Vous êtes sur la page 1sur 5

Intro 

:
Amorce : Le recueil des Regrets est publié en 1558 lorsque Du Bellay
revient de Rome, où il a plusieurs années auprès d’un de ses cousins,
cardinal Jean Du Bellay. Ce grand humaniste, proche de Ronsard, participa
au mouvement de la Pleïade. Intéressé et attiré par l’Antiquité et le
savoir, il était heureux de découvrir cette ville.
Présentation / résumé : Il se retrouve finalement déçu par les coulisses
du Vatican, l’hypocrisie des multiples courtisans. Parallèlement se met en
place une cour autour du roi en France au XVIe siècle. La royauté est
beaucoup moins itinérante, et depuis François 1er, souhaite briller par son
entourage. Le sonnet en alexandrins présenté a pour objet la critique des
courtisans par la satire.
Problématique : La servilité et l’hypocrisie des courtisans ne sont-elles
dues qu’à leur caractère ?
Plan : Les deux premiers quatrains constituent un premier mouvement du
sonnet qui expose des imitateurs serviles. Les deux derniers tercets, eux,
se concentrent sur l’hypocrisie des courtisans qui les rend ridicules.

Argument 1, Des imitateurs serviles (les deux quatrains) :


- Le poème débute par l’interjection « Seigneur ». Du Bellay semble
s’adresser à un aristocrate, ou à Dieu. Dans ce dernier cas, il confesse sa
colère qu’il va exprimer.
- « je ne saurais regarder d’un bon œil » indique effectivement qu’il
ressent un mauvais sentiment. Ce premier vers annonce qu’il va donner son
avis. La litote garde néanmoins une certaine mesure dans le ton.
- Il semble en employant l’expression « d’un bon œil » faire part d’un
témoignage, qui ancre ses observations dans le réel. Il va nous décrire un
spectacle.
- Le vers 2 commence par une métaphore animalière péjorative « Ces
vieux singes de cour ». L’objet de son désagrément vient des courtisans.
Et il exprime déjà son opinion désapprobatrice : ils sont « vieux », ce qui
peut renvoyer à l’âge, mais plus encore à l’habitude de leur comportement.
La métaphore du singe dévoile leur pratique mimétique, leur tendance à
l’imitation.
- Le second hémistiche du vers « qui ne savient rien faire » asséné avec
un présent de vérité générale un jugement définitif sur leur inutilité. Ce
ne sont rien d’autres que des animaux de compagnies, des éléments du
déco qui n’ont aucune autre fonction.
- Dans le troisième et quatrième vers, l’auteur fournit des exemples
précis du caractères imitateur des courtisans.
- « Sinon en leur marcher les princes contrefaire », les princes sont les
maîtres des courtisans, les propriétaires des « singes ». Ils imitent donc
leur maître, mais imparfaitement, par l’emploi de l’infinitif
« contrefaire ».
- « Et se vêtir, comme eux, d’un pompeux appareil. » Le vers 4 délivre un
deuxième exemple. Après la démarche c’est l’habillement qui est copié.
L’emploie du comparatif « comme » renforce cette volonté d’imitation
ainsi que le lien de subordination des courtisans. Le terme « appareil »
désigne ici l’ensemble de la tenue. « pompeux » est un adjectif qui signifie
de manière prétentieuse.
- Dans ce premier quatrain, Du Bellay dépeint des courtisans qui ne vivent
que dans l’apparence, ou plutôt que par l’apparence de leur seigneur qu’ils
cherchent à imiter sans succès.
- L’allitération en « s » des trois premiers vers (Seigneur, saurais, singes,
savent, sinon) crée une sonorité proche de l’ironie.
- Les vers 5 et 6 sont construits avec une anaphore : « Si / S’il » qui
insiste sur le caractère habituel, répétitif de leur comportement.
- Après le mimétisme d’apparence mis en avant dans le premier quatrain,
le poète caricature ici leur servilité de jugement.
- Déjà, le vers 5 emploie un terme plus fort que « prince », celui de
« maître ». Le courtisan est bien un être non-libre, presqu’un animal. Le
parallélisme avec la césure à l’hémistiche (les 6 premières syllabes) rend
extrêmement visible l’imitagtion. Ils ne sont qu’une copie de l’humeur de
leur maître.
- Vers 6, la litote sert à montrer la lâcheté de ces êtres soumis, qui bien
loin d’oser désapprouver la parole fausse de leur maître, ils la font vérité.
- Enfin, les deux derniers vers du quatrain achèvent de montrer leur
servilité : « afin de lui complaire ». Leur but est de se rendre agréable à
leur maître, par n’importe quel moyen, même le plus ridicule.
- Le chiasme vers 8 finit ce premier mouvement par un exemple
hyperbolique et absurde de l’imitation des courtisans : « La lune en plein
midi, à minuit le soleil. » Ils sont donc prêts à tout pour revnoyer la même
image que leur maître.
- Du Bellay dénonce dans ce premier mouvement l’inutilité des courtisans
qui ne sont que des imitateurs sans aucun libre arbitre.
- Il cherche à convaincre ses lecteurs : dans les deux premiers vers, il
expose sa thèse, dans les suivants, il l’illustre par des arguments
(imitation de la démache, tenue, jugements de leur maître).

Argument 2, Des hypocrites idiots (les deux tercets) :


- Le second mouvement met moins l’accent sur l’imitation servile que sur la
mise en scène des courtisans entre eux.
- Le vers 9 nous montre que nous changeons de rapport : « Si quelqu’un
devant eux reçoit un bon visage ». Le point de vue du poète est passé du
rapport des courtisans à leur maître, à leurs rapports entre eux-mêmes.
- Cependant, l’imitation est toujours présente : « Ils vont le caresser,
bien qu’ils crèvent de rage » vers 10. Ils vont faire comme leur maître et
complimenter le courtisan, seulement, la locution « bien que » montre
pleinement qu’ils n’en ont pas envie intérieurement : « crèvent de rage ».
- Il n’y a plus du tout d’euphémisme. L’expression « crèvent de rage » est
une explosion de violence. Elle fait ressortir le règne animal. En apparence
les courtisans conservent le contrôle, mais à l’intérieur ils ont une émotion
totalement contraire.
- Rechercant la « caresse » du prince, ils jalousent celui qui la reçoit.
L’auteur dénonce un nouveau trait du courtisan, celui de l’hypocrisie. Le
courtisan porte un masque sur ses sentiments.
- L’anaphore du vers 11 avec le vers 9 (« Si », « S’il »), qui a déjà été
employée dans le deuxième quatrain est réutilisée pour mettre en avant la
répétition de la scène.
- Le parallélisme « S’il le reçoit mauvais, ils le montrent au doigt. » décrit
un comportement automatique des courtisans. Leur attitude est comme
programée.
- De plus, Du Bellay induit le fait que l’orsqu’un courtisan déplaît au
maître, bien que les autres adoptent le même jugement que lui, ils sont en
fait très heureux de la situation. C’est une nouvelle fois de l’hypocrisie.
- Le dernier tercet continue vers la chute. C’est l’apogée du ridicule des
courtisans.
- Comm dans le premier vers, Du Bellay nous rappelle qu’il porte un
jugement sur les courtisans « Mais ce qui plus contre eux quelquefois me
dépite ». Il crée avec ce vers un effet d’attente. Que peut-il y avoir de
pire que d’être un automate imitateur, servile et hypocrite ?
- Ici, en employant le verbe « dépite », il ‘est plus dans la litote du
premier vers. Il affiche sans maquillage sa contrariété.
- La conjonction « Mais » renforce le caractère spectaculaire de ce qui va
être dévoilé.
- Les deux derniers vers sont l’illustration de son dépit. La locution
« C’est quand » donne un effet de présent.
- Le thème central du second mouvement, l’hypocrisie, est encore mis en
avant : « devant le roi, d’un visage hypocrite, ». Il faut noter que le nom
« roi » et employé pour la première fois. Nous comprenons donc que Du
Bellay vise au-delà des courtisans, la cour royale.
- « Ils se prennent à rire, et ne savent pourquoi. » Ce dernier vers montre
la dernière réaction des courtisans. Elle n’est plus en mimétisme de leur
maître. Ils reconnaissent l’hypocrisie, par instinct, sans réfléchir, car
c’est leur essence même.
- Le rire est nerveux, on peut y lire l’étonnement de se voir dans un
miroir, ou, le contentement de démasquer l’un des leurs devant leur roi.
- Cependant, ils « ne savent pourquoi », car d’après le poète, ils ne sont
pas capables de réflexion. Trop entraînés à la simple imitation, ils n’ont
pas assez de recul pour comprendre leur propre réaction.
- Une dernière fois, l’impression est donnée d’animaux sans conscience.
- Du Bellay les dénonce mais en même temps il les plaint de leur misérable
condition.

Conclusion :
Résumé : Du Bellay, dans ce sonnet, critique avec férocité, fait la satire
des courtisans. Il dépeint leur attitude en deux temps : il expose leur
servilité, ils ont un maître à qui ils cherchent à plaire, une absence de
liberté dans leur imitation constante au niveau de l’apparence ou du
jugement ; puis, il insiste sur l’hypocrisie des courtisans qui affichent des
jugements contraire à leurs opinions ou ressentis, cette mécanique se
retrouve monter en flèche quand ils font face à l’hypocrisie d’un des leurs
devant le roi. La supercherie, le ridicule semblent tellement flagrants
qu’ils rient.
Réponse à la problématique : Du Bellay par cette forte satire des
courtisans les blâme évidemment. Cependant, il les montre comme les
pions d’un théâtre qui les contrait, celui de la cour. Alors, nous
comprenons que si le comportement des courtisans exaspère le poète, il
dénonce certainement davantage la cour en elle-même, qui oblige à porter
des masques. Elle n’est pour lui qu’un théâtre de mensonges.
Ouverture : La critique que fait Du Bellay de la cour et des courtisans
dans ce sonnet rappelle évidemment de nombreuses fables de La Fontaine
qui n’a eu de cesse à travers son œuvre de dénoncer les mensonges et
l’hypocrisie.

Vous aimerez peut-être aussi