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COMPOSANTES ET DETERMINANTS
Introduction
Le rôle essentiel des commerciaux, membres des forces de vente itinérantes, est récent.
Depuis quelques décennies, les modes d’industrialisation ont nécessité de développer une
commercialisation marginalisant les pratiques de type artisanal où l’on fabriquait et vendait
dans le cadre d’une relation interpersonnelle préalablement établie.
Par ailleurs, ce type de vente évolue rapidement sous l’influence de trois facteurs importants.
Ce nouveau paysage pour l’exercice de la fonction commerciale n’entraîne pourtant pas une
remise en cause complète de ses caractéristiques fondamentales.
Tout d’abord, l’incertitude du résultat demeure l’une des données principales de ce métier;
elle garde des proportions que peu d’activités économiques répétitives connaissent (Xardel,
1992)
Pour la direction d’une équipe commerciale qui intègre une forte dimension subjective,
l’impact des choix structurels semble avéré dans la mesure où ils " affectent directement les
interactions entre les membres, leurs besoins personnels et leur degré de motivation "
(Lawrence et Lorsch, 1967).
Pourtant, l’étude du facteur organisationnel n’est entreprise que de manière incidente par les
auteurs de référence dans les systèmes de management de la force de vente. Dans l’inventaire
des variables contribuant à la performance, il n’est pas valorisé au niveau des déterminants
psychosociologiques tels que la motivation.
Ainsi, selon Walker, Churchill et Ford (1977), cinq variables contribuent à la performance du
vendeur: 1) la motivation, 2) le niveau de compétence, 3) les aptitudes du vendeur, 4) les
perceptions que le vendeur a de son rôle, 5) les facteurs personnels, organisationnels et
d’environnement.
L ‘approche de René-Yves Darmon (1993) s’inscrit dans le prolongement de ces travaux. Son
système plus élaboré fait apparaître la question de l’organisation plus nettement en particulier
lorsqu’il souligne l’importance des processus de coordination ou de spécialisation.
Le contrôle qui recouvre selon les auteurs des activités de management bien différenciées est
l’une des variables les plus étudiées. Ainsi, Goutam N. Challagalla et Tasadduq A. Shervani
(1996) ont évalué les effets du contrôle managérial sur la satisfaction et la performance des
vendeurs. L’une des parties essentielles de leur travail consiste à définir la notion de contrôle
managérial (supervisory control). Ils sont amenés à distinguer le contrôle de la capacité et le
contrôle de l’activité elle-même Dans la même logique, Jaworski, and Ajay K. Kohli (1991)
ont pu établir une corrélation entre le contrôle a posteriori sur ces deux variables également.
Plus récemment, Ingram, Thomas N et Danny N. Bellenger (1985) ont pu déterminer qu’il
existait une relation directe entre les variables organisationnelles et personnelles et la valeur
effective des commerciaux. Weitz (1986) avait d’ailleurs constaté que les chercheurs comme
les responsables de force de vente reconnaissent que le contexte (dont font partie le système
de contrôle managérial et la spécialisation territoriale) participe à la performance de la force
de vente.
L’objet de notre étude est d’appréhender le cadre organisationnel de la fonction " gestion de la
force de vente ". Il s’agit aussi d’évaluer le déterminisme duquel il résulterait par l’intégration
de facteurs inventoriés en théories des organisations. Cette investigation s’inscrit dans le
prolongement de travaux sur l’organisation du service marketing (Rico, 1995, Marticotte et
Perrien, 1996).
Pour cette étude, il est nécessaire construire un cadre de recherche qui permette de vérifier
l’impact des déterminants de la forme organisationnelle et de décrire la structure à travers ses
composantes.
Il convient de noter que les chercheurs, dans ce domaine, ont étudié souvent des relations bi-
variées ; cela se vérifie dans deux types d’investigations relatives:
en premier lieu, à la relation entre la performance de la force de vente et les composantes
organisationnelles,
Notre travail se situe dans le second champ tout en étant caractérisé par l’intégration de
plusieurs facteurs de détermination.
Pour la mesure des variables, l’information a été recueillie par l’administration par entretien
ou par voie postale d’un questionnaire auprès des 10 entreprises sélectionnées selon des
critères précisés ci-après. Les personnes interrogées étaient exclusivement des responsables de
commerciaux: ils avaient une responsabilité hiérarchique directe sur les vendeurs.
Deux missions de conseil en management commercial avaient permis de préparer ce travail.
Le questionnaire comprenant quarante questions est directement adapté de celui de JC Rico
pour son étude sur l’organisation des départements marketing des entreprises en milieu inter-
organisationnel (1995).
Tout d’abord, nous développerons le cheminement théorique qui justifie la modélisation (A).
Ensuite, nous présenterons les hypothèses pour la vérification desquelles l’enquête a été
conduite (B).
Selon l’hypothèse formulée également par Marticotte et Perrien (1995), il est considéré que
l’environnement externe influence:
La structure de la force de vente est donc déterminée par des facteurs externes et internes à
l’organisation, mais ces facteurs internes à l’organisation sont eux aussi influencés par
l’environnement externe.
Cela étant posé, il nous a semblé opportun de privilégier les deux relations directes suivantes:
L’organisation des forces de vente rattachées à des entreprises dont les caractéristiques
objectives sont très similaires sera étudiée. Ces facteurs déterminants sont propres à chaque
entreprise; leur effet hypothétique ne peut aboutir strictement aux mêmes conséquences.
En quelque sorte, toute chose étant (relativement) égale par ailleurs, la forme
organisationnelle des forces de vente étudiées devrait comprendre de fortes proximités qui se
révéleraient sous forme de tendance à l’uniformisation.
d’une part, celles qui sont des composantes de l’organisation de la force de vente,
L’étude de ces variables résulte d’une démarche empirique reposant principalement sur de
l’observation et des entretiens. La grande notoriété de ces entreprises et de leurs produits
(exemples: Canon, IBM, Rank Xerox...) permet d’opérer une vérification sans procéder à une
lourde investigation. L’observation externe complétée d’une approche documentaire et
d’entretiens informels est suffisamment éclairante.
L’interaction avec les clients: Elle se traduit par la dépendance à l’égard de l’environnement
et notamment les clients (groupe d’Aston). Concrètement, elle se révèle par exemple par la
durée des relations, le degré d’adaptation des biens vendus, la position dominante ou non du
fournisseur chez ses clients, l’existence éventuelle de barrières à l’entrée ou à la sortie,
l’importance des relations interpersonnelles, l’importance de la coopération client-fournisseur,
l’importance de la confiance mutuelle, le degré d’organisation de la démarche achat chez les
clients.
Le cycle de vie du produit: Cette variable n’est pas toujours identifiée de manière
indépendante; elle est souvent intégrée dans le concept de technologie. Dans le champ
commercial, elle s’impose comme un élément important: le renouvellement des produits a un
impact direct sur le travail de commercialisation.
Le modèle de Marticotte et de Jean Perrien (1995) instaure une séparation formelle entre les
caractéristiques du département marketing et celle de l’organisation dont il dépend. La
pertinence de ce choix pour notre propre travail n’est pas à remettre en cause d’autant plus
que l’entité " force de vente " est la plupart du temps très distincte sur un plan strictement
physique des autres composantes opérationnelles ou fonctionnelles de l’entreprise.
La taille de l’organisation: L’analyse classique en ce sens est celle de Northcote Parkinson
(1957) qui établit une relation stricte entre taille et structure organisationnelle, se traduisant
par une bureaucratisation croissante. Plus précisément, il y a, selon cet auteur, une liaison
logarithmique entre le ratio des activités de support (principalement administratives) et des
activités opérationnelles d’une part et le nombre de participants de l’autre. Une équipe de
chercheurs anglais (Pugh, Hickson et Hinnings, 1969) a également étudié cette relation et a
pu montrer le rôle prépondérant de la taille dans la spécialisation, la standardisation et la
formalisation dans les organisations. Si toutes les études empiriques n’ont pas pu vérifier un
lien univoque entre la taille et le degré de complexification des structures, l’existence d’une
relation avec la spécialisation et la formalisation est admise.
Leur zone de travail commercial est limitée sur le plan géographique; elle recouvre une
région, quelques départements ou une agglomération importante.
Les caractéristiques des ressources humaines de ces entreprises sont très proches. Elles
recrutent des collaborateurs ayant la même formation initiale. Les référentiels
comportementaux sont dotés de nombreux points communs. Le contenu des annonces de
recrutement illustre ces fortes convergences.
La planification : Pour Koontz, O’Donnel, elle joue bien sûr un rôle essentiel puisqu’elle
détermine les lignes conductrices de l’avenir de l’entreprise. " Elle s’intègre dans les
processus d’orientation des activités qui déterminent leur nature, leur localisation, leur niveau,
leur distribution temporelle, leurs composantes opératoires principales, en référence à des
principes d’action collective définis ou simplement pratiqués par les décideurs ".
Le contrôle : C’est une fonction de vigilance dont l’objet est d’assurer que l’utilisation des
ressources et les résultats soient conformes aux objectifs de l’organisation. Ce qu’il recouvre,
c’est la notion de rétroaction autrement appelée le feedback.
En premier lieu, c’est celui auquel faisait référence H. Fayol (1979) lorsqu’il indiquait qu’il
s’agissait de signaler les fautes et les erreurs afin qu’on puisse les réparer et en éviter le
retour.
En second lieu, on peut le concevoir comme Y. Enregle et R.A Thiétart qui considèrent que
lorsque les résultats peuvent être prédits, l’action corrective peut être mise en œuvre avant que
l’action ne soit entièrement terminée.
Cependant, il convient d’observer que ce clivage n’est pas aussi net. En effet, l’évaluation des
écarts même dans un cadre prédictif est faite à partir de signaux ou d’indicateurs qualitatifs ou
quantitatifs qui font l’objet d’un contrôle a posteriori.
La spécialisation: Dès que les tâches se répètent dans une organisation , il est nécessaire de
spécialiser. Cette spécialisation comprend deux dimensions: la verticale et l’horizontale. La
spécialisation verticale correspond à la création de niveaux hiérarchiques. Quant à la
spécialisation horizontale appelée aussi fonctionnelle, elle aboutit à la création de fonctions
indépendantes.
B - Les hypothèses
Les hypothèses sont formulées sur la base d’un préalable . Toutes les forces de vente qui font
l’objet de l’étude empirique sont soumises à des déterminants qui sont similaires dans leur
nature et très proches dans leur degré.
L’hypothèse principale est donc de considérer que l’organisation des forces de vente des
entreprises commercialisant des produits de haute technologie à d’autres entreprises tend vers
une structuration très forte.
Connaissent une interaction faible avec les clients ( interaction avec les clients)
Et dans laquelle le personnel répond à des caractéristiques " culturelles " très proches
(Variable culture).
Alors,
H2. Le contrôle est une composante organisationnelle qui s’intensifie dans sa précision et par
sa fréquence.
H3.La décentralisation/centralisation est une variable qui obéit à des tendances contradictoires
Dans ces entreprises, la notion de spécialisation joue un rôle prépondérant dans le dispositif
organisationnel. En effet, sur les 10 entreprises, 9 sont dotées d’au moins trois degrés de
spécialisation. Ainsi, les commerciaux évoluent dans un secteur géographiquement défini,
pour une clientèle ayant des caractéristiques précises (taille et/ou secteur), pour une gamme de
produits répondant à des besoins spécifiques.
Seule l’entreprise Philips pour sa filiale " Systèmes médicaux " semble avoir mis en place une
affectation sur un critère unique (géographique). L’explication réside dans le fait que la
spécialisation est opérée au niveau de la filialisation. En effet, cette entité a été créée pour
développer et commercialiser un type de produit ( les systèmes d’information pour l’imagerie
médicale) à une clientèle en conséquence limitée au seul secteur médical.
L’évaluation du degré de contrôle a été faite en demandant aux responsables des forces de
vente des entreprises d’indiquer sur une liste de 22 paramètres combien ils en utilisaient et
quelle en était leur fréquence d’examen. Deux groupes d’entreprises peuvent être constitués à
partir de ces résultats.
Groupe 1 : 8 forces de vente soumises à une évaluation très fréquente ( au moins une fois par
semaine) sur plus de 15 critères.
Groupe 2 : 2 forces de vente soumises à un contrôle moins fréquent et plus réduit quant aux
nombres de paramètres utilisés.
Par ailleurs, selon 9 responsables sur 10, le contrôle est dans une phase de croissance.
Troisième hypothèse: La décentralisation est une variable qui obéit à des tendances
contradictoires
La première repose sur la liberté dont dispose le commercial ou le responsable des forces de
vente pour décider seul dans ses différents d’activité. Ainsi, le commercial pourra de lui-
même organiser son planning en définissant ses priorités.
Le seconde est liée aux poids croissant du contrôle. Sa permanence et sa finesse pèsent
comme une contrainte. La circulation verticale de l’information qui répond à ces mêmes
caractéristiques est un facteur d’amplification de ce sentiment.
Dans ces entreprises, le commercial est donc dans l’obligation d’adopter des procédures de
travail très précises. Les différences liées à des pratiques individuelles spécifiques ne sont
plus tolérées. La démarche commerciale est découpée en différentes étapes qui répondent
chacune d’entre elles à un référentiel.
Cette standardisation est accompagnée d’une formalisation. Cette dernière est notamment
mise en œuvre dans un domaine où l’absence de formalisme était jusqu’ici la règle: la
communication entre les collaborateurs. A titre d’illustration, la réunion commerciale où se
retrouve l’équipe et son responsable obéit à un processus préalablement établi et formalisé.
Par ailleurs, le niveau de formation initiale participe probablement à cette tendance. Il existe
une corrélation entre celui-ci et le recours à l’écrit.
Les résultats montrent que la planification du travail des commerciaux n’est pas aussi
développée que le contrôle. Il convient aussi d’observer des différences assez significatives
entre les entreprises.
Cette lecture des résultats ne doit pas pourtant conduire à nier la capacité de la force
commerciale d’orienter et d’organiser son travail dans le temps. C’est finalement l’autonomie
des commerciaux qui s’alimente de cette différence entre le contrôle et la planification. Ils
détermineront eux-mêmes leur priorité en privilégiant les activités qui feront l’objet d’un
contrôle a posteriori.
En conséquence, il est possible de considérer que la planification existe; elle n’est pas
formalisée comme le contrôle mais la formalisation du contrôle constitue un référentiel
suffisant.
Les résultats valident cette hypothèse. Les opinions exprimés sont globalement favorables
mais avec quelques réserves. Plus l’activité est structurée, plus les tâches structurelles
inhérentes sont nombreuses et mobilisent du temps (celui du manager). Les répondants
conçoivent que cela puisse contribuer à l’efficacité tout en regrettant une certaine rigidité.
Question Canon Epson Ricoh Philips Nec Alcatel Matra IBM Rank Hewlett
Xerox
Packard
Spécialisation 4 3 3 1 3 3 3 3 3 3
Sur 4 items
Standardisation Fort Fort Fort Fort Fort Fort Fort Fort Fort Moyen
Rôle 3 5 4 6 6 4 5 6 6 4
Sur 6 exemples Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Augmentation
Formalisation Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Sur 13 exemples Imp Imp. Imp Imp Imp Imp. Imp Imp. Imp Imp
Temps consacré
Centralisation Forte Forte Moy Moy. Forte Moy. Moy. Forte Moy. Forte
Autonomie Oui Stable Oui. Oui Oui Oui Stable Non Oui Non
Augmentation de la centralisation
Planification 14 8 10 8 17 5 5 5 10 4
Augmentation
Existence d’un système de Non oui non oui oui Non Oui Oui Oui
gestion informatisé
oui oui oui Non Oui Oui Oui
Modem
oui
Minitel
Intranet
Opinion Oui Moyen Oui Moyen Oui Oui Oui Oui Oui Oui
Pertinence pour FDV Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui Moyen
Efficacité
la première est que ces entreprises se dotent d’organisations qui se structurent selon des
processus qui croissent en complexité,
Si l’on interroge un commercial itinérant sur les motivations qui l’ont conduit à choisir ce
métier, il est généralement admis qu’il place souvent au premier rang son goût pour la
performance et pour sa traduction financière en rémunération; il peut encore évoquer son
intérêt pour le contact humain. Mais la liberté et l’autonomie sont aussi des revendications
fortes (Négro,1993).
Or, le cadre organisationnel dans lequel il exerce son métier touche directement à ces
éléments. L’organisation n’est pas seulement un référentiel au sens statique du terme, c’est
bien sûr un élément structurant du travail des commerciaux.
Pour les dirigeants, l’amélioration de la performance est l’objectif qui les amène à faire
évoluer la forme organisationnelle de leur force de vente. L’efficacité organisationnelle
constitue une condition nécessaire (mais non suffisante) de la réussite économique. Cette
recherche d’efficacité alimentée par des objectifs de productivité modifie considérablement le
rapport du commercial à son travail. Les qualités requises pour l’exercice de ce métier
s’enrichissent de nouvelles exigences (Labilliet, 1994). L’évolution de l’organisation du
travail au sein des directions commerciales va requérir un profil psychologique et intellectuel
particulier.
L’étendue des tâches du commercial s’étant élargie, il doit être en mesure de gérer une
nouvelle complexité, y dégager des priorités et assumer des choix seul tout en sachant que le
contrôle auquel il est soumis gagne en précision et en fréquence. Or la responsabilité
hiérarchique qui pèse sur lui n’a plus ni la même apparence formelle, ni le même contenu.
En outre, comme l’évoque R;Y Darmon (1997), il convient de se demander si tous les outils
de contrôle sont compatibles et peuvent être utilisés simultanément des éléments de contrôle
centralisés et décentralisés?
Nous sommes en effet au sein d’une transformation importante portée par les capacités
prodigieuses de l’informatique, celle-ci perdura-t-elle réellement au regard des exigences
qu’elle implique?
Comment diriger efficacement, quels sont les leviers qu’il faut actionner?
Le processus de décision et d’animation d’une équipe commerciale est donc au cœur d’un
système dont la complexité mérite d’être appréhendée. Les chercheurs peuvent contribuer à sa
meilleure connaissance et favoriser ainsi une analyse avec des prolongements utiles pour les
managers.
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