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Biotransformation

I. Introduction
L’organisme assure la biotransformation d’un grand nombre de substances endogènes
(hormones stéroïdes, acétylcholine, noradrénaline …) et exogènes (médicaments…)

Ces molécules subissent des modifications sur leurs fonctions chimiques lors de leur passage
dans les organes et tissus

II. Définition
La biotransformation est une conversion généralement de nature enzymatique de la
molécule mère en métabolites et dérivés conjugués plus hydrosolubles et plus polaires donc
plus facilement excrétés par le rein
La biotransformation est en général un processus de détoxification, mais dans certains cas
les métabolites peuvent être actifs (bioactivation) voir toxiques

III. Localisation
1. Organes et tissus
La biotransformation a lieu dans tous les tissus contenant des enzymes de biotransformation

 Le foie+++ : Principal site de biotransformation


 L’intestin : Deuxième site de biotransformation après le foie
 Le poumon : Concentration en enzymes largement inférieure à celle du foie
 Le rein
 Le cerveau, la peau, la moelle osseuse …

2. Localisations cellulaires
Réactions de phase I essentiellement au niveau du réticulum endoplasmique (RE)
Réaction de phase II principalement dans le cytosol
Autres : lysosomes (protéases), mitochondries (monoamine oxydase) …
IV. Etapes

Phase I Phase II
Glucurono
Oxydation conjugaiso
n

Sulfoconjug
Réduction aison

Hydrolyse Autres

1. Réactions de phase I
C’est la conversion de la molécule mère en métabolites plus polaires par ajout ou
démasquage de groupes fonctionnels (OH, COOH, NH2, …)

1.1. Réactions d’oxydation


C’est quantitativement la réaction la plus importante de la phase I :

 Oxydation microsomale :
Les systèmes enzymatiques sont situés sur la membrane du réticulum endoplasmique lisse.
- Mono-oxygénase à cytochrome P 450 ++:
Représente le système oxydatif le plus puissant de l’organisme
Elle est : Relative: un CYP métabolise plusieurs substrats différents.
Chevauchante: un substrat peut être métabolisé par plusieurs CYP

Structure :
C’est un complexe multienzymatique constitué de :
 Hémoprotéine (hème + protéine), l’hème constitué d’un noyau tétrapyrrolique
avec un atome de fer oxydé (Fe3+) à son centre
 L’apoprotéine à laquelle est fixé l’hème est de composition variable selon les
isoenzymes
 Une enzyme réductrice : la NADPH Cytochrome P450 réductase
 Phospholipide phosphatidylcholine qui permet la cohésion du complexe
Mécanisme d’action :

1. Le substrat réagit avec la forme oxydée du CYTP450 pour former un


complexe enzyme-substrat.
2. CYTP450 réductase accepte un électron (provenant du NADPH) qui
réduit le complexe oxydé CYTP450-substrat.
3. Complexe CYTP450-substrat sous forme réduite réagit alors avec
l’oxygène moléculaire
4. Un second électron du NADPH cédé par la même réductase
flavoprotéique pour former une espèce oxygénée activée.
5. Un atome d’oxygène est libéré sous forme d’H2O
6. Le second atome d’oxygène transféré au substrat qui est libéré sous
forme oxydée
7. L’enzyme du CYTP450 oxydée est régénérée.

Exemples de réactions catalysés par le CyP450 :


 Hydroxylation aliphatique:

Donne des alcools I ou II qui peuvent à leurs tour être oxydés en aldéhydes ; cétones et
acides carboxyliques.
Ex: n-hexane métabolisé en hexanol
 Hydroxylation aromatique :
Introduction d’un groupement OH sur un noyau aromatique simple, nitré ou halogéné.

Soit directe ou par formation d’un intermédiaire époxyde instable .

Directe :

Par époxydation :
Naphtaléne  naphtalène époxyde  1- naphtol et naphtalène1, 2-dihydrodiol

 N-hydroxylation :
Introduction d’un oxygène sur le groupement aminé de la molécule.

(méthémoglobinisant)

 Sulfoxydation :
Fixation d’un atome d’oxygène sur l’atome de soufre de la molécule.
Peut aboutir à des sulfoxydes(SO) ex : chlorpromazine
Ou à des sulfones (SO2) ex : Oméprazole

 Désalkylation :
l’azote  N-désalkylation, ex : diazépam  nordiazépam  oxazépame
l’oxygène  O-désalkylation, ex : codéine  morphine
le soufre  S-désalkylation, ex : 6-méthylmercaptopurine  6-mercaptopurine

 Désamination oxydative :

Remplacement d’une amine primaire par un oxygène


Ex : Amphétamine  phénylacétone

 Déshalogénation oxydative :
Remplacement d’un halogène par un oxygène
Ex : chloroforme  phosgène

 Désulfuration oxydative
Remplacement d’un atome de soufre par un atome d’oxygène
Ex : parathion  paraoxon

- Mono-oxygénase dépendant du FAD :


Les mono oxygénases à flavines est une famille d’enzymes microsomales impliquées dans
l’oxydation de composés aminés, soufrés et séléniés par exemples pesticides organophosphorés,
amines aliphatiques, amines aromatiques, sulfures, thio-urée.
- La fixation du substrat s’effectue après la réaction avec l’oxygène.

- Oxydation indépendante des micro-oxygénases : oxydation par la prostaglandine


synthase :
Ex : aflatoxine B1  aflatoxine B1 8,9 époxyde (puissant cancérigène)

 Oxydation non microsomale :


- Déshydrogénases :
 Alcool déshydrogénase : ADH
Alcool primaire  aldéhyde
Alcool secondaire  cétone

 Aldéhyde déshydrogénase : ALDH


Aldéhyde  acide carboxylique
- Monoamine-oxydase :

Enzyme localisée principalement sur les membranes externes des mitochondries du cerveau
Catalyse la désamination oxydative des monoamines primaires, secondaires et tertiaires en
aldéhydes

1.2. Réactions de réduction


 Réaction microsomale :
Réduction des composé nitrés et azoïques en amines
Ex : Nitrazepam réduit en amino nitrazepam
 Réaction non microsomale :
Réduction de doubles liaisons / Réduction de disulfures en thiols/ Réduction de sulfoxydes
1.3. Réactions d’hydrolyse
- D’ Estérases :
 Arylestérases : hydrolyse des esters aromatiques, ex : atropine  Tropan-3-ol
 Cholinestérases : hydrolyse de l’acétylcholine en choline et acide acétique
 Carboxyestérases : hydrolyse des esters aliphatiques
- D’ Amidases : hydrolyse des amides, ex : isoniazide

- D’ Epoxyde hydrolases : hydrolyse des epoxydes pour former un dihydro-diol

2. Réactions de phase II
Réactions de synthèse qui nécessite une source d’énergie apportée par l’ATP.
Greffage d’une substance endogène sur le xénobiotique lui-même et/ou avec son métabolite
La phase II est une phase de conjugaison qui aboutit à la formation de substances
conjuguées, plus hydrosolubles et facilement éliminées
2.1. Glucuroconjugaison :

Quantitativement c’est la plus importante voie de phase II


• L’enzyme : UDP-glucoronyl transférase ( UGT).
• Le composé endogène : Acide glucuronique.
• La forme active ( donneur): l’UDP-GA.
• UDPG transférase permet le transfert de l’acide glucoronique à partir de l’UDP-
GA sur le groupe accepteur du substrat (aglycone).
Acide UDP-glucuronique + aglycone —› p-glucuronide + UDP

- Concerne :
 Alcools aliphatiques ou aromatiques
 Phénols
 Acides carboxyliques
 Composés soufrés
 Amines
Ex : phénol + UDP-GA  Phénol glucuronide
- O-glucoronides : formés à partir des phénols, d’alcools, d’acides
carboxyliques et d’hydroxylamines.

- N-glucoronides : formés à partir de groupements aminés aromatiques


(ex : l’aniline), d’amides et de composés azotés hétérocycliques.

- S-glucoronides : formés à partir des thiols (thiophénol).

2.2. Sulfoconjugaison
Voie majeure
• L’enzyme : sulfotransférase
2-
• Le composé endogène : ions sulfates (SO4 )

• La forme active : phosphoadénosine- phosphosulfate (PAPS)


• Le Substrat: Les groupes fonctionnels nécessaires pour la formation de sulfates
sont les phénols, les alcools aliphatiques et les amines aromatiques, acides
carboxyliques.
Ex : p-nitro phénol  métabolite cancérigène

2.3. Acétylation

• L’Enzyme : N- Acétyl Transférase (NAT)


• Le composé endogène :-CO-CH3.
• Forme active : l’acétyle COA
• Substrat : amines, des hydrazines, des sulfonamides....

Ex : isoniazide  acétyl-isoniazide
2.4. Méthylation
Voie mineure

• L’enzyme : méthyl transférase (COMT ,TPMT)


• Le composé endogène : CH3.
• Forme active: la s-adénosyl méthionine(SAM).
• Substrat: substances à fonction alcool, phénol, amine, thiol…

2.5. Conjugaison aux acides aminés

• L’Enzyme :Aminoacide Transférase


• Le composé endogène :glycine, glutamine , taurine.
• Substrat : COOH , NH2
2.6. Conjugaison au glutathion
• L’enzyme : Glutathion-S-transférase(GST).
• Le composé endogène : Glutathion= glutamine+ cystéine + glycine ( molécule
nucléophile)
• Le Substrat: Molécule électrophile.

2.7. Conjugaison à la glycine


Catalysé par l’acyltransférases (transfert du groupement acétyl sur la glycine).

2.8. Glutamoconjugaison :
Conjugaison au glutamate

V. Facteurs influençant la biotransformation


1/ polymorphisme génétique :
Nombreuses enzymes de la biotransformation.
Déficit enzymatique plus ou moins important => diminution des capacités de
biotransformation.
Les principaux polymorphismes concernent les CYP450 (CYP 2D9, CYP 2C19, CYP 2D6, CYP
3A5...), les N-acétyl-transférase (NAT2) et les glutathion-S-transférases.
Ex : métabolisme de l’ Azathioprine (polymorphisme de TPMT ).
 Activité faible => risque d’hépatotoxicité

 Activité accrue => risque d’hématotoxicité

2/ les facteurs physiopathologiques :

Age Espèce Pathologie

•Fœtus: conjugaison est •Variations qualitatives •Insuffisance hépatique


active(-importante) (différents isoformes) réduction de la capacité
•Nouveaux Nés: phase I et/ou quantitatives de métaboliser les
(< adulte) (même isoformes à taux substances étrangères
•Personnes âgées : ↓ différents
capacités du foie •Métabolites
éventuellement
différents

3/ facteurs exogènes :
02 phénomènes :
 Induction
 Inhibition
VI. Conséquences de la biotransformation
1. Sur le plan toxicologique :

• Transformation des cyanures en


thiocyanates,
Inactivation • Conjugaison du phénol en
(détoxification) phénolglucuronide.
• Hydrolyse du Paraoxon en
paranitrophénol et diéthylphosphate .

• La 2-naphtylamine est oxydée en 2-


naphtylhydroxylamine qui est un
cancérogène.
Bioactivation: • Le paracétamol est transformé par les
enzymes microsomiques en NAPQI.

2. Sur le plan thérapeutique :


 Génération de métabolites actifs :
La molécule mère est appelé pro drogue
ex : Enalapril  enalaprilate (par une réaction d’hydrolyse)

 Génération de métabolite d’activité différente de la molécule mère :


Ex : chlordiazepoxide  nordiazépam

 Interactions :
Risque d’échec thérapeutique
Ex : rifampicine (inducteur enzymatique) et contaceptifs oraux

 Traitement anti-dotal :
Traitement de l’intoxication au méthanol par l’éthanol
 Traitement paradoxale :
Ex : héroine + buprénorphine

3. Sur le plan analytique :


La présence de ces métabolites est responsable de certaines interférences au cours d’une
analyse toxicologique.
VII. Conclusion
La biotransformation donne naissance généralement à des produits moins toxiques,
plus hydrosolubles et facilement éliminées. Mais, dans certains cas on a des métabolites plus
toxiques qui présentent un danger pour l’organisme.
La connaissance de ces réactions de biotransformation est importante pour une meilleure
prévention contre les risques et la toxicité

Dr. MESLEM

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