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Droit civil : La famille

Leçon 1 : Introduction au droit de la famille


, Bernard BEIGNIER
, Yann PUYO

Table des matières


Section 1. La famille et les familles.......................................................................................................................... p. 2
§1. La notion de famille....................................................................................................................................................................... p. 2
§2. Les familles.................................................................................................................................................................................... p. 3
Section 2. Les liens de famille...................................................................................................................................p. 4
§1. Le lien de filiation...........................................................................................................................................................................p. 4
§2. Le lien conjugal..............................................................................................................................................................................p. 4
§3. Le lien d'alliance............................................................................................................................................................................ p. 4
Section 3. L'évolution du droit de la famille............................................................................................................ p. 6
§1. L'évolution législative du droit de la famille................................................................................................................................... p. 6
§2. L'évolution des sources du droit de la famille............................................................................................................................... p. 9

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Trois questions sont préalables à l'étude du droit de la famille :
• Qu'est-ce que la famille ?
• Quels sont les liens qui unissent les membres d'une famille et qui sont pris en considération par le droit ?
• Quelle a été, et quelle est l'évolution juridique de la famille ?

Section 1. La famille et les familles


La famille recouvre des réalités très différentes qui sont envisagées par différentes sciences (sociologie,
biologie, droit...). Chacune de ces sciences traduit différemment ces réalités et peuvent ne pas être en accord
sur la situation qui est qualifiée de famille. La seule certitude est que la famille suppose le groupement. C'est
là le trait commun à toutes les sciences qui appréhendent cette situation. En droit, la famille se comprend donc
comme un groupement. Toutefois, il n'existe pas un seul modèle de ce groupement.

§1. La notion de famille


En droit français, la famille ne fait pas l'objet d'une définition. Le Code civil ne propose pas de partie consacrée
exclusivement à la famille. Toutes les dispositions relatives à celle-ci sont éparses. Cette absence s'explique
par le fait que le Code civil traduit un nouvel ordre juridique qui repose sur les droits de la personne et qui
rompt ainsi avec l'Ancien droit qui était fondé sur le groupement et plus spécialement les corporations.

Le défaut de définition dans notre Code civil n'empêche pas d'en proposer une ce que fait la doctrine
en raisonnant sur les différentes réalités qui sont appréhendées par le droit et les règles qui régissent le
groupement. Ainsi, il incombe de proposer une définition suffisamment large de la famille afin de ne pas
omettre une situation qui relève du droit de la famille. Celle-ci peut donc être définie comme le groupement
de personnes liées par la parenté ou l'alliance. Cependant différentes théories doctrinales proposent des
définitions plus précises de ce groupement. Parmi elles, il convient de retenir les théories fonctionnaliste et
institutionnelle.

La première envisage la famille par rapport à la fonction qu'elle a au sein de la société. Et plus spécialement,
son rôle dans l'établissement d'un ordre juridique. En tant que groupement primaire de la société, la famille a
pour rôle d'enseigner à ses membres les normes fondamentales sur lesquelles est fondé l'ordre social. Elle
produit donc des règles de base qui sont conformes à celles qui sont nécessaires à tout rapport social. Ainsi, les
ascendants transmettent à leurs descendants des normes de conduite qui leur permettront de vivre en société,
tel que le respect d'autrui et la politesse. Dans une certaine mesure le respect des règles sociales inculquées
par la famille conduit l'individu à respecter celles qui sont prescrites par la loi française. D'ailleurs, si la famille
ne parvient pas à assurer ce rôle essentiel d'éducation, c'est L'Etat qui la remplace par différentes mesures.

Exemple
A titre d'exemple, le juge des enfants peut aller jusqu'à placer l'enfant dans un service départemental
tel que l'Aide Sociale à l'Enfance (cf. infra). Le rôle de la famille est si capital qu'en cas de défaillance,
c'est l'Etat qui accomplit cette fonction.
La seconde théorie, institutionnelle, qualifie la famille d'institution, c'est-à-dire un groupement de personnes
doté d'un pouvoir et de biens afin de réaliser un intérêt collectif. En l'occurrence, l'intérêt de la famille est la
norme qui régit le comportement des membres de ce groupement. Les parents sont titulaires de l'autorité
parentale (cf. infra) qui est un pouvoir exercé sur les enfants dans leur intérêt et donc dans l'intérêt du
groupement. Certains biens sont destinés à l'utilisation de la famille. Ainsi en est il des sépultures ou souvenirs
de famille (cf. cours de droit des successions). Cette institution privée qu'est la famille est juridiquement
autonome, c'est-à-dire qu'elle crée des normes qui sont destinées à s'appliquer à tous les membres.

L'exposé de ces deux théories permet d'expliquer les difficultés que pose l'absence de définition de la
famille car il est difficile de trouver une acception susceptible d'expliquer le régime juridique propre à ce

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groupement. En outre, définir la famille peut s'avérer pernicieux car la notion est en perpétuelle évolution.
Certaines situations qui, auparavant n'étaient pas considérées comme des familles, sont désormais qualifiées
comme telles.

Remarque
Les modèles familiaux sont ainsi multiples.

§2. Les familles


Lorsqu'une situation est qualifiée de famille, il ne s'agit pas toujours du même type de groupement.

Ainsi, le ménage composé uniquement des personnes mariées constitue une famille. Les personnes vivant
en concubinage ou étant partenaires (c'est-à-dire lié par un pacte civil de solidarité) ne forment pas encore
expressément, au regard du droit français, un ménage et donc un groupement familial, ils forment un couple.
En effet, aujourd'hui aucune disposition relative à ces communautés de vie n'introduit explicitement une finalité
familiale. Cependant, les règles qui régissent leur organisation sont souvent copiées sur le modèle du mariage,
ce qui assimile ces couples à des familles, c'est pourquoi le concubinage et le pacte civil de solidarité seront
traités dans ce cours.

Le groupe parental est plus large que le ménage et le couple, car il est constitué des parents et de
l'enfant, voire des enfants. A priori, le mariage ne joue aucun rôle dans la fondation du groupe. Seul compte
l'établissement du lien de filiation qui fait du couple des parents. Cela étant, le mariage demeurant le seul contrat
créant l'institution familiale, notamment avec l'article 213 du Code civil fixant les devoirs respectifs des époux à
l'égard des enfants, mais surtout avec la présomption de paternité ; faire accéder les couples homosexuels au
mariage, c'était inéluctablement leur autoriser l'accès à l'établissement de la filiation. Si bien que la loi du 17
mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de même sexe, aboutit à un paradoxe : jusqu'à présent l'évolution
historique du droit révélait un détachement progressif de la filiation et du mariage permettant d'affirmer que
la filiation pouvait suffire à créer la famille, la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 marque résolument un retour
en arrière. En effet, elle semble aller à l'encontre de cette idée et ce en ne permettant l'adoption plénière que
par les couples homosexuels mariés. En d'autres termes, seul le couple homosexuel marié peut créer de lien
de filiation avec un enfant, ce qui « impose » donc le mariage pour avoir accès à la filiation (sur le sujet, v.
er
notamment : X. Labbé, « Les enfants des épouses lesbiennes», Gaz. Pal., 1 déc. 2013, n° 346, p. 5). Quoi qu'il
en soit, par l'établissement du lien de filiation, le groupement tend à la pérennité car l'enfant demeurera toujours
lié à ses parents. Toutefois, le groupe parental peut n'être formé que d'un seul parent dans l'hypothèse où
l'enfant n'a de lien de filiation qu'à l'égard de sa mère ou de son père. Cette situation ne doit pas être confondu
avec le cas de l'enfant qui n'est élevé que par un seul de ses parents car, en l'occurrence, la filiation est établie
à l'égard des deux parents. Aucun régime juridique particulier n'est rattaché à cette notion. Ainsi, cet état de
fait est souvent qualifié de famille monoparentale et relève de la sociologie voire de la sociologie juridique.

Exemple
C'est l'hypothèse, par exemple, d'une mère divorcée qui exerce seule l'autorité parentale.
Il est plus souvent utilisé l'expression de « parents » que celle de groupe parental. Dans le langage courant, les
parents désignent, généralement, toutes les personnes qui sont liées à un individu par un lien de famille hormis
ceux qui ont un lien d'alliance avec la personne, c'est-à-dire un lien qui résulte du mariage de la personne
(cf. infra).

En définitive, la famille au sens le plus large comprend les parents ainsi que les personnes qui sont rattachées
ensemble par un lien d'alliance. Ces différents types de familles dépendent donc des différents types de liens
qui unissent les individus.

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Section 2. Les liens de famille
Différents liens de famille sont reconnus comme tels par le droit et ont pour effet d'unir les personnes au sein
d'une famille :

§1. Le lien de filiation


Le lien de filiation (cf. infra) est un lien fondateur de la famille, c'est celui qui relie l'enfant à ses parents ou à
l'un d'eux. En principe, ce lien résulte de la simple procréation qui devient, de ce fait, un fait juridique puisque
c'est un fait auquel la loi attribue un effet : l'établissement de la filiation. Il est vrai que la procréation est suivie
de l'établissement de certains actes juridiques dont l'acte de naissance mais ils ne sont que déclaratifs et
donc, ne font que constater la procréation et le lien de filiation qui en découle. L'enfant né d'une procréation
médicalement assistée est également assimilé à celui qui est né naturellement. Par conséquent, même si un
tiers donneur intervient, le droit, par une fiction, considère que les parents qui ont eu recours à une assistance
médicale à la procréation, sont ceux qui ont procréé l'enfant. La filiation peut aussi être établie par la possession
d'état (art. 310-1 du C. civ ). Cette dernière s'établit par la réunion de certains faits qui révèlent le lien de
filiation et de parenté entre une personne et une famille (art. 311-1 du C. civ.). De là, la possession d'état est
un fait juridique. C'est un faisceau de faits qui crée la filiation. Cependant, dans le cadre de l'adoption simple
ou plénière, la filiation résulte d'un acte juridique. L'adoption suppose une requête de l'adoptant, c'est-à-dire
un acte de volonté ayant pour effet d'établir la filiation. Par conséquent, il s'agit bien d'un acte juridique, qualifié
souvent d'« acte complexe » en raison du contrôle étatique qui est exercé dans la procédure d'adoption. De ce
lien de filiation vont découler les liens de parenté qui unissent l'enfant à d'autres membres de la famille c'est-
à-dire aux ascendants (grands-parents) et collatéraux (frères et sœurs, oncles et tantes). « La proximité de
parenté s'établit par le nombre de générations ; chaque génération s'appelle un degré » (art. 741 du C. civ.).

« En ligne directe, on compte autant de degrés qu'il y a de générations entre les personnes : ainsi, le fils est, à
l'égard du père, au premier degré, le petit-fils au second ; et réciproquement du père et de l'aïeul à l'égard des
fils et petits-fils. En ligne collatérale, les degrés se comptent par génération, depuis l'un des parents jusques
et non compris l'auteur commun, et depuis celui-ci jusqu'à l'autre parent. Ainsi, deux frères sont au deuxième
degré ; l'oncle et le neveu sont au troisième degré ; les cousins germains au quatrième ; ainsi de suite. » (art.
743 du C. civ.).

« La suite des degrés forme la ligne ; on appelle ligne directe la suite des degrés entre personnes qui
descendent l'une de l'autre ; ligne collatérale, la suite des degrés entre personnes qui ne descendent pas les
unes des autres, mais qui descendent d'un auteur commun. On distingue la ligne directe descendante et la
ligne directe ascendante. » (art. 742 du C. civ.).

§2. Le lien conjugal


Le lien conjugal est celui qui unit les personnes mariées. Le mariage est un acte juridique par lequel les époux
organisent leur communauté de vie et qui a pour effet de fonder une famille. L'article 213 du Code civil dispose
que : « Les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de famille, ils pourvoient à l'éducation des
enfants et préparent leur avenir. »Ce faisant, la loi reconnaît qu'en se mariant les époux fondent un groupement
familial dont ils ont la direction. Comme on l'a précédemment évoqué, en n'autorisant seulement les couples
homosexuels mariés à adopter, et donc à créer un lien de filiation, la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 renforce,
paradoxalement, ce principe selon lequel le mariage apparaît est un acte fondateur de la famille. Par le mariage,
chaque époux s'unit également à la famille de son conjoint, c'est ce qu'on nomme le lien d'alliance.

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§3. Le lien d'alliance
Le lien d'alliance unit, par l'effet du mariage, chaque époux avec les parents (l'expression étant ici entendue au
sens large) de l'autre. L'époux est ainsi uni à son beau-père, sa belle-mère, ses beaux-frères et belles-sœurs.
Comme il sera étudié ultérieurement, l'alliance peut créer des droits et des obligations entre les personnes
qui sont unies par ce lien.

Remarque
Concernant le concubinage et le pacte civil de solidarité, la question se pose de savoir si ces unions de
personnes sont créatrices de lien de famille.
La loi ne prévoit pas expressément, comme pour le mariage, que ces situations sont créatrices d'une
famille ou du moins que les couples de concubins ou de partenaires (liés par un pacs) sont unis par un lien de
famille. Néanmoins, le droit s'inspire souvent du mariage afin de régir les rapports entre ces personnes, ce qui
tend progressivement à reconnaître que ces couples forment un groupement familial en devenir. Dans tous
les cas, dès que des partenaires ou des concubins ont un enfant à l'égard duquel ils ont un lien de filiation, ils
fondent une famille par le lien de filiation ainsi créé. Par conséquent, les situations qui peuvent être qualifiées
juridiquement de famille sont en évolution comme l'est le droit de la famille.

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Section 3. L'évolution du droit de la
famille
L'évolution du droit de la famille s'apprécie à deux niveaux : au niveau des différentes législations qui se sont
succédées et au niveau des sources.

§1. L'évolution législative du droit de la


famille
Jusqu'à la fin de l'Ancien régime, la famille obéissait à un modèle patriarcal hérité du droit romain et donc
fondé sur le pater familias seul détenteur de l'autorité dans le groupement. La femme n'avait que des droits
très réduits et la famille ne s'entendait que de celle qui était fondée par un mariage, mariage purement religieux
et donc sacramentel (relevant ainsi, pour les catholiques, du droit canonique et non du droit civil). Les unions
hors mariage n'avaient pas de reconnaissance légale et les enfants nés de ces unions avaient des droits très
diminués par rapport aux enfants légitimes (c'est-à-dire les enfants nés de parents mariés).

La Révolution va profondément réformer le droit de la famille. Le mariage devient un contrat civil qui peut
être résilié par le divorce. Il est ainsi mis fin à l'indissolubilité de cette union. La femme obtient certains droits à
égalité avec son époux. Les enfants légitimes et naturels (c'est-à-dire les enfants qui sont nés de parents non
mariés) obtiennent des droits identiques et le droit d'aînesse est supprimé.

Le Code Napoléon va conserver certaines réformes de la Révolution. Cependant, il opère un retour à un


modèle patriarcal. Le mariage est consacré comme socle unique de la famille sans remettre en cause pour
autant l'existence des enfants naturels. Ce renforcement du mariage s'accompagne d'ailleurs de la restriction
des causes de divorce, le rendant pour le moins très difficile. Il sera ensuite supprimé (en 1816) puis restauré
en 1884 pour une seule cause : la faute. Les réformes relatives au droit de la famille se feront par petites
touches introduisant de plus en plus le contrôle de l'Etat dans le fonctionnement du groupement familial.

Les années 60 marquent le début de grandes réformes en droit de la famille visant à adapter les règles
de droit aux évolutions de la famille et ainsi à sa réalité sociale. Jean Carbonnier sera nommé par Jean Foyer,
garde des sceaux sous le gouvernement du Général de Gaulle afin d'accomplir cette tâche et de préparer
ces réformes. Parmi elles, il convient de retenir la loi n° 65-570 du 13 juillet 1965 qui réforma les régimes
matrimoniaux et le mariage, la loi n° 70-459 du 4 juin 1970 relative à l'autorité parentale, la loi n° 72-3 du
3 janvier 1972 concernant la filiation et la loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 sur le divorce. Ces lois eurent
notamment pour effet d'établir l'égalité entre les époux dans la gestion et plus largement dans celle de
la famille. De même, l'autorité parentale mit fin à la puissance paternelle et instaura ainsi une égalité entre
les parents dans les droits et devoirs envers les enfants. Une égalité partielle fut également établie entre les
enfants légitimes et naturels.

Du début des années 80 à 2000 certaines lois vinrent ensuite parachever l'esprit des réformes antérieures
telles que la loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985 sur les régimes matrimoniaux qui eut principalement pour
but de parvenir à une égalité concrète entre les époux. D'autres lois ont eu pour effet d'amorcer toute une série
de réformes importantes et consacrant l'évolution des mœurs et l'évolution de la famille particulièrement la loi
n°99-944du 15 novembre 1999 qui a instauré le pacte civil de solidarité.-

Les réformes de 2000 à 2010.


Le début de notre siècle est tout aussi riche en matière de réformes que la période 60-70. La loi n° 2001-1135
du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins a instauré un régime
successoral avantageux à l'égard du conjoint survivant établissant, de la sorte, un régime protecteur qui
n'existait quasiment pas. Elle a également eu pour effet de supprimer la différence de droits successoraux
entre enfants légitimes et adultérins. La loi n°2002-302du 4 mars 2002 sur le nom de famille modifiée par
celle du 18 juin 2003 a eu pour principal effet d'établir une égalité entre les père et mère dans le choix du

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patronyme donné à l'enfant. La loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale a renforcé le
principe d'égalité et d'accord entre les parents notamment en prévoyant expressément, qu'en cas de séparation
ou de divorce, l'exercice commun de l'autorité parentale perdure et un mode de résidence alternée doit être
mis en place chaque fois que c'est réalisable.

La loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce a réformé les causes de divorce en privilégiant
les modes de rupture amiable et la rapidité des procédures. L'ordonnance du 4 juillet 2005 – ratifiée
avec quelques modifications importantes par la loi du 16 janvier 2009 n° 2009-61 relative à la filiation a
eu essentiellement pour finalité de mener à son terme l'égalité des filiations en unissant le mode
d'établissement du lien de filiation pour les enfants légitimes et naturels.

La loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités poursuit la volonté
de renforcer le principe de liberté de disposition de son patrimoine tout en continuant à assurer une
certaine protection de la famille. Elle permet ainsi une plus grande liberté dans la transmission des biens
tout en facilitant cette transmission pour les membres de la famille notamment par l'instauration d'un plus grand
nombre de pactes familiaux.

La loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010, relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences
au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, est destinée à organiser la protection du
conjoint qui est victime de violences au sein du couple et a également pour objet de lutter contre les mariages
forcés.

Les réformes depuis 2010.


La loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 : le mariage des personnes de même sexe.
L'une des dernières réformes les plus importants est sans nul doute la loi n°2013-404du 17 mai 2013 ouvrant
le mariage aux personnes de même sexe. Par cette loi, est juridiquement reconnue et consacrée la famille
homoparentale. Désormais, l'enfant adopté aura un père et une mère, ou un père, ou une mère, ou deux
mères, ou encore deux pères. De nouveaux couples accèdent ainsi au mariage et à la filiation. La loi crée ainsi
de nouveaux modèles maritaux et, conséquemment, familiaux. Après un changement sociologique certain,
c'est un changement juridique dont les effets, tant extrapatrimoniaux que patrimoniaux, demeurent encore,
pour partie, incertains auquel on assiste. Cette incertitude est certainement plus patente dans les effets du
divorce d'un couple homosexuel. D'un point de vue extrapatrimonial : pour déterminer la résidence de l'enfant
quelle maternité ou quelle paternité sur les deux faire prévaloir ? Lorsque l'enfant est issu biologiquement
de l'un des deux parents est-ce cette réalité que pourrait privilégier le juge ? D'un point de vue patrimonial :
la différence de situation des hommes et des femmes sur le marché de l'emploi est une réalité (bien que
contesté et contestable) très souvent prise en compte dans la détermination d'une prestation compensatoire.
Ce critère ne pourra pas être utilisé dans le divorce d'un couple homosexuel pour lequel le juge sera contraint
de s'en tenir plus à des critères in concreto (Sur l'ensemble de cette question, v. S. Thouret, « Le divorce pour
tous », Dr. fam., 2013, étude 22, spéc. n° 17 et s.). Surtout cette réforme invite à repenser notre législation
actuelle sur la filiation. En permettant aux couples homosexuels d'accéder à l'adoption, il était prévisible que
les juges connaissent de nombreuses demandes d'adoption de l'enfant du conjoint ayant eu recours à une
procréation médicalement assistée (PMA) ou une gestation pour autrui GPA dans un pays où cela est admis.
D'où la nécessité de réformer en conséquence le droit de la filiation comme le préconise le rapport « Filiation,
origine, parentalité », commandé en octobre 3013 (I. Théry et A.-M. Leroyer, « Filiation, origines, parentalité :
le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle », Dr. fam. sept. 2014, Etude 2, spéc. n
° 2). Comme l'explique les auteurs de ce rapport : « alors que le droit du couple est désormais commun et
pluraliste, la filiation a certes été unifié selon des valeurs fortes, mais son caractère pluraliste n'est toujours
ni reconnu, ni institué » (Id.). Il s'agirait ainsi de faire coexister à égalité les trois modes d'établissement de la
filiation que sont la procréation naturelle, l'adoption et l'engendrement avec tiers donneur (Id., n° 6).

ème
La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la Justice du XXI siècle : le divorce sans juge.
ème
La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, dite loi de modernisation de la Justice du XXI siècle, se
situe dans le mouvement général de déjudiciarisation très largement entamé au début des années 2000. A
er
partir du 1 novembre 2017, les conclusion, modification et dissolution du PACS ne relèvent plus que

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er
des officiers d'état civil ou, le cas échéant, du notaire. Surtout, dès le 1 janvier 2017, le divorce par
consentement mutuel à la seule responsabilité des notaires et avocats. Le juge aux affaires familiales ne
doit intervenir, aux fins d'homologuer une convention de divorce par consentement mutuel, que dans la seule
hypothèse où un enfant mineur sollicite son intervention. L'objectif premier de cette loi est économique et vise
à désengorger les tribunaux d'un contentieux dont la masse est importante. Cependant, en excluant l'action
des tribunaux dans ces domaines, une plus grande liberté est aussi offertes aux parties. Réciproquement, les
professionnels qui devront guider les parties dans cette liberté auront une responsabilité accrue. Liberté et
responsabilité professionnelle vont ainsi de paires.

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice :


déjudiciarisation et disparition de l'audience de conciliation.
Cette loi modifie en profondeur de nombreux pans du droit civil et pénal tant concernant le fond que la
er
procédure, particulièrement en fusionnant dès le 1 janvier 2020 les tribunaux d'instance et de grande
instance en un seule entité institutionnelle : le tribunal judiciaire. A la faveur de cette réforme est créé une
nouvelle fonction spécialisée, sorte de survivance de l'ex-instance : le juge des contentieux et de la protection
qui exerce les fonctions de juge des tutelles et du surendettement et connaît des litiges en matière de baux et
de crédits à la consommation. Sans nier par là aux autres juges du tribunal judiciaire leur fonction protectrice
de l'ordre public en général, cette loi redistribue ainsi les compétences par matière et dessine une nouvelle
organisation judiciaire plus unifiée et structurée par pôles (civil, social, pénal...).
En matière de droit de la famille, cette loi poursuit l’œuvre de déjudiciarisation de la précédente loi sur la
ème
Justice du XXI siècle en confiant aux notaires la rédaction des actes de notoriété constatant la possession
d'état et la filiation qui en résulte (art. 317 du C. civ.), ou les actes de notoriété suppléant les actes d'état civil
détruits ou disparus (art. 46 du C. civ.). Elle attribue également aux notaires la compétence exclusive pour
recueillir le consentement des à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneurs ou avec accueil
d'embryon (art. L. 2141-6 et -10 du Code de la santé publique). Cette loi a aussi pour objectif de simplifier
considérablement le droit des personnes majeures protégées en supprimant un certain nombre de contrôles
judiciaires. A ce titre, le mariage ou le pacs ne font plus l'objet d'une autorisation préalable. Désormais, le tuteur
ou curateur dûment informé du projet de mariage de la personne protégée pourront former opposition. Cette
loi prévoit également la possibilité de procéder à une séparation de corps par consentement mutuel par acte
d'avocats déposé au rang des minutes d'un notaire. La procédure de divorce est aussi réformée en profondeur,
notamment par la suppression de l'audience de conciliation et l'instauration subséquente d'un seul acte de
saisine du juge du divorce. Pour autant, dès le début de la procédure une audience a pour objet de débattre
des mesures provisoires nécessaires à l'organisation de la vie des enfants et des époux, sauf si ces derniers
y renoncent. Le juge tranche alors par voie d'ordonnance.
Concernant la procédure de divorce, cette loi a été complétée par le décret n° 2019-1380 du 17 décembre 2019
er
réformant les textes du Code de procédure civile afin d'instaurer au 1 janvier 2021, une procédure unifiée
et simplifiée, sans tentative de conciliation.

Ces dernières réformes démontrent qu'en droit de la famille les principes de liberté et d'égalité cherchent à être
optimisés. Cependant, selon les domaines concernés, la mise en œuvre simultanée de ces principes aboutit
à des solutions nécessairement contradictoires. Ainsi en droit des successions, comment aboutir à plus de
liberté tout en préservant un traitement égalitaire entre les membres de la famille ? L'absolutisme de la liberté
ème
et de l'égalité et l'équilibre entre ces deux principes étant contradictoires, il est prévisible que le XXI siècle
soit jalonnés encore par de nombreuses réformes.

La loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre le violences conjugales : évolution de
l'ordonnance de protection et privation de l'exercice de l'autorité parentale.
Cette loi a principalement pour objectif de renforcer l'efficacité de l'ordonnance de protection rendue par le JAF
en instaurant une procédure plus rapide et en coordonnant les actions des différents magistrats intervenant
en matière de violences conjugales (JAF, parquet...). Par ailleurs, la protection de l'enfant et de l'autre parent,
victimes de violences, est également modifiée relativement à l'autorité parentale. Auparavant, seul le retrait de
l'autorité parentale était envisageable et sous certaines conditions. Désormais, le parent auteur peut se voir
retirer, non l'autorité parentale (mesure extrême et donc rare en pratique) mais l'exercice de celle-ci et selon un
régime particulier. Cette réforme laisse néanmoins subsister une difficulté importante : de nombreux magistrats

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peuvent être amenés à connaître des violences conjugales et de leurs suites (JAF, juge pénal, parquet, juges
des enfants...) compliquant ainsi l'accès effectif de la victime à la Justice. Il est regrettable que le législateur,
confronté à la nécessité d'une réponse législative rapide, n'est pas pu instaurer une compétence exclusive en
la matière à l'un des magistrats acteurs de la procédure.

La loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique qui a étendu l'accès à l'assistance médicale à
la procréation avec tiers donneur aux femmes seules et couples de femmes. Par ce biais, elle a également
modifié les conditions d'accès à ce mode de procréation qui ne repose plus désormais sur des conditions
médicales mais sur un projet parental. Est aussi créé un nouveau mode d'établissement de filiation pour les
couples de femmes ayant recours à la PMA : la mère qui n'accouche pas voit sa filiation établie à l'égard de
l'enfant par une reconnaissance conjointe avec la femme qui accouche.

§2. L'évolution des sources du droit de la


famille
En droit interne, la source principale du droit de la famille est le Code civil. Bien qu'il n'y ait aucun titre du
Code consacré à cette branche du droit, de nombreux textes la concernent. D'autres dispositions concernant
l'action de l'Etat sont contenues dans le Code de l'action sociale et des familles et dans le Code de la famille.
D'autres matières du droit et ainsi d'autres Codes prévoient des dispositions relatives au droit de la famille : le
droit du travail, et plus généralement, le droit social, le droit fiscal, le droit commercial... En définitive, toutes
les matières du droit contiennent des règles de droit relatives à la famille.

Ce sont surtout les sources internationales et européennes qui aujourd'hui prennent de plus en plus
d'importance et méritent un développement un peu plus long.

Dans les sources internationales, bien qu'elle ne puisse être invoquée directement devant le juge français,
il faut évidemment citer la Déclaration universelle des droits de l'Homme qui contient plusieurs textes relatifs
à la famille et aux rapports de celle-ci avec l'enfant. Celui-ci est d'ailleurs mieux protégé par la Convention
internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 qui a fait l'objet d'une ratification par l'Etat
français. Ainsi, la loi du 8 janvier 1993 relative à l'état civil, la famille, les droits de l'enfant et le juge aux affaires
familiales a eu notamment pour objet de modifier certains textes afin de les mettre en conformité avec cette
Convention internationale.

En outre, la Cour de cassation a reconnu son applicabilité immédiate en droit interne.


Exemple
ère
Cass. civ. 1 , 8 novembre 2005, Dr. fam. 2006, comm. 28, A. Gouttenoire.
Le développement constant des sources européennes est sans nul doute le phénomène le plus important. La
Convention européenne des droits de l'Homme contient quelques articles relatifs au droit de la famille, mais
c'est surtout la jurisprudence issue de la Cour européenne des droits de l'Homme qui influence le plus le droit
er
français.La célèbre affaire Mazureck (CEDH, Mazureck, 1 février 2000, D. 2000, 332, note Thierry) a ainsi
initié la réforme du 3 décembre 2001 en obligeant la France à procéder à l'égalité des droits successoraux
entre les enfants qu'ils soient légitimes, naturels ou adultérins.
L'Union européenne contribue aussi à la construction de notre droit de la famille. Même si en l'état actuel, les
rapports et recommandations n'ont pas d'influence directe dans notre droit, certaines directives posent des
solutions qui sont directement applicables ou qui doivent être transposées dans l'ordre interne à plus ou moins
brève échéance. Par ailleurs, la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes concerne
également le droit de la famille. En régissant les situations relevant du droit international privé, la Cour a une
incidence directe sur l'ordre interne.

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Exemple
La CJCUE règlent les questions d'application des règlements européens notamment ceux concernant
directement le droit de la famille tel que le règlement 2201/2003 du 27 novembre 2003 relatif à la compétence,
la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité
parentale (sur le déplacement d'un enfant dans l'Union européenne, v. CJUE, 9 oct. 2014, aff. C-376/14).
Outre le droit européen lato sensu, c'est surtout l'appartenance de la France à l'Union européenne et le statut
de résident européen qui a une influence indirecte sur notre droit. La reconnaissance de droits aux résidents
européens non français influe sur notre droit interne car elle crée des paradoxes difficiles à résoudre. Ne serait-
ce qu'avant la loi du 17 mai 2013, comment appréhender les droits des homosexuels, résidents européens,
mariés valablement dans un pays de l'Union et résidant habituellement en France ? (sur cette question avant
la loi, v. notamment : E. Fongaro, « Retour sur les effets en France d'une union homosexuelle célébrée à
l'étranger », JCP N 2005, étude, p. 1238). Ces considérations conduisent à penser que les différents évolutions
probables des institutions composant l'Union européenne conduiront à repenser l'ordre juridique français.

Le droit de la famille peut être classiquement divisé en deux parties : les règles de droit qui sont relatives au
couple et celles qui concernent l'enfant.

Module 1 : Le couple Module 2 : L'enfant


Désormais le droit prend en considération et
régit différentes catégories de couples : les La filiation est le lien de droit qui unit l'enfant
époux, les partenaires (liés par un PACS) et à son père et à sa mère. Il fait du couple
les concubins. Chacun des ces couples est des parents et il est à l'origine de la fondation
soumis à des règles différentes qui attestent de d'une famille. Ce lien est éminemment juridique
l'importance que l'ordre juridique leur attribue. puisqu'il crée des effets de droit à l'égard
Si le mariage est une union qui est très des personnes qu'il unit. Il ne tient pas
réglementée par le droit, cela l'est moins pour nécessairement compte du fait biologique et
le pacte civil de solidarité et encore moins prend également en considération la réalité
pour le concubinage. Pour l'instant la dimension sociale. Ceci explique qu'une personne puisse
familiale n'est expressément reconnue qu'aux être reconnue le parent d'un enfant qu'elle élève
couples de mariés et non aux autres qui ne alors même qu'elle ne l'a pas conçu. Il existe
semblent accéder au statut de famille qu'avec différentes natures de filiation correspondant
la filiation. Le couple hétérosexuel qui a un aux différentes manières dont le lien est créé.
enfant forme ainsi une famille. Ces différences Si auparavant, il fallait distinguer entre la filiation
conduisent à envisager le mariage d'une part et légitime, naturelle, et adultérine ; chacune
les unions hors-mariage d'autre part. Le mariage entraînant des règles de droit différentes.
étant très réglementé, il convient d'étudier Depuis une ordonnance n° 2005-759 du 4
séparément : juillet 2005, toutes ces filiations obéissent à un
régime juridique commun qui permet de parler
• sa formation,
de filiation par nature. Celle-ci se distingue
• ses effets, ainsi de la filiation adoptive et de la filiation
• sa rupture, par procréation médicalement assistée. Ce lien
qui unit l'enfant aux parents crée une famille
• les effets de sa rupture.
et ainsi des droits et des devoirs à l'égard de
Une fois ces études réalisées, il sera possible chacun. Ces droits et obligations se manifestent
de s'intéresser au concubinage et au pacte civil concrètement à travers l'autorité parentale et les
de solidarité, ce qui donnera au lecteur les clés obligations d'entretien et d'aliments qui existent
d'une analyse comparative de ces différents au sein de la famille.
couples appréhendés par le droit français.

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