, p. 17.
par l'auteur lui-même au cadi Kamãl ad-Din On reprochera d'ailleurs à lbn Taimïya de vou-
'Umar b. Saraf ad-Dïn Abï-l-Hair Muhammad loir s'insurger sans succès contre un état de fait.
Kamãl ad-Dín 'limar b. al-Ansãrl. Elle fut en- Cf. al-Kiyâs, op. cit., p. 176.
suite transmise à 'Ala5 ad-Dïn 'Alï b. Zain ad-Dïn

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UNE RISÃLA D'IBN ÏAIMlYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 217

traduite par l'obligation, pour les quatre rites, de sanctionner plus ou moins
tacitement la pratique du tahlil, ou conclusion d'un mariage intermédiaire
de complaisance, qui avait pour but de rendre l'épouse de nouveau licite à
son ancien époux.
C'est en moraliste et en juriste qu'Ibn Taimïya s'est dressé contre de telles
pratiques. D'une part, l'abus de la répudiation a pour conséquence d'ébranler
la solidité de l'institution familiale, et, au surplus, de méconnaître les droits
de la femme à être traitée en pleine justice. Cette dernière considération
laisse déjà se dessiner, dans la doctrine d'Ibn Taimïya, un féminisme discret
dont on trouvei'ait aisément d'autres exemples, et qui devait aboutir, chez
lbn Kaiyim al-Gauzïya, à une franche justification de la monogamie pour des
raisons de justice sociale. C'est en juriste ensuite qu'Ibn Taimïya s'attache à
l'étude du problème, car la pratique du tahlïl lui a toujours paru jeter le
discrédit le plus évident sur le système législatif de l'Islam , qui se révélait
ainsi impuissant à soumettre à une norme la réalité sociale. Rendre donc la
Loi à la fois plus rationnelle, plus juste et, en même temps, plus proche du
réel, tel fut le but qu'Ibn Taimïya s'est assigné dans celte courte risãh.

II. La doctrine d'Ibn Taimïya présente ensuite un intérêt méthodologique.


Elle s'eiforce de trouver dans la San a elle-même les facteurs de son évo-

lution. Il est donc intéressant de se demander à quels principes généraux du


fikh elle va faire appel. Le premier des principes qu'Ibn Taimïya met en
œuvre est celui de la primauté de l'intention ( nïya ), conçue, non point comme
une velléité plus ou moins consciente , mais bien comme un acte de volonté
effectif ( kasd , irãda ). Un hadït fort célèbre, qui se trouve dans le Sahlh d'al
Buhârï et dans celui de Muslim, faisait dire au Prophète : «Les actes ne sont
que par les intentions, d lbn Taimïya a consacré, au commentaire de ce hadït,
une risàia ^ fort intéressante qui a été récemment publiée à Damas. On peut,
à la lecture de cette dissertation, achever de se convaincre qu'Ibn Taimïya a
fait de ce principe un usage beaucoup plus systématique que les autres fukaha.
Il n'est certes aucune pratique cultuelle ( 4bãdãl ) qui ne suppose, pour être
valable, une intention réelle. Mais lbn Taimïya étend l'application de ce
(6) Sarh hadït : chinama l-amãl bi-n-nïyat wa innama li-kuïl imr 3 ma nawàn , Le Caire, impr.
ai-Munlrïya, i354,pp. 3o.

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principe au domaine des muãmalãt,


dans le fikh, d'opposer à celui des 4bã
taire d'Ibn Taimïya s'efforce sans cess
contrat - même de mariage , d'où lim
n'est valable sans le consentement d
la formule utilisée, donc sans l'affir
intention ( kasd ), dit par là même but
A la notion toute subjective d'intentio
de l'institution, celle de but. La doc
tiellement finaliste , organiciste et fo
le formalisme du fikh traditionnel,
encore excessif.

De là un second principe, corrélatif


avant tout, le but, que la Sarta assig
instituée par Dieu pour permettre à
d'en prendre une autre, s'il appert,
ne pouvait lui convenir. Le talãb est d
choses permises, elle est celle «qui r
réglementé d'une façon telle qu'il laiss
revenir sur sa décision et de renouer
répètent inlassablement Ibn Taimïy
de l'existence de trois répudiations
son maître, à savoir que la Loi de l'Isla
entre les Lois du Judaïsme et du C
supérieure , Ibn al-Kaiyim , dans son P
que les prescriptions de la Sana touc
plus rationnelles, les plus justes et l
rigoureusement le divorce. Dans la T
le droit de la reprendre tant qu'elle

(7) De là la classification
Rida : Leassez originale
Califat des
dans la doctr
questions juridiquesBeyrouth
dans l'œuvreig38,p. i54.
d'Ibn Taimïya.
Cf. noire Essai. L'idée du
(8) reste
Ibn devait être
Taimïya, re- III
Fatãwã,
prise de nos jours (9) Ibn
par Kaiyim al-Gauziya,
les modernistes musul-
mans. Cf. notre traduction
p. 120. du Hilãfa de Rasïd

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UNE RISÄLA D'IBN TAIMÏYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 219

droit sur elle dès qu'elle a conclu une nouvelle alliance. Et Ibn al-Kaiyim
d'ajouter qu'il y a, dans de telles stipulations, une évidente sagesse : l'homme
qui sait qu'il n'aura plus le droit de reprendre sa femme, s'il la re'pudie et
si elle vient à contracter un nouveau mariage , est par là même enclin à ne
faire du talãk qu'un usage des plus prudents. Ces stipulations fort rigoureuses
s'adressent certes à une Communauté bien connue pour sa violence ( šidda ) et
son obstination ( isrãr ). Elles sont quelque peu atténuées dans l'Islam qui a
permis aux hommes beaucoup plus de bonnes choses ( taiyibãt ) que les autres
confessions, mais, même subsistant avec cette atténuation, elles n'en indiquent
pas moins avec quel sérieux et quelle gravité il convient d'user du talãk :
c'est précisément cette dernière considération qui, jointe à la première, va
nous expliquer les rapports établis par Ibn Taimlya entre la répudiation et
le serment.

III. On ne saurait méconnaître en effet l'intérêt juridique proprement dit de


la doctrine d'Ibn Taimiya. Le Coran et le hadit édictent les principes les plus
généraux du talãk, mais la véritable systématisation a été faite par les fukaha.
Au point de vue de la forme, les juristes distinguent trois types de répu-
diation. Le talãk peut être immédiatement exécutoire, ainsi lorsque le mari
dit à sa femme : «Tu es répudiée ( mutallalfa ) ou je t'ai répudiée. n Lorsque
le mari prononce X une telle formule expréssement 1 , ' écrit Muwaffak • ad-Din(10' '
X 1 ' • '

la f
ten
de r
la r
peut
une
tem
d'un
deux
dans
cons

(10) A

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de la distinguer; elle suit le statut jur


mais du talãk mu allah.

Tout autre est la position d'Ibn Ta


serment de répudiation à une ré
rangera certaines répudiations con
ments (12l Force est de ne point s'
formule, mais de s'interroger avant t
le talãk ou le hilf. H ne peut y avoir
l'intention de se séparer de sa femm
de la condition lui est plus pénible
en l'occurrence le talãk : lorsque le m
vient à se mal conduire, il n'y a pas
diation conditionnelle. Si, par contre,
forme du ta4ik, n'a d'autre but, dan
exemple un facteur d'exhortation ou
une fin autre que le talãk , il n'y a
Si donc il n'y a plus qu'un serment, l
kaffãra. Par quelle argumentation dét
lbn Taimlya parvient-il à celte dern
demander aux pages qui suivent et qu
le vif le travail d'un juriste dans l'éla

(U> A la suite de des serments


la doctrine et du ta'ltk
sâfé'ite da
qui est
longuement p. 35o-35i.
défendue par l'adversaire d'Ibn Tai-
mlya, l'auteur des <n) A comparer
biographies avecTakî-d-
Sâfé'ites, les aut
Dln as-Subkl, dans ses deux
Taimlya risala polémiques
a consacrées à cette q
Nal/ Л al-igtima trouvera
mal-if lirãk dans ses Falãivã,
fi masâ'il al-aimãn
ma-t-lalãk et tut- Xapolémiques posthumes
zar al-muhakkak etbi-t-
fi-l-hilf les
lalãk al-mu aliale, Damas 1 3 h 7 , notamment
qui reprirent par la suiteр^5б
la
(l2) D'où une Essai.
étude de la forme grammaticale

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UNE RISÂLA D'IBN TAIMÏYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 221

Au nom de Dieu le Clément , le Miséricordieux.

Il n'y a de force et de puissance qu'en Dieu !

Louange à Dieu! C'est Lui à qui nous demandons aide et pardon. Nous
Lui demandons de nous protéger contre les maux que nous portons en nous
et contre les mauvaises actions que nous pouvons commettre. Ceux que Dieu
guide, nul ne saurait les e'garer; ceux que Dieu égare, nul ne saurait les
diriger. Nous témoignons qu'il n'y a pas d'autre Dieu qu'Allah, que Dieu est
Un, sans associé. Nous témoignons que Muhammad est l'esclave de Dieu et
son Envoyé. Que les bénédictions de Dieu soient sur lui et sa famille, ainsi
que le salut!
Voici une étude succincte et synthétique des questions que posent les ser-
ments et la répudiation, des cas où ils sont liés l'un à l'autre et de ceux où
on doit les dissocier. Cette question peut, en effet, relever des serments et
nullement de la répudiation. Elle peut parfois aussi relever de la répudiation,
sans avoir le moindre rapport avec le serment. Elle peut enfin participer
de l'une et de l'autre.

Les formules relatives à la répudiation se répartissent en trois catégories;


de même les formules de serment. Ce sont des formules d'exécution, des
formules de conditionnement, ou des formules de serment.
La formule d'exécution consiste à prononcer la répudiation d'une façon
absolue, sans la subordonner à une condition ( sifa ) ou à un serment. Par
exemple, celles-ci : crTu es répudiée ( mutallaka ou tãlika )«. «Une telle est
répudiée«. ccTu es [7] répudiée ( tallãk )« ou bien : crJe t'ai répudiée«, en
un mot, toutes les autres formules dans lesquelles on emploie le verbe, le
masdar, le participe actif ou le participe passif. Cette répudiation est la cr répu-
diation exécutoire« ( mungiz ). On appelle aussi : talãk mursal, cr répudiation
immédiate « , talãk múllale, cc répudiation absolue , c'est-à-dire qui n'est subor-
donnée à aucune condition. Ces formules entraînent la répudiation. Elles n'ont
rien d'un serment que l'on est autorisé à tenir ou non; elles ne comportent

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pas de kaffãra^, de l'avis de tous


terminologie, ne désignent pas cett
de hilf. Mais il y a cependant des g
et dont l'intention est de prononcer
Les formules de répudiation qui se p
consistent à dire : ce Que la répudia
ferai pas telle chose, n L'homme ju
autrui, pour s'interdire quelque cho
l'authenticité d'une nouvelle ou la dém
la fois la répudiation et le serment.
unanime des philologues; elles se p
serment. Ce sont aussi des serments
admettent sans discussion la nécessit
ils discutent longuement de leur c
rangent de préférence dans la catég
le divorce doit être prononcé lorsq
au contraire, les rangent de préfé
estiment qu'elles ne sauraient entraîn
du serment est tenu à la kaffãra d
à rien.

Les mêmes discussions se retrouvent


sous la forme d'un vœu , ainsi lorsqu
complirai le pèlerinage, je jeûnerai
aumône. n Toutefois, cette dernièr
longs développements [8] de la par
autres. Les Salaf disent : a C'est là u
types de serments étaient, en effet
la différence des serments de répud
question ne devinrent fréquentes q
donnèrent lieu aux deux thèses que
Les troisièmes formules de répudiat
ment, par exemple : cr Si j'entre da
(14) Sur la nalure de Ia kaffãra, ou rachat, v
al-Gauzîya, in Kiyâs, op. cit., p. 1 55 et 17 h.

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UNE RISÄLA D'IBN TA1MÏYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 223

cette répudiation la répudiation conditionnelle ( talâk bi-sifa ); celui qui la


prononce entend parfois ne formuler qu'un simple serment et répugne à
la répudiation quand la condition vient à se réaliser; parfois, on veut au
contraire que le divorce soit prononcé dès que la condition est donnée.
Dans le premier cas, l'effet de cette formule est celui d'un serment de
répudiation : l'opinion des juristes est unanime. Si l'on dit : « Si je viens à
jurer, je serai tenu d'affranchir un esclave я, et si l'on vient alors à prononcer
un serment de répudiation, on commet effectivement un parjure : sur ce
point, aucune discussion, à notre connaissance, n'a été soulevée par les
savants les plus connus. Il en est de même de toutes les autres formules où
l'on se lie à une condition, avec l'intention de prononcer un serment; ainsi :
cr Si je fais telle chose /j'affranchirai un esclave, mes esclaves seront libres,
je serai tenu d'accomplir le pèlerinage ou de jeûner un mois, ou enfin mes
biens seront distribués en aumônes ou en cadeaux , etc. n De semblables propos
sont à mettre sur le même rang que les suivants : « L'affranchissement me lie
si je fais telle chose; je serai obligé d'accomplir le pèlerinage, je ne ferai pas
cela, etc.1» Toutefois, ce qui vient en second lieu dans les formules de condi-
tionnement vient en premier lieu dans les formules de serment; ce qui est
nié dans un cas est affirmé dans l'autre.

Dans le deuxième cas, on veut que la répudiation soit effective dès que la
condition est donnée. Ces formules entraînent la répudiation dès que la con-
dition se trouve réalisée, comme dans le cas de la répudiation exécutoire.
Sur ce point, tous les juristes sont d'accord, les Anciens comme les Modernes
(Halaf). II en est de même lorsque l'on subordonne la répudiation à un
moment, lorsque l'on dit, par exemple : et Tu seras répudiée au début du
mois» [9]. De nombreux savants disent que, selon Yigma, une telle répu-
diation conditionnelle a effectivement lieu, que, à leur connaissance, elle ne
fit pas à l'origine l'objet d'un désaccord, mais qu'Ibn Hazm, toutefois, prétend
que semblable formule n'entraîne pas la répudiation - doctrine qui est aussi
celle des Imãmiya. Ibn Hazm cependant, dans son Kitãb al-igma, affirme que
les docteurs, à l'unanimité, enseignent que de telles formules entraînent la
répudiation. Selon cet auteur, il y a discussion uniquement lorsque ces formules
se présentent sous l'aspect extérieur ( mahrag} d'un serment: entraînent-elles,
ou non, la répudiation et, dans la négative, est-on tenu ou non à une kaffãra?

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Ш HENRI LAOUST.

Les trois opinions ont été soute


les autres formules similaires de

Cette forme de répudiation (nou


que l'on veut véritablement vo
non celle qui n'a qu'une valeu
exemple celle-ci : <r Lorsque le
être ou non considérée comme
Selon la première, c'est un serme
des deux opinions soutenues
elle n'est pas un serment : telle e
tion soutenue dans le rite hanb
juste au point de vue juridique
Passons maintenant aux trois
prend les serments contractés a

(15) Celte faveur


classification du vœu , et
tripartite leserm
des pro
chez Ibn dans
Taimlya est les termes
assez suivants
originale. On n
tingue en vœu
général , aud'accomplir une
point de vue de œu
la f
que deux faire,
catégories de en raison de
serments cette
: les ser
conclus cfCelui
au nom de Dieu ( qui a fait
bi-llãh ) etle vœu
les se
conclus par des lui obéir.»
créatures ( Si cet acte de
Ы-1-mahlükä
premiers seuls moyens
sont des - ainsi un réelle
serments vieill
contractés ( de s'imposer
muhtarama unen
); donc, jeûne
cas d
jure, ils sont supporter
passibles d'une-kaffära
l'homme est
; les s
serments , par la kaffära
contre du serment,
, constituent c
un act
sociationnisme etcr
, àCelui qui ,formule
ce titre un
s'ils ne comp
pas de kaffära, de exigent
ils tenir a pour
de rachat
celui la
qui les
mulés un acte de contrition
Cette (
doctrine tauba ). -
présente
doctrine avait au point
pour de vue
principal de la con
inconvénie
rendre Loi , explicable
difficilement celui de conduire
le vœu ( àn
qui n'entrait tions
plus et
ainsi d'édicter
dans de
la même nou
cat
juridique que le principes
serment que
(hilf).
l'onL'exemp
formul
Muwaffak ad-Dln Dln,
b. en traitant
Kudâma estdes serm
typique
égard. La ' Umda chapitre
(n° 1зБ) (n° 126, le
étudie p. vœu
1З2)
le chapitre qui, ler
dans la réglementation
la règle suivante : rrL
nourriture, traite
quedu casle
dans de force
cas majeu
du serment
l'un deprincipe
rum). On sait qu'un ses noms, l'un de
général
Sarta est que la sence , lève
darûra commeles sa science
interdicti
plus strictes. sa toute
Mais puissance est
une exception , sa àgra
fa

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UNE RISALA D'IBN TA IM Ï YA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 225

serments formulés en faveur de Dieu ( U-llãh ), la troisième les serments


contractés au nom ou en faveur d'un autre que Dieu (l>i gair Allah ou li gair
Allah).
Les serments de la première catégorie, où l'on jure au nom de Dieu, sont
considérés par le Coran, la Sunna et ïigma comme réellement contractés;
ils sont passibles d'une kaffara.
Les serments de la troisième catégorie, ceux où l'on jure au nom ou en
faveur d'une créature, comme lorsqu'on jure par le tugilt, par le père, par la
КаЪа, etc., ne sont nullement des serments respectables, ils n'ont pas été
effectivement contractés et n'entraînent pas de kajfãra en cas de parjure, de
l'avis unanime des savants. 11 est toutefois interdit de prononcer de sem-
blables serments. Il est établi, dans le Sahih, que le Prophète a dit : cr Celui
qui prononce un serment en disant : rrPar Al-Lãt et 4J/.zan doit dire : irli n'y a
d'autre Dieu qu'Allah n De même que lorsque l'on jure par les Anges et
les Prophètes de l'avis unanime des docteurs. En ce qui concerne le serment
par le Prophète Muhammad, deux doctrines, il est vrai, ont été soutenues
dans le rite hanbalite, mais, selon l'opinion dominante, ces serments ne
sauraient être considérés comme ayant été contractés et ne comportent pas
de kajfãra.

son pacte , ou la confiance quii mérite , sauf dans que Dieu«; à la seconde forme de lauhïd , 011
le cas du vœu que Ton utilise comme serment; rattachera les serments faits »pour Dieu«, et,
la kaffara est alors analogue à celle du serment par antithèse, ceux qui sont faits crpour d'autres
proprement dit. r> - Une telle doctrine du ser- que Dieu«. Dans la hiérarchie des valeurs mo-
ment et de la kaffara oblige en outre 'es fukahã' rales , le lauhïd al-uliihïya vient avant le lauhïd ar-
à d'autres inconséquences flagrantes : on admet- rubûbïya. Donc le vœu sera de slricte obligation ,
tra, par exemple, comme valable le serment fait mais, en cas de force majeure, pas de kaffara ;
au nom du Prophète et , par voie de conséquence , on sera même récompensé pour avoir eu l'inten-
surtout si Ton admet le culte des saints, tout tion de l'accomplir. Le serment pour Dieu et le
serment fait par un saih ou même un chef de serment par Dieu comportent une kaffara; les
confrérie. La doctrine d'Ibn Taimïya est plus autres serments, étant associationnisme, exigent
rationnelle; elle se fonde toujours sur sa fameuse une lauba proportionnée à la gravité de la faute.
distinction des deux lauhïd, le tauhld ar-rubûbïya - Bon exposé de la doctrine dans Ibn al-Kaiyïm ,
et le lauhïd al-ulûhïya. (Pour l'analyse de ces Kiyàs, 179.
deux notions, cf. notre Essai.) A la première (l6) Al-Buhârï, Saltili y Б2, 2 6; 83, Ů, 5, 7.
forme de tauhld , on rattachera la catégorie des On trouve la même prescription dans le Musnad
serments faits *au nom de Dieu« , et la catégorie d'Ahmad b. Hanbal, cf. Wensinck, Hundbook ,
antithétique des serments faits «au nom d'autre p. 178 (sub. Oaths).
Bulletin d'études orientales , t. VII-V1II. 29

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226 HENRI LAOUST.

Quant aux serments en faveur d'a


vœux en faveur des idoles et des é
l'on dit : «Si je fais telle chose, je s
en faveur de telle église, ou du tomb
tuent des vœux, ce sont de l'associ
constituent également de l'association
de glorification ( tazïm ), par exem
telle chose, je suis tenu à lin don.« S
de répugnance, quand par exemple un
je suis juif ou chrétien«, ceux qui p
être considérés comme association
pareil cas, deux doctrines sont sou
entachés d'associationnisme , on doit
pas tenu de les exécuter, ni de payer
s'imposent que lorsque ces serment
nom de Dieu.

Les serments contractés pour Dieu ( U4lãh ) se divisent en deux catégories.


Dans les uns, on se donne pour but de chercher à se rapprocher de Dieu, et
non seulement de chercher un encouragement ou une interdiction : c'est en
cela que consiste le vœu (narfr). 11 est en effet établi dans le Sahlh que le
Prophète a dit : ft La kaffãra d'un vœu est la même que la kaffãra d'un ser-
menti. « Il est également établi que le Prophète a dit : «Que quiconque a
fait le vœu d'obéir à Dieu lui obéisse. Que quiconque a fait le vœu de désobéir
à Dieu ne lui désobéisse pas(18l « L'homme donc qui veut, par un vœu,
s'engager à obéir à Dieu, est tenu de lui obéir; s'il a fait le vœu d'accomplir
un acte qui n'est pas une marque d'obéissance à Dieu, il n'est pas tenu de
s'exécuter; il n'est pas permis enfin de tenir un vœu dont l'objet est une chose
interdite. Mais l'homme qui ne tient pas un vœu fait pour Dieu est astreint à la
kaffãra du serment, d'après la majorité des Salaf. C'est la doctrine d'Ahmad,
c'est aussi celle d'Abu Hanlfa, d'une manière absolue, disent les uns, uni-
quement lorsque le vœu a le sens d'un serment, disent les autres.

(17) Al-Buharï, Sahlh , 83 , i ; 84 , 9 , 1 o. niques. Cf. Wensinck, Handbook, p. 27 h (sub.


(,8) Le même hadït se trouve avec quelques vow).
variantes dans la plupart des répertoires cano-

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UNE RISALA D'IBN TA1MÎYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 227

Le deuxième groupe de serments de cette cate'gorie (li-llãh) consistent dans


les serments dont le but est l'exhortation, l'interdiction, l'approbation, le
démenti : telle est le serment où l'on formule un vœu, une répudiation, un
affranchissement, le z%hâr^' celui où l'on s'engage à quelque chose d'interdit.
Par exemple : « Si je fais cela , j'accomplirai le pèlerinage , je jeûnerai pendant
une année, je donnerai mes biens en aumône, j'affranchirai mes esclaves ou
je répudierai mes femmes, d Les serments de ce genre relèvent à la fois du
serment, de la répudiation, de l'affranchissement, du vœu et du zihãr. Les
savants, à leur sujet, enseignent trois doctrines :
i° L'homme est tenu d'exécuter ce à quoi il s'est engagé, s'il vient à
commettre un parjure, car il s'est engagé [12] aux conséquences qu'entraîne
la réalisation de la condition : la condition étant donnée, la conséquence est
pour lui obligatoire. Tel est le vœu de faire quelque bonne action, si telle
condition est donnée.

2° Ce serment n'a pas été contracté. Il n'implique rien dans le cas où


l'homme manque à sa parole : il ne comporte pas de kaffãra et n'entraîne pas
l'obligation d'exécuter ce à quoi l'on s'est engagé, car il a été contracté au
nom d'un autre que Dieu. Le Prophète a dit : «Que quiconque fait un ser-
ment le fasse au nom de Dieu ou se taise, я Dans une autre version , donnée
par le Sahïh, il dit : s Ne jurez que par Dieu*20'. »
3° Ces serments comportent une kaffãra en cas de parjure, comme les
autres serments. Certains savants établissent une distinction , parmi les ser-
ments contractés pour Dieu, entre ceux où l'on s'engage à accomplir quelque
œuvre obligatoire (wugûb) (par exemple le serment de vœu), et ceux où l'on
s'engage à s'interdire ( tahrïm ) quelque chose (ces derniers sont les serments
de répudiation et d'affranchissement). Dans le premier cas, disent-ils, une
haffãra est exigée, comme dans tout serment, en cas de parjure. Dans le
second, on est tenu d'exécuter ce qui a été conditionné, c'est-à-dire ce que

(19) Ou assimilation injurieuse; il a lieu lorsque vante : ff Je jure que ton dos m'est comme le dos
le mari déclare que sa femme (ou une partie de ma mère." Dans la doctrine d'ibn Taimïya,
du corps de sa femme) lui est prohibée au le zihãr peut être l'équivalent d'une répudiation
même litre qu'une autre femme parente au degré ou d'un simple serment selon l'intention du
prohibé, ou qu'une partie du corps de cette mari.
dernière. La formule type de zihãr est la sui- (20) Wensinck, op. cit., p. 178.
29 •

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228 HENRI LAOUST.

l'on a juré de faire, au cas où l'on


premier cas, en effet, ce à quoi on s
on ne saurait se libérer qu'en l'exé
faire, on peut se racheter par une
s'interdire quelque chose, et celte i
donnée : on ne saurait se racheter pa
La troisième doctrine est celle qu
de l'expérience. Elle ressort aussi d
ensemble, ainsi que nous l'avons ex
Dieu a dit dans son Livre : «Mais i
que vous avez contractés. Leur rachat
ces mots : tt Telle est la kaffãra de v
dit encore : et Dieu vous a permis d
ll est établi dans le Sahîh que le Prop
puis constate qu'il est préférable d'
férable et se délier de son ancien
englobe tous les serments des Musu
prit des textes.
Au point de vue de la lettre, Dieu a
vous délier de vos serments» et : et
discours s'adresse aux croyants. To
règle : un serment fait au nom de
saurait être rangé dans la catégori
vertu de cette parole du Prophète

(2,) Coran , v, 91. ment par lequel on s'enga


(22) Ibid., Lxvi, 6.vœu , à qui Ton a donné plu
(23) Wensinck, Handbook , op. de
le nom de «vœu cit., p. 78.
dispute
(21) Ges cr serments des Musulmans
serment я sont A0
de répudiation; seu-
l
lement au nombre de six et, 5°
chissement; précise à ce suje
le serment d'in
lbn Taimïya, «on quichercherait
en consiste par exemple àud
vainement
septième » ; ce sontdra
: i° pour moi illicite
les serments sian
faits je nom
fais
de Dieu, et tous ziliãr
ceux , lorsque
qui l'on dit
ont la même : rr
signif
cation ; on comme
rangera le dos
dans cette de ma mère
catégorie si
les ser-
ments dans Fatãwã
lesquels , III,
on jure dep. 35o; cf. auss
commettre un
acte d'infidélité Gauzïya,
{kufr) bien Aksâm al-Kur'ân.
qu'il y ait désaccor
entre les juristes sur ce dernier point; 20 le ser

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UNE RISALA D'IBN TAIMÏVA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 229

est. un associationniste. n Cette tradition est, rapportée par les auteurs de


Sunan, Abu Dâwûd et d'autres'25). Ces serments donc ne sauraient entrer
dans la catégorie des « serments des Musulmans n. Au contraire, les serments
faits au nom de Dieu ou pour Dieu sont des et serments des Musulmans», ils
suivent donc la règle énoncée plus haut. C'est pourquoi lorsqu'un homme
dit : ffLes serments des Musulmans ou les serments de la baia <26' me lientn
et s'il a l'intention d'y faire entrer la répudiation et l'affranchissement, la
répudiation et l'affranchissement en font effectivement partie. Cette doctrine
est enseignée par tous les juristes et je ne connais pas sur ce point de désac-
cord. On ne saurait par contre ranger dans cries serments des Musulmans n
un serment fait au nom de la Ka'ba ou de quelque autre créature. Or, un
serment qui fait partie des cr serments des Musulmans я est réglementé par
les versets précédents.
Passons maintenant à l'esprit des textes. Dieu a instauré la hajfâra dans les
serments des Musulmans de manière à ce que leurs serments n'acculent pas
les croyants à une obligation ou à une interdiction sans issue, comme c'était
le cas à l'origine de l'Islam, avant l'établissement des kaffãrãt (21h A ce moment,
on n'avait pas d'autre ressource que de tenir son serment. S'il existait alors
des serments sans kaffâra, c'était [14] en raison de l'existence d'inconvénients.
De même Dieu a dit : et N'exposez pas Dieu à vos serments (de manière à vous
empêcher) de faire le bien, d'être pieux et de mettre la concorde parmi les
gens f28'. » En d'autres termes , Dieu leur a interdit d'utiliser les serments
comme un moyen qui put les empêcher d'accomplir un acte ordonné par
Dieu, de crainte qu'ils ne refusent d'obéir à Dieu en raison d'un serment
contracté. S'il avait existé des serments que l'on pût contracter sans avoir

(25) Ce sont tous les serments faits par une puisqu'ils sont une manifestation caractérisée
créature , comme les serments où Ton invoque la du kufr. Falãwã, 111, p. 35o. Il est intéressant
Kacba , la tombe ďun saih, la prospérité du sul- de noter qu'il s'appuie ici sur des liadïts qui se
tan, le prestige de quelque personnage; tous trouvent dans Abu Däwüd, 21, 3 et at-Tirmidï,
les f ulama 5 sont d'accord pour réprouver énergi- 18, 8, 9, 18.
quement de semblables serments, mais tous (2(5) Sur ce serment particulier de la haica,
cependant ne comprennent pas cette réprobation cf. Falãwã , III, p. 35 1.
de la même façon; pour les uns, ils sont repré- (27) La kaffâra a été en effet édictée par le Co-
liensibles, pour d autres, interdits, lbn Taimïya, ran , v, 91.
pour sa part, les considère comme interdits (28) Coran, и, 2 2 4.

Bulletin d'études orientales, t. V11-VI1I. 3o

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230 HENRI LAOUST.

la faculté de se racheter par une ka


moyen d'échapper à l'obéissance de
De même Dieu a dit*29': «A ceux
conjugaux, on fera un répit de quat
Dieu est clément et miséricordieux. S'
entend tout et sait tout.« Al-îla es
par ce terme qu'un homme jure de
S'il juré au nom de Dieu, on doit le co
de continence (mâfe); s'il jure pour
vœu, de zihãr, de répudiation ou d'aff
v С
des savants, comme Abu Hanlfa et Mãlik, as-Sãfil С dans s
et Ahmad. Certains savants ne rapportent pas de désaccor
comme par exemple Ibn al-Mundir et d'autres. On raco
dit : «Tout serment qui interdit à un homme d'avoir
femme constitue un lia. n Dieu a donné le choix au müh ent

s'exécuter (yafi3) ou répudier. S'exécuter, c'est avoir de


L'homme a donc à choisir entre la possibilité de conser
conformant au bon usage ( ma ruf ), ou de la laisser av
S'il s'exécute et a des rapports avec sa femme, celle-ci o
et le mari est considéré comme la conservant selon le b
cr S'ils s'exécutent, (sachez que) Dieu est indulgent et
Le pardon [15] et la miséricorde de Dieu en faveur du m
de tout péché et lui permettent de garder sa femme.

(29) Coran, n, 2 36. tradition d4bn cAbbãs qui suit, Ibn Taimîy
(30) On entend par ilãy le serment de le
range donc conti-
zihãr dans le genre juridique d
lla',
nence : le mari jure de ne plus mais
avoir deil y voit un serment de continen
rapports
ďune
avec sa femme. Mais en vertu des particulière
droits qu'ellegravité, car il consiste, e
a sur le corps de son mari, même
la femme peut,
temps que au
dans un serment de contine
terme d'un délai de h mois, mettre son mari
proprement dit, en
dans une assimilation injurieu
demeure de la répudier ou D'où
de reprendre
aggravation
les de la kaffãra : elle consis
à affranchir un esclave croyant, à observer
rapports conjugaux; en cas de refus de la part
jeûne
du mari, elle peut demander de la
au cadi deux mois on à nourrir soixante pa
dissolu-
tion du mariage. La kaffãra du
vres.
serment de con-
(31)
tinence est la même que celle des Allusion
autres au verset coranique (ir, 229) sur
serments.
Coran, LViii , 4-5. Vor aussi Pedersen
lequel in les
sont fondés El,rapports conjugaux.
(32) Coran, 11, 2ü6.
II, p. 8З2 (sub kasam). En s'autorisant de la

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UNE RISALA D'IBN TA1MÏYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 231

dispensent pas de la kaffãra, ainsi que Dieu l'a dit : <rÓ Prophète, pourquoi
interdis-tu ce que Dieu t'a permis? Tu cherches la satisfaction de tes femmes.
Or Dieu est indulgent et miséricordieux. 11 vous a permis de vous délier de
vos serments 11 Dieu donc a montré qu'il était indulgent et miséricordieux
en permettant aux croyants de se libérer de leurs serments : il a été misé-
ricordieux à l'égard de ses serviteurs en leur imposant la kaffãra et il s'est
montré indulgent ( gafur ) en pardonnant ainsi la violation d'un serment. Tout
engagement, en effet, doit être tenu, sauf dans le cas où une kaffãra a été
instaurée, comme celle qui permet de se libérer d'un serment. Lorsque le
midi refuse d'avoir des rapports avec sa femme et se décide à la répudier,
Dieu alors rrsait entendre et connaître«. La condition juridique du müh dans
le Coran consiste ou bien à avoir des rapports avec sa femme, ou bien à se
résoudre au divorce. S'il exécute, Dieu montre son pardon et sa clémence;
aucune répudiation ne s'ensuit. Là-dessus on est d'accord lorsque le serment
est fait к par Dieu и.
Quant au serment de répudiation , les juristes qui soutiennent qu'il entraîne
nécessairement la répudiation et ne saurait comporter de kaffãra disent que,
lorsque le muli qui a juré de répudier sa femme s'il vient à avoir des rap-
ports avec elle, a effectivement des rapports avec elle, il en résulte que la
femme est répudiée; de même, s'il a décidé de répudier sa femme et s'il le
fait, sa femme est répudiée. La répudiation donc, dans une semblable doc-
trine, est toujours obligatoire, que (le muli) conserve sa femme selon le bon
usage (ma ruf), ou qu'il s'en sépare avec bonté ( ihsãn ). Mais le Coran stipule
cependant expressément que le muli a le choix (entre deux solutions) : il
doit remplir ses devoirs conjugaux ou répudier sa femme. S'il remplit ses
devoirs conjugaux, il n'est pas obligé de répudier sa femme, mais il est tenu
à la kaffãra du parjure, si l'on admet que le serment de répudiation comporte
une kaffãra. Le müli, en effet, qui a contracté (au nom de Dieu) son serment -
de continence, puis qui a des rapports avec sa femme, est tenu à la kaffãra '
du parjure pour la plupart des docteurs. On cite une opinion aberrante
(sãdd) selon laquelle il n'est tenu à aucune kaffãra. Mais l'opinion de la majorité
est la plus exacte. Dieu a exposé la kaffãra [46] du serment dans la sourate

(i3) Coran , Lxvi, i.


3o.

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232 HENRI LAOUST.

ai-Ma ida^ et le Prophète a dit : «■


estime qu'il est préférable d'agir au
est alors tenu de racheter son serme

On nous dira sans doute : rrLe m


a des rapports avec elle durant s
à avoir des rapports avec elle, bé
lui pardonne) le retard apporté d
gaux et il bénéficie aussi de sa misé
Nous répondrons : «Selon l'une de
qui admettent ce principe [la trip
par trois sa femme s'il a des ra
cas, à avoir de rapports avec elle
discute seulement pour savoir s
pour lui'35) (?); c'est là l'une des
l'une des deux opinions soutenue
opinion , le mari est autorisé à avoir
à la suite de quoi il doit s'en abste
dite. Mais l'on sait que le serment
femme a le droit d'exiger de son
évident aussi que la femme ne préf
seront suivis d'une triple répudi
trouve pas d'autre moyen d'arriv
De plus, dans une semblable hypo
divorce; la femme préférera au con
sa retraite légale et d'être licite à
puisqu'elle a besoin de la répudiat
pour la femme un dommage pur et

(54) Coran, v, 91,


et pour
même détourner les suit
de la nourriture
factieuses d'un parjure.
sur le jeune
- On trouvera
qui n'est qu'un
d'aut
versets encore sur tion
fa kajjara personnelle. , notamment îv, 9/
pour le meurtre (35) Le texte semble ici altéré et et
prémédité il ne nous
non prémédi
et surtout en ce
a pasqui concerne
été possible le
de le rétablir avec plus de zihãr lv
h- 5. La doctrine certitude.
d'Ibn Taimïya rétablit une h
rarchisation entre
(36) La les
dissolutionkajfàràl
du mariage. : prédominan
fort nette de l'affranchissement comme œuvre pie

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UNE RISALA D'IBN TA1MÏYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 233

du serment de continence dont la législation a été édictée [17] dans l'intérêt


de la l'emme, et non pour lui nuire.
Les Compagnons et d'autres c ulama se sont autorisés des textes que j'ai cités
sur cette question; ils ont conclu, dans leurs falãwã, que quiconque formule
un serment dans les termes suivants : et Si je fais telle chose, mes biens (se-
ront distribués) en cadeaux, mes esclaves seront libres, etc.n, peut racheter
son serment par une kajjara. Ils considèrent donc un tel serment comme
soumis à la kajjara. De même, plus d'un savant, aussi bien parmi les Anciens
( Salaf ) que parmi les Modernes ( Halaf ) estiment que cette règle englobe le
serment de répudiation, d'affranchissement 'et les autres serments. Ils consi-
dèrent que tout serment, si considérable soit- il , est passible de la kajfãra.
Certains savants prétendent que les serments de ce genre ont quelque
ressemblance avec le vœu, la répudiation et l'affranchissement et aussi avec
le serment (proprement dit). H n'en est rien : ce sont de simples serments
qui ne constituent ni un vœu, ni une répudiation, ni un affranchissement;
certains juristes les appellent sans doute я vœux de dispute et de colère v,
mais cette dénomination est spéciale; il ne s'ensuit pas que ces serments
puissent recevoir le nom de vœux d'une façon absolue. Les grands imãms
qui ont suivi les Compagnons ont montré que ce sont là de purs serments
( mah<k ), ainsi que l'ont établi aš-Šafn, Ahmad b. Hanbal et d'autres juristes
à l'occasion du serment par lequel on s'engage à accomplir un vœu. Ce sont
toutefois des serments dans lesquels le parjure dépend de deux choses : il
faut que l'on ait fait ce sur quoi on a juré, puis que l'on se soit abstenu de
réaliser ce par quoi l'on a juré.
De même, lorsque l'on dit : я Si je fais telle chose, je serai tenu d'accom-
plir le pèlerinage celte année n, une telle formule doit être mise sur le même
rang que celle-ci : crPar Dieu , si je fais telle chose, oui, j'accomplirai le pèle-
rinage cette année. •» Dans ce cas, on n'est tenu à une [48] kajfãra que lorsque
l'on a fait (cette chose) et que l'on n'a pas accompli le pèlerinage la même
année. De même, lorsque l'on dit : « Si je fais telle chose, je serai tenu d'ac-
complir le pèlerinage celle années, on est tenu à une kajjara uniquement
lorsque l'on a fait cette chose sans accomplir le pèlerinage la même année.
-De même, lorsque l'on dit : crSi je fais telle chose, je serai tenu d'affranchir
mon esclave ou de répudier ma femmes, on est tenu à une kajfãra si l'on a

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Ш HENRI LAOUST.

fait cette chose et que l'on n'a pas a


Il en est de même si l'on dit : rrPar
je répudierai ma femme et j'affra
« Si je fais telle chose, ma femm
formules sont à mettre sur le mêm
telle chose, la répudiation et l'affra
ou : <t Oui, je prononcerai la répud
a fait cette chose, on n'est tenu à
répudiation et l'affranchissement
l'affranchissement, ceux-ci n'ont
ne s'est pas trouvée réalisée. Le p
La chose subordonnée à la condition
une obligation (wugüb), soit dans u
l'on a dit : cr Si je fais telle chose,
subordonnée à la condition est, ic
re Si je fais telle chose, mon escl
chose subordonnée à la condition es
et de la répudiation. Nous avons
subordonne line chose à une cond
chose se produire quand la condit
réalise alors effectivement. Ainsi
répudier sa femme, si celle-ci le
ff Si tu me libères de ta dot, tu
tion ( sifa ) est donnée, la répudiat
Par contre, si cet homme veut pron
produire la chose conditionnée qu
dérer) comme ayant formulé un se
«La répudiation m'oblige; oui, je f
que cet homme s'est formellemen
condition arrive et que, par suite
doctrine est fausse pour plusieurs r
i° Prenons le cas de celui qui jur
dans les termes suivants : «Si je
ou, s'il s'agit d'un protégé ( dimmi )

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UNE RISALA D'IBN TAIMÏYA SUR LE SERMENT DE RÉPUDIATION. 235

On s'engage à embrasser l'idolâtrie ou l'Islam dès qu'arrivera la condition;


or, l'on est d'accord , en fait ( iltifãk ), pour reconnaître que l'on n'est pas obligé
de tenir cet engagement : on n'a pas voulu que la chose conditionnée se
produise dès que la condition est donnée; on a simplement voulu jurer par
elle. On fera la même remarque pour toutes les autres espèces de serments
qui se présentent sous la forme d'un conditionnement (ta'lïk).
s° Lorsque l'on dit : rrSi je fais telle chose, je suis tenu de répudier ma
femmes, on n'est nullement tenu de répudier sa femme si l'on vient à faire
cette chose.

3° Lorsque l'on s'engage à une chose si la condition se produit, on n'est


tenu de faire cette chose que sous deux conditions : la chose à laquelle on
s'engage doit être une œuvre pie par laquelle on se rapproche de Dieu
( kurba ); on doit avoir l'intention de se rapprocher de Dieu en accomplissant
cette chose, et non de jurer par elle. Ainsi, lorsque l'on s'engage à accomplir
un acte qui n'est pas une œuvre pie (kurba) - comme c'est le cas de la
répudiation, de la vente, de la location, de la nourriture, de la boisson - on
n'est pas obligé de tenir son engagement. (Inversement), lorsque l'on s'engage
à accomplir une œuvre pie - comme l'aumône, le jeune, le pèlerinage -
mais avec l'intention de jurer simplement par elle, on n'est, pas obligé de
tenir son engagement. On a la possibilité de choisir entre l'exécution ou la
kaffãra, selon les Compagnons et la grande majorité des Salaf; telle est aussi
la doctrine ďaš-Safn et d'Ahmad b. Hanbal, ainsi que l'une des leçons attri-
buées à Abu Hanlfa et l'opinion admise par les Mâlékites les plus surs (mtt-
hakkik ) [20].
Dans le cas qui nous occupe, l'homme qui a juré par la répudiation s'est
engagé à répudier sa femme, mais sous la forme d'un serment : il répugne
à l'idée de voir la répudiation se produire dès que se réalise la condition, de
même que l'on répugne à l'idolâtrie par laquelle on a juré, et que l'on ré-
pugne à l'idée d'être obligé d'accomplir ces pratiques cultuelles par lesquelles
on a juré.
D'autres prétendent que cet homme a juré «par un autre que Dieu» et
qu'il n'est donc pas tenu à une kaffãra. Nous répondrons : cfLa tradition
scriptuaire ( nass ) concerne ceux qui jurent par des créatures ( mahlïikâl ) : un
serment ainsi conclu est associationnisme , car c'est un serment conclu par

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236 HENRI LAOUST.

un autre que Dieu. Mais ceux qui con


contractent un serment beaucoup p
tractent par Dieu ( bi-Uãh ); c'est en
serment. Il est donc encore plus log
conclut un serment ccpour Dieu я que

Henri Laoust.

(37) L'éditeur de ce manuscrit d'Ibn Taimîya, plus intéressante est empruntée au Kilâb al -
Muhammad b. cAbd ar-Razzãk b. lïamza , repro- igmFi ďlbn Ilazm. Il est également intéressant
duit, après celte risala , une courte notice qui de relever qu'lbn Taimîya donne comme justifi-
se trouve dans l'original et qui énumère un cer- cation de sa propre thèse l'opinion de mugtahids
tain nombre d'opinions divergentes sur la ques- maghrébins (p. s /»).
tion du serment de répudiation. La citation la

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