Vous êtes sur la page 1sur 6

Exemple de lecture linéaire à l’oral de français

commentairecompose.fr/exemple-de-lecture-lineaire/

Par Amélie Vioux

La lecture linéaire à l’oral de français est


une explication qui suit le fil de texte.

Contrairement au commentaire composé


écrit, qui s’organise autour d’axes de
lecture, l’analyse linéaire suit l’ordre du
texte.

Mais attention : la lecture linéaire est un


exposé structuré !

Simplement, au lieu d’être structurée


autour d’axes thématiques, l’analyse
linéaire est structurée autour des mouvements du texte.

Elle suit donc bien un plan avec des parties qui ont un titre, mais ce plan rend compte de la
progression du texte.

De même, comme dans un commentaire composé, ton explication linéaire doit absolument
éviter la paraphrase : tu dois proposer une interprétation du texte, mettre en valeur son
sens implicite, grâce à l’analyse les procédés relevés.

Chaque idée est donc illustrée précisément avec des citations et procédés littéraires.

Rien ne vaut de lire quelques exemples pour se rendre compte de ce qu’on attend de toi
dans une explication linéaire.

Tu trouveras donc ci-dessous un modèle de lecture linéaire sur la fable « Les obsèques
de la lionne » issue des Fables de Jean de La Fontaine.

Tu peux constater que dans cet exemple de lecture linéaire :

– Mon explication suit un plan qui met en avant la structure du texte, sa progression.

– Chaque partie de mon plan a un titre qui correspond à mon interprétation du texte

– Mon exposé répond à une problématique énoncée dans l’introduction. La problématique


est essentielle : elle donne une cohérence et une finalité à mon analyse.

1/6
– Je n’analyse pas chaque terme ni chaque vers de la fable. Je sélectionne les procédés
les plus pertinents pour répondre à ma problématique.

Voici une lecture linéaire de la fable « Les obsèques de la lionne » de La Fontaine.

Exemple d’introduction de lecture linéaire, « Les obsèques de la


lionne » :
Il est toujours délicat de juger le regard que porte La Fontaine sur le Monarque Louis XIV
tant il s’agit d’un mélange complexe d’admiration, de fascination et de méfiance.

Louis XIV s’est lui aussi toujours méfié de La Fontaine depuis la déchéance du Contrôleur
Général des Finances Fouquet qui était le protecteur du fabuliste. [Accroche ou amorce]

Dans les Fables et notamment dans « Les obsèques de la Lionne » publiés en 1694 dans
le livre huitième, La Fontaine critique audacieusement le système de cour. [Présentation
du texte à commenter]

En quoi cet apologue, récit destiné à plaire et instruire, met-il en scène une critique de
la Cour ? [Problématique]

La fable « Les obsèques de la lionne » comprend deux parties : des v.1 à 23, le lecteur a
l’impression d’être face à une fable traditionnelle composée d’un court récit et d’une morale
(I). Néanmoins, le vers 25 relance la fable par un coup de théâtre plaisant permettant au
fabuliste d’acérer sa plume satirique (II). [Annonce du plan suivant le mouvement du
texte]

I – « Les obsèques de la lionne » : une fable traditionnelle (v.1 à 23)

A – Un début in medias res (v.1 à 5)

Le premier vers est une entrée in medias res car elle exprime directement ce qui s’est passé
hors-scène avec une grande efficacité narrative « La femme du Lion mourut » : les
personnages principaux sont posés.

L’adverbe « Aussitôt » au v.2 amorce l’action dramatique avec un effet d’accélération


renforcé par le verbe « accourut » dont le préfixe « a- » fait du palais du Lion un point de
convergence de tous les mouvements : « Aussitôt chacun accourut ».

Le caractère imaginaire du monde animal (« “Lionne », « Lion” » ) ne dure pas longtemps :


en utilisant la périphrase « “Le Prince” » au vers 3, La Fontaine nous place immédiatement
dans l’univers politique de la cour.

2/6
Le verbe « Accourut » laisse d’ailleurs entendre le substantif « cour » et suggère ainsi
l’empressement servile des courtisans.

La formulation complexe du vers 4 « “De certains compliments de consolation” » souligne la


duplicité du langage courtisan et donne une dimension satirique à cette fable.

L’antithèse « “compliments » / « consolation” » montre que la cour est un théâtre où la


tristesse est jouée plutôt que ressentie.

L’hyperbole « “surcroît d’affliction” » au vers 5 renforce la fausseté de l’univers courtisan où


les sentiments sont joués.

B – Le spectacle du pouvoir (v.6 à 12)

La Fontaine donne ensuite à voir le pouvoir du roi dont toutes les volontés sont satisfaites.

L’expression expéditive : « un tel jour, un tel lieu » souligne la rapidité avec laquelle la
moindre volonté du roi est exécutée.

Les propositions « “Pour régler la cérémonie / Et pour placer la compagnie” » (v.9 et 10)
témoigne ironiquement de l’organisation du système de courtisanerie où chacun doit être à
sa place au service du Prince.

L’impératif à la deuxième personne « “Jugez si chacun s’y trouva” » au vers 11 invite le


lecteur à observer ironiquement cette organisation digne d’un spectacle.

c – Une première morale satirique (v.13 à 23)

Alors que nous avions quitté l’univers animal avec le champ lexical de l’Ancien Régime («
“Prince », « Province », « Prévôts », « Messieurs les Courtisans” » ), La Fontaine revient à
l’animalisation du Prince et sa Cour des vers 12 à 16 , en proposant ainsi une plaisante
satire.

L’hyperbole « “Tout son antre en résonna” » (v.13) exprime une démonstration de tristesse
excessive, théâtrale, et donc peu sincère.

L’intervention du fabuliste au vers 17 « “Je définis” » et le présent de vérité générale « “sont


ce qu’il plaît au Prince” » semblent clore la narration pour laisser place à la morale.

Le moraliste critique alors l’insincérité des courtisans par les antithèses « “tristes, gais” »
(v.18) et « “être » / »paraître” » qui sont à la rime aux vers 19 et 20. Ces antithèses
soulignent la rapidité avec laquelle les courtisans changent de masque au gré des
circonstances.

3/6
Le chiasme « “prêts à tout, à tout indifférents ”» (v.18) suggère quant à lui l’enfermement
dans l’artifice et la tromperie.

La métaphore « “Peuple caméléon, peuple singe du maître” » continue l’animalisation


satirique des courtisans.

A ce stade, le lecteur a donc l’impression que la fable s’achève : après un court récit mettant
en scène le spectacle de la cour, La Fontaine délivre sa morale en critiquant l’hypocrisie des
courtisans.

II – Un coup de théâtre destiné à plaire et instruire (v.24 à 55)

A – La surgissement du cerf : un coup de théâtre (v.24 à 27)

Alors que l’on pourrait croire à la fin de la fable, La Fontaine fait plaisamment passer la
morale pour une digression.

Le récit reprend en effet au vers 24 avec l’expression « “Pour revenir à notre affaire” » qui
crée un effet d’intertextualité avec Montaigne (qui aime dans ses Essais promener le lecteur
dans des digressions).

Le surgissement du cerf au v.25 est donc inattendu et crée un véritable coup de théâtre :
« “Le Cerf ne pleura point.” »

Les pensées de ce nouveau personnage nous sont communiquées par le discours indirect
libre qui tend à le rendre plus proche et sympathique aux yeux du lecteur : « “comment eût-il
pu faire ? / Cette mort le vengeait : la Reine avait jadis / Étranglé sa femme et son fils.”».

B – Le fonctionnement de la rumeur à la Cour (v.28 à 38)

Le cerf refusant de jouer le jeu hypocrite des courtisans, il devient le bouc-émissaire de la


cour.

La Fontaine profite de ce passage pour montrer le fonctionnement de la rumeur :

– « le flatteur » transforme la phrase « “il ne pleura point” » en « “Et soutint qu’il l’avait vu
rire” » (v.29).

– Ce faux témoignage devient une vérité objective dans la bouche du Roi : « “Tu ris” »
(v.34).

La Cour est ainsi un lieu où le vrai se transforme en faux.

Le cerf est placé dans une position de bouc-émissaire tragique.

4/6
Il est le centre de la violence comme le montre le champ lexical de la vengeance: «
“ongles », « Loups », « Vengez », « immolez », « Ce traître” ».

Le champ lexical religieux permet la parodie d’un procès dont la violence est justifiée par
des termes sacrés : « “profanes », « sacrés », « immolez », « mânes” ».

C – La défense du cerf (v.39 à 51)

Dans un nouveau coup de théâtre, le cerf parvient à se défendre grâce à un discours


rhétorique.

Il capte d’abord l’attention du Roi par l’apostrophe respectueuse « Sire ».

Puis il utilise les termes abstraits et philosophiques le « temps » et « douleur » qui lui
donnent un statut de sage.

La périphrase « “Votre digne moitié” » fait du cerf un maître-flatteur.

Il invente ensuite une mise en scène imaginaire comme l’indique le champ lexical du
merveilleux : “«fleurs », « apparue », « reconnue », « les Dieux », « Champs Élyséens », «
saints », « Miracle », « Apothéose », « songes” »

La magie de son récit opère et tout se retourne soudain en sa faveur comme le montre la
locution adverbiale « “A peine on eut ouï la chose” ».

La rapidité du retournement de situation souligne les caprices de la fortune et l’instabilité


de la cour.

Les hyperboles prononcées en chœur au discours direct « “Miracle, apothéose !” »


mettent en valeur la théâtralité artificielle de cet univers.

Le cri du vers 50 (« “se mit à crier” ») fait d’ailleurs écho aux cris de douleur du vers 12
(« “Le Prince aux cris ‘abandonna”« ) : il n’y a aucune émotion derrière ce cri qui ne sert que
la flatterie, au gré des circonstances.

D – Une morale sur la fragilisation du pouvoir royal (v.52 à 55)

La Fontaine passe enfin à la véritable morale de son histoire des vers 52 à 55.

La deuxième personne du pluriel ainsi que l’impératif («“Amusez les Rois », « Flattez-les
», « payez-les », « vous serez” ») met plaisamment le lecteur dans la position du flatteur en
lui proposant un « mode d’emploi » de la flatterie, afin d’en dresser efficacement la satire.

Mais plus gravement, La Fontaine suggère que la flatterie inverse le rapport de pouvoir :
Le Roi devient le sujet de ses sujets « “Ils goberont l’appât” ».

5/6
Le flatteur met donc en danger l’ordre social par ses jeux d’influence.

Exemple de conclusion de lecture linéaire, « Les obsèques de la


lionne » :
« Les obsèques de la Lionne » sont une fable plaisante dont les coups de théâtre ne
peuvent que plaire au lecteur.

La Fontaine y dresse non seulement une satire des courtisans mais montre aussi la
fragilisation du pouvoir royal par la flatterie. [Synthèse de l’analyse]

La Fontaine se place ainsi dans le sillage des moralistes comme La Bruyère qui, fidèles à
l’exigence classique, visent à plaire et instruire. [Ouverture sur l’histoire littéraire]

Tu t’entraînes à la lecture linéaire ? Regarde aussi :


♦ Introduction de la lecture linéaire
♦ Conclusion de la lecture linéaire
♦ Développement de la lecture linéaire
♦ Réussir la lecture à voix haute à l’oral de français
♦ 30 minutes de préparation à l’oral : gestion du temps

6/6

Vous aimerez peut-être aussi