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de la famille
2e édition
Carole Petit
Maître de conférences UCLY
Principales abréviations.....................................................................................................................................3
Introduction...............................................................................................................................................................5
PR EMIÈR E PARTIE
Le lien de couple
CH A PITR E 1
L’union..............................................................................................................11
CH A PITR E 2
La désunion.................................................................................................... 58
CH A PITR E 1
La filiation......................................................................................................119
Index........................................................................................................................................................................... 231
Table des matières..............................................................................................................................................235
1. Adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre 1989 et entrée en vigueur en France le 2 septembre
1990.
2. Adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948.
3. Supprimé sous la Restauration par la loi du 8 mai 1816, il est rétabli par celle du 27 juillet 1884, cf. infra n° 82.
1. Certains pans du Droit patrimonial de la famille sont sortis de l’étude classique du Droit de la famille et étudiés au titre des
régimes matrimoniaux et des successions, lesquels ne seront pas traités dans cet ouvrage.
Le lien de couple
Le Code civil connaît aujourd’hui trois formes d’unions : le mariage, le Pacte civil de solidarité
et le concubinage.
9. Mariage. Il ne définit pas le mariage, qui constituait en 1804 une évidence rendant inutile
– voire impossible – la conceptualisation juridique1. Le mariage revêt toutefois trois
caractères principaux. Il est civil ; il s’agit d’une union laïque célébrée lors d’une cérémonie
républicaine2. Il est solennel puisqu’il est célébré par un officier d’état civil après accom-
plissement de certaines formalités légales et recueil public des consentements. Il est
enfin personnel. Le majeur protégé ne peut en effet pas être représenté pour se marier.
L’article 460 prévoyait néanmoins un régime d’autorisation, point d’équilibre entre respect
de la liberté du mariage et caractère personnel, d’une part, et protection des personnes
vulnérables et de leur consentement, d’autre part3. Il a été modifié par la dernière loi de
programmation et de réforme pour la justice qui lui substitue un régime d’information4.
Article 460
1. Portalis définissait le mariage comme « la société de l’homme et de la femme qui s’unissent pour perpétuer leur espèce,
pour s’aider par des secours mutuels à porter le poids de la vie et pour partager leur commune destinée ». Pour Carbonnier,
il s’agissait de « l’acte par lequel un homme et une femme qui se sont mutuellement choisis s’engagent à vivre ensemble
jusqu’à la mort » (Droit civil, t. II, PUF, 21e éd., 2002, p. 368).
2. Seul le mariage civil emporte des effets juridiques. Les époux peuvent bien sûr choisir de faire célébrer un mariage religieux
mais celui-ci ne produira pas d’effets de droit et doit être célébré après le mariage civil (C. pén., art. 433-21).
3. Cons. Const., 29 juin 2012, décision QPC n° 2012-260 : conformité de l’article 460 al. 1er (anc.) à la Constitution (« eu égard aux
obligations personnelles et patrimoniales qui en résultent, le mariage est un acte important de la vie civile, en subordonnant
le mariage d’une personne en curatelle à l’autorisation du curateur ou à défaut celle du juge, le législateur n’a pas privé la
liberté du mariage de garanties légales ; les restrictions dont il accompagne son exercice, afin de protéger les intérêts de la
personne, n’ont pas porté à cette liberté une atteinte disproportionnée »). Cf. aussi CEDH, 25 oct. 2018, n° 37646/13, Delecolle
c/ France, Dr. fam. 2018, chron. 4, A. Gouttenoire et F. Marchadier.
4. Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, art. 10. Ladite information est à justifier au titre des formalités préalables à la célébration
(C. civ., art. 63) et une opposition est possible de la part du tuteur ou du curateur (C. civ., art. 175). Cf. infra n° 42 à 44. Cf.
Rapport du défenseur des droits sur la protection juridique des majeurs vulnérables, 29 sept. 2016.
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Article 461
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11. Concubinage. Le concubinage est également défini par le Code civil. L’article 515-8 le désigne
comme « une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de
stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui
vivent en couple ». Il n’a aucun caractère solennel. Aucune formalité particulière n’est à
respecter ; il n’y a ni engagement public de volonté, ni célébration, ni même enregistrement
légal quelconque. On peut en revanche retenir les caractères civil – du moins laïc – et
personnel, même s’ils ont ici assez peu de sens.
Au-delà de ces définitions, le Droit ne reconnaît la situation de couple et ne lui confère des
effets juridiques (section 2) que si elle remplit les conditions de formation du mariage, du
Pacs ou du concubinage (section 1).
12. Acte ou fait juridique ? Le mariage est un acte juridique d’une nature particulière et duale.
Il est à la fois un contrat, puisqu’il est formé par un accord de volontés, et une institution,
puisque son statut est déterminé par le Code civil. Le Pacs est également un acte juridique
d’une nature hybride. Il est clairement défini par le Code civil comme un contrat, l’aspect
contractuel étant d’ailleurs plus marqué que dans le mariage1. Mais il s’agit d’un contrat
spécifique comme le montre sa place dans le Code civil2 et son inscription en marge de l’acte
de naissance des partenaires. Le législateur le définit, ainsi que son objet, les conditions de
sa conclusion et de sa rupture, de même que les obligations qui en découlent. Il est donc
également un statut du couple. Le concubinage, quant à lui, bien que défini dans le Code
1. Le Conseil constitutionnel a rappelé la nature contractuelle du Pacs dans une décision du 21 octobre 2015, n° 2015-9 LOM.
2. « Livre Premier : Des personnes ».
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Le Droit est désormais indifférent au sexe des membres du couple, tandis que l’âge de ces
derniers est une condition qui semble prendre une importance croissante. Le consentement
des membres du couple est également une condition fondamentale, particulièrement
visible dans le mariage.
1. L’indifférence au sexe
13. Concubinage et Pacs. Bien avant sa consécration dans le Code civil, la Cour de cassation
acceptait de faire produire des effets juridiques à l’union libre, mais seulement entre
personnes de sexe différent, estimant que le concubinage ne pouvait résulter que d’une
relation stable et continue ayant l’apparence du mariage, donc, à l’époque, entre un homme
et une femme1. Mais dès le début des années 1990, des groupes de pression se sont constitués
afin de réclamer un statut pour les couples non mariés. Les couples de personnes de sexe
opposé, qui ne voulaient pas se marier, ont progressivement rejoint les revendications des
couples de personnes de même sexe qui, eux, ne pouvaient pas se marier.
Le législateur a fini par prendre en compte ces revendications et, après diverses proposi-
tions2, la loi du 15 novembre 1999 a créé le Pacte civil de solidarité, ouvert aux couples de
sexe différent ou de même sexe. L’intégration du concubinage dans le Code civil au cours
du vote de la loi sur le Pacs3 a également donné aux couples de personnes de même sexe
la qualité de concubins que leur refusait jusque-là la Cour de cassation.
1. Soc., 11 juill. 1989 n° 85-46008 et 86-10665 ; Civ. 3e, 17 déc. 1997, n° 95-20779.
2. Les modalités du statut à créer ont fait débat, outre le débat suscité par l’opportunité même de la création d’un statut.
Fallait-il le réserver aux couples ? Fallait-il le réserver aux couples homosexuels ? Ont d’abord été proposés un contrat de
partenariat civil en 1990, un contrat d’union civile (C.U.C.) en 1992, un contrat de vie sociale (C.U.S.) en 1993 et 1997, puis un
pacte d’intérêt commun (P.I.C.) en 1998.
3. Le Pacs résulte d’une initiative parlementaire. Le Sénat, hostile à son adoption, avait rejeté la proposition tout en proposant,
en contrepartie et en espérant voir ainsi rejeter le Pacs, que soit insérée dans le Code civil une définition du concubinage
englobant les couples homosexuels.
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1. Même si certains articles portaient en eux cette condition : l’article 144, qui énonçait jusqu’à sa modification en 2006 que
« l’homme avant 18 ans révolus et la femme avant 15 ans révolus, ne peuvent contracter mariage », l’ancien article 75 in fine,
selon lequel l’officier d’état civil, lors de la célébration, « recevra de chaque partie, l’une après l’autre, la déclaration qu’elles
veulent se prendre pour mari et femme […] », l’article 162 qui prohibait le mariage entre frère et sœur.
2. Déclaration universelle des droits de l’homme, art. 16 : « 1. À partir de l’âge nubile, l’homme et la femme, sans aucune
restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit de se marier et de fonder une famille. Ils ont des droits
égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution ».
3. Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, art. 12 : « À partir de l’âge nubile, l’homme
et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit ».
4. La CEDH a opéré un revirement de jurisprudence concernant le mariage des transsexuels avec une personne de leur sexe
d’origine. Ayant affirmé pendant plusieurs années que le mariage est l’union de deux personnes de sexe biologiquement
différent (arrêt Rees C/ Royaume-Uni, 17 octobre 1986, n° 9532/81), elle a finalement admis « le mariage des transsexuels »
dans deux arrêts du 11 juillet 2002, I. et Goodwin c/ Royaume-Uni, n° 25680/94 et 28957/95. Le fondement du revirement n’est
pas celui d’une redéfinition du mariage mais celui d’une redéfinition du sexe, l’homme et la femme n’étant plus définis
par rapport à des critères exclusivement biologiques. La Cour admet toutefois que « depuis l’adoption de la Convention,
l’institution du mariage a été profondément bouleversée par l’évolution de la société » (§ 100). Mariage et procréation sont
dissociés. Par conséquent, le mariage homosexuel n’est plus impensable.
5. Lois néerlandaises du 21 décembre 2000, loi belge du 13 février 2003 et loi espagnole du 1er juillet 2005.
6. Cf. Le Monde du 17 mars 2004.
7. Civ. 1re, 13 mars 2007, D. 2007, p. 1389, rapport G. Pluyette et E. Agostini ; Gaz. Pal., 2007, n° 81, p. 10, avis M. Domingo et rapport
G. Pluyette ; D. 2007, p. 1375, obs. H. FULCHIRON ; RTD civ. 2007, p. 315, obs. J. Hauser ; D. 2007, p. 1561, obs. J.-J. Lemouland et
D. Vigneau. Cf. aussi Cons. Constit., 28 janv. 2011, décision QPC n° 2010-92 : conformité à la constitution des articles 75 et 144
du Code civil, autrement dit de l’interdiction du mariage entre personnes de même sexe. CEDH, 24 juin 2010, Schalk et Kopf
c/ Autriche, n° 30141/04 : « les États demeurent libres, tant au regard de l’article 12 qu’au regard de l’article 14 combiné avec
l’article 8, de n’ouvrir le mariage qu’aux couples hétérosexuels ». La CEDH a d’ailleurs statué sur le mariage de Begles et refusé
de constater la violation de l’article 12 (droit au mariage) combiné avec l’article 14 (non-discrimination) et de l’article 8 (vie
privée et familiale) combiné avec l’article 14 de la Convention : CEDH, 9 sept. 2016, Chapin et Charpentier C. France, n° 40183/07.
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2. L’âge minimum
15. Pacs et mariage. Le Pacs est depuis sa création ouvert aux seules personnes physiques
majeures2. Le mariage était quant à lui permis à partir de dix-huit ans pour les garçons
et quinze ans pour les filles, jusqu’à la loi du 4 avril 2006 qui, poursuivant notamment
l’objectif de lutter contre les mariages forcés, a porté à dix-huit ans l’âge nubile pour les
filles et ainsi rétabli l’égalité des sexes3. Néanmoins, le mariage des mineurs est excep-
tionnellement possible sur dispense du procureur de la République pour motifs graves et
avec autorisation parentale4, ce qui n’est pas le cas pour le Pacs.
16. Sanction. Le défaut d’âge légal entraîne la nullité absolue du mariage qui peut être attaqué,
dans un délai de trente ans à compter de sa célébration, soit par les époux eux-mêmes, soit
par tous ceux qui y ont intérêt, soit par le ministère public5. La nullité n’est pas expressément
prévue par le législateur pour le Pacs conclu par un mineur, mais puisque le Pacs est un
contrat, sa nullité pour incapacité est envisageable sur le fondement du droit commun
des obligations6.
1. Loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.
2. Cette condition résulte de la définition du Pacs, à l’article 515-1 du Code civil.
3. Loi n° 2006-399 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.
C. civ., art. 144.
4. C. civ., art. 145 et 148 s. Les cas sont néanmoins très rares, au point qu’il est difficile de trouver des exemples. Il n’est même pas
certain qu’une dispense puisse être aujourd’hui obtenue au motif d’une grossesse puisque le statut d’enfant né en mariage
n’est plus un statut particulièrement privilégié.
5. C. civ., art. 184. Le mariage du mineur est soumis à deux conditions : la dispense d’âge et l’autorisation parentale une fois
cette dispense obtenue. Il faut, sur le plan des sanctions, différencier le défaut d’âge légal, c’est-à-dire le mariage du mineur
sans dispense d’âge, qui est sanctionné d’une nullité absolue, et le mariage du mineur sans autorisation parentale, qui est
sanctionné d’une nullité relative pouvant être demandée par ceux dont le consentement était requis ou celui des époux qui
avait besoin du consentement, dans les cinq ans à partir de ses dix-huit ans (C. civ., art. 182 et 183). Cf. infra n° 44.
6. Cons. const. 9 nov. 1999, n° 99-419 DC, considérant 28 : « […] si les dispositions de l’article 515-5 du Code civil instituant des
présomptions d’indivision pour les biens acquis par les partenaires du pacte civil de solidarité pourront, aux termes mêmes
de la loi, être écartées par la volonté des partenaires, les autres dispositions introduites par l’article 1er de la loi déférée
revêtent un caractère obligatoire, les parties ne pouvant y déroger […] ; […] les dispositions générales du Code civil relatives
aux contrats et aux obligations conventionnelles auront par ailleurs vocation à s’appliquer, sous le contrôle du juge, sauf en
ce qu’elles ont de nécessairement contraire à la présente loi […] ». L’article 1147 du Code civil dispose toutefois que l’incapacité
de contracter est une cause de nullité relative.
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3. Le consentement
18. Concubins. La question du consentement est relativement difficile à penser pour les
concubins, dont le consentement se matérialise, en l’absence d’engagement juridique,
par le fait même de vivre ensemble. Alors que dans les autres formes de vie en couple, en
particulier dans le mariage, elle est un devoir entre les membres du couple, la communauté
de vie est dans le concubinage une condition d’existence. Les risques liés à un concubinage
« simulé » sont en outre assez réduits puisqu’il produit bien moins d’effets que le mariage
et le Pacs. Une vie commune « forcée » ou dépourvue d’intention de former véritablement
un couple ne serait tout simplement pas qualifiée de concubinage et donc insusceptible
de produire des effets juridiques.
19. Époux et partenaires. Le mariage et le Pacs, qui constituent quant à eux des engagements
juridiques, requièrent un consentement réel de la part des membres du couple mais aussi
un consentement intègre.
a) Existence
20. Intention matrimoniale. Selon l’article 146 du Code civil, « il n’y a pas de mariage lorsqu’il
n’y a point de consentement ». L’échange formel des consentements s’exprime au moment
de la célébration du mariage3 et doit correspondre à la volonté intérieure des époux. Selon
la Cour de cassation, le mariage est en effet nul lorsque les époux « ne se sont prêtés à
1. C. civ., art. 371-3. Il peut toutefois quitter la maison familiale avec l’autorisation de ses parents, par exemple pour suivre des
études.
2. L’état de santé n’est pas une condition du mariage. La seule exigence liée à la santé était celle relative au certificat médical
prénuptial attestant de divers examens (rubéole, toxoplasmose – un dépistage du VIH était proposé) et dont l’objectif
était l’information du conjoint ; les époux n’étant toutefois pas tenus d’être en bonne santé ni même de communiquer les
résultats de l’examen. La loi n° 2007-1787 de simplification du droit du 20 décembre 2007 a abrogé cette disposition.
3. Civ. 1re, 22 janv. 1968 : il appartient aux juges du fond, si, lors de la célébration, l’un des époux ne peut pas parler, de relever
les signes par lesquels il a entendu affirmer sa volonté.
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Circulaire du 22 juin 2010 relative à la lutte contre les mariages simulés (extrait)3
« Le mariage repose principalement sur l’échange des consentements au moment de sa
célébration. En acceptant de se prendre pour mari et femme, les deux époux s’engagent à
une communauté de vie qui suppose une véritable volonté de partager une vie de famille.
À chaque fois que les époux se sont prêtés à la cérémonie en vue d’atteindre un effet étranger
ou secondaire au mariage, avec l’intention de se soustraire aux autres conséquences légales,
le consentement au mariage exigé par l’article 146 du Code civil fait défaut et leur mariage
est nul, faute de véritable intention matrimoniale.
La notion de mariage simulé peut donc s’entendre de tout mariage qui ne repose pas sur
une volonté libre et éclairée de vouloir se prendre pour mari et femme, qu’il ait été conclu
exclusivement à des fins migratoires ou pour obtenir un avantage professionnel, social,
fiscal ou successoral.
Les mariages simulés sont cependant souvent difficiles à caractériser. Or il appartient à celui
qui se prévaut de l’absence d’intention matrimoniale d’en rapporter la preuve. Dans ces
conditions, lorsque le ministère public entend soit surseoir ou faire opposition à la célébration
du mariage, soit engager une action en annulation du mariage, il lui revient de démontrer
que le projet de mariage ou le mariage contracté est dépourvu de volonté matrimoniale.
Ainsi, il doit établir que le consentement a été donné non dans l’objectif d’être engagé
dans les véritables liens qui découlent du mariage, mais seulement afin d’en obtenir un ou
plusieurs effets secondaires ; par exemple un titre de séjour, la nationalité française mais
aussi une couverture maladie, une pension de réversion, ou d’autres avantages sociaux ».
1. Civ. 1re, 28 oct. 2003, n° 01-12574 : motifs purement successoraux ; confirmation de l’arrêt Apietto, Civ. 1re, 20 nov. 1963, Bull. civ. I,
n° 506 : « si le mariage est nul, faute de consentement, lorsque les époux se sont prêtés à la cérémonie qu’en vue d’atteindre
un résultat étranger à l’union matrimoniale, il est au contraire valable lorsque les conjoints ont cru pouvoir limiter ses effets
légaux, et notamment n’ont donné leur consentement que dans le but de conférer à l’enfant commun la situation d’enfant
légitime ».
2. Cf. infra le mariage des étrangers, n° 45 et Civ. 1re, 13 janv. 2021, n° 19-16703 et 19-16874.
3. Circ. n° CIV/09/010, Garde des Sceaux.
4. C. civ., art. 175-2 : Lorsqu’il existe des indices sérieux laissant présumer, le cas échéant au vu de l’audition prévue par l’article 63
(cf. infra nos 37 et 45), que le mariage envisagé est susceptible d’être annulé au titre de l’article 146 ou de l’article 180, l’officier
de l’état civil peut saisir sans délai le procureur de la République. Le procureur de la République est tenu, dans les quinze
jours de sa saisine, soit de laisser procéder au mariage, soit de faire opposition à celui-ci, soit de décider qu’il sera sursis à
sa célébration, dans l’attente des résultats de l’enquête à laquelle il fait procéder.
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b) Intégrité
25. Caractère libre. Le consentement des futurs époux doit être libre. L’article 12 de la Convention
européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 16
de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 garantissent à l’homme et à la
femme le droit de se marier. Ce droit implique aussi celui de ne pas se marier. Le Conseil
constitutionnel a d’ailleurs consacré la liberté du mariage en tant que composante de la
liberté individuelle1.
1. Cons. Const. 13 août 1993, n° 93-325 DC, Loi relative à la maîtrise de l’immigration et aux conditions d’entrée, d’accueil et de
séjour des étrangers en France.
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Les fiançailles
Les fiançailles sont une promesse de mariage. Mais les promesses de mariage ne sont pas
susceptibles d’engager juridiquement car elles doivent laisser entière la liberté matrimo-
niale. Elles constituent en revanche un fait juridique et sont donc susceptibles de produire
des effets de droit, de deux types :
■ Action en responsabilité civile. Les fiançailles ne font pas naître d’obligations mais sont
susceptibles d’engager la responsabilité civile extracontractuelle de droit commun de
l’auteur de la rupture à condition pour la victime qui souhaite obtenir des dommages
et intérêts de démontrer le caractère fautif de la rupture, un dommage matériel et/ou
moral et le lien de causalité entre la faute et le dommage4.
Sur le pourvoi formé par M. Saïd Y…, demeurant … (20e), en cassation d’un arrêt rendu le
8 décembre 1992 par la cour d’appel de Paris (8e chambre, section A), au profit :
1/ de Mme Djamilia Z… épouse X…, C : O Banque Paribas, … (2e),
2/ de la société anonyme Banque Paribas, sise … (2e), défenderesses à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au
présent arrêt ;
[…]
Sur le moyen unique, pris en ses sept branches, tel qu’il est énoncé au mémoire en demande
et reproduit en annexe :
21
1. Présents modiques eu égard à la fortune et au train de vie du donateur. Civ. 1re, 19 déc. 1979, n° 78-13346.
2. Civ. 1re, 30 oct. 2007, n° 05-14258.
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Le Code civil prévoit des empêchements à la formation du couple juridique, fondés sur les
liens préexistants, soit entre les membres du couple, soit entre l’un des membres du couple
et un tiers. Les premiers sont fondés sur les liens de parenté et d’alliance ; les seconds sur
les liens de couple.
1. C. civ., art. 1137 : « Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des
mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont
il sait le caractère déterminant pour l’autre partie […] ».
2. C. civ., art. 1130 s. Cons. const., 9 nov. 1999, décision n° 99-419 DC concernant la loi relative au pacte civil de solidarité, cons. 28 :
« […] les dispositions générales du Code civil relatives aux contrats et aux obligations conventionnelles auront […] vocation à
s’appliquer, sous le contrôle du juge, sauf en ce qu’elles ont de nécessairement contraire à la présente loi ; qu’en particulier,
les articles 1109 et suivants [anciens] du Code civil, relatifs au consentement, sont applicables au pacte civil de solidarité ».
3. Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt de la Cour de cassation n° 12-26066 du 4 déc. 2013, la Cour d’appel, qui avait annulé
le mariage de Mme X avec le père de son ex-mari, avait retenu que l’empêchement à mariage entre un beau-père et sa bru
était justifié en ce qu’il répondait à des finalités légitimes de sauvegarde de l’homogénéité de la famille en maintenant des
relations saines et stables à l’intérieur du cercle familial, que cette interdiction permettait également de préserver les enfants,
qui peuvent être affectés, voire perturbés, par le changement de statut et des liens entre les adultes autour d’eux, et que,
contrairement à ce que soutenait Mme X…, il ressortait des conclusions de sa fille que le mariage célébré le 17 septembre
1983, alors qu’elle n’était âgée que de dix ans, avait opéré dans son esprit une regrettable confusion entre son père et son
grand-père. Dans un arrêt n° 15-27201 du 8 déc. 2016, la Cour de cassation estime que l’interdiction vise à « sauvegarder
l’intégrité de la famille et […] préserver les enfants des conséquences résultant d’une modification de la structure familiale ».
4. Cf. infra n° 44 pour le mariage. Pour le Pacs, Cf. Cons. Constit., 9 nov. 1999, préc., considérant 27 : « Eu égard à la nature des
empêchements édictés par l’article 515-2 du Code civil, justifiés notamment par les mêmes motifs que ceux qui font obstacle
au mariage, la nullité prévue par cette disposition ne peut être qu’absolue ».
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Lien de parenté
01_LiensParente.pdf
En ligne directe X et ses parents ont un lien de parenté au premier degré ; X et ses grands-
parents sont parents au deuxième degré, etc. Un degré = une génération.
En ligne collatérale on calcule les degrés en remontant à l’auteur commun : les frères et
sœurs sont au deuxième degré (auteurs communs : père et mère) ; les oncles et tante au
troisième (auteurs communs : grand-père et grand-mère).
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33. Mariage. L’article 147 du Code civil dispose qu’on ne peut contracter un second mariage
avant la dissolution du premier, sachant que le mariage est dissout par le divorce ou le
décès. À des fins préventives, l’article 70 du Code civil impose la remise, par chacun des
époux à l’officier d’état civil, d’un extrait récent de son acte de naissance1. En cas de mariage
bigame, la nullité absolue du mariage est accompagnée d’une sanction pénale de l’époux
bigame et de l’officier d’état civil qui avait connaissance du premier mariage2. La bigamie
est d’ailleurs l’une des causes les plus fréquentes d’annulation des mariages3.
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34. Pacs. Sur ce point, il existe une différence entre les formes de vie en couple qui montre la
suprématie persistante du mariage dans la conception française du couple. En effet, il ne
peut pas y avoir de Pacs, selon l’art. 515-2 du Code civil, entre deux personnes dont l’une au
moins est déjà liée par un Pacs et entre deux personnes dont l’une au moins est engagée
dans les liens du mariage.
La sanction est là encore la nullité absolue du Pacs enregistré en violation de ces règles.
Ainsi, le mariage empêche la formation du Pacs alors que le Pacs n’empêche pas la formation
du mariage. Le mariage mettra fin au Pacs.
35. Concubinage. L’article 515-8, qui définit le concubinage, ne pose quant à lui expressément
aucune condition d’exclusivité. La référence à la « vie de couple » exclut-elle toutefois indirec-
tement la possibilité d’entretenir une relation de couple par ailleurs ? Encore une fois, il s’agit
surtout d’une question de reconnaissance juridique du concubinage en lui-même, laquelle
sera déduite du constat ou non des conditions posées à l’article 515-8. L’indemnisation de
l’épouse et de la concubine peut par exemple être admise, si les conditions d’existence du
concubinage, et notamment la stabilité, sont remplies2.
Au-delà de ces conditions de fond, la formation du couple exige en général le respect de
certaines formalités.
36. Le concubinage ne se crée pas mais se constate à partir d’une situation de fait. Aucune
condition de forme n’est par conséquent requise. Il n’est ni célébré, ni déclaré, ni enregistré
légalement. Il ne fait l’objet d’aucune mention à l’état civil, d’aucune forme de publicité.
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Trois étapes peuvent être distinguées dans la formation du mariage comme dans celle du
Pacs, des premières formalités à la publicité.
1. Cf. infra n° 42 : différence entre les empêchements simplement prohibitifs et les empêchements dirimants. L’officier de l’état
civil encourt néanmoins des sanctions, cf. notamment C. civ., art. 63 in fine.
2. Loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du xxie siècle, préc. Une transmission par Comedec est également
possible. Les art. 63 et 70 exigeaient depuis la loi du 14 novembre 2006 une copie intégrale de l’acte de naissance de chacun
des époux.
3. C. civ., art. 63 s., en particulier art. 70 et 71.
4. C. civ., art. 460, cf. supra n° 9.
5. C. civ., art. 63.
6. Dispense possible par le procureur de la République pour causes graves (ex : mariage in extremis, menaces…), C. civ., art. 169.
7. Cf. C. civ., art. 63 à 65. Le Code civil imposait que la femme attende un délai de trois cent jours, appelé « délai de viduité »
après la dissolution d’un premier mariage avant d’en contracter un autre, afin d’éviter les « confusions de parts », c’est-à‑dire
les conflits de paternité. Cette condition, qui constituait une atteinte à la liberté du mariage et à l’égalité des sexes, était
devenue moins pertinente au regard des progrès scientifiques liés à la preuve de la paternité. Elle a été supprimée par la
L. n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce.
29
2. La célébration ou l’enregistrement
39. Mariage. Le mariage fait l’objet d’une véritable célébration républicaine3, solennelle et
publique en présence des époux en personne4 et de deux à quatre témoins5, par un officier
de l’état civil6. Ce dernier procède à la lecture des articles relatifs aux devoirs du mariage et
à l’autorité parentale7 et fait procéder à l’échange oral des consentements8. La cérémonie
se déroule, au choix des époux, dans la commune où l’un d’eux, ou l’un de ses parents, a
son domicile ou sa résidence9. La clandestinité10 et l’incompétence de l’officier d’état civil11
peuvent entraîner la nullité du mariage12. Mais en cas d’empêchement grave, la cérémonie
peut avoir lieu au domicile ou la résidence de l’un des époux13. Un mariage peut ainsi être
célébré in extremis, c’est-à‑dire en cas de péril imminent de mort de l’un des époux.
1. Ils fixent par exemple la participation de chacun à l’aide matérielle, choisissent éventuellement le régime de l’indivision
pour leurs biens. Cf. infra n° 65 s.
2. Cf. décret n° 2006-1806 du 23 décembre 2006 modifié relatif à la déclaration, la modification, la dissolution et la publicité
du pacte civil de solidarité.
3. C. civ. art. 165. Le mariage est en principe célébré à la mairie, portes ouvertes (C. civ., art. 75). Mais l’article L. 2121-30-1 du
Code général des collectivités territoriales, créé par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, prévoit que le maire peut, sauf
opposition du procureur de la République, affecter à la célébration de mariages tout bâtiment communal, autre que celui de
la maison commune, situé sur le territoire de la commune. Le procureur de la République veille à ce que la décision du maire
garantisse les conditions d’une célébration solennelle, publique et républicaine. Il s’assure également que les conditions
relatives à la bonne tenue de l’état civil sont satisfaites.
4. C. civ., art. 75 et 146-1 : le mariage d’un Français, même contracté à l’étranger, requiert sa présence.
5. C. civ., art. 75. Témoins majeurs, parents ou non des époux.
6. Seul le maire et ses adjoints peuvent se prévaloir de cette qualité. Toutes les fonctions d’officier de l’état civil peuvent être
déléguées, à l’exception de celles prévues par l’article 75 du Code civil, c’est-à‑dire celles relatives à la célébration du mariage
et à la production de l’acte de mariage. CGCT, art. R. 2122-10.
7. Lecture des art. 212, 213, 214 al. 1, 215 al. 1 et 371-1. La lecture de l’article 220 sur la solidarité des dettes ménagères avait été
ajoutée par la loi du 1er juillet 2010 sur le crédit à la consommation mais a été supprimée par la loi du 17 mai 2013 ouvrant le
mariage aux couples de personnes de même sexe.
8. L’Officier d’état civil reçoit de chaque partie la déclaration qu’elles veulent se prendre pour époux puis prononce, au nom
de la loi, qu’elles sont unies par le mariage.
9. Loi du 17 mai 2013, préc.
10. Mariage célébré sans aucune publicité.
11. Aucun des époux ni de leurs parents n’a son domicile ou sa résidence sur la commune. Mais la nullité est facultative pour le
juge, qui peut éviter de la prononcer en l’absence de volonté frauduleuse.
12. Cf. infra n° 42 s.
13. C. civ., art. 75 al. 2. Bien entendu, la validité du mariage est subordonnée à l’absence d’altération du consentement.
30
3. La publicité
41. État civil. L’acte de mariage, qui est un acte d’état civil, est dressé par l’officier de l’état civil
à l’issue de la célébration4 et le mariage fait l’objet d’une mention sur l’acte de naissance
de chacun des époux.
Le Pacs, qui ne donne lieu à l’établissement d’aucun acte d’état civil en tant que tel, fait
néanmoins l’objet d’une mention en marge des actes de naissance5, qui permettra aux
partenaires d’en faire la preuve et aux tiers d’en avoir connaissance. À l’origine, il n’y avait
pas de publicité du Pacs à l’état civil, essentiellement pour éviter un rapprochement trop
important entre le Pacs – ouvert aux couples de personnes de même sexe et qui ne relevait
pas de l’état des personnes – et le mariage. La loi du 23 juin 2006 a prévu cette publicité,
notamment pour mettre fin au système lourd de délivrance de certificats de « non-Pacs »
délivrés par les greffiers6. Ce rapprochement entre Pacs et mariage est conforté depuis
que l’officier de l’état civil enregistre les Pacs. À l’avenir, le Pacs pourrait bien donner lieu
à un acte de l’état civil.
1. Circ. du 17 mai 2017 de présentation des dispositions en matière de pacte civil de solidarité issues de la loi n° 2016-1547 du
18 novembre 2016 de modernisation de la justice du xxie siècle et du décret du 6 mai 2017 relatif au transfert aux officiers de
l’état civil de l’enregistrement des déclarations, des modifications et des dissolutions des pactes civils de solidarité, NOR :
JUSC1711700C : les partenaires ne sont pas fondés à exiger une quelconque cérémonie mais le maire de chaque commune
est libre de prévoir l’organisation d’une célébration (fiche technique n° 1, n° 2-1, p. 11).
2. Cf. un modèle de convention de Pacs : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits.
3. L. du 18 nov. 2016 préc. et décret n° 2017-889 du 6 mai 2017 relatif au transfert aux officiers de l’état civil de l’enregistrement
des déclarations, des modifications et des dissolutions des pactes civils de solidarité, NOR : JUSC1703741D.
4. Art. 75 in fine et 76. Pour un modèle d’acte de mariage, cf. Circ. 29 mai 2013 de présentation de la loi ouvrant le mariage aux
couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1312445C, Annexe 1.
5. Si l’enregistrement est fait par le notaire, ce dernier adresse l’information aux communes de naissance des partenaires.
6. L. n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités.
31
Définition Effets
Acte juridique par lequel une personne autorisée1 Empêche la célébration du mariage.
avertit l’officier d’état civil de l’existence d’un L’ officier de l’état civil sursoit à célébrer2 jusqu’au
empêchement à mariage (une condition de jugement de mainlevée ou pendant un an3.
formation du mariage n’est pas remplie).
1. Certains membres de la famille, tuteur, curateur ou ministère public. Cf. C. civ., art. 172 s. Cf. P. MARCOU, « La spécificité de
l’opposition familiale », RLDC, 2020, n° 186.
2. Si l’officier d’état civil passe outre l’opposition, il encourt des sanctions (amende). Le mariage restera valable si l’empêchement
est simplement prohibitif ou pourra être annulé s’il est dirimant.
3. C. civ., art. 176 à 178. La mainlevée est demandée par les futurs époux au TJ, qui statue dans les dix jours. Si l’opposition est
maintenue, il est impossible de célébrer le mariage. L’opposition est caduque après l’écoulement d’un délai d’un an, sauf
renouvellement ou s’il s’agit d’une opposition du ministère public (C. civ., art. 176). Dans ce dernier cas, l’opposition ne cesse
de produire effet que sur décision judiciaire.
32
Action en nullité
Action en justice
Nullité absolue Nullité relative
Intérêt protégé Intérêt général. Intérêt particulier.
Sont donc sanctionnés de nullité Sont donc sanctionnés d’une nullité
absolue1 : relative :
– le défaut d’âge légal ; – les vices du consentement
– le défaut de consentement ; – le mariage contracté par un mineur
– le défaut de comparution sans autorisation parentale
personnelle ;
– la bigamie ;
– l’inceste ;
– la clandestinité
(défaut de célébration publique)
– l’incompétence de l’officier d’état civil2
Titulaires de l’action – Ministère public – Le mariage consenti par erreur ne peut
– Époux être attaqué que par l’époux victime.
33
À l’égard des époux Le mariage n’existe plus pour l’avenir. Chacun reprend l’usage de son nom, il est
mis fin aux devoirs entre époux, au régime matrimonial, etc.
Le mariage est également, en principe, censé n’avoir jamais existé dans le
passé. Il existe toutefois une exception importante à la rétroactivité : lorsque le
mariage est déclaré « putatif » par le juge1, ses effets passés sont maintenus à
l’égard de l’époux de bonne foi qui pourra, par exemple obtenir une prestation
compensatoire2 ou une pension de réversion.
34
35
45. Les règles relatives au mariage des étrangers montrent la difficulté à concilier respect de
la liberté du mariage et suspicion de fraude.
Liberté du mariage
Conv. EDH, art. 12 : « À partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier
et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit ».
DDHC, art. 16 : « À partir de l’âge nubile, l’homme et la femme, sans aucune restriction quant
à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit de se marier et de fonder une famille. »
Cons. Const., 13 août 1993, n° 93-325 DC : « La liberté du mariage […] est une des composantes
de la liberté individuelle ».
Cons. Const., 20 novembre 2003, n° 2003-484 DC : « Considérant […] que le respect de la liberté
du mariage, composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la
Déclaration de 1789, s’oppose à ce que le caractère irrégulier du séjour d’un étranger fasse
obstacle, par lui-même, au mariage de l’intéressé ;
Considérant, en premier lieu, que, si le caractère irrégulier du séjour d’un étranger peut
constituer dans certaines circonstances, rapproché d’autres éléments, un indice sérieux
laissant présumer que le mariage est envisagé dans un autre but que l’union matrimoniale,
le législateur, en estimant que le fait pour un étranger de ne pouvoir justifier de la régularité
de son séjour constituerait dans tous les cas un indice sérieux de l’absence de consentement,
a porté atteinte au principe constitutionnel de la liberté du mariage ;
36
Conditions de fond
C. civ, art. 202-1 al. 1 : Chaque époux doit en principe remplir les conditions de fond de sa
loi personnelle1. Mais quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le
consentement des époux, au sens de l’art. 146 et du premier al. de l’article 180.
C. civ., art. 202-1 al. 2 : Particularité du mariage entre personnes de même sexe lorsque la
loi de nationalité le prohibe. Deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage
lorsque, pour au moins l’une d’elles, soit la loi personnelle, soit la loi de l’État sur le territoire
duquel elle a un domicile ou sa résidence le permet2.
Convention franco-marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille et à
la coopération judiciaire :
Art. 4
La loi de l’un des deux États désignés par la présente Convention ne peut être écartée par les
juridictions de l’autre État que si elle est manifestement incompatible avec l’ordre public.
Art. 5
Les conditions du fond du mariage tels que l’âge matrimonial et le consentement de même
que les empêchements, notamment ceux résultant des liens de parenté ou d’alliance, sont
régies pour chacun des futurs époux par la loi de celui des deux États dont il a la nationalité.
Civ. 1re, 28 janvier 2015, n° 13-50059 :
« Mais attendu que si, selon l’article 5 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981
relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire, les conditions
de fond du mariage telles que les empêchements, sont régies pour chacun des futurs époux
par la loi de celui des deux États dont il a la nationalité, son article 4 précise que la loi de l’un
1. Sauf contradiction avec l’ordre public français en matière internationale : polygamie, représentation. La preuve du contenu
appartient à l’étranger (certificat de coutume ou certificat de capacité matrimoniale).
2. L’officier de l’état civil doit attirer l’attention sur la possibilité que le mariage ne soit pas reconnu à l’étranger et sur les risques
encourus.
37
Conditions de forme
C. civ., art. 202-2 : Le mariage est valablement célébré s’il l’a été conformément aux formalités
prévues par la loi de l’État sur le territoire duquel la célébration a eu lieu.
C. civ., art. 47 : « Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et
rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus,
des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant
après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont
déclarés ne correspondent pas à la réalité ».
Mais, sauf convention contraire, seul l’acte traduit par un traducteur assermenté et légalisé
peut produire ses effets en France1.
46. Égalité. Le Pacs ayant été créé en 1999, les partenaires ont toujours été traités de manière
égale dans le Code civil. En revanche, la femme mariée était incapable en 1804. Elle ne
pouvait gérer ses biens ni même percevoir ses salaires et son mari devait d’ailleurs l’autoriser
à exercer une activité professionnelle. C’est également lui qui choisissait le lieu de résidence
de la famille et prenait les décisions concernant les enfants en vertu de sa puissance pater-
nelle. La prédominance du mari s’est progressivement atténuée, essentiellement à partir
de la loi du 18 février 1938 qui a supprimé l’incapacité qui frappait la femme mariée. Les
réformes successives ont ensuite toutes été tournées vers l’égalité, mais aussi la liberté et
l’autonomie de chacun des époux. La loi du 13 juillet 1965 réformant les régimes matrimo-
niaux a retiré la possibilité au mari de s’opposer à l’exercice par sa femme d’une activité
professionnelle séparée et rendu à cette dernière la gestion de ses biens propres. Depuis
la loi du 11 juillet 1975, ce n’est plus le mari qui choisit la résidence de la famille et la loi du
23 décembre 1985 a gommé les inégalités restantes au sein des régimes matrimoniaux.
1. Civ. 1re 14 nov. 2007, n° 07-10935 ; Civ. 1re, 13 avr. 2016, n° 15-50018. Cf. décret n° 2020-1370 du 10 nov. 2020 relatif à la légali-
sation des actes publics établis par une autorité étrangère. En cas d’impossibilité : un acte de notoriété peut être délivré par
les autorités consulaires. L’Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides reconstitue les actes d’état civil de ces
derniers.
38
47. Les effets familiaux ne concernent essentiellement que le mariage qui au-delà du lien
personnel entre les époux, crée un lien d’alliance et un lien de famille, contrairement au
Pacs et au concubinage, qui créent seulement un lien personnel plus ou moins intense et
avec plus ou moins de conséquences, entre les membres du couple.
1. Mariage
48. Lien d’alliance. Le lien d’alliance est le lien juridique qui existe entre les deux époux, d’une
part, et entre les époux et les parents de l’autre, d’autre part. Ce lien d’alliance permet à
chacun des époux, s’il le souhaite, de porter à titre d’usage le nom de l’autre, justifie les
empêchements à mariage entre alliés, l’existence d’un devoir de secours entre époux et
d’une obligation alimentaire réciproque entre gendres/belles-filles et beaux-parents1.
49. Lien de famille. Le mariage crée aussi un lien de famille puisqu’il entraîne la présomption
selon laquelle le mari est le père des enfants de sa femme2. Cette présomption, qui demeure
une des rares spécificités du mariage, ne joue pas pour les couples mariés de même sexe3,
mais ces derniers, peuvent, comme les époux de sexe différent, adopter. L’article 203 du
Code civil prévoit en outre que les époux contractent ensemble, par le seul fait du mariage,
l’obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants ; l’article 213 indiquant qu’ils
assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille, pourvoient à l’éduction
des enfants et préparent leur avenir. Si ces dispositions peuvent paraître obsolètes en ce
que ces obligations communes résultent davantage et plus généralement de l’exercice en
commun de l’autorité parentale, qui n’est pas propre aux époux, elles continuent néanmoins
à mettre en lumière l’aspect familial du mariage.
1. C. civ., art. 206. Cf. supra nos 30 s. et infra nos 63 et 242. Le devoir de secours et l’obligation alimentaire sont d’ordre patrimonial
mais sont évoqués ici en ce qu’ils découlent du lien d’alliance. On peut aussi estimer que le lien d’alliance justifie l’existence
des droits successoraux du conjoint survivant hors testament, réservés par la loi au conjoint survivant.
2. C. civ., art. 312. Cf. infra n° 164 s.
3. C. civ., art. 6-1.
39
2. Pacs et concubinage
50. Absence de lien d’alliance. Le Pacs et le concubinage ne créent quant à eux aucun lien
d’alliance. Ils ne produisent aucun effet sur le nom d’usage et n’entraînent aucun devoir
de secours entre les partenaires et les concubins, ni obligation alimentaire du partenaire
ou du concubin à l’égard de la famille de l’autre.
Toutefois, il ne peut y avoir de Pacs entre ascendants et descendants, entre alliés et entre
collatéraux jusqu’au troisième degré inclus. En outre, les personnes déjà engagées dans
les liens du mariage ou du Pacs ne peuvent conclure un Pacs3. Ces empêchements, qui font
écho à ceux qui existent également pour le mariage, résultent du lien entre les partenaires,
qui est un lien personnel sans être un lien d’alliance.
51. Absence de lien de famille. Le Pacs et le concubinage ne créent enfin aucun lien de famille.
Ils n’ont aucun effet sur la filiation. Le partenaire et le concubin doivent reconnaître l’enfant
de la partenaire ou de la concubine pour que le lien de filiation soit établi à leur égard. Les
partenaires et les concubins ne peuvent pas adopter conjointement. L’autorité parentale
sera en principe exercée en commun par les parents liés par un Pacs ou concubins mais cet
exercice conjoint résulte de l’établissement du lien de filiation et non du lien de couple4.
Il n’existe enfin pas d’équivalent de l’article 215 alinéa 3. Toutefois, l’article 1751 sur la
cotitularité du bail s’applique aux partenaires s’ils en font la demande conjointement.
1. Mariage
Les époux doivent vivre ensemble dans le respect l’un de l’autre en étant fidèles et en se
portant assistance.
1. Ex. : aliénation de la pleine propriété du bien (peu importe qu’il appartienne aux deux époux ou à l’un d’eux).
2. L’action en nullité lui est ouverte dans l’année de la connaissance de l’acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d’un an
après la dissolution du régime matrimonial.
3. Cf. supra n° 34.
4. Cf. C. civ., art. 372 et infra n° 253.
40
1. Ce délit était d’ailleurs plus largement réprimé chez la femme que chez l’homme.
2. Cf. infra n° 92.
3. Fidélité morale : Pau, 26 Janvier 2015, n° 15/345.
4. Civ. 1re, 11 mars 2009, n° 08-13169.
5. Civ. 1re, 17 déc. 2015, n° 14-29549. L’arrêt ne concerne pas une procédure de divorce mais une éventuelle diffamation par
allégation publique suite à la publication d’une interview dans un magazine concernant la liaison d’un homme politique
marié avec celle qui sera ensuite la concubine d’un Président de la République. Cf. aussi civ. 1 re, 3 nov. 2016, n° 15-24879
et Ass. plén. 29 oct. 2004, n° 03-11238 : « n’est pas nulle comme ayant une cause contraire aux bonnes mœurs la libéralité
consentie à l’occasion d’une relation adultère ».
6. Cf. Civ. 1re, 25 oct. 2017, n° 16-21136 : Révocation pour ingratitude d’une donation consentie par l’époux à l’épouse. Les relations
adultères entretenues par cette dernière avec un ami intime du couple, qui avaient suscité des rumeurs, la détérioration
des relations conjugales et la douleur de l’époux, très attaché à son épouse, ont été qualifiées d’injure grave.
41
42
43
53. Assistance. L’article 212 impose aussi aux époux un devoir mutuel d’assistance. Il s’agit
du soutien, d’ordre moral, voire physique, que doivent s’apporter les époux au quotidien,
par exemple dans les tâches ménagères et éventuellement professionnelles, et face
aux difficultés, par exemple en cas de maladie ou d’accident. L’assistance est un devoir
personnel, mais qui par certains aspects se rapproche du devoir de secours et de l’obligation
de contribuer aux charges du mariage, qui sont des devoirs patrimoniaux relevant de la
même idée d’entraide.
54. Communauté de vie. Les époux s’obligent en outre mutuellement, selon l’article 215 al. 1
du Code civil, à une communauté de vie. Ce devoir constitue le support des autres, qui ne
peuvent s’accomplir de manière effective que dans la vie commune. La communauté de vie
revêt en premier lieu un aspect matériel. On parle traditionnellement de la communauté de
« toit », en ce qu’elle implique la cohabitation matérielle des époux. Si l’article 108 autorise
les époux à avoir des domiciles séparés, notamment pour des raisons professionnelles, il
doit exister une résidence de la famille, choisie en commun1 et dans laquelle les époux se
retrouvent.
La communauté de vie comporte en outre un aspect plus charnel. On parle traditionnel-
lement de communauté « de lit ». Le « devoir conjugal », qui n’est pas en tant que tel inscrit
dans la loi, n’est toutefois pas absolu, et tend peut-être même à devenir de plus en plus
relatif, à mesure qu’une place plus importante est faite à la liberté de chacun des époux
et au respect de son intégrité. Il doit ainsi être combiné avec la liberté de corps et peut
notamment être empêché, de manière justifiée, par des difficultés ou une impossibilité
voire un accord entre les époux2.
La vie commune se pense enfin de manière plus générale et en lien avec les autres devoirs.
Elle comporte ainsi, par exemple, une certaine communauté financière3 qui relève toutefois
davantage de la sphère patrimoniale.
L’un des époux peut être dispensé du devoir de communauté de vie en cas de violence
exercée par son conjoint. Le juge aux affaires familiales peut en effet, dans cette hypothèse,
délivrer en urgence une ordonnance de protection et statuer, notamment, sur la résidence
séparée des époux4.
1. C. civ., art. 215 al. 2.
2. Cf. notamment Aix-en-Provence, 3 mai 2011, n° 2011/292, JurisData n° 2011-014496 : octroi de dommages et intérêts à l’épouse
sur le fondement de l’art. 1382 anc. du C. civ., en raison du préjudice subi du fait de l’abstinence sexuelle non justifiée de
l’époux ; M. Lamarche, « De la juridicité du debitum conjugale en mariage ou “la notion civilisée du mariage” », Dr. fam. n° 5,
2021, alerte 41.
3. Cf. Ph. Malaurie et H. Fulchiron, Droit de la famille, Lextenso, 5e éd., 2016, n° 1481.
4. C. civ., art. 515-9 s. issus de la loi n° 2010-769 du 9 juill. 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux
violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants.
44
45
1. Dans le cadre des régimes de protection des majeurs, le tuteur ou le curateur est, sauf désignation préalable d’une autre
personne par la personne protégée avant la mise en place de la mesure, en principe le conjoint, le partenaire ou le concubin
(C. civ., art. 449). L’assistance serait donc un devoir de couple plus que de mariage ?
2. Même si le nouvel article 515-9 C. civ., dans l’unique but de protéger les victimes de violences au sein des couples, prend en
considération le Pacs en dehors même de toute cohabitation : « Lorsque les violences exercées au sein du couple, y compris
lorsqu’il n’y a pas de cohabitation, ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un
ancien concubin, y compris lorsqu’il n’y a jamais eu de cohabitation, mettent en danger la personne qui en est victime, un ou
plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une ordonnance de protection ».
3. Cf. infra nos 127 s.
4. CESEDA, art. L. 423-23 à combiner avec l’article 12 de la loi du 15 novembre 1999 relative au Pacs. Sur le délai d’un an, cf. circ
n° NOR/INT/D/04/00134/C du 30 oct. 2004, ministère de l’Intérieur.
5. Cf. l’ordonnance très critiquée du Président du TGI de Lille en date du 5 juin 2002, D. 2003, 515, note X. Labbée ; Dr. fam.
2003, n°57, note B. Beignier ; RTD civ. 2003, p. 270, obs. J. Hauser. Cf. aussi J. Hauser, « À quoi engage le Pacs : convention et
ordre public ? », à propos de Rennes, 5 mai 2015, n° 14/01137, RTD civ. 2015, p. 855.
6. Cf. Ph. Malaurie et H. Fulchiron, ouvrage préc., n° 389.
46
3. Concubinage
62. Absence de devoirs personnels. Aucun devoir mutuel d’ordre personnel n’existe entre les
concubins, qui ne s’engagent pas juridiquement1. La communauté de vie est une condition
d’existence et de reconnaissance du concubinage2. Elle constitue un fait, qui peut produire
des effets juridiques, mais pas un devoir. Les concubins sont libres de mener une vie
commune. Si cette vie commune n’existe pas ou cesse, ils ne sont tout simplement pas ou
plus concubins et ne peuvent revendiquer, le cas échéant, les effets juridiques attachés
à cette qualité3. Une rupture abusive et donc fautive pourrait entraîner réparation sur le
fondement du droit commun de la responsabilité si elle entraîne un dommage, mais le
seul fait de rompre la vie commune ne constitue pas une faute4. Certains effets juridiques
du concubinage sont en outre conditionnés à une durée de vie commune. Le transfert
du bail d’habitation en cas de décès du locataire est par exemple prévu pour le concubin
notoire s’il vivait avec le défunt depuis au moins un an à la date du décès5. La reprise du
bail d’habitation peut également être faite au bénéfice du concubin notoire du bailleur
depuis un an6.
Au-delà des effets personnels, la formation du couple produit des effets patrimoniaux.
Le devoir de secours ne concerne que les époux, tandis que les partenaires doivent comme
les époux contribuer aux charges.
1. Sur l’absence de devoir de fidélité ; cf. Besançon, ch. soc., 10 nov. 2017, n° 16/02338 : « […] la liaison que [le concubin] a pu
entretenir avec une autre jeune femme n’est pas de nature à anéantir le lien de concubinage. »
2. Même si, à des fins de protection des victimes de violence, le concubinage peut, dans des situations exceptionnelles, être
retenu en l’absence de cohabitation. Cf. C. civ., art. 515-9 nouveau, préc.
3. Cf. par ex. Civ. 1re, 3 oct. 2018, n° 17-13113 : refus de versement d’un capital décès, faute d’avoir prouvé la qualité de concubin
de l’assuré (pas de preuve d’une vie commune au jour du décès).
4. Cf. infra n° 151.
5. L. du 6 juill. 1989 préc., art. 14.
6. Ibid., art. 15.
47
63. Mariage. Selon l’article 212 du Code civil, les époux se doivent mutuellement secours. Le
devoir de secours est une expression de l’idée d’entraide, comme l’assistance, mais ici sur le
plan patrimonial. Il correspond à une obligation alimentaire et existe donc lorsqu’un époux
est dans le besoin. À ce titre, il ne couvre pas les dépenses d’agrément mais seulement celles
nécessaires aux besoins « vitaux ». L’époux qui réclame l’exécution du devoir de secours,
par exemple pendant l’instance en divorce, devra prouver qu’il n’est pas en mesure de
subvenir à ses besoins1.
64. Pacs et concubinage. Aucun devoir de secours n’existe en revanche dans le Pacs et dans
le concubinage, en l’absence de lien d’alliance. Pour le Pacs, en pratique, l’aide matérielle
réciproque est susceptible d’absorber, en quelque sorte, une forme de secours.
65. Époux et partenaires. Les époux doivent respectivement contribuer aux charges du mariage,
selon l’article 214 du Code civil. Les partenaires s’engagent à une aide matérielle réciproque,
selon l’article 515-4 alinéa 1er. Il convient de s’interroger sur le contenu des charges en
question, avant de préciser comment s’opère la répartition entre les membres du couple
de ces dépenses et comment le défaut de contribution est susceptible d’être sanctionné.
66. Contenu. La contribution aux charges du mariage est indépendante de l’état de besoin et
doit donc être distinguée de l’obligation alimentaire et du devoir de secours. Elle couvre
notamment les dépenses relatives au logement, les impôts, les charges immobilières, les
assurances, la nourriture, l’habillement ; mais aussi les dépenses d’agrément liées, par
exemple, aux vacances et loisirs de la famille2. Le débiteur doit assurer à son époux une
condition égale à la sienne, un train de vie équivalent au sien. Il y a ici une notion d’égalité
entre celui qui a le plus de ressources et l’autre.
L’aide matérielle entre partenaires est a priori un peu plus floue. Elle peut être définie comme
la contribution aux charges de la vie commune. L’article 213-3 du Code de l’organisation
judiciaire dispose désormais que « le Juge aux affaires familiales connaît des actions liées à
la fixation […] de la contribution aux charges du mariage et du Pacs ». Les deux obligations
sont donc très proches et couvrent probablement le même type de dépenses3.
1. Besançon, 9 oct. 2015, n° 14/01566, Dr. fam. 2016, n° 1, comm. 4, A.-C. Réglier : La Cour d’appel a retenu que l’état de besoin de
l’épouse, qui ne justifiait d’aucune démarche active en vue de reprendre son activité professionnelle, n’est pas caractérisé,
de sorte que le devoir de secours ne trouve pas à s’appliquer, malgré la différence de revenus entre les époux.
2. Le financement d’un bien immobilier destiné à l’usage de la famille, même s’il ne constitue pas le domicile conjugal, est inclus
dans la contribution de l’époux aux charges du mariage : Civ. 1re, 3 oct. 2018, n° 17-25858. En revanche, l’investissement locatif
destiné à constituer une épargne ne relève pas de la contribution aux charges du mariage : Civ. 1re, 5 oct. 2016, n° 15-25944,
D. Louis, « Contribution aux charges du mariage : exclusion de l’investissement locatif », D. actualités, 27 oct. 2016.
3. Cf. Civ. 1re, 27 janv. 2021, n° 19-26140 (logement).
48
1. Cf. pour une illustration pratique de la nécessité, dans certaines hypothèses, de déterminer effectivement la contribution de
chaque époux aux charges du mariage au regard de leurs conditions de vie et de leurs revenus respectifs, Civ. 1re, 16 janv. 2019,
n° 18-10459, D. 2019, 910., obs. J-J. Lemouland et D. Vigneau.
2. Civ. 1re, 13 mai 2020, n° 19-11444 statuant sur une clause qualifiée par la Cour de cassation de non-recours figurant dans le
contrat de mariage : « il résulte de l’attribution combinée [des art. 214, 226 et 1388 du Code civil] que les conventions conclues
par les époux ne peuvent les dispenser de leur obligation d’ordre public de contribuer aux charges du mariage ». Sur les
conséquences des clauses de contribution journalière et de non-recours, cf. aussi Civ. 1re, 18 nov. 2020, n° 19-15353, Dr. fam.
2021, n° 1 comm. 6, S. Torricelli-Chrifi.
3. Ex. : Civ. 1re, 28 nov. 2006, n° 04-15480, Civ. 1re, 19 déc. 2018, n° 18-12311, D. 2019, 910, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau.
4. Ou de se faire reconnaître la qualité de tiers possesseur des travaux au sens de l’art. 555 C. civ. dans l’hypothèse du finan-
cement de la maison d’habitation construite sur le terrain appartenant à l’autre concubin : Civ. 1re, 2 sept. 2020, 19-10477.
49
50
51
B. Les pouvoirs pécuniaires des membres du couple dans leurs rapports avec les tiers
Les pouvoirs pécuniaires des membres du couple à l’égard des tiers concernent l’obligation
à la dette et la présomption en matière mobilière.
1. L’obligation à la dette
70. Définition. L’obligation à la dette peut être définie, de manière générale, comme l’obli-
gation de se soumettre à la poursuite du créancier et d’acquitter la dette. Dans les rapports
entre les membres du couple et les tiers, il s’agit de savoir contre quel(s) membre(s) du
couple les créanciers peuvent exercer leurs poursuites afin de réclamer le paiement, et
si le membre du couple qui ne s’est pas engagé personnellement peut être contraint de
régler l’intégralité de la dette.
71. Solidarité des époux. L’article 220 du Code civil pose le principe de la solidarité pour les
dettes ménagères, des époux à l’égard des tiers. Cela signifie que le créancier d’une telle
dette peut réclamer le paiement à n’importe lequel des époux, même s’il n’a pas lui-même
contracté la dette, s’il ne s’est pas lui-même engagé. Cette solidarité, dangereuse pour
les époux1, ne concerne que les dettes dites « ménagères », c’est-à‑dire ayant pour objet
l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants2. Elle connaît également des limites.
L’article 220 alinéa 2 prévoit une première exception. La solidarité n’a pas lieu pour les
dépenses manifestement excessives, le caractère excessif étant apprécié eu égard au train
de vie du ménage, à l’utilité ou l’inutilité de l’opération et à la bonne ou mauvaise foi du
tiers contractant. Une deuxième exception à la solidarité est prévue à l’alinéa suivant.
La solidarité n’a pas lieu pour les achats à tempérament ni pour les emprunts. Enfin,
l’article 220 prévoit in fine une exception à l’exception : les emprunts retombent dans la
solidarité lorsqu’ils portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie
courante et que le montant cumulé de ces sommes, en cas de pluralité d’emprunts, n’est
pas manifestement excessif eu égard au train de vie du ménage3.
1. L’article 220-1 prévoit que chaque époux peut demander, au titre des mesures d’urgence, au juge de retirer à l’autre les
pouvoirs de faire un certain nombre d’actes lorsqu’il aura usé de ses pouvoirs en mettant en péril l’intérêt de la famille.
2. Toute dette même non contractuelle. Civ. 1re, 29 juin 2011, n° 10-16925 : Constituent une dette ménagère les cotisations
sociales obligatoires à un régime d’assurance maladie dont l’objet est de satisfaire les besoins ordinaires du ménage en cas
de réalisation des risques.
3. La référence au cumul d’emprunt est un ajout de la loi Hamon n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation.
52
72. Solidarité des partenaires. L’article 515-4 alinéa 2 pose un principe ressemblant pour les
partenaires, qui sont tenus solidairement à l’égard des tiers des dettes contractées par
l’un d’eux pour les besoins de la vie courante. La notion de besoin et l’absence de référence
aux enfants semblent donner à la solidarité des partenaires un champ d’application plus
étroit qu’à celle des époux, mais la référence à la vie courante semble à l’inverse plus large
que l’entretien du ménage et l’éducation des enfants. En réalité, le législateur de 1999 a
pris soin d’éviter une trop flagrante similitude avec le mariage, mais il est raisonnable de
penser que les juges procèdent par analogie avec le domaine d’application de l’article 220.
On retrouve ensuite les deux mêmes exceptions que dans l’article 2201 même si les critères
d’appréciation du caractère manifestement excessif de la dépense ne sont pas précisés.
Enfin, l’exception à l’exception concernant les emprunts modestes est reprise.
73. Comparaison. Il convient, pour mieux cerner le domaine d’application et les limites de
cette solidarité pour les conjoints et les partenaires, de comparer les deux articles, sous
forme de tableau.
1. Cette restriction n’existe, pour le Pacs, que depuis la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 sur le crédit à la consommation.
53
Époux Partenaires
Chacun des époux a pouvoir pour Les partenaires sont tenus
passer seul les contrats qui ont pour objet solidairement à l’égard des
Principe : l’entretien du ménage ou l’éducation des tiers des dettes contractées
solidarité enfants : toute dette ainsi contractée par l’un d’eux pour les besoins
par l’un oblige l’autre solidairement. de la vie courante.
La solidarité n’a pas lieu, néanmoins, Toutefois, cette solidarité
pour des dépenses manifestement n’a pas lieu pour les dépenses
excessives, eu égard au train de vie manifestement excessives.
Exception 1 du ménage, à l’utilité ou à l’inutilité
de l’opération, à la bonne ou mauvaise
foi du tiers contractant.
Elle n’a pas lieu non plus, s’ils n’ont Elle n’a pas lieu non plus,
été conclus du consentement des deux s’ils n’ont été conclus
époux, pour les achats à tempérament du consentement des deux
Exception 2 ni pour les emprunts. partenaires, pour les achats
à tempérament ni pour
les emprunts.
à moins que ces derniers ne à moins que ces derniers
portent sur des sommes modestes ne portent sur des sommes
nécessaires aux besoins de la vie modestes nécessaires aux
Exception courante et que le montant cumulé besoins de la vie courante
à l’exception de ces sommes, en cas de pluralité et que le montant cumulé
(retour au principe d’emprunts, ne soit pas manifestement de ces sommes, en cas
de la solidarité) excessif eu égard au train de vie de pluralité d’emprunts, ne soit
du ménage. pas manifestement excessif eu
égard au train de vie du ménage.
74. Concubins. En revanche, la Cour de cassation rappelle régulièrement qu’il n’existe pas
d’équivalent de l’article 220 pour les concubins, dont les dettes sont séparées, sauf solidarité
conventionnelle expresse. Les dettes contractées par l’un, même pour les besoins du couple,
n’engagent que lui et les tiers ne peuvent agir contre l’autre.
Toutefois, lorsque les concubins ont adopté un comportement laissant penser au tiers avec
lequel l’un d’eux a contracté qu’ils étaient mariés, il est envisageable de faire jouer la théorie
de l’apparence et faire ainsi bénéficier le tiers de la solidarité si ce dernier a été victime
d’une erreur légitime, qui est néanmoins difficilement concevable et rarement retenue1.
1. Cf. Caen, 1er juin 2017, n° 15/02372, Dr. fam. 2017, n° 10, comm. 201, M. Gayet.
54
2. La présomption mobilière
75. Il existe une présomption de pouvoirs en matière mobilière. En effet, l’article 222 du Code
civil prévoit que si l’un des époux se présente seul pour faire un acte d’administration, de
jouissance ou de disposition sur un bien meuble qu’il détient individuellement, il est réputé,
à l’égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de faire seul cet acte1. Cette présomption
est également prévue pour les partenaires, à l’article 515-5 alinéa 1er. Les actes visés sont
inattaquables, même s’ils sont passés par l’un sur les biens personnels de l’autre.
Le régime des biens des membres du couple, en particulier des époux, est une partie technique
du Droit patrimonial de la famille qui ne sera étudiée ici que de manière sommaire2, en
distinguant le mariage, le Pacs et le concubinage.
1. Cette présomption n’est pas applicable aux meubles meublants du logement de la famille ni aux meubles corporels dont
la nature fait présumer la propriété de l’autre conjoint conformément à l’article 1404.
2. Cf. les ouvrages consacrés à l’étude des régimes matrimoniaux.
55
76. Régime légal de la communauté réduite aux acquêts. Le régime légal, c’est-à‑dire celui
qui s’applique par principe, en l’absence de contrat de mariage, est le régime de la commu-
nauté réduite aux acquêts. Tous les biens que les époux acquièrent pendant le mariage
sont communs, à l’exception des biens propres par nature et de ceux acquis par donation,
succession ou legs1.
77. Contrat de mariage. Par exception, les époux peuvent choisir un autre régime en établissant
un contrat de mariage.
Ils peuvent opter pour un régime de communauté universelle. Dans ce cas, tous les biens
des époux, meubles et immeubles, présents et à venir, sont communs, quelle que soit la
date d’acquisition et l’origine des biens, à l’exclusion des biens propres par nature.
Ils peuvent enfin choisir soit la séparation de biens, afin d’être, sauf indivision convention-
nelle ponctuelle, chacun propriétaires de leurs biens personnels et indépendants dans
leur gestion, soit la participation aux acquêts, qui fonctionne pendant le mariage comme
la séparation de biens mais permet à chacun des époux, au moment de la dissolution, de
participer aux acquêts constatés dans le patrimoine de l’autre.
2. Pacs
La loi du 15 novembre 19992 avait créé un régime d’indivision complexe et controversé. La
loi du 23 juin 20063 l’a simplifié et a établi le principe de la séparation des patrimoines.
78. Séparation légale des patrimoines. On parle de régime « pacsal », pour faire le rappro-
chement avec le régime matrimonial. On peut rapprocher le régime légal des partenaires
du régime de la séparation de biens dans le mariage puisque le principe est l’indépendance
des partenaires4. Cette indépendance est de trois ordres et concerne la propriété des biens,
leur gestion et les dettes.
Chacun des partenaires conserve la propriété des biens dont il était propriétaire au jour de
l’enregistrement du Pacs. Il est également seul propriétaire de ceux qu’il acquiert pendant
le Pacs5. La difficulté réside dans la preuve de la propriété. Selon l’article 515-5 al 2, « chacun
des partenaires peut prouver par tous moyens […] qu’il a la propriété exclusive d’un bien.
Les biens sur lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d’une propriété exclusive
sont réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour moitié ». La charge de la preuve
1. Biens propres par nature : vêtements et linges à usage personnel, instruments de travail nécessaires à la profession de
l’un des époux, dommages et intérêts alloués en réparation d’un préjudice. Biens propres par destination : biens acquis
antérieurement au mariage ou pendant le mariage par succession, donation ou legs.
2. Préc.
3. Préc.
4. Ce principe ne concerne que les Pacs conclus après le 1er janvier 2007. Les anciens Pacs sont soumis au régime de l’indivision,
sauf convention nouvelle.
5. Si l’un participe au financement d’un bien appartenant à l’autre, il a seulement une créance envers lui.
56
3. Concubinage
80. Les patrimoines des concubins sont indépendants. Il n’y a pas d’équivalent de régime
matrimonial. Tout est en principe séparé : les biens, leur gestion et les dettes5.
Mais cela n’empêche pas les concubins d’acquérir ponctuellement et conventionnellement
en indivision. En pratique, les concubins acquièrent d’ailleurs souvent en indivision le
logement du couple6.
57
La nature de chaque forme de vie en couple s’exprime autant dans l’union que dans la
désunion. On entend par désunion, pour les époux, la rupture du lien conjugal et donc le
divorce. Le lien conjugal peut néanmoins plus modérément se distendre, sans tout à fait
ou tout de suite être rompu, au moyen de la séparation de corps, qui permet de se séparer
physiquement, tout en restant marié. Elle est très peu utilisée aujourd’hui1 et ne sera donc
présentée que brièvement.
81. Séparation de corps2. Elle est prononcée ou constatée3 pour les mêmes causes et aux mêmes
conditions que le divorce, et la procédure est la même4. En revanche, elle ne dissout pas le
mariage. Les époux restent mariés mais les effets du mariage sont allégés, distendus : la
fidélité et le devoir de secours demeurent, le nom d’usage est en principe maintenu, ainsi
que la vocation successorale5. Le devoir de cohabitation, lui, disparaît, de même que la
communauté de biens. Pour le reste, la séparation de corps produit les mêmes effets que
le divorce. Elle ne sera toutefois le plus souvent qu’un état temporaire. Sa conversion en
divorce est possible, après écoulement d’un délai de deux ans, voire avant en cas d’accord.
S’agissant de la désunion à proprement parler, il faut s’interroger sur ses causes, lesquelles
sont indissociables de la procédure à suivre (section 1), avant de préciser quelles en sont
les conséquences (section 2).
Jusqu’à la loi du 18 novembre 2016, le mariage ne pouvait être dissous, outre par le décès,
que par un divorce prononcé par un juge. Après des années de débats, et pour désengorger
les tribunaux, la loi de modernisation de la justice du xxie siècle a consacré une forme
déjudiciarisée de divorce, créant ainsi un nouveau cas de désunion sans juge (§2). Mais ce
dernier continue à prononcer les autres formes de divorce (§1).
1. Cf. toutefois Montpellier, 4 juill. 2017, n° 16/04406, Dr. fam. 2017, n° 10, comm. 204, J.-R. BINET.
2. C. civ., art. 296 s.
3. La loi du 23 mars 2019 a instauré la convention de séparation de corps par acte sous signature privée contresigné par avocats.
4. Les règles applicables au divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats ainsi que
celles relatives à la procédure des divorces judiciaires sont applicables à la séparation de corps (C. civ., art. 298).
5. Sauf renonciation dans la convention.
58
82. Divorce. Admis sous la Révolution, le divorce fut maintenu en 1804. Il a été supprimé sous
la Restauration, par une loi du 8 mai 1816, puis rétabli le 27 juillet 1884 par la loi Naquet,
mais de manière limitée. En effet, le divorce par consentement mutuel n’existait pas. Il
était uniquement fondé sur la faute, conduisant souvent les époux à inventer des torts et
exagérer des désaccords.
Une réforme très importante, largement inspirée par Jean Carbonnier, a été opérée par la
loi du 11 juillet 19751 qui a instauré, notamment afin d’atténuer les conflits, plusieurs cas de
divorce : le divorce pour faute, le divorce pour rupture de la vie commune qui impliquait
une cessation de la communauté de vie depuis six ans, le divorce sur demande acceptée dit
aussi divorce « sur double aveu », dans lequel les époux étaient d’accord sur le principe du
divorce mais pas sur ses effets et enfin le divorce sur requête conjointe, supposant l’accord
des époux sur le principe du divorce ainsi que sur ses conséquences. Cette réforme tendait
aussi, toujours pour dédramatiser le divorce, à dissocier en partie sa cause et ses effets, et
à concentrer le plus possible dans le temps le prononcé du divorce et le règlement de ses
conséquences afin que la situation soit réglée une fois pour toutes.
Cette volonté a été accentuée par une loi du 30 juin 2000 qui réforma la prestation compen-
satoire, mais pas le divorce en lui-même. Celui-ci a été réformé dans son ensemble par la
loi du 26 mai 2004, poursuivant l’objectif de favoriser les accords, accélérer la procédure,
respecter les volontés individuelles, et désengorger les tribunaux2. Les mêmes objectifs,
en particulier le souhait de désengorger les tribunaux, de simplifier et d’accélérer la
procédure, ont conduit à de nouvelles réformes introduites par les lois du 18 novembre
2016 et 23 mars 20193.
83. Causes. Le divorce est donc aujourd’hui facilité mais connaît toujours quatre causes4 :
– le divorce pour faute ;
– le divorce pour altération définitive du lien conjugal ;
– le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage dit « divorce accepté » ;
– et le divorce par consentement mutuel.
Les trois premiers sont des divorces dits contentieux alors que le dernier est un divorce
gracieux.
59
85. JAF. Le juge aux affaires familiales, juge unique et spécialisé du Tribunal judiciaire, est
compétent à tous les stades de la procédure : pendant l’instance en divorce, puis pour
prononcer le divorce et statuer sur ses conséquences, et enfin sur l’éventuel contentieux
d’après-divorce. Les débats ne sont pas publics2.
Le juge aux affaires familiales compétent est celui du lieu de résidence de la famille. Si les
époux résident séparément, c’est le juge du lieu où réside l’époux avec lequel vivent les
enfants mineurs. Dans les autres cas, c’est le juge du lieu où réside celui qui n’a pas pris
l’initiative du divorce. Enfin, en cas de demande conjointe, est compétent le juge du lieu
de résidence de l’un ou l’autre époux, au choix de ces derniers3.
86. Preuve. De manière générale, les faits invoqués en tant que causes de divorce ou comme
moyen de défense peuvent être établis par tout mode de preuve, le principe étant la liberté
de la preuve. Cette liberté comporte néanmoins certaines limites. Les témoignages des
descendants4 sont écartés. Il est en outre interdit aux époux de produire en justice « des
1. C. civ., art. 247 et 247-1. NB : si les époux ne sont finalement pas parvenus à un accord total dans le cadre d’un divorce par
consentement mutuel extrajudiciaire, ils peuvent se désister pour engager une procédure de divorce contentieux. Mais il
ne s’agit pas à proprement parler d’une « passerelle ».
2. C. civ., art. 248.
3. C. pr. civ., art. 1070.
4. C. civ., art. 259. Le terme « descendants » est entendu largement. Il s’agit des enfants communs et des enfants d’un premier
lit, mais également du conjoint, partenaire ou concubin des descendants. En outre, la prohibition s’applique aux déclarations
recueillies en dehors de l’instance en divorce. Civ. 1re, 1er févr. 2012, n° 10-27460 : « Mais attendu qu’il résulte de l’article 205
du code de procédure civile que les descendants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux à
l’appui d’une demande en divorce ou en séparation de corps ; que cette prohibition s’applique aux déclarations recueillies en
dehors de l’instance en divorce ; que, dès lors, c’est à bon droit que l’arrêt retient que les déclarations des enfants recueillies
lors de l’enquête de police ne peuvent être prises en considération ».
60
Si les cas de divorce n’ont en eux-mêmes pas été modifiés structurellement depuis 2004,
la procédure, elle, a été assez profondément réformée.
a) Le divorce accepté
88. Selon l’article 233 du Code civil, le divorce peut être demandé par l’un ou l’autre des époux
ou par les deux lorsqu’ils acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération
des faits à l’origine de celle-ci. Le divorce pour acceptation de la rupture du mariage est un
cas de divorce objectif, sans égard aux causes ayant conduit à la ruine du mariage. Les époux
sont d’accord sur le principe de la rupture de leur mariage mais laissent le juge statuer sur
1. C. civ., art. 259-1. Il est possible de produire des lettres missives sans le consentement de l’expéditeur et du destinataire, si
elles n’ont pas été obtenues par violence ou fraude. Civ. 1re, 17 juin 2009, n° 07-21796 : le contenu des courriels ou sms n’est
écarté des débats que s’ils ont été obtenus par violence ou par fraude.
2. C. civ., art. 259-2. La Cour de cassation admet la preuve de la faute par rapport d’enquête privée si ces conditions sont
respectées : Civ. 1re, 18 mai 2005, n° 04-13745. L’adultère peut aussi être prouvé par constat d’huissier, lequel est en général
autorisé par le juge et ne constitue donc pas une atteinte illicite à la vie privée.
3. C. civ., art. 249-4. Jusqu’à la loi du 23 mars 2019, aucune demande pour acceptation du principe de la rupture du mariage ne
pouvait en outre être présentée.
4. C. civ. art. 249 à 249-2.
5. Divorce accepté : cf. supra n° 88. Jusqu’à la loi du 23 mars 2019, la requête en divorce était formée au nom du majeur protégé
par le tuteur avec autorisation du Conseil de famille ou du juge des tutelles, après avis médical et, dans la mesure du possible,
audition du majeur protégé concerné.
61
1. C. civ., art. 268 : Les époux peuvent, pendant l’instance, soumettre à l’homologation du juge des conventions réglant tout
ou partie des conséquences du divorce. Le juge, après avoir vérifié que les intérêts de chacun des époux et des enfants sont
préservés, homologue les conventions en prononçant le divorce.
2. Cf. infra n° 105 s. la procédure applicable à partir du 1er janvier 2021.
3. Cf. notamment Ph. MALAURIE et H. FULCHIRON, Droit de la famille, LGDJ, Lextenso éditions, 5e éd., n° 682.
4. L’ancien divorce pour rupture de la vie commune exigeait une séparation de six ans, maintenait le devoir de secours sous
forme de pension alimentaire et le divorce ne pouvait être prononcé, même si les conditions légales étaient réunies, dans
l’hypothèse où il aurait conduit à des conséquences matérielles ou morales d’une exceptionnelle dureté pour les enfants
ou pour le défendeur.
5. Cf. Civ. 1re, 6 juin 2012, n° 12-40027 et n° 12-40028 (non-lieu à renvoi d’une QPC relative aux articles 237 et 238 C. civ.) : « […]
la question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors, d’abord, que le prononcé du divorce après constatation de
l’altération définitive du lien conjugal ne contrevient pas au droit de mener une vie familiale normale, ensuite, qu’étant
accordée à chacun des époux, cette possibilité de demander le divorce n’est pas contraire au principe d’égalité ; » « […] la
question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors qu’il ne résulte ni des articles 237 et 238 du Code civil, ni de
l’interprétation que la jurisprudence de la Cour de cassation donne de ces textes que ceux-ci institueraient, comme il est
prétendu, une présomption quasiment irréfragable de cessation de vie commune tant matérielle qu’affective, privant le
défendeur de tout moyen effectif de défense ; ».
6. Sur la preuve Cf. infra n° 86.
62
63
1. Cf. supra n° 52 sur l’adultère. De plus, la condamnation à une peine afflictive et infamante prévue à l’article 243 ancien du
Code civil, abrogé par la loi du 26 mai 2004, était considérée comme une cause semi-péremptoire : cf. Ph. MALAURIE et H.
FULCHIRON, Droit de la famille, préc., n° 723.
2. Cf. supra n° 52 s. et par ex. Versailles, 1er déc. 2016, n° 15/01708, Dr. fam. 2017, n° 2, obs. 28, C. Berthier : attitude injurieuse de
l’épouse constituant une faute conjugale.
3. Bordeaux, 19 nov. 1996, JurisData n° 1996-613168 : les époux avaient adopté un mode de vie « libérée », s’autorisant l’adultère et
vivant séparément. Le juge a refusé le prononcé du divorce pour faute en retenant que « les violations que chacun aujourd’hui
reproche à l’adversaire ne sont pas imputables à l’un ou à l’autre, mais procèdent de ce mode de vie tout comme elles ne
rendent pas la vie commune intolérable puisqu’elles correspondent à l’inverse à une organisation sociale mutuellement
consentie ». Paris, 25 mai 2005, JurisData n° 2005-275255 : « l’accumulation d’animaux domestiques au risque de compro-
mettre l’hygiène ne peut être imputée à la femme qui démontre que son mari partageait son amour des animaux ».
4. Douai, 16 mars 2017, n° 16/02018, Dr. fam. n° 7-8, juill. 2017, comm. 154, M. GAYET : La Cour d’appel prononce le divorce aux
torts partagés en retenant, d’une part, que l’alcoolisme chronique du mari, son absence de volonté réelle de le faire soigner
pendant près de vingt ans et le comportement violent qui en est résulté au préjudice de l’épouse constituait une violation
grave des obligations du mariage rendant intolérable pour cette dernière le maintien de la vie commune et, d’autre part,
que l’éducation excessivement stricte et sévère dispensée à leur fille par l’épouse, fondée principalement sur des corrections
et punitions, constituait une violation grave de l’obligation d’entretien et d’éducation de l’enfant rendant intolérable pour
l’époux le maintien de la vie commune.
5. cf. Civ. 1re, 11 janv. 2005 (plusieurs arrêts), Dr. fam. 2005, n° 3, comm. n° 53 V. Larribau-Terneyre ; RTD civ. 2005. 370, obs. J.
Hauser.
64
65
Le défendeur en divorce pour faute peut quant à lui adopter des attitudes différentes en
fonction de ce qu’il souhaite obtenir.
93. Réconciliation. S’il souhaite que la demande en divorce soit jugée irrecevable, il peut
invoquer la réconciliation. Si le juge la retient, il n’examine pas l’affaire au fond1.
La réconciliation, qui se prouve par tout moyen, est l’hypothèse dans laquelle l’époux
« victime » pardonne à l’époux fautif, qui accepte ce pardon. Elle doit remplir trois condi-
tions pour être retenue. Le pardon se manifeste objectivement, matériellement, par une
reprise de la vie commune. Il se manifeste subjectivement, psychologiquement par une
volonté de pardonner : il doit donc être volontaire et éclairé, c’est-à‑dire donné en toute
connaissance de cause ; les faits fautifs doivent être connus. La reprise temporaire de la
vie commune pour les seuls besoins de l’éducation des enfants est insuffisante. Enfin, le
fautif doit accepter le pardon. Le fait de continuer le comportement fautif après le pardon
fait revivre les faits antérieurs et la réconciliation ne peut alors plus être retenue2.
Article 244
La réconciliation des époux intervenue depuis les faits allégués empêche de les invoquer
comme cause de divorce.
Le juge déclare alors la demande irrecevable. Une nouvelle demande peut cependant être
formée en raison de faits survenus ou découverts depuis la réconciliation, les faits anciens
pouvant alors être rappelés à l’appui de cette nouvelle demande.
Le maintien ou la reprise temporaire de la vie commune ne sont pas considérés comme
une réconciliation s’ils ne résultent que de la nécessité ou d’un effort de conciliation ou des
besoins de l’éducation des enfants.
1. Déclarer une demande irrecevable consiste pour le juge à repousser, sans l’examiner, une demande qui ne remplit pas les
conditions de recevabilité exigées.
2. Douai, 16 mars 2017, n° 16/0218, préc. : Lors d’un accord intervenu dans le cadre d’une procédure de médiation pénale, l’époux
s’était engagé à ne plus commettre de violences à l’encontre de son épouse, laquelle a renoncé à sa plainte. Toutefois, l’époux
n’ayant pas fait en sorte postérieurement à ces faits de faire soigner son addiction à l’alcool et s’étant au contraire maintenu
dans les conditions ayant favorisé son comportement violent, il ne pouvait plus être argué de la réconciliation et l’épouse
pouvait invoquer les faits de violence antérieurs à la médiation.
66
1. C. civ., art. 245 al. 2. NB : la demande reconventionnelle en divorce pour faute peut aussi être faite par le défendeur à une
demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal : le demandeur demande le divorce pour altération définitive
du lien conjugal ; le défendeur demande reconventionnellement le divorce pour faute ; dans cette hypothèse, le demandeur
initial peut invoquer les fautes de son conjoint pour modifier le fondement de sa demande (C. civ., art. 247-2). Pour rappel,
art. 246 : si une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal et une demande en divorce pour faute sont
concurremment présentées, le juge examine en premier la demande en divorce pour faute.
2. Les demandes principales et reconventionnelles sont indivisibles et le juge doit se prononcer sur les deux demandes dans
une même décision.
3. C. civ., art. 245 al. 3. Il doit inviter les parties à présenter leurs observations.
67
Les fautes de l’époux qui a pris l’initiative du divorce n’empêchent pas excuse
d’examiner sa demande ; elles peuvent, cependant, enlever aux faits qu’il
reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause
de divorce.
Ces fautes peuvent aussi être invoquées par l’autre époux à l’appui d’une demande
demande reconventionnelle en divorce. Si les deux demandes sont reconventionnelle
accueillies, le divorce est prononcé aux torts partagés.
97. Ainsi, si les conditions du divorce contentieux sollicité sont remplies, le juge prononce le
divorce et statue aussi sur ses effets. À défaut, lorsqu’il rejette définitivement la demande
en divorce, il peut statuer sur la contribution aux charges du mariage, la résidence de la
famille et les modalités de l’exercice de l’autorité parentale1.
98. Procédure commune. Les trois divorces contentieux sont différents quant à leur cause.
Ils obéissent néanmoins à un tronc commun procédural. Dans les trois cas en effet, et
à la différence du divorce par consentement mutuel, le juge doit trancher un conflit ou
du moins un défaut d’accord, même si, en particulier dans le cas du divorce accepté, les
époux ne sont pas en désaccord sur tous les points. Une procédure de divorce contentieux
se déroulait jusqu’au 1er janvier 2021 en deux étapes : la phase de conciliation et la phase
de jugement. La loi de programmation et de réforme pour la justice du 23 mars 2019 a
toutefois simplifié la procédure en supprimant la phase de conciliation. Il est nécessaire
d’expliquer brièvement la procédure antérieure, d’une part afin de mieux comprendre la
réforme et, d’autre part, parce que les instances en cours restent soumises à la procédure
antérieure, qui coexistera donc en pratique quelques années avec la nouvelle2.
68
– Phase de conciliation
99. Requête initiale. L’époux qui prenait l’initiative du divorce présentait par l’intermédiaire
de son avocat une requête au juge, dans laquelle n’étaient indiqués ni la cause du divorce,
ni les faits et motifs à l’origine de celle-ci, afin de favoriser les accords1. À ce stade, le juge
pouvait prendre des mesures d’urgence2, c’est-à‑dire, le plus souvent, autoriser les époux à
résider séparément, éventuellement avec les enfants mineurs, et des mesures conservatoires
comme l’apposition de scellés sur les biens communs3. Il indiquait au bas de la requête les
jours, heure et lieu auxquels il procéderait à la tentative de conciliation4.
100. Audience de conciliation. L’époux qui n’avait pas pris l’initiative du divorce était convoqué à
l’audience de conciliation. La procédure était orale. Le JAF s’entretenait avec les deux époux
séparément puis ensemble et appelait ensuite les avocats5, sachant que ce qui était dit ou
écrit lors de cette audience ne pouvait être invoqué pour ou contre un époux ou un tiers
dans la suite de la procédure. Le juge devait chercher à concilier les époux sur le principe
du divorce, mais aussi sur ses conséquences en favorisant les solutions amiables6. C’est
pourquoi il informait les époux de la possibilité de poursuivre la procédure par acceptation
de la rupture du mariage. Les époux pouvaient en effet signer, pendant cette audience, un
procès-verbal constatant l’acceptation mutuelle du principe de la rupture du mariage et du
prononcé du divorce sur ce fondement. La cause du divorce était alors acquise, l’acceptation
n’étant plus susceptible de rétractation, même par la voie de l’appel7.
À l’issue de l’audience de conciliation, le juge rendait une ordonnance8.
101. Ordonnance sur tentative de conciliation et mesures provisoires. Lorsqu’il constatait que
le demandeur maintenait sa demande, ce qui était en général le cas, le juge rendait une
ordonnance dans laquelle il prescrivait les mesures provisoires, autrement dit les mesures
nécessaires pour assurer l’existence des époux et celle des enfants pendant l’instance,
jusqu’à la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée9. Il pouvait notamment,
69
– Phase de jugement
102. Introduction de l’instance en divorce. Dans les trois mois du prononcé de l’ordonnance,
seul l’époux qui avait présenté la requête initiale pouvait assigner en divorce. En cas de
réconciliation des époux ou si l’instance n’avait pas été introduite dans les trente mois du
prononcé de l’ordonnance, toutes ses dispositions étaient caduques, y compris l’autorisation
d’introduire l’instance2. Le délai entre l’ordonnance de non conciliation et l’introduction
de l’instance en divorce pouvait donc être très long.
103. Mise en état et audience de jugement. Cette deuxième phase de procédure était écrite.
L’introduction de l’instance, le plus souvent par voie d’assignation, était suivie de la mise en
état, au cours de laquelle les parties échangeaient, par voie de conclusions, leurs demandes,
arguments et pièces, sous le contrôle du juge. Lorsque le dossier était en état d’être jugé, la
mise en état était clôturée et l’audience de jugement fixée. Les époux étaient représentés
par leurs avocats et n’avaient pas l’obligation d’être présents en personne lors de cette
audience. C’est lors de cette phase de jugement que les conditions du divorce devaient
être démontrées au juge.
Lorsque l’accord des époux pour que le divorce soit poursuivi pour acceptation du principe
de la rupture du mariage était constaté lors de l’audience de conciliation, ils saisissaient
obligatoirement le juge sur ce fondement3.
Les époux avaient également pu se mettre d’accord sur le principe de la rupture du mariage
entre l’ordonnance sur tentative de conciliation et l’introduction de l’instance. Dans ce cas,
chacun pouvait déclarer, par écrit signé de sa main, qu’il acceptait le principe de la rupture
du mariage. Les deux déclarations étaient annexées à la requête conjointe introductive
d’instance. Il s’agissait du deuxième moment possible pour l’acceptation.
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104. Procédure des divorces contentieux avant le 1er janvier 2021
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b) La procédure des divorces contentieux depuis le 1er janvier 2021
105. La loi du 23 mars 2019 et le décret du 17 décembre 20191, dans l’objectif de simplifier et
accélérer la procédure des divorces contentieux, ont réformé cette dernière d’une manière qui
aura des répercussions assez profondes en pratique et qui, au-delà, marque le changement
de mentalités concernant le divorce et par conséquent le mariage lui-même. La nouvelle
procédure, entrée en vigueur le 1er janvier 20212, emprunte largement aux règles de la
procédure civile classique devant le tribunal judiciaire mais comprend quelques adapta-
tions à la matière familiale. La procédure est écrite, la représentation de chacun des époux
par un avocat obligatoire.
106. Introduction de l’instance3. La phase de conciliation en tant que telle est supprimée. La
procédure débute directement par l’acte introductif d’instance, qui indique la date de la
première audience4. Il s’agit soit d’une requête conjointe comprenant en annexe l’accep-
tation par acte sous signature privée contresigné par avocats5, soit d’une assignation qui
ne peut comporter le fondement de la demande si le demandeur envisage un divorce pour
faute6. Si le fondement de l’altération définitive du lien conjugal est indiqué à ce stade,
l’appréciation de l’écoulement du délai d’un an se fera à ce moment-là.
L’acte introductif d’instance comporte, d’une part, les demandes relatives aux mesures
provisoires, le cas échéant, et, d’autre part, celles relatives au fond, c’est-à‑dire au divorce et
à ses conséquences. Il doit comporter une proposition de règlement des intérêts pécuniaires
et patrimoniaux et faire mention des dispositions relatives à la médiation familiale et
la procédure participative ainsi qu’à la possibilité de faire homologuer des accords sur
l’exercice de l’autorité parentale et les conséquences du divorce.
107. Audience d’orientation et sur mesures provisoires. Même en l’absence de demande
portant sur des mesures provisoires, cette première audience a lieu afin d’organiser la
procédure. La présence des époux est facultative, contrairement à celle de leurs avocats.
1. Décret n° 2019-1380 relatif à la procédure applicable aux divorces contentieux et à la séparation de corps ou au divorce sans
intervention judiciaire.
2. Initialement prévue le 1er sept. 2020, l’entrée en vigueur de la réforme a été repoussée par la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020
relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de
l’Union européenne et l’art. 4 du décret n° 2020-950 du 30 juill. 2020.
3. C. pr. civ., art. 1108 et 1109.
4. Préalablement à l’introduction de l’instance, le demandeur sollicite une date auprès du greffe (sur les modalités de « prise
de date », cf. arrêté du 9 mars 2020 relatif aux modalités de communication de la date de première audience devant le TJ,
modifié par celui du 22 déc. 2020 et J. Colliot, « La nouvelle assignation en divorce : ce qui change au 1er janvier 2021 », Dr.
fam. 2021, n° 2, comm. 15). En cas d’urgence, il est possible de saisir le JAF par requête afin qu’il fixe une date plus proche
pour l’audience d’orientation et sur mesures provisoires. Jusqu’à présent les époux attendaient d’être convoqués par le greffe
après dépôt de la requête initiale.
5. L’acte doit avoir été signé dans un délai n’excédant pas les six mois précédant la demande en divorce. C. pr. civ., art. 1123-1,
al. 1.
6. Sur l’aspect stratégique de « l’acte introductif d’instance silencieux » et l’ajout, par le décret n° 2020-1452 du 27 nov. 2020, de
la précision selon laquelle, lorsque le demandeur n’a pas indiqué le fondement de la demande dans cet acte, le défendeur
ne peut lui-même indiquer le fondement de la demande en divorce avant les premières conclusions au fond du demandeur
(C. pr. civ., art. 1107), cf. V. Egea, « L’apport du décret n° 2020-1452 du 27 nov. 2020 à la nouvelle procédure de divorce :
« réforme de la réforme » ou simple ajustement technique ? » , Dr. fam. 2021, n° 1, étude 1.
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B. Le divorce par consentement mutuel judiciaire
Le divorce par consentement mutuel n’emprunte la voie judiciaire que dans une hypothèse
particulière et suit une procédure différente de celle des divorces contentieux.
110. Procédure judiciaire exceptionnelle. Les époux optent pour un divorce par consentement
mutuel lorsqu’ils s’entendent sur la rupture du mariage et ses effets. Leur accord est constaté
dans une convention qui, depuis la loi du 18 novembre 2016, prend en principe la forme
d’un acte sous signature privée contresigné par avocats puis déposé au rang des minutes
d’un notaire1. Néanmoins, l’article 229-2, 1° nouveau du Code civil prévoit une exception.
Les époux ne peuvent consentir mutuellement à leur divorce par acte sous signature privée
contresigné par avocats lorsque le mineur, informé par ses parents de son droit à être
entendu par le juge, sollicite effectivement son audition.
111. Information de l’enfant. Dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel, qui débute
nécessairement de manière non judiciaire désormais, les époux informent en effet leurs
enfants mineurs capables de discernement2 de leur droit à être entendu par le juge.
Cette information prend la forme d’un formulaire rempli et signé par chacun des enfants
mineurs. Ainsi informé, l’enfant peut, jusqu’au dépôt de la convention au rang des minutes
d’un notaire, manifester son souhait d’être auditionné. Si cette exception constitue un
garde-fou nécessaire, les praticiens dénoncent le risque d’instrumentalisation des enfants
et le poids – trop – important que ce procédé fait peser sur leurs épaules3.
76
Si l’enfant demande à être entendu par le juge, le divorce devient donc judiciaire. Mais la
procédure est alors différente de celle des divorces contentieux.
112. Requête conjointe. Les époux, qui sont d’accord tant pour divorcer que sur toutes les
conséquences du divorce, ne vont se présenter qu’une fois devant le juge1. L’article 230 du
Code civil nouveau précise que dans le cas prévu au 1° de l’article 229-2, le divorce peut être
demandé conjointement par les époux lorsqu’ils s’entendent sur la rupture du mariage et
ses effets en soumettant à l’approbation du juge une convention réglant les conséquences
du divorce2.
Le ou les avocats3 vont donc présenter au juge aux affaires familiales une requête conjointe4
dans laquelle ils n’ont pas à évoquer les faits à l’origine de la demande en divorce. À peine
d’irrecevabilité, la requête comprend en annexe le formulaire d’information de l’enfant
mineur demandant à être entendu, daté et signé par lui, ainsi qu’une convention datée
et signée par chacun des époux et leur avocat portant règlement complet des effets
du divorce5. Cette convention porte sur les questions relatives à l’autorité parentale, la
résidence habituelle des enfants, la pension alimentaire au titre de la contribution à leur
entretien et leur éducation, la prestation compensatoire éventuellement due par un époux
1. Avant la loi du 26 mai 2004, les époux comparaissaient deux fois devant le juge, avec un délai de réflexion de trois mois
entre les deux comparutions.
2. Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2017 (L. n° 2016-1547, préc., art. 114, V). Les mots : « Dans le cas prévu
au 1° de l’article 229-2 » ne sont pas applicables aux procédures en cours devant le juge lorsque les requêtes en divorce ont
été déposées au greffe avant l’entrée en vigueur des dispositions de l’article 230 dans sa nouvelle rédaction.
3. C. civ., art. 250 al 1. Dans une procédure de divorce par consentement mutuel judiciaire, les époux peuvent avoir un avocat
chacun ou choisir un avocat commun alors que dans une procédure de divorce par consentement mutuel sans juge, chaque
époux est obligatoirement assisté de son propre avocat.
4. Elle est écrite et les éléments devant y figurer sont précisés par l’art. 1090 du C. pr. civ.
5. C. pr. civ., art. 1091.
77
1. L’état liquidatif doit être passé en la forme authentique devant notaire lorsque la liquidation porte sur des biens soumis à
publicité foncière.
2. C. civ., art. 388-1 et C. pr. civ., art. 1092. Le juge peut réaliser lui-même l’audition ou désigner une personne pour y procéder.
3. L’accord ne doit par exemple pas être simulé. Cf. Civ. 1re, 17 nov. 1981, n° 80-11498 : les époux avaient divorcé par consentement
mutuel pour se remarier immédiatement et ainsi faire acquérir à l’époux la nationalité française de l’épouse. Un époux ne
doit en outre pas divorcer ou accepter certaines conséquences du divorce sous la contrainte. Le consentement n’est enfin
pas éclairé lorsqu’il est précipité et dicté par la colère par exemple, ou lorsqu’il est hésitant ou provoqué par une erreur.
4. Si une ou plusieurs clauses de la convention lui paraissent contraires à ces intérêts, il peut la/les faire modifier ou supprimer
avec l’accord des époux et en présence des avocats.
5. Cf. infra n° 121 s. : obligation pour chaque époux d’être assisté de son propre avocat, délai de réflexion de quinze jours avant
la signature de la convention, contrôle formel du notaire et surtout information et droit du mineur d’être entendu par le
juge.
6. C. civ., art. 232.
7. C. pr. civ., art. 1100 et 1101.
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§2. La désunion sans juge
La désunion sans juge concernait jusqu’à très récemment exclusivement les partenaires (B)
et les concubins (C). Elle concerne désormais également les époux, lorsqu’ils sont d’accord
et qu’aucun de leurs enfants mineurs ne demande à être auditionné (A).
120. Réforme. Le consentement mutuel est la cause de divorce la plus utilisée, représentant
plus de la moitié des divorces1. Il a été proposé à plusieurs reprises de supprimer le juge
pour cette cause de divorce2, en prévoyant un enregistrement par l’officier de l’état civil, le
greffier en chef du TGI ou le notaire. Mais cette déjudiciarisation a été très controversée.
Ses partisans mettaient notamment en avant le respect de la liberté individuelle des époux,
la simplicité, la souplesse et la rapidité de la procédure, ou encore la dédramatisation du
divorce, le désengorgement des tribunaux et les économies pour la Justice et l’État. Du
côté des opposants, étaient essentiellement mis en avant le rôle du juge dans la protection
du consentement des époux et de l’intérêt des enfants, le risque que le contentieux soit
repoussé à l’après-divorce, la perte de l’aspect institutionnel du mariage, le coût pour les
époux et les questions liées à l’indépendance du notaire ou même de l’officier d’état civil
dans les petites communes.
Après des années de débats et pour désengorger les tribunaux en recentrant les juridictions
sur leurs missions essentielles, la loi du 18 novembre 2016 a supprimé par principe le juge
dans le divorce par consentement mutuel3. Il est donc possible, depuis le 1er janvier 2017, de
divorcer sans juge. Il s’agit d’un changement important, de la nature même, sinon du sens,
du mariage. Il est en outre symptomatique d’un nouveau rapprochement des différentes
formes de vie en couple, en particulier du mariage et du Pacs, au moment où ce dernier passe
à la compétence des officiers de l’état civil4. Si certaines garanties ont été apportées, une
partie des critiques émises en amont par les opposants demeurent toutefois pertinentes.
1. Cf. www.insee.fr/fr/statistiques.
2. Un projet de la loi avait déjà été enregistré à la Présidence du Sénat le 3 mars 2010, visant notamment à alléger la procédure
de divorce par consentement mutuel pour les couples n’ayant pas d’enfant mineur commun, en les dispensant de compa-
raître personnellement et systématiquement devant le JAF. Cette réforme avait été rejetée par les parlementaires. Cf. sur
les origines de la réforme, J.-R. Binet, « Le divorce par consentement mutuel sans juge : propos liminaires », Dr. fam. 2017,
n° 1, dossier 2.
3. L. n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 préc., titre IV.
4. Cf. H. Fulchiron, « Le divorce sans juge, c’est…pour bientôt ! », Dr. fam. 2016, n° 9, repère 8 : « Le Pacs devient un vrai statut
alternatif du couple ; le mariage n’est plus que cela. Le fruit est mûr : suffira-t‑il d’un peu d’habileté et d’une solide détermi-
nation pour le ramasser ? ».
81
82
1. L’acte est remis au notaire qui l’enregistre pour assurer sa conservation et éviter sa disparition en cas de perte ou de destruction
par exemple. La minute est l’original d’un document.
2. C. civ., art. 229-3.
3. Cf. circ. du 26 janv. 2017 préc., fiche 2 : « Ce caractère purement conventionnel du divorce par consentement mutuel rend
applicable à celui-ci le sous-titre Ier du titre III du livre III du Code civil relatif au contrat ». La circulaire n’a pas de valeur
contraignante et renvoie elle-même à l’appréciation des tribunaux mais donne une indication de ce qui constituera proba-
blement la pratique, au moins dans un premier temps.
4. Circ. 26 janv. 2017 préc., fiche 2 : l’art. 1128 C. civ. est applicable au divorce par consentement mutuel extrajudiciaire, la
convention peut donc être attaquée en cas de vice du consentement, de défaut de capacité et de contrariété à l’ordre public,
sachant que relèvent notamment de l’ordre public familial, l’autorité parentale et l’obligation alimentaire.
5. Nîmes, 14 avr. 2020, JurisData n° 2020-016433, Dr. fam. 2020, n° 12, comm. n° 157, J.-R. Binet.
6. Circ. 26 janv. 2017, préc., fiche 9 : La convention pourra être révisée d’un commun accord des parties, par simple acte sous
seing privé ou par acte sous signature privée contresigné par avocat, qui n’auront toutefois date certaine et force exécutoire
que s’ils en font constater la substance dans un acte authentique. Le principe du divorce ne peut quant à lui être révisé en
raison de l’indisponibilité de l’état des personnes. La révision de la prestation compensatoire est soumise aux dispositions
spécifiques de l’article 279 C. civ. (Cf. infra n° 136). Les ex-époux pourront en outre faire homologuer leur nouvel accord
concernant les modalités d’exercice de l’autorité parentale et le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation
des enfants devant le JAF (C. civ., art. 373-2-7) ou saisir le JAF aux fins de statuer sur ces questions (C. civ., art. 373-2-13).
83
127. Liberté. L’article 515-7 prévoit que le Pacs se dissout par la mort de l’un des partenaires
ou le mariage des partenaires ou de l’un d’eux. Il prévoit également qu’il se dissout par
déclaration conjointe ou décision unilatérale. Les partenaires sont donc libres de rompre
le Pacs, même unilatéralement et sans condition. Cette liberté, qui n’exclut pas l’éventuelle
responsabilité de l’auteur de la rupture si les conditions de sa mise en jeu sont remplies4,
est toutefois assortie d’un certain formalisme.
128. Consentement mutuel. Lorsque les partenaires sont d’accord pour mettre fin au Pacs,
ils doivent remettre ou adresser à l’officier de l’état civil du lieu d’enregistrement ou au
notaire instrumentaire qui a procédé à l’enregistrement du pacte une déclaration conjointe
à cette fin.
129. Volonté unilatérale. Lorsque l’un des partenaires seulement souhaite mettre fin au pacte,
il lui suffit de le faire signifier à l’autre par voie d’huissier. Une copie de cette signification
est remise ou adressée à l’officier de l’état civil ou au notaire.
Dans les deux hypothèses, l’officier d’état civil ou le notaire enregistre la dissolution et fait
procéder aux formalités de publicité sur les actes d’état civil.
1. Ces procédures ne sont pas applicables à la prestation compensatoire sous forme de rente temporaire ou de capital échelonné.
Cf. S. Thouret, « L’après-divorce conventionnel : vers le retour au juge ! », AJ Fam. 2017, p. 42.
2. La circ. du 26 janv. 2017, préc., fiche 9, se contente de préciser qu’en cas d’inexécution par l’un des ex-époux de ses obligations
résultant de la convention, l’autre pourra toujours saisir le TGI de la difficulté, en précisant que l’exception d’inexécution
ne pourra être invoquée dès lors qu’elle est contraire à l’intérêt de l’enfant (le débiteur d’une pension alimentaire due pour
l’éducation de l’enfant ne pourra refuser son versement au motif que l’enfant ne lui est pas présenté).
3. Sur ces différentes questions, Cf. notamment H. Fulchiron, « Le divorce sans juge, c’est…pour bientôt ! », préc. ; J.-R. Binet,
« Le divorce par consentement mutuel sans juge : propos liminaires », préc. et S. Thouret, « L’après-divorce conventionnel :
vers le retour au juge ! », préc.
4. Cf. infra n° 152.
84
130. Les concubins ne se sont pas engagés. Le concubinage est une union libre qui peut par
conséquent être librement rompue, sans formalités particulières, sous réserve, si les condi-
tions sont remplies, d’engager la responsabilité de l’auteur de la rupture1.
Si le juge ne peut donc pas être saisi pour prononcer la désunion des partenaires et des
concubins en tant que telle, il peut néanmoins être appelé à statuer, en cas de difficulté,
sur les conséquences de cette désunion.
131. Déconnexion de la cause. Les effets du divorce sont en principe déconnectés de sa cause. Les
conséquences sont ainsi en principe identiques quelle que soit la forme de divorce choisie
et, s’agissant du divorce pour faute, quels que soient les torts. Cela contribue à éviter que
le conflit s’envenime et que les époux recherchent à tout prix les torts de l’autre dans le but
d’obtenir tel ou tel avantage. L’article 268 du Code civil prévoit d’ailleurs qu’en dehors même
du divorce par consentement mutuel, les époux peuvent, pendant l’instance, soumettre
à l’homologation du juge des conventions réglant tout ou partie des conséquences du
divorce. Le juge, après avoir vérifié que les intérêts de chacun des époux et des enfants
sont préservés, homologue les conventions en prononçant le divorce2.
Le principe d’indépendance entre cause et effets du divorce connaît toutefois quelques
exceptions concernant la prestation compensatoire et certains dommages et intérêts.
85
132. Condition d’octroi. L’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée
à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans
les conditions de vie respectives. L’article 270 alinéa 2 du Code civil, en définissant ainsi
la prestation compensatoire, en fixe par la même occasion la condition. Si la rupture du
mariage ne crée pas de disparité dans les conditions de vie respectives des époux, elle
ne donne pas lieu à attribution d’une telle compensation1. L’idée est de rééquilibrer les
différences de situations patrimoniales résultant du divorce2.
L’article 270 al. 3 prévoit une exception dont les conditions cumulatives rendent toutefois le
domaine d’application étroit. En effet, le juge peut refuser d’accorder une telle prestation,
même s’il existe une disparité, si l’équité le commande :
– soit en considération des critères prévus à l’article 2713 ;
– soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l’époux qui demande le bénéfice
de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture4.
En dehors de ces hypothèses et une fois admis le principe de l’attribution d’une prestation
compensatoire, il convient d’en fixer la forme.
1. Rennes, 21 mars 2016, n° 14/09078, JurisData n° 2016-005580 : La disparité n’existait pas en l’espèce, en raison notamment
de la donation consentie par l’époux – qui ne disposait plus d’aucun patrimoine immobilier – de sa part indivise dans le
logement familial dont l’épouse était désormais seule propriétaire. La demande de prestation compensatoire s’apprécie
à la date à laquelle la décision prononçant le divorce a acquis force de chose jugée ; cf. en cas d’appel Civ. 1re, 2 sept. 2020,
n° 19-16315.
2. Civ. 1re, 16 déc. 2020, n° 19-20732 : la prestation compensatoire « vise à maintenir la parité qu’assurait l’union matrimoniale ».
Cf. Cécile Bourreau-Dubois et Isabelle Sayn, « Faut-il maintenir la prestation compensatoire ? », Lejournal.cnrs.fr, 7 octobre
2016, https://lejournal.cnrs.fr/billets/faut-il-maintenir-la-prestation-compensatoire.
3. Cf. infra n° 134.
4. Ex : Grenoble, 20 oct. 2009, n° 08/05102 et Montpellier, 5 févr. 2008, n° 07/02030 : l’épouse, s’étant convertie à la religion
catholique, avait rejeté son mari, ses enfants et sa famille pour suivre son « guide » et se consacrer à une vie exclusivement
spirituelle.
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1. C. civ., art. 276. Le juge peut, lorsque les circonstances l’imposent, combiner rente et capital. En outre, chacune des parties
a la possibilité de demander à tout moment la conversion de la rente en capital. Le juge ne peut rejeter une telle demande
que par décision spéciale et motivée (C. civ., art. 276-4).
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1. La Cour de cassation doit régulièrement rappeler qu’en prenant en considération, pour apprécier l’existence d’une disparité
créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives des époux, la charge que constitue la pension alimentaire
au titre du devoir de secours, les juges du fond violent les art. 270 et 271 du Code civil. Le devoir de secours prend en effet fin
au moment du divorce (Civ. 1re, 7 déc. 2016, n° 15-28765 et Civ. 1re, 4 mai 2017, n° 16-19212). À l’inverse, elle a dû rappeler que
« la prestation compensatoire ne devient exigible qu’après la dissolution du mariage et ne peut être prise en considération
pour limiter le montant de la pension alimentaire » (Civ. 1re, 22 mars 2017, n° 16-15783).
2. Civ. 1re, 4 nov. 2015, n° 14-18814 : les allocations familiales perçues par le demandeur ne doivent pas être prises en compte pour
déterminer le montant de la prestation compensatoire. Ces prestations, destinées à l’entretien des enfants, ne constituent
pas des revenus (jurisprudence constante de la Cour de cassation ; cf. plus récemment Civ. 1re, 2 sept. 2020, n° 19-16538).
En revanche, dans sa décision n° 2014-398 QPC du 2 juin 2014, le Cons. const. a déclaré le second alinéa de l’article 272 du
C. civ. contraire à la Constitution. Par conséquent, la rente perçue au titre de la réparation des accidents du travail et les
sommes versées au titre du droit à compensation d’un handicap doivent être prises en compte, puisqu’elles sont destinées
à compenser, au moins en partie, une perte de revenus. Plus généralement, sont prises en compte les prestations assurant
un revenu de substitution. Sur la prise en compte, dans les charges du débiteur, des sommes versées au titre de sa contri-
bution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant majeur, cf. Civ. 1re, 13 févr. 2019, n° 17-27749, Dr. fam. 2019, n° 7-8, comm. 149,
A. Kimmel-Alcover.
3. C. civ. art. 272 al. 1. Mais Cf. Civ. 1re, 11 janv. 2005, n° 02-19016 : « l’article 271, alinéa 2, ne fait pas de la fourniture de la déclaration
sur l’honneur une condition de recevabilité de la demande de prestation compensatoire ». Sur la prise en considération de
revenus occultes, cf. Civ. 1re, 15 janv. 2020, n° 18-26012, Dr. Fam. 2020, n° 4, comm. 66 M. GAYET.
4. Civ. 1re, 8 juin 2016, n° 14-29630 : la vie commune antérieure au mariage ne doit pas être prise en considération.
5. Préc.
6. C. civ., art. 275 al. 2 et 3.
89
1. C. civ., art. 276-3. Sur la révision des rentes viagères fixées avant l’entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, cf. Civ. 1re, 15 oct.
2020, n° 20-14584 et Cons. const. 15 janv. 2021, n° 2020-871 QPC relative aux dispositions transitoires de la loi du 26 mai 2004.
2. C. civ., art. 276-4. Civ. 1re, 10 juill. 2013, n° 12-13239 : « […] à la demande du débiteur de la prestation compensatoire et sauf
décision de refus spécialement motivée, le juge substitue à la rente un capital total ou partiel dont il fixe les modalités de
paiement, pourvu que le débiteur justifie être en mesure de le régler et que l’âge ou l’état de santé du créancier ne fasse pas
obstacle à une telle substitution ».
3. Cf. supra n° 124 s., les questions relatives à la révision du contenu de la convention de divorce établie par acte sous signature
privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire.
4. C. civ., art. 280. Cf. les dérogations et précisions apportées par les art. 280-1 s.
5. C. civ., art. 280 al 4 et 5.
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1. Paris, 19 mai 2016, n° 14/09312, JurisData 2016-009869 ; Civ ; 1re, 16 déc. 2020, 19-20732.
2. Civ. 1re , 25 mai 2016, n° 15-16456 : « […] ayant constaté qu’elle était saisie par l’épouse d’une demande de dommages-intérêts sur
le fondement de l’article 266 du Code civil, la cour d’appel n’était pas tenue de rechercher si cette action pouvait être fondée
sur l’article 1382 du même code ». Civ. 1re, 15 mai 2019, n° 18-16055, Dr. fam., 2019, n° 9, comm. 174, A.-M. Caro : « Attendu que,
pour condamner M. M… à payer à Mme B… des dommages-intérêts sur le fondement de l’article 266 du Code civil, l’arrêt
retient qu’il convient de réparer le préjudice avéré de l’épouse causé par l’attitude de dénigrement adoptée par le mari ;
Qu’en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser les conséquences d’une particulière gravité subies par Mme B…
du fait de la dissolution du mariage, la cour d’appel a violé le texte susvisé ». Cf. infra n° 149.
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Seront étudiées ici les autres conséquences produites par la désunion. Certaines sont
communes à plusieurs formes de vie en couple, d’autres sont propres à l’une d’elles.
141. Le divorce et la dissolution du Pacs mettent fin au lien juridique de couple pour l’avenir1.
Ainsi, tous les devoirs entre époux et entre partenaires cessent2 ; la solidarité à l’égard des
tiers également.
Les concubins ne sont quant à eux tenus à aucun devoir en tant que tel et ne sont liés que
par un lien de fait.
142. Chacun des époux perd l’usage du nom de son conjoint. L’un d’eux peut néanmoins
conserver l’usage du nom de l’autre, soit avec l’accord de celui-ci, soit avec l’autorisation du
juge, s’il justifie d’un intérêt particulier pour lui ou pour les enfants3. L’intérêt particulier du
conjoint peut résider dans le maintien d’une activité professionnelle avec le nom sous lequel
il est connu en tant qu’avocat, écrivain ou artiste par exemple. L’intérêt des enfants peut
consister, en particulier lorsqu’ils sont jeunes, à porter le même nom que les deux parents.
Le partenaire et le concubin ne bénéficiant pas de l’usage du nom de l’autre, la question
de la perte ne se pose pas.
1. Chacun des époux peut donc se remarier. L’ex-épouse n’a plus à respecter le délai de viduité de 300 jours, destiné à éviter
les conflits de paternité, lequel a été supprimé par la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce.
2. C. civ., art. 260. Le divorce dissout le mariage :
– à la date à laquelle la convention de divorce conclue par acte sous seing privé contresigné par avocats acquiert force
exécutoire.
– à la date à laquelle la décision qui prononce le divorce prend force de chose jugée, c’est-à‑dire lorsque les voies de recours
ont été rejetées ou le délai pour les exercer est expiré.La dissolution du Pacs prend effet entre les partenaires à la date de
son enregistrement et à l’égard des tiers à partir du jour où les formalités de publicité ont été accomplies.
3. C. civ., art. 264. L’autorisation du conjoint est caduque en cas de remariage et peut être révoquée en cas d’usage abusif. Cf.
pour un exemple d’autorisation maritale jusqu’à la majorité du plus jeune enfant, Civ. 2e, 4 juin 2020, n° 19-13178 (condam-
nation de l’épouse à renoncer sous astreinte à poursuivre au-delà de ce délai l’usage du nom de son ex-époux).
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143. Le divorce entraîne la perte des droits successoraux prévus par la loi en faveur des
conjoints survivants. En outre, les dispositions à cause de mort et les avantages matri-
moniaux qui devaient prendre effet au décès de l’un des époux sont révoqués de plein
droit avec le divorce1.
Le Pacs et le concubinage n’entraînent quant à eux aucune vocation successorale ab intestat.
144. Époux. Le régime matrimonial des époux est dissous2. Les biens et dettes sont recensés,
évalués et répartis. Les époux peuvent procéder à un règlement conventionnel de la liqui-
dation et du partage3. À défaut, le juge statue sur les demandes de maintien dans l’indi-
vision, d’attribution préférentielle et d’avance sur part de communauté ou biens indivis,
ainsi que sur les éventuels désaccords persistants concernant la liquidation-partage4. Il
existe des règles particulières au logement de la famille5.
1. C. civ. art. 1096 al. 1 et 265 al 2. Il est possible de renoncer à la révocation de plein droit, mais cela rend la libéralité irrévocable.
Cf. à titre d’illustration Civ. 1re, 18 déc. 2019, n° 18-26337. Toutefois, le divorce ne remet pas en cause les libéralités entre vifs
que se sont consenties les époux, qui sont irrévocables, qu’elles aient été consenties dans le contrat de mariage ou au cours
du mariage. Les avantages matrimoniaux et donations qui prennent effet au cours du mariage et les donations de biens
présents demeurent, sans que le divorce n’ait d’incidence (C. civ., art. 1096 al. 2 et art. 265 al. 1).
2. À l’égard des biens des époux, les effets du divorce remontent en principe à la date de la demande en divorce pour les divorces
contentieux. Mais à la demande des époux, le juge peut fixer les effets de la dissolution, entre eux, à la date à laquelle ils
ont cessé de cohabiter et de collaborer. Divorce par consentement mutuel : les époux peuvent fixer eux-mêmes, dans la
convention, la date à laquelle le divorce prendra effet dans leurs rapports patrimoniaux. À défaut, il prendra effet à la date
de l’homologation de la convention pour le divorce par consentement mutuel judiciaire et à la date à laquelle la convention
acquiert force exécutoire lorsque le divorce par consentement mutuel est constaté par actes d’avocats. C. civ., art. 262-1.
À l’égard des tiers, le jugement ou la convention de divorce sont opposables une fois la mention sur les actes d’état civil
apposée. C. civ, art. 262.
3. C. civ., art. 265-2.
4. C. civ., art. 267.
5. Lorsque le logement est assuré par un droit au bail, ce droit est attribué à l’un des deux époux selon les intérêts en présence
(C. civ., art. 1751 al. 2). Lorsqu’il constitue un bien commun, il peut faire l’objet d’une attribution préférentielle (C. civ., art. 831-2,
1476 et 1542). Lorsqu’il est un bien propre, un bail forcé peut être imposé à l’époux propriétaire si le conjoint réside avec les
enfants mineurs. Le bail cessera à la majorité du plus jeune des enfants (C. civ., art. 285-1).
95
145. Partenaires. Le législateur est peu prolixe sur les conséquences de la dissolution du Pacs.
Il prévoit que les partenaires procèdent eux-mêmes à la liquidation et au partage de leurs
intérêts patrimoniaux et qu’à défaut d’accord, le juge aux affaires familiales pourra être
saisi pour statuer sur les conséquences patrimoniales de la rupture1. Les biens indivis sont
en général partagés et chacun récupère ses biens personnels2.
96
1. Indemnité due, lors de la liquidation de la communauté, par un époux à la communauté lorsque son patrimoine personnel
s’est enrichi au détriment de celle-ci ou due par la communauté à un époux lorsque les biens propres de celui-ci ont servi à
augmenter la masse commune.
2. Les techniques issues du droit commun et analysées ci-dessous pour le concubinage, notamment l’enrichissement injustifié,
sont naturellement applicables au Pacs. Cf. par ex. Civ. 1re, 11 avr. 2018, n° 17-18207.
3. Cf. Douai, 21 sept. 2017, n° 16/05927, Dr. fam. 2017, n° 12, comm. 235 J.-R. Binet : validité de la clause du Pacs prévoyant la
possibilité pour le partenaire subissant la rupture de se maintenir dans l’immeuble indivis sans versement d’une indemnité
d’occupation.
4. Il arrive que l’un des concubins demande à ce que soit constatée sa créance envers l’indivision au titre du remboursement
du prêt ayant permis le financement du logement indivis. La Cour de cassation peut refuser le remboursement en relevant
l’intention de partager les charges communes. Cf. supra n° 69. Elle peut également refuser le paiement d’une indemnité
d’occupation au concubin animé d’une intention libérale : Civ. 1re, 2 avr. 2014, n° 13-11025.
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1. Un apport est un bien mis en commun par les associés lors de la constitution d’une société. En contrepartie, chacun reçoit
des droits sociaux (parts ou actions). Un apport en industrie est l’apport d’un travail ou d’un service.
2. Mais il n’y a pas de reprise ni de remboursement des apports en industrie. Le travail du concubin sur l’immeuble de la
concubine ne peut être restitué. Il a vocation à une partie de la plus-value sur l’immeuble mais ne peut prétendre à une
créance du chef de l’apport en industrie.
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D’autres techniques de droit commun sont parfois utilisées par les juges pour régler les
difficultés survenant entre les concubins au moment de la rupture, comme l’article 555 du
Code civil relatif aux constructions sur le sol d’autrui1.
1. Civ. 1re, 15 juin 2017, n° 16-14039, Dr. fam. 2017, n° 10, comm. 200, M. Gayet ; M. FARGE, « De l’application des règles relatives
à la construction sur le terrain d’autrui de l’article 555 du Code civil aux concubins : Dr. fam. 2002, comm. 23 et supra n° 69. Cf.
également Civ. 1re, 19 déc. 2018, D. 2019, 910, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau : paiement de l’indu ; absence de restitution
à l’égard des obligations naturelles volontairement acquittées (ici la cour d’appel aurait dû rechercher si le financement de
la maison d’habitation au moyen des seuls deniers personnels de Monsieur ne s’expliquait pas par le devoir de conscience
du concubin).
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1. La responsabilité extracontractuelle de droit commun est également un outil d’indemnisation en cas de décès accidentel de
l’un des membres du couple. La question du droit de la concubine à des dommages et intérêts en cas de mort accidentelle
du concubin a longtemps fait controverse et a suscité une évolution. Pendant une première période, la Cour de cassation
a estimé que les concubins ne pouvaient se prévaloir d’un intérêt légitime juridiquement protégé, à défaut de lien de droit
existant entre eux (Civ. 27 juillet 1937). Elle a finalement admis en chambre mixte qu’un concubin est fondé à exercer une
action en responsabilité délictuelle sur le fondement des articles 1382 et 1383 ancien du Code civil contre l’auteur de l’accident
ayant entraîné la mort du concubin afin d’obtenir réparation du préjudice matériel et moral subi (Ch. Mixte, 27 février 1970,
Dangereux, n° 68-10276).
106
153. Indifférence à la forme de vie en couple des parents. S’agissant des conséquences à
l’égard des enfants, que les parents qui se séparent aient été mariés, pacsés ou concubins,
les questions à régler sont les mêmes et concernent l’exercice de l’autorité parentale, la
résidence de l’enfant et la contribution à son entretien et son éducation. Ces conséquences
relèvent en effet de l’autorité parentale, voire de la qualité de parents, au-delà de la forme
de vie en couple qu’ils ont choisie.
154. Contrôle du juge. Simplement, dans le divorce judiciaire, le juge décide ou au moins contrôle
systématiquement les effets du divorce à l’égard des enfants alors que dans le divorce
par consentement mutuel extrajudiciaire il n’intervient pas au moment du divorce, mais
seulement et éventuellement dans le cadre d’un contentieux d’après-divorce. Il n’inter-
vient pas non plus, en principe, dans le cadre de la séparation d’un couple non marié, sauf
en cas de conflit1 ou si les parents souhaitent soumettre au juge une convention aux fins
d’homologation afin de donner force obligatoire à leur accord2.
155. Révision. Les modalités de la séparation relatives aux enfants, qu’elles aient été fixées
directement pas le juge, par convention homologuée ou par acte sous signature privée
contresigné par avocats sont toujours révisables3. De manière plus générale, le juge aux
affaires familiales peut être saisi de toutes les questions relatives à l’autorité parentale. Il
1. C. civ., art. 373-2-8. Le juge peut désigner un médiateur familial (C. civ., art. 373-2-10). Il peut ordonner une enquête sociale
(C. civ., art. 373-2-12).
2. C. civ., art. 373-2-7. Le juge homologue ces conventions après avoir vérifié que l’intérêt de l’enfant est respecté et que le
consentement des parents a été librement donné. CSS, art. L 582-2 : Le directeur de la CAF peut, sous certaines conditions,
donner force exécutoire aux accords des ex-concubins et ex-partenaires fixant le montant de la contribution à l’entretien
et à l’éducation de l’enfant.
3. C. civ., art. 373-2-13.
107
B. La résidence
158. Si l’exercice en commun de l’autorité parentale demeure le principe, les parents ne vivent
par hypothèse plus ensemble. Il faut donc fixer la résidence habituelle de l’enfant. C’est
également le cas, à plus forte raison, en cas d’exercice unilatéral de l’autorité parentale4.
Les parents par convention ou le juge optent pour une résidence alternée ou décident
du parent au domicile duquel sera fixée la résidence habituelle de l’enfant, en accordant
un droit de visite et hébergement à l’autre5, dont il faut fixer le rythme6. Le juge peut se
prononcer après avoir ordonné une garde alternée à titre expérimental7.
Il est obligatoire d’informer l’autre parent en cas de changement de résidence et si un
différend naît de ce changement, le juge sera saisi.
108
159. Les parents sont tenus d’une obligation d’entretien à l’égard de leurs enfants1. Lorsqu’ils
sont séparés, cette obligation se traduit par une contribution à l’entretien et à l’éducation
de l’enfant exécutée par le versement, par un parent à l’autre, d’une pension alimentaire
mensuelle dont le montant est déterminé en fonction des ressources des deux parents
et des besoins de l’enfant2. Elle peut aussi prendre la forme d’une prise en charge directe
d’une dépense d’entretien, comme, par exemple, les frais de scolarité ou d’un droit
d’usage et d’habitation, par la fourniture d’un logement3. La pension alimentaire peut être
remplacée par un capital, qui pourra prendre la forme d’un usufruit ou de l’affectation de
biens productifs de revenus4.
L’obligation ne cesse pas de plein droit et persiste après la majorité de l’enfant, sauf pour
le débiteur à démontrer que celui-ci n’est plus dans le besoin, ou du moins qu’il peut y
subvenir seul5.
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MOTIFS DE LA DÉCISION :
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115
Le lien enfant-parent
L’enfant est au cœur du Droit de la famille, en particulier dans ses rapports avec ses parents,
chargés d’en assurer la protection et l’éducation dans le respect de sa personne et de son
intérêt supérieur. Le lien de filiation doit être établi (chapitre 1) pour qu’en découlent un
certain nombre de conséquences (chapitre 2).
160. Définition. La définition de la filiation est simple et paraît intangible. Il s’agit du lien
juridique qui unit l’enfant à ses parents ou à l’un d’eux. Les règles qui la gouvernent diffèrent
néanmoins selon la conception retenue, à une époque donnée, du couple, de l’enfant et de
la famille. Elles sont aussi influencées par les possibilités offertes par la science.
161. Évolution. La faveur accordée par le Code Napoléon au mariage et la méconnaissance de
la preuve scientifique de la filiation ont en effet longtemps inspiré un Droit de la filiation
construit sur des présomptions, qui masquaient parfois la vérité biologique. La filiation
légitime était établie plus facilement et de manière plus stable que la filiation naturelle,
les enfants de la femme mariée étant rattachés au mari de leur mère par une présomption
de paternité inattaquable.
Trois principes essentiels ont progressivement guidé les réformes du Droit de la filiation,
en particulier de la filiation par procréation : la vérité, l’égalité et la stabilité.
Les progrès scientifiques ont d’abord permis de faire la preuve biologique, par l’examen
comparé des sangs, du défaut de paternité. Cette évolution, associée aux bouleversements
culturels et sociaux qui ont marqué le milieu du xxe siècle1, a conduit la loi du 3 janvier 1972,
inspirée par l’idée d’égalité mais toujours favorable au modèle de la famille légitime, à
faire une place à la vérité biologique2. La loi du 8 janvier 1993 a renforcé cette place, les
empreintes génétiques permettant désormais de faire la preuve positive de la filiation
avec une quasi-certitude3.
L’ordonnance du 4 juillet 20054 a également œuvré en faveur de l’égalité en supprimant
formellement la distinction entre filiation légitime et filiation naturelle. Aucun article du
Code civil ne contient plus ces mots. Ce texte a ainsi, dans une certaine mesure, uniformisé
les modes d’établissement de la filiation des enfants nés en et hors mariage5. Il a par ailleurs
tendu à embrasser le mieux possible les différentes facettes de la vérité. Les évolutions
qu’ont connues le couple et le statut des enfants ces dernières décennies, ainsi que les
progrès scientifiques, ont en effet conduit le Législateur à confirmer la place essentielle du
1. Cf. supra n° 6.
2. Loi n° 72-3 sur la filiation.
3. Loi n° 93-22 modifiant le Code civil relative à l’état civil, à la famille et aux droits de l’enfant et instituant le juge aux affaires
familiales.
4. Ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation, entrée en vigueur le 1er juillet 2006.
5. Si cette égalité est effectivement réalisée pour la filiation maternelle, c’est moins le cas pour la filiation paternelle dont
l’établissement en mariage reste gouverné par la présomption de paternité du mari, Cf. infra nos 164 s.
119
Pour l’heure, le Code civil distingue toujours, sans le dire très expressément, la filiation par
procréation – charnelle (section 1) ou médicalement assistée (section 2) – de la filiation par
adoption (section 4). Il interdit en outre la gestation pour autrui sur le territoire français.
1. Loi n° 2009-61 du 16 janvier 2009, ratifiant l’ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation et
modifiant ou abrogeant diverses dispositions sur la filiation.
2. Loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.
3. Cf. X. Labbée, « L’homme qui a valablement épousé sa sœur face à l’adage “quae temporalia…” », Gaz. Pal, 04/07/2017, p. 21.
4. Cf. « Filiation, origines, parentalité – Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle », Rapport du groupe de
travail Filiation, origines, parentalité (Sous la présidence d’Irène Théry), http://www.justice.gouv.fr
120
La filiation est la plupart du temps établie en dehors de toute action contentieuse (§1). Il
est néanmoins possible, si nécessaire et à certaines conditions, d’exercer une action en
justice visant à l’établir ou la contester (§2).
A. L’effet de la loi
L’établissement de la filiation par le simple effet de la loi recouvre deux hypothèses : l’éta-
blissement de la filiation maternelle par la désignation de la mère dans l’acte de naissance
et l’établissement de la filiation paternelle par le jeu de la présomption de paternité.
163. Mater semper certa est. « La mère est toujours certaine, c’est celle qui accouche ». L’article 311-25
du Code civil prévoit ainsi que « la filiation est établie, à l’égard de la mère, par la désignation
de celle-ci dans l’acte de naissance de l’enfant ». Jusqu’à la réforme de 2005, ce principe
n’était consacré dans le Code civil que pour la femme mariée, ce qui imposait à la femme
non mariée de reconnaître son enfant1 et constituait une inégalité non justifiée entre
enfants légitimes et enfants naturels. Désormais, la loi ne fait plus de distinction entre la
maternité en mariage et la maternité hors mariage. L’identité de la mère indiquée dans
l’acte suffit à établir la filiation2. La règle repose sur l’évidence de la maternité résultant de
l’accouchement mais prend aussi en compte la volonté de la mère, puisque celle-ci peut
1. La mère naturelle était bien désignée dans l’acte de naissance mais cela ne suffisait pas à établir la maternité automati-
quement. Néanmoins cette désignation valait reconnaissance si elle était corroborée par la possession d’état (C. civ., art. 337
anc.).
2. L’art. 311-25 C. civ. dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 4 juill. 2005 est applicable, sous réserve des décisions de
justice passées en force de chose jugée, aux enfants nés avant son entrée en vigueur, ce qui ne peut néanmoins avoir pour
effet de changer leur nom ou leur permettre, s’ils sont majeurs à la date de l’entrée en vigueur de l’ordonnance, d’obtenir la
nationalité française. Ils ne peuvent en outre s’en prévaloir dans les successions déjà liquidées (ord. n° 2005-759 du 4 juill.
2005, art. 20).
121
164. Pater is est. Le père est, quant à lui, celui que les noces désignent. La loi continue à distinguer
le père marié à la mère de celui qui ne l’est pas, l’établissement de la paternité par le seul
effet de la loi étant réservé au premier. La présomption de paternité du mari trouve sa
source dans le Droit Romain et la maxime Pater is est quem nuptiae demonstrant. Elle est
reprise dans le Code civil depuis son origine, mais sa portée a évolué. Le raisonnement doit
suivre trois étapes. Il convient en effet de s’assurer que la situation entre dans le champ
d’application de la présomption de paternité avant de se demander, le cas échéant, si elle
correspond à l’une des hypothèses dans lesquelles la présomption est écartée. Dans ce cas,
il faudra alors voir si elle est rétablie.
1. Le Code civil prévoit toujours la possibilité d’une reconnaissance maternelle (art. 316), permettant ainsi à une femme qui a
accouché sous X d’établir sa maternité et obtenir remise de l’enfant, tant qu’il n’a pas été placé en vue de son adoption.
2. C. civ., art. 55.
3. Il s’agit d’une présomption simple admettant donc la preuve contraire. L’art. 311 pose une seconde présomption simple,
dite présomption omni meliore momento : « la conception est présumée avoir lieu à un moment quelconque de cette période,
suivant ce qui est demandé dans l’intérêt de l’enfant ».
122
Acte de naissance n°
Mélissa LA PORTE DANTON
Nom : LA PORTE DANTON suivant déclaration conjointe du 12 février 2016
(1re partie : LA PORTE 2nde partie : DANTON)
Prénom(s) : Mélissa
Sexe : féminin
Née le 11 février 2016 à 14 heures 30 minutes
À 259 rue Sainte Marie Thérèse, Bron (Rhône)
123
1. L’article a été actualisé par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 pour prendre en compte les réformes du divorce et de la
procédure.
124
Dans les cas où la présomption de paternité est écartée, elle peut toutefois être rétablie.
Relative aux règles particulières à divers actes de l’état civil relatifs à la naissance
et à la filiation2
[…]
« Lorsque ces conditions sont réunies, les époux peuvent demander la délivrance d’un acte de
notoriété constatant la possession d’état à leur égard et rétablissant ainsi la filiation pater-
nelle (V. n° 300 et suiv.). La publicité de cet acte sera faite en marge de l’acte de naissance
de l’enfant sur instructions du procureur de la République du lieu de conservation de l’acte
de naissance par l’apposition de la mention marginale suivante :
Filiation établie à l’égard de … (Prénom(s) NOM du père suivi le cas échéant de (1re partie :
… 2e partie : …), né le … à …, époux de la mère.
Acte de notoriété en date du … délivré par le juge d’instance3 de….
Instructions du procureur de la République de la République de … n° … du … …… (lieu et
date d’apposition de la mention)
……. (qualité et signature de l’officier de l’état civil) ».
125
B. La reconnaissance
Lorsque la filiation n’est pas établie par l’effet de la loi, elle peut l’être par une reconnais-
sance de paternité ou de maternité (C. civ., art. 316).
168. Acte de reconnaissance. L’acte de reconnaissance a pour effet d’établir le lien de filiation
depuis la naissance et ne doit pas être confondu avec la déclaration de naissance. Il résulte
d’une démarche volontaire par laquelle un homme ou une femme reconnaît sa paternité
ou sa maternité. La reconnaissance doit être faite sous la forme d’un acte authentique3
et est inscrite en marge de l’acte de naissance de l’enfant reconnu4 ou directement dans
l’acte de naissance si elle est faite avant ou au moment de la déclaration de naissance. Il
s’agit d’un acte personnel5 irrévocable mais dont la véracité peut être contestée en justice,
y compris par son auteur, dans les conditions fixées par la loi6.
169. Enfant reconnu. Un enfant peut être reconnu à condition qu’il n’ait pas déjà une filiation
établie dans la même branche7. Dans l’hypothèse contraire, celui qui veut reconnaître
l’enfant doit, en application du principe chronologique, d’abord exercer en justice une
action en contestation, afin d’obtenir l’annulation de la première filiation8. En pratique, il
est possible de reconnaître immédiatement l’enfant mais la reconnaissance ne produira
ses effets qu’une fois le jugement annulant le premier lien de filiation intervenu.
Un enfant peut être reconnu quel que soit son âge, même après son décès, et même avant
sa naissance, dès lors qu’il est déjà conçu. La reconnaissance prénatale ne prendra toutefois
effet que si l’enfant naît vivant et viable9.
126
1. Le placement en vue de l’adoption fait obstacle à toute restitution de l’enfant à sa famille d’origine, à toute déclaration de
filiation ou reconnaissance (C. civ., art. 352). Sur les difficultés du père à faire obstacle à l’adoption en temps utile, Cf. infra
n° 217.
2. Cf. infra n° 266.
3. Loi n° 2018-778 pour une immigration maitrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie.
4. Action en contestation de paternité ou maternité exercée par le ministère public sur le fondement de la fraude (C. civ.,
art. 336), infractions de faux en écriture publique et atteinte à l’état civil de l’enfant (C. pén., art. 441-1 et 227-13), délit visant
spécifiquement les reconnaissances frauduleuses à visée migratoire ou aux fins d’obtention de la nationalité française
(CESEDA, art. L. 823-11 et L. 823-12).
127
Acte de reconnaissance
Acte de reconnaissance n°
Nom du père : Y
Prénom(s) : Jean-Pierre
Né le …à ….
Profession :
Domicile :
et
Nom de la mère : X
Prénom(s) : Marie
Née le …à …
Profession :
Domicile :
Ont déclaré reconnaitre pour leur ou leurs enfants le ou les enfants dont Marie X déclare être
actuellement enceinte et être informés du caractère divisible du lien de filiation ainsi établi.
Date et heure de l’acte : 07 novembre 2017 à 08 h 45 minutes
Lecture faite et invités à lire l’acte, les déclarants ont signé avec nous, Gérard Z, attaché
territorial, Officier de l’état civil par délégation du Maire.
Copie délivrée selon procédé informatisé
À Valence le ….
L’officier de l’état civil
128
C. La possession d’état
La possession d’état peut permettre d’établir la filiation lorsque celle-ci n’est pas établie
par l’effet de la loi ou par reconnaissance. Elle permet en particulier l’établissement de
la paternité hors mariage lorsque la reconnaissance est rendue impossible en raison du
décès du père prétendu.
172. Notion. Posséder un état donné, c’est avoir l’apparence de cet état. Il s’agit du vécu, de la
vérité sociologique et affective, qui correspond le plus souvent à la vérité biologique. On
dit que la possession d’état révèle le lien de filiation entre une personne et celui dont on
la dit issue et qui l’élève ou l’a élevée. L’article 311-1 du Code civil énumère, à titre indicatif,
ses principaux éléments constitutifs, dont la réunion parfaite n’est pas nécessairement
obligatoire puisque la possession d’état s’établit par un faisceau d’indices. La possession
d’état doit en outre revêtir quatre caractères selon l’article 311-2, pour jouer son rôle.
129
173. Acte de notoriété. Un acte de notoriété est nécessaire pour faire la preuve non contentieuse
de la possession d’état. Cet acte peut, selon l’article 317 du Code civil, être demandé par le
père et/ou la mère du vivant de l’enfant – quel que soit son âge – ou après son décès. La
possession d’état prénatale peut d’ailleurs être prise en compte. Il faudra démontrer, par
exemple, la participation aux choix des nom(s) et prénom(s) de l’enfant, la présence lors
du suivi médical de la grossesse, les démarches d’inscription en crèche ou de recherche
d’assistante maternelle, l’achat de meubles et/ou des travaux pour la chambre de l’enfant2.
L’acte peut aussi être demandé par l’enfant, du vivant de son parent prétendu ou après
son décès. Il est en effet possible pour un enfant d’invoquer la possession d’état à l’égard
de son parent décédé, notamment pour prouver sa qualité d’héritier.
La demande est faite au notaire3, dans un délai de cinq ans à compter de la cessation de
la possession d’état alléguée ou du décès du parent prétendu4. L’acte de notoriété sera
établi sur la foi des déclarations d’au moins trois témoins et, si nécessaire, de tout autre
document qui atteste une réunion suffisante de faits au sens de l’article 311-1. Mentionné
en marge de l’acte de naissance de l’enfant, il fera foi de la possession d’état jusqu’à preuve
contraire, laquelle pourra être rapportée dans le cadre d’une action en contestation de la
filiation établie par possession d’état5.
1. Circ. 30 juin 2006, préc. : « Le caractère équivoque peut notamment résulter d’une fraude ou d’une violation de la loi. Il peut
en être ainsi lorsque la possession d’état est invoquée pour contourner les règles régissant l’adoption, l’interdiction d’établir
la filiation incestueuse ou la gestation pour le compte d’autrui. Le caractère équivoque peut également résulter du conflit
de possessions d’état successives ou concurrentes ».
2. La circ. du 28 nov. 2011, préc., pp.161-162, prévoit la possibilité de demander un acte de notoriété prénatal.
3. L. n° 2019-222 du 23 mars 2019.
4. Après 5 ans il est possible d’agir en constatation de la possession d’état devant le Tribunal judiciaire, dans le délai de dix ans
à compter du jour où l’enfant a été privé de l’état qu’il réclame. Cf. infra n° 187.
5. Cf. infra n° 190.
130
131
174. Compétence. L’action est exercée devant le tribunal judiciaire du lieu où demeure le
défendeur, qui statue en formation collégiale, les débats ayant lieu en chambre du conseil.
175. Capacité. En principe, le mineur seul ne peut agir en justice. Il est, pour ce faire, représenté
par son ou ses parents, ou à défaut son tuteur. Mais un administrateur ad hoc est désigné
dans les cas où il existe une opposition d’intérêt.
176. Rétroactivité. Les actions relatives à la filiation sont déclaratives : elles déclarent un lien
de filiation qui préexiste ou annulent un lien de filiation qui n’a jamais existé. Par consé-
quent, une fois que le juge a déclaré ou annulé ce lien, le jugement produit des effets qui
remontent à la naissance.
177. Indisponibilité. « Les actions relatives à la filiation ne peuvent faire l’objet d’une renon-
ciation »1, autrement dit une personne ne peut pas renoncer à exercer une action en justice
aux fins d’établir ou de contester sa filiation2. Plus généralement, on ne peut pas faire de
convention portant sur la filiation3, l’article 16-7 du Code civil prohibant en particulier les
conventions de mère porteuse4.
132
133
action relative à la filiation et elle est réalisée par des experts judiciaires. Cf. Civ. 1re, 8 juin 2016, n° 15-16696, Dr. fam. 2016,
n° 9, comm. 173, H. Fulchiron et Civ. 1re, 19 sept. 2019, n° 18-18473.
1. Civ. 1re, 28 mars 2000, n° 98-12806, Dr. fam. 2000, comm. 72, P. Murat ; JCP 2001, I, 362, obs. L. Cadiet ; JCP 2001, I, 332, obs.
Y. Favier ; RTD civ. 2000, p. 304, obs. J. Hauser ; D. 2000, 731, note T. Garé ; D. 2001, 976, obs. F. Granet-Lambrechts ; D. 2001,
2868, obs. C. Desnoyer.
2. Civ. 1re, 2 décembre 2020, n° 19-21.850.
3. Civ. 1re, 14 janv. 2015, n° 13-28256 ; Civ. 1re, 13 juill. 2016, n° 15-22848, Civ. 1re, 8 juill. 2020, n° 18-20.961, reproduit infra n° 185.
4. C. pr. civ., art. 11 al. 1. Civ. 1re, 18 nov. 2015, n° 14-23096, Dr. fam. 2016, n° 2, comm. 28, A-C. Réglier ; CEDH, 2 juin 2015, Canonne
c/ France, n° 22037/13 ; Civ. 1re, 11 mai 2016, n° 15-18312.
5. Elle avait été admise avant la loi bioéthique du 10 août 2004. Cf. l’affaire Montand : Paris, 6 nov. 1997, D. 1998.118, note
Ph. Malaurie ; JCP 1998,I,101, n° 3, obs. J. Rubellin-Devichi ; Dr. fam. 1998, 4, obs. P. Catala ; Defrénois 1998, art. 36753, obs. J.
Massip ; RTD civ. 1998.87, obs. J. Hauser. La Cour d’appel avait ordonné l’exhumation du corps afin de faire pratiquer une
identification génétique, laquelle avait conclu à l’absence de paternité, alors que les juges de première instance (TGI Paris,
6 sept. 1994), tirant les conséquences du refus du défendeur de se soumettre aux expertises et relevant notamment la ressem-
blance physique frappante entre l’enfant et le père prétendu, avaient conclu à la paternité.Un contrôle de conventionnalité
in concreto pourrait toutefois conduire à ce que cette exclusion de principe soit écartée dans certaines situations. Cf. en ce
sens J. Garrigue et A. Gouëzel, « Recevabilité des actions relatives à la filiation : droit au respect de la vie privée ou sécurité
juridique ? », RJPF 2020, n° 10, p. 37, sur CEDH, 16 juin 2020, Boljevic c/ Serbie, n° 47443/14 et 30 juin 2020, Bocu c/ Roumanie,
n° 58240/14.
6. Cf. Cons. Const., 30 sept. 2011, décision QPC n° 2011-173.
134
135
Au-delà de ces principes généraux, il convient d’étudier plus précisément les règles s’appli-
quant à chacune des actions relatives à la filiation, en distinguant celles qui ont pour objet
d’établir la filiation de celles qui ont au contraire pour objet de la contester.
136
Ces actions tendent à faire déclarer en justice l’établissement du lien de filiation. Il en existe
quatre. Les trois premières sont fondées sur la recherche de la vérité biologique, tandis
que la dernière est fondée sur la recherche de la vérité sociologique.
184. Action en recherche de maternité. Une seule action en recherche de maternité est
envisagée par le Code civil, à l’article 325. L’action obéit donc aux mêmes règles, qu’il
s’agisse d’établir une filiation maternelle en ou hors mariage. Rappelons néanmoins que
dans l’immense majorité des cas, le nom de la mère sera indiqué dans l’acte de naissance et
donc la filiation maternelle établie automatiquement. Cette action n’a lieu d’être que si la
filiation maternelle n’est établie ni par la désignation de la mère dans l’acte de naissance,
ni par reconnaissance, ni par possession d’état.
Le demandeur est l’enfant, qui agit contre la mère prétendue ou ses héritiers, personnel-
lement s’il est majeur ou émancipé, par l’intermédiaire de son représentant s’il est mineur.
Le délai de prescription est, conformément au droit commun, de dix ans à compter de la
naissance et suspendu pendant la minorité de l’enfant, lequel peut donc peut agir jusqu’à
ses vingt-huit ans. Il faut prouver l’accouchement de la mère prétendue et l’identité de
l’enfant avec celui dont elle a accouché. Si l’action aboutit, la filiation maternelle est
déclarée rétroactivement établie.
La loi du 16 janvier 20091 a supprimé la fin de non-recevoir spécifique à l’action en recherche
de maternité, tirée de l’accouchement secret de la mère, sans toutefois remettre en cause la
possibilité pour celle-ci de demander le secret de son identité lors de la naissance2. L’enfant
dont la mère a accouché sous X peut donc, à condition de ne pas avoir été adopté et d’avoir
accédé à l’identité de celle qu’il recherche, exercer une action contre cette dernière visant
à lui imposer sa maternité. En pratique l’hypothèse sera bien rare.
185. Action en recherche de paternité hors mariage. Il existe deux actions visant spécifiquement
à établir la paternité3. La première, prévue à l’article 327 du Code civil, concerne la paternité
hors mariage. Elle est réservée à l’enfant et donc exercée par lui ou son représentant en
son nom s’il est mineur, contre son père prétendu ou ses héritiers4. Le délai de prescription
a été élargi par l’ordonnance de 2005 et est passé de deux ans à dix ans à compter de la
naissance, conformément au droit commun, avec suspension pendant la minorité.
1. Préc.
2. C. civ., art. 326. Sur l’équilibre organisé par la loi (dispositions du Code de l’action sociale et des familles) entre le respect dû
au droit à l’anonymat garanti à la mère lorsqu’elle a accouché et le souhait légitime de l’enfant né dans ces conditions de
connaitre ses origines, cf. L. n° 2002-93 du 22 janvier 2002 relative à l’accès aux origines des personnes adoptées et pupilles
de l’État ; CEDH, Odièvre c/ France, 13 févr. 2003, Dr. fam. 2003, comm. 58, P. Murat, RTDciv. 2003, p. 276, obs. J. Hauser et
p. 375 obs. J.-P. Marguénaud, JCP 2003, p. 561, obs. A. Gouttenoire et F. Sudre, JCP 2003, p. 285, obs. J. Hauser ; CE, 16 oct.
2019, n° 420230, reproduit infra n° 223.
3. Sur le refus de la Cour de cassation de transmettre une QPC relative à l’égalité homme-femme, cf. Civ. 1re, 28 mars 2013,
n° 13-40001, civ. 1re, 9 nov. 2016, n° 15-20547 et civ. 1re, 4 déc. 2019, n° 19-16634.
4. La mère mineure peut représenter son enfant. Si le père est mineur, il doit être personnellement partie à l’action, en présence
de ses représentants légaux.
137
1. Préc.
2. Préc.
3. Dr. fam. 2017, n° 1, comm. 9, H. Fulchiron.
138
139
140
141
186. Action en rétablissement des effets de la présomption de paternité du mari. Cette action,
prévue à l’article 329 du Code civil, concerne la paternité en mariage. En effet, lorsque la
présomption de paternité est écartée en application de l’article 313, et n’est pas rétablie de
plein droit sur le fondement de l’article 314, ses effets peuvent être rétablis par jugement
selon l’article 315 du Code civil. Cette action a un intérêt particulier lorsque la mère a
voulu priver le mari d’un enfant qui est le sien en le déclarant à l’état civil sans l’indication
de son nom. Le rétablissement de la présomption par jugement est plus solide que la
142
1. Civ. 1re, 16 mars 2016, n° 14-21.457, Dr. fam. 2016, n° 5, comm. 106 A.-Cl. Réglier : le délai court à compter du jour de l’entrée
en vigueur de l’ordonnance du 4 juill. 2005 (1er juill. 2006), sans que la durée totale puisse excéder celle prévue par la loi
antérieure.
2. Cf. Civ. 1re, 2 déc. 2020, n° 19-20279. La prescription de l’action en recherche de paternité n’est pas un obstacle à l’exercice
de l’action en constatation de la possession d’état : la demande formée par deux enfants nés hors mariage en recherche
de paternité contre les héritiers de leur père prétendu après son décès étant jugée prescrite, leur demande subsidiaire en
constatation de leur possession d’état est admise sur le fondement de l’art. 330 (Civ. 1re, 23 nov. 2011, n° 10-26993, reproduit
ci-dessous).
3. Civ. 1re, 6 déc. 2005, n° 03-15588 et Civ. 1re, 16 juin 2011, n° 08-20475. La Cour de cassation statue sur la rédaction des textes
antérieure à l’ordonnance de 2005 mais le raisonnement est transposable.
4. Pour une décision considérant que la possession d’état n’est pas établie : Civ. 1re, 9 février 2011, n° 09-71691 (textes antérieurs
à ceux issus de l’ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005).
143
144
L’action en constatation de la possession d’état est recevable alors que l’action en recherche de paternité
ne l’est pas.
Ne peut être demandé que par les père et mère Peut être exercée par tout intéressé.
ou l’enfant.
La demande doit être faite dans le délai Le délai de prescription est de dix ans à partir
de cinq ans à compter du jour où la possession de la cessation de la possession d’état ou du décès
d’état a cessé ou du décès du parent prétendu1. du parent prétendu2.
Acte délivré sur production de trois Preuve libre, mais il ne peut y avoir lieu à
témoignages et, si nécessaire, de documents prescription d’une expertise biologique.
complémentaires.
Ceux qui prétendent contester la filiation ainsi L’établissement de la filiation par le jugement
établie peuvent apporter la preuve contraire ne peut pas être remis en cause, sinon par les voies
en exerçant une action en contestation de recours.
de la possession d’état (cf. infra).
145
Action
Action en rétablissement Action
Action en recherche des effets en constatation
en recherche de paternité de la présomption de la possession
de maternité hors mariage de paternité d’état
C.civ., art. 325 C. civ., art. 327 à l’égard du mari C. civ., art. 330
C. civ., art. 329
L’article 331 précise que lorsqu’une action en établissement de la filiation est exercée, le
tribunal statue, s’il y a lieu, sur l’exercice de l’autorité parentale, la contribution à l’entretien
et à l’éducation de l’enfant et l’attribution du nom.
188. Évolution. Ces actions ont pour objet de faire annuler un lien de filiation légalement établi.
La loi les enfermait dans des conditions strictes et avait conduit la jurisprudence à en créer
de nouvelles par le biais contestable de l’interprétation a contrario de certains articles du
Code civil2. Certaines actions visant à anéantir une filiation étaient alors rendues possibles
pendant trente ans. L’ordonnance du 4 juillet 2005 a profondément réformé la contes-
tation de la filiation dans un souci de simplification, de prise en considération des progrès
scientifiques et de l’évolution des mentalités, prenant acte du fait que la paternité hors
1. C. civ., art. 321 : à l’égard de l’enfant, le délai est suspendu pendant sa minorité.
2. C. civ., art. 322 al. 2 et 334-9 anc.
146
1. L’action en contestation de paternité doit, à peine d’irrecevabilité, être dirigée contre le père dont la paternité est contestée
et contre l’enfant : Civ. 1re, 1er févr. 2017, n° 15-27245, Dr. fam. 2017, comm. 101, H. Fulchiron.
2. Le ministère public peut contester la filiation de l’enfant en cas de fraude ou d’indices contenus dans l’acte rendant la filiation
invraisemblable même si filiation est confortée par une possession d’état supérieure à cinq ans (C. civ., art. 336). Pour un ex.
d’application de l’art. 336 et la notion de fraude à la loi concernant une reconnaissance mensongère, cf. Toulouse, 16 mai
2017, Dr. fam. 2017, n° 10, comm. 207, H. Fulchiron.
3. La Cour de cassation a qualifié ce délai de délai de forclusion, susceptible d’être interrompu par une demande en justice
mais pas suspendu à l’encontre de celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement : Civ. 1re, 1er févr. 2017,
n° 15-27245, préc. et Civ. 1re, 15 janv. 2020, n° 19-12348, Dr. fam. 2020, comm. 118, C. Siffrein-Blanc.Sur le point de départ du
délai de l’art. 333 al. 2, cf. Civ. 1re, 21 sept. 2016, n° 15-24226 : « Qu’en statuant ainsi, alors que l’ordonnance n° 2005-759 du
4 juillet 2005 était entrée en vigueur le 1er juillet 2006, de sorte que le délai de cinq ans prévu par l’alinéa 2 de l’article 333
du Code civil courait à compter de cette date, la cour d’appel a violé par fausse application les textes susvisés ». Ce délai de
cinq ans est un délai préfix qui doit être soulevé d’office par le juge, le cas échéant.
147
1. Sur la question de la conformité de la fin de non-recevoir spécifique de l’art. 333 al. 2 à l’article 8 Conv. EDH, cf. notamment
Civ. 1re, 10 juin 2015, n° 14-20790, Dr. fam. 2015, comm. 163 C. Neirinck ; D. 2015, p. 2365 note H. Fulchiron ; RTD civ. 2015, 596,
obs. J. Hauser : La mère, se heurtant à la fin de non-recevoir car la possession d’état conforme à la présomption de paternité
de son ex-mari avait duré plus de 5 ans, a saisi le procureur de la République pour qu’il agisse sur le fondement de l’art. 333
al. 2. Le Procureur a assigné l’enfant, le mari, la mère et les filles du second mari pour qu’un examen comparé de l’ADN soit
ordonné. La Cour de cassation reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir répondu aux conclusions de la mère, du fils et de
l’ex-mari faisant valoir qu’un juste équilibre devait être ménagé, dans la mise en œuvre de l’article 8 entre l’intérêt du fils de
voir établir sa filiation biologique et l’intérêt des héritières du nouveau mari, père véritable prétendu, qui s’opposaient à cet
établissement. Cf. aussi Civ. 1re, 6 juill. 2016, n° 15-19853 ; Civ. 1re, 1er févr. 2017, n° 15-27245, préc. : « Mais attendu que M. X… s’est
borné, dans ses conclusions d’appel, à invoquer la prééminence de la vérité biologique ; qu’après avoir constaté la possession
d’état de l’enfant à l’égard de M. A…, l’arrêt énonce que le législateur a choisi de faire prévaloir la réalité sociologique à l’expi-
ration d’une période de cinq ans pendant laquelle le père légal s’est comporté de façon continue, paisible et non équivoque
comme le père de l’enfant, ce qui ne saurait être considéré comme contraire à l’intérêt supérieur de celui-ci ; que la cour
d’appel, qui a ainsi procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ». Cf. sur l’art. 333 dans sa
globalité Civ. 1re, 24 février 2011, n° 10-40068 : non-lieu à renvoi d’une QPC (équilibre entre les composantes biologique et
affective de la filiation ; stabilisation de la filiation).
2. Contestation de reconnaissance prénatale : le délai court à partir de la naissance.
148
149
150
190. L’action en contestation de la possession d’état. Cette action vise à faire annuler l’acte
de notoriété1. Elle peut être exercée par toute personne justifiant d’un intérêt légitime,
dans un délai de dix ans à compter de la délivrance de l’acte. Une filiation établie par une
possession d’état contraire à la vérité biologique est donc inattaquable après ce délai.
L’objet de la preuve pose quant à lui question. L’article 335 indique en effet que « la filiation
établie par la possession d’état constatée dans un acte de notoriété peut être contestée en
rapportant la preuve contraire ». S’agit-il de prouver que la possession d’état n’existe pas ou
ne revêt pas les qualités requises et/ou que la filiation ainsi établie n’est pas conforme à la
vérité biologique ? Le doute semé par le texte révèle l’ambiguïté de l’acte de notoriété. Cet
acte constate la possession d’état. Il est donc possible de penser qu’il suffit de contester
l’existence de la possession d’état ou prouver qu’elle est viciée pour voir aboutir l’action.
Mais le constat par l’acte de notoriété de cette possession d’état entraîne l’établissement
de la filiation. C’est donc cette dernière que l’on conteste, d’autant que la possession d’état
est avant tout envisagée, dans le Code civil, comme le révélateur de la vérité biologique. Les
auteurs admettent que la preuve puisse avoir l’un ou l’autre de ces deux objets : inexistence
ou vice de la possession d’état, d’une part, non-conformité de la filiation ainsi établie à
la vérité biologique, d’autre part. C’est également la position du ministère de la justice2.
1. Cf. supra n° 173.
2. Circ., 30 juin 2006, préc. : « Il appartient à celui qui conteste la possession d’état constatée dans un acte de notoriété de
rapporter la preuve, par tous moyens, que la possession d’état ne s’est pas valablement constituée, parce qu’elle repose sur
des faits insuffisamment établis ou qu’elle ne présente pas les qualités exigées par l’article 311-2. Le demandeur peut être
également autorisé à prouver que la filiation ainsi présumée n’est pas conforme à la réalité biologique. La jurisprudence
151
La possession d’état
conforme au titre a duré
Fin de non- 5 ans depuis la naissance
recevoir ou la reconnaissance
spécifique si elle a été faite
ultérieurement.
selon laquelle une expertise biologique peut être ordonnée dans le cadre d’une action en contestation de la possession d’état
ne semble pas devoir être remise en cause. » Cf. Caen, 9 janvier 2014, n° 09/01687 : la Cour d’appel admet la preuve biologique.
1. C. civ., art. 321 : à l’égard de l’enfant, le délai est suspendu pendant sa minorité.
152
1. Qu’il s’agisse d’une paternité en mariage ou hors mariage. L’action est exercée pendant la minorité de l’enfant par sa mère,
qui agit au nom de l’enfant.
2. S’il est décédé, l’action est dirigée contre ses héritiers et les subsides seront prélevés sur l’héritage. L’action peut même être
dirigée contre celui à l’égard duquel l’établissement de la parenté est impossible en cas d’inceste absolu.
3. Civ. 1re, 14 juin 2005, n° 04-13901.
4. Les subsides sont dus à compter de l’assignation.
153
192. Pratiques autorisées. L’assistance médicale à la procréation (AMP), selon l’article L. 2141-1
du Code de la santé publique, s’entend des pratiques cliniques et biologiques permettant
la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons,
le transfert d’embryons et l’insémination artificielle. Une liste des procédés biologiques
utilisés est fixée par arrêté du Ministre de la santé sur la base de critères portant sur le
respect du corps humain, notamment l’anonymat, la gratuité, l’interdiction du clonage
et des pratiques eugéniques3 et permet de limiter les pratiques.
193. Don de gamètes. On distingue l’AMP intraconjugale (endogène) de l’AMP avec tiers
donneur (exogène).
Si très peu d’enfants naissent d’une procréation médicalement assistée avec don4, cette
dernière a donné lieu à des débats importants relatifs à l’anonymat du donneur5 et à la
connaissance par l’enfant de ses origines personnelles. Le Conseil d’État a eu l’occasion
d’affirmer la conformité à l’article 8 de la Convention européenne des Droits de l’homme
de l’interdiction d’avoir accès à des données identifiantes concernant le donneur6. Mais un
certain nombre d’arguments ont été avancés en faveur de la modification de la loi, pour
permettre aux enfants concernés d’avoir accès à leurs origines sans que leur filiation ne soit
154
Les conditions énoncées à l’article L. 2141-2 du Code de la santé publique sont relatives,
d’une part, à la finalité de l’AMP, et, d’autre part, à ses bénéficiaires3.
194. Finalité. L’AMP doit, jusqu’à présent, avoir pour finalité de remédier à l’infertilité patho-
logique, médicalement diagnostiquée, d’un couple, ou d’éviter la transmission à l’enfant
ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité. Cette finalité pourrait
évoluer si l’AMP était ouverte par la prochaine loi bioéthique aux couples de femmes voire
aux femmes seules.
195. Bénéficiaires. Les bénéficiaires de l’AMP sont pour l’heure les couples, mariés ou non, mais
composés d’un homme et d’une femme. Pour les couples non mariés, la preuve d’une vie commune
d’au moins deux ans n’est plus nécessaire depuis 20114. La question de l’ouverture de l’AMP
aux couples de femmes ou même aux femmes seules s’est posée avec une intensité accrue
depuis la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe.
Pour contourner l’interdiction, un certain nombre de femmes se rendent, par exemple, en
Belgique, en Espagne, aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni pour bénéficier d’une insémination ;
l’épouse de la mère ayant ensuite la possibilité d’adopter l’enfant5.
1. Filiation, origines, parentalité – Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, Rapport du groupe de travail
Filiation, origines, parentalité (Sous la présidence d’Irène Théry), http://www.justice.gouv.fr. Une levée relative de l’anonymat
avait été envisagée par le Gouvernement lors de la révision des lois bioéthiques en 2011, mais l’idée avait été rejetée par le
Parlement.
2. Le donneur aura nécessairement donné son consentement exprès à cette possibilité au moment du don (cf. les dispositions
spécifiques concernant les dons antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi). Le Sénat souhaite toutefois que le donneur renou-
velle son consentement au moment de la demande d’accès à son identité par l’enfant majeur.
3. Des règles supplémentaires concernent le transfert d’embryon. Cf. C.S.P., art. L. 2141-3 s.
4. Loi n° 2011-814 du 7 juill. 2011.
5. C. civ., art. 345-1 : adoption de l’enfant du conjoint ; avis de la Cour de cassation du 22 sept. 2014, reproduit infra ; Versailles,
16 avril 2015, nos 14/04253, 14/05360, 14/07327, 14/05368, 14/07323 et Versailles, 15 févr. 2018, nos 17/05285 et 17/05286. Cf.
également la proposition de loi visant à réformer l’adoption, adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture le
4 déc. 2020 (TA N° 525), afin, notamment, d’ouvrir l’adoption aux couples non mariés. Cf. infra n° 213. La dernière mouture de
la loi bioéthique va dans le même sens.A défaut d’adoption, sur le droit de visite et d’hébergement pouvant être accordé à la
compagne de la mère sur le fondement de l’art. 371-4 C. civ., cf. Civ. 1re, 24 juin 2020, n° 19-15198 et CEDH, 12 nov. 2020, Honner
c/ France, n° 19511/16.Sur la transcription de la mention de la compagne ou épouse de la mère en cas d’AMP dans un couple de
femmes, cf. Civ. 1re, 18 déc. 2019, nos 18-14751 et 18-50007, reproduit infra ; M. Farge, « Transcription des filiations maternelles
de l’enfant issu d’une AMP à l’étranger », Dr. fam., n° 7-8, juill. 2020, comm. 113 sur Civ. 1re, 18 mars 2020, n° 18-15368 : « Ni
la circonstance que l’enfant soit né d’une assistance médicale à la procréation ni celle que son acte de naissance désigne
la mère ayant accouché et une autre femme en qualité de mère ou de parent ne constituent un obstacle à la transcription,
155
sur les registres de l’état civil français de l’état civil, de cet acte probant au sens de l’article 47 du Code civil » (sur la position
antérieure, cf. H. Fulchiron, « La filiation des enfants nés par PMA et GPA à l’étranger : la stabilisation », Dr. fam. 2018, n° 3,
comm. 63 et les arrêts cités de la CA à Rennes). Pour une comparaison avec la GPA, cf. infra n° 204 s.
1. Avec des divergences, notamment sur le remboursement par la Sécurité Sociale dans cette hypothèse : AN, Projet de loi,
TA n° 343, 15 oct. 2019 et Sénat, projet de loi, TA n° 55, 4 févr. 2020.
2. Projet de loi relatif à la bioéthique, Sénat, n° 53, 3 févr. 2021. En raison des divergences importantes avec la version du texte
issue de la deuxième lecture de l’Assemblée nationale (Texte n° 474, 31 juill. 2020), une commission mixte paritaire a été
réunie le 17 févr. 2021 mais a échoué à élaborer un texte de compromis. Le processus législatif traine en longueur, depuis sa
présentation en conseil des ministres en juillet 2019. Espérons qu’à l’heure où est publié cet ouvrage la loi a été adoptée !
3. Cf. Versailles, 5 mars 2018, Agence de la biomédecine, arrêts n° 17 VE 00824 et n° 17 VE 00826.
4. C.S.P., art. L. 2141-11-1.
5. CE, 31 mai 2016, n° 396848. Cf. aussi TA de Rennes, ord. 11 oct. 2016, n° 1604451 (accueille la demande de la veuve) ; TA
Toulouse, 13 oct. 2016, n° 1405903 (rejette la demande de la veuve) ; CE, ord. 24 janv. 2020, n° 437328 (transfert d’embryon ;
pas d’atteinte à l’article 8 Conv. EDH car le déplacement en Europe est fondé seulement sur la possibilité légale d’y faire
procéder à un transfert d’embryon post mortem en l’absence de circonstances particulières). Cf., sur ces deux dernières
affaires, J.-R. Binet, « Insémination post mortem : d’une injustice à l’autre », Dr. fam. 2016, n° 12, comm. 267. Sur une demande
faite par la mère du défunt, cf. CEDH, 12 nov. 2019, n° 23038/19, Petithory Lanzmann c/ France.
6. L’installation de l’intéressée en Espagne ne résultait pas « de la recherche, par elle, de dispositions plus favorables à la
réalisation de son projet que la loi française, mais de l’accomplissement de ce projet dans le pays où demeure sa famille
qu’elle a rejointe ».
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159
196. L’article 311-19 du Code civil édicte une prohibition absolue d’établir la filiation à l’égard
du donneur. Aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don et l’enfant
issu de la procréation médicalement assistée. Aucune action en responsabilité ne peut en
outre être exercée contre l’auteur du don.
Ces règles sont couramment présentées comme les corolaires de l’anonymat du donneur
mais ce lien est à nuancer dans la perspective d’une évolution concernant cet anonymat
puisque procréation et origines seront très probablement tout à fait être distinguées de
la filiation en elle-même2.
197. C’est le Droit commun qui s’applique à l’établissement de la filiation à l’égard du couple
ayant bénéficié de la procréation médicalement assistée. Rien ne permet d’ailleurs à
l’officier d’état civil qui établit l’acte de naissance de l’enfant de deviner les circonstances
de sa conception, du moins s’agissant d’un couple homme-femme. La désignation de la
mère dans l’acte de naissance de l’enfant établira la filiation à son égard. La présomption
de paternité trouvera en outre à s’appliquer si le couple est marié. À défaut, le père recon-
naîtra l’enfant. La contrainte est néanmoins plus importante ici que dans le droit commun
puisque « celui qui, après avoir consenti à l’assistance médicale à la procréation, ne reconnaît
pas l’enfant qui en est issu engage sa responsabilité envers la mère et envers l’enfant. En
1. Cf. Civ. 1re, 16 mars 2016, n° 15-13427 ; JCP 2016, 532, J.-R. Binet ; D. 2016, p. 977, note F. Viney ; Dr. fam. 2016, n° 5, comm. 104 H.
Fulchiron.
2. Cf. supra n° 193.
160
198. L’article 311-20 alinéa 2 pose un principe, trouvant ses limites dans deux tempéraments.
En effet, le consentement donné à une PMA avec don de gamètes interdit toute action
en contestation de la filiation établie à l’égard du couple receveur et toute action aux fins
d’établissement d’une autre filiation, sauf à alléguer que le consentement a été privé d’effet
ou que l’enfant n’est pas issu de la PMA4.
161
200. Cour de cassation. La pratique ayant commencé à se développer alors qu’il n’existait aucune
disposition législative sur la question, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la licéité
des associations de mise en relation des parents demandeurs et des mères porteuses1 et
sur l’adoption par la mère d’intention de l’enfant issu d’une GPA. Elle a alors cassé, dans
l’intérêt de la loi, un arrêt ayant prononcé l’adoption, en condamnant fermement le contrat
de mère porteuse comme contraire aux principes d’indisponibilité du corps humain et
d’indisponibilité de l’état de personnes et en considérant que l’adoption était par conséquent
l’ultime phase d’un processus constituant un détournement de l’institution de l’adoption.
162
201. Lois bioéthiques. À l’occasion des lois bioéthiques du 29 juillet 1994, le Législateur a inséré
dans le Code civil la disposition d’ordre public selon laquelle « toute convention portant sur
la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle »1. L’interdiction est donc
générale et concerne tant les pratiques « altruistes » que les pratiques rémunérées ; tant
la simple gestation que la procréation pour autrui ; tant les couples demandeurs stériles
que ceux qui ne le sont pas. Les conventions dites de mère porteuse sont frappées de
nullité absolue. La mère légale est la mère porteuse, sauf si elle accouche dans le secret.
L’article 336 du Code civil, qui n’est pas spécifique à cette situation, prévoit en outre que
la filiation légalement établie peut être contestée par le ministère public si des indices
tirés des actes eux-mêmes la rendent invraisemblable ou en cas de fraude à la loi. Le Code
pénal, enfin, prévoit des sanctions diverses et punit notamment le fait de s’entremettre
entre une personne ou un couple désireux d’accueillir un enfant et une femme acceptant
de porter cet enfant en vue de leur remettre2.
202. Fondements. L’interdiction d’avoir recours à une GPA en France est fondée sur l’indispo-
nibilité du corps humain et de l’état des personnes. Elle vise notamment à éviter le « trafic
de ventres », l’instrumentalisation des corps des femmes et des enfants, et l’exploitation
de la misère. L’intérêt de l’enfant est ici pensé en amont, avant même sa conception, et de
manière relativement abstraite.
203. Questions. Cette interdiction fait néanmoins aujourd’hui l’objet de discussions, sous l’effet
des revendications croissantes, notamment des couples stériles et des couples homosexuels.
Le débat est également alimenté par le fait que, pour contourner l’interdiction française,
1. Loi n° 94-653 du 29 juillet 1994, art. 3. C. civ., art. 16-7 et 16-9. Sur les conséquences, cf. H. Fulchiron, « Vérité biologique,
prohibition de la GPA, fraude à l’adoption et intérêt de l’enfant : comment trouver un juste équilibre ? », commentaire de
l’arrêt Civ. 1re, 12 sept. 2019, n° 18-20472, Dr. fam., 2019, n° 11, comm. 216.
2. C. pénal, art. 227-12. Cf. TGI de Versailles, 26 févr. 2019, n° 16/07633, D. IP/IT 2020, p. 69, note B. Musseau : site internet espagnol
mais ciblant le public français, proposant de faire l’intermédiaire entre une personne ou un couple désireux d’accueillir un
enfant et une femme acceptant de le porter ; le contenu du site a été jugé manifestement illicite, par référence aux articles 16-7
du C. civ. et 227-12 du C. pén., par le tribunal, qui a par conséquent enjoint à l’hébergeur de le rendre inaccessible sur le
territoire français.
163
§2. La situation des enfants nés de gestations pour autrui valablement effectuées
à l’étranger
Contrastant avec l’inertie caractérisant la première question, la deuxième, après une période
de stabilité (A), a connu un mouvement significatif ces dernières années (B).
204. Position de refus. La Cour de cassation a pendant plusieurs années refusé l’établissement
et la reconnaissance en France de la filiation, à l’égard des parents d’intention, des enfants
nés de GPA effectuées à l’étranger.
Elle refusait ainsi de prononcer l’adoption de ces derniers par la mère d’intention4 et de
faire produire effet, à l’égard de celle-ci, à la possession d’état5. Elle a également refusé
la reconnaissance par la mère d’intention, assez logiquement puisqu’en droit français, la
mère est celle qui accouche, donc la mère porteuse. Mais la reconnaissance par le père
d’intention, même s’il est bien le père biologique, a également été annulée6.
Elle refusait parallèlement la transcription de l’acte de naissance ou du jugement d’adoption
étrangers sur les registres d’état civil français7.
1. Pays autorisant ou tolérant la GPA : notamment Belgique, Grèce, Russie, Ukraine, Inde. Mais cf. pour l’Inde J. Couard,
« Parution d’une étude sur la gestation pour autrui en Inde », Dr. fam. 2016, n° 12, alerte 99 : « Afin d’endiguer le phénomène
et sous la pression de certains États, le gouvernement indien a donc fermé l’accès à la GPA aux étrangers en 2015 tout en
confirmant les possibilités d’y recourir pour les couples indiens ».
2. Infra, n° 206 s.
3. Des arrêts récents concernant l’adoption par le parent d’intention de l’enfant issu d’une GPA étrangère montrent bien la
difficulté de protéger la mère porteuse, lorsque celle-ci n’est pas mentionnée dans l’acte de naissance étranger en qualité
de mère : Civ. 1re, 4 nov. 2020, n° 19-15.739 et 19-50. 042.
4. Civ. 1re, 9 déc. 2003, n° 01-03927.
5. Civ. 1re, 6 avr. 2011, n° 09-17130.
6. Annulation de la reconnaissance paternelle : Civ. 1re, 13 sept. 2013, n° 12-18315.
7. Civ. 1re, 6 avr. 2011, n° 10-19053 et 09-66486 ; Civ. 1re, 13 sept. 2013 n°12-18315 et n° 12-30138 ; Civ. 1re, 19 mars 2014, n° 13-50005.
La transcription est définie par la circulaire portant instruction générale relative à l’état civil (IGREC) en date du 11 mai 1999
comme : « l’opération par laquelle un officier de l’état civil reporte sur ses registres un acte de l’état civil reçu ailleurs que
dans sa circonscription, ou une décision judiciaire relative à l’état civil ». Elle permet d’obtenir des actes français.
164
1. Décision du 5 juin 2015, n° MSP-MLD-MDE-2015-093 : Les enfants concernés rencontrent des difficultés pour circuler hors du
territoire français puisqu’ils « se voient refuser la délivrance de passeports car ni leur filiation, ni leur nationalité française ne
sont reconnues », malgré la circulaire du 25 janvier 2013 [circ. dite « Taubira » : délivrance de certificats de nationalité française
aux enfants nés de GPA à l’étranger validée par CE, 12 déc. 2014, Association Juristes pour l’enfance et autres, n°367324, 366989,
366710, 365779, 367317, 368861]. En outre, « l’enfant né à l’étranger d’une GPA ne peut hériter des parents d’intention que
s’il a été institué légataire ; ses droits successoraux sont alors calculés moins favorablement ». Ces enfants « ne disposent
[…] pas d’état civil français et de livret de famille ; de ce fait, les parents rencontrent de nombreuses difficultés dans leur
vie quotidienne pour exercer l’autorité parentale, pour procéder au rattachement des enfants à la Sécurité Sociale, à leur
inscription à l’école, ou pour bénéficier des prestations familiales ou d’un congé parental ».
2. F. Chénedé, « État civil des enfants nés de gestation pour autrui à l’étranger : reconnaissance ? », RLDC 2015, n° 128, actes du
colloque organisé par l’UCLY, L’état de la personne ou la personne dans tous ses états, ss dir. C. PETIT et L.-D. MUKA TSHIBENDE.
« […] si le droit français refuse de consacrer juridiquement leur filiation, il ne fait nullement obstacle à leur accueil et à leur
éducation par leurs parents d’intention. C’est d’ailleurs ce qui distingue la solution française, qui peut être jugée propor-
tionnée, de la position des autorités italiennes, plus récemment condamnées par la CEDH, pour avoir retiré l’enfant à ses
parents d’intention (CEDH, 27 janv. 2015, aff. 25358/12, Paradiso et Campanelli c/ Italie) [Cf. depuis CEDH, Gde ch., 24 janvier
2017, n°25358/12.]. De manière plus générale, il faut rappeler à quel point l’affirmation selon laquelle ces enfants seraient
des “fantômes de la République” est grossièrement mensongère : autorisés à entrer sur le territoire national, bénéficiant de la
nationalité française, vivant avec leurs parents, qui peuvent être désignés tuteurs, ces enfants ne rencontrent dans leur vie
quotidienne, de l’aveu même des associations militantes, aucune difficulté, et c’est tant mieux, pour l’inscription à la Sécurité
Sociale, à la crèche, à l’école ou encore dans un établissement de soins (sur cette réalité, v. Contribution à la réflexion sur la
maternité pour autrui, Les rapports du Sénat, nº 421, 2008, p. 44) ».
3. Civ. 1re, 6 avr. 2011, préc.
165
206. CEDH. La Cour européenne des droits de l’homme, le 26 juin 2014, dans les arrêts Mennesson
et Labassée1, a marqué un tournant décisif. Elle a condamné la France sur le fondement
de la violation de la vie privée des enfants2. C’est le refus de reconnaître et de permettre
l’établissement en droit interne du lien de filiation à l’égard de leur père biologique qui
est expressément condamné, la Cour attirant l’attention sur l’importance de la filiation
biologique comme élément de l’identité. La mère d’intention n’est quant à elle pas évoquée
expressément3.
1. CEDH, 26 juin 2014, Menesson et Labassée contre France, n° 65941/11 et 165192/11. Le pourvoi en cassation sera réexaminé suite
à cette condamnation : Cour de réexamen des décisions civiles, 16 févr. 2018, n° 001.
2. Conv. EDH, art. 8.
3. La France a par la suite été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme, le 21 juillet 2016 (CEDH, Foulon et
Bouvet c/ France, Dr. fam. 2016, comm. 201, H. Fulchiron ; Cour de réexamen, 16 févr. 2018, n° 002) et le 19 janvier 2017 (CEDH,
Laborie c/ France, Dr. fam. 2017, n° 2, comm 34 H. Fulchiron), mais pour des affaires jugées en droit interne avant le revirement
de 2015.
166
207. Cour de cassation. Suite à cette condamnation, la Cour de cassation a modifié sa position
dans deux arrêts d’Assemblée plénière du 3 juillet 20151, sur le fondement des articles 47
du Code civil et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Elle a retenu que
la convention de GPA ne faisait plus obstacle à la transcription sur les registres français
d’état civil de l’acte de naissance étranger, dès lors que l’acte n’est ni irrégulier, ni falsifié
et que les faits qui y sont déclarés correspondent à la « réalité ».
Article 47
Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les
formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données
extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes
vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne
correspondent pas à la réalité.
208. Transcription de l’acte de naissance étranger sur les registres de l’état civil français en ce
qu’il désigne le père. La Cour d’appel de Rennes a eu l’occasion d’appliquer cette nouvelle
jurisprudence, notamment dans deux arrêts du 7 mars 20162. Dans la première affaire3, l’acte
d’état civil californien mentionnait l’enfant comme étant né du père français d’intention et
1. Cass. Ass. plén., 3 juill. 2015, n° 15-50002 et 14-21323, D. 2015. 1819, note Fulchiron et Bidaud-Garon ; ibid. 1773, obs. Sindres ;
ibid. 1919, obs. Bonfils et Gouttenoire ; AJ fam. 2015. 496, obs. Chénedé ; ibid. 364, obs. Dionisi-Peyrusse ; RTD civ. 2015. 581,
obs. Hauser ; Gaz. Pal. 2015. 2949, obs. Le Maigat ; Dr. fam. 2015, n° 166, obs. Binet.
2. H. Fulchiron, « GPA : une nouvelle lecture a minima des arrêts Labassée et Mennesson », Dr fam. 2016, n° 5, étude 9. Cf.
aussi Rennes, 28 sept. 2015, n° 14/07321 et n° 14/05537, Dr. fam. 2015, n° 11, comm. 201 J.-R. Binet. La Cour d’appel de Rennes
connaît en appel des décisions du TJ de Nantes, dans le ressort duquel se trouve le Service central de l’état civil des Français
de l’étranger.
3. N° 15/03859.
167
1. N° 15/03855.
2. Nos 15-28.597, 16-16.901/16-50.025, 16-16455 et 16-16.495, JCP 2017, n° 39, p. 1691, note A. Gouttenoire, D. 2017, n° 30, p. 1737,
comm. H. Fulchiron, Dr. fam. 2017, n° 9, p. 10, comm. J.-R. Binet. Cf. aussi Civ. 1re, 29 nov. 2017, n° 16-50061.
3. La Cour précise par ailleurs que la transcription concernant le père n’est pas subordonnée à une expertise judiciaire.
4. Conv. EDH, art. 8.
5. Convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l’enfant, art. 3 § 1.
6. Cf. Paris, 30 janv. 2018, JurisData n° 2018-003358 : adoption plénière par le père d’intention non conforme à l’intérêt de
l’enfant. Cf. également Civ. 1re, 4 nov. 2020, préc.
168
211. Transcription intégrale. La Cour de cassation, suite à cet avis consultatif, a validé la trans-
cription de l’acte de naissance des jumelles Mennesson à l’égard de leur mère d’intention,
motivant sa décision sur les conditions, énoncées par la Cour de Strasbourg et non remplies
en l’espèce, dans lesquelles l’adoption est considérée comme suffisante : « Il se déduit de
l’art. 8 Conv. EDH qu’au regard de l’intérêt de l’enfant […] [qui exige un examen de chaque
situation au regard des circonstances particulières qui la caractérisent] la reconnaissance
du lien de filiation à l’égard de la mère d’intention mentionnée dans l’acte étranger doit
intervenir au plus tard lorsque ce lien entre l’enfant et la mère d’intention s’est concrétisé.
[…] Il résulte de ce qui précède, qu’en l’espèce, s’agissant d’un contentieux qui perdure depuis
plus de quinze ans, en l’absence d’autre voie permettant de reconnaître la filiation dans des
conditions qui ne porteraient pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la
vie privée de Mmes E… et J… D… consacré par l’article 8 de la Convention de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales, et alors qu’il y a lieu de mettre fin à cette
atteinte, la transcription sur les registres de l’état civil de Nantes des actes de naissance
établis à l’étranger de E… et J… D… ne saurait être annulée »3.
169
1. Civ. 1re, 18 déc. 2019, n° 18-11815 et 18-12327 ; Civ. 1re, 18 nov. 2020, n° 19-50043 ; Civ. 1re, 13 janv. 2021, nos 19-17929 et 19-50046.
2. CEDH, 12 déc. 2019, C et E c/ France, nos 1462/18 et 17348/18 ; CEDH, 16 juill. 2020, D c/ France, n° 11288/18 : refus de transcription
de l’acte étranger à l’égard de la mère d’intention, mère génétique de l’enfant désignée dans l’acte de naissance et épouse du
père ; l’existence d’un lien génétique n’a pas pour conséquence que le droit au respect de la vie privée et familiale requière
la reconnaissance du lien de filiation par l’unique voie de la transcription de son acte de naissance, dès lors que le lien de
filiation peut être établi par une autre voie, en l’espère suffisamment rapide.
3. Projet de loi relatif à la bioéthique, adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale le 31 juill. 2020, n° 474, art. 4 bis.
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Section 4 – L’adoption
212. L’adoption crée un lien de filiation qui ne repose pas sur la procréation mais, d’une part, sur
la volonté de ceux qui consentent à l’adoption, des adoptants et de l’adopté en fonction de
son âge et, d’autre part, sur le jugement puisqu’elle est prononcée par le tribunal judiciaire.
Si elle existait d’une certaine manière dans l’Antiquité1, le modèle d’aujourd’hui est en réalité
assez récent. Quasiment inexistante dans l’Ancien Droit, elle a été restaurée par Napoléon
Bonaparte qui l’a intégrée dans le Code civil en la réservant aux adoptés majeurs, dans
l’objectif essentiel de transmettre la succession, et sans rupture des liens avec la famille
d’origine. Néanmoins, la première guerre ayant fait de nombreux orphelins, la loi du 19 juin
1923 a permis l’adoption d’enfants mineurs, toujours sans rupture des liens avec la famille
d’origine. Le Décret-loi du 29 juillet 1939 a quant à lui ajouté la « légitimation adoptive » des
enfants de moins de cinq ans par des couples mariés de plus de quarante ans sans enfants,
qui se rapproche davantage de l’adoption plénière d’aujourd’hui.
Une grande refonte a ensuite été opérée par la loi du 11 juillet 19662, qui a véritablement
consacré les deux formes actuelles de l’adoption – l’adoption simple et l’adoption plénière –
et ouvert cette dernière aux personnes seules. Depuis la loi du 22 décembre 19763, il n’est
plus nécessaire de ne pas avoir d’enfants pour adopter. La loi du 5 juillet 19964 a simplifié
1. Cf. JurisClasseur Civil Code, art. 343 à 370-2 – Fasc. 10 : filiation adoptive par Cl. Neirinck.
2. L. n° 66-500 du 11 juill. 1966.
3. L. n° 76-1179 du 22 déc. 1976.
4. L. n° 96-604 du 5 juill. 1996.
173
A. Les conditions
La volonté n’est pas suffisante. Un certain nombre de conditions de fond et de forme sont
prévues par la loi et sont relatives, d’une part, à l’adoptant et, d’autre part, à l’adopté.
174
SUR L’ADOPTION
32. Considérant que les articles 343 et 346 du Code civil, applicables tant à l’adoption plénière
qu’à l’adoption simple, disposent, d’une part, que l’adoption « peut être demandée par
deux époux… » et, d’autre part, que « nul ne peut être adopté par plusieurs personnes si ce
n’est par deux époux » ; qu’en outre, il résulte tant de l’article 356 du Code civil, applicable
à l’adoption plénière, que de l’article 365 du même code applicable à l’adoption simple,
compte tenu de la portée que la jurisprudence constante de la Cour de cassation confère
à ces dispositions, que la faculté d’une adoption au sein d’un couple est réservée aux
conjoints ; que, par suite, l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même
1. Cf. pour des exemples d’appréciation de cette dernière condition : Agen, 15 mai 2013, 12/01359, JurisData 2013-010350 et
Douai, 6 juin 2013, 12/04631, JurisData 2013-011823.
2. Organisme de droit privé autorisé par le président du conseil départemental et qui sert d’intermédiaire pour l’adoption,
CASF art. L225-11 s.
3. C. civ., art. 353-1. Si l’agrément a été refusé ou s’il n’a pas été délivré dans le délai légal de neuf mois, le tribunal peut prononcer
l’adoption s’il estime que les requérants sont aptes à accueillir l’enfant et qu’elle est conforme à son intérêt ; il est néanmoins
peu probable que le tribunal prononce l’adoption dans la première hypothèse. La procédure d’agrément relève du Code de
l’action sociale et des familles. Le ou les adoptants doivent être agréés par un arrêté du président du conseil départemental
après avis d’une commission qui vérifie qu’ils remplissent les qualités nécessaires pour adopter sur les plans familial, éducatif
et psychologique. Les refus et retraits d’agrément sont motivés et contrôlés par les juridictions administratives. Une nouvelle
demande est possible après un délai de 30 mois. L’agrément est valable sur tout le territoire pour 5 ans, avec confirmation
régulière du souhait d’adopter et entretiens d’actualisation du dossier.
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a) Âge
216. Selon l’article 345 du Code civil, l’adoption plénière n’est en principe permise qu’en faveur
des enfants âgés de moins de quinze ans. Elle est néanmoins possible pendant toute la
minorité et les deux ans qui suivent la majorité si l’enfant a plus de quinze ans et a été
accueilli avant d’avoir cet âge par des personnes qui ne remplissaient pas les conditions
légales pour adopter ou s’il a fait l’objet d’une adoption simple avant cet âge. Si l’enfant
a plus de treize ans, il doit en outre consentir à son adoption2 et peut se rétracter jusqu’à
son prononcé.
b) Placement
217. Préalablement au prononcé de l’adoption, l’enfant doit en outre être accueilli au foyer du
ou des adoptants pendant au moins six mois. On parle de placement en vue de l’adoption
lorsque les adoptants se sont adressés à l’Aide sociale à l’enfance (ASE) ou à un organisme
autorisé pour l’adoption, sachant que les enfants de moins de deux ans doivent nécessai-
rement être remis à l’ASE ou un OAA, sauf dans l’hypothèse d’une adoption intrafamiliale3.
Le placement consiste dans la remise effective de l’enfant aux futurs adoptants et fait échec
à la remise à la famille d’origine et à toute reconnaissance ou déclaration de filiation4. C’est
pourquoi l’enfant dont la filiation n’est pas établie ne peut être placé en vue de l’adoption
avant l’écoulement d’un délai de deux mois.
1. Cf. Cons const., 17 mai 2013, décision n° 2013-669 DC, préc. et reproduite supra.
2. Devant un notaire, les autorités consulaires ou les services de l’Aide Sociale à l’Enfance lorsque l’enfant lui est confié.
3. C. civ., art. 348-5. L’enfant de plus de deux ans peut quant à lui avoir été remis directement aux adoptants par ses parents
qui consentent à l’adoption.
4. C. civ., art. 352. Cf. sur les effets du placement à l’égard du père biologique de l’enfant souhaitant le reconnaitre ou l’ayant
reconnu cf. Civ. 1re, 7 avr. 2006, n° 05-11285 (affaire « Benjamin »), préc. ; Cons. Constit. 7 févr. 2020, n° 2019-826 QPC (déc.
reproduite) et Civ. 1re 27 janv. 2021, nos 19-15921, 19-24608 et 20-14012 (déc. reproduite).
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183
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185
Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Riom, 5 mars, 5 novembre et 17 décembre 2019), I… T… H… est
née le […] . Sa mère a demandé le secret de son accouchement. Le lendemain, l’enfant a
été admise, à titre provisoire, comme pupille de l’État puis, à titre définitif, le 24 décembre
suivant. Le conseil de famille des pupilles de l’État a consenti à son adoption le 10 janvier
2017 et une décision de placement a été prise le 28 janvier. L’enfant a été remise au foyer
de M. et Mme R… le 15 février. Après avoir, le 2 février 2017, entrepris des démarches auprès
du procureur de la République pour retrouver l’enfant, et ultérieurement identifié celle-ci,
M. A… , père de naissance, l’a reconnue le 12 juin. M. et Mme R… ayant déposé une requête
aux fins de voir prononcer l’adoption plénière de l’enfant, M. A… est intervenu volontai-
rement à l’instance.
[…]
Mais sur le quatrième moyen du pourvoi n° Y 19-15.921, pris en sa deuxième branche
Énoncé du moyen
8. M. A… fait grief à l’arrêt de dire que son action est irrecevable et de prononcer l’adoption
de l’enfant I… T… H… , alors « qu’aux termes de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit au respect de sa vie privée
et familiale ; que selon la jurisprudence de la Cour européenne, la vie familiale s’étend à la relation
potentielle qui aurait pu se développer entre un père naturel et un enfant né hors mariage et que la vie
privée, qui englobe des aspects importants de l’identité personnelle, inclut le droit au regroupement
d’un père avec son enfant biologique ainsi que l’établissement d’un lien juridique ou biologique entre
un enfant né hors mariage et son géniteur ; toujours selon la jurisprudence de la Cour européenne, la
notion de vie privée inclut le droit à la connaissance de ses origines, l’intérêt vital de l’enfant dans son
épanouissement étant également largement reconnu dans l’économie générale de la Convention ; que
l’annulation par la cour d’appel de l’acte de reconnaissance de I… par son père après son placement en
vue de l’adoption et la décision de prononcer l’adoption plénière de l’enfant constituent une ingérence
dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale de M. A… et de I… garanti par l’article 8
de la Convention ; qu’il appartient au juge de vérifier si concrètement, dans l’affaire qui lui est soumise,
une telle ingérence est nécessaire dans une société démocratique, et, pour ce faire, d’apprécier la
nécessité de la mesure au regard du but poursuivi, son adéquation et son caractère proportionné à
cet objectif ; après avoir constaté que M. A… avait démontré sa détermination, par les nombreuses
démarches qu’il a engagées pendant les mois qui ont suivi la naissance de I…, à faire reconnaître
sa paternité sur l’enfant et qu’il était prouvé, par les expertises biologiques, qu’il était bien le père
biologique de I…, la cour d’appel a annulé l’acte de reconnaissance au motif que le placement en vue
de l’adoption faisait échec à toute déclaration de filiation en application de l’article 352 du Code civil
186
187
c) Adoptabilité
218. Plusieurs catégories d’enfants sont adoptables. Selon la terminologie employée par le
ministère de l’Europe et des affaires étrangères, l’enfant est adoptable soit par consen-
tement familial, soit par décision administrative, soit par décision de justice1.
219. Consentement familial. Selon l’article 347 du Code civil, peuvent en premier lieu être
adoptés les enfants pour lesquels les père et mère ou le conseil de famille ont consenti
à l’adoption. Il s’agit principalement des enfants remis volontairement à l’ASE ou à un
OAA. Le consentement est en principe donné par les père et mère ou l’un d’eux si l’autre
est décédé, dans l’impossibilité de manifester sa volonté, a perdu ses droits d’autorité
parentale ou encore si la filiation n’est pas établie à son égard2. Il est donné par le Conseil
de famille lorsque les deux parents sont décédés, privés de l’autorité parentale ou dans
l’impossibilité de manifester leur volonté, après avis de la personne qui dans les faits prend
soin de l’enfant3.
1. www.diplomatie.gouv.fr.
2. C. civ., art. 348 et 348-1.
3. C. civ., 348-2. Lorsque les père et mère ou le conseil de famille consentent à l’adoption de l’enfant en le remettant au service
de l’aide sociale à l’enfance ou à un organisme autorisé pour l’adoption, le choix de l’adoptant est laissé au tuteur avec
l’accord du conseil de famille des pupilles de l’État ou du conseil de famille de la tutelle organisée à l’initiative de l’organisme
autorisé pour l’adoption (C. civ., art. 348-4).
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Le tribunal judiciaire déclare délaissé l’enfant recueilli par une personne, un établissement
ou un service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui se trouve dans la situation
mentionnée à l’article 381-1 pendant l’année qui précède l’introduction de la demande en
déclaration judiciaire de délaissement parental. La demande en déclaration de délaissement
parental est obligatoirement transmise, à l’expiration du délai d’un an prévu à l’article 381-1,
par la personne, l’établissement ou le service départemental de l’aide sociale à l’enfance
qui a recueilli l’enfant, après que des mesures appropriées de soutien aux parents leur ont
1. C. civ., art. 351 al. 2 et 3 et 352. Sur la conformité de ces articles à la Constitution, cf. Cons. Const. 7 févr. 2020, n° 2019-826
QPC reproduite supra.
2. C. civ., art. 348-3.
3. C. civ., art. 348-6.
4. Cf. pour plus de précisions sur les catégories d’enfants admis en qualité de pupille de l’État, CASF, art. L. 224-4.
5. CASF, art. L. 224-8.
6. Ce qui les rend adoptables en réalité, c’est le consentement des parents au moment de la remise à l’ASE ou le consentement
du conseil de famille des pupilles de l’État.
7. Ces articles remplacent depuis la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant l’ancien article 350 relatif
à la déclaration judiciaire d’abandon.
189
222. Enfants du conjoint. Une dernière catégorie d’enfants adoptables doit être mentionnée.
L’adoption plénière de l’enfant du conjoint est en effet permise dans quatre hypothèses :
lorsque l’enfant n’a de filiation établie qu’à l’égard de ce conjoint ; lorsque l’enfant a fait
l’objet d’une adoption plénière par ce seul conjoint et n’a de filiation établie qu’à son égard2 ;
lorsque l’autre parent que le conjoint s’est vu retirer totalement l’autorité parentale ; ou
enfin lorsque l’autre parent que le conjoint est décédé et n’a pas laissé d’ascendants au
premier degré ou lorsque ceux-ci se sont manifestement désintéressés de l’enfant3.
1. Cet arrêt concerne l’art. 350 anc. mais la solution aurait probablement été la même sous l’empire des nouveaux textes : le
désintérêt doit être volontaire.
2. Cette deuxième hypothèse a été ajoutée par la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même
sexe, préc.
3. C. civ., art. 345-1.
190
B. Les effets
223. État civil. L’adoption plénière est prononcée par le tribunal judiciaire au terme d’une
procédure gracieuse2. Le jugement doit être transcrit sur les registres d’état civil du lieu
de naissance de l’adopté, ou ceux du service central de l’état civil du ministère des affaires
étrangères à Nantes lorsque l’adopté est né à l’étranger3. La transcription ne contient
aucun élément relatif à la filiation d’origine4 et tient lieu d’acte de naissance pour l’adopté.
Mais le caractère adoptif de la filiation n’est pas dissimulé. La copie intégrale de l’acte de
naissance fait en effet mention du jugement d’adoption plénière5, du moins lorsqu’elle est
délivrée à la demande de l’adopté ou de l’adoptant ou sur autorisation du procureur de la
République6. Les extraits d’acte de naissance avec filiation indiquent quant à eux les parents
adoptifs sans aucune référence au jugement d’adoption, et protègent donc la vie privée
de l’intéressé. L’acte originaire est revêtu de la mention « adoption » et considéré comme
nul. Il n’est pas détruit mais l’officier d’état civil ne doit donc en principe plus le divulguer7.
1. C. civ., art. 353. Cf. Chambéry, 28 avr. 2015, n° 14/02523, JurisData 2015-009553 : adoption par l’épouse de la mère de l’enfant
conçu à l’aide d’un donneur connu mais qui ne souhaite pas être parent (cf. en particulier l’appréciation de l’intérêt de
l’enfant). Depuis la loi du 14 mars 2016, l’article 353 dispose que le mineur capable de discernement doit être entendu par
le tribunal ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le tribunal à cet effet.
2. C. pr. civ., art. 1166 et 1167. Les adoptants adressent une requête au tribunal. Cette requête formalise leur consentement,
qui peut être rétracté jusqu’à ce que la décision prononçant l’adoption devienne définitive. L’enfant sera auditionné s’il le
demande et s’il a le discernement suffisant. Adoption posthume : Cf. art. 353 al. 4 et 5.
3. La transcription doit être faite dans les quinze jours de la date à laquelle la décision passe en force de chose jugée. C. civ.,
art. 354.
4. Le Code civil évoque la filiation « réelle » de l’adopté (art. 354 al. 3).
5. Cf. circ., 29 mai 2013, de présentation de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, NOR : JUSC1312445C,
annexe 2.
6. Décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l’état civil, NOR : JUSC1703743D, art. 37. Afin de connaître les personnes auxquelles
les copies intégrales, les extraits avec ou sans filiation peuvent être délivrées, cf. les articles 27 s. du décret.
7. L’accès sera parfois possible avec communication au CNAOP et en cas d’allégation d’un cas d’inceste lors du mariage de
l’adopté.
191
Vu la procédure suivante :
Mme B… F… née C… a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d’annuler
la décision du 12 mars 2012 par laquelle le D… national pour l’accès aux origines person-
nelles a refusé de lui communiquer l’identité de sa mère. Par un jugement n° 1500074 du
30 septembre 2015, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 15PA04869 du 30 janvier 2018, la cour administrative d’appel de Paris a rejeté
l’appel formé par Mme B… F… contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 avril et 27 juillet
2018 au secrétariat du contentieux du D… d’État, Mme F… demande au D… d’État :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l’État, la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du
code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
fondamentales ;
– le Code civil ;
– le code de l’action sociale et des familles ;
– la loi du 27 juin 1904 sur le service des enfants assistés ;
– l’acte dit “loi” n° 182 du 15 avril 1943 ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Bertrand Mathieu, conseiller d’Etat en service extraordinaire,
– les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de La Varde, Buk
Lament, Robillot, avocat de Mme C… épouse F… ;
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B… F… née C… a été
adoptée par M. E… C… et son épouse par jugement du 6 novembre 1952, quelques mois
après sa naissance, déclarée le 11 juin 1952. Elle s’est adressée en septembre 2010 au D…
national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP) pour tenter d’obtenir l’identité
de ses parents biologiques. Par une décision du 12 mars 2012, le CNAOP a refusé de lui
communiquer l’identité de sa mère biologique. Mme F… se pourvoit contre l’arrêt par
1. S’agissant du secret, à l’égard de la mère biologique, de l’identité des parents adoptifs et de la nouvelle identité de l’enfant,
cf. CE, 17 octobre 2012, n° 348440.
192
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194
Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 1er avril et 27 mai 2016), que, soutenant que la notice
relative à leur nom de famille figurant dans l’ouvrage intitulé « Le simili-nobiliaire français »
faisait état du caractère adoptif de la filiation de M. Jean X… et invoquant l’atteinte ainsi
portée à leur vie privée, celui-ci et son fils, M. Christophe X…, ont assigné M. Y…, l’auteur de
cet ouvrage, et la société Sedopols, qui l’a édité, aux fins d’obtenir la suppression de toute
mention de leur nom dans les éditions ultérieures, ainsi que la réparation de leur préjudice ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu que M. Y… et la société Sedopols font grief à l’arrêt du 1er avril 2016 de dire qu’ils
ont porté atteinte à la vie privée de M. Jean X… et de les condamner à payer à ce dernier des
dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que l’état civil d’une personne ne fait plus partie
de la sphère de la vie privée protégée par l’article 9 du Code civil lorsqu’il devient accessible
au public ; qu’en l’espèce, pour estimer que la divulgation, dans un ouvrage destiné au public,
de la filiation adoptive de M. Jean X… portait atteinte à la vie privée de l’intéressé, la cour
d’appel a considéré que la filiation adoptive de celui-ci appartient à son histoire personnelle
et à l’intimité de sa famille ; qu’en statuant ainsi, tout en admettant que, conformément à
l’article 17 de la loi n° 2008-696 du 15 juillet 2008, M. Y… avait pu consulter et obtenir une
copie intégrale de l’acte de naissance de M. Jean X…, ce dont il résulte que ces éléments ne
relevaient plus, à ce stade, de la sphère de la vie privée de l’intéressé, la cour d’appel a omis
de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l’article 9 du Code
civil, ensemble l’article L. 213-2 du code du patrimoine, dans sa rédaction issue de la loi du
15 juillet 2008 ;
Mais attendu que, s’il résulte de l’article L. 213-2, I, 4°, e), du code du patrimoine, dans
sa rédaction issue de la loi n° 2008-696 du 15 juillet 2008 relative aux archives, que les
registres de naissance de l’état civil constituent, à l’expiration d’un délai de soixante-
quinze ans à compter de leur clôture, des archives publiques communicables de plein droit
à toute personne qui en fait la demande, certaines des informations qu’ils contiennent
et, notamment, celles portant sur les modalités d’établissement de la filiation, relèvent
de la sphère de la vie privée et bénéficient, comme telles, de la protection édictée par les
articles 9 du Code civil et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des
195
A. Les conditions
225. Particularités. Il existe quelques particularités par rapport à l’adoption plénière, qui
concernent les conditions relatives à l’adopté. L’adoption simple est en effet permise quel
que soit l’âge de l’adopté, qui peut être majeur, et il n’y a pas de condition liée à l’accueil ou
au placement en vue de l’adoption5. La loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de
personnes de même sexe a en outre précisé qu’un époux peut adopter en la forme simple
l’enfant que son conjoint a adopté en la forme simple ou plénière.
196
197
B. Les effets
La procédure est la même que pour l’adoption plénière et le jugement est transcrit sur les
registres d’état civil1. Mais les effets sont différents puisque l’adoption simple ne rompt
pas le lien avec la famille d’origine. Elle lui superpose un nouveau lien de filiation et est
révocable.
227. Conservation des droits. « L’adopté reste dans sa famille d’origine […] et y conserve tous
ses droits ». Il y conserve donc ses droits héréditaires et les empêchements à mariage
continuent à s’appliquer entre l’adopté et sa famille d’origine2. L’adopté conserve en outre
en principe son nom de famille3.
228. Obligation d’entretien. L’obligation d’entretien est maintenue mais seulement de manière
subsidiaire : les père et mère de l’adopté ne sont tenus de lui fournir des aliments que s’il ne
peut les obtenir de l’adoptant4. Inversement, l’adopté a toujours une obligation alimentaire
à l’égard de sa famille d’origine mais, d’une part, l’exception d’indignité5 peut jouer pour
l’exclure et, d’autre part, l’adopté est dispensé de l’obligation s’il a été admis en qualité de
pupille de l’État ou retiré de son milieu familial par décision judiciaire pendant au moins
trente-six mois au cours des douze premières années de sa vie6.
229. Autorité parentale. En revanche les parents de naissance perdent leurs droits d’autorité
parentale, sauf dans l’hypothèse de l’adoption de l’enfant du conjoint.
1. Les extraits d’acte de naissance avec filiation mentionnent, outre les parents d’origine, les parents adoptifs et font référence
au jugement d’adoption : Décret du 6 mai 2017 préc., art. 37 al. 2. Adoption simple à titre posthume : cf. Montpellier, 2 août
2017, n° 17/00782, Dr. fam. 2017, n° 12, comm. 242 H. Fulchiron.
2. C. civ., art. 364.
3. Cf. infra n° 272.
4. Une contribution partielle est possible : Civ. 1re, 14 avril 2010, n° 09-12456.
5. C. civ., art. 207.
6. CASF, art. L. 132-6.
198
230. Nouveaux droits et obligations. L’adoption simple crée un nouveau lien de filiation entre
l’adopté et l’adoptant. Par conséquent, le nom de famille de l’adoptant est en principe adjoint
à celui de l’adopté1 et les empêchements à mariage s’appliquent au sein de la nouvelle
famille2. L’adopté doit des aliments à l’adoptant s’il est dans le besoin et, réciproquement,
l’adoptant doit des aliments à l’adopté3. L’adopté et ses descendants ont en outre, dans
la nouvelle famille, les mêmes droits successoraux qu’un enfant issu d’une filiation par
procréation4, mais l’adopté n’a pas la qualité d’héritier réservataire dans la succession des
ascendants de l’adoptant.
199
231. Autorité parentale. L’adoptant est en principe investi à l’égard de l’adopté de tous les
droits d’autorité parentale.
Il existe toutefois une exception concernant l’adoption de l’enfant du conjoint. En effet,
dans cette hypothèse, le parent biologique et l’adoptant sont tous les deux titulaires
de l’autorité parentale. Le parent biologique conserve cependant seul l’exercice, sauf
déclaration conjointe adressée au directeur des services de greffe judiciaires du tribunal
judiciaire aux fins d’un exercice en commun1. Cette exception ne concerne que l’adoption
de l’enfant du conjoint. La Cour de cassation refuse par conséquent l’adoption de l’enfant
par le (la) concubin(e) ou le (la) partenaire de la mère ou du père car celle-ci entrainerait
le transfert des droits d’autorité parentale à l’adoptant et priverait le parent biologique,
qui entend pourtant continuer à élever l’enfant, de ses propres droits2.
232. Révocabilité. La loi 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant3 a modifié l’article 370
du Code civil sur la révocabilité de l’adoption simple, qui dispose désormais que s’il est
justifié de motifs graves, l’adoption peut être révoquée, lorsque l’adopté est majeur, à la
demande de ce dernier ou de l’adoptant. Lorsque l’adopté est mineur, la révocation de
l’adoption ne peut en revanche être demandée que par le ministère public4.
200
201
Perte des droits d’autorité parentale Principe : l’adoptant est investi à l’égard
sauf adoption de l’enfant du conjoint. de l’adopté de tous les droits d’autorité
parentale.
Exception pour l’adoption de l’enfant
Autorité du conjoint : le parent biologique
parentale et son conjoint sont tous les deux
titulaires de l’autorité parentale mais
le parent biologique en conserve seul
l’exercice sauf déclaration conjointe
en vue d’un exercice en commun.
202
233. L’adoption est dite internationale lorsqu’il existe un élément d’extranéité. Il peut s’agir
de l’adoption, en France ou à l’étranger, d’un enfant étranger par un Français, de l’adoption
d’un Français par un étranger ou encore de l’adoption d’un étranger par un étranger en
France. Le cas qui pose le plus souvent question en France est celui d’une personne française
souhaitant adopter un enfant étranger.
Il ne s’agit ici que d’une présentation sommaire. L’adoption internationale soulève des
questions complexes relevant du Droit international privé. Quelle est la juridiction compétente
pour prononcer une telle adoption ? Quelle est la loi applicable ? Une adoption prononcée
à l’étranger est-elle reconnue en France ?
Textes applicables :
■ Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération
en matière internationale1.
■ C.civ., art. 370-3 s.
Conditions :
■ C. civ., art. 370-3 : les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de l’adoptant.
Si les adoptants sont deux époux, il s’agit de la loi qui régit les effets du mariage, c’est-
à‑dire la loi nationale commune ou la loi du domicile commun2.
■ Mais :
– L’agrément est nécessaire pour l’adoption d’un enfant étranger. Il n’y a toutefois
pas d’accueil préalable de l’enfant.
– En outre, quelle que soit la loi applicable, l’adoption requiert le consentement
libre et éclairé du représentant légal de l’adopté. Les conditions liées au consen-
tement de l’adopté et à sa représentation sont soumises à sa loi nationale.
– La question de l’adoptabilité de l’enfant relève enfin nécessairement de la loi
nationale de celui-ci. Il est donc impossible de prononcer l’adoption du mineur
étranger si la loi nationale de l’enfant la prohibe3 sauf s’il est né et réside habituel-
lement en France4.
1. Ratifiée par la France le 30 juin 1998 et entrée en vigueur en France le 1er octobre 1998, J.O. 13 sept. 1998.
2. Si l’adoptant est français, c’est donc la loi française qui s’applique. Si les adoptants sont étrangers et si la loi nationale des
deux époux interdit l’adoption, celle-ci ne peut être prononcée. L’adoption en France d’un enfant, français ou étranger, par
des parents marocains est par exemple impossible.
3. Cette impossibilité ne s’applique pas aux majeurs.
4. Cet enfant a vocation à devenir français (C. civ., art. 21-7).
203
204
Article 371-2
Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses
ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant.
Cette obligation ne cesse de plein droit ni lorsque l’autorité parentale ou son exercice est
retiré, ni lorsque l’enfant est majeur.
Il convient d’apporter des précisions concernant les débiteurs de cette obligation (§1), mais
aussi son objet (§2), sa durée (§3) et son exécution (§4), avant de la comparer à l’obligation
alimentaire, avec laquelle elle est parfois confondue (§5).
1. L’attribution de la nationalité, qui découle directement de la filiation avec un Français (cf. C. civ., art. 18 et 18-1), relève quant
à elle d’un cours ou d’ouvrages spécifiques.
205
235. Obligation parentale. Les débiteurs de l’obligation d’entretien sont les parents, peu importe
qu’ils soient mariés ou non, qu’ils vivent ensemble ou séparément1. L’obligation est en effet
directement liée à la parenté ; le retrait de l’autorité parentale n’y met pas fin et la faute
de l’enfant créancier ne peut dispenser le débiteur de son obligation.
Elle ne concerne que les parents et pas les autres ascendants. C’est l’obligation alimentaire
des grands-parents qui prend le relais en cas de décès des parents ou de manière subsidiaire
si les parents ne sont pas totalement en mesure d’assurer leur obligation.
L’obligation d’entretien est enfin unilatérale, autrement dit elle ne concerne que les parents
envers leurs enfants.
236. « Nourrir, entretenir et élever ». L’objet de l’obligation d’entretien est plus large que
celui d’une simple obligation alimentaire. Son contenu est souvent décrit par référence à
l’article 203 du Code civil, qui concerne formellement les époux mais peut en réalité être
étendu à tous les parents puisque l’article 371-2, lui, ne distingue pas. Selon l’article 203, les
époux contractent ensemble l’obligation de « nourrir, entretenir et élever » leurs enfants.
« Nourrir » l’enfant fait référence à la fourniture d’aliments à proprement parler. L’« entre-
tenir » implique plus largement la fourniture des conditions matérielles (vêtements,
logement…). « Élever » l’enfant consiste enfin à permettre son développement et assurer
son éducation. On parle d’ailleurs, en particulier en cas de séparation, de contribution à
l’entretien et à l’éducation de l’enfant.
237. Durée limitée. L’obligation d’entretien a une durée limitée puisqu’elle n’a pas vocation
à durer toute la vie de l’enfant créancier. Elle ne cesse pour autant pas de plein droit à la
majorité de ce dernier et persiste au-delà, sauf pour le débiteur à démontrer que l’enfant
n’est plus dans le besoin ou du moins qu’il peut subvenir seul à ses besoins. L’enfant majeur
peut d’ailleurs agir lui-même pour réclamer le versement d’une contribution à son entretien
et son éducation, qui peut perdurer pendant la période des études et de recherche d’emploi,
mais pas davantage en principe.
1. Lorsque les parents sont mariés, les dépenses liées à l’obligation d’entretien entrent dans les charges du mariage (C. civ.,
art. 214). Cf. supra n° 65.
206
238. Forme. L’obligation d’entretien s’exécute en principe en nature. Mais en cas de séparation
ou lorsque enfant majeur ne vit plus avec ses parents, l’article 373-2-2 prévoit que la contri-
bution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant prend la forme d’une pension alimentaire
dont le montant est déterminé en fonction des ressources des deux parents et des besoins
de l’enfant1. Ce montant varie en fonction du nombre d’enfants et de l’amplitude du droit
de visite et d’hébergement. Le ministère de la justice a mis en place un barème des pensions
alimentaires, qui est un outil simplement indicatif pour le juge. Un « simulateur » de pension
alimentaire est même à disposition des parents sur le site du ministère2.
Le débiteur peut toutefois demander à exécuter son obligation par la prise en charge directe
d’une dépense d’entretien, comme les frais de scolarité. La pension alimentaire peut aussi
prendre la forme d’un droit d’usage et d’habitation par la fourniture d’un logement.
Si la consistance des biens du débiteur le permet, elle peut être remplacée, partiellement
ou totalement, par un capital, qui pourra prendre la forme du versement d’une somme
d’argent3, d’un usufruit ou de l’affectation de biens productifs de revenus.
239. Révision. La révision de la pension alimentaire est possible en fonction de l’évolution
des besoins de l’enfant et des ressources des parents, même si elle a été fixée dans une
convention homologuée par le juge ou encore dans une convention de divorce par consen-
tement mutuel prenant la forme d’un acte sous signature privée contresigné par avocats
déposé au rang des minutes d’un notaire4.
240. Inexécution. En cas d’inexécution volontaire ou de désaccord sur la mise en œuvre de l’obli-
gation d’entretien, il est possible d’engager une action devant le juge aux affaires familiales
qui fixera les modalités d’exécution. Le fait, pour le débiteur de l’obligation d’entretien, de
ne pas exécuter la décision judiciaire ou le titre5 lui imposant de verser une contribution
à l’entretien et à l’éducation de l’enfant, en demeurant plus de deux mois sans s’acquitter
1. La pension alimentaire est indexée sur l’indice des prix à la consommation. Sur l’intermédiation de l’organisme débiteur des
prestations familiales, cf. C. civ., art. 373-2-2, II ; D. Everaert-Dumont, « Le nouveau service public de versement des pensions
alimentaires », Dr. fam., 2020, n° 6, Étude n° 20.
2. http://www.justice.fr/simulateurs/pensions/bareme
3. La somme sera versée entre les mains d’un organisme accrédité chargé d’accorder en contrepartie à l’enfant une rente
indexée. C. civ., art. 373-2-3.
4. C. civ., art. 373-2-13.
5. C. civ., art. 373-2-2, I, 2° au 5°.
207
241. L’obligation d’entretien a un certain nombre de points communs avec l’obligation alimen-
taire mais doit en être distinguée sur certains points. Les débiteurs de l’obligation alimen-
taire sont plus nombreux et sa durée plus longue, tandis que son objet est plus réduit et
la temporalité de son exécution différente.
242. Débiteurs. L’obligation alimentaire est fondée sur la parenté, mais aussi sur l’alliance et
plus généralement l’idée de solidarité familiale. L’article 205 du Code civil prévoit ainsi que
les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans
le besoin. L’article 206 fait quant à lui peser une obligation alimentaire sur les gendres et
belles-filles à l’égard de leurs beaux-parents5. Contrairement à l’obligation d’entretien,
cette obligation alimentaire est réciproque6 et la faute du créancier indigne peut décharger
le débiteur7.
208
243. Objet. Les aliments recouvrent ce qui est indispensable à assurer la subsistance, comme
la nourriture, le logement, les vêtements et les frais médicaux. Le contenu de l’obligation
alimentaire est donc plus réduit que celui de l’obligation d’entretien, laquelle couvre mais
dépasse l’obligation alimentaire.
contraire du juge. En outre, le retrait de l’autorité parentale emporte, pour l’enfant, dispense de l’obligation alimentaire, par
dérogation aux articles 205 à 207, sauf disposition contraire dans le jugement de retrait (C. civ., art. 379 al. 2).
209
1. À l’exception des frais funéraires, qui, lorsque la succession ne peut les prendre en charge, sont assumés par l’enfant même
s’il a renoncé à la succession de son parent, en fonction de ses ressources (et réciproquement).
2. Mais une autre obligation alimentaire peut prendre le relai.
3. C. civ., art. 208.
4. Cf. supra n° 240.
5. Les époux sont également tenus l’un à l’égard de l’autre d’un devoir de secours, qui est une obligation alimentaire. Cf. supra
n° 63.
210
247. Évolution. Le Code civil de 1804 réservait la « puissance paternelle » au mari. La loi du 4 juin
19701 a remplacé la puissance paternelle par l’autorité parentale en la confiant en principe
aux deux parents, du moins lorsqu’ils étaient mariés. L’exercice conjoint de l’autorité
parentale a ensuite progressivement été généralisé. La loi dite Malhuret du 22 juillet 19872
a complété la loi de 1970 et supprimé le terme de « garde ». La loi du 8 janvier 19933 a donné
compétence au juge aux affaires familiales pour tout ce qui concerne l’autorité parentale
et consacré le principe d’égalité des parents en la matière. L’égalité a été achevée par
la loi du 4 mars 20024, qui a procédé à un remaniement assez profond du Code civil en
supprimant toute distinction entre enfant légitime et enfant naturel dans le domaine de
l’autorité parentale. La loi du 9 Juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement
aux femmes, aux violences au sein du couple, et aux incidences de ces dernières sur les
enfants5 a créé l’ordonnance de protection du juge aux affaires familiales et contient des
211
249. Parents. La titularité de l’autorité parentale est une conséquence directe de l’établissement
de la filiation. Si le lien de filiation est établi à l’égard d’un seul parent, lui seul est titulaire
de l’autorité parentale. Si le lien de filiation est établi à l’égard des deux parents, ils en sont
tous deux titulaires. Si l’un d’eux décède, l’autre reste seul titulaire.
En revanche, si la filiation de l’enfant n’est établie à l’égard d’aucun des deux parents, ou
s’ils sont tous les deux décédés, la prise en charge de l’enfant relève du régime de la tutelle4.
1. L. n° 2013-404 du 17 mai 2013. C. civ., art. 6-1 issu de la loi du 17 mai 2013 : « Le mariage et la filiation adoptive emportent les
mêmes effets, droits et obligations reconnus par les lois, à l’exclusion de ceux prévus au titre VII du livre 1er du présent code
[filiation charnelle], que les époux ou les parents soient de sexe différent ou de même sexe ». Technique de « l’article balai »,
qui évite de remplacer, dans toutes les dispositions intéressées les termes « pères et mères » par les termes « parents »,
notamment pour l’autorité parentale. L’autorité parentale est un effet de la filiation adoptive pour les parents de même
sexe : deux parents de même sexe peuvent être titulaires et exercer l’autorité parentale. Il faut donc lire « parents » au lieu
de « père et mère ».
2. L. n° 2019-1480 du 28 déc. 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille et L. n° 2020-936 du 30 juill. 2020 visant
à protéger les victimes de violence.
3. C. civ., art. 371-1.
4. La tutelle des mineurs relève du programme de droit des personnes et mérite d’être comparée à la tutelle des majeurs
concernant les biens. Elle n’est donc pas étudiée dans cet ouvrage.
212
Celui auquel l’autorité parentale est retirée n’en est plus titulaire2. A fortiori il ne l’exerce
plus. Les liens sont rompus dans l’intérêt de l’enfant. Il s’agit d’une mesure emportant de
graves conséquences et qui est donc soumise à de strictes conditions.
251. Conditions. Les conditions du retrait varient en fonction de la juridiction qui le prononce.
Le retrait peut être prononcé par une juridiction pénale à l’encontre des parents condamnés
comme auteurs, coauteurs ou complices d’un crime ou d’un délit commis sur leur enfant
mineur, par leur enfant mineur ou sur la personne de l’autre parent3. Le juge civil prononcera
quant à lui le retrait soit dans l’hypothèse d’une mise en danger manifeste de l’enfant, soit
en cas d’abandon4. La mise en danger de la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant par
les parents peut résulter soit de mauvais traitements, soit d’une consommation habituelle
et excessive d’alcool ou de l’usage de stupéfiant, soit d’un défaut de soins ou d’un manque
de direction, soit de leur inconduite notoire ou comportement délictueux, notamment
lorsque l’enfant est témoin de pressions ou violences exercées par l’un des parents sur
l’autre. L’abandon résulte quant à lui de l’abstention pendant plus de deux ans, par les
parents, d’exercer et accomplir leurs devoirs suite à une mesure d’assistance éducative5.
252. Effets. Les effets du retrait sont variables. Le principe est le retrait total6, qui s’étend à tous
les enfants mineurs nés au moment du jugement. Le ou les parents concerné(s) perd(ent)
alors tous les attributs de l’autorité parentale7. Le juge peut toutefois prononcer un retrait
213
1. L’exercice en commun
Il convient de voir dans quels cas l’exercice de l’autorité parentale est dévolu aux deux
parents avant d’expliquer selon quelles modalités elle est ainsi exercée.
253. Dévolution. L’article 372 alinéa 1er du Code civil pose le principe selon lequel « les père et
mère exercent en commun l’autorité parentale ». L’exercice conjoint est donc le principe,
que les parents soient mariés ou non, ensemble ou séparés. Il n’existe plus, depuis la
loi du 4 mars 2002, aucune différence en fonction de la nature de la filiation. Il résulte
néanmoins de l’alinéa 2 du même article que cette règle doit être précisée. Les parents
exercent en commun l’autorité parentale si la filiation est établie à l’égard de l’un et de
l’autre au plus tard un an après la naissance de l’enfant. Dans l’hypothèse où la filiation
1. Cf. infra, n° 257, la possibilité désormais pour le juge de ne retirer que l’exercice de l’autorité parentale.
2. C. civ., art. 379-1.
3. C. civ., art. 381.
214
1. Dans cette hypothèse, le mariage des parents après la naissance de l’enfant n’emporte pas de plein droit exercice en commun
de l’autorité parentale : Civ. 1re, avis, 23 sept. 2020, n° 20-70002, Dr. fam., 2020, n° 12, comm. 161, V. EGEA.
2. Ces démarches supplémentaires visent notamment à s’assurer que le parent à l’égard duquel la filiation a été établie en
premier soit informé de l’établissement tardif de la filiation à l’égard de l’autre et à préserver l’intérêt de l’enfant. Civ. 1re, avis,
23 sept. 2020, n° 20-70002, préc. : La compétence du directeur des services du greffe judiciaire pour recevoir une déclaration
conjointe ne fait pas obstacle à celle du JAF qui, s’il est saisi sur le fondement de l’art. 372 al. 3 du C. civ., doit se prononcer
sur un exercice en commun de l’autorité parentale, même lorsque la demande est formée conjointement par les parents.
La saisine du JAF n’est donc pas exclusivement réservée aux hypothèses de désaccord parental.
3. C. civ., art. 372-2.
4. Cf. proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant, n° 371, adoptée par l’Assemblée nationale en
première lecture le 27 juin 2014 : « Constitue un acte important l’acte qui rompt avec le passé et engage l’avenir de l’enfant
ou qui touche à ses droits fondamentaux. » « Le changement de résidence de l’un des parents, dès lors qu’il modifie les
modalités de résidence de l’enfant ou le droit de visite de l’autre parent, et le changement d’établissement scolaire sont
des actes importants ».
5. Civ. 1re, 3 mars 2009, 05-17163.
6. Cf. aussi le tableau récapitulatif des actes usuels et des actes importants du Rapport J. LEONETTI, Intérêt de l’enfant, autorité
parentale et droits des tiers, La documentation française, 2009. L’établissement d’un passeport ou d’une carte nationale
d’identité est considéré, de manière contestée, comme un acte usuel et requiert la signature d’un seul parent. Néanmoins,
l’article 373-2-6 al. 3 du Code civil prévoit que le juge aux affaires familiales peut ordonner l’interdiction de sortie du terri-
toire français sans l’autorisation des deux parents. Cette interdiction est inscrite au fichier des personnes recherchées par le
procureur de la République. L’article 371-6 prévoit également que l’enfant quittant le territoire national sans être accompagné
d’un titulaire de l’autorité parentale est muni d’une autorisation de sortie du territoire signée d’un titulaire de l’autorité
parentale. La rédaction de cet article issu de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le
terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale pose question en ce qu’il
permettrait au parent titulaire mais non exerçant d’autoriser la sortie sans l’accord de l’autre parent.
215
1. C. civ., art. 373-2-7. Le juge homologue la convention sauf s’il constate qu’elle ne préserve pas suffisamment l’intérêt de
l’enfant ou que le consentement des parents n’a pas été donné librement.
2. C.civ., art. 373-2-8. En cas de désaccord, le juge s’efforce de concilier les parties. À l’effet de faciliter la recherche par les parents
d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, il peut leur proposer une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur
accord, désigner un médiateur familial pour y procéder (C. civ., art. 373-2-10).
3. Ce droit de visite, lorsque l’intérêt de l’enfant le commande, peut, par décision spécialement motivée, être exercé dans un
espace de rencontre désigné par le juge (C. civ., art. 372-2-9 al. 3).
4. C. civ., art. 373-2-2. Cf. supra n° 238.
216
2. L’exercice unilatéral
Par exception, l’autorité parentale est exercée par un seul parent dans certaines hypothèses
qu’il convient de décrire avant d’étudier les modalités de cet exercice unilatéral.
255. Dévolution. Il a déjà été dit que l’exercice de l’autorité parentale est unilatéral dès l’origine
lorsque, selon l’article 372 al. 2, la filiation est établie à l’égard de l’un des parents plus
d’un an après la naissance ou lorsque la filiation a été judiciairement déclarée à l’égard
du second parent, en l’absence de déclaration conjointe ou décision du JAF en faveur d’un
exercice en commun.
En outre, le parent hors d’état de manifester sa volonté, en raison de son incapacité, de
son absence ou de toute autre cause perd l’exercice de l’autorité parentale1. L’autre l’exerce
donc seul de plein droit dans ces hypothèses.
Le décès de l’un des parents entraîne également l’exercice unilatéral par l’autre. Si les deux
parents exerçaient jusque-là l’autorité parentale, le survivant l’exerce seul à compter du
décès. Si le parent décédé l’exerçait seul, l’autre recouvre automatiquement l’exercice.
Or, en principe, si l’exercice était unilatéral, c’est que l’intérêt de l’enfant commandait
qu’il en soit ainsi. Le JAF peut donc décider de confier l’enfant à un tiers, qui accomplira
les actes usuels, si « des circonstances particulières l’exigent ». Il peut aussi charger le tiers
de requérir l’ouverture d’une tutelle.
217
257. L’objectif de lutte contre les violences familiales, renforcé récemment, a conduit le légis-
lateur à modifier et compléter le dispositif existant en matière d’autorité parentale, quitte
à brouiller un peu les lignes traditionnelles, notamment entre titularité et exercice de
l’autorité parentale.
La loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille4 a ainsi
complété les dispositions relatives au retrait de l’autorité parentale5 en ajoutant la possi-
bilité pour le juge de retirer son exercice.
Elle a également introduit un nouvel article 378-2 dans le Code civil, qui prévoit la suspension
de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement
du parent poursuivi ou condamné, même non définitivement, pour un crime commis sur
la personne de l’autre parent jusqu’à la décision du juge et pour une durée maximale de six
mois, à charge pour le procureur de la République de saisir le juge aux affaires familiales
dans un délai de huit jours.
B. L’exercice délégué
La délégation d’autorité parentale est prévue aux articles 377 et 377-1 du Code civil. Elle est
prononcée par le JAF à certaines conditions et produit des effets plus ou moins importants.
218
1. L’accord des deux parents est nécessaire s’ils exercent tous les deux l’autorité parentale. Si un seul l’exerce, lui seul est apte
à déléguer l’exercice de son autorité. Mais dans ce cas il doit informer l’autre parent puisqu’il s’agit d’un choix important
relatif à la vie de l’enfant.
2. La loi du 14 mars 2016, préc., a en effet ajouté le ministère public (C. civ. art. 377 al. 3) avec l’accord du tiers candidat à la
délégation. Le ministère public peut être informé par transmission de la copie du dossier par le juge des enfants ou avis de
ce dernier. Sont ainsi concernés les enfants placés (cf. mesures d’assistances éducatives prononcées par le juge des enfants
en cas de danger, C. civ., art. 375 s.). Les parents restent titulaires de l’autorité parentale et des prérogatives compatibles
avec la mesure.
3. C. civ., art. 377 nouveau.
4. Sur les conditions et les effets de la déclaration judiciaire de délaissement parental cf. infra n° 221.
5. C. civ., art. 377-3.
6. Loi n° 2002-305 du 4 mars 2002, art. 7.
219
260. Lien avec la filiation. La dévolution du nom de famille relève traditionnellement du cours
de Droit des personnes. Elle constitue néanmoins un corollaire de la filiation puisqu’elle
en découle directement. Les règles qui gouvernent la dévolution du nom sont d’ailleurs
intégrées aux dispositions générales relatives à la filiation dans le Code civil. Elles ont fait
l’objet de réformes d’ampleur et complexes.
261. Égalité, liberté et complexité. Avant le 1er janvier 2005, l’enfant légitime portait le nom
du père alors que l’enfant naturel portait le nom de celui à l’égard duquel la filiation était
établie en premier5.
La réforme issue des lois du 4 mars 2002 et 18 juin 20036, entrée en vigueur le 1er janvier
2005, a bouleversé le dispositif de dévolution du nom. Elle a été guidée par l’idée d’égalité
des sexes, c’est-à‑dire entre le père et de la mère ; la suppression du terme « patronyme » et
la possibilité du « double-nom » en sont les symboles ; mais également par l’égalité entre
1. Cf. concernant les droits des tiers indépendamment de l’hypothèse d’une délégation, C. civ., art. 371-4 : « L’enfant a le droit
d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de ce droit.
Si tel est l’intérêt de l’enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l’enfant et un tiers, parent
ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l’un de ses parents, a pourvu à son éducation, à
son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables ».
2. Civ. 1re, 24 févr. 2006, n°04-17090.
3. Civ. 1re, 8 juill. 2010, n° 09-12623. Sur l’accord nécessaire du parent, cf. Civ. 1re, 31 mars 2021, n° 19-19275.
4. C. civ., art. 377-2. Caen, 10 mars 2016, n° 15/01208, Dr. fam. 2016, n° 5, comm. 108 H. Fulchiron : « Dès lors, et au regard de
la circonstance nouvelle que constitue la séparation entre la compagne et la mère biologique, seule titulaire de l’autorité
parentale et dont l’accord est nécessaire pour maintenir la délégation, il ne peut qu’être mis fin à cette dernière […] ».
5. Donc souvent la mère. L’enfant naturel portait le nom du père en cas d’établissement simultané de la filiation.
6. L. n° 2002-304, J.O. 5 mars 2002 et L. n° 2033-516, J.O. 19 juin 2003.
220
§1. Le nom de l’enfant dont la filiation est établie à l’égard des deux parents
Article 311-21
221
262. Deux hypothèses. L’article 311-21 vise la situation dans laquelle la filiation d’un enfant est
établie à l’égard de ses deux parents au plus tard le jour de la déclaration de la naissance
ou par la suite mais simultanément. Deux hypothèses sont donc à distinguer.
La première, et de loin la plus courante, est celle dans laquelle la filiation est établie à l’égard
des deux parents au plus tard le jour de la déclaration de naissance. Il peut s’agir, par exemple,
de l’enfant né de parents mariés et dont la filiation est établie automatiquement à l’égard
de la mère par la mention du nom de cette dernière dans l’acte de naissance et à l’égard
du père par le jeu de la présomption de paternité. Il peut également s’agir de l’enfant, né
de parents non mariés, dont le nom de la mère est inscrit dans l’acte de naissance et dont
la filiation est établie à l’égard du père par une reconnaissance faite avant ou au plus tard
le jour de la déclaration de naissance.
La seconde hypothèse est celle dans laquelle la filiation est établie « par la suite », c’est-à-
dire après la déclaration de naissance, mais simultanément à l’égard des deux parents. Il
s’agit d’une hypothèse résiduelle puisque, depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance du
4 juillet 2005 ayant réformé la filiation, la mère n’a plus besoin de reconnaître l’enfant pour
établir la filiation maternelle. Il faut donc imaginer la situation dans laquelle la mère n’est
pas désignée dans l’acte de naissance en raison d’un accouchement sous X, d’une omission
accidentelle, ou encore d’une supposition ou substitution d’enfant, mais reconnaît l’enfant
après la déclaration de naissance et conjointement avec le père.
263. Modalités de choix. Lorsque la filiation est établie comme indiqué ci-dessus, le principe est
le choix de nom. Les parents peuvent en effet attribuer à l’enfant soit le nom du père, soit
le nom de la mère, soit les deux noms accolés dans l’ordre qu’ils choisissent. Ils procèdent
à ce choix en remplissant une déclaration conjointe de choix de nom auprès de l’officier
d’état civil, lors de la déclaration de naissance.
264. Nom double et nom composé. L’enfant né après le 1er janvier 20051 peut donc porter un
double nom, qu’il convient de distinguer du nom composé. Le nom composé comporte un
ou plusieurs vocables et est transmissible uniquement dans son intégralité. Il constitue
1. La loi du 4 mars 2002 n’est pas applicable aux enfants nés avant la date de son entrée en vigueur. Toutefois, dans le délai de
dix-huit mois suivant cette date, soit jusqu’au 30 juin 2006, les parents exerçant l’autorité parentale pouvaient demander
par déclaration conjointe à l’officier d’état civil, au bénéfice de l’ainé des enfants communs lorsque celui-ci avait moins de
222
treize ans au 1er sept. 2003 ou à la date de la déclaration (l’enfant devait donc être né après le 1er sept. 1990), l’adjonction en
deuxième position du nom du parent qui ne lui avait pas transmis. Le nom ainsi dévolu valait pour l’ensemble des enfants
communs, nés et à naître (L. n° 2002-304, 4 mars 2002, art. 23). Sur la différence de traitement des enfants nés avant l’entrée
en vigueur des lois de 2002 et 2003 et ayant plus de treize ans au 1er sept. 2003, cf. CEDH, 27 août 2013, n° 38275/10, De Ram
c/ France (absence de violation des art. 8 et 14 Conv. EDH).
1. La division étant obligatoire ou facultative en fonction des cas, Cf. infra n° 265.
2. CE, 4 déc. 2009, n° 315818, Dr. fam. 2010, Repère 2, obs. P. Murat ; RTD civ. 2010, p. 295, obs. J. Hauser.
3. Sur la période se situant entre la décision du Conseil d’État et la nouvelle circulaire, et sur les possibilités de rectifications des
doubles noms comportant un double tiret, cf. C. Petit, « Nouvelles modalités d’indication des “doubles noms” dans les actes
d’état civil. Égalité, liberté et … complexité », Dr. fam. 2012, Étude, p. 13. L’officier de l’état civil peut supprimer le double-tiret
lorsque l’intéressé en fait la demande.
223
Signatures
du père de la mère
Avertissement : En application de l’article 441-7 du Code pénal est puni d’un an d’emprison-
nement et de 15 000 € d’amende le fait :
1° d’établir une attestation ou un certificat faisant état de faits matériellement inexacts ;
2° de falsifier une attestation ou un certificat originairement sincère ;
3° de faire usage d’une attestation ou d’un certificat inexact ou falsifié.
Les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende lorsque
l’infraction est commise en vue de porter préjudice au Trésor public ou au patrimoine d’autrui.
_______________________________________________________________
(1) Ne remplir cette rubrique qu’en présence d’un double nom, c’est-à‑dire d’un nom dévolu en application de la loi du 4 mars
2002 relative au nom de famille, uniquement pour les personnes nées après le 1er septembre 1990 ayant bénéficié d’une
déclaration conjointe d’adjonction ou de changement de nom. Les parents qui portent un nom composé indivisible n’ont
pas à remplir cette rubrique, ce nom étant intégralement transmissible à la génération suivante.
1. Extrait de la circ. du 25 oct. 2011 relative à la modification des modalités d’indication des « doubles noms » issus de la loi
n° 2002-304 du 4 mars 2002 dans les actes de l’état civil : suppression du double tiret (NOR : JUSC1028448C).
224
1. Cette règle ne concerne toutefois que les hypothèses dans lesquelles les parents ont été en mesure de faire un choix de nom
pour le premier enfant (« Lorsqu’il a déjà été fait application du présent article, du deuxième alinéa de l’article 311-23 ou de
l’article 357 à l’égard d’un enfant commun ») et ne permet en réalité pas toujours d’éviter la pluralité de noms au sein de la
fratrie. Cf. C. Petit, « Difficultés d’application de la législation relative au nom de famille : appel au législateur », préc. et CA
Versailles, 31 janv. 2013, LPA 2014, n° 155, p. 10, chron. F. Dekeuwer-Defossez.
2. C. civ., art. 311-21 al. 1er : « dans la limite d’un nom de famille pour chacun d’eux ».
3. C. civ., art. 311-21 al. 4 : « Lorsque les parents ou l’un d’entre eux portent un double nom de famille, ils peuvent, par une
déclaration écrite conjointe, ne transmettre qu’un seul nom à leurs enfants ».
225
Exemple
Louis est né le 19 mars 2018. Ses parents, Elodie MARTIN et Marc DURAND, ne sont pas
mariés et n’ont pas fait de déclaration conjointe. Il a été reconnu par son père le 4 janvier 2018.
En l’absence de reconnaissance maternelle, il s’appelle Louis DURAND.
S’il a été reconnu par sa mère le 10 décembre 2017, il s’appelle Louis MARTIN.
226
267. Seconde règle subsidiaire : désaccord parental signalé. L’article 311-21 prévoit l’hypothèse
particulière dans laquelle l’un des parents n’ayant pas fait de déclaration conjointe de
choix de nom signale le désaccord parental à l’officier de l’état civil, au plus tard le jour de
la déclaration de naissance ou après la naissance, lors de l’établissement simultané de la
filiation. Une deuxième règle subsidiaire est prévue dans ce cas : l’enfant prend les noms
de ses deux parents, dans la limite du premier nom de famille pour chacun d’eux, accolés
selon l’ordre alphabétique. L’égalité entre le nom du père et celui de la mère est ici rétablie.
Cette nouvelle règle subsidiaire, venant ajouter de la complexité à la complexité, est issue
de la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage, et par conséquent l’adoption, aux couples de
personnes de même sexe. En effet, l’adoption conférant le nom de l’adoptant à l’adopté2,
la règle subsidiaire en vigueur depuis 2005 posait difficulté en cas d’adoption d’un enfant
par deux hommes ou deux femmes. La règle du double nom dans l’ordre alphabétique a
donc été consacrée pour les enfants adoptés3. Pour les autres enfants et dans l’objectif de ne
pas créer de rupture d’égalité, l’article 311-21 a été modifié « par ricochet » mais en limitant,
pour « sauver » le nom du père, l’application du double nom dans l’ordre alphabétique aux
hypothèses de désaccord signalé4.
Statistiques5
Si le principe est l’égalité entre le nom de la mère et le nom du père depuis 2005, le nom du
père est toujours très majoritaire en pratique.
Près de 85 % des enfants nés en 2015 ont reçu le nom du père. C’est le cas pour près de 95 %
des naissances en mariage et environ de 75 % des autres.
5 % environ seulement des enfants ne reçoivent que le nom de la mère qui n’est alors dans
l’immense majorité des cas pas mariée.
Enfin, environ 10 % des enfants reçoivent les deux noms.
Le subsidiaire et la tradition l’emportent donc sur le principe et l’esprit de la loi.
1. Sur l’impossibilité pour le juge d’adjoindre les deux noms, quand bien même l’absence de déclaration conjointe proviendrait
du décès du père, cf. Civ. 1re, 7 mai 2010, n° 09-10.997. Cf. aussi l’utilisation de la procédure administrative de changement
volontaire de nom : CE, 12 déc. 2012, n° 357865.
2. Par substitution dans l’adoption plénière et en principe par adjonction dans l’adoption simple, Cf. infra nos 271 et 272.
3. C. civ., art. 357 al. 4 et 363 al 3.
4. Sur cette réforme, cf. C. Petit, « Modification des règles relatives au nom de famille des enfants : égalité, liberté et complexité
(suite) », RLDC 2013, 5162. Cf. également le modèle indicatif de déclaration de désaccord proposé par la circulaire du 29 mai
2013 de présentation de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe (dispositions du Code civil), NOR :
JUSC1312445C.
5. INSEE, statistiques état civil sur les naissances en 2015, https://www.insee.fr/fr/statistiques. Les chiffres sont relativement
stables : près de 82 % des enfants nés en 2019 portent le nom du père (« Origine du nom de famille des nés vivants selon la
situation matrimoniale des parents », année 2019, www.insee.fr/fr/statistiques).
227
§2. Le nom de l’enfant dont la filiation est établie à l’égard d’un seul parent
Article 311-23
268. Nom du parent. Les enfants dont la filiation n’est établie qu’à l’égard de l’un des parents
prennent le nom de ce parent.
269. Changement de nom. Toutefois, il est possible pour les parents, s’ils sont d’accord, de faire
une déclaration de changement de nom devant l’officier d’état civil, lors de l’établissement
du second lien de filiation et pendant toute la minorité de l’enfant, afin de substituer le
nom du second parent ou accoler les deux noms, avec le consentement de l’enfant de
plus de treize ans1. Là encore, la déclaration ne peut néanmoins avoir d’autre effet que de
donner le nom précédemment dévolu ou choisi au premier enfant commun. Il s’agit ici d’un
changement de nom lié au changement d’état, à ne pas confondre avec le changement
volontaire de nom résultant d’une procédure administrative2.
1. Depuis le 18 janvier 2009, les enfants nés avant 2005 bénéficient de cette possibilité (mais la déclaration conjointe ne peut
avoir pour objet qu’une adjonction).
2. C. civ. art. 61.
228
270. Attribution administrative. Lorsque la filiation de l’enfant n’est pas établie à sa naissance,
par exemple dans les hypothèses d’enfants trouvés ou d’accouchement sous X, l’article 57
alinéa 2 du Code civil met en place une attribution administrative de nom : « […] La femme
qui a demandé le secret de son identité lors de l’accouchement peut faire connaître les
prénoms qu’elle souhaite voir attribuer à l’enfant. À défaut ou lorsque les parents de celui-ci
ne sont pas connus, l’officier de l’état civil choisit trois prénoms dont le dernier tient lieu
de nom de famille à l’enfant […] ».
271. Adoption plénière. L’adoption plénière confère à l’enfant adopté le nom de l’adoptant,
selon l’article 357 du Code civil. Lorsqu’il s’agit de l’adoption de l’enfant du conjoint ou de
l’adoption par deux époux, les adoptants procèdent à un choix de nom par déclaration
conjointe, jointe à la requête en adoption, en respectant les limites habituelles1. En
l’absence de déclaration conjointe, l’enfant prend le nom de l’adoptant et de son conjoint
ou les noms des deux adoptants dans l’ordre alphabétique, selon la règle modifiée par la
loi du 17 mai 2013 pour l’adapter à l’hypothèse où l’enfant est adopté par deux hommes
ou par deux femmes.
272. Adoption simple. L’adoption simple confère le nom de l’adoptant à l’adopté en l’ajoutant
au nom de ce dernier2. Mais cette adjonction, prévue à l’article 363 du Code civil, peut
s’avérer complexe lorsque l’adopté et/ou l’adoptant porte(nt) un nom double et en cas
d’adoption par deux époux.
Dans la première hypothèse, « le nom conféré à l’adopté résulte de l’adjonction du nom
de l’adoptant à son propre nom, dans la limite d’un seul nom pour chacun d’eux. Le choix
du nom adjoint ainsi que l’ordre des deux noms appartient à l’adoptant, qui doit recueillir
le consentement personnel de l’adopté âgé de plus de treize ans. En cas de désaccord ou à
défaut de choix, le nom conféré à l’adopté résulte de l’adjonction en seconde position du
premier nom de l’adoptant au premier nom de l’adopté »3.
Dans la seconde hypothèse, « le nom ajouté à celui de l’adopté est, à la demande des époux
adoptants, celui de l’un d’eux, dans la limite d’un nom. Si l’adopté porte un double nom de
famille, le choix du nom conservé et l’ordre des noms adjoints appartient aux adoptants,
qui doivent recueillir le consentement personnel de l’adopté âgé de plus de treize ans. En
1. Limite d’un nom de famille pour chacun des parents et unité du nom au sein de la fratrie, cf. supra n° 265.
2. Si l’adopté est majeur, il doit consentir à cette adjonction.
3. C. civ., art. 363 al. 2.
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231
232
233
Sommaire.....................................................................................................................................................................1
Principales abréviations.....................................................................................................................................3
Introduction...............................................................................................................................................................5
PR EMIÈR E PARTIE
Le lien de couple
CH A PITR E 1
L’union..............................................................................................................11
235
CH A PITR E 2
La désunion.................................................................................................... 58
236
CH A PITR E 1
La filiation......................................................................................................119
237
CH A PITR E 2
Les corollaires de la filiation....................................................................... 205
Index........................................................................................................................................................................... 231
238