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guineen,35649.html
Publication : 8/06/2020 - 15317 caractères

Le statut juridique des personnels marins et non marins dans le


Code Maritime guinéen. Par Albert Dione, Docteur en droit et
Diarra Kourouma, Enseignant chercheur.
Contrairement au droit maritime français, le droit maritime guinéen n’opère pas une distinction entre les gens
de mer marins et les gens de mer non marins. Cette distinction justifie-t-elle l’application d’un régime juridique
différencié ?

Le statut juridique des personnels marins et non marins dans le Code maritime
guinéen.

Il existe un contrat de travail spécifique souvent inconnue du public, destiné au personnel naviguant que l’on
appel de façon général gens de mer ou encore marins. L’utilisation des navires central-électrique pour la
production d’électricité à destination des pays africains comme le Sénégal et la Guinée oblige à opérer une
distinction entre les gens de mer marin et le personnel naviguant ne disposant pas du statut de gens de mer tel
que prévu à l’article 391 du Code maritime guinéen. Le Code des transports de la France et le décret n°
2015-454 du 21 avril 2015 relatif à la qualification de gens de mer et de marins font une distinction entre
marins, gens de mer autres que marins et le personnel ne relevant pas des gens de mer. Cette distinction est
faite en fonction du caractère occasionnel de leur activité à bord et de la nature ou de la durée de leur
embarquement.

Compte tenu de ce qui précède, la réflexion sur la notion de gens de mers en droit maritime guinéen et
l’analyse du contrat d’engagement, s’impose (I). Cette notion n’est pas définie par le Code maritime, alors que
le Code du travail fait allusion aux matelots et aux gens d’équipages sans pour autant les définir. Dès lors, la
question qui se pose est de savoir si l’absence de toute distinction claire implique l’application de dispositions
différentes à ce personnel (II).

I. La notion de gens de mer et le contrat d’engagement maritime.

a. La notion de gens de mers dans le Code maritime guinéen.

Il nous faut comprendre la notion de gens de mer avant de décrypter les caractéristiques du contrat
d’engagement. En effet, le terme gens de mer est flou dans l’esprit des non initié en matière de navigation
maritime. Pour comprendre le statut de ces professionnels, il faut se baser sur la qualification des termes gens
de mer ou marins et du personnel naviguant ne disposant pas du statut de gens de mer. L’objectif est de
préciser le champ d’application du droit social maritime et du droit commun du travail.

Comme toute profession, le travail à bord des navires est réglementé. Le métier de marin, et particulièrement
les conditions de travail et de vie à bord des navires, ont des spécificités différentes des autres professions
exercées sur la terre ferme. Il en est ainsi de la spécificité du lieu d’exécution du contrat de travail c’est-à-dire
la mer et du type de navire dans lequel le marin exécute son contrat.

Il faut noter que la Convention du travail maritime, a adopté une définition large de la notion de gens de mer.
En effet, l’expression gens de mer ou marin désigne les personnes employées ou engagées ou travaillant à
quelque titre que ce soit à bord d’un navire. De son côté le Code maritime guinéen n’a pas défini les gens de
mer. Mais il considère comme marin toute personne engagée par un armateur ou son représentant ou
embarqués pour son propre compte et qui occupe à bord d’un navire une fonction permanente relative à la
marche, à la conduite, à l’entretien et à l’exploitation du navire.

L’absence de définition de cette notion ne devrait pas semer la confusion dans la distinction des statuts
juridiques et professionnels du personnel navigant. Les opérateurs maritimes des navires-centrale électrique
qui désirent engager des gens de mers en Guinée n’auront pas du mal à établir le régime juridique de ce
personnel navigant. Dans la mesure où tout le personnel naviguant est soumis à l’application des dispositions
du Code maritime ; peu importe leur activité à bord du navire. De même, l’article 132.1 du Code du travail
prévoit l’application de ces dispositions aux marins, suivant leurs situations. De ce point de vue, le juge pourra
toujours opérer une qualification du contrat de travail du personnel naviguant en cas de doute.

b. Le contrat d’engament maritime (contrat de travail à bord d’un navire).

Aux termes de l’article 132.1 du Code du travail guinéen, tout contrat de travail conclu entre un armateur ou
son représentant et un marin et ayant pour objet un service à accomplir à bord d’un navire ou un contrat
d’engagement maritime est soumis aux règles du contrat de travail. Cela signifie que le Code du travail est
aussi applicable au contrat d’engagement maritime.

Il faut comprendre que les gens de mers sont recrutés pour travailler à bord d’un navire. Par conséquent, ils
concluent un contrat d’engagement maritime qui équivaut au contrat de travail du marin. Ainsi, l’article 392 du
Code maritime guinéen précise que le lieu de travail des gens de mer est le navire, ce qui exclut tout travail en
dehors du navire. Ce lieu de travail doit respecter toutes les normes de sécurité prévues par l’Organisation
International du Travail (OIT), la Convention du travail maritime et les législations nationales.

L’exercice de la profession de marin en Guinée est soumis à l’immatriculation. L’article 396 du Code maritime
guinéen dispose que nul ne peut conclure un contrat de travail maritime sans être identifié auprès des services
compétents de l’Autorité Maritime. L’immatriculation peut se faire sans promesse d’embarquement et sans
condition de nationalité. Par ailleurs, le marin ne peut exécuter un travail à bord d’un navire guinéen s’il n’a
pas suivi avec succès une formation professionnelle appropriée au poste qu’il souhaite occuper. Ce qui soulève
la question de savoir si les ingénieurs et techniciens travaillant à bord des navires central électrique doivent
obligatoirement suivre une formation de marin ? (Nous reviendrons sur cette question) Contrairement au Code
du travail qui prévoit la possibilité de travailler sans un contrat de travail écrit, la conclusion du contrat
d’engagement maritime écrit est obligatoire avant tout embarquement du marin à bord d’un navire. L’article
454 du Code maritime guinéen et l’article 132.4 du Code du travail guinéen mentionnent que le contrat de
travail maritime doit être rédiger par écrit en des termes clairs et précis, de nature à ne laisser aucun doute
sur les droits et obligations respectifs des parties.

Par ailleurs, le Code maritime de la Guinée prévoit à son article 395 que tout marin étranger embarquant à
bord d’un navire guinéen doit présenter un contrat de travail maritime visé par l’Autorité Maritime guinéenne à
défaut, l’armateur ne peut engager un marin étranger.

En outre, le Code maritime guinéen dispose à l’article 453 qu’en dehors des périodes d’embarquement, le
contrat de travail maritime est régi par le droit commun (Code du travail). Faut-il comprendre à travers cette
disposition qu’en période de congés annuels à terre, le marin ne bénéficie pas des dispositions du Code
maritime ? En première lecture, il semble que c’est ce que le législateur a voulu exprimer. Mais tous les
débarquements ne se traduisent pas par la fin du contrat d’engagement. Dès lors, il faut analyser la situation
juridique du marin pendant la période à laquelle il n’est pas à bord du navire alors qu’il est toujours lié par le
contrat d’engagement. En effet, les dispositions spécifiques du Code maritime ne peuvent pas s’appliquer au
marin à terre (nourriture et logement article 431). Alors, il ne faudrait pas créer un « vide juridique » sur cette
période ; d’où la nécessité de l’application du Code du travail.

Aux termes de l’article 52 du Code maritime guinée, la navigation commerciale entre les ports guinéens ou
entre un port et une plate-forme en mer est réservée aux armements nationaux. Un armement national est un
armement propriété d’une personne physique ou morale de nationalité guinéenne possédant ou affrétant au
moins un navire sous pavillon national. Sont aussi réservées aux armements nationaux, les navigations qui sont
faites dans les eaux territoriales ainsi que toute autre opération de transbordement (port de Conakry et port de
Kamsar). Cela signifie-t-il que ces armateurs sont obligés d’engager des marins guinéens avant l’engagement
des marins étrangers ? la réponse est oui par application des principes du Contenu Local notamment l’article 7
du décret D/2019/N° 263 fixant les règles régissant le Contenu Local en Guinée. Une fois à bord les activités du
personnel naviguant diffèrent, ce qui permet de distinguer leur statut professionnel.

II. Le régime juridique des marins et le personnel navigant ne disposant pas du statut
de marin.

a. La distinction entre gens de mer marin et gens de mer non marin.

Le Code maritime guinéen ne fait pas une distinction entre les gens de mer marins et les gens de mer, non
marins. Alors que l’article 5511-1, 3° du Code des transports français définit les Marins, comme les gens de
mer salariés ou non salarié exerçant une activité directement liée à l’exploitation du navire. Et que le 4° du
même article définit les Gens de mer, comme toutes personnes salariées ou non salariées exerçant à bord d’un
navire une activité professionnelle à quelque titre que ce soit. Par ailleurs, le décret de 2015 fait la distinction
entre les gens de mer non marins et les personnels autres que les gens de mer, en fonction du caractère
occasionnel de leur activité à bord.

Il faut comprendre à travers ce qui précède que la distinction est basée sur l’activité exercé par le marin ; il
s’agit ici de la référence à l’exploitation du navire. Or, l’exploitation à bord comporte, les activités relatives à la
marche, à la conduite ou à l’entretien, ainsi que celles qui sont nécessaires pour assurer l’ensemble des
fonctionnalités du navire. Par exemple les marins exécutent les tâches liées à la préparation ou service des
repas ; d’hydrographes ; de mécaniciens ; de pilotage maritime, de lamanage ; les médecins à bord sont
considérés comme des marins, lorsque l’embarquement est exigé par la réglementation maritime.

Pour rappel, l’article 392 du Code maritime guinéen précise que le marin occupe une fonction permanente
relative, à la conduite, à la marche et à l’exploitation du navire. Donc si le Code maritime guinéen ne fait pas
expressément la distinction entre les gens de mer marin et les gens de mer non-marin, il reprend textuellement
l’énumération des activités du marin tel que prévu par le Code des transports français. Cette absence de
distinction aussi bien dans le Code maritime guinéen que dans le Code du travail guinéen, ne fait pas obstacle
au bénéficie du régime juridique affilié aux marins ou aux gens de mer tel que prévu par le Code maritime et le
Code du travail. En effet, la distinction entre personnel naviguant n’a qu’un caractère professionnel. Si les
activités à bord et les conditions de travail ne sont pas les mêmes, ils partagent le même lieu de travail qui est
le navire. Ils affrontent tous ensemble, selon l’expédition, les périples de la mer. Etant dans le navire, ils
doivent tous bénéficier des avantages du Code maritime, ils font parties de l’équipage.

b. La distinction justifie-t-elle l’application de régimes juridiques différenciés ?

Si le Code maritime guinéen ne fait pas cette distinction soulevée par le Code des transports de la France.
L’interprétation de l’article 391 du Code maritime guinéen ne laisse aucun doute pour l’application d’un régime
juridique unique à tout le personnel naviguant. Même s’il existe un personnel travaillant à bord des navires
central électrique dont l’activité n’entre pas dans les termes de l’article 392. En effet, l’exploitation du navire
s’entend comme toute activité professionnelle relative à la marche, à la conduite ou à l’entretient ainsi que
celle qui sont nécessaire pour assurer l’ensemble des fonctionnalités du navire.

La question qui se pose est de savoir si on doit considérer ces personnels comme des marins au regard du droit
guinéen ou comme des gens de mer non marin à bord d’un navire d’exploitation au sens de l’article 391 du
Code maritime. Ce qui est sûr, les ingénieurs travaillant pour le fonctionnement de la centrale électrique
flottante ne participent pas à la marche, à la conduite ou à l’entretient du navire ainsi qu’aux activités
nécessaires pour assurer l’ensemble des fonctionnalités du navire. Ils ne sont pas formés pour effectuer ces
activités.

Ces personnels n’ont pas subi, ni suivi la formation de marin et ne sont pas recruter dans les mêmes conditions
que les marins tel que prévu par le Code maritime guinéen. D’ailleurs, la qualification juridique du navire
permet de déduire l’activité exercer à bord du navire qui peut être autres que l’activité d’exploitation de
l’article 392. Par exemple, la production d’énergie à bord des navires central électrique destinée à la
commercialisation et à la consommation terrestre n’est pas une activité au sens de l’article 392. Mais au regard
de l’article 391, ce personnel est soumis au régime juridique du Code maritime. Donc ils bénéficient des
avantages du Code avec une adaptation de leur contrat bien entendu.

Cette interprétation fait apparaître une distinction entre les activités du personnel sur la même embarcation.
Certains travaillent à bord au service de la mission assignée à l’expédition. Par exemple : les interprètes, les
chercheurs, les hydrographes halieutiques, le personnel mécanicien, les techniciens, les ingénieurs des
installations et du fonctionnement de la centrale électrique. L’activité de ces derniers, cesse dès que le navire
est en haute mer et que la production est suspendue en attendant d’atteindre la nouvelle destination. Par
conséquent, ils effectuent une activité occasionnelle à bord.

Compte tenu de ce qui précède, les termes de l’article 392 du Code maritime sont compatibles avec les termes
de l’article 132.1 et suivant du Code du travail guinéen qui est, à ce titre, le droit commun du travail applicable
en l’absence de dispositions particulières. Sous cet angle, les dispositions du Code du travail rejoignent celles
du Code maritime. Donc les mêmes dispositions sont applicables aux ingénieurs travaillant à bord de ces
navires.

Le fait que la distinction entre les gens de mer marins et les gens de mer non-marins ne figure pas dans le Code
maritime ni dans le Code du travail, ne suppose pas l’absence de disposition en la matière. Ce qui compte, c’est
la détermination de l’activité exercée à bord. Une fois l’activité déterminée, on pourra en déduire les
dispositions applicables, étant donné que les deux Codes régissent le travail à bord des navires guinéens. Tout
compte fait, le bénéfice des dispositions du Code maritime est acquis à bord.

Auteur :

Albert DIONE Docteur en droit Diarra KOUROUMA Enseignant chercheur Universités de Conakry

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