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D’un autre côté, Chabrol et Callahan (2004, p. 3) d’investigation des manifestations défensives des
précisent que cette position classique qui « [...] soignants (QIMDS).
consistait à opposer les mécanismes de défense,
considérés comme inconscients, involontaires, rela-
tivement rigides, orientés vers les conflits internes ÉLABORATION DU QIMDS
et liés à la psychopathologie et les processus de
faire face, considérés comme conscients, volon- Dans un premier temps, nous avons procédé au
taires, flexibles, comportementaux, orientés vers recensement des outils permettant d’appréhender
l’adaptation positive à la réalité externe et liés à la ces mécanismes de défense. Puis, à la suite de
santé mentale et au bien-être [...] » est dépassée, l’analyse de 50 entretiens non directifs centrés avec
puisqu’il existe des zones de recoupement entre des soignants, nous avons élaboré les items du
mécanismes de défense et de faire face. D’ailleurs, questionnaire.
certains auteurs tentent d’établir une cohérence
théorique au sein de tous ces concepts. Ainsi, Recensement des outils existants évaluant les
Ionescu, Jacquet et Lhote (1997) entrevoient l’exis- mécanismes de défense
tence d’un continuum entre les mécanismes de
défense, les mécanismes de dégagement et de faire Trois méthodes sont principalement employées,
face. Ce continuum suivrait le degré de conscience afin de repérer les mécanismes de défense d’une
de ces mécanismes. Un autre auteur, Plutchick personne : l’entretien, le questionnaire et les tests
(1995), a, lui aussi, une conception intégrative de projectifs. Plusieurs méthodes, procédant par entre-
ces différents mécanismes. Il envisage la possibilité tien clinique, sont disponibles : celle de Jacobson,
d’une correspondance entre les mécanismes de Beardslee et Hauser (1986), Defense mechanism
défense et les styles de faire face. rating scale (DMRS : Perry, 1990 ; Perry, Cooper,
1989) ; l’échelle de fonctionnement défensif (DSM
En ce qui concerne le terme de mécanisme de IV, 1994) et Expanded structured interview (ESI :
défense, il est apparu, pour la première fois, en Hall, Davidson, Mac Gregor, Mac Lean, 1998).
1894 dans l’article de Freud, Les psychonévroses Pour les questionnaires, il en existe sept : Défense
de défenses. Il le définit, deux ans plus tard, dans mechanism inventory (DMI : Gleser, Ihilevich,
son article Nouvelles remarques sur la psychoné- 1969), Life style index (LSI : Plutchik, Kellerman,
vrose de défense comme étant le point nucléaire du Conte, 1979 ; Plutchik, 1995), Defense mechanism
mécanisme psychique des névroses en question.
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Ces instruments sont utilisés pour une population travail, de fonctionnement mental [...] formulations
générale, pour les enfants et les adolescents, dans abstraites utiles pour expliquer des comportements
le contexte des troubles de la personnalité, des trou- qui resteraient autrement incompréhensibles. [...]
bles anxio-dépressifs, et dans le cadre de l’évalua- pour Wallerstein, la manifestation des comporte-
tion des psychothérapies. Pour notre part, nous ments de défense – qui doit donc être distinguée
avons choisi de construire un outil spécifique pour des mécanismes de défense – est constituée de
les soignants. Comme nous l’indiquions précédem- comportements, d’idées, d’affects spécifiques qui
ment, lorsque le psychologue occupe une fonction servent des buts défensifs. Ces manifestations
institutionnelle, celle-ci le conduit à centrer son peuvent être conscientes ou inconscientes. »
intérêt sur les collectifs et à prendre « soin », à se (Ionescu et coll., 1997, p. 24). C’est la raison pour
soucier, de l’institution dans laquelle il travaille. laquelle nous avons choisi plutôt le terme de mani-
Dans cet objectif, le psychologue crée des espaces festation défensive dans l’intitulé de notre outil. La
de paroles, où les pratiques peuvent être réfléchies version du questionnaire à 72 items a fait l’objet
et analysées, dans le but d’éviter un fonctionne- d’une passation, et il est apparu que le nombre des
ment chronique, répétitif de l’institution où, à items rendait le protocole expérimental trop lourd
l’extrême, le personnel soignant, qui présente un et redondant. L’analyse d’entretiens complémen-
syndrome d’usure professionnelle, ne serait plus à taires enregistrés, effectués auprès de 20 soignants,
même d’assumer correctement les tâches qui lui nous a amenés à supprimer 10 mécanismes de
incombent. C’est pourquoi nous considérons que, défense. Les 14 mécanismes, qui ont été conservés,
accompagnés par le psychologue, les soignants sont les suivants : activisme, affiliation, annulation
pourront identifier leurs mécanismes de défense, ce rétroactive, anticipation, (dé)négation, formation
processus constituant une des pierres angulaires réactionnelle, humour, identification aux collègues,
pour l’analyse de la pratique des soignants. Cette identification aux patients, identification projec-
identification a pour conséquence, d’induire des tive, intellectualisation, introjection, mise à l’écart
changements et des transformations psychiques et rationalisation. Leurs définitions, adaptées à la
chez le soignant, ce qui aura un impact indéniable pratique soignante, sont les suivantes :
sur la prise en charge relationnelle des soignés.
– l’activisme (ACT) : recours à un acte tech-
nique de soin, afin de se préserver du vécu des
Construction de la liste d’items du QIMDS
affects suscités par la relation au patient ;
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– l’humour (HUM) : ce mécanisme met le cotation aux items : chaque réponse cotée supé-
soignant dans une position de prise de distance par rieure ou égale à quatre fait l’objet d’une investi-
rapport à une situation vécue comme traumatisante, gation plus fine. Le psychologue demande, alors,
en la reconsidérant sous un autre jour, de manière au soignant d’associer une expérience vécue ou
à en dégager les aspects plaisants, ironiques, voire fantasmée à laquelle il a pensé lorsqu’il a répondu
insolites. C’est un mécanisme, qui met les à l’item. Ce procédé (questionnaire + entretien)
soignants dans une disposition favorable pour permet la prise de conscience, par le soignant, des
affronter la difficulté, c’est-à-dire pouvoir la recon- manifestations défensives qu’il utilise, dans le
naître, tout en gardant une certaine distance ; contexte de sa pratique. Ce protocole offre, égale-
– l’identification aux collègues (IDC) : ce méca- ment, au soignant, la possibilité de se dire,
nisme permet au soignant de se forger des pratiques d’exprimer des affects, parfois refoulés, non
communes de travail qui se traduisent par élaborés, et de lui révéler certains aspects de son
fonctionnement.
l’emprunt d’attitudes et de comportements ;
– l’identification aux patients (IDA) : ce méca-
nisme donne, au soignant, la possibilité de ne pas ASPECTS PSYCHOMÉTRIQUES DU QIMDS
se vivre comme radicalement différent du patient. La deuxième phase de la recherche a porté sur
Le soignant est, donc, par l’emploi de ce méca- les propriétés psychométriques de l’outil. Notre
nisme, disponible psychiquement, pour entendre et objectif était de pouvoir apprécier la validité de sa
prendre en compte la singularité du discours du structure et la fidélité de ses mesures, de cerner le
patient ; degré de divergence avec des mesures de stratégies
– l’identification projective (IDP) : c’est un de faire face (étude de la validité divergente), et,
mécanisme qui mène le soignant à penser savoir ce enfin, de fournir des éléments de calibrage et de
qui est « bon » pour le patient. Ce mécanisme sensibilité. Dans cette optique, le QIMDS a été
renforce l’emprise du soignant sur le patient ; administré conjointement au questionnaire de la
– l’intellectualisation (INT) : le soignant se Brief COPE, de Carver (1997), validé en français
réfugie dans la transmission d’un savoir théorique, par Muller et Spitz (2003). Les points suivants
général, sans prêter attention à la demande du décrivent la méthodologie de cette étude et les
patient, ainsi qu’à l’effet produit par son discours. résultats obtenus.
Il permet, au soignant, de se protéger de l’angoisse
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Activisme (ACT) .54 .77 1. Face à un problème, ma première idée est d’agir I .80
immédiatement pour le régler.
2. J’ai pour habitude de m’investir énormément pour A .74
régler les problèmes.
3. Dans un contexte difficile, je ne me sens bien que C .67
lorsque je suis occupé(e).
Annulation .63 .83 7. Si je m’occupe bien des patients, leur détresse va I .72
rétroactive(ANR) disparaître.
8. L’affection que je ressens pour les patients atténue A .85
leur souffrance.
9. Si je suis disponible, le patient se sentira mieux. C .80
Dénégation (DEN) .53 .69 13. Je suis satisfait(e) de ce que je fais pour les A .69
patients, bien qu’il ne soit pas toujours facile de
s’occuper d’eux.
14. Je pense qu’il faut s’impliquer dans la relation au I .76
patient, tout en gardant de la distance.
15. J’aime mon travail, bien que je ne sois pas toujours C nr
d’accord avec ce que l’on me demande de faire.
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Humour (HUM) .61 .82 19. Face à une situation angoissante, j’essaye d’en A .65
dégager les aspects plaisants, ironiques, ou insolites.
20. Face à une situation qui me paraît angoissante, j’ai C .80
tendance à plaisanter.
21. Je pense qu’il vaut mieux adopter une attitude I .87
humoristique face à une situation difficile.
Identification aux .50 .67 22. Je me reconnais assez bien dans les difficultés de I .75
collègues (IDC) mes collègues.
23. J’adopte certaines des attitudes de mes collègues. C .67
24. Je me sens proche de mes collègues. A nr
Identification aux .59 .81 25. Certains de mes comportements ou attitudes C .70
patients(IDA) peuvent ressembler à ceux des patients.
26. Je me reconnais dans les préoccupations des I .83
patients.
27. Il m’arrive parfois de ressentir les mêmes difficultés A .78
que les patients.
Notes. AVE : part de la variance expliquée. Les 6 items non retenus dans l’analyse finale sont déclarés « nr » dans le tableau.
Trois facettes des manifestations défensives : Comportement (C), Idée (I), Affect (A).
Tableau 1.1. Résultats de la modélisation PLS confirmatoire en 14 facteurs (AVE, fiabilité, saturations).
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Intellectualisation .58 .80 31. Les difficultés rencontrées généralement avec les I .72
(INT) patients dépassent le cadre professionnel et sont la
conséquence d’un dysfonctionnement de la société.
32. Si je n’ai pas le temps de bien faire mon travail, c’est C .73
parce que l’institution ne m’en donne pas les moyens.
33. Cette profession nous confronte tous aux mêmes A .82
difficultés psychologiques ou sociales pour lesquelles la
société n’apporte pas de réponse.
Introjection (INR) .54 .78 34. Je perçois les signes de souffrance du patient. I .76
35. Lorsque le patient souffre, je fais tout pour le C .71
soulager.
36. Je ressens facilement la détresse du patient. A .73
Mise à l’écart (MIS) .65 .78 37. Quand j’ai une difficulté, je m’efforce de me changer I .82
les idées et de plus y penser.
38. Quand je suis face à une difficulté, j’ai tendance à C .79
faire autre chose à la place.
39. Face à une difficulté, je laisse de côté les émotions A nr
qu’elle génère.
Rationalisation .72 .83 40. Si j’avais plus de temps, je serais plus disponible A .83
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Notes. AVE : part de la variance expliquée. Les 6 items non retenus dans l’analyse finale sont déclarés « nr » dans le tableau.
Trois facettes des manifestations défensives : Comportement (C), Idée (I), Affect (A).
Au regard des résultats et des critères de validité cumulatives 3 : ils ne sont opérationnalisés au final
publiés dans la littérature sur la technique PLS qu’à travers deux items, leur AVE et leur fiabilité
(Henseler, Ringle, Sinkovics, 2009), on observe sont juste dans les normes, voire faibles.
qu’il y a une certaine compatibilité globale des Le tableau 2 indique que les variables latentes,
données avec un modèle en 14 manifestations bien que, parfois, fortement corrélées entre elles,
défensives. En effet, les saturations des items sont ont toujours une racine carrée d’AVE supérieure à
souvent proches de. 70 au sein de leur facteur leurs corrélations : la variance expliquée, au sein
d’appartenance (pour 30 items sur 38 retenus), tout d’une variable latente, est systématiquement supé-
en ayant des saturations basses (< .40) dans les rieure à la variance expliquée, prise en compte par
13 autres facteurs. L’AVE est supérieur à .50 pour la relation entre deux variables latentes. Par consé-
11 facteurs sur 14 et l’indice de fiabilité des varia- quent, ces variables latentes mesurent des concepts
bles latentes est pratiquement toujours supérieur à distincts, même si elles ne sont pas indépendantes
.70 (11 facteurs sur 14). Les résultats les plus discu- l’une de l’autre.
tables concernent les mécanismes d’affiliation et
d’identification aux collègues pour trois raisons
3. Le tableau 1.1 ne montre que les saturations des
items sur la variable d’appartenance dans un souci de
lisibilité.
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ACT AFF ANR ANT DEN FOR HUM IDC IDU IDP INT INR MIS RAT
ACT .73
AFF – .09 .69
ANR .51 – .02 .79
ANT .57 .13 .33 .75
DEN .36 – .19 .30 .19 .72
FOR .38 .06 .34 .42 .45 .71
HUM .39 .09 .28 .19 .19 .25 .78
IDC .27 .12 .27 .34 – .03 .02 .23 .71
IDU .46 – .07 .31 .34 .13 .15 .21 .34 .77
IDP .48 – .11 .59 .45 .28 .40 .21 .33 .30 .73
INT .23 – .16 .31 .28 .23 .13 .25 .29 .45 .42 .76
INR .30 – .21 .37 .33 .30 .31 .01 .00 .10 .40 .23 .73
MIS .07 .09 .20 .23 .07 .16 .35 .33 .13 .26 .16 – .02 .81
RAT .02 – .11 .39 .10 .02 .03 – .06 .27 .20 .41 .41 .21 .09 .85
Notes. p < .05 pour r > . 19 et p < .01 pour r > . 23.
Tableau 2. Matrice de corrélations entre les manifestations défensives (racine carrée de l’AVE dans la diagonale).
Outre ces aspects purement psychométriques, hiérarchique (CAH) a été effectuée sur ces varia-
une analyse plus poussée des corrélations entre les bles, selon la méthode d’agrégation de Ward avec
facteurs de manifestations défensives nous a comme distance 1-r de Pearson. Le graphique 1
semblé pertinente, afin d’isoler des classes signi- présente le dendogramme obtenu sous STATIS-
fiantes. À partir de la matrice de corrélations des TICA 6, dans lequel on a une possibilité de parti-
variables latentes, une classification ascendante tion en 5 classes.
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Graphique 1. Dendogramme de la classification ascendante hiérarchique des 14 variables latentes (en pointillé
la partition en 5 classes).
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La classe C1 regroupe cinq manifestations défen- La matrice de corrélation entre les manifestations
sives : activisme, anticipation, identification aux défensives et les modes de faire face fournit des
collègues, identification aux patients et intellectua- éléments de réponse. Sur les 196 corrélations
lisation. On peut considérer que ce regroupement calculées entre stratégies de faire face et manifes-
des manifestations défensives traduit, probable- tations défensives, seulement 29 corrélations sont
ment, l’adhésion des soignantes à la culture de significatives au seuil α = .05. Parmi ces dernières,
métier. Celle-ci valorise des normes de comporte- 11 corrélations sont significatives au seuilα = .01.
ments et des valeurs promues dans le cadre de leurs Ces 11 corrélations nous semblent les seules perti-
formations. Ainsi, l’activisme et l’anticipation nentes à commenter, du fait qu’elles traduisent des
participent-ils à un idéal de soin correspondant à la liens moyens à forts 4 entre les variables des deux
réactivité exigée par les protocoles de soins stan- outils en s’échelonnant de .24 à .45.
dardisés et prescrits actuellement. De même, la Le tableau 3 présente ces 11 corrélations. Sur
combinaison entre l’identification aux patients et 14 manifestations défensives, seules, 8 entretien-
l’intellectualisation peut témoigner de la difficulté, nent une ou deux corrélations pertinentes avec des
d’une part, à concilier soins relationnels et soins stratégies de faire face. Parmi ces 8 manifestations
techniques et, d’autre part, à respecter la dignité du défensives, la formation réactionnelle et l’identifi-
patient, tout en s’appuyant sur une identification cation aux collègues partagent deux corrélations
aux collègues, afin de se rassurer. avec des stratégies de faire face. On trouve une
La classe C2 rassemble l’annulation rétroactive, convergence assez évidente entre les mesures de
l’identification projective et la rationalisation. Ce manifestations défensives et de faire face au sujet
regroupement souligne le fait que la soignante ne de l’humour (r = .45), de la mise à l’écart et de la
peut assumer certaines pensées et désirs et va soit distraction (r = .32), dont les items traduisent des
les annuler (annulation rétroactive), soit les attri- opinions très similaires. En ce qui concerne les
buer aux patients (identification projective). Cette autres liens, il est plus facile de les décrire, en
attribution externe est renforcée par l’usage de considérant que certaines manifestations défensives
justifications relatives aux conditions de travail facilitent ou inhibent certains modes de faire face.
(rationalisation). L’ensemble de ces manifestations Ainsi, la formation réactionnelle semble, dans le
constitue, alors, un moyen de rejeter les affects cadre de l’activité professionnelle, conduire à une
conflictuels suscités par la relation, tout en gardant prise de conscience des problèmes rencontrés ; elle
un certain contrôle sur le patient. paraît conduire à ne pas les nier, à chercher à les
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Note. L’ensemble de ces corrélations sont significatives à ?=.01. L’activisme, l’annulation rétroactive, l’anticipation, l’identification
aux patients, l’identification projective, l’intellectualisation ne sont que faiblement corrélés avec les modes de coping et ne sont
donc pas reportés dans ce tableau.
Tableau 3. Corrélations moyennes à fortes entre les variables latentes de manifestations défensives et les modes
de coping.
Globalement, la présence d’un nombre très limité p < .01) ; plus les soignantes ont d’ancienneté
de corrélations entre les facteurs des deux ques- dans un service, plus l’introjection est
tionnaires incite à penser que ces outils ne mesu- présente (r = .21 ; p < .05). Le QIMDS est donc
rent pas les mêmes phénomènes. Même s’il existe très peu discriminant sur ces variables
un recoupement partiel des mesures, comme les sociodémographiques.
processus psychologiques d’humour, de mise à Le tableau 4 permet d’avoir quelques repères
l’écart et de distraction, la validité divergente du pour l’entretien clinique, afin de moduler le
questionnaire de manifestations défensives reste critère de coupure, pratiqué actuellement, autour
satisfaisante. du score de quatre. En effet, certaines manifesta-
tions défensives sont très fortement ou très faible-
Sensibilité et calibrage du QIMDS
ment déclarées par le personnel soignant, sans
L’étude des liens entre chaque manifestation réelle différence interindividuelle. Ainsi, 75 %
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ACT AFF ANR ANT DEN FOR HUM IDC IDA IDP INT INR MIS RAT
Moy 4,12 2,49 3,72 3,87 4,87 4,52 3,28 3,57 3,27 3,78 4,05 4,75 2,42 4,99
EcT 1,02 0,71 1,15 0,98 0,83 0,79 1,36 1,00 1,16 1,06 1,16 0,65 1,31 1,01
Med 4,10 2,46 3,92 4,00 5,00 4,62 3,36 3,55 3,31 3,84 4,27 4,71 2,44 5,15
25 % 3,44 2,31 2,86 3,35 4,59 4,00 2,29 2,90 2,63 3,21 3,35 4,33 1,48 4,15
75 % 4,75 2,92 4,55 4,65 5,59 5,00 4,29 4,45 4,06 4,60 4,93 5,33 3,40 6,00
Min 0,8 0,46 1,00 0 2,59 2,00 0 0 0 0,76 1,00 2,86 0 2,00
Max 6 4,39 5,74 6,00 6,00 6,00 6,00 5,45 5,65 6,00 6,00 6,00 5,52 6,00
Note. Les calculs ont été réalisés à partir des scores des sujets sur chaque variable latente.
récits, qui mobilisent ses mouvements pulsionnels où l’élaboration pourra se poursuivre collective-
et l’introduit au processus d’élaboration de sa ment. Le QIMDS s’inscrit donc dans une démarche
pratique. Il s’agit d’amener le soignant à se qualitative clinique à double finalité : favoriser,
raconter, à mettre en mots des situations vécues, chez le soignant, l’identification de son mode de
parfois, comme des micro-traumatismes, de fonctionnement singulier, dans le cadre de la rela-
mentionner des éprouvés déstabilisants, des affects tion de soin, et lui offrir des repères quant à l’évolu-
rarement exprimés. En d’autres termes, selon le tion de son fonctionnement.
modèle théorique de Bion (1965), le soignant, dans
C’est pourquoi son utilisation peut être envisagée
le cadre de cette offre de parole, transforme ces
comme un préalable à la constitution d’un groupe
« éléments bruts de l’expérience » en éléments
de parole d’analyse de la pratique. À l’instar de
métabolisés, représentables. Il peut, ainsi, prendre
Leboul (2004), nous pensons que le groupe de
de la distance face aux situations évoquées,
parole, structuré par la présence d’un psychologue
retrouver « sa capacité à penser » et assumer au
extérieur, constitue :
mieux les difficultés relationnelles qu’il rencon-
trera, par la suite, dans sa pratique quotidienne. – un lieu de soutien susceptible de prendre en
Au cours d’entretiens avec le QIMDS, nous compte la souffrance des soignants et de faciliter
avons pu remarquer combien l’expression de diffi- la régulation de leur fonctionnement interne ;
cultés, d’interrogations nouvelles et de situations – un lieu de formation qui favorise l’apprentis-
problématiques, non mentionnées jusque-là, se sage de l’écoute et de la prise de parole de chacun ;
dévoilaient progressivement. Ce constat témoigne
– un espace de libre expression qui concerne la
de ce que, lorsque l’on offre, aux soignants, la
mise en mots du vécu.
possibilité d’exprimer leur vécu professionnel, ils
s’en saisissent aisément : le discours est alors très La finalité de ces groupes d’élaboration de la
dense, très riche et authentique. Cette mise en pratique étant, conjointement, d’améliorer la rela-
parole de l’éprouvé, du vécu de l’expérience tion soignant/soigné, de la transformer en une rela-
professionnelle, authentifie et justifie la nécessité tion structurante pour le soigné, d’atténuer la souf-
de construire des espaces de parole structurants france des soignants et de prévenir l’usure
pour les soignants, lieux reconnus par l’institution, professionnelle.
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