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Une plus grande ouverture aux échanges internationaux ne peut être positive qu’à certaines
conditions :
L’ouverture internationale pourrait être un catalyseur de la croissance plus qu’une cause directe. Elle
doit s’accompagner de réformes internes sur le plan économique et institutionnel pour avoir un effet
sur la croissance et le développement. L’OCDE reconnaît que la mondialisation a d’abord favorisé le
développement des pays industrialisés, puis celui des pays émergents depuis une trentaine d’années.
Si certains PED (pays en développement) se positionnent dans le sillage des émergents, d’autres pays
restent en marge, voire sont fragilisés par leur ouverture aux marchés internationaux. La grande
pauvreté mondiale a reculé, mais elle reste très profonde dans certaines régions. Dans de nombreux
pays, les inégalités se sont creusées. La mondialisation ne peut être favorable au développement que
si certaines conditions sont réunies.
Le nombre de pays ayant connu une croissance du PIB par habitant plus importante que les pays de
l’OCDE, donc un processus amorcé de rattrapage a fortement augmenté. Il s’agit notamment du
Bangladesh, de l’Indonésie, du Nigeria, du Viêtnam, du Pakistan ou encore des Philippines, pays qui
connaissent des taux de croissance annuels moyens de l’ordre de 6%. Ces pays ont en commun une
démographie dynamique et des niveaux de salaires faibles. Ils connaissent une forte croissance ces
dernières années, en partie du fait de leur récent pouvoir d’attraction sur les entreprises des pays du
Nord. En effet, le développement de certains pays émergents, comme la Chine, l’Inde ou les pays
d’Europe de l’Est, s’est accompagné d’une certaine hausse des coûts de la main-d’œuvre. D’autres
territoires sont devenus ainsi plus attractifs au niveau des coûts salariaux unitaires.
Depuis quelques années, les multinationales des pays émergents investissent beaucoup dans les PED.
La Chine s’illustre, ici encore. De plus en plus, elle se positionne comme constructeur
d’infrastructures et de bâtiments en Afrique. Elle s’implante également de plus en plus dans le
secteur minier et l’achat de terres agricoles. Les FMN (firmes multinationales) des pays émergents
s’implantent aussi dans les pays développés, cherchant en particulier à accroître leurs compétences
technologiques.
De plus, pour sortir de la dépendance à l’égard des matières premières, il est important que les
PED diversifient leurs économies. Outre la volatilité des cours des matières premières, on constate
que ce secteur ne profite en général pas tellement aux autres secteurs économiques. Les États
doivent donc profiter des périodes où les cours des matières premières sont élevés pour lutter contre
la pauvreté et les inégalités, mais aussi pour se diversifier, en développant l’industrie et les services.
Enfin, un certain protectionnisme peut être vu comme nécessaire, ou, en tout cas il n’est pas
forcément pertinent d’adopter une libéralisation rapide et brutale. Un certain protectionnisme
éducateur.
La mondialisation telle qu’elle existe aujourd’hui, a des effets écologiques et sociaux très négatifs. Les
changements climatiques en sont une manifestation, mais aussi l’accroissement de la pauvreté et
l’accroissement des distances économiques et sociales entre groupes humains.
L'accélération sans précédent des flux, de la production et des échanges, que connaît actuellement
l'humanité n'est que la phase la plus récente de la mondialisation. La mondialisation se décompose
en plusieurs processus relevant de plusieurs grands domaines (socio-économiques, culturels,
technologiques, etc.) liés entre eux. Le terme « mondialisation » s'est imposé à partir des années
1980, même s'il a été employé en France pour la première fois dès 1904.
La mondialisation est un processus continu d'intensification et de fluidification des échanges, porté
par l'essor des transports et des mobilités (populations, entreprises, etc.) et accéléré depuis les
années 1970 par les systèmes contemporains de communication et de circulation de l'information.
Elle tend à accentuer les phénomènes de diffusion et d'homogénéisation à travers l'espace mondial.
Mais, paradoxalement, par la mise en concurrence des territoires et des sociétés qui lui sont
associée, elle alimente aussi des comportements de contestation : localismes, particularismes,
régionalismes, communautarismes sont ainsi revisités à la lueur de la mondialisation.
La mondialisation aujourd’hui se heurte à deux problèmes majeurs :
La géopolitique, le retour brutal des conflits entre grandes puissances montre la fragilité des
chaînes mondiales de production. Les acteurs économiques reconsidèrent leurs stratégies et
prônent un découplage réduisant les interdépendances, notamment avec la Chine.
Et à la forte décrue du pétrole.
Jean-Marc Jancovici
Associé Carbone 4 - Président The Shift Project
Peut-on avoir de la mondialisation sans pétrole ? La mondialisation, ce n'est pas juste un
concept : c'est avant tout des flux de biens qui transitent d'un continent à un autre.
Deux moyens sont indispensables pour que cet échange de marchandises à large échelle
puisse prendre place : des camions, et des bateaux. Le graphique ci-dessous (que j'ai trouvé
dans une publication de l'OCDE, mais la source initiale est indiquée sur le graphique) donne
l'évolution de la capacité de la marine marchande depuis 1900, en tonnes de port (c'est à dire
en tonnes pouvant être transportées).
En 1900 déjà, la capacité des bateaux à vapeur et à diesel (donc à combustibles fossiles)
excédait d'un facteur 3 à 4 celle des bateaux à voile. Aujourd'hui, avec près d'un milliard de
tonnes de port, la flotte mondiale est quasiment 100 fois plus capacitaire qu'elle ne l'était il y
a un siècle.
Pas de minerais, de charbon, de phosphates, d'engrais, de sable, ou de céréales ici ? Pas de
problème, un vraquier Capesize de plus de 80.000 tonnes vous amènera cela depuis l'autre
bout du monde. Pas de machines à laver, de peluches pour Noël, de casseroles, de bananes
ou de pantalons ici ? Pas de problème, un porte container pouvant transporter jusqu'à
250.000 tonnes vous amènera cela pour pas très cher.
Pas de voitures, de tôles, de machines outil, ou de grues ? Un cargo, de quelques dizaines de
milliers de tonnes de capacité, se chargera de les acheminer depuis le pays de fabrication. Et
c'est sans parler des pétroliers et désormais méthaniers...
On ne se rend pas bien compte, chez soi ou au travail, qu'il y a un peu (ou beaucoup) de
transport maritime dans chaque objet que la civilisation industrielle offre à notre regard.
Sans pétrole pour les faire avancer, et sans charbon pour les fabriquer (avec de l'acier), ce qui
n'est certes pas pour demain matin, que restera-t-il de ces bateaux ?
A l'évidence, jamais la marine à voile (malgré quelques projets sympathiques) ne pourra
proposer de tels tonnages. Les cerfs-volants sont une aide, et on fera bien quelques bateaux
nourris aux carburants issus de la biomasse, mais cela ne permettra pas de se passer
complètement de pétrole sur la flotte actuelle.
Le nucléaire offre une solution technique réelle : il propulse déjà sous-marins et porte-avions,
plus petits qu'un porte container. Mais il y a environ 20.000 navires de fort tonnage dans le
monde actuellement : on imagine mal fabriquer autant de chaudières nucléaires en quelques
décennies, tout en adaptant chaque port du monde ou presque à la maintenance de ce
nouveau type de navire.
Il est donc tentant de conclure que la forte décrue du pétrole signifiera une forte décrue du
commerce mondial en volume, et donc une contraction de l'offre de produits manufacturés
disponibles un peu partout, puisque les chaines d'approvisionnement - de la mine à chez
vous - sont devenues mondiales pour tout produit manufacturé. Il va falloir s'y préparer !
Problématique évoquée :
Pleins feux sur la sécurité énergétique : la raréfaction du pétrole et ses conséquences
Le deuxième modèle était le socialisme, tel qu’il s’était développé dans les pays de
l’Est européen et également en Chine, dans la péninsule indochinoise et à Cuba. Ce
modèle constituait en principe une alternative au capitalisme, même régulé sous sa
forme keynésienne. Il entra également en crise, assez rapidement, pour des raisons
internes (modèle économique de rattrapage du capitalisme, organisation autoritaire
du champ politique) et externes (la guerre froide comme instrument de pression sur
les économies socialistes). La chute du mur de Berlin fut le point final en Europe.
L’Asie de l’Est et du Sud-Est changea de modèle à partir des années 80, pour
adopter une orientation capitaliste de développement économique et Cuba, plus
fidèle aux objectifs socialistes, dut ouvrir ses frontières au capital extérieur et
établir une double monnaie.
La deuxième frontière, ce sont les services publics. Tant qu’ils restent du domaine
de l’Etat ou des collectivités, ils contribuent de manière faible à l’accumulation du
capital. Une fois que des services, tels que l’électricité, l’eau, les transports, les
téléphones, mais aussi la santé et l’éducation passent dans le domaine privé, la
possibilité de gain devient beaucoup plus importante. Or, cela concerne des
centaines de milliards d’euros. La conséquence est que la privatisation signifie
généralement un accès plus difficile ou totalement exclu pour les plus pauvres.
La troisième frontière est constituée par les zones de biodiversité dans le monde,
parce que l’industrie du futur se basera plus sur le biologique que sur le chimique.
C’est vrai pour des industries telles que la pharmacie ou les cosmétiques, sans
parler bien entendu de l’industrie alimentaire, mais encore plus, dans l’avenir, de
la production de la bioénergie pour remplacer le pétrole en extinction progressive
et particulièrement destructeur de l’environnement. Malheureusement, la formule
capitaliste d’agriculture, détruit considérablement les sols, à cause de l’utilisation
massive des engrais chimiques et des pesticides et provoque des catastrophes
sociales considérables dans les populations paysannes. Tan que la recherche de
nouvelles sources d’énergies renouvelables restera dans la logique du capitalisme,
elle ne débouchera pas sur de réelles alternatives écologiques et sociales.
Le néolibéralisme n’est pas un accident de l’histoire. Il se situe dans la logique même de
l’accumulation du capital. Il dispose des institutions juridiques nécessaires sur le plan
mondial, c’est-à-dire la Banque mondiale, le FMI et l’organisation mondiale du commerce.
Les deux premiers organismes n’ont rien de démocratique car les décisions sont prises au
sein du Conseil d’administration, où sont représentés les pays en fonction du capital dont
ils disposent. Par ailleurs, les Etats-Unis possèdent un droit de veto, seul pays du monde
jouissant d’un tel avantage. Les décisions sont donc prises en fonction des intérêts de ceux
qui disposent du capital, les pays du Nord, qui en règle générale favorisent le système
existant. Par ailleurs, l’exploitation des richesses du Sud par le capital du Nord n’a jamais
été aussi grande dans l’histoire, elle est plus importante que du temps du colonialisme.
Alors que le monde a multiplié par sept sa richesse au cours des 50 dernières années,
jamais dans l’histoire il n’y a eu autant de personnes pauvres ou vivant dans l’extrême
pauvreté.
Tout cela provoque évidemment des réactions. D’une part, les responsables économiques
et politiques du système lui-même se militarisent de plus en plus pour conserver le
contrôle, notamment des richesses naturelles et de l’énergie. Par ailleurs, ils sont effrayés
de certaines conséquences sociales et mettent en route de grands projets, tels que la lutte
contre la pauvreté (la Banque mondiale) ou les objectifs du Millenium proclamé par l’ONU.
Ce dernier consiste à vouloir réduire l’extrême pauvreté de moitié en 2015. Outre le fait
que l’objectif ne sera probablement pas atteint, n’est-il pas scandaleux d’accepter à
l’avance qu’en 2015 il y aura encore 800 millions de personnes vivant dans une grave
indigence ? Or, les moyens existent pour résoudre ces problèmes en moins d’une
génération.
Par ailleurs, depuis la fin des années 90, une convergence des mouvements sociaux et des
organisations non gouvernementales progressistes s’est opérée et cela 25 ans après le
Consensus de Washington et 10 ans après la chute du mur de Berlin, signifia le triomphe du
néolibéralisme. Ces résistances existaient depuis longtemps dans différents domaines, mais
pour la première fois, ce sont joints ensemble des mouvements et des milieux qui
n’avaient rien à voir les uns avec les autres précédemment. On a vu à Seattle ou plus tard
dans le Forum social mondial se réunir les syndicats ouvriers, les paysans sans terre, les
peuples autochtones, les femmes, les écologistes, les mouvements de défense des droits
de l’homme, etc. Tous ont progressivement découvert qu’ils avaient le même adversaire,
c’est-à-dire le néolibéralisme. Les convergences de résistance se sont manifestées au cours
des dernières années de manière de plus en plus massive, notamment dans le cadre des
Forums sociaux (Porto Alegre), mais aussi dans celui de réseaux d’acteurs collectifs,
comme les paysans dans Via Campesina par exemple.
En Amérique latine, on voit émerger des partis de gauche, fruit en grande partie des
mouvements sociaux, qui mettent en route une autre logique économique de solidarité
plutôt que de compétition, qui rendent au peuple la souveraineté sur leurs ressources
naturelles et qui mettent en route des modèles économiques contredisant les logiques du
fonctionnement capitaliste : échanges sans passer par le système bancaire mondial, troc
entre viande et pétrole (Argentine - Venezuela), médecins et pétrole (Cuba - Venezuela),
etc. Ils construisent aussi un nouveau modèle d’intégration économique. Cela montre que
des alternatives sont possibles.