Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Pour suivre la demande chinoise, qui va continuer à tirer le marché mondial à la hausse, elle
devra à présent davantage s’investir sur les réseaux sociaux locaux.
C’est ce que Louis Vuitton a bien compris en devenant à l’été 2019 la première marque de
luxe à s’associer avec Xiaohongshu (« petit livre rouge », en mandarin), la dernière sensation
des réseaux chinois. En mars 2020, la marque a même choisi d’utiliser cette plateforme pour
lancer sa nouvelle collection en y associant une blogueuse de mode et une célèbre
influenceuse chinoise. Résultat : 152 000 pages vues en une petite heure de streaming.
C’est sur ce type de stratégie que les acteurs français du luxe devront parier pour renouer
avec la croissance qui n’est cependant pas attendue avant 2022 ou 2023, dates auxquelles,
selon Bain and Co, les ventes de produits de luxe devraient à nouveau atteindre celles
enregistrées en 2019.
Les Douanes ont publié leur bilan sur les exportations en 2021 . Le secteur de la
beauté est dans le top 3 des industries qui contribuent le plus fortement au
commerce extérieur de la France. La beauté est devancée par le secteur
aéronautique (30,8 milliards d’euros) et la filière des vins et spiritueux (14,6
milliards d’euros). Au total, les exportations de produits de beauté ont rapporté
16,2 milliards d’euros à la France en 2021. Une performance particulièrement
forte qui souligne la bonne santé du secteur.
Dans le détail, c’est la parfumerie qui sert de locomotive pour les exportations de
produits de beauté made in France. A elle seule, elle pèse pour 30,6% des
exportations de produits de cosmétiques. C’est également la parfumerie qui
enregistre la meilleure progression en 2021. Elle a augmenté ses exportations de
35,4% par rapport à 2020.
Pour preuve, le repositionnement des grandes groupes tels que L’Oréal ou LVMH
sur la parfumerie premium et les soins de la peau ont porté leurs fruits depuis le
début de la crise sanitaire. Et les investissements autour de la
beautytech s’affirment déjà comme un levier de réussite pour les années à venir.
Les Etats-Unis sont le deuxième marché clé pour les exportations des produits de
beauté made in France. Avec 1,8 milliard d’euros et 11,2% des exportations de
produits de beauté, le marché américain capte une part non négligeable des ventes
internationales tricolores. La parfumerie en particulier profite du rebond
économique du luxe américain , avec une progression des ventes de 66% en 2021.
Au global, le Groupe NPD a observé que les ventes de produits de beauté
premium avait connu un formidable rebond aux Etats-Unis en 2021. Elles ont
augmenté de 30% par rapport à 2020. Et la tendance devrait se poursuivre sur
2022.
I. La reprise de nos exportations vers l’ASEAN (+7,9%,12,4 Mds EUR) n’est pas suffisante
pour recouvrer le niveau d’avant crise (16,5 Mds EUR en 2019)
L’ASEAN reste l’an dernier le 6ème client de la France (2,6% des exportations totales
françaises), après l’Union européenne, les États-Unis, le Royaume-Uni, la Chine et la Suisse.
Avec une hausse modérée de 7,9%, les exportations françaises vers l’ASEAN restent
inférieures à nos résultats d’avant-pandémie (-24,5%). Comme les années précédentes,
Singapour compte pour plus de la moitié de nos exportations totales dans la zone (57,5%
du total, +1,9%), en raison notamment de son rôle de plateforme commerciale (d’après
les douanes singapouriennes, 55% des exportations totales depuis la cité-État sont des
réexportations), bien qu’il ne soit pas possible de mesurer l’ampleur exacte de ce phénomène.
Dans le reste de l’ASEAN, les ventes françaises présentent des disparités marquées : les
ventes vers la Thaïlande (+29,6% à 1,4 Md EUR), le Vietnam (+29,0% à 1,2 Md EUR) et le
Laos (+25,9% à 12,1 M EUR) enregistrent une hausse significative, les exportations sont
presque multipliées par deux (+89,4% à 217 M EUR) vers le Cambodge et augmentent
quasiment de moitié (+49% à 741 M EUR) vers les Philippines. Dans le même temps, les
exportations à destination de l’Indonésie (-12,6% à 893 M EUR), la Birmanie (-30,5% à 39,2
M EUR), et Brunei (-12,0% à 7,1 M EUR) poursuivent leur chute (cf. Annexes).
En 2021, nos principaux postes d’exportation vers l’ASEAN sont le secteur
aéronautique, qui enregistre une reprise modérée (14,2% de nos exportations contre
32% en 2019), les produits de luxe (23,5% de nos ventes) et les produits
pharmaceutiques, informatiques et électroniques :
II. Les importations depuis l’ASEAN se redressent plus rapidement que les exportations vers
la zone : +9,4%, à 17,9 Mds EUR
Les importations françaises depuis l’ASEAN, en augmentation de 9,4%, se sont élevées à
18 Mds EUR en 2021, ce qui fait de la zone notre 5ème fournisseur (3% de nos importations
totales), après la Chine, l’Union européenne, les États-Unis et le Royaume-Uni. Le Vietnam,
dont les ventes à la France augmentent de 2,6% à 5,5 Mds EUR, demeure notre principal
fournisseur dans la région (30,6% du total) en raison de sa spécialisation dans les téléphones
portables et l’électronique, et dans le textile/habillement. Les importations depuis Singapour
se contractent de 2,8%, entrainées à la baisse par la chute des importations de produits
pétroliers (-68,4%, à 106,7 M EUR). Nos achats depuis la Thaïlande (+18,4%, à
3,2 Mds EUR), la Malaisie (+25,7%, à 3 Mds EUR), l’Indonésie (+12,0% à 1,9 Md EUR), le
Cambodge (+3,3%, à 971,8 M EUR), les Philippines (+24,6%, à 947,2 M EUR) et le Laos
(+30,0%, à 42,1 M EUR) augmentent sensiblement, tandis que les importations depuis la
Birmanie (-17,5%, à 340,3 M EUR) chutent en raison du contexte politique.
Premier poste à l’import, nos achats de textiles, habillement, cuir et chaussures restent
stables à 4,6 Mds EUR et constituent 25,6% de nos importations totales. Les importations
en provenance de l’ASEAN comptent pour près d’un dixième de nos importations mondiales
dans ce secteur.
Nos achats de produits informatiques, électroniques et optiques (2ème poste
d’importation) se redressent de 1,8% à 4,3 Mds EUR après une contraction de 13,3% en
2020 et comptent pour 24,2% de nos importations totales depuis la région. Les importations
de ce secteur en provenance de la zone comptent pour 8,5% de nos importations mondiales.
Elles sont en hausse pour la quasi-totalité des pays de la région : +5,5% pour la Malaisie (1,2
Md EUR),+3,1% pour la Thaïlande (643 M EUR), +6,4% pour Singapour (600,9 M EUR) et
+24,8% pour les Philippines (369,8 M EUR), à l’exception du Vietnam dont les importations
poursuivent leur baisse (-8,2%, à 1,5 Md EUR).
III. Le déficit commercial vis-à-vis de l’ASEAN se creuse davantage, à 5,5 Mds EUR, faute
d’une reprise suffisante à l’export et d’une hausse des importations
Notre déficit commercial vis-à-vis de l’ASEAN se creuse de nouveau (-626 M EUR) à 5,5
Mds EUR bien que plus modérément qu’en 2020 où il avait crû de près du double (de -2,6 à -
4,9 Mds EUR). Il s’agit de la 7 ème année consécutive de déficit commercial, qui représente
5,0% de notre déficit commercial mondial.
L’excédent bilatéral dégagé dans les échanges avec Singapour, le 2ème plus important au
niveau mondial derrière le Royaume-Uni, ne suffit pas à compenser notre déficit
commercial vis-à-vis de la plupart des autres pays de l’ASEAN. Au sein de la zone, la
France enregistre un excédent commercial avec Singapour (+5,1 Mds EUR) et, dans des
proportions plus limitées, avec le Brunei (+6,3 M EUR). Ces résultats ne permettent pas de
compenser le déficit vis-à-vis des huit autres pays de la région, en particulier du Vietnam (-4,3
Mds EUR), de la Malaisie (-2,2 Mds EUR), de la Thaïlande (-1,8 Md EUR), de l’Indonésie (-
1 Md EUR) du Cambodge (-754,8 M EUR), et des Philippines (-205,7 M EUR). Nos ventes
au Vietnam, en Thaïlande et aux Philippines compensent cette année la baisse modérée de la
part de la cité-État dans nos exportations vers l’ASEAN (de 61% à 57,5%), qui conserve tout
de même son rôle de plateforme commerciale pour les réexportations vers les autres pays de
l’ASEAN, vis-à-vis desquels la France accuse un fort déficit commercial.
Echanges bilatéraux entre la France et la Chine
Echanges de biens
Malgré des ventes aéronautiques qui peinent à retrouver leur niveau pré-covid, les
exportations françaises vers la Chine ont enregistré de bonnes performances en 2021, en
particulier grâce au dynamisme de l’agroalimentaire, la maroquinerie, la chimie et la
pharmacie. Les importations en provenance de Chine ont également progressé dans tous les
secteurs, en lien avec la reprise de la consommation des ménages en France. Le déficit
commercial français vis-à-vis de la Chine a atteint 39,6 Md€ à comparer à 38,9 Md€ en 2020
et 32,3 Md€ en 2019.
Les exportations françaises vers la Chine ont baissé en 2022 : -1,3 % à 24,1 Md€ selon
les douanes françaises. Ce bond s’explique par :
(i) un effet de base: nos exportations avaient augmenté de 37,3 % en 2021;
(ii) la réduction des exportations du secteur agricole et agroalimentaire (-13,2 % à
3,7 Md€[1] ; -15,1 % en g.a. au S1[2]) qui a été pénalisé par la baisse de la consommation en
Chine (-0.2 % en valeur pour la consommation réelle en 2022) dans le contexte des blocages
enregistrés dans les ports, et des confinements - partiels ou généraux – tout au long de
l’année. Les exportations de céréales (-38,3 % à 731 M€) ont chuté à cause des mauvaises
récoltes en France, et les ventes de viande (-29,1 à 358 M€) ont baissé du fait de
l’effondrement des cours du porc[3]. Les exportations de vins (-4,8 % à 532 M€) se sont
plutôt bien maintenues, malgré la baisse de la consommation domestique ; la France conserve
sa place de premier fournisseur dans ce secteur pour la deuxième année consécutive.
(iii) la lenteur de la reprise des ventes aéronautiques(+2,4 % à 4,6 Md€), de loin le premier
poste de nos exportations en Chine (plus d’un tiers de nos exportations pré-covid avec
7,4 Md€ d’exportation en 2019 ; 19 % en 2022). L’an dernier, Airbus a livré 112 appareils à
des clients chinois (contre 142 en 2021), dont 92 appareils de la famille A320 (issus des
usines de Tianjin, Hambourg et Toulouse) et 16 A350. La commande de plus de 37 Md$
d’appareils Airbus annoncée le 1er juillet 2022 par trois compagnies chinoises portant sur des
livraisons devant avoir lieu entre 2023 et 2027 devrait avoir une incidence positive sur les
chiffres des exportations aéronautiques en 2023, même si certaines livraisons d’appareils
long-courrier sont encore conditionnées à la signature d’un « general terms agreement » .
Les exportations de luxe[4] ont résisté en 2022 (+2,0 % à 6,3 Md€), et ont plus que doublé par
rapport à 2019.
La part de marché de la France en Chine [5] est en baisse (1,3 %, contre 1,5 % en 2021 et 1,6
% en 2019) ; loin derrière celle de l’Allemagne (4,1 %, en baisse également). Nos entreprises
sont bien positionnées dans les secteurs du vin et des spiritueux (1 er fournisseur), de
l’aéronautique (2e derrière les États-Unis), des cosmétiques (2e derrière le Japon) et des
produits pharmaceutiques (4e derrière l’Allemagne, l’Irlande, et les États-Unis). Pour
l’agroalimentaire, la France est le 11e fournisseur de la Chine (8e en 2021).
Les importations françaises de biens chinois ont bondi en 2022 : +20,7 % à
77,7 Md€ (+12,8 % en 2021). Cette hausse s’explique en premier lieu par la reprise de la
consommation des ménages en France se traduisant par des achats de matériel électrique
(+25,0 à 10,1 Md€) et de produits informatiques et électroniques (+16,3 % à 21,7 Md€), dont
les téléphones (+15,2 % à 7,4 Md€), les cartes électroniques (+68,6 % à 2,1 Md€), et les
ordinateurs (+10,4 % à 8,0 Md€). La hausse de nos importations de textile et d’habillement
(+20,0 % à 11,6 Md€) a été importante, ainsi que celle pour le secteur automobile (+46,4 % à
2,0 Md€). Les importations dans les autres principaux postes ont également enregistré une
croissance élevée, en lien avec la reprise de l’industrie (+70,3 % 3,1 Md€ pour les produits
chimiques). Dans tous ces secteurs, les achats en provenance de Chine sont bien plus élevés
qu’avant la crise sanitaire.
Echanges de services
Dans les services, la France est excédentaire vis-à-vis de la Chine : en 2021, son excédent a
atteint 6,1 Md€, en hausse par rapport à 2020 (2,6 Md€) et 2019 (5,2 Md€), malgré la chute
des dépenses des touristes chinois sur le territoire français depuis le début de la pandémie.
Investissements croisés
I - Investissements français en Chine
La présence française en Chine est ancienne ; les entreprises françaises s’y sont très tôt
impliquées dans des projets emblématiques. 2085 entreprises françaises, essentiellement
des grands groupes, étaient présentes en Chine en 2020, employant près de 307 000
personnes (chiffres OFATS/Eurostat). La France est le premier investisseur européen en
terme de nombre d’entreprises, mais l’Allemagne occupe la première position en terme
de chiffre d’affaires généré (192 Md€ pour l’Allemagne, 72 Md€ pour la France en
2020). La majorité des investissements français est concentrée autour des provinces
côtières et des grandes métropoles. Cette présence est très diversifiée parmi les secteurs
(agroalimentaire, industrie, transports, urbanisation, grande distribution, services financiers) et
les modes d’implantation varient (capitaux 100 % français ou co-entreprise avec un partenaire
chinois). D’après la Banque de France, le stock des investissements français en Chine a
agumenté en 2021 (27 Md€ en 2019 ; 30 Md€ en 2020 ; 32 Md€ en 2021).
II - Investissements chinois en France
Les investissements chinois dans le monde ont connu récemment une progression
fulgurante, de 18 Md$ de moyenne annuelle entre 2005 et 2007 à plus de 200 Md$ en
2016. Néanmoins, en 2017, en conséquence de mesures visant à contrôler les sorties de
capitaux et à encadrer la politique d’investissement à l’international des groupes
chinois, une réduction de moitié des flux sortants d’IDE a pu être observée : selon les
statistiques du ministère du Commerce, les investissements sortants de la Chine sont
passés de 196 Md$ en 2016, à 143 Md$ en 2018, 137 Md$ en 2019, 133 Md$ en 2020 et
145 Md$ en 2020. Si le stock d’investissements chinois à l’étranger progresse (les Nations
unies font état d’un stock de 2 582 Md$ en 2021, hors Hong Kong qui détient pour sa part un
stock d’IDE de 2 082 Md$) et se situe désormais devant le stock français (1 545 Md$) ou
allemand (2 141 Md$) ; il reste encore loin derrière le stock américain (9 814 Md$).
En France, le stock des IDE chinois représentait, d’après la Banque de France,
seulement 3,0 Md€ en 2021, soit 0,4 % des stocks totaux d’IDE (5,8 Md€ et 0,7 % du total
en incluant Hong-Kong), mais ce chiffre pourrait être très en-deçà de la réalité en raison de la
part des investissements passant par des canaux opaques (paradis fiscaux ou sociétés écrans
dans des pays tiers – le stock s’élève déjà à 8,6 Md€ d’investissements chinois en 2021 en
prenant en compte les « investisseurs ultimes »*). Le rapport 2021 de Business France sur
les IDE en France recense, pour 2021, 53 projets d’investissements chinois en France,
contribuant à la création ou au maintien de 2 169 emplois (+ 28 % par rapport à 2020).
L’attrait d’un grand marché très bien connecté au reste de l’Europe reste une motivation
essentielle pour de nombreuses entreprises chinoises, de même que le souhait d’acquérir des
technologies avancées et des marques. Elles sont ainsi nombreuses à choisir la France pour
y implanter des centres de R&D et tirer parti d’une main d’œuvre qualifiée et de la présence
de clusters technologiques. Des entreprises en difficulté ont aussi été reprises par des groupes
chinois. Enfin, l’implantation à Paris de quatre banques chinoises est aussi motivée par la
proximité du continent africain.
[1] Les chiffres des douanes françaises ne tiennent pas des flux de Cognac exportés via
Singapour (environ la moitié du total des exportations de Cognac).
[2] Du fait notamment des confinements dans 45 villes représentant 40 % du PIB au
printemps.
[3] La Chine a connu une surproduction de viande de porc, suite à la reconstitution de son
cheptel après l’épisode de peste porcine africaine et des investissements massifs dans ce
secteur. Le prix du porc importé par la Chine depuis la France est passé de 3,0$/kg en 2021
à 2,4$/kg en 2022 (chiffres des douanes chinoises).
[4] Boissons, parfums, cosmétiques, cuir, bagagerie, bijouterie, joaillerie et objets d’art.
[5] Données douanes chinoises
* Mesure prenant compte de l’investisseur en bout de chaîne.
** Pour un suivi plus assidu de la politique commerciale chinoise et des relations
économiques bilatérales, nous vous invitons à vous abonner à nos publications régulières ou
à consulter nos productions plus approfondies.
La France est le premier acteur mondial de la mode et du luxe, ses entreprises réalisant 25%
des ventes mondiales du secteur, selon les données du Conseil national de l’industrie. Au
total, la filière pèse 154 milliards d’euros et emploie 616.552 personnes. Fortement touchée
par la crise, elle se prépare à reconquérir les marchés. Dans ce contexte a été dévoilé jeudi 18
mars le plan de Relance Export pour la filière mode et luxe. L’occasion pour Business France
et ses partenaires de décrypter l'évolution des différents marchés à l'international en ce post-
2020
Plan :
De l’artisanat à l’industrie
Le luxe, pilier de l’économie française
Une demande devenue mondiale
Le luxe fait généralement référence à des objets beaux, élégants et inaccessibles. Des produits
réservés à une clientèle triée sur le volet, capable d’investir une somme faramineuse pour les
obtenir. Pourtant, le luxe n’est désormais plus hors de portée. Bien que toujours réservé aux
publics aisés, il n’est plus la chasse gardée des plus riches. Au contraire, tout au long de ces
dernières décennies – et parfois même bien plus tôt, en Europe notamment – le luxe s’est
"démocratisé". Et s’il a pu ainsi conquérir de nouveaux marchés, c’est parce qu’il a réussi à
opérer une métamorphose de taille : passer d’un mode de production artisanal à un monde
industriel. Une transformation opérée d’abord en France.
Bien que les produits de luxe relèvent de l’artisanat et de l’exceptionnel, les grandes maisons
ont pris un virage industriel dès le lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elles "n’ont
plus une démarche orientée vers le luxe, mais suivent une logique commerciale et industrielle
[…] [avec] une production à grande échelle. L’exemple des parfums dans le groupe Louis
Vuitton Moët Hennessy (LVMH) confirme cette nouvelle orientation. […] Géant de la
parfumerie, LVMH produit dans les mêmes laboratoires et les mêmes usines les différentes
gammes de parfums. On y trouve les marques de prestige, Dior ou Kenzo, et des productions
de grandes diffusions et de faible prix. Il en résulte une uniformisation industrielle que
certains professionnels eux-mêmes regrettent ouvertement", écrit Marc de Ferrière le Vayer
dans "L’industrie du luxe et la mode : du temps des créateurs au temps des communicants (fin
XIXe, fin XXe siècle)" (Apparence(s), Histoire et culture du paraître, no 1, Varia, 2007). Le
parfum est aussi le premier secteur à basculer vers un modèle de distribution plus intensif. "Si,
jusqu’à la fin des années 1990 Guerlain reste attaché à une distribution ultra sélective, les
autres maisons se sont appuyées très tôt sur le vaste réseau des parfumeurs. Carven, avec Ma
Griffe, est une pionnière dès 1946" (ibid.).
Concentration du secteur
En plus de développer des modes de production industrielle, les géants du luxe misent
également sur les fusions-acquisitions pour se renforcer. Une logique cohérente pour créer des
synergies mais aussi diversifier leurs portefeuilles d’activités et ainsi faire preuve de
davantage de résilience en cas de ralentissement sur un marché en particulier. "Ces dernières
années se caractérisent par des conditions commerciales plus difficiles pour les produits de
luxe. De nouveaux modèles commerciaux et une concurrence plus agressive entre les canaux
de distribution est évidente. Les entreprises du luxe se concentrent sur les acquisitions pour
élargir leurs portefeuilles, pénétrer de nouveaux segments et se diversifier, bien que la
croissance organique joue également un rôle clé" (Euromonitor International, "Stratégies
concurrentielles dans le luxe", novembre 2018).
L’un des premiers à avoir favorisé la concentration sur le marché du luxe n’est autre que le
leader mondial, le français LVMH. Alors que dans les années 1990 il existait encore une
multitude de marques indépendantes, LVMH a réalisé sur la seule année 1999 pas moins de
neuf acquisitions dont les horlogers joailliers Tag Heuer, Zenith et Ebel (Les Échos, "La
concentration bat son plein dans l’univers du luxe", 24 juillet 2000). Au cours des années
2000, il avait même tenté d’absorber le groupe Hermès, sans succès (Capital, "Quand LVMH
a tenté de prendre le contrôle d’Hermès via le Panama", 6 avril 2016). Et cette logique de
croissance par acquisitions se poursuit : en 2017, LVMH a, par exemple, acquis la société
Christian Dior Couture et Rimowa, fabricant allemand de valises. Aujourd’hui, les marques
les plus fortes appartiennent toutes à de grands groupes comme LVMH qui en compte
soixante-dix à lui seul.
Que l’économie mondiale soit en crise ou non, le luxe se montre plus que résilient face à la
conjoncture. Alors que beaucoup de secteurs stagnaient voire reculaient au lendemain de la
crise financière de 2008, le luxe a continué d’afficher des performances insolentes. Depuis
2010, le secteur n’a enregistré qu’un seul repli (- 0,4%) en 2016, principalement à cause du
ralentissement chinois. Mais il s’est rapidement redressé. En 2018, le marché mondial des
produits de luxe était estimé entre 276 et 281 milliards d’euros, en nette croissance par rapport
à 2017 (étude du cabinet de conseil en management Bain & Company pour la fédération
italienne des entreprises de luxe Altagamma, "Worldwide luxury market monitor", juin 2018).
Un marché de poids, donc, sur lequel la France se hisse en tête du classement. Le luxe est
même l’une des principales forces du pays dans le jeu du commerce mondial. Cette
domination se retrouve aussi du côté des marchés financiers, où les deux plus importants
groupes français du luxe, LVMH et Kering, présentent des capitalisations sans précédent.
Pour la France, le luxe constitue l’une de ses principales forces dans l’économie mondiale.
Alors que sa balance commerciale est largement déficitaire (- 62,3 milliards d’euros en 2018)
(Cahiers français no 407, "Panorama du commerce extérieur français"), plusieurs marchés du
luxe s’imposent comme des piliers français à l’export. Pour preuve, les neuf entreprises
françaises présentes dans le top 100 des plus gros acteurs du luxe dans le monde concentrent à
elles seules 24,3% des ventes mondiales (classement Deloitte, Global Powers of Luxury
Goods, 2018).
Les grandes marques française du luxe représentent un véritable enjeu pour le maintien
des emplois sur le territoire
La parfumerie-cosmétique
Premier secteur fort du luxe français dans le monde, la parfumerie-cosmétique française est le
deuxième plus gros secteur à l’export après l’aéronautique. En effet, en 2017, la balance des
exportations/importations dans ce domaine s’est soldée par le deuxième plus fort excédent
français à 10,6 milliards d’euros, derrière l’aéronautique à 17,4 milliards d’euros (DGDDI, Le
commerce extérieur de la France en 2017, p. 24, 7 février 2018). Ces exportations sont
principalement à destination de l’Europe avec 6,3 milliards d’euros, soit 46 % des
exportations totales (Fédération des entreprises de la beauté, Les chiffres du secteur, 2017).
La maroquinerie et la chaussure
Au-delà des vêtements et parfums, les grandes marques du luxe ont fait des accessoires leur
principal gagne-pain. Désormais accessibles à une large clientèle, ces produits de luxe
représentent aujourd’hui avec les parfums l’essentiel des chiffres d’affaires de plusieurs
marques françaises. Ainsi, selon Cash Investigation (cité plus haut), la maroquinerie-
chaussure entre pour plus de la moitié du chiffre d’affaires de la marque chez Gucci (propriété
du français Kering), Saint Laurent et Hermès ; la part est de 36% chez LVMH (Groupe
LVMH, Rapport annuel 2017, p. 24 et 25).
Que ce soit au travers de leurs ateliers de fabrication français ou dans leurs magasins ouverts
dans l’Hexagone, les grandes marques françaises du luxe représentent un véritable enjeu pour
le maintien des emplois sur le territoire national. Lorsqu’elles s’appuient sur le made in
France, bien évidemment. Hermès, maison fondée en 1837, fait office de bon élève en la
matière. La marque fabrique en effet 85% de ses articles sur le territoire et a créé 2 400
nouveaux emplois dans le pays entre 2011 et 2016 (voir "Le luxe, cette industrie française qui
crée de l’emploi", Capital, 12 juin 2017). Au total, elle regroupe 16 ateliers de maroquinerie –
le dernier ayant été inauguré en avril 2018 à Allenjoie dans le Doubs – en plus de 35 autres
sites de production en France. Soit au total 41 manufactures implantées dans le pays –
réparties sur 46 sites géographiques – et seulement 11 ailleurs dans le monde ("Une seizième
manufacture de luxe pour Hermès", L’Usine Nouvelle, 31 décembre 2018). Sur les 13 483
personnes employées par le groupe, 8 319 sont en France. Soit près de 62% de son effectif
total (Groupe Hermès, Rapport annuel 2017, p. 7). Le Groupe LVMH, quant à lui, détient 105
sites de production en France et le Groupe Kering emploie 2 000 personnes sur le territoire
(Le Journal de l’Économie, "En France, le luxe toujours plus d’emplois", 12 juin 2017). Au
total, et au sens strict, le luxe représente 165 000 emplois ; si en englobe l’ensemble de la
filière mode, il faut compter plus de 600 000 emplois directs et 1 000 000 d’emplois indirects
en France (ministère de l’Économie et des Finances, ministère de la Culture et Comité
stratégique de la filière "Mode et luxe", Contrat stratégique de filière Mode et Luxe 2019-
2022, 2019).
Comme l’écrit l’économiste Nicolas Tarnaud (Les Échos, "Le luxe dans le monde
d’aujourd’hui", 11 février 2018) : "Le luxe est devenu un élément de plaisir qui s’est
démocratisé durant le XIXe siècle. […] Selon les pays, le luxe peut être plus ou moins un
signe extérieur de richesse ainsi qu’un marqueur social. […] Les objets de luxe ne laissent
personne indifférent en raison de leur inaccessibilité et du rêve qu’ils procurent". Le marché
de produits de luxe a conquis la planète. Il ne s’adresse plus seulement aux pays riches ou aux
populations les plus aisées mais s’est véritablement démocratisé. Dans cette ouverture vers de
nouvelles cibles, l’industrie du luxe a trouvé de nouveaux leviers de croissance. De sorte
qu’aujourd’hui, son avenir s’annonce sous le signe de la croissance. Bain & Company (étude
citée plus haut) estime que ce marché devrait continuer de croître à raison de 4% à 5% par an
ces prochaines années jusqu’à représenter entre 366 et 390 milliards d’euros en 2025.
Si la majorité des entreprises positionnées sur le marché du luxe sont toujours originaires des
pays riches, la demande, en revanche,s’est de plus en plus déplacée vers les pays émergents.
Un changement de paradigme à l’oeuvre depuis les années 1990 et qui a été porté par l’essor
économique de certains pays asiatiques – Chine en tête –, dont les taux de croissance
dépassaient les deux chiffres par an. L’Asie (hors Japon) est ainsi le deuxième marché du
numéro un mondial LVMH avec 28 % de son chiffre d’affaires global réalisé dans la zone,
derrière l’Europe (29% dont 19% hors France et 10% en France). Viennent ensuite en
troisième position les États-Unis (25%) et le Japon (7%) (Groupe LVHM, Rapport annuel
2017, p. 24 et 25). Chez le Groupe Kering, l’Asie- Pacifique pèse 27% des ventes, juste
derrière l’Europe de l’Ouest avec 33% (Groupe Kering, Rapport annuel 2017, p.70). Fait
notable, ces consommateurs achetaient jusqu’à présent principalement dans des places fortes
du luxe mondial, comme Paris. Conscientes de cette manne représentée par les touristes, les
Galeries Lafayette ont d’ailleurs ouvert en mars 2017 une annexe dédiée aux clients chinois
baptisée "Shopping & Welcome Center". Signalétique en mandarin, vendeurs bilingues…
Dans cet espace de 4 200 mètres carrés, tout est fait pour que cette clientèle qui représente 2
milliards d’euros dans le chiffre d’affaires du magasin – soit environ 25 % de ses recettes
totales – se sente à l’aise (Le Parisien, "Les Galeries Lafayette ont ouvert leur annexe pour
touristes chinois", 23 mars 2017). Mais de plus en plus, ces clients achètent directement sur
leur marché domestique, notamment via Internet.
La Chine pèse lourd dans la demande mondiale en produits de luxe. En 2017, les chinois
représentaient 32% des consommateurs de produits de luxe dans le monde et la tendance
ira crescendo puisqu’ils devraient dynamiser à eux seuls 70% de la croissance du marché d’ici
2024 (Boston Consulting Group, "True luxury global consumer insight", 2018). Résultat, les
grandes maisons de luxe sont désormais très dépendantes de l’économie chinoise et du goût
de ces consommateurs. Si le marché mondial du luxe s’est replié en 2016, c’est d’ailleurs en
grande partie à cause de la chute du yuan et du ralentissement de la croissance chinoise. Or,
cette forte dépendance à l’égard du marché chinois devrait s’accroître : d’ici 2025, le cabinet
de conseil Bain & Company estime que la Chine pourrait peser à elle seule 46% des achats de
produits de luxe dans le monde (voir "L’industrie du luxe a un problème avec la Chine", The
Wall Street Journal, 1er janvier 2019). Soit près de la moitié de la demande mondiale.
Alors qu’on pourrait croire que les produits de luxe sont réservés à un public plus mature car
davantage prêt à investir dans des biens raffinés et coûteux, ce sont en réalité les jeunes qui en
sont les plus friands. Toujours d’après l’étude Bain & Company, les millenials – jeunes âgés
de 18 à 35 ans – représentent aujourd’hui 85 % de la croissance du marché et passeront d’ici
2024 de 29% à 50% des consommateurs de produits de luxe. "L’industrie du luxe est portée
par un basculement générationnel […] Cette nouvelle donne a obligé les marques […] à
renouveler leur offre avec des produits susceptibles de satisfaire une clientèle ultraconnectée
et peu fidèle" (Fashion Network, "2018, nouvelle année record en vue pour le luxe", 7 juin
2018). C’est la raison pour laquelle les grands groupes français ont commencé à développer
de nouvelles stratégies numériques. Bien qu’elles s’y soient mises plus tardivement que la
majorité des enseignes de détail, leurs ventes en ligne progressent très rapidement. Ainsi en
2017, elles ont grimpé de 24% pour représenter entre 9% et 10% du marché global. D’ici
2025, l’e-commerce devrait concentrer un quart des recettes totales du marché des produits de
luxe. Ce rajeunissement des consommateurs a aussi orienté les nouvelles collections des
grandes marques vers des univers streetwear où le luxe était absent jusqu’alors. Après être
entré dans une ère de production industrielle, le luxe est-il à la veille de sa deuxième mutation
profonde ?
Coût de production : 10 000 euros Frais de transport : 2 000 euros Droits de douane :
550 euros TVA : 715 euros Certification et conformité : 3 000 euros Distribution locale
: 2 500 euros
Veuillez noter que cet exemple est simplifié et qu'il peut y avoir d'autres coûts ou
facteurs à prendre en compte en fonction de votre situation spécifique. Il est
fortement recommandé de consulter des professionnels du commerce international
pour obtenir une estimation précise et complète des coûts d'exportation des produits
cosmétiques de la France vers la Chine.