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ETHERS DE GLYCOL

I- Propriétés physicochimiques:

-Solvants et co-solvants: solubilité à la fois dans l’eau et dans les solvants organiques.
-Liquides incolores, modérément volatils, à odeur agréable et légèrement éthérée.
-Il existe plus de 80 dérivés dont uniquement une trentaine utilisés actuellement en industrie.
-Inflammables: lorsque leur concentration augmente dans l’air (charge électrostatiques).
-Réactifs (avec les oxydants) comme l’oxygène de l’air.
-Faible risque pour l’environnement : pas bioaccumulables.
-Stabilité à long terme des formulations, sans hydrolyse.
-Bonnes performances techniques, de petites quantités suffisent pour assurer leur rôle.
-Evaporation lente, aucune odeur résiduelle.
-Compatibles avec la plupart des solvants.

II- Origine : Ils sont produits à partir de l’oxyde d’éthylène (pour les dérivés E) ou de l’oxyde
de propylène (pour les dérivés P) par réaction avec un alcool (-OH), on a donc la formation de
produits avec une fonction alcool et une fonction éther. Pour les dérivés P, l’hydroxyl (-OH) est
fixé majoritairement sur le côté le moins encombrant de l’oxyde de propylène pour former
l’isomère α majoritaire. L’isomère β est minoritaire.

Les oxydes d’éthylène et de propylène sont des sous-produits de l’industrie pétrolière.

III- Classification: Les éthers de glycol sont répartis en deux grandes familles :

1- Les dérivés de l’éthylène glycol: de formule chimique R-O-(CH2-CH2)n-O-R'

2- Les dérivés du propylène glycol : de formule chimique R-O-[CH2-CH(CH2)]n-O-R‘

On peut aussi avoir des dérivés du diéthylène glycol, des glymes ou esters de la fonction (-OH).

Glymes: sont des éthers dialkylés de formule générale CH3O-(CHrCHrO) n-CH3


Avec (n = 1 monoglyme, n = 2 diglyme, n = 3 triglyme). Ils sont obtenus par alkylation directe
des glycols par des agents alkylants comme les dialkylsulfates.
Ethers Esters : proviennent de la réaction d'un acide organique, généralement l'acide acétique,
sur la fonction alcool libre des éthers monoalkylés : R'O-CHrCH(CH3)- R"COO.

IV- Utilisation: Les éthers de glycols ont remplacé les solvants habituels jugés trop nocifs et
inflammables. Ils sont utilisés comme :

-Solvants : des peintures, colles, encres, vernis, diluants, produits ménagers, produits
phytosanitaires (insecticides,…), cosmétiques notamment les teintures pour cheveux, produits
pharmaceutiques, crèmes de soins, produits d’entretien, produits de mécanique et de métallurgie.
Ces produits contiennent en général 40% de dérivés E et 60% de dérivés P.

-Agents de tension: ils retardent l'évaporation de l'eau et augmentent ainsi le temps permettant
une application de qualité dans des conditions difficiles (EGME, PGME).

-Agents de coalescence : ils assurent une bonne formation du film de liant par une fusion
correcte des particules de polymère de latex (DEGBE, DPGBE).

-Agents de compatibilité entre molécules insolubles et le véhicule aqueux (TPGBE).

-Véhicule d'additifs tels qu'épaississants ou bases colorantes.

V- Législation : elle est d’évolution constante et varie d’un pays à un autre. Certains dérivés
interdits dans les produits courants, sont encore utilisés dans certaines usines.

Le phénoxyéthanol (EGPhE) est présent comme conservateur ou bactéricide dans près de la


moitié des produits cosmétiques, à l'exception des produits alcooliques. La concentration
maximale fixée par la directive cosmétique est 1 %. La parfumerie française consomme 255
tonnes d'EGPhE par an. Les laboratoires de l'AFSSAPS contrôlent par ailleurs les teneurs en
EGPhE des produits cosmétiques disponibles sur le marché français.

VI- Toxicocinetique :

L'exposition professionnelle aux éthers de glycol concerne un très grand nombre de secteurs
d'activité. Les secteurs les plus exposés sont l'industrie aéronautique, la peinture, le bâtiment,
l'industrie mécanique et les composants électroniques.

Du fait de leur caractère amphiphiles, ils traversent facilement les membranes cellulaires. Il
existe plusieurs voies d’absorption. Les conditions de chauffage et d’humidité la favorisent.

1-Absorption :

Voie cutanée : absorption très importante (4% -50%). La quantité de produit pénétrant la peau
est variable selon le type d'éther, poids moléculaire, sa dilution, sa présence en solution aqueuse
ou éthanoïque, l’espèce. Pas d’accumulation ni métabolisation constatée dans la peau elle-même)

Voie pulmonaire : 50 – 80%, proportionnelle aux concentrations atmosphériques


Voie orale : accidentelle, tentative de suicide, aliments contaminés. Absorption totale sauf pour
les polyethers de glycols. Un très faible % se retrouve inchangé dans les fèces.

2-Distribution : Ils accèdent à tous les compartiments dans les minutes qui suivent l’absorption
(qlq soit la voie d’absorption). Après qlq heures, de fortes concentrations se retrouvent dans le
foie, les reins et la graisse. Ils traversent la BHE et placentaire.

3-Métabolisme : Ils sont tous métabolisés très rapidement. La demi-vie (20min - 4h). Les esters
(acétate en général) sont hydrolysés en quelques minutes dans le sang ou au niveau des
muqueuses par les estérases et ne sont pas détectés dans les fluides biologiques. Les
transformations impliquent des réactions d’oxydation (par ADH puis ALDH si la fonction alcool
est primaire, dans ce cas c’est la voie majoritaire. Il en résulte des métabolites toxiques
(aldéhydes et acide alkoxyacetiques : ex. methoxyacetique, ethoxyacetique, butoxyacetique,…..),
c’est un métabolisme oxydatif toxifiant. L’oxydation par les P450 se fait si la fonction alcool est
secondaire, dans ce cas elle devient la voie majoritaire et produit finalement du CO2 :
détoxification).

Les réactions de phase I (hydrolyse, oxydation) sont éventuellement suivies de conjugaisons. La


demi-vie des métabolites variable: 6- 80h. Il existe des métabolites théoriques et donc non encore
connus ou mis en évidence.
4-Elimination : Rapidement métabolisés. L’élimination est principalement urinaire, les
métabolites peuvent avoir des cinétiques d’élimination bcp plus lentes.

10% sous forme inchangée, 0,4% dans l’air expiré pour l’EGE et 2% dans l’urine pour l’EGBE.
Une faible partie peut être éliminée par les fèces.

Pour la série E : Les aldéhydes ont une brève durée de vie et ne peuvent pas être mis en
évidence dans les milieux biologiques. Les acides alkoxyacétiques sont les principaux
métabolites urinaires. Ils sont accompagnés d’éthylène glycol (formé par la P450) et leur vitesse
d’élimination ↑ avec la longueur de la chaine alkyle.

Pour la série P : la majorité des dérivés sont éliminés s/f de CO2, de propylène glycol et de
produits conjugués (isomère α majoritaire n’est pas transformé en aldéhydes et acides).
VII- Mécanisme d’action toxique :

La toxicité varie selon les familles de produit, qui sont métabolisés de façon différente par les
organismes. Les éthers de la série P sont rapidement éliminés par la respiration (souvent
dégradés en propylène glycol et en alcool puis finalement en gaz carbonique). Les molécules de
la série E sont dégradées en métabolites toxiques : en aldéhydes, qui donnent eux-mêmes
naissance à des acides (ADH et ALDH) et l’éthylène glycol (par la P450).

Les effets toxiques sont liés aux molécules mères et aux métabolites. Les dérivés E semblent plus
toxiques que ceux des dérivés P.

**Les éthers de glycol (molécules mères) : agissent sur le SNC (dépresseurs).

**Les aldéhydes : Liaison avec protéines et acides nucléiques, pontage méthylénique entre
protéines (T) et acides nucléiques (cross link), cassure mono et double brin de l’ADN, inhibition
des mécanismes de réparation de l’ADN.

**Les acides alkoxyacetique : surtout MMA (acide methoxyacetique) entrainent :

-Inhibition de cycle de Krebs


-Inhibition de la respiration mitochondriale et du CYT oxydase
-Réduction de la biodisponibilité des petites unités carbonées nécessaires à la synthèse des bases
puriques et pyrimidiques
-Acidose métabolique avec trou anionique élevé.

Conséquences :

Hématotoxicité: Toxicité médullaire avec neutropénie, anémie arégénérative, plus rarement une
aplasie. L’EGME et l’EGEE st responsables de leucopénie avec granulopénie. Le BEAA (acide
butoxyéthoxyacétique) constitue un puissant agent hémolytique.

Immunotoxicité :

Immunosuppression : attribuée au MAA avec réduction de résistance vis-à-vis des agents


microbiens.

Immunostimulation : maladies auto-immunes, réactions allergiques et de sensibilisation.

Hépatotoxicité : Formation de métabolites réactifs in situ réaction avec les groupements thiol
et NH2 des protéines  dommages cellulaires  cytolyse hépatique.

Néphrotoxicité : Atteinte tubulaire par dépôt d’Hb (hémolyse).

Reprotoxicité : L’effet toxique des (EGME, EGEE et leurs acétates) sur les testicules est
hautement spécifique, la lignée germinale en est la cible principale.
Le MAA entrerait en compétition avec le transfert des résidus mono-carbonés vers les bases
puriques et pyrimidiques. Il réduirait également l’expression de l’ARNm de la s/unité II du
complexe cytochrome oxydase des spermatocytes bloquant ainsi la spermatogénèse.

Le passage placentaire (EGME et EGEE) est responsable de phénomènes embryo- et


foetotoxiques dus à une perturbation de la prolifération et de la différenciation
cellulairemalformation neurologique, faciale et mort in utero.

VIII- Symptomatologie de l’intoxication aigue :

-Irritation digestive en cas d’ingestion d’une solution concentrée


-Dermite d’irritation en cas de projection cutanée
-Dépression du SNC
-Hypoventilation et œdème pulmonaire non cardiogénique
-Néphropathie tubulaire aigue
-Cytolyse hépatique modérée
-Hypotension artérielle
-Hémolyse modérée
-Signes biologiques : Acidose métabolique (pH<7), élévation des non dosés anioniques (trou
ionique), anémie hypochrome, thrombocytopénie, polyurie, parfois hématurie

IX-Traitement :

Evacuateur : LG, CA, lavage abondant dermique et oculaire

Symptomatique : correction de l’acidose, anticonvulsivants

Antidotes :

**Ethanol (compétition sur ADH) : Alcoolémie efficace comprise entre 1 et 1,3 g/L, maintenue
pdt 3 jours, au minimum, en l’absence de dialyse et 1 jour en cas la dialyse ou disparition des
signes cliniques.

Surveillance biologique : taux d’alcoolémie et surtout la glycémie (parfois hypoglycémie chez


les enfants), ionogramme, pH artériel, gaz du sang.

**4-methylpyrazol : Blocage de l’ALDH.

X- Symptomatologie de l’intoxication chronique : +++ professionnelle

Dermite de contact, troubles amnésiques, dépression, trouble de concentration et du sommeil,


détérioration intellectuelle, céphalées, asthénie, irritabilité, Hypoplasie médullaire, neutropénie,
hémopathie malignes (en cas de co-exposition au benzène), immunodépression, ↓ Lym T , ↑ NK
et T cytotoxique.
Altération de la fertilité chez l’homme : oligospermie, stérilité et chez la femme : cycles
irréguliers, réduction du rapport de fécondité, cancer des testicules, estomac, leucémie aigüe.

XI- Analyse :

Les aldéhydes sont difficilement mis en évidence. On analyse les molécules mères ou les acides.

**Prélèvements :

1/Air : (ambiances professionnelles ou environnementales).

2/Liquide biologiques :

Sang : (rare, métabolisation rapide), extraction par dichlorométhane en présence de sulfate de


sodium anhydre (purificateur).

Urines: Extraction/ dichlorométhane ou hexane puis dérivatisation

Dosages des métabolites glucuro et sulfoconjugués nécessite une hydrolyse.

3/Produit : peinture, solvant,….ingéré ou suspecté

**Méthodes : CPG-FID, CPG-SM, HPLC (dosage des acides alkoxyacétiques).

HPLC-SM: méthode de choix détecte des taux de qqs ppm

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