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1- Trouble de la personnalité histrionique

Le trouble de la personnalité histrionique est caractérisé par un motif omniprésent d’émotivité


excessive et de recherche d’attention. Le diagnostic repose sur les critères cliniques. Le
traitement repose sur la psychothérapie psychodynamique.

Les patients présentant un trouble de la personnalité histrionique utilisent leur


apparence physique, ils agissent de façon inappropriée, séduisent ou provoquent,
pour attirer l'attention des autres. Ils n'ont pas de sens de l'autonomie et sont très
influençables, ils agissent souvent docilement pour retenir l'attention des autres.

La prévalence estimée est < 2% de la population générale (1). La prévalence chez


les femmes et les hommes est similaire. Des rapports antérieurs selon lesquels il
existerait une prévalence augmentée chez les femmes étaient probablement
influencés par des biais de constatation des études hospitalières.
Les comorbidités sont fréquentes, en particulier d'autres troubles de la
personnalité (antisociale, limite [borderline], narcissique) (2). Certains patients
présentent également un trouble somatoforme , qui peut être la raison pour laquelle
ils consultent à des fins d'évaluation. Un trouble dépressif majeur , une trouble
dépressif persistant et un trouble de conversion peuvent aussi coexister.
2- Aperçu historique de la personnalité histrionique
Si l’on peut faire remonter l’histoire de l’hystérie à plusieurs siècles (Hippocrate,
Platon avec son Timée, Galien), voire à des millénaires (papyrus Kahoun, 1900
av. J.-C.), nous prendrons ici pour point de départ La médecine pratique [4] de T.
Sydenham. Pourquoi Sydenham ? Parce que, comme le dit E. Trillat, non
seulement il possédait « d’éminentes qualités de clinicien », mais en outre « il est
l’un des premiers à faire de l’hystérie une maladie pas comme les autres » [3].
Dans sa « Dissertation sur l’affection hystérique » (1681), Sydenham considère
que celle-ci est « la plus fréquente de toutes les maladies chroniques ». L’une des
observations cliniques à relever chez Sydenham est la suivante, qui met en relief
la dimension importante de l’« imitation » dans l’hystérie : « l’affection
hystérique n’est pas seulement très fréquente, elle se montre encore sous une
infinité de formes diverses, et elle imite presque toutes les maladies qui arrivent
au genre humain, car dans quelque partie du corps qu’elle se rencontre, elle
produit aussitôt les symptômes qui sont propres à cette partie […]. Cette maladie
est un protée qui prend une infinité de formes différentes ; c’est un caméléon qui
varie sans fin ses couleurs […]. Ses symptômes ne suivent aucune règle, ni aucun
type uniforme ». Si Sydenham est un tournant décisif dans la déjà longue histoire
de l’hystérie, c’est aussi selon E. Trillat parce que pour lui « le siège de l’hystérie
n’est plus dans l’utérus, il est dans le cerveau » [1]. Pour P. Bercherie également,
Sydenham amène « une grande mutation » [5] dans la compréhension de
l’hystérie, pour les raisons déjà vues, mais aussi parce que « l’Hippocrate anglais
» réunissait en une même maladie l’hypocondrie (côté homme) et l’hystérie (côté
femme), dont les troubles et les crises émergeaient sur fond d’un terrain « nerveux
» commun (l’hystérie est appréhendée ici comme maladie du système nerveux, la
référence matricielle étant donc abandonnée). Sydenham ne donne pas à
proprement parler de définition de l’hystérie, mais ses très fines observations (il
est « l’un des plus grands cliniciens de tous les temps », selon I. Veith [6])
permirent de jeter un regard nouveau sur l’hystérie. Sydenham décrivit
notamment la toux hystérique, et c’est à lui que l’on doit le désormais célèbre «
clou hystérique », violent mal de tête accompagné de vomissements.
Références générales
 1. Morgan TA, Zimmerman M: Epidemiology of personality disorders. In Handbook
of Personality Disorders: Theory, Research, and Treatment. 2nd ed, edited by WJ
Livesley, R Larstone, New York, NY: The Guilford Press, 2018, pp. 173-196.
 2. Zimmerman M, Rothschild L, Chelminski I : The prevalence of DSM-IV
personality disorders in psychiatric outpatients. Am J Psychiatry 162:1911-1918,
2005. doi: 10.1176/appi.ajp.162.10.1911
 Nicolas Brémaud, Panorama historique des définitions de l’hystérie ,Dans
L’information psychiatrique, 2015/6, (Volume 91), pages 485 à 498

Symptomatologie du trouble de la personnalité histrionique


Les patients présentant un trouble de la personnalité histrionique ont sans cesse besoin d’être
le centre d’attention et dépriment souvent lorsque ce n’est pas le cas. Ils sont souvent
dynamiques, impressionnants, enthousiastes et charmeurs et parfois séduisent de nouvelles
connaissances.
Ces patients se déguisent souvent et agissent dans un but de séduction provocante
inappropriée, non seulement avec des intérêts potentiels romantiques, mais aussi dans
de nombreux contextes (p. ex., travail, école). En raison de leur désir d’impressionner les
autres par leur apparence, ils sont souvent préoccupés par celle-ci.
L’expression de l’émotion peut être peu profonde (désactivée et trop rapide) et exagérée. Ils
parlent de façon spectaculaire, ils expriment des opinions fortes mais peu de faits ou de détails
viennent les appuyer.
Les patients présentant un trouble de la personnalité histrionique sont facilement influencés
par les autres et par les tendances du moment. Ils ont tendance à être trop confiants, en
particulier par rapport aux figures d’autorité qui, selon eux, peuvent être en mesure de
résoudre tous leurs problèmes. Ils pensent souvent que leurs relations sont plus étroites
qu’elles ne le sont. Ils ont soif de nouveauté et s’ennuient facilement. Ainsi, ils peuvent
changer d’emploi et d’amis fréquemment. Si on ne les gratifie pas immédiatement ils se
sentent frustrés, de sorte que leurs actions sont souvent motivées par l’obtention d’une
satisfaction immédiate.
La réalisation de l’intimité émotionnelle ou sexuelle peut être difficile. Les patients peuvent,
souvent sans en avoir conscience, jouer un rôle (p. ex., victime). Ils peuvent essayer de
contrôler leur partenaire en utilisant la séduction ou la manipulation émotionnelle tout en
devenant très dépendants du partenaire.
Diagnostic du trouble de la personnalité histrionique
 Critères du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders,
5th edition, Text Revision (DSM-5-TR)
Pour qu'un diagnostic de trouble de la personnalité histrionique soit posé ( 1), les
patients doivent présenter
 Un schéma persistant d'émotivité et de recherche d'attention excessifs

Ce modèle correspond à la présence de ≥ 5 des éléments suivants:


 Une gêne lorsqu'ils ne sont pas le centre de l'attention
 Une interaction avec les autres sous une forme de séduction ou de
provocation sexuelle inappropriées
 L'expression rapidement changeante et superficielle des émotions
 Une utilisation régulière de l'apparence physique pour focaliser
l'attention sur eux
 Un discours extrêmement impressionniste et vague
 Une auto-dramatisation, une théâtralité et une expression des
émotions exagérées
 Une suggestibilité (ils sont facilement influencés par d'autres
personnes ou situations)
 L'interprétation des relations comme plus intimes que ce qu'elles sont

En outre, les symptômes doivent avoir débuté au début de l'âge adulte.

Diagnostic différentiel
Les troubles de la personnalité histrionique peuvent être distingués d'autres troubles de la
personnalité en fonction de caractéristiques spécifiques:

 Trouble de la personnalité narcissique : les patients souffrant d'un trouble de


la personnalité narcissique recherchent également de l'attention, mais,
contrairement à ceux qui ont un trouble de la personnalité histrionique, ils
veulent se sentir admirés ou élevés; les patients souffrant d'un trouble de la
personnalité histrionique ne sont pas aussi pointilleux sur le genre d'attention
qu'ils reçoivent et ne sont pas dérangés par le fait d'être considérés mignons ou
stupides.
 Trouble de la personnalité limite (borderline) : les patients souffrant d'un
trouble de la personnalité limite (borderline) se considèrent comme de
mauvaises personnes et leur vécu émotionnel est intense et profond; ceux qui
ont un trouble de la personnalité histrionique ne se considèrent pas mauvais,
même si leur dépendance à l'égard de la réaction des autres peut provenir la
conséquence d'un manque de confiance en eux.
 Trouble de la personnalité dépendante : les patients souffrant d'un trouble de
la personnalité dépendante, comme ceux qui ont un trouble de la personnalité
histrionique, recherchent la proximité des autres, mais ils sont plus anxieux,
inhibés, et soumis (parce qu'ils craignent un rejet); les patients souffrant d'un
trouble de la personnalité histrionique sont moins inhibés et plus flamboyants.
Le diagnostic différentiel du trouble de la personnalité histrionique comprend également
le trouble somatoforme et le trouble d'anxiété lié à la maladie .
Référence pour le diagnostic
 1. American Psychiatric Association: Diagnostic and Statistical Manual of Mental
Disorders, 5th ed, Text Revision (DSM-5-TR). Washington, DC, American
Psychiatric Association, 2022, pp. 757-760.
Traitement du trouble de la personnalité histrionique
Les principes généraux du traitement du trouble de la personnalité histrionique
sont les mêmes que ceux de tous les troubles de la personnalité.
On en sait peu sur l'efficacité du traitement cognitivo-comportemental et sur celle
du traitement médicamenteux dans le trouble de la personnalité histrionique.

La psychothérapie psychodynamique, qui met l'accent sur les conflits sous-


jacents, peut être essayée. Le thérapeute peut commencer par encourager les
patients à substituer la parole au comportement, et ainsi, communiquer avec les
autres d'une manière moins spectaculaire. Le thérapeute peut aussi aider les
patients à comprendre que leur comportement histrionique est un moyen inadapté
pour attirer l'attention des autres et gérer leur estime d'eux-mêmes

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