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Analyse de Texte n°1 - Les Contemplations : “Elle était déchaussée”

Introduction :

Le début du XIXème siècle a été marqué par un mouvement littéraire nommé


Romantisme, qui se caractérise par l’expression du moi et des sentiments. Le recueil de
poèmes de Victor Hugo “Les Contemplations” en fait partie et est une autobiographie, il
l’explique lui-même dans la préface en expliquant que “25 années sont dans ces deux
volumes”, puisque son œuvre est divisée en 2 parties. On remarque que ce poème est daté
de la jeunesse du poète alors qu’il a été écrit le 16 Avril 1853, c’est un poème d’exil auquel il
confère donc une date fictive dans le but d’en faire un souvenir de jeunesse. Dans ce
poème, Victor Hugo parle de sa rencontre avec une inconnue pour qui il a un coup de
foudre.
Nous allons tenter de savoir comment Victor Hugo parvient-il à idéaliser la rencontre
amoureuse dans ce récit.
Pour cela, nous verrons dans un premier temps le coup de foudre du poète du vers 1
à 3, puis nous nous intéresserons à l’invitation amoureuse du vers 4 à 13, et enfin nous
étudierons la réponse de la jeune femme lors des 3 derniers vers.

1ère Partie : Le Coup de foudre :

Dès le premier vers, on observe que la femme est décrite comme sauvage et
négligée dans sa tenue, cela est mis en valeur par un parallelisme avec deux hémistiches
ayant la même structure grammaticale et la même sonorité avec une introduction du champ
lexical de la négligence, caractéristisé par les termes “déchaussée” et “décoiffée”, cela
exprime déjà une sorte de mystère chez la femme.

On observe également que l’auteur n’introduit pas son poème, il n’y a pas de description du
cadre spatio-temporel, on assiste à un début “in medias res”.

Dans la lignée de la description du personnage, on peut voir une première évocation rapide
du cadre avec le terme “joncs penchants”, Victor Hugo suggère donc un paysage au bord de
l’eau.

Dans le vers suivant, Victor Hugo parle de lui, on a donc une rupture dans la première
strophe qui n’avait pour l’instant décrit que le personnage féminin, cet effet de rupture se
caractérise plus concrètement avec un remplacement de la troisième personne par la
première. Il se met en scène comme un promeneur ce qui permet de construire un début de
récit absent jusque là.

Le poète vit une rencontre qu’il perçoit comme extraordinaire, il n’est pas vraiment sûr de ce
qu’il a vu, je cite : “Moi qui passais par là, je crus voir une fée”, il utilise un modalisateur,
“crus voir”, pour montrer son étonnement face à cette apparition et introduit le champ lexical
du surnaturel pour décrire la femme qu’il voit, illa considère donc comme un être fantastique
et irréel.
Ainsi, Victor Hugo idéalise dès le début la femme rencontrée en la représentant comme une
apparition surnaturelle, une femme mystérieuse, sans identité et non conventionelle.

2ème partie : L’invitation amoureuse :

A la suite de sa rencontre avec la jeune femme, le poète met en avant sa proximité


avec elle en lui adressant la parole, en lui demandant : “Veux tu t’en venir dans les
champs ?” On relève dans cette demande une allitération en “t” qui montre un tutoiement
inattendu de la part de l’auteur. Cette proximité est d’autant plus accentuée avec le
rapprochement entre “je” et “elle” qui étaient jusque là séparés.

On assiste ensuite au vers 5 à un échange entre les deux personnages qui se fait
principalement par le regard puisque la jeune fille ne répond pas à la demande du poète. Ce
dernier met d’ailleurs en avant son regard avec l’adjectif “suprême” et avec un polyptote qui
accentue la beauté du regard de l’inconnue. C’est également le cas au vers suivant dans
lequel Victor Hugo montre à quel point il est fasciné par sa beauté, le terme est bien sûr
abstrait puisque l’on a aucune indication physique, cela renforce le caractère mystérieux
dela jeune femme.

Son silence entraîne une deuxième invitation du poète au vers 7, cette demande est plus
précise et moins ambigu, la périphrase “c’est le mois où l’on aime” qui désigne le mois de
Juin montre des intentions d’intimité du poète ainsi que le complément de lieu “sous les
arbres profonds” qui évoque un éventuel rapprochement entre les deux personnages.

On remarque également que toute la scène du poème dégage une grande simplicité, rien
n’est artificiel, et le cadre naturel semble accueillant. La seconde demande du poète à la
jeune fille d’une promenade constitue l’enjeu de l’action de ce petit récit car sa réponse va
constituer le dénouement. Le lecteur attend la réponse à cette question et une sorte
d’attente se met en place car la jeune femme reste silencieuse, on peut penser qu’elle se fait
désirer.

Un début d’action semble apparaître dans la strophe suivante, l’inconnue essuie ses pieds
ce qui crée un suspense pour le lecteur qui est également accentué par l’antithèse du vers
11 entre “folâtre” et “pensive”.

On peut s’attendre à un début de dénouement de la part de l’auteur, mais ce n’est pas le


cas, Victor Hugo ne parle même plus de lui ni de la jeune femme, il se met à décrire le
paysage ce qui marque une sorte de pause dans le récit. Cette description a tout de même
un lien avec les sentiments des personnages puisque le poète décrit un cadre naturel
accueillant en corrélation avec l’amour de ces personnages. En effet, la nature est souvent
utilisée par Victor Hugo pour mettre en avant le sentiment amoureux.

La description du cadre souligne à la fois le silence total de la scène puisque l’on entend les
oiseaux chanter ainsi que la tendresse ressentie par le poète qui est mise en avant par la
personnification de l’eau qui devient presque amoureuse du rivage et qui vient le caresser.
Dans cette deuxième partie, on a donc une invitation amoureuse en harmonie avec un cadre
naturel qui ne paraît pas forcément réaliste, cette rencontre amoureuse est même idéalisée.
On a également la forte impression que le coup de foudre du poète est réciproque.

3ème Partie : La réponse de la jeune femme :

Le vers 14 provoque un effet de surprise puisque le récit reprend directement après la


description du cadre et parce qu’une ellipse temporelle a été introduite par le poète. On a
donc l’impression qu’il manque un petit morceau de récit. Notre regard est porté sur une
action déjà commencée. Ce procédé surprend le lecteur et précipite le dénouement qui va
être très court puisqu’il ne dure que 3 vers.

On a également une nouvelle allusion à la nature avec le terme “roseaux verts”, synonyme
de “joncs”, qui avait déjà été employé un peu plus tôt dans le poème. On a encore une fois
un lien qui est fait entre l’inconnue et la nature ce qui représente une référence
mythologique aux divinités, notamment aux nymphes, qui sont des divinités liées à l’eau.

La jeune femme se dirige vers le poète sans aucune parole, signe de détermination, il n’y a
pas d’hésitation dans sa décision. On remarque que les 3 vers s'enchaînent en une phrase
très longue, on a là un enjambement. Cet enjambement mime le mouvement de la jeune
femme vers le poète tandis que l’emploi d’adjectifs mélioratifs permet d’introduire l’idée du
bonheur qui semble liée à la personnalité de la jeune fille qui est décrite comme insouciante
et sauvage, elle évoque un sentiment de liberté et d’indépendance.

Conclusion :

On peut donc dire que cette scène de rencontre amoureuse a quelque chose d'irréel,
d’onirique, on a l’impression d’être dans un rêve. Le mystère qui entoure la jeune femme, sa
comparaison avec une fée, et soncomportement renvoient à un rêve, puisqu’elle n’a pas
peur, ne montre pas de méfiance, et ne parle pas. Cet amour instantané semble donc
irréel.Ainsi, Victor Hugo idéalise le personnage féminin et la situation amoureuse en
provoquant cet effet de mystère

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