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Le Baroque (1600-1750)

L’âge tonal

Après l’apogée de la polyphonie, l’époque baroque abandonne la modalité et


adopte définitivement la tonalité. L’harmonie remplace le contrepoint.
Alors que la Renaissance avait porté à un haut degré de perfection le chant
polyphonique, le Baroque revient à une forme de monodie avec la mélodie
accompagnée (par une basse continue : clavecin + viole de gambe ou
violoncelle).
Tout au long de ces années, c’est en Italie que vont s’inventer tous les genres
vocaux et instrumentaux importants, mais la France - qui supporte mal de
passer au 2d plan - va se définir sous Louis XIV une esthétique musicale forte et
durable.

Le XVIIe siècle

1. La musique dramatique

L’opéra nait au XVIIe siècle, mais résulte d’une lente évolution car ses divers
éléments existent en germe depuis le Moyen-âge (les Mystères, la Pastorale et
le Madrigal en Italie, le Villancico en Espagne…). Cependant c’est la découverte
du style musical dramatique et de l’harmonie qui vont permettre son
développement. Il prendra par la suite une place primordiale, pour plusieurs
siècles.

a) L’opéra en Italie

- écoles florentine :
A Florence, autours des comtes Bardi et Corsi, se réunissent poètes et
musiciens : ils vont donner naissance à l’opéra.
Ils inventent la musique représentative, c’est-à-dire dramatique. Ainsi Caccini
(1545-1618) et Peri (1561-1633), qui renoncent à la polyphonie, fixent le
nouveau style récitatif (importance du texte, que la mélodie doit épouser)
Les 1ers opéras : « Dafné » en 1594 et « Euridice » en 1600, de Peri.
L’opéra apparait alors comme un drame musical entièrement chanté, avec des
danse, des airs, des récitatifs, des chœurs, et accompagné par un orchestre.

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- Ecole vénitienne :
C’est Claudio Monteverdi (1568-1643) qui va perfectionner l’opéra et lui
donner ses 1ères lettres de noblesse, en lui assurant un succès définitif.
Il compose : « Orfeo » (1607), « Ariana » (1608), « Le retour d’Ulysse » (1641)
et « Le couronnement de Poppée » (1643). C’est le fondateur de la tragédie
musicale historique.
Son élève Cavalli (1602-1676) écrit également des opéras.
Une vie musicale intense règne à Venise.
Ecoute : « Orfeo » de Monteverdi (p1 + 3 + 4)
- Ecole napolitaine :
Alessandro Scarlatti (1659-1736) compose 125 opéras.
Pergolèse (1710-1736) exerce également une influence sur l’opéra comique.

b) L’opéra en France

Depuis le XVe siècle, la France privilégie les fêtes luxueuses et les spectacles
brillants, avec des danses intercalées (CF le goût pour la danse de Louis XIV).
Sous l’influence des guerres d’Italie (auxquelles prennent part plusieurs rois de
France), ce genre évolue et s’enrichit : il devient dramatique et s’exprime par
des textes chantés accompagnés par un orchestre, entrecoupé de danses qui
participent au spectacle, et avec des mises en scène somptueuses et des
machines (décors animés). Cette forme musicale en partie dansé prend le nom
de ballet de cour (sorte d’opéra-ballet ou comédie-ballet).
Lully (1632-1687) :
Il arrive en France en 1643, et est naturalisé français en1661. Il est violoniste et
compositeur. Il devient très vite le 1er compositeur de la cour de Louis XIV. Il
compose en moyenne un opéra par an, et aura une grande autorité sur les
autres musiciens de la cour.
Parmi ses opéras : « le bourgeois gentilhomme » en collaboration avec Molière,
« Alceste » (1674) et « Thésée » (1675) … sur des poèmes de Quinault.
Il est considéré comme le véritable créateur de l’opéra français.
Ecoute : « Acis et Galatée » Lully (p1 + 3 + 9)
c) L’opéra en Angleterre

A cette époque l’Angleterre possède le plus grand musicien de toute son


histoire en la personne d’Henry Purcell (1658-1695). Sa musique est influencée
par les italiens auxquels il emprunte l’usage de la basse obstinée, et par les
œuvres chorales des français, mais il garde néanmoins sa personnalité.
« Didon et Enée » est son œuvre la plus connue.
Ecoute : « King Arthur » (p3)

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d) L’opéra en Allemagne

Les compositeurs allemands accordent peu d’intérêt à l’opéra italien qui


pourtant rayonne dans toute l’Europe. Schütz tentera néanmoins d’en
composer un, mais cette tentative restera sans lendemain. Après 1678
seulement l’opéra devient à Hambourg un genre national, en langue
allemande, mais il s’apparente plus à un divertissement qu’à un spectacle
véritablement artistique.

2. La musique religieuse

A côté de la musique liturgique très liée au culte, il existe une musique d’ordre
spirituelle, intermédiaire entre le sacré et le profane, qui trouve sa place au
concert.

a) L’oratorio en Italie

Le Florentin Philippe de Neri (fondateur de l’ordre des Oratoriens) avait


l’habitude de faire chanter dans sa communauté des hymnes nommées Laudi
Spirituali (composés dans le style polyphonique par Animuccia puis par
Palestrina). Ces cantiques prennent peu à peu une forme dialoguées,
deviennent narratifs et dramatiques, et le récitatif apparait. Ils comprennent
bientôt tous les éléments de l’opéra, mais sans mise en scène ni costume, et
s’écrivent en latin ou en langue vulgaire (sur un texte religieux). Ce genre
musical prend le nom d’oratorio. Comme la tragédie lyrique, son origine
semble également remonter aux Mystères et aux représentations sacrées du
Moyen Age.
Le 1er opéra religieux - la Rappresentazione di Anima e di Corpo de Emilio de
Cavalieri - est donné en 1600 à Rome (dans la chapelle des Oratoriens).
Dès ses débuts, l’oratorio connait un grand succès en Italie. Carissimi (1605-
1674) et A. Scarlatti (1659-1725) en écriront quelques uns.
Ecoute : A.Scarlatti (CD Diapason n° 411, p2) + « Stabat Mater » Vivaldi
b) L’oratorio et la cantate en Allemagne

De dimensions plus restreintes que l’oratorio, la Cantate met en relief la


virtuosité des chanteurs, il comprend des airs pour voix seule, des ensembles et
des récitatifs.
Heinrich Schütz (1585-1672), formé à Venise puis maître de chapelle à Dresde,
écrit des Psaumes, des Concerts Spirituels, des Symphonies Sacrées et des

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Passions. Il fait la fusion entre la tradition allemande et les conceptions
italiennes de l’oratorio.
En Allemagne du Nord, Buxtehude (1637-1707) écrit de nombreuses cantates,
et utilise le choral comme ferment de ses œuvres sacrées.
Ecoute : « Passion selon St Mathieu » Bach (p1)
c) Le motet en France

Les compositeurs français de musique sacrée écrivent des Motet, genre


apparenté à la cantate, mais plus réduit dans ses proportions. Il y a Dumont
(1610-1684), Lalande (1657-1726), Marc-Antoine Charpentier (1634-1704),
Campra (1660-1744), et bien sûr le grand Lully.
Ecoute : Lully (CD “grands motets”), p1

Le XVIIIe siècle

Le XVIIIe siècle voit l’épanouissement de la musique baroque, qui atteint son


plus haut degré de perfection. C’est aussi l’apogée de la basse continue. La
musique se joue dans les salons, mais on va voir apparaitre des concerts
payants, et donc la naissance du « public ». Le piano-forte apparait vers 1711,
mais il n’a pas encore les qualités qui feront son succès (il ne supplantera le
clavecin que dans la 2de moitié du XVIIIe siècle).

1. La musique dramatique en France

a) L’opéra

Après Lully (qui a « étouffé » tous les autres musiciens de l’époque), quelques
compositeurs maintiennent une production lyrique, jusqu’à l’arrivée de
Rameau.
Jean-Philippe Rameau (1683-1764) :
Jusqu’à l’âge de 50 ans, il va composer exclusivement des œuvres
instrumentales, et se faire connaitre comme théoricien (il écrit plusieurs traités
de musique, dont le célèbre Traité de l’Harmonie réduite à ses Principes
naturels en 1722).
Dès 1733, il écrit de nombreuses œuvres lyriques : des tragédies (Hippolyte et
Aricie en 1733, Castor et Pollux en 1737), des pastorales héroïques, des

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comédies lyriques (Platée en1745), des opéras-ballets (Les Indes galantes en
1735), des ballets.
Ecoute : « Les Indes Galantes » Rameau (« air pour les esclaves africains»)
b) L’opéra-comique en France et l’opéra bouffe en Italie

D’origine populaire, l’opéra-comique naît à Paris au XVIIIe siècle, dans les foires
Saint-Laurent et Saint-Germain : les spectacles forains, caractérisés par
l’alternance du parlé et du chanté, comprennent des parodies d’opéras et des
vaudevilles.
Bientôt (dès 1716), le Théâtre de la Foire peut représenter alors des pièces
comportant des chants, des danses, des parties instrumentales : ainsi naît
l’opéra-comique.

En Italie vers la même époque, l’usage veut que des intermèdes comiques
s’intercalent entre les actes de l’opéra, rompant ainsi la solennité du spectacle.
Bientôt ces intermèdes, représentés seuls, se développent et constituent
l’opéra bouffe : Alessandro Scarlatti (1659-1725), Francesco Durante (1684-
1755) et Pergolèse (1710-1736) en donnent une forme définitive.
L’opera buffa se différencie de l’opera seria par le choix des sujets très simple,
par le petit nombre de personnages (3 ou 4, dont un bouffon), et par le style
plein de vie et d’entrain. Contrairement à l’opéra-comique, l’opera buffa
n’admet pas le parlé.
La représentation à l’Opéra, en 1752, de la Servante Maîtresse de Pergolèse,
jouée par une troupe italienne, obtient un succès triomphal et déclenche la
Querelle des Bouffons, qui voit s’opposer les partisans de la musique italienne
et ceux de la musique française.

2. L’art allemand

A la même époque, l’Allemagne austère et rigide apporte tous ces soins à la


musique religieuse. Les œuvres de musique profane elles-mêmes, possèdent ce
sérieux et ce génie de la construction qui caractérise l’esprit germanique.
L’école d’orgue allemande est très importante à cette époque.

a) Les précurseurs de Bach


Ecoute : Buxtéhude (CD J.P. Lecaudey)
Après Schütz, une série de compositeurs plus ou moins originaux apporte sa
contribution à la formation d’un art allemand : Samuel Scheidt (1553-1654),
Dietrich Buxtehude (1637-1707), Johann Pachelbel (1653-1706), entre autre.

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b) Jean-Sébastien Bach (1685-1750)

Il est issu d’une lignée de musiciens remontant au XVIe siècle ! De son vivant, il
sera plus connu comme improvisateur de fugue et expert en orgue que comme
compositeur…
L’œuvre de Bach illustre tous les genres en honneur à l’époque, tant dans le
domaine instrumental que religieux. Elle synthétise de façon remarquable les
ressources de la polyphonie et les procédés du style lyrique italien. Si Bach
n’innove guère, il donne cependant à chaque forme une perfection et une
ampleur jamais atteinte avant lui.
Son œuvre est immense :
- Œuvres vocales et religieuses : cantates d’église et cantates profanes,
des motets, 4 Passions, le Magnificat, la messe en si min…
- Œuvres instrumentales : beaucoup de pièces pour orgue (préludes,
toccatas, fantaisies, fugue), pour clavecin (suites, inventions, le
« Clavecin bien tempéré »), pour instrument soliste (clavecin, violon,
violoncelle, luth, flûte), pour orchestre (suites et concertos), des sonates,
des chorals…
Ecoute : 1 chorale (CD Lecaudey), une fugue, concertos brandebourgeois
c) George-Frédéric Haendel (1685-1759)

Après avoir fait ses études en Italie, il se fixe à Londres en 1712, et se fait
naturaliser anglais en 1726. Il devient aveugle à la fin de sa vie (comme Bach).
Durant toute la première partie de sa vie, il se consacre à l’opéra. Il en écrit 40,
tous dans le style italien (Giulio Cesare en 1724, Riccardo I en 1727, Ariane en
1734…)
Puis il abandonne l’opéra et se tourne vers l’oratorio. De 1732 à 1751 il en
compose 32 (dont Israël en Egypte en 1739, et le célèbre Le Messie en 1742)
Ces oratorios sont plus des « épopées dramatiques » que des œuvres
religieuse.
Moins importante que son œuvre dramatique et religieuse, sa contribution à la
musique instrumentale n’en est pas moins sensible : Sonates et Trios pour
divers instruments, Concerti grossi pour orchestre, Suites et Fugue pour
clavecin, Concertos pour orgue et orchestre.
Ecoute : « Le Messie » (Chœur « alléluia ! ») ou Water music
d) Contemporains et successeurs de Bach et Haendel

Il faut également citer Johann Mattheson (1681-1764), Telemann (1681-1767),


et 4 des fils de J.S. Bach : Wilhelm Friedmann (1710-1784), Karl Philipp Emanuel
(1714-1788), Johann Christoph (1732-1788) et Johann Christian (1735-1782).

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La musique instrumentale

Parallèlement à l’art dramatique se manifeste dès le début du XVIIe siècle un


renouveau de la musique instrumentale. La basse continue apparait et sert de
base à l’accompagnement de toutes les musiques. De nouveaux genres et
formes sont créés.

1. La musique instrumentale

a) Les violons et les violes

En Italie le violon est roi, il se perfectionne grâce aux grands luthiers de la ville
de Crémone (Amati et ses 2 élèves Guarnerius et Stradivarius). Les
compositeurs italiens tels que Arcangelo Corelli (1653-1713) et Antonio Vivaldi
(1678-1743) lui donneront ses lettres de noblesse.
En France et en Angleterre, on préfère la sonorité plus douce des violes.
Marin Marais (1656-1728), Jean de Sainte-Colombe (1640-1700) et Antoine
Forqueray (1672-1745) sont les interprètes et compositeurs français les plus
connu.
Ecoute : « L’uniforme » M.Marais
b) Le luth (et ses dérivés : archiluth, théorbe et chitarrone)

Il perd peu à peu de sa suprématie au profit du clavecin qui prend la 1ère place.
En France : Robert de Visée (luthiste de Louis XIV)
En Allemagne : Sylvius Leopold Weiss, J.S. Bach
En Italie : Johannes Hieronymus Kapsberger (d’origine allemande)
En Angleterre : John Dowland
Ecoute : Kapsberger
c) Les claviers (orgue et clavecin)

Il faut noter qu’à cette époque, la littérature d’orgue ne se distingue pas


toujours de celle pour clavecin, les œuvres étant souvent jouée indifféremment
sur l’un ou l’autre des instruments. L’orgue devient uniquement un instrument
d’église (le clavecin y est proscrit).
En Allemagne (il y a une importante école d’orgue) : Sweelinck (1562-1643),
Buxtehude, Pachelbel, Haendel (qui fera carrière en Angleterre), Bach.
En Italie : Frescobaldi (1583-1643), A. Scarlatti.
En Angleterre : Locke, Blow et Purcell.

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En France : Titelouze, Chambonnières, Grigny, Les Couperin père et fils,
Rameau.
En Espagne : d’origine italienne, Domenico Scarlatti (1685-1757) et ses 555
sonates.
Le piano forte apparait vers 1711, mais mettra du temps à supplanter le
clavecin.
Ecoute : le clavecin (Mr Tomkins, Scarlatti et F.Couperin), l’orgue (Bach)
d) Les autres instruments

Les flutes (à bec et traversière, qui sont en bois), le cor, le hautbois et la harpe.
La clarinette apparait à la fin du XVIIIe siècle.
Ecoute : Bach sonate pour violoncelle

2. La Basse continue

La basse continue (ou continuo) a été inventée pour accompagner la mélodie


(chant ou instrument). Elle est omniprésente dans toute la musique, même
quand elle n’est pas spécifiée.
Il s’agit d’un duo d’instrument : une basse (viole de gambe ou violoncelle) et un
clavecin (quelques fois le luth).
Son rôle est donc d’accompagner la mélodie, et de réaliser l’harmonie et la
basse. C’est l’ossature et le pilier de toute musique vocale et instrumentale.

3. Les formes instrumentales

L’époque baroque voit naître plusieurs genres et formes qui seront utilisés dans
la musique instrumentale.

a) La fugue

Issue de l’imitation et du canon, c’est une parfaite incarnation de l’art


polyphonique. Bach est celui qui ira le plus loin dans cette forme. La fugue sera
associée à la musique religieuse.
Ecoute : Bach « l’offrande musicale », « l’art de la fugue » (contrapunctus 1)
b) La suite

Transcription instrumentale des ouvres vocales du Moyen Age, la suite se


présente comme une succession de danses (telles que la courante, la pavane, la
gaillarde, le menuet, la chaconne, la sarabande, l’allemande, la gigue…), en

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alternance de mouvement vif et lent. La structure de ces danses est binaire
(AABB). La suite disparait vers le milieu du XVIIIe siècle, avec l’arrivée de la
sonate bithématique.

c) La sonate

Monothématique durant la 1ère moitié du XVIIIe siècle, elle ne se différencie


guère de la suite (elle en garde l’alternance des morceaux, pour lequel une
indication de mouvement se substitue dans le titre au nom de la danse).
Corelli (1653-1713) est le grand compositeur de sonate en duo ou en trio (2
violons + basse), et il influencera tous les autres.

b) Le concerto

Les italiens vont inventer et fixer dans sa forme le concerto et le concerto


grosso : Corelli et surtout Vivaldi, qui lui donnera ses lettres de noblesses.
Le concerto est destiné à mettre en valeur la virtuosité d’un seul soliste,
dialoguant avec l’orchestre.
Le concerto grosso : c’est un groupe de soliste (le concertino) qui dialogue avec
l’orchestre.
Ecoute : un concerto de Vivaldi, ou concerto brandebourgeois de Bach (n°3,
BWV 1048, allegro)
c) La symphonie

A cette époque, la symphonie ou sinfonia est une forme assez mal définie.
C’est une sorte de sonate pour orchestre ou d’ouverture à l’italienne. C’est en
général une pièce pour orchestre en un ou plusieurs mouvements.

d) L’ouverture

C’est une préface orchestrale d’un ouvrage lyrique (dès la naissance de


l’opéra). Elle se présente sous 2 aspects : ouverture à l’italienne (en 3 parties :
vif, lent, vif), et ouverture à la française (en 3 parties : lent, vif, lent – soit le
contraire de l’ouverture à l’italienne !)

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