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Chapitre 3 : Période d’observation

Le législateur marocain a mis en place une procédure relative au choix de la solution


adéquate pour l’entreprise. Le législateur français a, à son tour adopté la même procédure
qu’il a appelé la période d’observation.
Période suivant immédiatement le prononcé du jugement d'ouverture d'une procédure
de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire lorsque l'exploitation
de l'activité de l'entreprise est maintenue 1. Elle permet au tribunal d'apprécier les chances
de redressement de l'activité par l'établissement d'un bilan économique et social.
Plusieurs points méritent d’être analysés dans le cadre de cette période. Le premier
est relatif à l’élaboration du bilan et du projet de plan (section 1), tandis que le deuxième
se rapporte à la situation de l’entreprise (section 2). Or, le dernier portera sur la situation des
créanciers (section 3).

Section 1 : Le bilan financier, économique et social de l’entreprise et l’élaboration


du plan du sort de l’entreprise

Avant d’aborder le projet de plan (sous-section 2), on envisagera en premier lieu le


bilan (sous-section 1).

Sous-section 1 : Le bilan financier, économique et social de l’entreprise

§1 : L’élaboration du bilan par le syndic


Conformément aux articles 569 et 595 du code de commerce, le législateur marocain a
confié la mission d’élaboration du bilan économique et social de l’entreprise au syndic avec
le concours effectif du chef de l’entreprise.
Par ailleurs, force est de constater que le syndic dispose des mêmes prérogatives
attribuées au président du tribunal de commerce et du conciliateur dans le cadre de la
prévention externe. C’est ainsi que le syndic peut, selon l’article 597 du code de
commerce, obtenir communication des informations de nature à lui donner une idée exacte
sur la situation économique et financière de l’entreprise, et ce de la part de toutes les
parties ayant relation avec l’entreprise.
Le syndic ne peut être opposé du secret professionnel à l’égard de toutes les parties
quelle qu’en soit la nature, car il exerce sa mission d’investigation sous la supervision et le
contrôle du juge commissaire.
§2 : Le contenu du bilan
Sur le plan économique et financier, le bilan doit comporter la situation financière et
comptable et constater l’actif et le passif de l’entreprise et analyser la situation de
l’entreprise par rapport à l’environnement économique général. Ce rapport serait alors plus

1
C’est-à-dire dans le cas prévu à l’article 652 du code de commerce qui dispose que : « Lorsque l’intérêt général ou l’intérêt des créanciers nécessite
la continuation de l’activité de l’entreprise soumise à liquidation judiciaire, le tribunal peut autoriser cette continuation pour une durée qu’il fixe,
soit d’office soit à la demande du syndic ou du procureur du Roi ».
clair et facile à élaborer pour les entreprises qui tiennent une comptabilité régulière et
dispose d’un commissaire aux comptes.
Sur le plan social, le rapport éclaire la situation du travail et de l’emploi au sein de
l’entreprise concernant le nombre des postes d’emploi, la structure des salaires et les
relations du travail existantes notamment les relations collectives. Il indique également la
capacité de l’entreprise à gérer ses salariés ainsi que la masse des salaires.
Sur le plan matériel, les informations recueillies par le syndic sont aménagées sous la
forme d’un rapport conformément aux articles 569 et 595 du code de commerce. Il faut
préciser qu’il ne s’agit pas d’un exposé comptable en tant que tel, mais d’un exposé global de
la situation financière, économique, sociale et juridique de l’entreprise.
Sous-section 2 : Le projet de plan du sort de l’entreprise

§1- l’élaboration du projet de plan


Outre l’élaboration du bilan constatant une réalité passée de façon précise, le
législateur a confié au syndic d’autres missions. Il est investi également de la mission de
proposer au tribunal l’approbation ou le rejet du projet de plan de sauvegarde élaboré et
présenté par le chef de l’entreprise.
Or, pour l’entreprise en cessation des paiements, le syndic est tenu de réaliser un
projet de plan anticipant l’avenir de l’entreprise soit par son redressement ou sa
liquidation.
De surcroît, les tiers peuvent contribuer au maintien de l’activité de l’entreprise
conformément à l’article 598. Il en est ainsi, à travers, la cession en tout ou en partie de
l’entreprise, à la condition d’exclure l’offre présentée par le ou les gérants de l’entreprise
ainsi que leur parent ou alliés jusqu’au 2ème degré inclusivement soit directement soit à travers
un intermédiaire.
De même, le législateur a accordé, en vertu de l’article 601 du code de commerce, au
syndic des pouvoirs importants afin de concerter les créanciers concernant les sacrifices
qu’ils peuvent présenter à l’entreprise débitrice en vue de sa sauvegarde.
Le syndic transmet, selon l’article 601, aux créanciers les propositions de règlement
des créances sous le contrôle du juge commissaire.
Le syndic obtient des créanciers à titre individuel ou collectif l’acceptation de chaque
créancier, ayant déclaré sa créance, concernant les délais et les réductions qu’il leur
demande afin de garantir l’exécution de la continuation de l’entreprise. C’est ce qui ressort
de l’article 601. En cas de concertation individuelle, le défaut de réponse dans un délai de
trente jours de la réception de la lettre du syndic vaudrait acceptation. En revanche, en cas
de concertation collective des créanciers à travers leur convocation à un conseil qu’il
préside, la tenue de ce dernier sera effectué dans la période s’étalant entre le 15 ème jour et
le 21ème jour de la date d’émission de la convocation, et ce en application de l’article 603.
Il faut souligner, à cet égard que si l’article 601 concerne le projet de plan de
continuation, il s’étend également au projet de plan de sauvegarde suite au renvoi prévu à
l’article 569 à l’article 601.
Il faut rappeler par ailleurs que le syndic obtient communication de l’état des
créances après la déclaration des créanciers dans un délai de 2 mois à partir de la
publication du jugement d’ouverture de la procédure judiciaire de traitement au bulletin
officiel pour les créanciers résidents au Maroc et 4 mois pour les résidents à l’étranger.
Le syndic devait également, transmettre aux contrôleurs les propositions qu’il désire
présenter aux créanciers ainsi que les réponses de ces derniers, et ce conformément à
l’article 602.
Le législateur a obligé le syndic, de concerter le chef de l’entreprise concernant les
sacrifices présentés par les créanciers ainsi que le rapport qu’il élabore et présentera au
tribunal. Le chef de l’entreprise doit communique au syndic de ses remarques dans un délai
de 8 jours de la réception de l’avis du syndic.

§2- Rôle de l’assemblée des créanciers dans l’élaboration du projet de plan.


Si le législateur marocain a prévu des mécanismes de concertation et d’information
que le syndic devait observer afin d’élaborer le projet de plan de redressement ou en
observant celui de sauvegarde, il a en revanche et à la différence de son homologue
français a permis à une nouvelle institution « l’assemblée des créanciers », de contribuer
dans l’élaboration uniquement du projet de plan de redressement sans celui de sauvegarde.
D’où l’intérêt d’aborder les conditions de constitution et la composition (A), avant
d’envisager les attributions (B) et les conditions de sa réunion (C).
A- Les conditions de constitution et la composition
Afin d’instaurer l’équilibre entre le chef de l’entreprise, le syndic et les créanciers, et
assurer une implication positive des créanciers dans le choix de la solution, la loi 73/17 a
mis en place un mécanisme important au profit des créanciers de certaines entreprises
soumises aux procédures de redressement ou de liquidation judiciaire, lorsqu’ils
remplissent des conditions définies par la loi.
L’article 606 du code de commerce dispose que l’assemblée des créanciers est
constituée de plein droit dans :
Toute société commerciale obligée de désigner un commissaire aux comptes
Toute entreprise individuelle dont le chiffre d’affaire dépasse 25 millions de
dirhams ou emploie au moins 25 salariés pendant l’année antérieure de
l’ouverture de la procédure.
Le tribunal peut sur demande, du syndic en vertu d’une décision judiciaire motivée,
décider la constitution de l’assemblée des créanciers mrme en l’absence des conditions ci-
dessus. La demande du syndic doit, sous peine d’irrecevabilité, doit comporter des causes
pertinentes, motivées et expliquées par le syndic dans sa demande. Le jugement décidant la
constitution de l’assemblée des créanciers n’est susceptible d’aucun recours afin de ne pas
tarder le déroulement des procédures et les concertations y afférentes.
L’assemblée des créanciers est composée :
Du syndic en tant que président (sauf dans le cas où elle se tiendra pour
proposer le replacement du syndic ou il sera présidé par le juge commissaire)
Du chef de l’entreprise

Des créanciers inscrits dans l’état des créances déclarées transmises par le
syndic au juge commissaire et que le syndic n’a pas déclaré leurs refus ou leur
renvoi au tribunal, et si le juge commissaire n’a pas interdit leur participation.
Des créanciers titulaires de créances inscrites dans les ordonnances
d’acceptation, rendues par le juge commissaire selon l’article 732 ainsi que les
ordonnances rendues par les juridictions saisies des actions relatives au recours
contre les ordonnances du juge commissaire concernant les créances contestées
en tout ou en partie.
B- Les attributions
En application de l’article 607 du code de commerce, l’assemblée des
créanciers se tient afin de délibérer concernant :
a- Le projet de plan de redressement assurant la continuation de l’entreprise
b- Le projet de plan de redressement assurant la cession ou la proposition de la
liquidation, respectivement établi ou faite par le syndic, sur la base du
rapport de bilan.
c- Le projet de plan de redressement pour la continuation de l’activité de
l’entreprise proposé par les créanciers dans le cadre du plan alternatif en cas
de refus de l’assemblée des créanciers du plan de redressement élaboré par
le syndic
d- La modification des objectifs et moyens de plan de redressement pour la
continuation de l’activité de l’entreprise, et ce lorsque le syndic décide de
présenter un rapport au tribunal, sachant qu’il ne peut procéder à
l’élaboration dudit rapport qu’après délibération à ce sujet par l’assemblée
des créanciers.
e- La demande de replacement du syndic
f- La cession d’un ou plusieurs éléments important de l’actif de l’entreprise,
jugée utile pour l’exécution du plan
C- Les règles régissant la tenue de l’assemblée des créanciers
L’assemblée des créanciers se tient :
Soit à la demande du syndic, et à défaut à la demande du juge commissaire
Soit d’office
Soit à la demande du chef de l’entreprise
Doit à la demande d’u ou plusieurs créanciers et ce sans tenir compte ni de la
nature ni du rang de la créance (602).
La convocation à la réunion de l’assemblée des créanciers quelle que soit
l’origine de l’initiative, se fait par le biais
* d’une convocation insérée dans un journal d’annonce légal,
* d’une convocation affichée dans un panneau du tribunal fait à cette fin
*d’une convocation adressée aux créanciers à leur domicile élu ou de façon
électronique
L’avis doit comporter le droit des créanciers d’obtenir communication des
documents relatifs à la réunion dans le siège de l’entreprise ou à tout autre lieu indiqué
dans l’avis.
La convocation à la tenue de l’assemblée des créanciers est adressée dans un délai
de 5 jours qui court à partir :
De la date de la présentation du projet de plan par le syndic au juge
commissaire
Ou de la date de présentation d’une sollicitation de replacement du syndic
Ou de la date de présentation de la demande de cession de l’un des actifs
importants de l’entreprise pour l’exécution du plan
La convocation est adressée le jour ouvrable suivant la réception par le syndic du
projet de plan de redressement assurant la continuation, proposé par les créanciers, ou
suivant la date de dépôt du rapport du syndic concernant la modification des objectifs et
moyens du plan de continuation auprès du tribunal
Le quorum exigé pour la validité des délibérations de l’assemblée des
créanciers
La présence des créanciers soit (à titre personnel, ou représenté par un
mandataire, détenant au moins les 2/3 du montant des créances déclarées. A
défaut de ce quorum, le président (syndic ou juge commissaire) de l’assemblée
dresse un procès en ce sens et fixe la date de réunion de la deuxième assemblée à
la condition qu’elle ne dépasse le délai de 10 jours de la date de la réunion de la
première assemblée.
Les délibérations de l’assemblée des créanciers, sont valables dans la deuxième
convocation, quel que soit le montant des créances détenues par les créanciers
présents.
Le quorum exigé pour la validité des décisions :
Les décisions sont prises par l’assemblée des créanciers, en vertu d’un procès-
verbal de la réunion dressé par le président, lorsqu’il est approuvé par les créanciers
présents détenant un montant global des créances représentant plus de la moitié du
montant des créances détenues par les créanciers participant au vote.
Il faut souligner que les décisions dument prises par l’assemblée, lient même les
créanciers absents, qui n’y ont pas participé.
Les délibérations de l’assemblée des créanciers, se tiennent :
Pour l’approbation du projet de plan de redressement proposé par le syndic,
Pour le rejet du projet de plan de redressement.

Section 2 : Situation de l’entreprise durant la période d’observation

Le législateur a mis en place des procédures et mécanismes visant le redressement de


l’entreprise pendant la période d’observation. En ce sens nous allons aborder La
répartition des prérogatives entre le président de l’entreprise et le syndic (sous-section 1),
avant d’envisager les mesures conservatoires (sous-section 2) et le déroulement de
l’activité de l’entreprise durant la période de préparation de la solution (sous-section 3).
Sous-section 1 : La répartition des prérogatives entre le président de l’entreprise et le
syndic
§1- Le maintien des pouvoirs de gestion par le chef de l’entreprise concernant la
procédure de sauvegarde
En cas de procédure de sauvegarde, l'administration de l'entreprise est assurée, en
application de l’article 566 du code de commerce, par le débiteur lui-même. Ce principe se
justifie par la raison d'être de la procédure de sauvegarde. Il s'agit d'une procédure préventive,
destinée à anticiper la survenance d'une cessation des paiements. De fait, elle a un caractère
nécessairement volontaire et ne peut donc être ouverte qu'à la seule demande du chef
d’entreprise.
Compte tenu de l'ensemble de ces particularités, il est logique que le débiteur conserve
la plénitude de son pouvoir de gestion. Toute restriction à ce pouvoir aurait pour effet de
dissuader le chef d'entreprise de demander l'ouverture de cette procédure. Ceci explique
également que si un syndic est nommé lors du jugement d'ouverture, sa mission ne peut être
qu'une mission de surveillance ou d'assistance. C’est ainsi que l’article 566 du code de
commerce susmentionné dispose que les actes de disposition, et l’exécution du plan de
sauvegarde accomplis par le débiteur demeurent soumis au contrôle du
syndic.
§2- Le partage des pouvoirs entre le chef de l’entreprise et le syndic
En vertu de l’article 592 du code de commerce, l’article 576 de l’ancienne loi, le
tribunal décide, en fonction de la situation de l’entreprise et l’appréciation du
comportement du chef de l’entreprise, de l’une des situations suivantes:
A- Le maintien de la gestion au profit du chef de l’entreprise, le rôle du syndic se
limite au contrôle et l’information du juge commissaire des actes de gestion accomplis par le
chef de l’entreprise.
B- La gestion est attribuée au chef de l’entreprise, avec le concours du syndic. Et dans
ce cas, c’est le tribunal qui décide les modalités et les domaines d’assistance présentés
par le syndic au chef de l’entreprise.
C- Le tribunal charge uniquement le syndic de la gestion de l’entreprise et décide le
dessaisissement catégorique du chef de l’entreprise s’il s’agit de la gestion totale de
l’entreprise ou de son dessaisissement partiel de certaines activités.
Sous-section 2 : Les mesures conservatoires
§1- Les mesures conservatoires relatives au patrimoine du débiteur.
Afin de sauvegarder l’actif de l’entreprise en évitant toute dilapidation, le code de
commerce prévoit certaines mesures conservatoires aux articles de 679 au 685du code de
commerce.
Le syndic peut requérir du chef de l’entreprise ou lui-même d’inscrire au nom de
l’entreprise toutes hypothèques, nantissements, gages ou privilèges que le chef
d’entreprise aurait négligé de prendre ou de renouveler.
Le juge-commissaire peut prescrire au syndic l’apposition des scellés sur les biens de
l’entreprise pour éviter leur cession.
Le syndic procède, après avoir éventuellement requis la levée des scellés, à
l’inventaire des biens de l’entreprise pour avoir une idée exacte sur l’entreprise.
Le juge-commissaire peut ordonner la remise au syndic des lettres adressées au chef
d’entreprise afin d’éviter les fraudes éventuelles du débiteur ; Ce dernier, informé, peut
assister à leur ouverture.

§2- Les mesures conservatoires relatives aux dirigeants des sociétés commerciales
Il s’agit des mesures suivantes :
L’extension de la procédure ainsi que les mesures conservatoires à l’encontre
des associés responsables solidairement et indéfiniment du passif social.
L’interdiction de cession des parts, actions ou titre d’investissement
généralement de tous les droits financiers du gérant. Cette interdiction ne
concerne pas la constitution d’un nantissement sur les actions ou obligations.
§3- La période suspecte :
C’est une période comprise entre la date du jugement d'ouverture d'une procédure
de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire et la date de la cessation des
paiements fixée par le tribunal.
Conformément à l’article 712 du code de commerce, la période suspecte s’étend de la
date de cessation des paiements jusqu’au jugement d’ouverture de la procédure.
La période précédant le jugement d'ouverture est en effet propice à la fraude. On peut
craindre que le débiteur en cessation des paiements ne cherche soit à organiser son
insolvabilité en dissimulant une partie de ses biens, soit à avantager certains de ses
créanciers en violation du principe d'égalité.
Compte tenu de son objet, cette reconstitution de l'actif du débiteur ne se justifie
qu'en présence d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Elle est en
revanche totalement étrangère à la procédure de sauvegarde. Il ne peut en effet y avoir de
période suspecte en cas de sauvegarde puisque le débiteur n'est pas, et ne peut être, en
cessation des paiements.
A- La durée :

La durée de la période suspecte est fixée par le tribunal lors du jugement d'ouverture.
Conformément à l’article 713 du code de commerce, elle ne peut jamais excéder dix-huit
mois.
A défaut de détermination de cette date par le jugement, la cessation des paiements
est réputée être intervenue à la date du jugement.
Le syndic peut demander au tribunal de modifier la date de cessation des paiements une
ou plusieurs fois sans toutefois dépasser la durée maximale à savoir dix-huit mois avant le
jugement d’ouverture.
B- Le sort des contrats :

Deux sanctions peuvent affecter les actes conclus durant et avant même cette période.
Il s’agit de la nullité (I) et de l’annulation (II).
I- Nullité de plein droit
En vertu de l’article 714 du code de commerce, tout acte à titre gratuit conclu
postérieurement à la cessation des paiements, sans tenir compte de la réalisation du
dommage ou non et quel que soit les biens concernés meubles ou immeubles, est frappé de
nullité.
La nullité est ainsi indépendante de la bonne foi ou de la mauvaise foi du cocontractant
du débiteur.
- l’action en nullité est exercée uniquement par le syndic. Les actes concernés sont
réputés comme non avenus.
II- L’annulation
Deux situations se présentent :
a- L’article 714 :
Les actes à titre gratuit faits dans les six mois précédant la date de cessation des
paiements.
b- L’article 715 :
Les actes à titre onéreux, tout paiement, toute constitution de garanties ou sûretés,
lorsqu’ils auront été faits par le débiteur après la date de cessation des paiements.
A la différence de la nullité, l’annulation laisse au juge un pouvoir d'appréciation, ce
qui n'exclut pas l'obligation d'avoir à motiver sa décision.
A ce principe, les articles 716 et 717 apportent deux exceptions :
Toute garantie constituée antérieurement ou concomitamment à la naissance de
la créance garantie
Les effets de commerce à la condition de l’ignorance du bénéficiaire créancier
cambiaire, de l’état de cessation des paiements du débiteur: c’est-à-dire porteur
de bonne foi.

Sous-section 3 : Déroulement de l’activité de l’entreprise durant la période de


préparation de la solution
On abordera successivement le sort des contrats en cours (§1) et les l’interdiction
de l’accomplissement de certains actes (§2).
§1: L’obligation d’observer certaines règles : la continuité des contrats en cours
Le syndic a seul la faculté d’exiger l’exécution des contrats en cours en fournissant la
prestation promise aux cocontractants de l’entreprise. Toutefois, le contrat est résilié de plein
droit après une mise en demeure adressée au syndic et restée plus d’un mois sans réponse.
Le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d’exécution par l’entreprise de
ses engagements antérieurs au jugement d’ouverture.
L’inexécution de ses engagements ouvre droit au profit des créanciers seulement à la
déclaration de leurs créances au passif. Au cas où le syndic n’a pas opté pour la poursuite de
l’exécution du contrat, ceci ouvre droit à engager une action en dommage-intérêt dont le
montant sera déclaré au passif.
Néanmoins, la partie contractante peut différer la restitution des sommes versées par
l’entreprise en exécution d’un contrat jusqu’à ce qu’il a été statué sur les dommages-intérêts.
Les dispositions précitées ne s’appliquent pas aux contrats de travail.
Lorsque le syndic opte pour l’exécution des contrats en cours à la date d’ouverture
de la procédure, il doit exécuter les obligations de l’entreprise en vertu de ces contrats et
conformément aux conditions fixées par ces contrats. En revanche, il a le droit de modifier
les conditions qui privilégient le cocontractant par rapport aux autres créanciers de façon à
nuire au principe de l’égalité.
En cas d’exécution par le syndic des obligations des contrats en cours après le
jugement, le paiement est immédiat.
En cas d’accord de report de paiement, les créances seront soumises au droit de
priorité selon l’article 590 du code de commerce.
Enfin, nonobstant toute disposition légale ou clause contractuelle contraire, aucune
indivisibilité, résiliation ou résolution du contrat ne peut résulter du seul fait de l’ouverture
du redressement judiciaire.
§2: L’interdiction d’accomplir certains actes
Ces actes pourront compromettre à l’élaboration de la solution et par conséquent
l’affaiblissement de la situation de l’entreprise. Il s’agit de :

A- L’interdiction de paiement des créances antérieures au jugement d’ouverture de la


procédure. Prévue à l’article 690 du code de commerce, cette interdiction est applicable
aux procédures de sauvegarde, redressement ou liquidation. Cette interdiction est de plein
droit
Elle ne s’applique pas dans les situations suivantes :
1- Si la poursuite de l’activité de l’entreprise l’exige, et si le bien a été donné en
gage ou retenu légitimement, le juge commissaire peut autoriser le syndic de
retirer ce gage en dépossession du bien ou cette rétention légitime en payant les
créances qui lui sont liées et naissant avant l’ouverture de la procédure
judiciaire de traitement.
2- Le législateur a élargi la liste des exceptions en autorisant le paiement des
salaires des deux derniers mois dans un délai de 10 jours de l’ouverture de la
procédure de traitement judiciaire.
On regrette que l’article 690 ne fasse aucune indication au bénéfice des salariés d’un
privilège spécial après l’ouverture de la procédure, surtout que l’article 555 relatif à la
prévention externe concernant la suspension des poursuites individuelles a permis le
paiement des salaires.
Afin d’assurer cette interdiction des créances antérieures, le législateur a assorti toute
violation de cette disposition de sanctions civiles conformément à l’article 691. Il s’agit de la
nullité et de sanctions pénales notamment la sanction applicable à la banqueroute.
B- Interdiction de constitution de garantie sur les biens du débiteur
L’article 699 du code de commerce, revêt une connotation générale en interdisant
l’inscription des hypothèques, nantissements, privilèges postérieurement au jugement
d’ouverture.
Toutefois, en application de l’article 594, le juge commissaire peut autoriser au chef de
l’entreprise et au syndic d’y procéder.
Contrairement au droit français qui permet l’inscription du privilège de la trésorerie
générale et du vendeur du fonds de commerce et la vente des immeubles immatriculés.

Section3 : Situation des créanciers de l’entreprise

La situation des créanciers divergent en fonction de la date de l’origine de la créance. On


distingue à cet effet entre les créanciers antérieurs (sous-section 1) et les créanciers postérieurs
au jugement d’ouverture des procédures judiciaires (sous-section 2).
Sous-section1 : Situation des créanciers antérieurs au jugement d’ouverture de la
procédure judiciaire : l’attente
Concevant le droit de déclarer leurs créances (§1), les créanciers antérieurs au
jugement d’ouverture des procédures judiciaires sont soumis à certaines restrictions (§2).
§1- Droit de déclaration des créances
A l’exception des salariés, ces créanciers doivent déclarer leurs créances au syndic
quel que soit la nature de la créance, établie par acte écrit ou non.
La déclaration peut être faite par le créancier lui-même ou par un mandataire de son
choix. Le syndic doit tenir un registre spécial pour saisir les déclarations relatives à chaque
procédure, les pages sont numérotées et signées. Les délais sont de deux mo is pour les
résidant au Maroc et quatre mois pour les résidents à l’étranger. Dans le cadre des contrats
en cours, il est de 15 jours à partir de la date de la suspension de l’exécution.
En cas d’inobservation de cette déclaration, les créanciers n’ont plus le droit dans les
répartitions et les dividendes. La créance est ainsi éteinte.
L’action en relevé de la forclusion est recevable lorsque :
Le défaut de déclaration n’est pas dû à un fait du créancier
Lorsqu’elle est interjetée dans un délai d’un an de la date d’ouverture de la
procédure de traitement.

§2- Arrêt des poursuites individuelles et du cours des intérêts

A- L’arrêt des poursuites individuelles


L'arrêt des poursuites individuelles est posé par l'article 686 du code de commerce. Il
s'agit d'une règle d'ordre public destinée non seulement à garantir un paiement ordonné et
égalitaire des créanciers mais aussi à préserver les actifs de l'entreprise et donc son éventuel
sauvetage.
Le principe d'interruption des poursuites concerne l’ensemble des créanciers
antérieurs, à l'exception toutefois des salariés. Face au principe d'interruption des
poursuites, l’égalité entre créanciers antérieurs est une égalité parfaite. Aucune distinction
n'est en effet opérée selon qu’ils sont créanciers chirographaires ou créanciers munis d'une
sûreté spéciale ou d'un privilège général.
C’est ainsi que l’article 686 du code de commerce dispose que la suspension des
poursuites individuelles comprend :
« Suspension ou interdiction de toute action en justice de la part de tous les créanciers
dont la créance a son origine antérieurement à l’ouverture de la procédure et tendant :
1) à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ;
2) à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.
Elle arrête ou interdit également toute mesure d’exécution de la part de ces créanciers
tant sur les meubles que sur les immeubles.
Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont, en
conséquence, suspendus.
Exception faite du créancier titulaire d’une sureté mobilière qui peut demander au juge
commissaire la vente du bien objet de cette sureté lorsque :
- Ce bien est périssable (viande, poisson…)
- Ce bien est susceptible d’être modifié sensiblement (ordinateur)
- La conservation du bien requiert des frais exorbitants (tableaux)

Par ailleurs, il faut souligner que les cautions, solidaires ou non,


peuvent se prévaloir :
- des dispositions du plan de continuation ;
-de l’arrêt du cours des intérêts prévu à l’article.
La déchéance du terme ne leur est pas opposable.
Le recours contre les cautions ne peut être ouvert que pour les créances déclarées.
B- Arrêt du cours des intérêts
Elle concerne selon l’article 692 du code de commerce des intérêts légaux,
conventionnels, de majoration pour retard de paiement des taxes et impôts ou cotisations de
la sécurité sociale.
Cet arrêt court conformément à l’article 693 du code de commerce, à partir du
jugement d’ouverture et s’achève au prononcé du plan de sauvegarde ou de
continuation. Elle se poursuit, en revanche, avec le plan de cession ou de liquidation.
Cette règle tend à fixer le passif du débiteur à un moment donné et identique à tous
les créanciers. Elle permet aussi d'éviter une aggravation du passif et de faciliter par
conséquent le redressement de l'entreprise. Les intérêts courants après le jugement
d'ouverture ne sont pas simplement suspendus. Ils ne sont en réalité plus dus et sont en
conséquence éteints.
Sous-section 2 : Situation des créanciers postérieurs à l’ouverture de la
procédure judiciaire : motivation
Le législateur a réservé un traitement de faveur aux créances nées
postérieurement et régulièrement après le jugement d’ouverture et qui semblent
indispensables à la poursuite de cette procédure ou à l’activité de l’entreprise. Ces
créances sont payées à leur date échue. À défaut ils sont payés par priorité à toute
autre créance assortie ou non de privilège ou de sureté à l’exception de la préférence
prévue aux articles 558 et 565.

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