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COURS DE DROIT PATRIMONIAL DE LA FAMILLE : LES REGIMES

MATRIMONIAUX
Par Gaëtan IYEMBE

INTRODUCTION

Le droit patrimonial de la famille peut être défini comme le droit qui régit les rapports
pécuniaires dans la famille. Il comprend le droit des successions et des libéralités et le droit des
régimes matrimoniaux. La première partie de ce cours sera ainsi consacré au droit des régimes
matrimoniaux.

Le droit des régimes matrimoniaux est défini comme le droit qui régit les rapports
patrimoniaux des époux entre eux (usage, jouissance, disposition des biens) et avec les tiers
(acquéreurs, créanciers, débiteurs), qu’il s’agisse des revenus professionnels, des comptes
bancaires, des biens personnels ou des biens acquis au cours du mariage. Le droit des régimes
matrimoniaux est donc le droit des gens mariés. Le domaine du droit des régimes matrimoniaux
est ainsi strictement limité aux époux.

En effet, les concubins ou les couples vivant en union libre, les couples ayant une liaison
irrégulière ne sont pas soumis au droit des régimes matrimoniaux, car la loi considère qu’ils n’ont
pas de patrimoine à mettre en commun. De manière générale, ce type d’union ne produit aucun
effet juridique entre les partenaires, même si la communauté de vie implique une communauté
d’intérêt qui se traduit souvent sur le plan patrimonial. Dans ce cas, ce sont les règles de
l’indivision qui s’appliquent.

Inspiré du droit français, en particulier de la loi de 1965, la source du droit des régimes
matrimoniaux gabonais est la loi n°15/72 du 29 juillet 1972, portant adoption de la première
partie du code civil. Plus précisément, l’essentiel du statut patrimonial des époux se trouve dans
deux corps de règles distincts : articles 252 à 263, d’une part, articles 305 à 374 d’autre part.

Le second corps de règle concerne les régimes légaux alors que le premier est consacré au régime
primaire. Quant au contrat de mariage, son régime juridique est prévu aux articles 306 à 310 du
code civil.

A notre sens, deux principes d’inégales valeurs irriguent le droit des régimes
matrimoniaux : la puissance maritale et la mutabilité du régime matrimonial. Le principe de la
puissance domine les rapports entre époux. Il signifie que seul le mari est habilité à gérer le

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patrimoine familial. En dépit de l’évolution de la condition féminine, les rapports entre époux
sont demeurés des rapports hiérarchisés.

En parallèle, en vertu du principe de la liberté des conventions matrimoniales, les époux


gabonais peuvent opter pour le régime matrimonial de leurs choix. Toutefois, cette liberté
octroyée aux époux est une liberté à géométrie variable puisqu’elle dépend de la forme du
mariage choisie par les époux, à savoir mariage polygamique ou mariage monogamique.

Dans le cas d’un mariage polygamique, les époux n’ont pas le choix puisqu’ils sont soumis
impérativement au régime de séparation des biens en vertu de l’article 305.

Dans le cas d’un mariage monogamique, les époux ont le choix entre la communauté des
biens, la séparation des biens ou un régime conventionnel en vertu de l’article 305, alinéa 2.

Contrairement au code Napoléon de 1804, le choix des époux n’est pas irrévocable
puisqu’ils peuvent désormais changer de régime, sous le contrôle du juge, lorsque ce dernier n’est
pas contraire à l’intérêt du foyer en application de l’article 311. Du principe d’immutabilité des
régimes matrimoniaux de 1804, on est donc passé à un principe de mutabilité atténué ou contrôlé
des régimes matrimoniaux issu de la réforme de 1965 qui a été repris par le législateur gabonais.

A cette époque, le contexte se prêtait, en effet, à un assouplissement du principe, pour


plusieurs raisons : tout d’abord, le mariage est désormais une affaire individuelle plus qu’une
affaire de famille. Dès lors, la protection de l’intérêt de la famille qui fondait l’ancienne
immutabilité ne se justifiait plus. De même, la protection des tiers pouvait être assurée autrement
que par le principe d’immutabilité.

En effet, pour justifier le principe d’immutabilité, il était fréquemment avancé que les tiers ont
intérêt à connaître les pouvoirs des époux sur leurs biens. La mutation du régime risquait
d’entraîner la nullité des actes conclus dans le défaut de l’ignorance des pouvoirs d’un des époux.
Or, il suffisait d’organiser une publicité à l’attention des tiers pour contourner cette difficulté. Par
ailleurs, les tiers étaient déjà protégés par la théorie de l’apparence qui joue dans les rapports
entre époux, en particulier pour l’épouse qui était censée bénéficier d’un mandat domestique de
nature tacite pour les dépenses de la vie quotidienne du ménage.

Enfin, l’une des justifications invoquée autrefois en faveur de l’immutabilité est l’intérêt
des conjoints. On pensait qu’il était à craindre que l’influence prépondérante d’un des conjoints
au cours du mariage ne l’amena à abandonner les garanties qui avaient été stipulées en sa faveur

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et qu’il ne consenti à des modifications désastreuses pour lui. La règle était facilement
contournable si l’on avait permis aux époux de librement changer de régime. Or, les époux ne
sont pas des incapables qu’il faut à tout prix protéger. Pour éviter le risque de dépendance entre
les époux, un contrôle judiciaire et l’intervention du notaire sont largement suffisants.

Au regard de ce qui précède, les conditions était donc réunies à l’admission du


changement de régime matrimonial. Mais avant de changer de régime, les époux ont d’abord
éprouvé le régime qu’ils ont choisi le jour du mariage, à savoir, soit la communauté des biens,
soit un régime conventionnel fixé par contrat, soit la séparation des biens.

Même en l’absence de statistique, il est possible d’affirmer que les gabonais choisissent
majoritairement soit le régime de la communauté des biens soit la séparation des biens car leur
choix est lié à la forme du mariage choisie. En revanche, les statistiques seraient d’un intérêt
certain pour déterminer la proportion des époux gabonais qui optent soit pour le régime de
communauté des biens soit pour le régime de séparation des biens soit pour un contrat de
mariage.
Le cours de régimes matrimoniaux sera donc subdivisé en trois titres : le régime primaire (Titre
I), les régimes légaux (Titre II) et les régimes conventionnels (Titre 3).

TITRE I : LE REGIME PRIMAIRE

Le régime primaire est l’ensemble des règles qui régit les rapports patrimoniaux quotidien
des époux. C’est le régime de base. Contrairement aux régimes matrimoniaux proprement dit
qui est un droit autonome, le régime primaire est un effet du mariage, c’est-à-dire que ce régime
est étroitement lié au mariage. Sans mariage, il n’y a donc pas de régime primaire.

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Selon les auteurs Jacques Flour et Gérard Champenois, le régime primaire est celui sous
lequel on vit, le second sous lequel on meurt : le régime primaire règle les problèmes ordinaires
de la vie quotidienne des ménages, les actes qui intéressent la gestion et les dépenses, les revenus
du travail. A l’opposé, le régime matrimonial commande la répartition des richesses entre époux,
du capital qu’ils avaient en se mariant, des acquêts et des économies faits pendant la durée de
l’union ; il a pour objet les capitaux et la capitalisation des revenus.

A l’instar du droit français, le régime primaire des époux au Gabon est centré sur trois
questions essentielles : la contribution aux besoins de la famille, la solidarité pour les dettes
ménagères et la protection de la demeure familiale.

La réponse à ces questions dépend étroitement de la conception que se fait le législateur des
rapports entre époux. Prépondérance du mari ou égalité des époux ?

Comme dans le Code civil ancien, le droit des régimes matrimoniaux gabonais est
caractérisé par la prédominance maritale qui est énoncée ainsi à l’article 252, alinéa 1 : « Par
l’effet du mariage, le mari doit protection à sa femme, la femme doit obéissance à son conjoint
». La prédominance maritale ou puissance maritale confère ainsi au mari diverses prérogatives
dans la gestion du patrimoine familial. Il en résulte pour la femme mariée une sorte d’incapacité
d’exercice, c’est-à-dire qu’elle n’est pas apte à exercer certains droits par elle-même.

En pratique, soit elle est représentée par son mari soit son autorisation est nécessaire pour
l’accomplissement de certains actes. Dans les faits, elle aura besoin très souvent de l’autorisation
ou du consentement de son mari pour accomplir certains actes administratifs comme par
exemple, l’établissement d’un passeport.

La relative incapacité de la femme mariée s’explique essentiellement par une situation de


fait : la femme s’occupe du foyer et le mari pourvoie à son entretien. En d’autres termes, comme
l’a si bien formulé le juge dans un arrêt rendu le 12 février 1972, dans une affaire qui opposait
l’héritier de feue épouse Léon MBA aux héritiers de l’ancien Président que, selon la coutume,
la femme entre « les mains vides » dans son foyer conjugal. Par conséquent, « tous les biens qu’elle
possède lui sont fournis par son mari, de sorte qu’elle ne peut normalement s’en dessaisir en tout
ou en partie au profit d’un tiers sans en référer à celui-ci et sans son consentement ». En d’autres
termes, la femme ne peut accomplir des actes dispositions sans le consentement de son mari car
elle n’est propriétaire d’aucun bien pendant le mariage.

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Aujourd’hui, la condition sociale de la femme a bien évolué et met en mal cette
conception hiérarchisée des rapports entre époux. En effet, les femmes mariées exercent souvent
des activités professionnelles. Grâce à leurs revenus professionnels, elles participent désormais à
la formation du patrimoine familial.

Dans la loi de 1972, le législateur gabonais a tenu compte de cette évolution de la


condition féminine en introduisant dans les rapports entre époux plus d’égalité et en tenant
compte de l’indépendance de la femme. Toutefois, comme dans la loi française de 1965, il n’a
pas pour autant aboli la puissance maritale qui demeure la règle dans la gestion du patrimoine
familial.

Ainsi, s’agissant de la contribution aux charges du mariage, l’article 259, alinéa 1 prévoit
que si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du
ménage, ceux-ci y contribuent à proportion de leurs facultés respectives. L’alinéa 2 tempère cette
disposition en précisant que les charges du mariage incombent au mari, à titre principal. Il est
obligé, selon ses facultés et son état, de fournir à la femme tout ce qui est nécessaire pour les
besoins de la vie.

En vertu de l’article 261, la femme peut exercer la profession de son choix sauf si celle-ci
est contraire à l’intérêt de la famille. Dans ce cas, le mari peut demander au tribunal de lui
interdire l’exercice de cette profession. En dépit de cette limite, le libre exercice d’une profession
par la femme mariée lui permet d’acquérir des ressources propres qui lui permettent de
contribuer aux charges du ménage au même titre que le mari. En l’absence de revenus
professionnelles, la femme peut contribuer autrement aux charges du ménage notamment par
ses apports en communauté, son activité au foyer ou sa collaboration à l’activité professionnelle
de son mari.
Concernant ce dernier cas, l’hypothèse envisagée par le législateur est celui de la femme
mariée qui travaille avec son conjoint commerçant. La question s’est posée de savoir si elle peut
également avoir le statut de commerçant ou un autre statut juridique ?

En effet, la réponse à cette question est importante en pratique car selon son statut, la
femme peut bénéficier d’indemnités en cas de rupture du mariage. Or, en l’absence de statut, il
est fréquent que, en jurisprudence, la femme demande un dédommagement pour le travail fourni
auprès de son mari sur le fondement de l’enrichissement sans cause. Parfois, le juge est amené à
reconnaître entre les époux une société créée de fait.

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Toutefois, il est important de souligner que la question du statut de la femme mariée qui
travaille avec son conjoint commerçant, se pose surtout dans le régime de séparation de bien car
dans le régime de communauté, la communauté s’enrichit normalement du travail des époux.

Par ailleurs, selon l’article 260, dans les mariages polygamiques, il interdit d’utiliser les
revenus d’une des épouses au profit des autres. De même, en contrepartie de l’indépendance
accordée à la femme mariée, elle est responsable des dettes nées de l’emploi de ses revenus
professionnels selon l’article 261. Les créanciers ne peuvent donc exercer leur droit de poursuite
que sur les biens propres et non sur les biens communs sauf si le mari a donné son consentement
à l’opération en cause.

L’indépendance des époux, en particulier de la femme mariée est également assuré par
le principe de solidarité des dettes ménagères. En effet, la vie quotidienne créée une
interdépendance entre les époux qui rejaillit forcément sur leurs relations avec les tiers
notamment avec les créanciers du ménage. Comment alors assurer l’indépendance des époux
dans la gestion des ressources du ménage tout en protégeant les tiers qui contractent avec eux ?

Deux types de dispositions tendent à y parvenir. Les unes sont d’esprit séparatiste, elles
assurent à chaque époux son indépendance par une présomption de pouvoirs ; ce n’est pas le
choix du législateur gabonais. Les autres ont un esprit communautaire, elles associent d’une
manière ou d’une autre les époux à la gestion du ménage. Elles ont la préférence du législateur
gabonais qui a instauré la solidarité des époux pour les dettes ménagères et la cogestion pour les
actes de disposition portant sur le logement familial.

S’agissant de la solidarité pour les dettes ménagères, l’article 258 dispose que: « chacun
des époux est tenu des engagements contractés par l’autre pour l’entretien du ménage et
l’éducation des enfants.

Néanmoins, la solidarité n’a pas lieu pour les dépenses manifestement excessives, eu
égard aux capacités et au train de vie du ménage, à l’utilité ou à l’inutilité de l’opération, à la
bonne ou à la mauvaise foi du tiers. La solidarité n’a pas lieu non plus pour les obligations
résultant d’achats à tempérament, s’ils n’ont pas été conclus par consentement des deux époux.
». Il ressort de cette disposition que toutes dépense faite par un époux et ayant pour objet
l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants engage solidairement les deux conjoints, même
si la solidarité n’a pas été stipulée, même si l’engagement n’a pas été conjoint : c’est la déclinaison

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du principe de solidarité légale. Par conséquent, le créancier peut réclamer la totalité du paiement
à chacun des deux époux, ce qui renforce le crédit du ménage et surtout celui de la femme.

Toutefois, les dépenses excessives eu égard au train de vie du ménage, les emprunts sauf
s’ils sont « modestes et nécessaires aux besoins de la vie courante », les achats à tempérament,
même modestes ne donnent pas lieu à solidarité.

S’agissant de la protection du logement familial, la règle de la cogestion sur tous les actes
intéressant le logement familial permet d’assurer l’égalité entre les époux dans la gestion du
patrimoine familial.

Dans un contexte de crise du logement, la protection du logement familial est un impératif


car il constitue souvent le seul bien de la famille. C’est pourquoi, il est nécessaire qu’il soit protégé
des crises pouvant affecter la famille telles que le divorce ou le décès d’un conjoint. Le logement
familial a donc un statut particulier. L’essentiel de son régime juridique est prévu à l’article 254
qui dispose que : « Le choix de la résidence de la famille appartient au mari ; la femme est obligée
d’habiter avec lui, et il est tenu de la recevoir.

Lorsque la résidence fixée par le mari présente pour la famille des dangers d’ordre physique ou
d’ordre moral, la femme peut être autorisée par le tribunal à avoir pour elle et ses enfants une
autre résidence.

Les époux ne peuvent, l’un sans l’autre, disposer des droits par lesquels est assuré le
logement de la famille, ni des meubles dont il est garni. Celui des époux qui n’a pas donné son
consentement à l’acte de disposition peut en demander l’annulation ; l’action en nullité lui est
ouverte dans l’année à partir du jour où il a eu connaissance de l’acte, sans pour autant être
intentée plus d’un an après la dissolution du régime matrimonial . ».

Si la primauté du mari demeure la règle dans le choix de la résidence de la famille, celle-


ci est écartée en présence d’actes de disposition touchant au logement de la famille. Dans ce cas
précis, la réduction des pouvoirs de l’époux a certainement pour objet l’aliénation volontaire
entre vifs de la pleine propriété, qu’elle soit à titre onéreux ou à titre gratuit.

La réduction des pouvoirs du mari est également palpable dans les régimes matrimoniaux
proprement dit. En réalité celle-ci ne concerne uniquement que le régime de communauté des
biens, éventuellement le régime conventionnel choisi par les époux.

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TITRE II : LES REGIMES LEGAUX
Il s’agit du régime de communauté des biens réduite aux acquêts (Chapitre 1) et du régime
de la séparation des biens (Chapitre 2).

Chapitre 1. La communauté des biens réduites aux acquêts

Le régime de la communauté des biens réduite aux acquêts est assurément le régime
matrimonial qui symbolise le mieux la communauté d’intérêts qui existe entre les époux. Il est
caractérisé par la prépondérance du mari dans la gestion des biens communs ; l’existence de trois
masses de biens, à savoir une masse commune et les biens propres de chacun des époux, ce qui
implique que, contrairement à la séparation des biens où il n’y a pas de masse commune, des
opérations de liquidation soient nécessaires lors du partage de la communauté, c’est-à-dire à la
dissolution du régime ; A cet effet, la loi facilite la liquidation du régime en instaurant la
présomption de communauté ou présomption d’acquêts, ce qui permet de déterminer le
caractère propre ou commun d’un bien.
La détermination du caractère propre ou commun d’un bien est une question essentielle
car, elle commande la répartition des biens entre les trois masses, les pouvoirs des époux et le
droit de poursuite des créanciers. L’ensemble de ces questions seront abordées dans une section
1 portant sur la vie de la communauté.
A la mort de la communauté, il s’ensuit alors la dissolution et la liquidation du régime en vue de
répartir entre les époux la richesse acquise durant le mariage. La section 2 sera donc consacrée à
la mort de la communauté.

Section 1. La vie de la communauté


Trois questions agitent la vie de la communauté. La première est relative à la répartition
des biens et a trait à la composition de la communauté (Sous-section 1). Les deux autres questions
concernent les pouvoirs des époux et des créanciers. Elles ont trait à la gestion de la communauté
(Sous-section 2).

Sous-section 1. La composition de la communauté


Le régime de la communauté se caractérise par la constitution de trois masses de biens : une
masse commune et une masse propre appartenant à chacun des époux.
Afin de répartir les biens entre les diverses masses, il convient de déterminer leurs compositions
à l’actif (§1) et au passif (§2).

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§1. L’actif de la communauté

L’actif de la communauté se compose des acquêts ou biens communs (§1) et des propres
appartenant à chacun des époux ou biens propres (§2).

A. Les biens communs


Le législateur n’a pas défini les acquêts ou les biens communs. Cependant, il a énuméré
un certain nombre de biens considérés comme des acquêts. Parmi ces différents biens, les
revenus occupent une place importante dans les biens communs, en particulier les gains et
salaires. Les différents acquêts (1) et les revenus (2) seront abordés successivement.
1. Les différents acquêts
Aux termes de l’article 319 2/, l’actif commun est composé : « Des acquêts faits par les époux,
ensemble ou séparément, durant le mariage et provenant tant de leur industrie personnel que
des économies faits sur leurs salaires ». Il ressort de cet article que toutes acquisitions à titre
onéreux faites pendant la durée du régime par le mari ou par la femme, ensemble ou séparément,
est un acquêt, qu’il s’agisse d’une acquisition faite au moyen d’un prix payé, des économies déjà
faites, d’un crédit, ou qu’il s’agisse de création de valeurs nouvelles grâce à l’activité des époux
(par exemple, un fonds de commerce créé pendant le mariage).
L’article 320 ajoute que « tout bien meuble ou immeuble est réputé acquêt ». La loi pose
ainsi une présomption simple d’acquêt ou de communauté qui permet d’approvisionner l’actif
commun.
Si la loi s’appuie sur l’origine onéreuse des biens afin de les répartir à l’actif de la
communauté, la présomption de communauté permet d’étendre son domaine.
2. Les revenus
Aux termes de l’article 320 1/, la communauté se compose des revenus affectés aux
charges du ménage. Si la loi vise principalement les gains et salaires, il peut s’agir également des
revenus des propres (par exemple, un loyer). Dans cette hypothèse, il s’est posé la question de
savoir à quel moment ceux-ci acquièrent la nature de biens communs. En d’autres, acquièrent-ils
la nature de biens communs dès leur naissance ou leur perception ?
Selon une jurisprudence française constante, les revenus des propres sont communs dès qu’ils
ont été perçus. Il en va de même des revenus du capital ou de rente tels que les dividendes
d’actions en bourse. A l’opposé, les gains et salaires sont communs dès leur naissance sans que
soit nécessaire leur perception.

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B. Les biens propres
La loi distingue trois catégories de propres :
− Les propres par origine

− Les propres par nature

− Les propres par rattachement

1. Les biens propres par origine


Selon l’article 321, tous les biens dont un époux avait la propriété ou la possession avant
le mariage sont propres. La loi vise les biens présents et les biens futurs.
Les biens présents sont les biens dont les époux avaient la propriété avant le mariage
tandis que les biens futurs sont les biens acquis pendant le mariage par succession ou libéralités.
La répartition des biens à l’actif propre pose des difficultés juridiques lorsque le titre d’acquisition
n’avait pas de date certaine ou en présence d’une promesse unilatérale de vente antérieure à la
naissance du régime.
En ce qui concerne les difficultés liées à la certitude de la date d’acquisition du bien, un
arrêt de la Cour de cassation française rendu le 16 avril 1996, avait décidé que le bien acquis était
commun.
S’agissant de la promesse unilatérale de vente, lorsque la levée d’option est exercée
pendant la durée de la communauté, le bien acquis est commun.

2. Les biens propres par nature


En vertu de l’article 322, les propres par nature sont les biens propres à chacun des époux.
Autrement dit, ce sont les biens ayant un caractère personnel y compris les instruments de travail
nécessaires à la profession de l’un des époux, mêmes acquis pendant le mariage. Cependant, la
répartition des meubles corporels et incorporels soulève quelques difficultés juridiques.
S’agissant des meubles corporels, l’article 322 prévoit que « les vêtements et linges » à usage
personnel sont des propres par nature. A contrario, le linge à usage commun est un bien
commun.
S’agissant des meubles incorporels, le même article prévoit que « les actions en réparation de
dommage corporel ou moral, les créances et pension, tous les biens qui ont un caractère
personnel et tous les droits exclusivement attachées » sont des propres par nature. Toutefois, les
indemnités perçues en réparation d’un préjudice matériel tombent en communauté. De même,

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le bénéfice de l’assurance-vie est un bien propre sauf lorsque les primes payés ont été
manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur.

3 Les biens propres par rattachement


Il ressort de l’examen de l’article 323 deux catégories de propres par rattachement : les
propres par accroissement et les propres par remplacement.
La première catégorie comprend les biens acquis à titre d’accessoire d’un bien propre
(par exemple, l’époux propriétaire d’un immeuble qui y découvre un trésor ; le trésor, accessoire
de l’immeuble est un propre par accroissement), les valeurs nouvelles, les valeurs nouvelles, les
accroissements se rattachant à des valeurs mobilières propres (par exemple, la plus-value due à
la vente d’un immeuble).
De même l’article 325 prévoit que l’acquisition de la partie d’un bien dont l’un des époux
était propriétaire indivis est un propre par accroissement. Ainsi, les biens propres voient leur
domaine s’étendre par l’effet de la théorie de l’accessoire et de l’indivision. Cependant, cet
accroissement est contenu par la théorie des récompenses.
En effet, les récompenses sont dues chaque fois qu’il y a eu déplacement des valeurs de
la communauté à un propre ou inversement. C’est le cas par exemple, lorsque les deniers
communs ont servi pour l’acquisition d’un propre. Dans ce cas l’époux propriétaire doit
récompense à la communauté.

§2. Le passif de la communauté


En vertu du principe de la corrélation de l’actif et du passif, il y a un passif commun aux
deux époux et un passif propre à chacun des époux. A l’instar de l’actif, il se pose la question de
la répartition du passif entre les trois masses (A). En revanche, il ne s’agit plus d’une question de
pouvoirs mais de contribution des époux au passif. En réalité, la question qui est posée est celle
relative à l’étendu du droit de poursuite des créanciers (B).

A. La composition du passif
La répartition du passif entre les trois masses est d’abord une question de politique
juridique avant d’être une question technique. En ce sens, les dispositions prises tendent surtout
à assurer le crédit du ménage, qu’il s’agisse du passif commun (1) ou du passif propre (2).

1. Le passif commun
Aux termes de l’article 327, les dettes communes sont :

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- Les aliments dus par les époux et les dettes contractées par eux, pour l’entretien du ménage et
l’éducation des enfants ;
- Les dettes contractées par la femme en qualité de représentant de son mari, ou comme gérante
des affaires de celui-ci ou de la communauté ;
- Les dettes des deux époux qui n’ont pas leur source dans un acte juridique ;
- Les dettes de la femme postérieures à la formation de la communauté lorsqu’elles sont nées
dans les conditions prévues à l’article 253, alinéa 3 ;
- Les dettes assumées par la femme avec le consentement ou l’acquiescement de son mari, ou
avec l’autorisation de la justice dans le cas prévu à l’article 256 du présent code ;
- Les dettes contractées d’un commun accord pour l’acquisition, la conservation ou l’amélioration
d’un bien propre ou dans l’intérêt personnel de l’un des époux.
Il ressort du présent article que la loi opère une distinction entre les dettes nées du mari
et les dettes nées de la femme. Dans un contexte de toute puissance maritale, la logique voudrait
seules les dettes nées du chef du mari soient supportées par la communauté. Mais cette solution
présente l’inconvénient d’affaiblir le crédit du ménage. C’est pourquoi, le législateur fait supporter
à la communauté les dettes nées aussi de la femme dans trois cas :
- Lorsque la femme a suppléé le mari dans son rôle de chef de famille. C’est l’hypothèse évoquée
à l’article 327 4/;
- Lorsqu’elle a été mandatée par son mari pour gérer ses affaires ou ceux de la communauté
(article 327 2/) ;
- Lorsqu’elle a contracté des dettes expressément avec l’accord du mari ou sur autorisation de
justice (article 256).

Outre les dettes ménagères qui sont nécessairement communes, les dettes d’aliment sont
supportées également par la communauté en application de l’article 327 1/, même ceux qui sont
étrangères aux intérêts de l’union conjugal (Par exemple, la pension alimentaire due au précédent
époux divorcé).
Enfin, lorsqu’un époux a contracté une dette avec l’accord de son conjoint dans son
intérêt ou l’amélioration d’un propre, cette dette est nécessairement commune (article 327 6/). A
contrario, la dette est propre lorsque l’engagement a été contracté dans l’intérêt personnel d’un
des époux, sous réserve d’une récompense due à la communauté, lorsque celle-ci a financé
l’amélioration ou la conservation d’un bien personnel de l’un des époux ou lorsque les deniers
de la communauté ont servi à acquitter une dette ou charge personnelle, en application de l’article
328.

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2. Le passif propre
Deux catégories de dettes pèsent à titre définitif sur le patrimoine propre des époux: les
dettes nées avant le mariage et les dettes d’origine délictuelle ou quasi-délictuelle.
La première catégorie comprend les dettes dont un époux est tenu au jour du mariage, quelle
que soit la date de leur exigibilité, ainsi que celles qui grèvent les biens recueillis par succession
ou libéralités (article 330).

La deuxième catégorie comprend les amendes encourues en raison d’infractions pénales,


et les réparations et dépens dus par un époux ayant engagé sa responsabilité civile délictuelle ou
quasi-délictuelle « déduction faite du profit retiré par la communauté (article 329).
Si la communauté a acquitté une partie ou la totalité de ces dettes, elle a droit à récompense, à
hauteur de ce qu’elle a acquitté.

B. Le droit de poursuite des créanciers


En principe, le droit de poursuite des créanciers porte en premier lieu sur les biens
communs et par exception, sur les biens propres. Le principe (1) et l’exception seront
successivement abordés (2).

1. Le principe
En vertu de l’article 332, alinéa 2, le droit de poursuite des créanciers s’exerce sur les
biens communs lorsque la dette est née du chef du mari sauf en cas de solidarité entre époux.
Les hypothèses visées par le législateur sont celles relatives aux dettes ménagères où la solidarité
est toujours présumée ; et celles relatives aux dettes nées de la femme dans les cas énumérées par
la loi.

2. L’exception
Aux termes de l’article 331, les créanciers personnels de l’un ou l’autre des époux ne
peuvent poursuivre le paiement de leur créance que sur les biens propres de leurs débiteurs sauf
« lorsque le mobilier qui appartient au débiteur au jour du mariage ou qui lui est échu par
succession ou libéralités a été confondu dans le patrimoine commun et ne peut plus être identifié
». Ainsi, en cas de confusion de fait, le droit de poursuite des créanciers est neutralisé puisqu’il
ne pourra plus l’exercer sur les biens propres lorsqu’ils sont confondus avec les biens communs.
En pratique, les créanciers vont prévoir des clauses de solidarité dans le contrat afin de se
prémunir contre une telle éventualité.

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Sous-section 2. La gestion de la communauté
La gestion de la communauté touche aux pouvoirs des époux sur les trois masses de bien.
En vertu du principe de la primauté maritale, le mari est le chef de la communauté. Il a donc la
gestion exclusive de la communauté. Si le mari a des pouvoirs étendus sur la communauté,
chacun des époux conserve en revanche la gestion exclusive de ses propres. Il convient donc de
distinguer la gestion des biens communs (§1) de la gestion des propres (§2).

§1. La gestion des biens communs


En principe, l’exclusivité de la gestion est confiée au mari sous réserve de l’application
des règles de cogestion pour les actes les plus graves. Si la gestion maritale exclusive est la règle
(A), la cogestion en est l’exception (B).

A. Le principe
Le principe de la primauté maritale dans la gestion de la communauté est tempéré en
situation de crise, car la loi permet à la femme de se substituer au mari sous certaines conditions.
L’exposé du principe (1) et le tempérament (2) seront abordés successivement.

1. L’exposé du principe
En principe, seul le mari peut engager la communauté, en application de l’article 335. Il peut
donc prendre des actes d’administration comme des actes de disposition. Les difficultés
juridiques se posent en particulier pour les actes de disposition, car c’est à l’occasion de la
conclusion de tels actes qu’il peut commettre des fautes de gestion. Il s’agit très souvent des actes
soumis à cogestion tels que le legs d’un bien commun à un tiers sans le consentement de sa
femme. Dans ce cas, sa responsabilité civile peut être engagée envers la communauté, sous
réserve également des dispositions de l’article 338 qui prévoient la possibilité pour la femme
d’intenter une action en nullité relative de l’acte en cause. La mise en œuvre de ladite action se
fait généralement à la dissolution du régime.

2. Le tempérament
Selon l’article 337, la femme peut se substituer au mari lorsqu’il est de manière durable
hors d’état de manifester sa volonté ou sa gestion de la communauté atteste l’inaptitude. Pour ce
faire, elle doit saisir le juge afin qu’il lui transfère de manière momentanée ou durable les pouvoirs
du mari à engager la communauté. En situation de crise, l’épouse ou la première épouse dans les
mariages polygamique seront ainsi habilités à engager la communauté.

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B. L’exception : la cogestion
La cogestion est la règle en présence des actes les plus graves, c’est-à-dire celles qui
nécessitent le consentement du conjoint. Il s’agit principalement des actes de dispositions. Le
domaine de la cogestion (1) et ses effets dans les rapports entre époux (2) feront l’objet de ce
paragraphe.

1. Le domaine de la cogestion
Il s’agit essentiellement des actes de dispositions. La loi distingue les actes de disposition
à titre gratuit des actes de dispositions à titre onéreux.
En ce qui concerne les actes de disposition à titre gratuit, l’article 336 1/ prévoit que le mari ne
peut sans le consentement de sa femme disposer des biens communs entre vifs à titre gratuit
même pour l’établissement des enfants. Cette disposition ne s’applique qu’aux donations, les legs
étant des libéralités pour cause de mort.
Quant aux actes de dispositions à titre onéreux, l’article 336 2/ prévoit que, outre le
logement familial, la loi énumère un certain nombre d’actes qui nécessitent le consentement de
la femme, à savoir les aliénations à titre onéreux (vente ou échange), la constitution de droits
réels, la perception de capitaux provenant de ces acquisitions, le bail de longue durée, les biens
de grande valeur tels que les immeubles, le fonds de commerce, les meubles prévoient la
possibilité pour la femme d’intenter une action en nullité relative de l’acte en cause. La mise en
œuvre de ladite action se fait généralement à la dissolution du régime.

2. Le tempérament
Selon l’article 337, la femme peut se substituer au mari lorsqu’il est de manière durable
hors d’état de manifester sa volonté ou sa gestion de la communauté atteste l’inaptitude. Pour ce
faire, elle doit saisir le juge afin qu’il lui transfère de manière momentanée ou durable les pouvoirs
du mari à engager la communauté. En situation de crise, l’épouse ou la première épouse dans les
mariages polygamique seront ainsi habilités à engager la communauté.

B. Le transfert de pouvoirs d’origine judiciaire


Le transfert de pouvoir d’origine judiciaire peut se faire, soit à la demande d’un des
conjoints (1) soit à la demande d’un administrateur judiciaire (2).

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1. Le conjoint
Aux termes de l’article 341, lorsqu’un époux est hors d’état de manifester sa volonté ou
met en péril les intérêts de la famille, soit en laissant dépérir ses propres, soit en dissipant ou en
détournant les revenus qu’il en tire, à la demande de son conjoint, le juge peut le dessaisir de
l’administration et de la jouissance de ses propres.

2. L’administrateur judiciaire

Aux termes de l’article 341, alinéa 2, le juge peut confier la gestion des propres d’un
conjoint à un administrateur judiciaire dans le cadre d’un redressement judiciaire ou d’une
liquidation judiciaire.

Dans tous les cas, le transfert judiciaire des pouvoirs aboutit en réalité à un retrait des
pouvoirs du conjoint en cause sur ses propres. In fine, à la différence d’un célibataire ou d’un
époux séparé de biens qui peut, l’un et l’autre faire ce qu’ils veulent sur leurs biens, un conjoint
commun en bien doit convenablement gérer sa fortune personnelle et même en affecter les
revenus à la communauté. Ainsi, ce dernier n’a pas une pleine indépendance sur ses propres qui
demeurent affectés aux besoins du ménage.

Section 2. La fin de la communauté

La fin de la communauté est marquée par deux évènements, à savoir la dissolution (Sous-
section 1) et le partage (Sous-section 2).

Sous-section 1. La dissolution de la communauté

La loi énumère de manière limitative les causes de dissolution de la communauté. En


principe, toutes ces causes sont liées à la rupture du mariage. Les unes découlent de la rupture
volontaire du mariage et d’autres sont indépendantes de la volonté des époux. Les causes liées à
la rupture volontaire du mariage (§1) et celles liées à la rupture involontaire (§2) seront abordées
successivement.

§1. Les causes liées à la rupture volontaire du mariage


Aux termes de l’article 346, il s’agit du divorce, de la séparation de corps, de la
renonciation volontaire à l’engagement de monogamie et de la séparation des biens judiciaire.

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Ces causes peuvent être regroupées en deux catégories, celles qui entraîne la rupture définitive
du mariage (A) et celles qui entraîne le relâchement du lien conjugal (B).

A. Les causes entraînant la rupture du mariage


Il s’agit essentiellement du divorce. Le prononcé du divorce entraîne la dissolution de la
communauté. Celle-ci ne prend pas effet le même jour, dans les rapports entre époux (1) et à
l’égard des tiers (2).

1. Dans les rapports entre époux


Aux termes de l’article 288, la dissolution de la communauté prend au jour où le jugement
prononçant le divorce devient définit, c’est-à-dire que la décision est passée en force de chose
jugée. Les opérations de liquidation et de partage peuvent enfin débuter. Avant leur début effectif,
les époux sont dans une indivision post-communautaire.
Celle-ci obéit au régime de droit commun des indivisions prévu aux articles 749 à 760 du Code
civil.
2. Dans les rapports à l’égard des tiers
En application de l’article 287, la dissolution de la communauté prend effet à partir du
jour où les dispositions du jugement ou l’arrêt prononçant le divorce sont transcrites sur les
registres de l’état civil du lieu où le mariage a été célébré.

B. Les causes de rupture entraînant un relâchement du lien conjugal


La séparation de corps, la renonciation volontaire à l’engagement de monogamie (1) et la
séparation des biens judiciaire (2) seront abordés successivement.

1. La séparation de corps et la renonciation volontaire à l’engagement de monogamie


La séparation de corps et la renonciation volontaire à l’engagement de monogamie (article
178) n’entraîne pas la rupture du lien conjugal. Si la première entraîne un relâchement du lien
conjugal, la seconde n’a aucun impact sur ce dernier, sauf sur la forme du mariage. Dans les deux
cas, elles entraînent un changement de régime matrimonial, puisque les époux sont placés d’office
sous le régime de la séparation des biens, en application des articles 300 et 305 du Code civil.
La décision prononçant ou homologuant le changement de régime a effet entre les parties
au jour du prononcé du jugement. Il n’est opposable aux tiers que trois mois après la mention en
marge de l’acte de mariage (article 314).

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2. La séparation des biens judiciaire

Prévue à l’article 346 4/, la séparation des biens judiciaires a pour objet de procéder à la
liquidation anticipée des droits de chaque époux et à la fixation du patrimoine propre de chacun.

Si chacun des époux peut demander la séparation des biens judiciaires, c’est la femme
que la loi veut protéger conséquences fâcheuses de la gestion du mari de la communauté. Ainsi,
la femme peut saisir le juge afin d’ordonner une séparation des biens.

En cas de succès de la demande, les époux seront soumis au régime de la séparation des
biens.

§2. Les causes liées à la rupture involontaire du mariage

Il s’agit du décès et de situations assimilées, à savoir l’absence et la disparition.

A. La mort du conjoint

Le décès de l’un des conjoints entraîne la dissolution de la communauté et ouvre en


même temps sa succession. Dans ce cas de figure, on procède à la rédaction d’un inventaire, à
titre conservatoire. Celle-ci permet de protéger les intérêts des héritiers, en particulier lorsqu’ils
sont mineurs. En attendant le partage, le conjoint survivant peut bénéficier des gains de survie.

B. L’absence et la disparition du conjoint

Dans l’absence, une personne a cessé de paraître à son domicile ou à sa résidence et dont
a plus de nouvelles. Quant à la disparition, elle est le fait pour une personne de ne pas reparaître
à la suite de circonstances de nature à mettre en danger sa vie.

Le jugement déclaratif d’absence produit les mêmes effets que le décès. Ceux-ci peuvent
s’étendre à la disparition même si la loi ne le mentionne pas expressément. Ainsi, le jugement
déclaratif d’absence étant assimilé à l’acte de décès, la dissolution de la communauté prend effet
à partie de la date où le jugement est devenu définitif.

Sous-section 2. Le partage de la communauté


En raison de l’existence d’une masse commune entre les époux, il est logique procéder
au partage à la dissolution du régime. Mais avant le partage, il est nécessaire de déterminer la
consistance de la masse commune. Pour ce faire, on procède au préalable à la liquidation de la

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masse commune (Section préliminaire) qui sera suivie ensuite du partage qui se portera sur l’actif
(Section 1) et sur le passif (Section 2).

Sous-section préliminaire : La liquidation


La liquidation est une opération comptable, préalable au partage, qui consiste à fixer et à
chiffrer les droits de chacun, c’est-à-dire déterminer la consistance de la communauté au jour de
la dissolution et l’évaluer au jour du partage. Elle précise la composition de la masse active et
celle de la masse passive et permet de calculer les droits de chacun. L’opération principale et la
plus complexe a pour objet le calcul des récompenses.
Le régime juridique du calcul des récompenses est prévu par aux articles 349 à 351.
Aux termes de l’article 349, il est dressé au nom de chaque époux, un compte de récompense
que la communauté lui doit et les récompenses qu’il doit à la communauté.
L’article 350 ajoute que si la balance de paiement faite, le compte présente un solde en
faveur de la communauté, l’époux en rapporte le montant à la masse commune ; s’il présente un
solde en faveur de l’époux, celui-ci peut soit en demander le remboursement à la masse
commune, soit prélever des biens jusqu’à concurrence de la somme active ou passive. En d’autres
termes, il peut demander soit un paiement soit un prélèvement sur les biens communs. S’il opte
pour le prélèvement, l’article 351 prévoit dans quel ordre celui-ci va se dérouler.
En effet, les prélèvements s’exercent d’abord sur l’argent comptant, ensuite sur les
meubles et, subsidiairement sur les immeubles. Par faveur pour la femme, la loi prévoit que ses
prélèvements s’exercent avant ceux du mari, sauf si le divorce a été prononcé aux torts exclusifs
de la femme.
Dans tous les cas, l’époux qui opère le prélèvement a le droit de choisir les meubles et les
immeubles qui auront sa préférence.

§1. Le partage de l’actif


Il découle des dispositions de l’article 356, alinéa 1 que Le partage de l’actif commun est
soumis aux règles régissant le partage des successions. Celles-ci sont fondées sur deux principes :
le principe d’égalité (A) et le principe de l’effet déclaratif du partage (B).

A. Le principe de d’égalité
L’application du principe de l’égalité conduit à un partage par moitié de la masse
commune entre les époux (1) sous réserve de l’application des règles de l’attribution
préférentielle (2).

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1. Le principe : le partage par moitié
Selon l’article 355, la masse commune se partage par moitié entre les époux ou leurs
représentants sauf en cas de recel (article 358). Celui des époux qui aurait diverti ou recelé
quelques effets de la communauté se voit donc privé de sa portion dans lesdits biens.
Comme en matière successorale, certains biens importants peuvent faire l’objet d’une attribution
préférentielle.

2. L’exception : l’attribution préférentielle


En vertu de l’article 356, alinéa 2, lorsque la dissolution de la communauté résulte du
décès , de l’absence, de la disparition de l’une des époux, le conjoint survivant a la faculté de se
faire attribuer l’entreprise commerciale, industrielle, artisanale ou agricole dont l’exploitation était
assurée par lui-même ou par son conjoint, si au jour de la dissolution de la communauté il
participait lui-même effectivement à cette exploitation. Il en est de même de l’immeuble ou la
partie de l’immeuble servant effectivement de logement familial, ou le droit au bail des locaux
assurant le logement familial.
En cas de conflit, l’époux le plus diligent saisira le juge compétent qui est celui du lieu de
leur domicile.

B. Le principe de l’effet déclaratif du partage


Prévu à l’article 811 du Code civil, deuxième partie, chaque héritier est considéré être
propriétaire des biens contenus dans son lot dès le jour du décès. De même les époux sont censés
être propriétaire des biens contenus dans leur portion dès le jour de la dissolution de la
communauté. L’application du principe de l’effet déclaratif du partage emporte plusieurs
conséquences pour les époux (1). Certaines sont assorties d’exceptions(2).

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