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Gestion juridique, fiscale et sociale

La diversité des contrats


Les contrats de l’entreprise avec ses clients

Cas Madame K- Corrigé

Rappel des faits


Madame K. récemment installée en France et qui maîtrise mal le français vient d’acheter une
encyclopédie en 22 volumes à un démarcheur à domicile qui l’a convaincue que cet ouvrage permettrait à
ses enfants de progresser plus rapidement en français et dans leurs études.
Le montant total de l’achat s’élève à 3150 euros et madame K. a immédiatement réglé par chèque 40%
du prix au vendeur. Le chèque a été encaissé dès le lendemain.

Problème de droit
Cette affaire pose le problème de la législation applicable au démarchage à domicile.

Règles applicables
La loi du 17 mars 2014 a remanié le régime juridique du démarchage à domicile aujourd’hui intégré dans
la notion plus vaste de vente hors établissement, pratique consistant pour un professionnel à solliciter un
consommateur afin de lui faire conclure un contrat de vente ou de prestation de service.

Du fait des risques qui s’attachent aux ventes hors établissement, de nombreuses obligations s’imposent
au professionnel afin d’assurer la protection des consommateurs :

 Le démarcheur doit pouvoir présenter une carte indiquant son identité, sa qualité de démarcheur et
l’identification de son employeur s’il est salarié.

 Avant la conclusion du contrat, le professionnel doit communiquer par écrit au consommateur :

 Les informations précontractuelles habituelles : objet de la vente, caractéristiques


essentielles du produit ou du service, prix, délai de livraison ou d’exécution, identité et
coordonnées du professionnel, garantie légale et éventuellement contractuelle.

 Les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation ainsi qu’un
formulaire type de rétractation.

En cas de litige, c’est au professionnel de rapporter la preuve qu’il a bien fourni au consommateur les
informations précontractuelles obligatoires.

 Toute vente conclue hors établissement doit donner lieu à la rédaction d’un contrat signé par le
professionnel et le consommateur, reprenant l’ensemble des informations précontractuelles et
confirmant l’engagement de chacun.
Un exemplaire est obligatoirement remis au client accompagné du formulaire type de rétractation.

 Le client dispose en effet d’un délai de rétractation de quatorze jours calendaires pendant lequel il
peut renoncer à son engagement librement, sans motif ni pénalité. Toute clause du contrat prévoyant
la renonciation du consommateur à son droit de rétractation est nulle.

Le point de départ du délai de rétraction est fixé au jour de la conclusion du contrat s’il s’agit d’une
prestation de service, et au jour de la réception du bien pour les contrats de vente.
Cependant, lorsqu’un contrat de prestation de service inclut la livraison d’un bien, le point de départ
est également fixé au jour de la réception du bien.

Lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au consommateur, le
délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l'expiration du délai initial.

 Le vendeur ne peut percevoir aucun paiement de la part du consommateur avant l'expiration d'un
délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement, pas même un acompte
ou des arrhes.

© COMPTALIA – Reproduction interdite Cas Madame K- Corrigé 1/2


Gestion juridique, fiscale et sociale

 Le code de la consommation prévoit une amende administrative en cas de manquement à l’obligation


d’information précontractuelle, et des sanctions pénales (150 000 euros et deux ans) notamment en
cas de non-respect des règles relatives à la rédaction du contrat, au paiement et au délai de
rétractation.

Application au cas
En l’absence de renseignements suffisants, on considérera que les deux premières exigences de la loi ont
été respectées, le démarcheur ayant présenté une carte et rédigé un contrat avec madame K.

En revanche, une règle essentielle a été violée puisque le démarcheur a immédiatement encaissé une
fraction du prix, sans attendre l’expiration du délai de sept jours.

En conséquence, deux hypothèses peuvent se présenter :

 Si le délai de quatorze jours à compter de la livraison n’est pas écoulé, madame K. peut encore faire
jouer sa faculté de rétractation en renvoyant le bordereau figurant dans le contrat qui lui a été remis
ou, à défaut de bordereau, en adressant au vendeur une lettre indiquant sa volonté de renoncer au
contrat.

Dans les deux cas, envoi du bordereau ou d’une lettre, il faudra prévoir un courrier recommandé avec
accusé de réception afin d’assurer la preuve de l’envoi.

 Si le délai de quatorze jours a expiré, madame K. ne peut plus exercer sa faculté de rétractation.
Cependant, la vente ayant été faite en violation des règles légales relatives au paiement du prix,
règles qui sont sanctionnées pénalement, elle peut poursuivre pénalement l’auteur des faits et
demander la restitution intégrale de l’acompte versé ainsi que le versement de dommages et intérêts
en cas de préjudice.

Dans l’hypothèse où le démarcheur n’aurait pas fourni à madame K. les informations relatives au délai de
rétractation, celui-ci serait prolongé de douze mois supplémentaires pendant lesquels madame K.
pourrait revenir sur son engagement.

Remarque
Le sujet mentionne que madame K. est d’origine étrangère, qu’elle est installée en France depuis peu de
temps et qu’elle maîtrise mal la langue française.
Ces circonstances particulières permettent de se demander si la situation exposée n’est pas constitutive
d’un délit d’abus de faiblesse.

Cette infraction consiste en effet à abuser de la faiblesse ou de l’ignorance d’une personne


particulièrement vulnérable pour la contraindre à conclure un contrat.
L’abus de faiblesse peut intervenir dans plusieurs circonstances parmi lesquelles figure le démarchage à
domicile.

L’infraction est constituée lorsque plusieurs éléments constitutifs sont réunis :

 Un état de faiblesse ou d’ignorance de la victime ; les tribunaux ont admis à cet égard qu’une
personne étrangère ne maîtrisant pas le français est une personne vulnérable, susceptible d’être
victime d’un abus de faiblesse.

 La mauvaise foi du vendeur qui, conscient de la vulnérabilité de son client et de son incapacité à
mesurer la portée de ses engagements, en profite pour l’abuser et le forcer à s’engager.
L’énoncé incite à penser que c’est bien ce qui s’est passé dans cette affaire.

 La souscription du contrat par la victime, ce qui est le cas en l’espèce.

On peut donc en conclure que, dans cette affaire, il y a vraisemblablement eu, non seulement infraction à
la législation sur la vente hors établissement, mais également délit d’abus de faiblesse.

Le vendeur qui a démarché madame K. pourra donc être poursuivi pénalement et sanctionné par une
amende de 375 000 € et une peine d’emprisonnement de 3 ans.

© COMPTALIA – Reproduction interdite Cas Madame K- Corrigé 2/2

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