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Laurent Delprat
Avocat à la Cour
Maître de Conférences associé
INTRODUCTION
La morale, sans en être une cause exclusive, a manifestement une incidence sur les
dispositions du droit pénal. Le Code pénal réprime ainsi un certain nombre
comportements prohibés par la morale, notamment religieuse et judéo-chrétienne
(l’homicide, traduisant juridiquement l’un des dix commandements « tu ne tueras
point ») ou la doctrine sociale, réprimant les nuisances à la société et à l’ordre public
(assurant ainsi la sanction d’un non-respect du « pacte social » républicain issu des
philosophes du siècle des lumières). Le droit pénal érige ainsi sous forme d’infraction
un comportement si ce n’est immoral portant atteinte à la morale, apportant une
peine non plus divine mais humaine et sociétale.
Toutefois, le droit pénal n’est pas la morale et ces deux concepts sont autonomes.
Nombre d’agissements, considérés comme contraire à la morale, ne sont ainsi pas
sanctionnés : le mensonge, le suicide. Certains ont été dépénalisés, comme
l’homosexualité, d’autres font l’objet de réglementations échappant au droit pénal :
interruption illégale de grossesse, euthanasie et fin de vie, maltraitance, suicide,
automutilation… lesquels renvoient à des dispositions du Code de la santé publique.
À l’inverse, il est des hypothèses où le droit pénal est plus large que la morale car il
va réprimer des agissements qui sont indifférents à la morale (infractions au code de
la route, salubrité publique …).
Afin de définir le droit pénal, il est nécessaire de souligner qu’il s’agit à la fois d’un
droit sanctionnateur et d’un droit autonome.
Le droit pénal entretient avec d’autres branches du droit des rapports étroits, dont il
vient renforcer l’efficacité des règles énoncées (droit civil, droit fiscal, droit de
l’environnement, droit de la santé publique, droit du travail…). On érige alors en
disposition pénale le non-respect de certaines dispositions. Par exemple, en droit
des sociétés, le non-respect de certaines règles par les dirigeants sociaux entraîne le
prononcé de certaines sanctions pénales. En droit civil, l’abandon de famille est
sanctionné pénalement. En ce sens, le Code pénal est un code suiveur, le code
originel étant un Code pilote, renvoyant à des dispositions répressives ou au code
pénal en cas de manquement.
Nombre d’auteurs affirment que les disciplines répressives sont les plus anciennes
des disciplines juridiques. Le Droit pénal comporte un certain nombre de disciplines
dont la vocation est de réglementer la vie publique et d’en sanctionner les écarts.
Certaines de ces disciplines sont à vocation juridique, tandis que d’autres, plus
récentes, sont à vocation scientifique.
Dans le cadre juridique, quatre disciplines peuvent être distinguées : le droit pénal
général, la procédure pénale, le droit pénal spécial et la science pénitentiaire.
Le droit pénal général constitue la pierre angulaire du droit pénal. Le droit pénal
général définit l’ensemble des règles de fond applicables, quelle que soit la nature
particulière des infractions en cause. Dans ce cadre, les règles du droit pénal
général sont valables, sauf exception, à la fois pour les crimes, les délits et même
les contraventions.
Traditionnellement, le droit pénal général est cité en tête des disciplines juridiques
composant le droit pénal en raison du fait qu’il concerne toutes les infractions.
Le Droit international pénal, quant à lui, règle les problèmes posés par les
infractions imputables à un ou plusieurs Etats ainsi qu’à leurs dirigeants ou
exécutants contre un ou plusieurs autres (actes de terrorisme, crimes contre
l’humanité
C) La procédure pénale
La procédure pénale revêt une importance que n’ont pas la procédure civile et la
procédure administrative par rapport à leur droit de fond. Ainsi, les règles de fond
du droit civil ont pour objectif premier de régler les litiges. Ce n’est que dans des cas
restreints que le droit civil va donner lieu à un procès. En conséquence, la procédure
civile est subsidiaire par rapport au droit civil, du fait de son application
exceptionnelle.
Les articles 211-1 et suivants du Code pénal concernent le droit pénal spécial. Il
dresse la liste des comportements dangereux. Le droit pénal spécial ne s’intéresse
plus à l’infraction, en général, mais à la théorie de chaque infraction particulière.
C’est en fait un catalogue des différentes infractions., décrivant pour chacune
d’entre elles les éléments constitutifs, les sanctions encourues et les particularités
procédurales qui s’y attachent.
E) La science pénitentiaire
A) La criminalistique
• L’anthropologie criminelle
• La police scientifique
Elle intervient dans l’examen des lieux et des objets liés à un événement pour y
détecter et analyser les traces susceptibles de révéler le caractère infractionnel de tel
ou tel fait et la participation de tel individu aux faits. La police scientifique fait appel à
toute une série de disciplines plus vastes : la balistique qui est l’étude des balles
(comment telle balle a été tirée, par quelle arme…), la toxicologie qui est l’étude des
poisons et des drogues… Notamment, à partir de l’analyse de telle ou telle drogue
prohibée, il est possible de savoir qu’en tel endroit, la drogue qui circule est coupée
avec tel et tel produit et qu’à tel autre endroit un nouveau produit a été rajouté.
Ainsi, cela permet de remontrer les filières.
• La médecine légale
B) La criminologie
De manière générale, l’infraction peut être définie comme une conduite qualifiée
comme telle par la loi parce que contraire à l’ordre social. Cette situation entraîne le
prononcé d’une peine et/ou le prononcé d’une mesure de sûreté. Pour éviter
l’arbitraire, le législateur intervient pour définir les actes que la société sera autorisée
à réprimer.
L’infraction est donc une notion juridique. Il s’agit de tout acte prévu et puni par la
loi pénale. Cet acte peut être soit un acte de commission soit un acte d’omission.
L’infraction est souvent appelée délit au sens large. Mais, en pratique, il peut s’agir
d’un crime, d’un délit ou d’une contravention.
Les éléments constitutifs communs à toutes les infractions sont au nombre de trois :
-un acte n’est punissable que s’il est prévu et réprimé par la loi. C’est l’élément
légal
-un acte doit avoir été accompli entièrement ou doit avoir fait l’objet d’un
commencement d’exécution. C’est l’élément matériel. C’est l’élément matériel qui
permet d’extérioriser la conduite infractionnelle. Tel est le cas de la soustraction dans
le vol.
-l’acte doit avoir été accompli par une personne dotée d’une volonté libre et
consciente. C’est l’élément moral que l’on appelle également comportement
psychologique.
TITRE I
LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE L’INFRACTION
CHAPITRE I
L’ELEMENT LEGAL DE L’INFRACTION
À la base du droit pénal est présente l’idée selon laquelle une action ne peut être
pénalement sanctionnée que si le législateur l’a préalablement prévu. Sans texte
légal, il n’y a donc pas d’infraction ni, a fortiori, de répression. Cependant, dans
certains cas (légitime défense, ordre de la loi et commandement de l’autorité
légitime), le comportement qui devrait être réprimé va échapper à la répression
parce que son caractère infractionnel lui est retiré en vertu de dispositions
particulières de la loi. C’est ce que l’on regroupe sous l’appellation de « faits
justificatifs ».
Nous allons donc aborder en deux sections successives les cas dans lesquels
l’élément légal existe et ceux dans lesquels cet élément légal est supprimé.
Le législateur énonce que telle conduite constitue une infraction. Il prévoit alors une
sanction qui prend la forme soit d’une peine soit d’une mesure de sûreté. Il s’agit de
ce que l’on appelle la qualification légale. Une fois que ces textes sont édictés, les
juges saisis doivent vérifier que ces faits coïncident avec la qualification légale. Il
s’agit alors de la qualification judiciaire. Cependant, il existe un risque d’un certain
arbitraire de la part du juge. Pour cela, il a été nécessaire de poser certaines règles
au cours de cette phase de qualification pénale ou judiciaire.
L’élément légal est quelque chose de nécessaire. Cependant, dans certains cas, on
va se demander quel texte légal il convient d’appliquer. C’est toute la question de
l’application de la loi pénale dans le temps avec le principe de la non-rétroactivité et
celle de la loi pénale dans l’espace. Ces trois points feront l’objet de trois sections
successives.
L’élément légal signifie qu’un texte d’incrimination est nécessaire pour qu’une
infraction soit constituée. C’est l’expression du principe de la légalité des délits et
des peines. L’existence d’un texte d’incrimination va avoir pour conséquence des
éventuels conflits de lois pénales dans le temps en cas de réforme législative ainsi
que des conflits de lois pénales dans l’espace lorsque l’infraction contient un élément
d’extranéité, c’est-à-dire un élément étranger.
A) La légalité matérielle
Lorsque l’on étudie la légalité matérielle, il est nécessaire de distinguer le fondement
de ce principe, son contenu ainsi que les atteintes au principe.
1) Le fondement du principe
a) L’origine du principe
Sous l’Ancien Régime, la législation royale était très peu étoffée en matière pénale.
Les ordonnances royales et les Édits étaient généralement rédigés de manière très
vague. En conséquence, les juges chargés de l’application de ces textes disposaient
d’un large pouvoir d’appréciation, à la fois pour définir quels comportements
devaient être punis et pour fixer la peine applicable au condamné. Pour cette raison,
on estimait à cette époque que les peines étaient arbitraires. Cependant, ce terme
“arbitraire” n’avait en fait aucune connotation péjorative contrairement à ce que l’on
estimerait actuellement. Il était, en effet, employé dans son sens littéral et signifiait
simplement que dans le silence de la législation royale, le juge devait “arbitrer” la
peine en prenant en compte les circonstances de fait ayant présidé à la commission
de l’infraction. Cependant, un tel pouvoir d’appréciation laissé au juge présentait des
risques dans la mesure où la répression et la peine prononcée devenaient aléatoires.
Pour cette raison, dès le XIV° siècle, cette trop grande liberté d’appréciation laissée
au juge a suscité les interrogations de la doctrine. Au siècle des Lumières, cet
arbitraire du juge devient synonyme d’injustice. Rapidement, dans “l’esprit des lois”,
Montesquieu soutient que les incriminations et les peines qui peuvent leur être
appliquées doivent être fixées par la loi. Par la suite, cette idée est reprise par
BECCARIA dans “le traité des délits et des peines”.
Outre son origine, quelle est la justification du principe de la légalité des délits et
des peines ?
b) La justification du principe
-une raison d’équité : il apparaît souhaitable que la loi puisse être connue à
l’avance car tout citoyen doit pouvoir connaître à l’avance ce qu’il peut faire ou ne
pas faire.
En dépit des avantages du principe de la légalité des délits et des peines, celui-ci
n’est pas exempt de critiques qui peuvent être formulées à son encontre. Certains
considèrent que ce principe consacre une définition abstraite du droit pénal qui se
fait au détriment d’une application concrète. En droit comparé, il est possible de
remarquer que certains pays ont banni le système de la légalité de leur droit.
Concrètement, il s’agit de pays totalitaires (Allemagne, URSS avant 1959). Certaines
critiques formulées contre le principe de la légalité concernent le fait que l’on aboutit
parfois à un vide juridique. Il semble possible de lutter contre ce vide juridique.
Cela, si l’on adopte la théorie de l’interprétation par analogie qui tend à avoir un
certain rôle créateur.
Globalement, on peut considérer que ces critiques sont peu contraignantes et sont
de toute façon mineures par rapport au fait que le principe de la légalité permet de
lutter contre l’arbitraire.
2) Le contenu du principe
Les atteintes au principe de la légalité sont de deux sortes : les infractions de type
ouvert et le rôle que peuvent jouer les principes généraux du droit, la coutume ou
les usages.
Les principes généraux du droit, les coutumes et les usages constituent des
sources non écrites du droit.
On dit souvent que le juge pénal doit prendre en compte les principes généraux du
droit qui ne sont pas formulés dans le Code pénal. Ces principes généraux sont
reconnus par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Le non-respect d’un
principe général par une décision est un motif de cassation. Les principes généraux
ont trois rôles : inspirer les règles, compléter les règles ou s’opposer aux règles. Le
rôle le plus fréquent est celui de complément et d’inspiration des règles. En droit
pénal, au titre des principes généraux du droit on note la présomption de bonne foi.
En ce qui concerne les règles de forme, on note le principe des droits de la défense.
A ce titre, plusieurs règles ont été édictées : parole donnée à la personne poursuivie
en dernier, oralité des débats, publicité des débats. En ce qui concerne les principes
généraux du droit dans les droits fondamentaux des citoyens, la chambre criminelle
applique le principe de la liberté et celui de l’égalité qui sont affirmés par l’article 1°
DDHC.
Les coutumes doivent tout d’abord être différenciées des usages. La coutume est
généralement définie comme la conséquence d’un usage ayant persisté. La coutume
consiste donc dans une pratique collective. Sous l’Ancien Régime, la coutume avait
un rôle extrêmement important. Au XVIII° siècle, par réaction à l’Ancien Régime, le
droit révolutionnaire a considéré que la coutume constituait une source d’arbitraire.
Aujourd’hui, la solution n’est pas aussi tranchée bien que certains estiment que son
caractère arbitraire doive prédominer. Aujourd’hui, la coutume peut servir à
interpréter un texte. Cependant, la coutume peut exercer un rôle plus important et
plus créateur en constituant une source du droit pénal. Notamment, c’est la
coutume qui autorise les parents à exercer des violences légères sur leurs enfants
dans le cadre de leur éducation ou dans le cadre de la participation à certains
sports. De même, la coutume autorise la tauromachie dans certaines régions sans
tomber sous le coup de la répression applicable en matière de mauvais traitements
à animal (article 521-1 du Code pénal).
B) La légalité formelle
Au titre de la légalité formelle, il est nécessaire d’aborder les sources du droit pénal.
Celles-ci, en pratique, sont au nombre de trois : les conventions internationales, les
lois au sens strict et les actes du pouvoir exécutif. Ces différentes sources du Droit
pénal seront reprises successivement. Adopter une telle classification implique que
l’on étudie les sources du droit de manière hiérarchique, les conventions
internationales s’imposant à la loi interne.
Ce traité qui institue la CEE a été signé le 25 mars 1957. Il comporte dans ses
articles 105 et 106 (ex-articles 85 et 86 du TCE) des dispositions sanctionnatrices
concernant les ententes et les abus de positions dominantes. Mais, en outre, la
question se pose de savoir si les règlements élaborés par le Conseil ou la
commission doivent être pris en considération en matière pénale et si des directives
communautaires peuvent mettre en échec des textes internes. En la matière, il
convient de faire une distinction entre les directives et les règlements
communautaires :
- Les directives lient les états membres quant aux objectifs à atteindre
mais laissent à chaque État sa compétence propre pour élaborer la norme. En
conséquence, les directives ne sont pas d’application directe en droit pénal interne.
Leur contenu ne s’applique qu’à travers les dispositions internes législatives ou
réglementaires adoptées. Ainsi, les directives communautaires doivent être
transposées en droit interne.
Cette convention signée à Rome en 1950 a été ratifiée par la France par une loi du
31 décembre 1973 et publiée par un décret du 3 mai 1974. Je vous précise, car cela
est important, que la France a admis la possibilité pour les citoyens d’exercer un
recours individuel (saisine de la Commission puis éventuellement de la Cour
européenne des droits de l’homme située à Strasbourg) après épuisement des voies
de recours internes depuis un décret du 9 octobre 1981. Cette convention concerne
essentiellement la procédure pénale dans la mesure où elle est, notamment relative,
aux conditions de la privation de liberté, mais elle concerne également le droit pénal
de fond, donc le Droit pénal général. Notamment, son article 3 interdit les peines et
les traitements inhumains ou dégradants.
La CEDH est d’application directe en droit interne. Quelle est la procédure à suivre ?
Dans la mesure où cette voie de recours n’est ouverte qu’après épuisement des
voies de recours internes, un particulier a la possibilité de déposer une requête au
secrétariat de la cour européenne des droits de l’homme dans un délai de 6 mois à
compter du jour où la décision interne est devenue définitive. La requête est alors
instruite. Lorsqu’aucun règlement amiable n’intervient avec l’État mis en cause, la
commission établit alors un rapport dans lequel elle formule un avis relativement au
fait de savoir si les obligations incombant à un État ont été violées. Ce rapport est
ensuite transmis au comité des ministres. La Cour européenne des droits de
l’homme (qui comprend un nombre de juges égal à celui des membres du conseil de
l’Europe) doit être saisie dans les trois mois de la transmission du rapport au comité
des ministres, soit par un État, soit par la commission. La Cour européenne rendra
alors un arrêt qui s’imposera aux États concernés.
Outre les traités et les conventions internationales, autre source du droit : la loi.
2) La loi
a) La constitution
En matière pénale, les lois ordinaires sont les lois qui ont été votées par le
Parlement, promulguées par le Président de la République et qui sont publiées au
Journal Officiel. En l’absence de précision particulière, la loi entre immédiatement en
vigueur. Cependant, les citoyens ont la possibilité d’invoquer leur ignorance de la loi
dans un délai de trois jours francs à compter de la publication.
Quelles sont donc les lois applicables en matière pénale ? Les lois sont souvent
matérialisées au travers des codes : Code pénal entré en vigueur au 1er mars 1994
qui est venu remplacer celui de 1810, Code de procédure pénale de 1959, code de
justice militaire de 2006. Outre ces lois intégrées dans des codes, s’appliquent en
matière pénale de très nombreuses lois éparses : loi sur la presse du 29 juillet 1881,
loi sur les sociétés du 24 juillet 1966, désormais codifiée dans le Code de commerce
de septembre 2000…
Des textes émanant du pouvoir exécutif vont être source de droit pénal : il s’agit des
ordonnances et des règlements administratifs. En revanche, les circulaires ne
peuvent pas constituer des sources de droit en matière pénale car elles ne peuvent
pas contenir d’incriminations. Pourtant, en droit pénal, la tendance actuelle tient au
développement croissant des circulaires. Celles-ci sont de plus en plus nombreuses
dans les domaines où la réglementation est de plus en plus complexe (domaine
économique, domaine fiscal…). Leur rôle consiste à faciliter l’application des textes
mis en place. Lorsqu’elles ont un usage interne, elles sont destinées à l’utilisation
des fonctionnaires chargés d’appliquer les textes. Lorsqu’elles sont à usage externe,
le justiciable ou ses conseils peuvent en prendre connaissance.
Depuis la constitution de 1958, plusieurs actes pris par le pouvoir exécutif sont
source de droit pénal : les décisions présidentielles, les ordonnances, les décrets en
conseil d’État et les autres règlements administratifs :
• les décrets en conseil d’État : ce sont les décrets pris par le pouvoir
exécutif en vertu de son pouvoir réglementaire (art. 37 de la
constitution). Ainsi, les contraventions relèvent du pouvoir réglementaire
en ce qui concerne leur définition et leur sanction. Outre l’article 37 de la
Constitution, c’est également la solution que retient l’article 111-2 NCP
aux termes duquel “le règlement détermine les contraventions et fixe dans
les limites et selon les distinctions établies par la loi, les peines
applicables aux contrevenants”. Ainsi, le pouvoir exécutif peut, par voie
réglementaire, fixer des peines atteignant 1500 € d’amende ou 3000 € en
cas de récidive.
Ainsi, les décrets par lesquels le gouvernement édicte des contraventions ont une
autorité inférieure à celle de la loi au sens formel. En conséquence, comme tous les
actes administratifs, ils peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir
devant le Conseil d’État et être soumis au contrôle de la légalité du juge répressif.
Le règlement est source de droit pénal. Il va pouvoir faire l’objet d’un contrôle de la
légalité.
Une action directe est possible devant les juridictions administratives. De même,
une action indirecte est possible devant les juridictions répressives. En effet, un
individu poursuivi devant le tribunal de police sur la base d’un texte réglementaire
peut soulever l’exception d’illégalité. Le texte ne sera pas annulé, mais sera mis
entre parenthèses pour le cas particulier.
Ainsi, si l’on compare l’ancien article R. 26-15° et le nouvel article 111-5, quel est
le cadre d’application de l’exception d’illégalité et quelle va être l’étendue du
contrôle réalisé par le juge pénal.
Sous l’empire de l’ancien code pénal, la jurisprudence avait donné lieu à des
errements qui sont désormais réglés par l’article 111-5 NCP.
Cette analyse du tribunal des conflits, critiquée par de nombreux auteurs, n’avait
pas été suivie par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Celle-ci estimait
que les juges répressifs pouvaient apprécier la légalité des actes administratifs
réglementaires et individuels (Crim., 21 déc. 1961, D. 1962, 102, arrêt Dame Le
Roux). Cependant, dans cet arrêt, la chambre criminelle assortissait cette
affirmation d’une réserve : la légalité des actes administratifs individuels ne pouvait
être appréciée par le juge répressif que s’ils étaient clairs et qu’il n’était pas
nécessaire de les interpréter (Crim., 1er juin 1967, Bull. crim., n° 172, arrêt
CANIVET et dame MORET). En outre, dans l’arrêt SCHIAVON, la Cour de cassation
avait considéré que les juridictions répressives étaient incompétentes pour apprécier
la constitutionnalité d’une loi ou d’un texte ayant valeur législative (Crim., 26 févr.
1974, D. 1974, 2, 273).
L’entrée en vigueur du Nouveau Code pénal semble avoir réglé l’opposition entre le
tribunal des conflits et la chambre criminelle.
La solution de l’article 111-5 du Code pénal : compte tenu de ses termes généraux,
l’article 111-5 du Code pénal, comme l’ancien article R. 26-15° permet d’apprécier la
légalité de tous les actes administratifs quelle que soit leur nature (arrêtés, décrets,
ordonnances de l’article 38 de la constitution…). Par ailleurs, l’article 111-5 du Code
pénal règle l’opposition entre le tribunal des conflits et la chambre criminelle.
Il semble, en effet, qu’il y ait deux cas dans lesquels le contrôle de la légalité
est exclu :
Outre l’étendue du contrôle de la légalité, celui-ci peut-il être exercé dans tous les
cas ou est-il limité à des cas d’ouverture ? Le contrôle de la légalité obéit à des cas
d’ouverture. Quels sont les cas d’illégalité qui peuvent être invoqués devant le juge
pénal ? En pratique, il existe 4 cas d’ouverture qui constituent les 4 cas d’ouverture
du recours pour excès de pouvoir :
-hypothèse d’incompétence. Cela correspond à l’hypothèse dans laquelle
l’autorité qui a fait le règlement n’avait pas qualité pour le faire. Il peut s’agir d’une
incompétence territoriale ou d’une incompétence dans le temps. Il peut s’agir de
l’hypothèse dans laquelle un maire empiète sur les pouvoirs d’un préfet.
-vice de forme : il s’agit de l’hypothèse d’un acte administratif qui n’est pas
pris dans les conditions de forme prévues par la loi. L’avis d’un organisme qui doit
être sollicité et qui ne l’est pas ou l’hypothèse dans laquelle un arrêté n’est pas
publié.
-violation de la loi : le juge répressif doit vérifier si l’acte n’est pas contraire à
la règle de droit à laquelle cet acte est subordonné. Dans ce cadre, le terme de loi
englobe toutes les normes supérieures à celle de l’acte attaqué (règles
constitutionnelles, lois…).
-détournement de pouvoir : le prévenu prétend que l’autorité administrative
a utilisé ses pouvoirs dans un but autre que celui pour lequel ces pouvoirs lui
avaient été donnés. Ainsi, un maire ne peut agir que pour assurer le bon ordre, la
sûreté, la sécurité et la salubrité publiques (arrêt Dame Le Roux : Crim., 21
décembre 1961, D. 1962, 102).
Quels sont les effets de l’exception d’illégalité ? Quand une partie réclame le
bénéfice de l’exception d’illégalité, le juge est tenu de se prononcer et de statuer sur
la légalité. Cependant, si personne ne soulève l’exception d’illégalité, le contrôle ne
s’impose pas au juge. Le plus souvent, en pratique, l’exception est soulevée par le
prévenu.
Si le juge estime que l’acte administratif est régulier, il doit en faire application et
prononcer alors la condamnation prévue. S’il considère que l’acte est illégal, il doit
écarter l’application du texte et relaxer le prévenu. Cependant, il n’a pas le pouvoir
d’annuler l’acte. En conséquence, toute personne poursuivie sur la base de ce texte
ne pourra être relaxée que si elle invoque l’exception d’illégalité et que celle-ci est
admise.
Le principe applicable à la matière est formulé dans l’article 112-1 du Code pénal
qui constitue une reprise de l’article 2 du Code civil : “Sont seuls punissables les
faits constitutifs d’une infraction à la date à laquelle ils ont été commis (al. 1er).
Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date
(al. 2). Toutefois, les dispositions nouvelles s’appliquent aux infractions commises
avant leur entrée en vigueur et n’ayant pas donné lieu à une condamnation passée
en force de chose jugée lorsqu’elles sont moins sévères que les dispositions
anciennes”.
Toutefois, les articles 112-2 à 112-4 du Code pénal précisent que, dans certains
cas, les lois sont d’application immédiate.
Si l’on analyse ces différents articles contenus dans le Code pénal, on observe que le
principe de la non-rétroactivité s’applique différemment suivant que l’on est en
présence d’une loi de fond ou de forme. Il faudra également régler la question des
autres sortes de lois pénales.
Si l’on tente de justifier cette règle, au plan pratique, celle-ci s’explique par le fait
que l’on doit avoir connaissance de la règle du jeu à l’avance. Sur le plan juridique,
on présente ce principe comme la conséquence du principe de la légalité des délits
et des peines. La situation du délinquant ne doit pas pouvoir être aggravée par
l’effet d’une loi postérieure à la commission des faits. Historiquement, la question
s’est posée de savoir quelle était la force de ce principe de non rétroactivité. Celui-ci
étant contenu dans l’article 8 de la DDHC, il a donc une valeur constitutionnelle.
- les lois qui se disent expressément rétroactives. Dans ce cas, ces lois
s’appliquent à la date qu’elles prévoient. Tel est le cas de l’ordonnance de 1944 sur
l’indignité nationale à l’encontre de tous ceux qui ont collaboré avec l’ennemi depuis
le 18 juin 1940.
- les lois interprétatives : elles ont pour objet de préciser le sens d’une
disposition contenue dans une loi antérieure, sans pour autant en modifier le
contenu. En fait, ces lois interprétatives sont rétroactives dans la mesure où elles
font corps avec la loi qu’elles viennent interpréter et ont donc le même champ
d’application dans le temps. Ex : la loi du 22 juillet 1996 de lutte contre le
terrorisme qui a précisé la notion d’arme, elle a ainsi précisé qu’un chien utilisé pour
tuer, blesser ou nuire pouvait être considéré comme une arme.
Cette règle de la rétroactivité est posée par l’article 112-1 alinéa 3 du Code
pénal. Quel est le contenu de cette règle, comment s’applique t’elle et quelles sont
ses limites ? Autant de questions que nous aborderons successivement.
a) Le contenu du principe
Ce principe de la rétroactivité in mitius des lois pénales de fond plus douces trouve
sa justification dans le fait que lorsque la loi nouvelle est moins sévère, la non-
rétroactivité n’a plus de raison d’être. En effet, dans ce cas, une application
rétroactive de la loi ne met pas en péril la liberté individuelle.
Déjà, sous l’empire de l’ancien Code pénal, la jurisprudence s’était posé la question
de savoir quelle était la valeur de ce principe de la rétroactivité in mitius. En la
matière, le conseil constitutionnel (décision 80-127 DC des 19 et 20 janvier
1981, 1981, II, 19701) a conféré une valeur constitutionnelle à ce principe. En
conséquence, si le législateur viole ce principe, il s’expose à la sanction du conseil
constitutionnel. La Cour européenne des droits de l’homme l’a également validé
(CEDH, 17 septembre 2009, SCOPPOLA c/ Italie : CJUE, 3 mai 2005, BERLUSCONI).
b) L’application du principe
La loi nouvelle plus douce s’applique (art. 112-1 al. 3) à toutes les infractions qui
n’ont pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée. Qu’est-ce
que cela signifie exactement ? Cette règle emporte deux conséquences :
- tout d’abord, elle implique que la loi nouvelle doit recevoir application tant que
l’infraction n’est pas définitivement jugée. Ainsi, la loi nouvelle s’applique lorsque
l’affaire est en cours, même lorsqu’un jugement sur le fond a déjà été rendu.
- Ensuite, cette règle signifie qu’une loi nouvelle plus douce ne peut pas porter
atteinte aux condamnations qui sont devenues définitives avant son entrée en
vigueur. Cette solution se justifie aisément. En effet, une solution contraire
conduirait à remettre en cause un très grand nombre de décisions ce qui
entraînerait un encombrement évident des juridictions et une absence totale de
sécurité juridique. Cependant, cette solution connaît une limite depuis l’entrée en
vigueur du NCP. En effet, son article 112-4 al. 2 dispose que “la peine cesse de
recevoir exécution quand elle a été prononcée pour un fait qui, en vertu d’une loi
postérieure au jugement, n’a plus le caractère d’une infraction pénale”. Ainsi, la
dépénalisation va conduire à la remise en cause de décisions ayant acquis
l’autorité de la chose jugée. Cependant, cet alinéa 2 de l’article 112-4 pose deux
difficultés d’application :
- 1ère difficulté : la question s’est posé de savoir ce qu’il fallait
exactement entendre par dépénalisation. Cette question ne pose pas difficulté
lorsque le comportement est réellement dépénalisé. Tel est, notamment, le cas pour
le vagabondage et la mendicité. En revanche, peut-on considérer qu’il y a
dépénalisation lorsque certes l’infraction disparaît mais que le comportement est
réprimé sous un angle différent ? Tel est le cas de l’abus de blanc seing qui est
désormais poursuivi sous l’angle de l’abus de confiance ou de l’escroquerie. Dans ce
dernier cas, on doit considérer qu’il n’y a pas de dépénalisation.
- 2nde difficulté : l’article 112-4 précise qu’en cas de dépénalisation,
“la peine cesse de recevoir exécution”. Cela signifie donc que cette disposition
produit les mêmes effets qu’une grâce. En conséquence, la peine n’est plus
exécutée, mais la condamnation n’est pas anéantie ; elle demeure donc inscrite au
casier judiciaire et pourra, dès lors, être prise en compte dans le cadre de la
récidive.
On a longtemps considéré que le moment à partir duquel la loi plus douce pouvait
être invoquée était celui de la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle. Cependant,
une décision du conseil constitutionnel est venue jeter le trouble sur la question
(Décision n° 92-305 DC du 21 février 1992, J.O. 29 février, p. 3122). En effet, dans
cette décision, le Conseil constitutionnel a considéré que “dans les domaines relevant
de sa compétence, il appartient au législateur, sous réserve de l’application
immédiate de mesures répressives plus douces, de fixer les règles d’entrée en
vigueur des dispositions qu’il édicte”. Ainsi, à la suite de cette décision, de nombreux
auteurs ont estimé que le législateur ne pouvait pas reporter l’entrée en vigueur des
dispositions pénales plus douces (GENEVOIX, notamment).
Cependant, ce principe de la rétroactivité in mitius connaît certaines limites.
En réalité, le point de savoir si une disposition nouvelle est plus douce ou plus
sévère ne pose guère de difficulté. En revanche, la question est beaucoup plus
délicate lorsqu’un même texte combine à la fois des dispositions plus douces et
d’autres plus sévères.
Loi qui restreint le champ de l’incrimination : loi du 9 juillet 2010 sur les violences
faites aux femmes qui restreint la définition du champ de la dénonciation
calomnieuse. Il faut désormais démontrer que le fait n’a pas eu lieu pour constituer
la dénonciation calomnieuse.
Loi qui supprime une peine : la loi du 15 aout 2014 qui supprime les peines
planchers qui s’appliquaient depuis 2007 aux récidivistes.
Loi prévoyant une peine plus douce : la peine de contrainte pénale permet un suivi
individualisé et état d’une personne qui a commis un délit mais qui reste en liberté,
constituant ainsi une nouvelle alternative à l’emprisonnement (cass crim 15 avril
2015).
Constituent des dispositions plus sévères, celles qui créent une nouvelle
incrimination, celles qui élargissent le champ d’application d’une incrimination,
notamment à une nouvelle catégorie de prévenus (Crim., 19 juin 2007, Droit pénal
2007, com. 134), celles qui suppriment ou limitent les causes d’irresponsabilité
pénale (exclusion du bénéfice de l’immunité familiale pour les soustractions
commises entre alliés au même degré : crim., 14 nov. 2007, Droit pénal 2008, com.,
16), celles qui augmentent le quantum d’une peine, celles qui limitent les possibilités
d’aménagement de la peine, celles qui instituent une circonstance aggravante qui a
pour effet d’augmenter la peine encourue…
Comment faire, en pratique, lorsque le texte nouveau combine tout à la fois des
dispositions plus douces et plus sévères ?
Après avoir envisagé l’application dans le temps des lois pénales de fond,
nous allons nous intéresser aux lois pénales de forme.
Les lois de procédure sont aussi appelées lois de forme. Elles concernent la
compétence et l’organisation judiciaire, les modalités des poursuites, les formes de
la procédure, les prescriptions de la peine et de l’action publique. Les lois de forme
sont visées dans le nouveau code pénal par l’article 112-2, 1° et 2° NCP. Aux
termes de cet article “Sont applicables immédiatement à la répression des
infractions commises avant leur entrée en vigueur : les lois de compétence et
d’organisation judiciaire, tant qu’un jugement sur le fond n’a pas été rendu en
première instance ; les lois fixant les modalités des poursuites et les formes de la
procédure”.
Les lois de procédure (article 112-2 NCP) s’appliquent immédiatement aux faits
délictueux commis avant leur promulgation. Cependant, cette solution ne s’applique
bien évidemment pas aux condamnations devenues irrévocables car aucune règle ne
permet de réviser une condamnation déjà prononcée (sauf octroi d’une mesure de
grâce).
En pratique, il est nécessaire de définir avec précision ce que l’on entend par
application immédiate. Cette notion doit être distinguée de la rétroactivité. En effet,
les lois nouvelles de forme ne sont pas rétroactives. En effet, si on estimait qu’une
loi de forme était rétroactive, il faudrait annuler tous les actes de procédure déjà
réalisés pour soumettre toute la situation à la loi nouvelle. Or, lorsque l’on fait
application de l’effet immédiat de la loi nouvelle, on applique successivement les
deux lois. La loi nouvelle prend seulement le relais de la loi ancienne. La procédure
continue avec la loi nouvelle mais ce qui a été déjà accompli sous l’empire de la loi
ancienne demeure.
La justification de cette règle tient au fait que la loi nouvelle a pour but une
meilleure administration de la justice criminelle. La loi nouvelle est présumée
meilleure que la loi ancienne et réalisée dans l’intérêt de la société et du délinquant.
Cette règle est applicable à tous les textes relatifs à l’organisation juridictionnelle et
à la compétence des tribunaux (création d’une juridiction spéciale pour mineurs). Si
une procédure criminelle devient correctionnelle, le tribunal correctionnel devra être
saisi pour appliquer la loi nouvelle. A l’inverse, si une procédure correctionnelle
devient de nature criminelle, la Cour d’assises devra être saisie mais ne pourra faire
application que de la loi ancienne moins sévère.
Les lois relatives à l’exécution des peines qui dépendent du droit pénitentiaire qui
constitue le prolongement de la procédure pénale reçoivent elles aussi une
application immédiate sauf si elles ont pour résultat de rendre plus sévères les
peines prononcées.
2) L’atténuation du principe
Il est deux hypothèses dans lesquelles on ne peut pas faire application de la loi
nouvelle de forme car une telle solution serait choquante : la première concerne les
lois relatives à la compétence et à l’organisation judiciaire et la seconde les lois
relatives à la procédure.
Au titre des autres lois pénales, nous allons nous intéresser aux lois relatives aux
modes de preuve, aux lois relatives à la prescription et aux lois relatives à
l’exécution et à l’application des peines.
Le NCP ne contient aucune disposition spécifique relative aux lois concernant les
modes de preuve. Et, en ce domaine, la doctrine est divisée sur la solution à
adopter. Certains auteurs (LEVASSEUR) considèrent qu’il s’agit de lois de fond et que
l’on doit donc leur faire application des principes de la non-rétroactivité et de la
rétroactivité in mitius.
D’autres, en revanche (MERLE et VITU), estiment que les lois relatives à la preuve
sont des lois de forme et qu’elles sont donc d’application immédiate. Cela signifie
donc que la preuve est régie par la loi en vigueur au jour où la preuve doit être
fournie, avec une réserve, cependant : les preuves préconstituées conservent la
valeur que leur accordait la loi en vigueur au jour de leur accomplissement. En ce
domaine, les décisions jurisprudentielles sont peu nombreuses, mais semblent
confirmer cette seconde thèse (Crim., 6 déc. 1973, Bull. crim., n° 454).
Quelles sont, maintenant, les règles gouvernant les lois relatives à la prescription ?
Ainsi, ces lois sont finalement régies comme des lois de fond ce qui diffère de la
solution applicable sous l’empire du code pénal de 1810.
La question se pose de savoir ce que l’on doit entendre par loi relative à l’exécution
et à l’application des peines : il s’agit des lois relatives aux conditions de mise en
œuvre de la peine prononcée (écrou, lieu de détention, transfèrement, mesures
d’individualisation de la peine).
Après le règlement des conflits de lois pénales dans le temps, nous allons nous
intéresser au règlement des conflits de lois pénales dans l’espace.
En raison du déplacement des personnes et des biens entre les différents États, il
arrive fréquemment que des infractions soient situées géographiquement à des
endroits différents. Le problème est de savoir, dans ces hypothèses, quelle loi on va
devoir appliquer. Pour bien comprendre le système appliqué par le droit français, il
convient d’aborder les différents systèmes envisageables avant d’étudier le système
retenu en France.
• Le système de la territorialité
En vertu de ce principe, une loi pénale s’applique à tous les individus quelle que soit
leur nationalité dès lors qu’ils ont commis sur ce territoire une infraction que la loi
édicte.
Cette théorie est compréhensible pour plusieurs raisons : tout résident dans un pays
doit connaître la législation du pays d’accueil et doit en respecter les dispositions. De
plus, le juge chargé d’appliquer la loi connaît mieux les lois de son pays que le droit
étranger. Cependant, cette théorie présente des inconvénients : par exemple, un
étranger qui a commis une infraction dans son pays peut vouloir se réfugier en
France pour échapper à sa propre législation. Il en est de même pour un français qui
ayant commis une infraction à l’étranger reviendrait ensuite en France pour
échapper aux poursuites.
• Le système de la personnalité
• Le système de l’universalité
Dans le NCP, la question des conflits de lois pénales dans l’espace est envisagée par
les articles 113-1 et s.. Le droit français ne fait pas une part égale aux différentes
théories que nous venons d’envisager. En résumé, on peut dire que le droit pénal
français repose à titre principal sur la territorialité. A titre subsidiaire, il repose sur le
principe de la personnalité. Enfin, ce n’est qu’à titre exceptionnel qu’il a recours à la
théorie de l’universalité.
Il faut faire une distinction suivant que l’infraction a été commise en France ou à
l’étranger, avant d’aborder la compétence universelle.
• Le lieu de l’infraction
Cette détermination est importante car, parfois une même infraction peut se situer
dans plusieurs pays différents. Le principe de solution découle en droit français de
l’article 113-2 alinéa 2 du NCP qui dispose que “l’infraction est réputée commise
sur le territoire de la République dès lors qu’un de ses faits constitutifs a eu lieu sur
ce territoire”. Le problème en pratique revient alors à déterminer la notion de fait
constitutif. La difficulté réside dans le fait que le terme « fait constitutif » n’est pas
une notion pénale à proprement parler. Le droit pénal, en revanche, connaît la
notion d’élément constitutif et de condition préalable (cadre dans lequel l’infraction
peut être commise).
La jurisprudence sous l’empire du Code pénal de 1810 avait adopté une position
extrêmement large puisqu’elle considérait que la loi française était applicable qu’un
élément constitutif ait été réalisé en France ou seulement une condition préalable de
l’infraction. La notion de fait constitutif semble pouvoir inclure à la fois la notion de
condition préalable et d’élément constitutif.
A l’inverse, l’article 113-10 NCP dispose que la loi pénale française s’applique à
tout crime ou délit contre les agents ou les locaux diplomatiques ou consulaires
français commis hors du territoire de la République.
Lorsque les conditions fixées par les articles 113-6 et 113-7 NCP sont réunies, la
poursuite des délits doit être précédée d’une plainte de la victime ou de ses ayants
droit (article 113-8 du NCP). Peu importe que la plainte de la victime préalable aux
poursuites à la requête du ministère public ait été déposée en France ou à
l’étranger, dès lors que dans le second cas elle a été transmise aux autorités
judiciaires françaises (Crim., 24 nov. 1998, Droit pénal 1999, n° 79).
Cependant, l’article 113-9 NCP précise qu’aucune poursuite ne peut être exercée
contre une personne qui justifie qu’elle a été jugée définitivement à l’étranger pour
les mêmes faits et, en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite.
Ainsi, le législateur fait application du principe non bis in idem.
Après avoir envisagé la question du règlement des conflits de lois pénales dans
l’espace, nous allons nous intéresser à la question de l’entraide répressive
internationale.
En matière de droit pénal., une coopération est nécessaire entre les États. La
procédure de nature administrative prend la forme de l’extradition. Mais, à côté de
l’extradition, il existe d’autres formes d’entraide répressive internationale.
1) L’extradition
L’extradition peut être définie comme la procédure par laquelle un État (État requis)
accepte de livrer un individu réfugié sur son territoire à un autre État appelé État
requérant pour permettre à ce dernier soit de le juger soit de lui faire exécuter sa
peine s’il a déjà été jugé par contumace.
L’utilité de cette technique est évidente bien qu’elle ne soit pas d’un usage très
fréquent (environ 400 par an). Son utilité principale est d’éviter les lacunes de la
répression. Ce système ancien a été perfectionné au XIX° siècle grâce à de
nombreux traités signés entre les différents pays. En France, jusqu’à une date
récente, la loi du 10 mars 1927 envisageait la question de la procédure applicable
en matière d’extradition. Cependant, cette loi avait un caractère subsidiaire
puisqu’elle prévoyait dans son article 1° qu’en l’absence de traité, elle était
applicable. Désormais, la loi du 9 mars 2004 a abrogé celle de 1927 (loi Perben II).
Elle s’applique également à titre subsidiaire, c’est-à-dire, en l’absence de convention
internationale ou lorsque certains points ne sont pas réglementés par les
conventions internationales
Dans le cadre de cette loi de 2004, lorsque l’on étudie l’extradition, une bonne
compréhension de la matière exige que l’on aborde ses conditions, la procédure
applicable ainsi que ses effets. Cette loi a, cependant, fait l’objet de modifications
avec la loi du 12 mai 2009.
En ce qui concerne les États, aux termes de l’article 696-2 CPP, l’extradition n’est
accordée que si l’infraction a été commise :
- sur le territoire de l’Etat requérant par un ressortissant de cet Etat ou par
un étranger ;
- en dehors de son territoire par un ressortissant de cet Etat ;
-en dehors de son territoire par une personne étrangère à cet Etat, quand
l’infraction est au nombre de celles dont la loi française autorise la poursuite en
France, alors même qu’elles ont été commises par un étranger à l’étranger (Etat de
la victime de l’infraction).
Ces trois États doivent justifier avoir exercé contre l’individu en cause des poursuites
ou avoir condamné la personne. En effet, on estime que si l’État n’a pas engagé de
poursuites c’est qu’il s’est désintéressé de l’affaire. Dans certaines hypothèses, il
peut y avoir une concurrence entre les 3 États. Dans ce cas, l’article 696-5 CPP
prévoit la solution. On donne la priorité à l’État contre les intérêts duquel l’infraction
était dirigée ou à celui sur le territoire duquel elle a été commise. En revanche, si les
demandes concurrentes ont pour cause des infractions différentes, il est tenu
compte pour décider de la priorité de toutes les circonstances de fait et, notamment,
de la gravité et du lieu de l’infraction, de la date des demandes… Cependant, si
différents États sont en concurrence, lequel doit-on choisir ? En général, l’extradition
est accordée à l’État sur le territoire duquel l’infraction a été commise.
S’agissant des infractions concernées, toute infraction ne peut pas donner lieu à
une extradition. Pour qu’une infraction permette l’extradition d’une personne, elle
doit remplir plusieurs conditions (article 696-3 CPP) :
b) La procédure d’extradition
En application de la loi du 9 mars 2004, il est nécessaire de distinguer selon que l’on
applique la procédure de droit commun ou la procédure simplifiée.
Il convient de distinguer selon que la France est l’Etat requis ou l’Etat requérant.
La phase administrative débute par une demande d’un État étranger adressée au
gouvernement français par la voie diplomatique (art. 696-8 CPP). Le dossier est
alors transmis par le Ministre des affaires étrangères au ministre de la justice qui
transmet ensuite la demande d’extradition au procureur général territorialement
compétent (art. 696-9 CPP). Le procureur général du lieu d’arrestation de l’individu
procède alors à son interrogatoire, dans les 48 heures, et précise à la personne le
contenu de la demande d’extradition. Le procureur général informe également la
personne qu’elle peut être assistée d’un avocat choisi ou commis d’office. Il lui
précise également qu’elle a la faculté de consentir ou de s’opposer à son extradition
(art. 696-10 CPP). A partir de là, deux cas sont à distinguer :
- 1er cas : la personne consent à l’extradition. C’est alors que débute la phase
judiciaire. Cette phase est déclenchée à l’initiative du procureur général qui saisit la
chambre de l’instruction à l’issue de l’interrogatoire (lorsque la personne réclamée
consent à l’extradition). La chambre de l’instruction, une fois saisie, a 5 jours pour
se réunir et faire comparaître l’individu concerné (art. 696-13 CPP). L’audience de
la chambre de l’instruction est publique, orale et contradictoire. L’État requérant ne
participe pas à cette phase de la procédure. La chambre de l’instruction entend la
personne et doit se prononcer sur la régularité formelle de l’extradition. En
revanche, elle n’a rien à dire en ce qui concerne l’opportunité de la demande. La
chambre de l’instruction doit donner acte à la personne de son consentement dans
le délai de 7 jours (art. 696-14 CPP). L’arrêt rendu par la chambre de l’instruction
n’est pas susceptible de recours (art. 696-14 CPP).
- 2nd cas (art. 696-15 CPP) : la personne indique au procureur général qu’elle ne
consent pas à l’extradition. Dans ce cas, la chambre de l’instruction est saisie sans
délai. La personne comparaît dans un délai de 10 jours ouvrables à compter de la
présentation au procureur général. Si la personne renouvelle son refus d’être
extradée, la chambre de l’instruction donne un avis motivé sur la demande
d’extradition dans le délai de un mois à compter de la comparution de la personne.
L’avis est défavorable si les conditions légales ne sont pas remplies ou en cas
d’erreur. L’avis négatif peut faire l’objet d’un pourvoi pour vices de formes (art. 696-
15 CPP). L’avis négatif définitif de la chambre de l’instruction met fin à la
procédure. L’extradition ne pourra pas être accordée. En revanche, en cas d’avis
positif de la chambre de l’instruction, l’extradition ne s’impose pas (art. 696-18
CPP). L’exécutif est maître de la décision. Cette décision résulte d’un décret du
premier ministre. Ce décret peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir
dans un délai d’un mois (art. 696-18 CPP).
Ainsi, le délai de 7 jours dans lequel la personne qui fait l’objet de la demande
d’extradition doit comparaître devant le procureur général passe ici à 2 jours (art.
696-26 CPP).
Il est nécessaire, ici encore, de distinguer suivant que la France est l’État requis ou
l’État requérant.
Lorsque la France est l’État requis, la personne peut être extradée à tout
moment dès lors que le décret d’extradition a été signé. La France doit livrer la
personne. L’État qui a demandé l’extradition dispose alors d’un délai de 1 mois pour
recevoir la personne (art. 696-18 CPP). A l’expiration du délai de 1 mois, si l’État
qui a requis l’extradition n’a pas reçu la personne, celle-ci doit, sauf cas de force
majeure, être remise d’office en liberté et aucune demande nouvelle n’est possible
pour la même cause.
Lorsque la France est l’État requérant, l’extradition n’est valable que si la France
l’a obtenue dans des conditions légales. L’extradition peut par la suite donner lieu à
une réextradition à destination du pays initialement requis ou en direction d’un autre
État tiers. Dans ce dernier cas, le gouvernement français ne défère à cette requête
qu’après s’être assuré du consentement du pays par lequel l’extradition a été
accordée (art. 696-41 CPP).
• La collaboration policière
Celle-ci est nécessaire dans la mesure où les infractions les plus graves sont souvent
commises au plan international (trafic de stupéfiants…). La collaboration est
nécessaire pour lutter efficacement contre le banditisme.
Au début, la collaboration était limitée à de simples contacts entre les polices d’États
limitrophes sur la base de simples circulaires. Puis, des conventions internationales
ont été signées en matière d’entraide, spécifiques à certaines infractions (convention
de 1929 sur le faux monnayage). Par la suite a été créé INTERPOL dont le nom date
de 1956 et correspond au code-radio de l’organisation. INTERPOL consiste dans une
organisation internationale de la police criminelle. Actuellement, son siège social est
situé à Lyon. Cette organisation a été créée en 1923 à Vienne en Autriche.
Actuellement, 150 États en sont membres. INTERPOL est une organisation très
structurée. Elle comprend une assemblée générale composée des délégués de
chaque État membre, un comité exécutif et un secrétariat général qui assure
l’activité administrative de l’organisation (fichiers sur la criminalité internationale,
centralisation et diffusion des renseignements) et un bureau central national par
État adhérent. INTERPOL contient une véritable encyclopédie du crime.
Outre INTERPOL, le Traité sur l’Union européenne du 7 février 1992 jette les
fondations d’une coopération en matière de justice. Cette coopération porte,
notamment, sur la lutte contre la toxicomanie.
En outre, les accords de Schengen des 14 juin 1985 et 19 juin 1990 (dont
l’application a été fixée au 26 mars 1995) prévoient de supprimer les contrôles aux
frontières entre les États parties à la convention. Ces accords prévoient également
la création d’une coopération entre les services de police des différents États
concernés. Notamment, l’article 40 des accords de Schengen, dispose que les agents
d’un État contractant sont autorisés à poursuivre l’observation d’une personne sur le
territoire d’un autre État à la simple condition que ce dernier y consente. En outre,
ces accords prévoient également la possibilité d’exercer des poursuites en cas de
flagrance ou d’urgence. Cependant, dans ce cas, l’arrestation doit être effectuée par
les agents de l’État dans lequel l’individu se trouve.
Parallèlement, c’est au 1er juillet 1999 qu’EUROPOL (office européen de police) est
entré en service. La coopération policière est, en effet, apparue comme une
nécessaire conséquence de la suppression des contrôles aux frontières. En pratique,
les Etats adhérents de l’Union européenne s’engagent à y adhérer. Quel est le rôle
d’EUROPOL ? En application du principe de subsidiarité, les compétences d’EUROPOL
sont centrées sur des formes et des types de criminalité insuffisamment
appréhendés : trafic illicite de stupéfiants, trafic illicite de matières nucléaires et
radioactives, traite des êtres humains…
• La collaboration judiciaire
Certes, l’application des lois de procédure est limitée à l’État dont elles émanent.
Cependant, il est des hypothèses dans lesquelles des investigations sont nécessaires
en territoire étranger. Pour cette raison, des conventions sont signées entre les États
pour des infractions spécifiques (trafic de stupéfiants…) pour permettre, notamment,
la réalisation de commissions rogatoires. En matière de collaboration judiciaire, la
convention la plus importante est celle dite d’entraide judiciaire en matière pénale
qui date de 1959.
Pour faciliter la coopération judiciaire, a été créé EUROJUST qui est chargé de
promouvoir et d’améliorer la coordination et la coopération en matière d’enquêtes et
de poursuites. Chaque Etat dispose, au sein d’EUROJUST, de représentants
nationaux.
Le problème concret qui se pose est de savoir si une décision étrangère peut
produire des effets en France. Pour répondre à cette question, il est nécessaire de
distinguer suivant que ces décisions ont une autorité négative ou positive.
• L’autorité négative des décisions
Cependant, pour qu’il en soit ainsi, l’article 113-9 NCP pose plusieurs conditions :
- l’individu doit justifier de l’existence d’un jugement étranger ;
- la décision étrangère doit avoir été rendue par une juridiction compétente
aux yeux du droit français ;
- s’il s’agit d’un jugement de condamnation, la peine doit avoir été exécutée
ou doit être prescrite, c’est-à-dire qu’elle ne doit plus pouvoir être exécutée.
Après avoir envisagé dans une première sous-section la nécessité d’un élément
légal, nous allons affirmer dans une seconde sous-section qu’une qualification
pénale ou judiciaire est nécessaire.
A) Le moment de la qualification
B) Le contenu de la qualification
Dans certains cas, l’incrimination prévue par le droit pénal peut faire appel à des
notions d’autres branches du droit. En raison du principe de l’autonomie du droit
pénal, le juge n’est pas lié par la nullité de l’acte juridique qui conditionne la
répression. Ainsi, un contrat nul peut donner lieu à une condamnation pour abus de
confiance. Tel est, notamment, le cas si la nullité du contrat s’explique en raison
d’une atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs.
Le ministère public se voit soumettre des faits par les autorités de police ou de
gendarmerie. Le ministère public va retenir une qualification puis va transmettre aux
fins de poursuite. Cette qualification est réalisée sur la base d’informations qui sont
susceptibles d’évoluer ou d’être complétées. Pour cette raison, la qualification
retenue par le ministère public ne lie pas les juridictions répressives. La qualification
initiale va pouvoir être modifiée dans des phases ultérieures, notamment au
moment du jugement.
La méthode analogique permet de résoudre un cas d’espèce, non prévu par la loi,
en ayant recours à l’esprit de la loi et en prenant pour appui la solution retenue dans
un cas similaire. Cette méthode apparaît plus dangereuse que les précédentes car
elle nécessite pour son application une absence de texte, c’est-à-dire finalement un
vide juridique dans un domaine déterminé. Or, le droit français est lié par le principe
de la légalité des délits et des peines. En pratique, il est possible de distinguer deux
types d’analogies :
-l’analogie légale qui permet d’appliquer une règle établie à un cas semblable.
-l’analogie juridique permet de résoudre un cas véritablement non prévu par
un texte. Dans ce cas, le juge se fonde, non plus sur un texte, mais sur l’esprit
général du droit pénal. Cette dernière solution est la plus dangereuse car elle
permet finalement au juge de créer le droit. Le système présente aussi
l’inconvénient d’être extrêmement arbitraire.
La règle de l’interprétation stricte ayant été instaurée dans l’intérêt de l’individu, elle
ne peut pas se retourner contre lui. Pour cette raison, on ne l’applique pas à toutes
les sanctions pénales. En effet, on doit faire une distinction entre les dispositions
défavorables à l’individu et celles qui lui sont favorables.
Interpréter une loi de manière stricte consiste pour le juge pénal à en dégager le
sens. Lorsque la loi pénale est obscure, le juge doit en découvrir le sens véritable.
Et, dans le cadre de l’interprétation stricte, le juge n’a pas la possibilité de se
substituer au législateur en utilisant un raisonnement par analogie. Dans le cadre de
l’interprétation stricte, deux cas sont à distinguer : celui dans lequel la loi est
obscure et le cas dans lequel elle est claire :
Lorsque la loi est obscure, pour en découvrir le sens véritable, le juge doit recourir
aux travaux préparatoires. Mais, si après cette recherche du sens de la loi un doute
subsiste quant au sens à en donner, ce doute doit profiter à l’accusé. Pour
déterminer la portée du texte, le juge peut s’inspirer du but poursuivi par le
législateur. Ainsi, on fait finalement application de la méthode téléologique.
A l’inverse, lorsque la loi est claire, le juge n’a plus véritablement à l’interpréter. Il
doit se contenter de l’appliquer. En application du principe de l’interprétation stricte,
le juge n’a pas la possibilité de l’appliquer à des cas non visés par le législateur. En
conséquence, un fait qui ne serait pas expressément visé par le texte d’incrimination
doit échapper à la répression. Tel est, notamment, le cas lorsqu’un fait analogue se
trouve puni. Ainsi, se trouve donc prohibé le raisonnement par analogie.
Lorsque l’on aborde les conflits de qualifications, une difficulté majeure se pose. En
effet, pour une même notion, les auteurs n’emploient pas les mêmes termes. Ainsi,
certains auteurs opposent le concours idéal au concours réel. D’autres opposent les
conflits de qualifications légales aux concours réels. D’autres, enfin, opposent les
conflits véritables de qualifications aux conflits apparents.
Sous l’empire du Code pénal de 1810, la solution à apporter en cas de concours réel
d’infractions était donnée par l’article 5. Cependant, ce texte ne fournissait qu’une
solution générale consistant dans le non-cumul des peines. Pour cette raison, la
jurisprudence était venue apporter des précisions complémentaires concernant
l’interprétation de ce texte. Le nouveau Code pénal est revenu sur la question et a
intégré les articles 132-2 à 132-7 consacrés au concours réel.
Sur le fond, on peut affirmer que ces articles ne modifient pas la matière. Ils se
contentent de reprendre les solutions qui avaient été dégagées par la jurisprudence.
Les concours réels d’infractions se résolvent donc de manière identique avec le Code
pénal de 1810 et sous l’empire du nouveau Code pénal. On fait application du
principe du cumul des peines dans la limite du maximum légal le plus élevé. Afin de
bien comprendre le concours réel, il convient de distinguer le domaine d’application
de la règle du cumul des peines dans la limite du maximum légal le plus élevé et son
fonctionnement.
Le domaine d’application de cette règle doit être analysé quant aux infractions et
quant aux sanctions. En tout état de cause, le cumul des peines dans la limite du
maximum légal le plus élevé s’accompagne d’un cumul de qualifications.
Désormais, le nouveau Code pénal prévoit qu’en cas de concours réel entre
plusieurs contraventions, le juge doit additionner les peines afférentes à chacune
d’elles, même s’il s’agit de contraventions de 5° classe. Dans ce cas, en application
de l’article 132-7 du nouveau Code pénal, seules les peines d’amende se
cumulent. Cela signifie donc que les peines restrictives de droit ne se cumulent pas.
Lorsque l’on aborde les contraventions, il n’est plus question de peines
d’emprisonnement puisque l’emprisonnement avec le nouveau Code pénal a été
supprimé en matière contraventionnelle.
Ce même article 132-7 dispose aussi que la règle du non-cumul des peines est
exclue lorsque sont en concours réel une contravention et un crime ou un délit.
Dans ce cas, on pourra donc cumuler la peine de la contravention et celle du crime
ou du délit.
Bien que le nouveau Code pénal ne consacre aucune disposition sur ce point, la
règle du non-cumul des peines est également exclue pour certains crimes et délits
extérieurs au nouveau Code pénal. Cette solution ne constitue qu’une reprise de la
jurisprudence applicable sous l’empire du Code pénal de 1810. Il s’agit, en fait, de
cas dans lesquels des textes spéciaux dérogent formellement à la règle du non-
cumul des peines.
En pratique, les exemples sont nombreux : contributions directes (Crim., 6 mars
1989, Bull. crim., n° 104), forêts (Crim., 22 juin 1965, Bull. crim., n° 162), pêche
(Crim., 15 décembre 1949, Bull. crim;, n° 349), douanes (Crim., 2 octobre 1975,
Bull. crim., n°201).
Quel est le domaine d’application de la règle du cumul des peines dans la limite du
maximum légal le plus élevé quant aux sanctions ?
Quant aux sanctions, l’article 132-3 du nouveau Code pénal prévoit que lorsque
plusieurs peines de même nature sont encourues, il ne peut être prononcé qu’une
seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal. Cette règle vaut pour
les peines criminelles, délictuelles, restrictives de droits, substitutives à
l’emprisonnement. En résumé, cette règle vaut pour chaque nature de peine
pouvant être prononcée en matière délictuelle et criminelle.
Plusieurs cas de concours réels concernent une poursuite unique : il peut s’agir soit
d’infractions commises quasi simultanément et poursuivies ensemble, soit
d’infractions commises successivement mais découvertes et jugées ensemble. Dans
ces hypothèses, le Code pénal de 1810 retenait le principe du non-cumul des peines.
Ainsi, un arrêt de principe a considéré que “en cas de conviction de plusieurs crimes
ou délits compris dans la même poursuite, la peine la plus forte est seule
prononcée” (Crim., 13 décembre 1945, Bull. crim., n° 147).
En application des dispositions de l’article 132-3 du nouveau Code pénal, une
solution identique est retenue. En effet, cet article dispose que “lorsque à l’occasion
d’une même procédure la personne poursuivie est reconnue coupable de plusieurs
infractions en concours, chacune des peines encourues peut être prononcée.
Toutefois, lorsque plusieurs peines de même nature sont encourues, il ne peut être
prononcé qu’une seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal le plus
élevé”. Cela signifie que le juge doit rechercher si chaque infraction est réellement
constituée. Dans l’affirmative, il prononcera une déclaration de culpabilité pour
chacune d’elle. Ensuite, il devra prononcer une peine.
Si, dans certaines hypothèses, les infractions en concours réel font l’objet d’une
poursuite unique, il est d’autres hypothèses dans lesquelles on assiste à une
pluralité de poursuites.
A partir de ce texte, il apparaît que l’on distingue 2 hypothèses : celle dans laquelle
la confusion des peines est obligatoire et celle dans laquelle elle est facultative.
La confusion des peines est obligatoire lorsque étant de même nature, le total
des peines dépasse le maximum de la peine la plus sévère. Ainsi, si pour un premier
vol, l’individu est condamné à 2 ans d’emprisonnement et à 2 ans
d’emprisonnement pour un second vol. Le total des condamnations s’élève à 4 ans.
Or, le NCP (art. 311-3) prévoit que la peine maximale en matière de vol simple est
de 3 ans d’emprisonnement. Donc, la durée de 4 ans excédant le maximum légal (3
ans), la confusion des peines doit nécessairement intervenir.
Cependant, au-delà des règles fixées par le nouveau Code pénal, il convient de
remarquer que la formule utilisée par l’article 132-4 “dans la limite du maximum
légal le plus élevé” met fin à une difficulté qui avait été soulevée en jurisprudence
sous l’empire du Code pénal de 1810. En effet, l’article 5 de ce Code utilisait
l’expression “la peine la plus forte est seule prononcée”. En pratique, le problème
qui se posait était de savoir comment on déterminait la peine la plus forte. La
jurisprudence s’était prononcée en faveur de la peine prévue par le texte
d’incrimination (Crim., 3 oct. 1974, Bull. crim., n° 273). C’est cette solution qui est
donc reprise par l’article 132-4 du nouveau Code pénal.
1) L’évolution de la jurisprudence
Lorsque l’on est en présence d’un conflit de qualifications légales, deux solutions
sont envisageables :
• soit poursuivre sous une seule qualification en déterminant laquelle ;
• soit retenir autant de qualifications que de textes violés.
On retenait donc une seule qualification. Par la suite, cette solution a souvent été
reprise par la jurisprudence (Crim., 19 avril 1967, Bull. crim., n° 126 ; Crim., 26
mai 1976, Bull. crim., n° 181 ; Crim., 10 janvier 1979, Bull. crim., n° 9).
2) L’analyse de la jurisprudence
Cependant, quelle que soit la solution retenue, elle est toujours conforme au
principe non bis in idem d’après lequel il est impossible d’exercer deux poursuites
pour le même fait.
Le cumul de qualifications est assez souvent retenu dans le domaine du DPA car il
permet de sanctionner plus sévèrement certains comportements.
Ces solutions ne sont bien évidemment pas spécifiques au DPA. Ainsi, en DPS, la
jurisprudence retient une double déclaration de culpabilité pour les crimes de guerre
et les crimes contre l’humanité (Crim., 17 novembre 1986, Bull. crim., n° 342). Il en
va de même de la diffamation et de la violation du secret professionnel (Crim., 19
octobre 1982, Bull. crim., n° 225). En outre, la jurisprudence a considéré que
constituent des infractions distinctes la violence par personne dépositaire de
l’autorité publique et d’autre part, les actes attentatoires à la liberté individuelle
(Crim., 21 avril 1998, Bull. crim., n° 140). En revanche, la jurisprudence a estimé
qu’un prévenu ne peut être déclaré coupable à la fois de sévices graves ou cruauté
envers un animal domestique et de la contravention de destruction volontaire sans
nécessité d’un animal domestique alors que les faits reprochés au prévenu
procèdent d’une seule et même action coupable ayant consisté à enfermer un chat
dans un sac et à le projeter violemment sur le sol en provoquant sa mort (Crim., 4
février 1998, Bull. crim., n 46). De même, un prévenu peut être condamné pour
diffamation publique à caractère racial, ethnique ou religieux et pour complicité de
contestation de crime contre l’humanité (Crim., 12 septembre 2000, Droit pénal
2001, n° 4). De même, les deux qualifications de complicité de prise illégale
d’intérêts et d’usurpation de fonctions ne sont pas incompatibles entre elles et
peuvent être retenues pour un même fait (Crim., 21 février 2001, Bull. crim., n°
46).
Ainsi, lorsque les textes protègent des valeurs sociales différentes, le concours idéal
se résout par un cumul des qualifications en cause mais par un cumul des peines
dans la limite du maximum légal le plus élevé, c’est-à-dire dans les mêmes termes
qu’un concours réel.
Lorsque le juge cumule les qualifications, on peut affirmer qu’il respecte pleinement
le principe non bis in idem selon lequel une personne déjà jugée pour un fait
délictueux ne peut être poursuivie pour le même fait. En effet, l’expression “le
même fait” doit s’entendre, non pas sur le plan matériel, mais sur le plan juridique.
Le fait est donc synonyme de qualification. On ne peut pas poursuivre deux fois pour
la même qualification, mais on peut qualifier différemment pour la seconde
poursuite.
Ce fait justificatif est visé par l’article 122-4 al. 1er NCP aux termes duquel “n’est
pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé
par des dispositions législatives ou règlementaires”. A partir de cet alinéa, il
convient d’opposer l’ordre de la loi à celui du règlement.
1) L’ordre de la loi
Pour savoir si l’ordre de la loi peut constituer une cause d’irresponsabilité pénale, il
faut distinguer suivant que l’ordre résulte d’une loi pénale ou d’une loi civile.
• Si l’ordre donné par la loi émane d’une loi pénale, il est certain
qu’une loi pénale peut toujours déroger à une autre loi pénale. Il faut cependant
distinguer selon que l’ordre résulte d’une loi de fond ou de forme.
— si l’ordre découle d’un texte de procédure, il est certain que
l’utilisation des pouvoirs coercitifs prévus par le code de procédure pénale
(arrestation, perquisitions et saisies…) ne peut pas constituer des infractions à la loi
pénale (séquestration, violation de domicile…). Cette règle ne vaut, cependant, qu’à
la condition que ces actes soient accomplis par les autorités compétentes en
respectant les conditions prévues par la loi (horaires pour procéder à des
perquisitions…).
— si l’ordre découle d’un texte d’incrimination, la question est
plus délicate dans la mesure où l’on se trouve en présence d’un conflit
d’incriminations. Dans cette hypothèse, 2 cas sont à distinguer :
◊ 1er cas : si chaque incrimination déroge à l’autre, la personne qui
commet l’une des deux infractions est pénalement irresponsable. Tel est le cas si un
directeur de publication publie un “droit de réponse” (obligation prévue par l’article
13 de la loi de 1881) contenant une diffamation ou une injure (infraction contenue
dans la loi de 1881).
◊ 2nd cas : si une seule des deux incriminations déroge à l’autre, la
difficulté est alors de savoir quelle est celle qui vis-à-vis de l’autre constitue une
cause d’irresponsabilité pénale. Et, en la matière, la jurisprudence statue au cas par
cas. Ainsi, la jurisprudence a considéré que les dispositions relatives à la non-
assistance à personne en danger constituaient un ordre de la loi permettant de
relaxer du chef de violences volontaires une personne qui en raison de son
intervention musclée avait fracturé le bras de la personne à sauver. D’une manière
générale, la Cour de cassation considère que ne peut être justifié sur la base de
l’article 122-4 NCP un gendarme qui a pris un risque disproportionné à l’obligation
de mettre un terme aux infractions constatées en commettant des actes
manifestement illégaux causant la mort accidentelle d’un gendarme passager
(Crim., 23 mars 2004, Bull. crim., n° 77).
• Si l’ordre donné par la loi émane d’une loi civile, les tribunaux
admettent plus difficilement que l’ordre de la loi civile justifie la commission d’une
infraction. En matière civile, le texte qui a posé le plus de difficultés en la matière
est l’article 215 CC aux termes duquel “les époux s’obligent mutuellement à une
communauté de vie”. Cet article 215 CC a été invoqué dans 2 types de cas :
— 1er cas : cet article a été invoqué pour tenter de justifier la
relaxe d’une personne poursuivie pour proxénétisme car elle vivait avec une
prostituée. Dans un premier temps, la jurisprudence refusait la relaxe. Puis, par la
suite, elle a admis la relaxe lorsque l’individu ne partageait pas les produits de la
prostitution. C’est ce que retient désormais l’article 225-6 NCP.
— 2nd cas : l’article 215 CC était invoqué pour justifier entre époux
des poursuites pour viol au motif que le devoir de cohabitation entre époux implique
l’existence de relations sexuelles. Désormais, la jurisprudence estime que le mari qui
abuse de sa femme sans son consentement commet un viol (Crim., 26 sept. 1994,
Droit pénal 1995, n° 6).
Outre l’ordre de la loi, intéressons nous à l’ordre donné par un règlement.
2) L’ordre du règlement
1) L’autorisation de la loi
2) L’autorisation du règlement
3) L’autorisation de la coutume
4) Le consentement de la victime
Après avoir envisagé dans un 1er § l’ordre de la loi, nous allons aborder le
commandement de l’autorité légitime.
L’autorité légitime est celle qui a le pouvoir de commander l’exécution des lois. Il
s’agit d’une autorité publique, civile ou militaire. Ainsi, le fait de se conformer à un
ordre émanant d’une autorité privée ne peut pas constituer un fait justificatif. Ainsi,
ne serait pas justifié le salarié d’une entreprise privée qui commettrait une infraction
après en avoir reçu l’ordre de son employeur.
En outre, l’autorité légitime doit être une autorité compétente qui doit avoir reçu
une délégation lui permettant de donner l’ordre en question. Ainsi, si le juge des
libertés et de la détention est compétent pour délivrer un mandat de dépôt, tel n’est
pas le cas pour un maire.
Mais, même si l’autorité est légitime le fait justificatif n’est pas caractérisé si l’ordre
est manifestement illégal.
B) Le commandement illégal
Le commandement illégal est celui qui est donné par une autorité légitime qui agit
sans l’ordre de la loi.
En pratique, le problème qui se pose est de savoir si le subordonné doit obéir à cet
ordre illégal et s’il va jouir de l’impunité s’il obéit. Pour bien comprendre le
problème, il semble utile d’aborder les différents systèmes de solution qui ont été
proposés par la doctrine avant d’aborder la solution consacrée par le NCP.
3 systèmes différents ont été proposés par la doctrine. Nous allons les aborder
successivement :
Face à ces trois théories, quelle est la solution retenue par le nouveau Code pénal ?
L’article 122-4 NCP précise très clairement que l’ordre manifestement illégal ne
peut constituer un fait justificatif. En conséquence, est justifiée l’exécution d’un
ordre dont l’illégalité n’est pas manifeste. En application de cette règle, un gardien
de prison qui mettrait sous écrou un individu en raison d’un mandat de dépôt qui
serait par la suite déclaré illégal n’engagerait pas sa responsabilité pénale.
Cependant, si l’exécutant de l’ordre connaissait son caractère illégal, il ne pourra pas
bénéficier du fait justificatif même si l’illégalité n’est pas manifeste.
Dans le cadre de cet article 122-4 NCP, la difficulté majeure consiste à déterminer
la notion d’illégalité manifeste. Si l’on en croit la majorité des auteurs, il semble que
l’illégalité manifeste s’apprécie au travers d’un critère objectif et d’un critère
subjectif. En quoi consistent ces deux critères ?
Après l’ordre de la loi, nous allons aborder un autre fait justificatif : la légitime
défense.
La légitime défense est visée dans le NCP par les articles 122-5 et 122-6
respectivement relatifs à la légitime défense de droit commun et à la légitime
défense privilégiée. Aux termes de l’article 122-5 NCP, “n’est pas pénalement
responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou
autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la
légitime défense d’elle-même ou d’autrui, sauf s’il y a disproportion entre les
moyens de défense employés et la gravité de l’atteinte. N’est pas pénalement
responsable la personne qui, pour interrompre l’exécution d’un crime ou d’un délit
contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu’un homicide volontaire,
lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens
employés sont proportionnés à la gravité de l’infraction”. L’article 122-6 NCP
dispose que “Est présumé avoir agi en état de légitime défense celui qui accomplit
l’acte : 1° Pour repousser, de nuit, l’entrée par effraction, violence ou ruse dans un
lieu habité ; 2° Pour se défendre contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés
avec violence”.
La légitime défense consacre le droit de riposter même par la violence à une
agression injuste. Cette infraction va alors disparaître parce que la légitime défense
constitue un fait justificatif. On considère qu’il s’agit d’un droit privé de défense qui
s’explique en raison de l’impossibilité de recourir aux pouvoirs publics. La légitime
défense constitue une exception au principe selon lequel on ne peut pas se faire
justice à soi-même.
L’article 122-5 NCP permet d’observer que la légitime défense peut intervenir pour
protéger une personne ou un bien.
1) L’agression légitimante
2) La défense légitimée
• 1ère condition
La défense doit être nécessaire. Cette précision résulte de l’article 122-5 NCP. Il ne
peut y avoir légitime défense si la personne pouvait se protéger en ayant recours à
l’autorité publique. Se pose alors le problème de la fuite. En pratique, la
jurisprudence estime que si la personne pouvait neutraliser l’action de l’agresseur par
une fuite, la défense ne pourra pas être légitimée.
• 2ème condition
• 3ème condition
Sous l’empire de l’ancien Code pénal, la jurisprudence avait admis, sous certaines
conditions, la légitime défense des biens. Cette solution est désormais consacrée par
l’article 122-5 NCP. En matière de légitime défense des biens, quelles sont les
conditions relatives à l’attaque et à la riposte ?
On remarque que ces articles imposent que l’on analyse des notions de droit pénal
spécial puisqu’il est question d’escalade, d’effraction, et d’acte commis de nuit.
Plus précisément, l’article 122-6 NCP prévoit qu’ “est présumé avoir agi en état de
légitime défense celui qui accomplit l’acte : 1°) pour repousser, de nuit, l’entrée par
effraction, violence ou ruse dans un lieu habité ; 2°) pour se défendre contre les
auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violence”. Cependant, face à ces
présomptions de légitime défense, la jurisprudence estime que l’effraction nocturne
ne peut à elle seule justifier ni l’homicide ni les blessures s’il est établi que celui qui
a tué ou blessé savait que sa vie ou celle des tiers n’était pas menacée.
En pratique, une difficulté s’est posée sur le point de savoir quelle était la nature de
la présomption retenue. En effet, en droit français on distingue deux sortes de
présomptions : les présomptions simples et les présomptions irréfragables. Face à
une présomption simple, il est possible d’apporter la preuve contraire. Face à une
présomption irréfragable, il n’est pas possible d’apporter la preuve contraire. En
jurisprudence, on a pu observer une évolution. En effet, dans les années 1920-
1925, la jurisprudence considérait que la présomption établie par l’article 329 CP
était de nature irréfragable. En conséquence, toute preuve contraire était impossible
à rapporter. Cependant, cette solution a entraîné quelques abus en jurisprudence.
Pour cette raison, la jurisprudence a modifié son analyse et a considéré que la
preuve contraire pouvait être admise. La présomption simple édictée par l’article
329 CP emportait donc simplement un renversement de la charge de la preuve. Cela
signifiait donc que l’agresseur ou le ministère public qui prétendait qu’il n’y avait pas
légitime défense devait le prouver.
Aujourd’hui, l’article 122-6 NCP édicte une présomption de légitime défense sans
préciser s’il s’agit d’une présomption simple ou irréfragable. La majorité des auteurs
s’accorde à penser que l’on doit reprendre la jurisprudence antérieure qui
considérait dans ce cas que la présomption était simple (Crim., 19 février 1959, D.
1959, 161, arrêt REMINIAC ; Crim., 13 oct. 1993, GP 1994, 1, 94).
Les conditions de l’état de nécessité sont formulées de manière stricte ce qui est à
approuver. Il existe deux séries de conditions qui tiennent au péril évité et à l’acte
commis.
A) Le péril évité
Le danger que l’on veut éviter doit avoir pour victime l’agent lui-même ou ses biens.
Ce danger peut revêtir deux formes : il peut être soit physique soit moral. Ainsi, la
nature du danger est finalement indifférente.
En outre, de la même manière que pour la légitime défense, le danger doit être
actuel ou imminent. L’exigence d’un danger actuel ou imminent implique que
celui-ci doit être réel et non pas simplement éventuel. La question de savoir quel est
l’effet du danger putatif n’a pas été résolue par la jurisprudence. Cependant, la
doctrine s’accorde à penser que le danger putatif exclut le bénéfice de l’état de
nécessité.
Cette condition n’étant pas expressément retenue par l’article 122-7 NCP, les
auteurs estiment qu’elle a donc été supprimée par le nouveau Code pénal.
Cependant, la jurisprudence a estimé que le prévenu ne peut prétendre avoir agi en
état de nécessité dès lors qu’il s’est volontairement placé dans la situation de devoir
commettre une infraction en cas de survenance prévisible du danger (Crim., 22
sept. 1999, Bull. crim., n° 193).
B) L’acte de sauvegarde
La question qui se pose est de savoir si cette condition doit être appréciée de
manière stricte. Selon les auteurs, il semble que cette exigence doive être appréciée
de manière souple. Ainsi, elle serait retenue chaque fois que l’infraction était le
“meilleur moyen” d’éviter le péril (Paris, 6 oct. 1944 et 5 janvier 1945, S. 1945, II,
81). La jurisprudence estime que le vol en quantités importantes est incompatible
avec la notion d’acte nécessaire (Poitiers, 11 avril 1997, D. 1997, 512). En revanche,
la jurisprudence a estimé que le fait de scier les gonds de la porte d’entrée d’un
appartement inoccupé de l’OPAC pour s’y installer avec sa famille constitue une
réaction nécessaire et mesurée au danger réel, actuel et injuste auquel son enfant,
sa femme et lui étaient confrontés, justifiant ainsi sa relaxe (TGI Paris, 28 novembre
2000, D. 2001, 2, 512).
Lorsque l’on aborde l’élément matériel de l’infraction, cela signifie que l’on va
s’intéresser à la tentative. Il est, cependant, aussi nécessaire de s’intéresser à
l’infraction consommée.
Parfois, le résultat de l’infraction tel qu’il a été prévu par la loi n’est pas atteint.
Cela, quand la matérialité n’est pas complète. Dans ces hypothèses, soit le
délinquant n’a pas pu ou n’a pas voulu aller jusqu’au bout (tentative interrompue)
soit les efforts du délinquant se sont révélés vains (tentative infructueuse). Mais,
au-delà de ces deux types de tentative, la question se pose de savoir comment la
tentative est sanctionnée.
En application de l’article 121-5 du NCP, “la tentative est constituée dès lors que,
manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a
manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son
auteur”. En application de l’article 121-4 “est auteur de l’infraction la personne qui
tente de commettre un crime ou, dans les cas prévus par la loi un délit”.
A) Un commencement d’exécution
• La jurisprudence
• L’élément objectif
• L’élément subjectif
L’acte doit être accompli avec l’intention de commettre l’infraction. Cette intention
peut se déduire du caractère univoque de l’acte (une personne postée au sommet du
toit d’un immeuble armée d’un fusil à lunette est dotée d’une intention homicide).
En pratique, comment la jurisprudence distingue t’elle le commencement
d’exécution des actes préparatoires ?
La tentative infructueuse concerne les hypothèses dans lesquelles le but n’a pas été
atteint. Il s’agit soit de l’hypothèse de l’infraction manquée soit de l’hypothèse de
l’infraction impossible.
A) L’infraction manquée
B) L’infraction impossible
L’infraction impossible correspond à l’hypothèse dans laquelle l’agent n’a pas obtenu
le résultat soit parce que l’infraction n’existait pas (homicide sur un cadavre) soit
parce que le moyen employé était inefficace (revolver non chargé).
- thèse de l’impunité défendue au XIX° siècle par ROSSI. Cette thèse est
d’inspiration objective. En l’absence de résultat, il ne peut y avoir de répression.
Face à ces thèses doctrinales, quelle est la solution retenue par la jurisprudence ?
2) La jurisprudence
Aujourd’hui et depuis un arrêt de 1928 (Epoux FLEURY, Crim., 9 nov. 1928, D.P.
1929, 1, 97, note Henry), on considère que l’impossibilité du résultat est sans
incidence quant à la répression dès lors que les faits reprochés constituent le
commencement d’exécution. L’infraction impossible est donc assimilée à l’infraction
manquée. Ainsi, l’infraction impossible est réprimée sous l’angle de la tentative. Il a
ainsi été jugé que le fait de vouloir tuer une personne qui était déjà décédée était
constitutif d’une tentative d’homicide volontaire (PERDEREAU, Crim., 16 déc. 1986,
Bull. crim., n° 25).
Aux termes de l’article 121-4 NCP, “Est auteur de l’infraction la personne qui : 1°
Commet les faits incriminés ; 2° Tente de commettre un crime ou, dans les cas
prévus par la loi, un délit”. De cet article, on peut déduire deux règles :
La peine encourue en matière d’infraction tentée est la même que celle prévue pour
l’infraction consommée. Cela ne signifie cependant pas que la peine prononcée soit
identique en cas d’infraction tentée et d’infraction consommée. Souvent, les
tribunaux prononcent des peines moindres en matière de tentative.
Après avoir envisagé dans la section I l’infraction tentée, nous allons pouvoir
observer que la répression peut intervenir dans certains cas, même en l’absence de
résultat.
Section II) L’indifférence aux résultats réels
Les infractions obstacles diffèrent des infractions formelles par le fait que si un
résultat se produit, il caractérise une autre infraction. Et, en réprimant le
comportement d’origine, le législateur souhaite faire obstacle à la commission de la
seconde infraction. Les infractions obstacles sont relativement nombreuses en droit
français, dans la mesure où elles permettent d’incriminer en tant qu’infractions
autonomes des comportements qui sont constitutifs d’actes préparatoires pour des
infractions plus graves.
Dans le nouveau Code pénal, l’exemple le plus parlant d’infraction obstacle est
l’association de malfaiteurs. En effet, dans le nouveau Code pénal, cette infraction a
désormais une portée générale puisqu’elle a pour objet de prévenir tous les crimes
ou délits punis d’une peine de dix ans d’emprisonnement. Les infractions obstacles
nécessitent toujours la réalisation d’un élément matériel, aussi minime soit-il.
- l’infraction obstacle disparaît car elle est absorbée par l’infraction qu’elle
avait pour objet de préparer : ainsi, le complot est absorbé par l’attentat.
- les deux infractions sont constituées : les menaces et les violences.
- l’infraction obstacle devient une circonstance aggravante de l’infraction
réalisée in fine : la conduite en état alcoolique est une circonstance aggravante de
l’homicide involontaire.
Pour pouvoir appréhender la notion d’infraction, il faut savoir ce qu’a voulu l’agent.
Savoir ce qu’a voulu l’agent est étudié dans le cadre de l’élément moral de l’infraction
que l’on appelle également “élément psychologique”. En effet, un élément moral est
nécessaire pour que l’infraction soit constituée. La responsabilité de l’agent nécessite
la réunion de deux éléments : l’imputabilité et la culpabilité. L’imputabilité est
constituée dès lors que l’agent ne bénéficie d’aucune cause de non-imputabilité
(démence). Ainsi, il y a imputabilité si l’agent dispose de la capacité de répondre de
l’infraction. Pour que la culpabilité de l’auteur de l’infraction puisse être retenue, il est
nécessaire qu’il ait commis une faute pénale, c’est-à-dire un manquement à un
devoir.
En général, les individus disposent de toutes leurs facultés mentales. Ils sont donc
responsables. L’imputabilité constitue donc la règle. Mais, parfois, la volonté n’est pas
saine ou n’est pas libre ce qui fait alors disparaître l’imputabilité. L’absence
d’imputabilité est caractérisée en cas d’absence de volonté saine, en cas d’absence
de volonté libre et en cas d’erreur.
Cette absence de volonté saine résulte soit de causes naturelles, soit de causes
accidentelles.
Aucune peine ne peut être prononcée à l'encontre d'un mineur de moins de treize
ans.
Selon l’article 122-8 du Code pénal, « Les mineurs capables de discernement sont
pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils ont été
reconnus coupables, dans des conditions fixées par une loi particulière qui détermine
les mesures de protection, d’assistance, de surveillance et d’éducation dont ils
peuvent faire l’objet. Cette loi détermine également les sanctions éducatives qui
peuvent être prononcées à l’encontre des mineurs de dix à dix-huit ans ainsi que les
peines auxquelles peuvent être condamnés les mineurs de treize à dix- huit ans, en
tenant compte de l’atténuation de responsabilité dont ils bénéficient en raison de leur
âge ».
S’agissant des mineurs de 13 ans qui sont jugés capables de discernement, le juge
des enfants ou le tribunal pour enfants ne peuvent prononcer que des mesures
éducatives telles que prévues par l’article 15 de l’ordonnance du 2 février 1945
(remise de l’enfant à ses parents, à son tuteur, à la personne qui en avait la garde ou
à une personne digne de confiance ; placement dans une institution ou un
établissement public ou privé, d’éducation ou de formation professionnelle, habilité ;
placement dans un établissement médical ou médico- pédagogique habilité ; remise
au service de l’assistance à l’enfance ; placement dans un internat approprié aux
mineurs délinquants d’âge scolaire ; mesure d’activité de jour, dans les conditions
définies à l’article 16 ter).
En ce qui concerne les mineurs de plus de 16 ans, s’ils peuvent faire l’objet de
condamnations pénales dans les mêmes conditions que les mineurs de 13 à 16 ans,
la juridiction de jugement peut écarter l’excuse de minorité parce que les
circonstances de l’espèce et la personnalité du mineur le justifient. Lorsqu’elle est
prise par le tribunal des enfants, la décision de ne pas faire bénéficier le mineur de
l’atténuation de peine doit être spécialement motivée (article 20-2). Devant la cour
d’assises, l’exclusion de l’excuse de minorité fait l’objet d’une question spéciale posée
à la cour et au jury (article 20).
Cette question est envisagée par l’article 122-1 NCP. Aux termes de cet article,
« n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des
faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le
contrôle de ses actes.
La personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou
neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes
demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance
lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime ».
Si l’on compare le Code pénal de 1810 et le nouveau Code pénal, on observe que la
notion de démence a été remplacée par celle de troubles psychiques ou
neuropsychiques.
1) L’abolition du discernement
Il résulte de l’article 122-1 NCP que l’agent peut bénéficier de cette cause
d’irresponsabilité pénale à trois conditions : qu’il soit atteint de troubles psychiques
ou neuropsychiques, que ces troubles aient aboli son discernement et que ces
troubles soient contemporains de l’infraction.
Il résulte de l’article 122-1 NCP que les troubles doivent avoir aboli le discernement
ou entravé le contrôle des actes de l’agent. Il est donc nécessaire que l’individu ait
perdu la capacité de comprendre ou celle de vouloir, c’est-à-dire de contrôler ses
actes. Tel est, notamment, le cas dans l’hypothèse d’une psychose, d’un delirium
tremens, d’une crise d’épilepsie, d’un délire toxicomaniaque…
Mais, outre l’abolition du discernement, le trouble doit être contemporain de
l’infraction.
Lorsque l’on estime que le trouble a aboli le discernement de l’individu, quels vont en
être les effets ?
Sur le plan médical, l’article 706-135 CPP dispose que « Sans préjudice de
l'application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du code de la santé publique, lorsque
la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement prononce un arrêt ou un
jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, elle
peut ordonner, par décision motivée, l'admission en soins psychiatriques de la
personne, sous la forme d'une hospitalisation complète dans un établissement
mentionné à l'article L. 3222-1 du même code s'il est établi par une expertise
psychiatrique figurant au dossier de la procédure que les troubles mentaux de
l'intéressé nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou
portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Le représentant de l'Etat dans le
département ou, à Paris, le préfet de police est immédiatement avisé de cette
décision. Le régime de cette hospitalisation est celui prévu pour les admissions en
soins psychiatriques prononcées en application de l'article L. 3213-1 du même
code », c’est-à-dire le régime des hospitalisations d’office.
Ainsi, l’individu ayant échappé à l’emprise de la loi pénale va être interné par
l’autorité administrative, c’est-à-dire par le Préfet qui utilisera la procédure de
l’hospitalisation d’office. L’individu interné sera alors traité de la même manière que
s’il n’avait pas commis d’infraction. Et, les personnes déclarées pénalement
irresponsables sont mélangées dans les hôpitaux psychiques au reste de la
population internée.
Ces deux décisions résultant de deux examens séparés et concordants doivent établir
que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui ».
Sur le plan judiciaire, l’article 706-136 CPP, issu de la loi du 25 février 2008,
dispose que « Lorsque la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement
prononce un arrêt ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause
de trouble mental, elle peut ordonner à l'encontre de la personne les mesures de
sûreté suivantes, pendant une durée qu'elle fixe et qui ne peut excéder dix ans en
matière correctionnelle et vingt ans si les faits commis constituent un crime ou un
délit puni de dix ans d'emprisonnement :
1° Interdiction d'entrer en relation avec la victime de l'infraction ou certaines
personnes ou catégories de personnes, et notamment les mineurs, spécialement
désignées ;
2° Interdiction de paraître dans tout lieu spécialement désigné ; 3° Interdiction de
détenir ou de porter une arme ;
4° Interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole spécialement
désignée, dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été
commise ou impliquant un contact habituel avec les mineurs, sans faire
préalablement l'objet d'un examen psychiatrique déclarant la personne apte à
exercer cette activité ;
5° Suspension du permis de conduire ;
6° Annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un
nouveau permis.
Ces interdictions, qui ne peuvent être prononcées qu'après une expertise
psychiatrique, ne doivent pas constituer un obstacle aux soins dont la personne est
susceptible de faire l'objet ».
Et, pour la Cour de cassation, les mesures énoncées par l’article 706-136 NCP,
constituent des mesures de sureté et sont donc d’application immédiate (Crim., 16
déc. 2009, Juris-Data n° 2009-050798). Cette décision constitue un revirement de
jurisprudence par rapport à la décision rendue le 21 janvier 2009 (Crim., 21 janv.
2009, D. 2009, p. 1111).
Sur le plan, civil, en application de l’article 414-3 Code civil, « Celui qui a causé
un dommage à autrui alors qu'il était sous l'empire d'un trouble mental n'en est pas
moins obligé à réparation ». Ainsi, le dément demeure responsable. Il sera donc tenu
d’indemniser la victime de l’infraction, voire ses ayants droit.
2) L’altération du discernement
En pratique, la difficulté qui se pose est de savoir quels sont les troubles susceptibles
d’altérer le discernement. Et, la frontière est difficile à établir entre le trouble
abolissant le discernement et celui qui ne fait que l’altérer. De même, il est difficile
de distinguer l’individu normal de l’anormal. Tel est essentiellement le cas en ce qui
concerne les intoxications volontaires, lorsque celles-ci n’entraînent pas une abolition
du discernement. Dans ce cas, les auteurs s’accordent à penser que l’individu qui
absorbe de l’alcool ou des produits stupéfiants ne devrait pas pouvoir bénéficier d’une
atténuation de sa responsabilité dans la mesure où le législateur incrimine tant
l’usage de stupéfiants que la conduite en état d’ivresse.
Il semble que certains troubles mentaux peuvent entrer dans la catégorie de ceux qui
altèrent le discernement. Tel est le cas pour l’individu débile moyen. Tel est
également le cas pour certaines névroses. Cependant, depuis l’entrée en vigueur du
nouveau Code pénal, très peu de décisions publiées traitent de cette question. Dans
un arrêt récent, la Cour d’appel de Paris a admis la responsabilité atténuée dans une
affaire où la personne poursuivie était en traitement pour schizophrénie au moment
des faits et n’était pas totalement inconsciente de ce qui se passait et de ce qu’elle
faisait mais ne se maîtrisait pas (Paris, 21 mai 1996, Droit pénal 1996, n° 240).
Le dernier point à envisager est celui de savoir quelle est l’incidence de l’article 122-1
al. 2 NCP ? Cet alinéa précise que la personne demeure punissable. Ainsi, la personne
sera déclarée pénalement responsable. Cependant, dans ce cas, la juridiction de
jugement doit tenir compte du trouble pour déterminer la peine et en fixer le régime
d’exécution. Ainsi, cet alinéa consacre une atténuation de responsabilité. Cependant,
le texte ne prévoit pas quel est l’effet quantitatif de cette atténuation. Les seules
limites à respecter sont les planchers fixés par les articles 132-18 NCP (2 ans lorsque
la peine encourue est la RCP, 1 an lorsque la peine encourue est la réclusion
criminelle à temps) et 132-18-1 introduits par la loi du 10 août 2007 pour les crimes
commis en état de récidive légale (5, 7, 10 ou 15 ans).
En outre, dans un arrêt intéressant, la jurisprudence a précisé que les dispositions de
l’alinéa 2 de l’article 122-1 NCP, permettant au juge de prononcer une peine
inférieure à la peine minimale en cas de récidive, s’appliquent même lorsque les faits
ont été commis une nouvelle fois en état de récidive légale (Crim., 6 nov. 2012, Droit
pénal 2013, com., 33).
Elle peut être provoquée par une force brutale de la nature (banni rejeté par la
tempête sur les côtes de France et qui commet le délit de rupture de ban), soit par le
fait des animaux (délit forestier commis par un berger dont le troupeau poursuivi par
des loups s’est sauvé dans un bois et à détruit des arbres), soit par le fait de
l’homme (gardien de prison séquestré qui ne peut pas empêcher l’évasion de
prisonniers).
2) La contrainte morale
La contrainte morale externe ne doit pas être confondue avec l’état de nécessité.
Il y a contrainte morale externe “lorsque l’agent voit sa liberté abolie par crainte d’un
mal imminent” (W. Jeandidier, Droit pénal général, Montchrestien, n° 361). Pourtant,
certaines décisions de jurisprudence continuent de confondre état de nécessité et
contrainte morale externe (Dijon, 19 déc., 1984, Gaz. Pal, 1985, 1, 256).
Elle consiste dans une violente colère ou une fatigue qui conduit à la commission de
l’infraction.
Elle n’est pas retenue par la jurisprudence. On peut, cependant, s’interroger sur le
point de savoir si, dans cette hypothèse, on ne pourrait pas retenir l’article 122-1
alinéa 2 du nouveau Code pénal qui consacre l’altération du discernement.
Lorsque l’on aborde la contrainte morale interne, on cite généralement l’affaire Silice
(Crim., 11 avril 1908, S. 1909, 1, 473, note Roux) dans laquelle la femme d’un
médecin militaire, craignant la mise à la retraite anticipée de son époux, avait écrit
une lettre d’injures au ministre de la guerre.
Les auteurs ont critiqué le refus par la jurisprudence de retenir la contrainte morale
interne, arguant du fait que l’article 64 du Code pénal de 1810 ne semblait pas
l’exclure. Ces remarques pourraient être transposées aux dispositions du nouveau
Code pénal.
La contrainte doit être irrésistible, imprévisible et ne doit pas résulter d’une faute
antérieure de l’agent.
Cette condition d’irrésistibilité figure dans la loi elle-même puisque l’article 122-2 NCP
parle d’une contrainte à laquelle le prévenu “n’a pu résister”.
• La question s’est posée de savoir si cette irrésistibilité devait être
appréciée in concreto ou, au contraire, in abstracto. La jurisprudence
a retenu l’appréciation in abstracto.
L’arrêt fondamental en la matière est l’arrêt Trémintin du 29 janv. 1921 (S. 1922, 1,
185, note Roux) qui a approuvé la condamnation pour désertion d’un marin qui
n’avait pas pu embarquer parce qu’il avait été retenu pour ivresse au poste de police.
On confond ici l’imputabilité de la faute antérieure avec l’imputabilité de l’infraction.
Un arrêt similaire confirme cette jurisprudence (Crim., 6 mai 1970, Bull. crim., n°
154). En pratique, l’exigence de l’imprévisibilité de la contrainte tend à limiter les
hypothèses dans lesquelles le prévenu sera relaxé. Ainsi, ont été condamnés le
conducteur d’un véhicule ayant provoqué un accident alors qu’il se savait atteint de
troubles pathologiques (Crim., 8 mai 1974, Bull. crim., n° 165), la conductrice
souffrant d’hypotension et ayant été à l’origine d’une collision (Crim., 12 févr. 1976,
Bull. crim., n° 57), l’automobiliste ayant dérapé sur une plaque de verglas (Crim., 14
oct. 1959, Bull. crim., n° 432).
Mais, la contrainte doit revêtir une troisième condition. En effet, la contrainte ne doit
pas résulter d’une faute antérieure de l’agent. De nombreux arrêts ont refusé de
retenir la contrainte dans la mesure où le prévenu était responsable de la situation
dans laquelle il s’était trouvé ultérieurement. Ainsi, une immobilisation irrégulière de
véhicule ne peut pas être justifiée si elle résulte d’un entretien non correct du
véhicule (Crim., 4 décembre 1958, D. 1959, 36). De même un automobiliste sera
déclaré responsable d’un accident causé au cours d’un malaise s’il ne s’est pas soigné
alors qu’il connaissait son état (Paris, 27 mai 1970, R.S.C. 1971, 119).
Cette condition dégagée par la jurisprudence sous l’empire du Code pénal de 1810
était fortement critiquée par la doctrine. Pourtant, le nouveau Code pénal n’a pas
modifié les dispositions relatives à la contrainte.
Sous l’empire du Code pénal de 1810, la doctrine s’était interrogée sur le point de
savoir si, dans le silence de l’article 64, la méprise de l’agent pouvait constituer une
cause de non-imputabilité. Une telle position était concevable puisque les lois
favorables à la personne poursuivie peuvent faire l’objet d’une interprétation
extensive en jurisprudence. Désormais, l’erreur est envisagée par l’article 122-3 NCP
selon lequel “n’est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par
une erreur sur le droit qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement
accomplir l’acte”. Il semble que l’erreur de droit constitue une cause de non-
imputabilité d’application très peu fréquente. En effet, on fait application en droit
français du principe selon lequel nul n’est censé ignorer la loi. C’est la raison pour
laquelle l’article 122-3 NCP pose des conditions très restrictives.
Cette présomption de connaissance du droit est générale. Elle concerne donc les
textes réprimant les crimes, les délits et les contraventions. Et, cette présomption de
connaissance du droit concerne tant les nationaux que les étrangers.
L’erreur retenue au titre de l’article 122-3 NCP doit porter sur une règle de droit. Il
convient donc de ne pas confondre l’erreur de droit avec l’erreur de fait. Mais, en
outre, quelles sont les règles de droit sur lesquelles l’erreur peut porter ?
L’erreur de droit peut être définie comme celle dans laquelle l’auteur méconnaît les
règles applicables ou leur portée. Dans l’erreur de fait, l’agent se représente le droit
applicable mais se trompe sur la matérialité de l’acte qu’il commet. En effet, il ne se
rend pas compte que l’acte réalisé constitue un comportement pénalement
répréhensible.
L’erreur de fait ne constitue pas une cause d’irresponsabilité pénale puisqu’elle n’est
pas visée par l’article 122-3 NCP. Cependant, elle est susceptible de produire certains
effets dans le cadre des infractions intentionnelles. En revanche, elle est sans
incidence en matière d’infractions non intentionnelles. Dans le cadre des infractions
intentionnelles, l’erreur de fait fait disparaître l’infraction lorsqu’elle supprime
l’intention : ainsi, ne commet pas un vol celui qui prend un bien en croyant en être
propriétaire alors que le bien appartient à autrui. En revanche, dans les autres cas,
l’erreur de fait est indifférente.
Dans la mesure où l’article 122-3 NCP ne fait aucune distinction, l’erreur peut porter
sur n’importe quelle règle de droit. Il peut donc s’agir d’un texte pénal (loi ou
règlement) ou d’un texte non pénal. Ainsi, pour écarter l’infraction de vol, les
tribunaux retiennent parfois l’ignorance de l’article 716 CC selon lequel lorsqu’un
trésor est trouvé dans le fonds d’autrui, il appartient pour moitié à son inventeur et
pour l’autre moitié au propriétaire du fonds. De même, pour écarter la bigamie, les
tribunaux ont parfois retenu que les époux pensaient légitimement être divorcés.
Lorsque l’erreur de droit porte sur une disposition pénale, elle peut porter sur une
infraction intentionnelle ou non intentionnelle. Cependant, en pratique, l’erreur de
droit est plus fréquemment invoquée dans le cadre des infractions non intentionnelles
et, plus spécifiquement dans les domaines techniques : droit de l’urbanisme, droit
des transports…
L’erreur de droit ne peut constituer une cause de non-imputabilité que si elle n’a pas
pu être évitée, c’est-à-dire si elle est inévitable, invincible. Cette condition tend à
faire de l’erreur de droit une cause d’irresponsabilité pénale exceptionnelle. Par
exemple, la Cour de cassation a considéré que « de part sa qualité de vice-président
du conseil général, le prévenu s’occupant depuis de nombreuses années de la
commission des routes, connaissait nécessairement les dispositions légales et
réglementaires en la matière et ne pouvait ignorer qu’il commettait des
manquements à ces dispositions ; qu’il n’est pas recevable à invoquer une erreur de
droit qu’il aurait commise dans l’interprétation des textes compte tenu de sa longue
expérience dans la passation des marchés publics ; qu’il ne pouvait ignorer que
l’opération reprochée constituait un manquement à la législation et l’erreur invoquée
ne présentait aucun caractère insurmontable » (Crim., 17 oct. 2007, Juris-Data n°
2007-041538).
Seuls deux exemples d’erreur de droit ont été invoqués lors des débats
parlementaires précédant l’adoption du nouveau Code pénal :
1er exemple : une information erronée fournie par une administration. Tel serait
le cas pour un licenciement irrégulier réalisé en respectant la procédure préconisée
par l’inspection du travail. Mais, dans ce cas, l’information obtenue ne doit pas
résulter d’un simple appel téléphonique. En matière d’information erronée, la doctrine
estime que si la fausse information émane d’une personne privée (même s’il s’agit
d’un professionnel : avocat, notaire…) elle ne peut pas constituer une erreur
invincible. Tel est le cas lorsque l’erreur émane d’un avoué en ce qui concerne
l’interprétation d’une décision de justice. Dans cette affaire, la Cour de cassation a
estimé que “tout risque d’erreur pouvait être évité par une demande d’interprétation
présentée à la juridiction compétente” (Crim., 11 oct. 1995, Droit pénal 1996, n°
56). En conséquence, l’erreur donnant lieu à irresponsabilité pénale ne peut émaner
que d’une autorité publique ou judiciaire. En outre, la jurisprudence estime qu’une
erreur sur l’interprétation de l’avis donné par une administration ou sur
l’interprétation d’une loi n’est ni invincible ni insurmontable dès lors qu’elle peut être
évitée par le recours aux lumières de juristes spécialisés ou à celles d’un inspecteur
du travail (Crim. 5 et 19 mars 1997, Droit pénal 1997, com. 107). Elle estime
également que l’appréciation de l’administration sur le caractère licite des objets ne
constitue pas une erreur de droit justifiant le recel de détention d’objets à caractère
pornographique en vue de leur diffusion (Crim., 9 juin 1999, Droit pénal 1999, com.
138). De même, la Cour de cassation a considéré que ne constituait pas une erreur
de droit l’erreur provenant d’une définition contenue dans un ouvrage de référence
(dictionnaire des médicaments définissant les médicaments vétérinaires) (Crim., 4
oct. 2011, Droit pénal 2011, n° 146).
L’erreur ne peut être admise que si la personne croyait dans la légitimité de l’acte
accompli. Tel est le cas lorsque l’auteur des faits pense que l’acte qu’il accomplit ne
constitue pas une infraction. En revanche, cette condition ne sera pas remplie si
l’auteur de l’acte a un doute sur la règle de droit applicable ou s’il croit que la règle
de droit ne justifie que partiellement ses actes.
Après avoir abordé dans une 1ère section l’imputabilité, nous allons nous intéresser
dans une seconde section à la culpabilité, seconde composante de l’élément moral.
Pour que la culpabilité de l’agent puisse être reconnue, il est nécessaire que
l’infraction lui soit imputable et qu’il ait commis une faute. En cela, on se sépare
nettement du droit civil où la faute n’est pas nécessairement exigée pour que la
responsabilité civile soit engagée. Cependant, entre torturer quelqu’un et brûler un
feu de signalisation, la faute n’est, à l’évidence, pas la même. On assiste donc en
droit pénal à une gradation de la faute. Il y a des cas où l’agent a conscience d’agir
illicitement et désire le résultat de son action (torturer quelqu’un pour le tuer). On
appelle alors cela la faute intentionnelle. Cependant, il est aussi des cas dans lesquels
l’agent qui a ou non conscience d’agir illicitement ne recherche pas le résultat. Dans
cette hypothèse, on parle de faute non intentionnelle.
Dans le nouveau Code pénal, l’article 121-3 dispose depuis la loi du 10 juillet 2000
relative aux délits non intentionnels :
- al. 1er : “Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre”.
- al 4 : “Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui
n’ont pas causé directement le dommage mais qui ont créé ou contribué à
créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas
pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est
établi qu’elles ont soit violé de façon manifestement délibérée une obligation
particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit
commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une
particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer”.
Pour que l’intention soit caractérisée, il faut aussi que l’agent ait eu conscience que le
résultat qu’il recherchait était illicite.
Cette affirmation semble vouloir dire que l’ignorance du caractère illicite du résultat
recherché fait disparaître l’infraction. Cela impliquerait alors que l’agent pourrait ne
pas connaître la loi. Or, on le sait, nul n’est censé ignorer la loi. Il s’agit ici d’une
présomption irréfragable.
En jurisprudence, la question s’est posée de savoir si l’erreur sur la personne pouvait
être retenue. C’est l’hypothèse dans laquelle A croit tuer B mais tue C. Dans ce cas,
pour la jurisprudence, l’identité de la victime est sans importance.
De même, s’est posée la difficulté de savoir quelle solution il fallait retenir en cas
d’erreur de coup. C’est l’hypothèse dans laquelle A veut tuer B mais le manque et tue
C. La jurisprudence ne retient pas l’erreur dans ce cas.
Il convient, enfin, de déterminer quels types d’infractions sont de nature
intentionnelle.
En application de l’article 121-3 NCP, les crimes et les délits sont de nature
intentionnelle.
L’article 121-3 NCP pose le principe que les crimes constituent des infractions
intentionnelles.
Le principe selon lequel les crimes constituent des infractions intentionnelles est
clairement posé par l’alinéa 1er de l’article 121-3 du nouveau Code pénal. Il s’agit
désormais d’un principe général repris dans un article unique.
Donc, en rappelant que tout crime suppose une intention, le nouveau Code pénal
demeure classique. Le crime constitue la catégorie d’infraction la plus grave. La
présomption d’innocence impose donc à la partie poursuivante de rapporter la preuve
de la culpabilité, c’est-à-dire de l’intention. Il faut se garder de confondre l’intention
avec le mobile de l’infraction. Par exemple, un individu avait la volonté de tuer (par
amour, par pitié ou par cupidité). Ce mobile constitue seulement la cause de
l’intention.
L’article 121-3 alinéa 1er du nouveau Code pénal précise qu’ ”il n’y a point… de délit
sans intention de le commettre”. Sous l’empire du Code pénal de 1810, la plupart des
délits rentraient dans la catégorie des infractions intentionnelles. Ainsi, l’article 309
alinéa 1er disposait que “toute personne qui, volontairement, aura porté des coups
ou commis des violences ou voies de fait ayant entraîné une maladie ou une
incapacité totale de travail personnel pendant plus de huit jours sera punie d’un
emprisonnement de deux mois à deux ans et d’une amende de 500 F à 20 000 F ou
de l’une de ces deux peines seulement”. De même, l’article 379 disposait que
“quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est
coupable de vol”. Dans l’article 309 alinéa 1er, le terme “volontairement” signifiait
que le délit était intentionnel et dans l’article 379, “frauduleusement”, s’inscrivait
dans la même logique.
Cependant, l’article 121-3 précise aussi, que le législateur peut aussi créer des délits
non intentionnels. Entre les infractions intentionnelles et les infractions non
intentionnelles, on retient les infractions de mise en danger délibérée.
L’article 121-3 alinéa 2 du nouveau Code pénal envisage une notion nouvelle
qualifiée de “mise en danger délibérée de la personne d’autrui”.
Cette notion nouvelle a été intégrée pour constituer une gradation dans l’élément
moral des infractions. Elle constituerait un moyen terme entre l’intention d’une part
et l’imprudence ou la négligence, d’autre part. Il s’agit ici de la consécration de la
notion de dol éventuel. Selon la doctrine (M.-L. Rassat Droit pénal général, op. cit.,
n° 257), le dol éventuel constitue “une forme particulière d’imprudence d’une gravité
exceptionnelle qu’on pourrait aussi appeler l’acceptation des risques et qui n’est pas
sans évoquer la faute lourde du droit civil…”. L’exemple classique est celui de
l’automobiliste qui double au sommet d’une côte, sans visibilité, et provoque, de ce
fait, le décès de l’automobiliste qui roule en sens inverse. La réponse du Code pénal
de 1810 consistait en une condamnation pour homicide involontaire. Or, s’il est vrai
que l’automobiliste ne voulait pas causer la mort d’autrui, il avait tout de même eu la
volonté de doubler sans visibilité. Dès lors, entre la volonté du comportement et
l’imprudence quant au résultat, il y avait une place pour cette notion de mise en
danger.
Ainsi, plusieurs infractions contenues dans le nouveau Code pénal consacrent cette
notion dans deux sortes de cas :
L’article 121-3 du nouveau Code pénal met aussi en exergue le caractère spécifique
de la faute non intentionnelle.
Sous l’empire de l’ancien code pénal, aucune distinction n’était faite entre les
comportements fautifs. Seul le résultat dommageable était pris en compte. Le
nouveau code pénal, entré en vigueur au 1er mars 1994, a établi deux régimes
juridiques eut égard au caractère de la faute, selon qu’elle était délibérée (al. 2) ou
simple (al. 3).
D’une manière générale, la faute non intentionnelle est caractérisée par le fait que
même si le résultat avait été prévu, il n’était pas désiré. Cela correspond à une
hypothèse dans laquelle l’agent n’a pas pris les précautions suffisantes pour éviter le
dommage. Il a commis une maladresse, une inattention, une négligence qui ont
conduit à la réalisation de l’infraction.
En matière de faute non intentionnelle, le législateur est intervenu par deux fois pour
restreindre le champ d’application de la culpabilité non intentionnelle : la loi du 13
mars 1996 exige une appréciation concrète de la faute d’imprudence ou de
négligence. En outre, la loi du 10 juillet 2000, destinée à limiter la responsabilité
pénale des élus, exige une faute caractérisée en matière de causalité indirecte. Ainsi,
cette loi de juillet 2000 a introduit un 3ème degré en matière de faute non
intentionnelle (la faute qualifiée en cas de causalité indirecte).
Dans les années 90, la condamnation de plusieurs maires de petites communes a fait
naître un débat sur la méthode d’appréciation de la faute d’imprudence ou de
négligence par le juge pénal. En effet, il était reproché aux juges une appréciation
abstraite de la faute qui ne prenait pas en compte les contraintes inhérentes à
l’exercice des fonctions publiques locales, telles la technicité croissante de la
réglementation. Ainsi, d’une responsabilité pénale basée sur la faute, on tendait à
glisser vers une responsabilité pénale fondée sur le risque puisque le seul
manquement à l’obligation suffisait à engager la responsabilité pénale (TC Rennes, 9
février 1994, D Env. 1994, n° 26, p. 20).
Cependant, les résultats décevants de la loi du 13 mars 1996 ont conduit en 1999 à
une réflexion d’ensemble sur une nouvelle définition des délits non intentionnels.
Ainsi, la loi du 10 juillet 2000 qui en est le résultat, a entraîné de réels
bouleversements en remettant en cause, dans certaines circonstances, un principe
essentiel de droit pénal dans l’appréciation par le juge pénal du lien de causalité :
l’équivalence des conditions.
La loi du 10 juillet 2000 était destinée à limiter la responsabilité pénale des élus
locaux en ne retenant leur responsabilité que pour les fautes révélant une réelle
indifférence aux valeurs sociales protégées. Cette loi y est parvenue par deux biais :
• en mettant fin à l’identité entre la faute civile et la faute pénale qui obligeait
le juge répressif à condamner pénalement pour permettre des réparations
civiles. Ainsi, désormais, la faute pénale est « l’expression de la culpabilité et
non plus l’instrument de l’indemnisation ».
Face à ces deux techniques, le juge pénal retient depuis toujours la seconde. De
cette théorie, il résulte que les fautes, même les plus légères (culpa levissima),
même causant un dommage de manière indirecte et non exclusive, sont susceptibles
d’engager la responsabilité pénale de leur auteur. Et, l’alinéa 4 de l’article 121-3 NCP
a donc comme objectif de remettre en cause cette technique d’appréciation.
Cependant, l’alinéa 4 de l’article 121-3 NCP ne vise que les personnes physiques et
non les personnes morales. Ainsi, cet alinéa consacre une double définition de la
faute qualifiée :
• 2ème élément : la faute doit avoir exposé autrui à un risque d’une particulière
gravité. Sans doute, cette gravité va découler de la nature du risque (mort,
blessures graves…) et de son degré de probabilité élevé.
Outre ces précisions, dans le nouveau Code pénal, quels sont les délits qui ne sont
pas intentionnels ?
Pour ce qui concerne les délits extérieurs au nouveau Code pénal, l’article 339 de la
loi d’adaptation (loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 relative à l’entrée en vigueur
du Nouveau Code pénal et à la modification de certaines dispositions de droit pénal et
de procédure pénale rendue nécessaire par cette entrée en vigueur, J.O. 23
décembre) dispose que “tous les délits non intentionnels réprimés par des textes
antérieurs à l’entrée en vigueur de la présente loi demeurent constitués en cas
d’imprudence, de négligence ou de mise en danger délibérée de la personne d’autrui,
même lorsque la loi ne le prévoit pas expressément”. Quelle signification doit être
donnée à cette disposition ?
Sous l’empire de l’ancien Code pénal, il existait en droit français des délits matériels.
Le prévenu était responsable sur la base de la simple constatation du fait matériel
interdit. Le ministère public n’avait à prouver ni l’intention, ni l’imprudence, ce qui
conduisait en quelque sorte à une présomption de culpabilité. Cependant, le prévenu
pouvait échapper à sa responsabilité pénale en invoquant la contrainte ou la
démence. Ainsi, l’article 339 de la loi d’adaptation signifie que les délits non
intentionnels prévus par des textes extérieurs au nouveau Code pénal ne sont
constitués que si la preuve d’une imprudence, d’une négligence ou d’une mise en
danger délibérée de la personne d’autrui est rapportée. De l’analyse de ce texte, il
est dès lors possible de déduire que la catégorie des “délits matériels” a été
supprimée. Cet article 339 apparaît donc susceptible de modifier un grand nombre
d’infractions, notamment dans le domaine du droit du travail, de la chasse, de
l’urbanisme ou de l’environnement. Avec le nouveau Code pénal, la réalisation de ces
infractions exige que soit rapportée la preuve de l’imprudence, de la négligence ou de
la mise en danger. A défaut, l’infraction ne sera pas constituée et ses auteurs
demeureront impunis.
Pour ce qui concerne les contraventions, l’élément moral n’est pas caractérisé.
L’alinéa 5 de l’article 121-3 du nouveau Code pénal se contente de préciser qu’ « il
n’y a point de contravention en cas de force majeure ». La force majeure constitue
donc une cause exonératoire de responsabilité.
En matière de contraventions, on peut, dès lors, penser que les règles dégagées sous
l’empire du Code pénal de 1810 restent en vigueur. L’élément moral est donc
constitué par la faute contraventionnelle, qui est toujours présumée (même
mécanisme que pour les délits matériels). Il résulte de cette affirmation que le
ministère public qui doit prouver la réalisation de l’infraction, est dispensé de
rapporter la preuve de l’élément moral des contraventions. L’existence de l’élément
moral se déduit de la réalisation matérielle des faits reprochés. Ainsi, lorsque les faits
ont été constatés, la personne poursuivie ne peut s’exonérer de sa responsabilité
pénale en prouvant sa bonne foi. A titre d’exemple, une personne qui n’aurait pas vu
un panneau d’interdiction de faire demi-tour ne peut s’exonérer en prouvant qu’elle
n’a pas vu le panneau (à propos d’un sens interdit, cf. Crim., 30 décembre 1953,
Bull. crim., n 360). En matière contraventionnelle, la seule possibilité d’exonération
réside donc dans la preuve de la contrainte ou de la démence. Cette règle, applicable
sous l’empire du Code pénal de 1810 (Crim., 16 novembre 1866, D. 1866, 1, 87) est,
désormais, expressément consacrée par l’article 121-3 du nouveau code pénal.
Après avoir envisagé dans un titre I les éléments constitutifs des infractions, nous
allons maintenant aborder la classification des infractions.
TITRE II
LA CLASSIFICATION DES INFRACTIONS
Chapitre I
Les classifications fondées sur l’élément légal
Plusieurs classifications sont fondées sur le texte de loi qui définit les infractions. En
pratique, deux classifications peuvent être retenues : celle fondée sur la gravité de
l’infraction et celle fondée sur sa nature.
Lorsque l’on aborde la classification fondée sur la gravité de l’infraction, cela signifie
que l’on va étudier ce que l’on appelle en droit pénal la summa divisio ou la
classification tripartite des infractions. On va donc ici s’intéresser à l’opposition entre
les crimes, les délits et les contraventions. On distinguera pour une meilleure
compréhension, le principe de classement et ses intérêts.
Le critère de distinction entre les crimes, les délits et les contraventions est celui de
la peine. Nous reprendrons les peines envisageables, pour les crimes, les délits et les
contraventions.
La conséquence de cette échelle des peines réside dans le fait que tout crime est
passible de l’une des peines mentionnées dans cette échelle. Cependant, il s’agit de
la peine encourue. En conséquence, une Cour d’assises a la possibilité de prononcer,
en fonction des circonstances de l’affaire, une peine inférieure à 15 ans. La question
se pose alors de savoir quelle sera la nature de cette peine. Sur ce point, l’article
131-1 NCP précise que « la durée de la réclusion criminelle ou de la détention
criminelle à temps est de 10 ans au moins ». La peine prononcée est donc criminelle
si elle est supérieure ou égale à 10 ans. En revanche, si elle est inférieure à 10 ans, il
s’agira alors d’une peine d’emprisonnement. Cependant, il résulte de l’article 132-18
NCP qu’il existe des planchers que la Cour d’assises ne peut pas franchir. En effet, la
peine prononcée ne peut pas être inférieure à 2 ans d’emprisonnement si la peine
encourue est perpétuelle et à 1 an d’emprisonnement si la peine encourue est à
temps.
Lorsqu'un crime est commis une nouvelle fois en état de récidive légale (troisième
terme), la juridiction ne peut prononcer une peine inférieure à ces seuils que si
l'accusé présente des garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion.
La question, âprement discutée, s’est posé de savoir quelle était la date d’entrée en
vigueur de cette mesure. La loi votée, mais non encore promulguée, prévoyait une
application au motif qu’il s’agissait d’un texte de procédure. Saisi sur la question, le
Conseil constitutionnel a déclaré cette application immédiate non conforme à la
Constitution (CC, 21 févr. 2008, décision n° 2008-562, J.O. 26 févr., p. 3272). A la
suite de cette décision, le Président de la République a saisi, par lettre de mission, le
Premier Président de la Cour de cassation (M. Vincent Lamanda) le 25 février 2008,
afin de faire des propositions pour que puisse s’appliquer un dispositif amoindrissant
les risques de récidive. Le rapport, remis le 30 mai 2008, propose quelques
aménagements législatifs et préconise l’octroi de nouveaux moyens (surveillance
électronique mobile par le biais d’un boîtier moins stigmatisant). Ainsi, l’inobservation
d’une mesure de surveillance de sûreté permettrait de rendre immédiatement
applicable le placement en rétention de sûreté.
Précisons d’emblée que les peines applicables aux personnes morales sont les mêmes
en matière criminelle et correctionnelle, à l’exception de la sanction-réparation (art.
131-39-1 NCP). L’article 131-37 NCP précise que les peines encourues par les
personnes morales sont l’amende et, dans les cas prévus par la loi, les peines de
l’article 131-39.
a) L’amende
Cependant, cette liste de l’article 131-39 NCP n’est pas limitative. En effet, le
législateur, dans des dispositions de Droit pénal spécial, s’autorise à édicter des
peines ne figurant pas sur cette liste. C’est le cas en matière de crimes contre
l’humanité où est prévue la confiscation générale des biens de la personne morale.
Mais, en matière correctionnelle, s’applique également la sanction-réparation.
c) La sanction-réparation
Cette peine nouvelle a été instituée par une loi du 5 mars 2007. Selon l’article 131-
39-1 NCP, « En matière délictuelle, la juridiction peut prononcer à la place ou en
même temps que l'amende encourue par la personne morale la peine de sanction-
réparation selon les modalités prévues par l’article 131-8-1.
Dans ce cas, la juridiction fixe le montant maximum de l'amende, qui ne peut
excéder ni 75 000 Euros ni l'amende encourue par la personne morale pour le délit
considéré, dont le juge de l'application des peines pourra ordonner la mise à
exécution en tout ou partie dans les conditions prévues par l’article 712-6 du code de
procédure pénale si le condamné ne respecte pas l'obligation de réparation ».
L’article 131-8-1 NCP précise que lorsque le délit est puni d’une peine
d’emprisonnement ou seulement d’une peine d’amende, la juridiction de jugement
peut prononcer à la place ou en même temps que la peine d’emprisonnement une
sanction-réparation. Selon l’alinéa 2 de l’article 131-8-1 NCP, « la sanction-réparation
consiste dans l’obligation pour le condamné de procéder, dans le délai et selon les
modalités fixées par la juridiction, à l’indemnisation du préjudice de la victime ». Et,
cette réparation peut être exécutée en nature, par le condamné lui-même ou par un
professionnel qu’il rémunère. A défaut de réparation, la peine de sanction-réparation
est alors mise à exécution. Il s’agit en fait ici d’une sorte d’astreinte applicable en
matière pénale.
Outre les peines criminelles, quelles sont les peines applicables en matière
correctionnelle ?
Pour les raisons précitées, nous n’aborderons ici que les peines encourues par les
personnes physiques. Selon l’article 131-3 NCP, constituent des peines
correctionnelles :
1°) l’emprisonnement ;
2°) l’amende ;
3°) le jour-amende ;
4°) le stage de citoyenneté ; 5°) le TIG ;
6°) les peines privatives ou restrictives de droits de l’article 131-6 ; 7°) les peines
complémentaires de l’article 131-10 NCP ;
8°) la sanction-réparation.
Cet article permet en fait de distinguer trois catégories de peines en matière
correctionnelle : les peines correctionnelles principales, les peines alternatives et les
peines complémentaires. La sanction-réparation est à la fois une peine principale et
une peine alternative.
Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, une
peine inférieure à ces seuils ou une peine autre que l'emprisonnement en
considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou
des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci (art. 132-19-2 al. 2
NCP).
D’un point de vue historique, ces peines de substitution ont été introduites par une
loi du 11 juillet 1975. Puis, le dispositif a été complété par une loi du 10 juin 1983.
Cependant, le NCP a élargi la possibilité de prononcer les peines alternatives. En
outre, la loi Perben II du 9 mars 2004 a introduit une nouvelle peine alternative
entrée en vigueur au 1er octobre 2004 : le stage de citoyenneté. A cela s’ajoute
également la peine de sanction-réparation. Quels sont les différents types de peines
alternatives ?
L’article 131-6 NCP énumère 15 peines privatives ou restrictives de droits, dont les
quatre dernières résultent de la loi Perben II du 9 mars 2004 et de la loi du 4 août
2008 :
« 1° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire, cette
suspension pouvant être limitée, selon des modalités déterminées par décret en
conseil d'Etat, à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; cette limitation
n'est toutefois pas possible en cas de délit pour lequel la suspension du permis de
conduire, encourue à titre de peine complémentaire, ne peut pas être limitée à la
conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
2° L'interdiction de conduire certains véhicules pendant une durée de cinq ans au
plus
3° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un
nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
4° La confiscation d'un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné ;
5° L'immobilisation, pour une durée d'un an au plus, d'un ou de plusieurs véhicules
appartenant au condamné, selon des modalités déterminées par décret en Conseil
d'Etat ;
6° L'interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de cinq ans au plus, une
arme soumise à autorisation ;
7° La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou
dont il a la libre disposition ;
8° Le retrait du permis de chasser avec interdiction de solliciter la délivrance d'un
nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
9° L'interdiction pour une durée de cinq ans au plus d'émettre des chèques autres
que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui
sont certifiés et d'utiliser des cartes de paiement ;
10° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction
ou de la chose qui en est le produit. Toutefois, cette confiscation ne peut pas être
prononcée en matière de délit de presse ;
11° L'interdiction pour une durée de cinq ans au plus d'exercer une activité
professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont été
sciemment utilisées pour préparer ou commettre l'infraction. Cette interdiction n'est
toutefois pas applicable à l'exercice d'un mandat électif ou de responsabilités
syndicales. Elle n'est pas non plus applicable en matière de délit de presse ;
12° L'interdiction, pour une durée de trois ans au plus, de paraître dans certains lieux
ou catégories de lieux déterminés par la juridiction et dans lesquels l'infraction a été
commise ;
13° L'interdiction, pour une durée de trois ans au plus, de fréquenter certains
condamnés spécialement désignés par la juridiction, notamment les auteurs ou
complices de l'infraction ; 14° L'interdiction, pour une durée de trois ans au plus,
d'entrer en relation avec certaines personnes spécialement désignées par la
juridiction, notamment la victime de l'infraction ;
15° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer une profession
commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un
titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le
compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société
commerciale ».
b) Le TIG
Il est envisagé comme peine alternative à l’emprisonnement. Le TIG est défini par
l’article 131-8 NCP comme un travail « d'intérêt général non rémunéré au profit soit
d'une personne morale de droit public, soit d'une personne morale de droit privé
chargée d'une mission de service public ou d'une association habilitées à mettre en
oeuvre des travaux d'intérêt général ». Pour pouvoir être prononcée, cette peine doit
être acceptée par le prévenu. La durée du TIG est comprise entre 20 et 210 heures.
Le TIG doit être accompli dans un délai qui ne peut excéder 18 mois (art. 131-22
NCP). La durée du TIG a été réformée par la loi Perben II du 9 mars 2004 et la loi du
24 novembre 2009.
Cette peine a été instaurée par une loi du 10 juin 1983 (art. 131-5 NCP). Cette peine
apparaît comme étant à la fois une peine complémentaire et une peine de
substitution à l’amende. Le jour amende est défini comme une sorte d’amende à
crédit. Le jour amende résulte de la fixation par le juge d’une contribution
quotidienne pendant un certain nombre de jours. Son montant n’est exigible qu’à
l’expiration du délai correspondant au nombre de jours amende prononcés. En tout
état de cause, le montant ne peut excéder 1000 € par jour et 360 jours. Ce nouveau
montant (300 € auparavant) est issu de la loi Perben II du 9 mars 2004 et entre en
vigueur au 1er janvier 2005. En outre, l’article 131-25 NCP précise que le défaut total
ou partiel du paiement des jours-amendes entraîne l’incarcération du condamné pour
une durée correspondant au nombre de jours-amendes impayés.
d) Le stage de citoyenneté
Les modalités du stage de citoyenneté sont fixées par décret (art. 131-5-1 NCP). En
pratique, ce stage doit avoir pour but de rappeler au condamné les valeurs
républicaines de tolérance et de respect de la dignité humaine sur lesquelles notre
société est fondée. Cet article précise que ce stage, dont le coût ne peut excéder
celui des amendes contraventionnelles de la 3ème classe (450 €), est effectué aux
frais du condamné. En outre, comme en matière de TIG, cette peine ne peut être
prononcée si le prévenu n’est pas présent à l’audience ou s’il la refuse.
Concrètement, cette peine peut être prononcée à titre de peine principale à la place
de la peine d’emprisonnement ou d’amende prévue pour l’infraction considérée ou à
titre de peine complémentaire en sus de la peine d’emprisonnement ou d’amende.
Concrètement, la loi du 9 mars 2004 a précisé la liste des infractions pour lesquelles
cette peine complémentaire pouvait être prononcée : il s’agit des infractions
sanctionnant les atteintes volontaires à l’intégrité physique (art. 222-45, 4°), les
discriminations et les conditions de travail contraires à la dignité humaine (art. 225-
19, 6°), le vol sous toutes ses formes, l’extorsion, le chantage ou la demande de
fonds sous la contrainte (art. 312-13) et des détériorations de biens (art. 322-15).
Après les peines correctionnelles alternatives, nous allons aborder les peines
complémentaires.
Dans sa partie générale, le NCP ne comporte pas de liste des peines complémentaires
encourues en matière correctionnelle. L’article 131-10 NCP se contente de donner
une définition générale des différentes catégories de peines complémentaires
susceptibles d’être prévues par la loi pour sanctionner les crimes et les délits. Ces
peines peuvent consister en des peines « emportant interdiction, déchéance,
incapacité ou retrait d'un droit, injonction de soins ou obligation de faire,
immobilisation ou confiscation d'un objet, confiscation d'un animal, fermeture d'un
établissement ou affichage de la décision prononcée ou diffusion de celle-ci soit par la
presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique
».
Aux termes de l’article 131-12 NCP, les peines contraventionnelles sont l’amende et
les peines privatives ou restrictives de droits de l’article 131-14, la peine de sanction-
réparation de l’article 131-15-1 NCP et les peines complémentaires des articles 131-
16 et 131-17. Cependant, l’amende constitue la peine principale.
Selon l’article 131-13 NCP, constituent des contraventions les infractions que la loi
punit d’une amende n’excédant pas 3000 €. L’article 131-13 NCP fixe le taux
maximum de l’amende pour chaque classe de contravention : 38 € pour la 1ère
classe, 150 € pour la 2ème classe, 450 € pour la 3ème classe, 750 € pour la 4ème
classe et 1.500 € pour la 5ème classe, voire 3.000 € en cas de récidive, lorsque le
règlement le prévoit et hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la
contravention constitue un délit.
Selon les articles 131-14 et 131-15 NCP, les juridictions pénales peuvent remplacer
l’amende encourue pour une contravention de 5ème classe par l’une ou plusieurs des
6 peines suivantes :
« 1° La suspension, pour une durée d'un an au plus, du permis de conduire, cette
suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
cette limitation n'est toutefois pas possible en cas de contravention pour laquelle la
suspension du permis de conduire, encourue à titre de peine complémentaire, ne
peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
2° L'immobilisation, pour une durée de six mois au plus, d'un ou de plusieurs
véhicules appartenant au condamné ;
3° La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou
dont il a la libre disposition ;
4° Le retrait du permis de chasser, avec interdiction de solliciter la délivrance d'un
nouveau permis pendant un an au plus ;
5° L'interdiction, pour une durée d'un an au plus, d'émettre des chèques autres que
ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont
certifiés et d'utiliser des cartes de paiement ;
6° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou
de la chose qui en est le produit. Toutefois, cette confiscation ne peut pas être
prononcée en matière de délit de presse ».
Elles sont envisagées par les articles 131-16 et 131-17 NCP. Celles de l’article 131-16
NCP peuvent s’appliquer quelle que soit la contravention. Il s’agit :
« 1° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire,
cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité
professionnelle sauf si le règlement exclut expressément cette limitation ;
2° L'interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de trois ans au plus, une
arme soumise à autorisation ;
3° La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou
dont il a la libre disposition ;
4° Le retrait du permis de chasser, avec interdiction de solliciter la délivrance d'un
nouveau permis pendant trois ans au plus ;
5° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou
de la chose qui en est le produit ;
6° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux
pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de
trois ans au plus ;
7° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité
routière ; 8° L'obligation d'accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de
citoyenneté ;
9° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de responsabilité parentale, selon les
modalités fixées à l’article 131-35-1 ;
10° La confiscation de l'animal ayant été utilisé pour commettre l'infraction ou à
l'encontre duquel l'infraction a été commise ;
11° L'interdiction, pour une durée de trois au plus, de détenir un animal ;
12° Le retrait pour une durée d’un an au plus des titres de conduite en mer des
navires de plaisance à moteur et, à l’encontre de toute personne embarquée sur un
navire étranger, l’interdiction pour un an au plus de pratiquer la navigation dans les
eaux territoriales ou les eaux intérieures maritimes françaises ».
Les peines applicables aux personnes morales sont énumérées à l’article 131-40 NCP.
Il s’agit de l’amende, des peines privatives ou restrictives de droits de l’article 131-42
et de la peine de sanction-réparation de l’article 131-44-1 NCP à laquelle il faut
ajouter les peines complémentaires de l’article 131-43.
L’amende : c’est la peine principale et elle est encourue pour toutes les
contraventions. Son taux est égal au quintuple de celui encouru par les personnes
physiques pour les mêmes faits, soit 7.500 € au plus pour les contraventions de la
5ème classe.
Les peines alternatives : l’article 131-42 NCP dispose que les juridictions pénales
peuvent remplacer l’amende encourue pour les contraventions de 5ème classe par
l’une des peines suivantes :
- l’interdiction pour une durée d’un an au plus d’émettre des
chèques ou d’utiliser des cartes de paiement ;
Afin d’éviter une énumération, il est possible de distinguer quatre grandes sortes
d’intérêts que nous reprendrons successivement.
• La tentative des crimes est systématiquement punie. Celle des délits ne l’est que
lorsque le texte d’incrimination le prévoit. Celle des contraventions n’est pas
punissable.
• La complicité est systématiquement punissable pour les crimes et les délits. Elle
l’est également pour les contraventions en cas de complicité par instigation. Pour
la complicité par aide et assistance, il est nécessaire que le texte d’incrimination
le prévoit expressément.
• Les sources de l’incrimination sont différentes suivant que l’on est en présence
d’un crime, d’un délit ou d’une contravention. Les crimes et délits relèvent de la
loi alors que les contraventions sont édictées par la voie réglementaire.
• La phase d’instruction est obligatoire pour les crimes et est à double degré, elle
est facultative pour les délits et exceptionnelle pour les contraventions.
• L’extradition ne peut être accordée que pour les crimes et les délits d’une certaine
gravité. L’extradition ne peut concerner que des faits punis de peines criminelles
ou correctionnelles lorsque le maximum encouru est au moins égal à 2 ans
d’emprisonnement. L’extradition peut également concerner les condamnés dont la
peine est supérieure ou égale à deux mois d’emprisonnement.
• Les sursis (simple ou avec mise à l’épreuve) ne concernent pas toutes les
infractions. Une distinction doit être faite entre le sursis simple et le SME. Pour le
sursis simple, il faut distinguer les dispositions applicables aux personnes
physiques et aux personnes morales.
• La règle du cumul des peines dans la limite du maximum légal le plus élevé ne
s’applique pas en matière contraventionnelle. Cette règle ne s’applique pas non
plus pour certains délits ni lorsque l’on cumule une contravention et un délit ou
une contravention et un crime.
• Outre la classification fondée sur la gravité de l’infraction, nous allons aborder les
classifications fondées sur sa nature.
Il s’agit d’aborder dans cette section, l’opposition entre les infractions de droit
commun et les infractions politiques et l’opposition entre les infractions de droit
commun et les infractions militaires.
Le nouveau Code pénal, comme celui de 1810, ne donne aucune indication sur ce
qu’il faut entendre par infraction politique. Pour cette raison, il est nécessaire de
distinguer les conceptions doctrinales, du droit positif et de la jurisprudence.
La doctrine est partagée entre une thèse objective et une thèse subjective.
Suivant la thèse objective, une infraction est politique lorsqu’elle porte atteinte à
un intérêt de nature politique (intégrité du territoire, fonctionnement du pouvoir
politique…). En la matière, la jurisprudence a considéré que les fraudes électorales
sont des délits politiques qui ne peuvent donner lieu à contrainte par corps (Crim., 7
novembre 2001, Droit pénal 2002, n° 19). De même, la promesse d’avantages en
contrepartie de l’orientation d’un vote est un délit politique (Crim., 2 oct. 2001, Droit
pénal 2002, n° 20).
1) La jurisprudence
Les infractions politiques par leur objet qui correspondent à la définition de la thèse
objective sont considérées par les tribunaux comme politiques quel que soit le mobile
de l’agent (atteinte à la sûreté de l’État, espionnage…).
Lorsque sont commises des infractions de droit commun mais avec un mobile
politique, la cour de cassation considère généralement qu’il s’agit d’infractions de
droit commun (Crim. 20 août 1932, D. 1932, I, 121 : affaire GORGULOFF qui a
assassiné le président de la République DOUMER). En revanche, en matière
d’extradition, les infractions de droit commun réalisées avec un mobile politique sont
considérées comme étant de nature politique. En conséquence, elles ne peuvent
donner lieu à l’extradition.
En ce qui concerne les infractions connexes, c’est-à-dire les infractions rattachées
dans le cadre d’une activité délictueuse à une infraction objectivement politique
(insurrection puis pillage d’un magasin), la jurisprudence considère depuis les années
60 (Crim. 18 novembre 1959) que ces infractions présentent dans leur ensemble un
caractère politique. En ce qui concerne l’extradition, le délinquant qui a commis une
infraction connexe ne pourra pas être extradé.
Après avoir envisagé le critère de l’infraction politique, il est nécessaire d’envisager
son régime.
Il est nécessaire de définir ce que l’on entend par infraction militaire avant d’aborder
le régime applicable à ces infractions.
• les infractions de droit commun commises pendant l’exécution du service par des
militaires ou à l’intérieur des casernes.
Au fond, le régime répressif applicable aux infractions militaires est plus sévère que
le régime de droit commun. Beaucoup d’infractions reposent sur la discipline qui est
nécessaire dans les forces armées. De manière générale, pour les infractions
militaires, on fait application des peines de droit commun auxquelles on ajoute des
peines spécifiques (dégradation, destitution…).
En la forme, les règles de compétence applicables varient suivant que l’on se situe en
temps de paix ou en temps de guerre.
Après avoir abordé dans ce premier chapitre la classification des infractions fondée
sur l’élément légal, une autre classification va être envisagée : celle fondée sur
l’élément matériel.
Chapitre II
LA CLASSICATION FONDEE SUR L’ELEMENT MATERIEL
§ I) La notion
Les infractions simples peuvent être définies comme celles dans lesquelles un acte
unique suffit pour consommer l’infraction. Tel est le cas du vol où la soustraction est
suffisante pour consommer l’infraction. Tel est également le cas de l’homicide
volontaire pour lequel un coup de couteau suffit à la réalisation de l’infraction.
A l’opposé des infractions simples, on trouve les infractions complexes et les
infractions d’habitude qui sont toutes deux des infractions a éléments matériels
multiples.
L’infraction complexe est caractérisée par une pluralité d’actes matériels de nature
différente. Tel est le cas de l’escroquerie dans laquelle la conduite matérielle est
caractérisée par l’utilisation de moyens frauduleux qui doivent être suivis d’une
remise. Tel est également le cas de l’extorsion qui nécessite, du point de vue
matériel, des violences ou des menaces suivies d’une remise.
A l’opposé, les infractions d’habitude sont caractérisées par une pluralité d’actes
matériels de nature identique, mais qui pris isolément ne sont pas punissables. De
façon générale, la jurisprudence considère que l’infraction d’habitude est consommée
dès la première réitération, c’est-à-dire à partir du 2ème acte. Tel est le cas en ce qui
concerne l’exercice illégal de la médecine. Tel est également le cas pour les appels
téléphoniques malveillants, le harcèlement sexuel ou le délit de célébration par un
ministre du culte d’un mariage religieux préalablement au mariage civil.
Au-delà des notions, quels sont les intérêts à distinguer ces trois catégories
d’infractions ?
§I) La notion
L’infraction instantanée peut être définie comme celle qui s’accomplit en un trait de
temps. Tel est le cas du vol, de l’homicide, des violences. A l’opposé, les infractions
continues sont définies comme celles dont la matérialité se prolonge dans le temps
en raison de la volonté réitérée de l’auteur des faits. Tel est le cas du recel, de la
séquestration ou du port illégal de décoration.
Cependant, à côté de ces deux catégories d’infractions, certains auteurs ont créé une
nouvelle catégorie : les infractions permanentes. Celles-ci peuvent être définies
comme des infractions dont l’acte matériel s’exécute en un trait de temps mais dont
les effets se prolongent dans le temps sans qu’intervienne l’auteur initial des faits. Tel
est le cas de la bigamie ou de la construction d’un immeuble sans permis de
construire.
La règle non bis in idem ne s’applique pas aux infractions continues si elles se
prolongent après une première condamnation.
Par opposition, l’infraction d’omission est celle dans laquelle l’agent ne fait pas ce que
la loi lui impose de faire. Ainsi, alors que la loi prescrit à tout individu d’aider une
personne en péril (article 223-6 NCP alinéa 2), l’agent ne fait rien.
Historiquement, la question s’est posée de savoir si l’on pouvait sanctionner un acte
de commission par omission : meurtre commis à l’aide d’une omission (ne pas
alimenter une personne). La jurisprudence a répondu par la négative dans un arrêt
célèbre dit « l’affaire de la séquestrée de Poitiers » (arrêt Monnier : Poitiers, 20
novembre 1901, D. 1902, 2, 81). A partir de cet arrêt, les infractions d’omission
créées par le législateur se sont multipliées : omission de porter secours, abandon de
famille, non représentation d’enfant…
A côté de ces infractions de pure omission, il existe certaines infractions dont
l’élément matériel est défini de manière telle qu’il peut être caractérisé par une action
ou une omission. C’est le cas pour les atteintes involontaires à la vie ou à l’intégrité
physique.
CHAPITRE I
LA COMPLICITE
L’article 121-7 dispose que “est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui
sciemment, par aide ou assistance, en facilite la préparation ou la consommation. Est
également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus
d’autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions
pour la commettre”.
Enfin, l’article R. 610-2 dispose que “le complice d’une contravention au sens du
second alinéa de l’article 121-7 est puni conformément à l’article 121-6”.
De ces différents articles, il résulte que le complice est une personne qui participe
volontairement et de manière accessoire à une infraction commise par un tiers. Le
droit français applique le système dit de la complicité, délit unique. Il en résulte que
l’on considère que l’entreprise criminelle forme un tout. Le comportement du
complice est aussi dangereux que celui de l’auteur principal. La criminalité du
complice suit donc celle de l’auteur.
Nous aborderons la complicité en distinguant ses conditions, la distinction entre
coauteur et complice et la répression de la complicité. Il conviendra également
d’aborder le cas spécifique de l’article 221-5-1 NCP issu de la loi Perben II du 9 mars
2004.
Aujourd’hui, le nouveau code pénal consacre la notion de complicité dans son article
121-7 NCP.
Nous aborderons les conditions de la complicité à travers trois points : les qualités de
l’infraction principale, l’élément matériel de la complicité et son élément moral.
L’infraction principale doit être punissable et doit être qualifiée, crime, délit ou
contravention.
La complicité ne peut être réprimée que s’il existe une infraction principale
punissable. Il n’est donc pas suffisant d’avoir collaboré à un acte. Il faut que cet acte
soit punissable.
Cela veut donc dire que :
• il n’y a pas complicité si le fait principal ne peut pas être puni : tel est le cas, si
le fait principal n’est pas incriminé (le suicide qui ne constitue pas une
infraction). Tel est aussi le cas si le fait principal bien qu’incriminé est resté au
stade des actes préparatoires.
• il n’y a pas non plus de complicité si l’acte principal bénéficie d’un fait justificatif
ou d’une immunité. Tel sera le cas dans l’hypothèse de la reconnaissance de la
légitime défense ou si un tiers aide un fils à voler son père. Cependant, certains
auteurs (Jeandidier, Conte) ont une position inverse depuis l’entrée en vigueur
du NCP. C’est ce qu’il ressort également d’une réponse du Garde des sceaux à
une question écrite n° 11649 (JOAN 28 juillet 2003, p. 6084). En revanche, la
jurisprudence ne s’est pas encore prononcée sur ce point.
• il n’y a pas non plus de complicité si l’infraction commise n’est plus punissable.
Tel est le cas en cas de prescription ou d’amnistie.
En revanche, la fuite ou le décès de l’auteur principal n’ôte pas au fait principal son
caractère punissable. De même, le complice reste punissable en cas de relaxe ou
d’acquittement de l’auteur principal si celui-ci se produit in personam (démence,
cause de minorité…). Chaque fois que la relaxe repose sur la personne, le complice
subit la peine. Si le fait principal est punissable, le complice va lui aussi subir la
répression. En revanche, si la complicité est punissable, sa tentative ne l’est pas. De
même, on ne peut pas être complice d’un acte justifié (légitime défense). La
complicité d’une infraction prescrite n’est pas punissable. La complicité d’une
infraction amnistiée n’est pas punissable si l’amnistie a lieu in rem mais reste
punissable lorsque l’amnistie est accordée in personam.
Mais, en outre, le fait principal doit être qualifié crime, délit ou contravention.
Le législateur a dû prévoir des cas limitatifs de complicité. Après avoir envisagé les
formes de la complicité, nous aborderons ses caractères.
En pratique, l’article 121-7 NCP fait une distinction entre deux formes de complicité :
la complicité par aide ou assistance et la complicité par instigation.
L’acte matériel de complicité revêt trois caractères distincts : il doit être consommé, il
doit être positif et doit aussi être antérieur ou concomitant à la consommation de
l’infraction.
• un acte de complicité consommé : une personne peut être poursuivie pour
complicité de tentative. En revanche, elle ne peut pas l’être pour tentative de
complicité. L’acte de complicité doit donc parvenir jusqu’à son terme.
L’acte de complicité est aussi caractérisé par la présence d’un élément moral.
On doit opérer une distinction suivant que l’infraction commise est intentionnelle ou
non.
• si une personne est complice d’un délit d’habitude : on punit le complice quand
l’acte auquel il est associé est le deuxième terme du délit d’habitude. En effet,
selon la jurisprudence « pour être punissable, la complicité d’une infraction
d’habitude n’exige pas l’aide du prévenu à au moins deux actes de l’infraction
principale » (Crim., 19 mars 2008, Droit pénal 2008, com., 79).
Avec l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal, la question semble devoir être
appréhendée différemment. En effet, désormais, nous l’avons dit, la complicité en
matière contraventionnelle est retenue. Plus précisément, rappelons-le les complices
par instigation sont dans tous les cas punissables alors que les complices par aide et
assistance ne pourront être déclarés coupables que si le règlement le prévoit. Ainsi,
la complicité pour les infractions non intentionnelles devrait se développer.
En outre, la jurisprudence a estimé que doit être déclaré complice du délit de mise en
danger d’autrui le passager d’un véhicule qui donne ordre à son chauffeur de brûler
un feu de signalisation en position rouge (Crim., 6 juin 2000, Droit pénal 2000, com.
124).
Par rapport à ces deux principes, le nouveau Code pénal, ne retient que celui de
l’emprunt de criminalité. En effet, désormais, le nouveau Code pénal ne dispose plus
que le complice est puni des mêmes peines que l’auteur principal. Le nouveau code
pénal dans son article 121-6 dispose que le complice encourt les mêmes peines que
s’il avait été lui-même auteur principal de l’infraction. Ce changement rédactionnel
est susceptible de produire des modifications lorsque l’infraction est accompagnée de
circonstances aggravantes.
Ainsi, prenons l’exemple d’une personne qui est complice du meurtre de son père.
Sous l’empire de l’ancien code pénal, cette personne était punie comme l’auteur
principal. Elle encourait donc les peines du meurtre simple et non celles du parricide.
Désormais, cette personne est punie comme si elle était elle-même auteur principal
de l’infraction. Elle encourt donc les peines du meurtre aggravé, l’aggravation tenant
au lien de parenté avec la victime de l’infraction.
Après la répression de la complicité, nous allons aborder le cas spécifique de l’article
221-5-1 NCP.
Aux termes de l’article 221-5-1 NCP, « le fait de faire à une personne des offres ou
des promesses ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques afin
qu’elle commette un assassinat ou un empoisonnement est puni, lorsque ce crime n’a
été ni commis ni tenté, de 10 ans d’emprisonnement et 150.000 € d’amende ». Cet
article consacre l’incrimination d’un acte de provocation non suivi d’effet, c’est-à-dire
l’absence de réalisation de l’acte criminel projeté. Cet article constitue donc un
tempérament à la théorie de la tentative et à celle de la complicité (A. PONSEILLE,
L’incrimination du mandat criminel, Droit pénal 2005, chron. 10). Il s’agit finalement
d’incriminer le contrat d’assassinat. Cette idée n’est pas nouvelle puisque le projet de
nouveau code pénal envisageait cette possibilité dans son article 121-6 selon lequel
le complice était, notamment, envisagé comme la personne qui « provoque
directement un tiers à commettre un crime, lors même qu’en raison de circonstances
indépendantes de la volonté de l’instigateur, la provocation n’est pas suivie d’effet ».
Cette solution retenue par le législateur était proposée par la doctrine depuis
longtemps pour pallier une carence de la législation qui ne réprimait pas l’incitation à
la commission d’un assassinat ou d’un empoisonnement lorsque ces infractions ne
sont ni réalisées ni tentées. En effet, un commencement d’exécution est nécessaire
pour retenir la tentative et, dans l’instigation non suivie d’effet, cet élément fait
défaut. De même, en matière de complicité, un fait principal punissable est
nécessaire, ce qui n’est toujours pas le cas en matière d’instigation non suivie d’effet.
Cependant, le législateur s’était déjà engagé dans la voie de la sanction de la
provocation non suivie d’effet en retenant l’article 450-1 NCP relatif à l’association de
malfaiteurs qui peut être définie comme « tout groupement formé ou entente établie
en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’un ou
plusieurs crimes ou d’un ou plusieurs délits punis d’au moins cinq ans
d’emprisonnement ».
Ainsi, lorsque le comportement pour lequel une personne est pénalement poursuivie
correspondra exactement à celui décrit par l’article 221-5-1 NCP, le juge sera tenu
d’écarter l’article 450-1 NCP en application de la règle selon laquelle la qualification
spéciale l’emporte sur la qualification générale.
Cependant, il faut bien comprendre que l’article 221-5-1 NCP n’incrimine que la
provocation à un assassinat ou à un empoisonnement. En conséquence, la
provocation non suivie d’effet à un autre crime reste impunie, sauf à appliquer
l’article 450-1 NCP, en tant qu’incrimination de secours.
Après avoir envisagé la complicité dans un chapitre premier, nous allons aborder,
dans un chapitre II, la responsabilité pénale des dirigeants.
CHAPITRE II
LA RESPONSABILITE PENALE DES DIRIGEANTS
• Les textes dans lesquels la responsabilité est plus implicite : Il s’agit alors de textes
d’incrimination qui visent le dirigeant comme éventuel auteur de l’infraction.
C’est notamment le cas des articles L. 4741-1 et L. 4741-9 du Code du travail qui
visent l’employeur et le préposé, d’une part, et « toute personne autre que celles
mentionnées à l’article L. 4741-1 ». Cet article concerne les règles d’hygiène et de
sécurité dans le monde du travail.
• la théorie de la faute
• la théorie du pouvoir.
• en cas de manquement d’ordre général commis dans son entreprise. Tel est le
cas s’agissant des règles d’hygiène et de sécurité dans le monde du travail.
• De surcroît, la délégation ne peut pas être totale. Son objet doit donc être
précis et limité (Crim., 13 juin 1972, Bull. crim., n° 23). Ainsi, les délégations
de pouvoirs générales sont prohibées ainsi que les délégations de pouvoirs
consenties au profit de plusieurs personnes ce qui est inopérant (Crim., 6 juin
1989, Bull. crim., n° 243). En revanche, les subdélégations sont admises par
certains arrêts (Crim., 4 février 1991, Bull. crim., n° 79).
1er cas : si l’on prend pour exemple les articles L. 4741-1 et L. 4741-9 du code du
travail, on constate qu’ils visent plusieurs sortes de responsables (employeur,
préposé, toute autre personne). Pour le premier, la délégation de pouvoirs n’a pas
besoin d’être expresse puisque ses fonctions lui confèrent l’autorité. La délégation
n’est donc que l’accessoire de droit de ses fonctions.
2nd cas : hormis ces hypothèses dans lesquelles la délégation de pouvoirs découle
des fonctions, la délégation de pouvoirs doit être expresse et publique (Crim., 13
janvier 1972, Bull. crim., n° 23). Cependant, il n’est pas nécessaire qu’elle soit écrite
(Crim., 27 octobre 1976, Bull. crim., n° 303).
La délégation de pouvoirs doit néanmoins être connue des autres employés.
En outre, celui qui invoque la délégation de pouvoirs (le chef d’entreprise en
pratique) doit rapporter la preuve de son existence (Crim., 1er octobre 1991, droit
pénal 1992, n° 19). Mais, en tout état de cause, la réalité et la portée de la
délégation de pouvoirs à une personne ayant la compétence, l’autorité et les moyens
nécessaires au sein de l’entreprise, que le dirigeant social peut invoquer pour
combattre la présomption de responsabilité qui pèse sur lui, sont laissées à
l’appréciation souveraine des juges du fond (Crim., 3 déc. 1998, Bull. crim., n° 332).
Sous l’empire du Code pénal de 1810, aucun article général ne retenait le principe de
la responsabilité pénale des personnes morales. Pourtant, un important débat avait
mobilisé la doctrine. En l’absence d’un texte général, certains textes épars avaient
retenu la responsabilité pénale des personnes morales.
Dès la fin du XIX° siècle, tous les arguments avancés par la doctrine classique et
défavorables à la responsabilité pénale des personnes morales ont été contrés.
• S’agissant de l’argument de fictivité, la doctrine moderne indiqua que la
fictivité ne faisant pas obstacle à la responsabilité civile des personnes
morales, leur responsabilité pénale pourrait donc être retenue.
• En ce qui concerne l’objection relative aux peines, les auteurs estimaient que
puisque la personne morale avait un patrimoine, des sanctions pouvaient
supprimer ou restreindre ses droits ou atteindre son patrimoine.
Avant 1810, une Ordonnance de Louis XIV du 26 août 1670 retenait la responsabilité
pénale des personnes morales de droit public.
On constate donc que, dès 1670, était envisagée la responsabilité pénale des
collectivités territoriales. Par comparaison avec l’avant-projet de Code pénal de 1986,
on observe que l’ordonnance de 1670 est finalement plus moderne. En effet, le projet
de Code pénal excluait la responsabilité pénale des collectivités publiques et des
groupements de collectivités publiques. Le droit positif du 1° mars 1994 n’exclut,
quant à lui que l’État. En cela, il est identique à l’ordonnance de 1670 qui ne retient
pas la responsabilité pénale du royaume. Dans l’ordonnance de 1670, on observe que
la responsabilité pénale des personnes morales peut être cumulée avec celle des
auteurs de l’infraction ou de leurs complices. On observe, en outre, que la personne
morale doit nommer quelqu’un pour la représenter dans le procès : un syndic, un
député ou un curateur. Si l’on aborde les peines que pouvaient encourir les
personnes morales de droit public, nous remarquons qu’il s’agit soit de peines
d’amende donc des peines de nature pécuniaire, soit de peines privatives de droit ne
même nature que nos actuelles peines complémentaires (suppression de privilège par
exemple).
Le problème des corporations et des corps intermédiaires a été solutionné à la
Révolution par le biais d’un anéantissement. Pour cette raison, le Code pénal de 1810
est demeuré muet sur la responsabilité pénale des personnes morales. D’ailleurs, la
Cour de cassation a consacré ce principe à plusieurs reprises (Crim., 8 mars 1883,
S., 1885, 1, 470).
Il faut ici distinguer les lois éparses et celles intégrées dans les différents Codes.
• loi du 21 mars 1884 qui prévoyait la dissolution des syndicats en cas d’activité
mettant en danger l’ordre public. Ainsi, par décision du Tribunal de la Seine du 13
janvier 1921, la CGT a été dissoute (Gaz. Pal., 1921, 1, 87).
• ordonnance du 5 mai 1945 (J.O. 6 mai 1945 et rectif. 15 mai 1945) relative aux
entreprises de presse coupables de collaboration, aujourd’hui abrogée. Cette
ordonnance prévoyait la responsabilité pénale des personnes morales françaises
ayant favorisé l’ennemi par leur activité. La complicité y est réprimée comme le fait
pour une société d’être auteur principal. Néanmoins, l’ordonnance prévoit dans son
article 3, deux faits justificatifs d’origine légale :
- lorsque les actes ont été accomplis par les dirigeants de la personne morale
pour leur propre compte.
Quelles sont les lois retenant la responsabilité pénale des personnes morales qui ont
été intégrées dans des codes ?
Code pénal (article 428 ancien CP) qui permettait d’infliger une amende à “toute
association d’artistes qui aura fait représenter sur son théâtre des ouvrages
dramatiques au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs”. Cet
article a été abrogé par une loi du 11 mars 1957 relative à la propriété littéraire et
artistique.
Code du travail (article L. 4741-2 du code du travail) qui permet, compte tenu
des circonstances, de mettre à la charge de l’employeur les amendes prononcées
contre un préposé dont l’infraction aux règles d’hygiène et de sécurité a provoqué un
homicide ou des blessures involontaires.
Code du travail (article L. 4741-11 du code du travail) qui fait obligation à la
juridiction saisie d’imposer à une entreprise des mesures destinées à rétablir les
conditions d’hygiène et de sécurité. Cependant, tous les auteurs ne considèrent pas
qu’il s’agit ici d’une responsabilité pénale des personnes morales. Notamment Mr
REINHARD, estime qu’il ne s’agit pas d’une responsabilité pénale puisqu’aucune
infraction n’est sanctionnée.
Après avoir abordé dans une première section le système applicable sous l’empire du
Code pénal de 1810, nous allons envisager le système retenu par le nouveau Code
pénal à travers deux sections.
La responsabilité pénale des personnes morales est envisagée, nous l’avons dit, dans
son principe général, par l’article 121-2 NCP. Aux termes de cet article, modifié par
l’article 54 de la loi Perben II : “les personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont
responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des
infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants (al. 1er).
Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables
pénalement que des infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de
faire l’objet de conventions de délégation de service public (al. 2). La responsabilité
pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou
complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du 4° alinéa de l’article
121-3 (al. 3)”. L’entrée en vigueur de l’article 54 de la loi du 9 mars 2004 a été
reportée au 31 décembre 2005.
A partir de cet article 121-2 NCP, il convient de déterminer successivement le
domaine d’application et les conditions de la responsabilité pénale des personnes
morales, avant d’envisager la question du cumul de responsabilité entre la personne
morale et les personnes physiques.
Il résulte de l’article 121-2 NCP que peuvent engager leur responsabilité pénale les
personnes morales de droit privé, celles de droit public ainsi que les personnes
morales étrangères.
• S’agissant des personnes morales de droit privé, peuvent engager leur
responsabilité pénale les personnes morales à but lucratif dont l’objectif consiste
dans la recherche du profit : sociétés civiles, sociétés commerciales, GIE,
coopératives… Mais, sont également concernées les personnes morales à but non
lucratif, telles les associations, les congrégations, les fondations, les syndicats et les
partis politiques.
• S’agissant des personnes morales de droit public, toutes peuvent engager leur
responsabilité pénale, hormis l’État. La question qui se pose est de savoir pourquoi
le législateur a exclu l’État de la responsabilité pénale. Cette solution s’explique par
le fait qu’il a été considéré comme inconcevable que l’État qui détient le monopole
du droit de punir puisse se sanctionner lui-même. Parmi les personnes morales de
droit public susceptibles d’engager leur responsabilité pénale, il convient de
distinguer les collectivités territoriales et les autres personnes morales de droit
public.
— Les autres personnes morales de droit public : pour ces personnes morales, leur
responsabilité pénale peut être engagée pour l’ensemble de leurs activités. Par
“autres personnes morales de droit public”, on entend les établissements publics et
les groupements d’intérêt public tels que les sociétés d’économie mixte, les
entreprises nationalisées et les ordres professionnels.
• S’agissant des personnes morales étrangères, l’article 121-2 NCP ne faisant aucune
distinction, elles peuvent donc engager leur responsabilité pénale. En application des
règles relatives aux conflits de lois pénales dans l’espace, la loi pénale française leur
est applicable lorsque l’infraction est commise en France ou, dans certains cas,
lorsque l’infraction est commise à l’étranger (infraction commise contre un français,
notamment). La nationalité de la personne morale dépend du lieu de son siège
social ou du lieu de la direction effective ou de la nationalité des personnes
contrôlant la société.
Seules les personnes morales ayant la personnalité morale peuvent engager leur
responsabilité pénale. Sont donc exclues les sociétés de fait ainsi que les sociétés en
participation. L’exigence de la personnalité morale suscite deux interrogations
concernant les personnes morales en cours de formation et, à l’inverse, celles en
cours de liquidation.
Cependant, la loi du 9 mars 2004 (art. 54), dont l’entrée en vigueur a été, sur ce
point, reportée au 31 décembre 2005, retient désormais le principe général de
responsabilité pour les personnes morales, à l’instar des personnes physiques.
Désormais, la responsabilité pénale des personnes morales peut être retenue pour
toutes les infractions, sauf dans les cas où le législateur écarte cette responsabilité,
comme c’est le cas pour les entreprises de presse (art. 55 de la loi du 9 mars 2004).
Outre son domaine d’application, quelles sont les conditions de la responsabilité
pénale des personnes morales ?
Agir pour le compte de la personne morale, suppose une infraction qui doit
nécessairement apporter un profit, quel qu’il soit à cette personne. Ainsi, n’engage
pas la responsabilité pénale de la personne morale le représentant qui agit pour son
propre compte dans son intérêt personnel. A l’inverse, la personne morale engage sa
responsabilité pénale lorsque le dirigeant agit au nom de la personne morale et dans
son intérêt. Dans ce cadre, la responsabilité pénale d’une personne morale pourra
être retenue en raison du défaut d’application d’une règle d’hygiène et de sécurité
ayant entraîné un homicide ou des blessures involontaires.
Dans ce cadre, une personne morale pourra être déclarée responsable d’une
infraction consommée ou simplement tentée. De même, la responsabilité de la
personne morale pourra être retenue en tant qu’auteur ou en tant que complice.
Mais, l’infraction doit avoir été commise par les organes ou représentants de la
personne morale. Et, ne justifie pas sa décision, une Cour d’appel qui condamne une
personne morale sans rechercher si l’infraction a été commise pour le compte de la
société par l’un de ses organes ou représentants (Crim., 1er avril 2008, Droit pénal
2008, n° 140, 2ème esp.). Cependant, la responsabilité pénale de la personne
morale ne suppose pas qu’elle ait commis une faute distincte de celle de ses organes
ou représentants (Lyon, 3 juin 1998, Droit pénal 1998, com. 118).
• La notion d’organe
Les organes d’une personne morale sont constitués par une ou plusieurs personnes
physiques auxquelles la loi ou les statuts donnent une fonction particulière dans
l’organisation de la personne morale en les chargeant “de son administration ou de
sa direction”. Ainsi, constituent les organes d’une personne morale de droit privé le
gérant, le président-directeur général, le conseil d’administration ou le directoire, les
directeurs généraux, le conseil de surveillance, l’assemblée générale pour les
associations et les syndicats.
Constituent les organes des collectivités territoriales et de leurs groupements le
maire, le conseil municipal d’une commune, le président du conseil général et le
conseil général du département, le président du conseil régional et le conseil régional
d’une région, le président, le bureau et le comité d’un syndicat de communes…
Face à ces organes de droit, la question se pose de savoir si les organes de fait d’une
personne morale (société commerciale) peuvent engager la responsabilité pénale de
la personne morale ? Dans une réponse à une question écrite, le garde des sceaux
s’est prononcé en faveur de la responsabilité pénale de la personne morale dans de
telles circonstances (Quest. n° 5635, JOAN Q, 22 nov. 1993, p. 4170). La doctrine,
quant à elle, est partagée sur la question. La jurisprudence ne s’est pas encore
prononcée sur la question.
Qu’entend-on par représentant de la personne morale ?
c) La notion de représentant
Face à ces tiers, la question s’est posé de savoir si le bénéficiaire d’une délégation de
pouvoirs pouvait engager la responsabilité pénale de la personne morale. Il semble,
selon la doctrine, que l’on doive apporter une réponse positive à cette question.
Selon la jurisprudence, ont la qualité de représentants, les personnes pourvues de la
compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires ayant reçu une délégation de
pouvoirs de la part des organes de la personne morale (Crim., 9 nov. 1999, Bull.
crim., n° 252).
B) Les conditions de forme
3° Interdiction d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de
fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d'utiliser des cartes de
paiement ;
4° Interdiction d'exercer certaines activités professionnelles ou sociales lorsque
l'infraction a été commise dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ces activités
et lorsqu'il est à redouter qu'une nouvelle infraction soit commise ;
L’ article 121-2 al. 3 NCP dispose que “la responsabilité pénale des personnes
morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes
faits”. Les personnes physiques visées par cet alinéa sont les organes ou
représentants de la personne morale ainsi que toute autre personne qui agirait sur
leurs instructions ou qui serait coauteur de l’infraction. Cependant, la jurisprudence
précise que la responsabilité pénale des personnes morales n’est pas le résultat
automatique de celle de leurs dirigeants (T.C. Lyon, 9 oct. 1997, Droit pénal 1997,
com. 154). D’ailleurs, en pratique, certains procureurs de la République, notamment
celui de Paris, épargnent les personnes physiques lorsqu’ils décident de poursuivre
les personnes morales.
Parfois, cependant, la jurisprudence prononce une condamnation conjointe d’une
société et de son directeur général (Crim., 15 mai 2012, Droit pénal 2013, p. 29).
Ce principe comporte, cependant, des exceptions.
Dans certains cas restreints, la responsabilité pénale des personnes morales pourra
être la seule retenue dans le cadre d’infractions intentionnelles. Ainsi, une
infraction résultant d’une délibération prise à bulletin secret par un organe collectif
d’une personne morale pourrait engager la seule responsabilité pénale de la personne
morale sans qu’une faute puisse être démontrée à l’encontre des personnes
physiques prises individuellement. Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a
retenu la dissociation de la responsabilité pénale de la personne morale de celle de
ses organes ou représentants (Crim., 8 sept. 2004, Droit pénal 2005, n° 11). Il existe
donc une certaine autonomie de la responsabilité pénale des personnes morales par
rapport à celle des personnes physiques.
L’article 131-37 du nouveau Code pénal prévoit deux types de peines applicables
en matière criminelle et correctionnelle :
- L’amende ;
A) L’amende
Rappelons au préalable que le Conseil constitutionnel avait déjà considéré dans une
décision du 30 juillet 1982 “qu’il n’existe aucun principe de valeur constitutionnelle
s’opposant à ce qu’une amende puisse être infligée à une personne morale” (cf.
Décis. n° 82-143, J. O. 31 juillet 1982).
L’amende, selon le nouveau Code, est en fait toujours applicable quelle que soit
l’infraction commise par la personne morale. L’article 131-38 prévoit notamment que
le taux de l’amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui
prévu pour les personnes physiques à propos de la même infraction. Ce taux apparaît
très élevé lorsqu’on sait que le nouveau Code, de manière générale, a déjà relevé le
taux de l’ensemble des amendes applicables aux personnes physiques.
En outre, la loi du 9 mars 2004 a réglé la lacune concernant les infractions pour
lesquelles aucune peine d’amende n’était encourue par les personnes physiques
(meurtre, empoisonnement, par exemple). Désormais, il est ajouté un alinéa 2 à
l’article 131-38 NCP aux termes duquel « lorsqu’il s’agit d’un crime pour lequel
aucune peine d’amende n’est prévue à l’encontre des personnes physiques, l’amende
encourue par les personnes morales est de 1 000 000 € ».
Quelles sont les peines prévues par l’article 131-39 NCP ?
Un crime ou un délit peut être sanctionné par l’une des peines restrictives ou
privatives de droit, dont la liste est prévue à l’article 131-39 (loi du 9 juillet 2010).
Reprenons-les une par une :
« 1° La dissolution, lorsque la personne morale a été créée ou, lorsqu'il s'agit d'un
crime ou d'un délit puni en ce qui concerne les personnes physiques d'une peine
d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, détournée de son objet pour
commettre les faits incriminés ». Cette peine est considérée comme la peine de mort,
puisque c’est en réalité la fin de la personne morale sur le plan juridique. Cette peine
concerne évidemment les infractions les plus graves comme le trafic de stupéfiants
ou le proxénétisme. L’article 131-45 prévoit toutefois que la décision prononçant la
dissolution de la personne morale nécessite le renvoi de celle-ci devant le tribunal
compétent pour procéder à la dissolution : soit le tribunal de grande instance lorsque
la personne morale est civile, soit devant le tribunal de commerce lorsqu’elle est
commerciale. A noter cependant que certaines personnes morales sont exclues du
champ d’application d’une telle peine : ce sont les personnes morales de droit public,
les partis politiques, les syndicats ainsi que les institutions représentatives du
personnel.
« 2° L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer
directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales
».
« 3° Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ».
Des précisions supplémentaires sont données par l’article 131-46. Ainsi, le
placement sous surveillance judiciaire entraîne la désignation d’un mandataire de
justice qui doit, tous les six mois au moins rendre compte de sa mission au juge de
l’application des peines. Au vue de ce compte-rendu, le juge de l’application des
peines peut saisir la juridiction qui a prononcé le placement sous surveillance
judiciaire. Cette juridiction peut, soit relever la personne morale de la mesure, soit
prononcer une nouvelle peine.
« 4° La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des
établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant
servi à commettre les faits incriminés ». Cette peine est aussi appliquée aux
personnes physiques.
« 5° L’exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au
plus ». La question se pose, cependant, de savoir si les marchés publics visés sont les
marchés futurs ou également ceux en cours d’exécution. La jurisprudence ne s’est
pas prononcée sur cette question.
« 6° L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de procéder
à une offre au public de titres financiers ou de faire admettre ses titres financiers aux
négociations sur un marché réglementé ;
7° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres
que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui
sont certifiés ou d'utiliser des cartes de paiement ;
8° La peine de confiscation, dans les conditions et selon les modalités prévues à
l'article 131-21 ; 9° L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci
soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie
électronique ; »Cette mesure très efficace pour les personnes physiques l’est
également pour les personnes morales, car elle touche incontestablement l’image de
l’entreprise concernée.
« 10° La confiscation de l'animal ayant été utilisé pour commettre l'infraction ou à
l'encontre duquel l'infraction a été commise ;
11° L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de détenir
un animal ».
« Les peines définies aux 1° et 3° ci-dessus ne sont pas applicables aux personnes
morales de droit public dont la responsabilité pénale est susceptible d'être engagée.
Elles ne sont pas non plus applicables aux partis ou groupements politiques ni aux
syndicats professionnels. La peine définie au 1° n'est pas applicable aux institutions
représentatives du personnel ».
C) La sanction-réparation
A) L’amende
C) La sanction-réparation