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TITRE 2 : LES REGLES PROCEDURALES

TENDANT A L’OBTENTION D’UN JUGEMENT

La procédure civile a été définie comme étant l’accomplissement d’actes devant permettre
au justiciable d’obtenir du juge civil un jugement. Ces actes sont accomplis depuis la
demande en justice jusqu’au jugement. Ils permettent à l’instance, lien procédural unissant les
parties de se dérouler.
La procédure est soumise dans son organisation et son fonctionnement à des principes
directeurs, assurant la garantie des droits fondamentaux du justiciable (traitement
égalitaire, droits de la défense), et contribuant à définir un office loyal du juge.
Elle se matérialise par un formalisme diversifié et adapté à la nature des litiges (procédure orale
et écrite).
Il convient de présenter d’abord les règles fondamentales du procès civil (chapitre 1), analyser
ensuite l’instance proprement dite (chapitre 2), et enfin l’issue de l’instance : le jugement
(chapitre 3).
CHAPITRE 1 : LES REGLES
FONDAMENTALES DU PROCES CIVIL

Le procès civil respecte des règles fondamentales qui ont pour but de garantir les droits
fondamentaux du justiciable : ces règles sont communément appelées principes directeurs du
procès civil (section 1).
D’autres règles, assure la sécurité des actes de procédure, à travers un formalisme diversifié,
adapté à la nature de la procédure suivie (section 2).

Section 1 : Les principes directeurs du procès civil

L’introduction dans le code procédure civile sénégalais de principes directeurs devant orienter
le procès et l’action du juge est assez récente. En effet après 30 ans d’application du code de
procédure civile et de flou, le législateur sénégalais, a trouvé nécessaire d’instituer, à travers le
décret n° 20011151 du 31 décembre 2001 modifiant le Code de Procédure civile, des règles
qualifiées de principes directeurs du procès, qui rappellent les attributs du procès équitable.

Il s’agit d’exigences essentielles, organisant les relations processuelles entre le juge et les
parties et entre les parties elles-mêmes.

Les droits et les devoirs des acteurs du procès ne sauraient être déterminés sans prendre en
compte, la finalité du procès civil, qui est la résolution d’un conflit d’intérêts privés conforme
aux exigences du procès équitable, et à celle d’une bonne administration de la justice.

Ces exigences ont conduit à l’élaboration de plusieurs principes directeurs du procès.


Dans un souci de cohérence, il sera étudié ici trois principes (les autres seront étudiés dans des
développements ultérieurs) :
- D’abord le principe d’initiative du procès (paragraphe 1), qui est relatif au déroulement
de l’instance ;
- Ensuite le principe dispositif (paragraphe 2), qui concerne la détermination de la matière
du litige ;
- Et enfin le principe du contradictoire (paragraphe 3), qui intéresse les droits de la
défense.

Paragraphe 1 : Le principe d’initiative

Le procès est indissociable de l’accomplissement de l’accomplissement d’un certain nombre de


formalités et d’actes.
Se pose alors la question de savoir, qui d’entre le les parties et le juge, a la maîtrise du
déroulement de l’instance ?
Classiquement, on distingue la procédure pénale de type inquisitorial, puisque le juge conduit
le procès, à la procédure civile de type accusatoire, puisque les parties disposent de la direction
de la procédure.
Si théoriquement cette distinction demeure justifiée, elle a perdu cependant de sa réelle portée
dans la pratique. En effet, il est certes établi que la procédure civile est principalement de type
accusatoire, mais des éléments de type inquisitorial ont été introduits afin de permettre au juge
de veiller au bon déroulement de l’instance.

L’étude des dispositions du CPC issues de la réforme de 20011, démontre que la direction du
procès appartient aux parties (A), bien que le juge dispose d’importants pouvoirs régulateurs
(B), liés à l’objectif d’une bonne administration de la justice.

A) Le pouvoir de direction des parties

Aux termes des dispositions 1.1 du CPC : « les parties introduisent l’instance, sous réserve des
cas où la loi dispose autrement.
Elles conduisent l’instance sous les charges qui leur incombent ; elles doivent notamment
accomplir les actes de procédure dans les délais et formes requis ; elles peuvent mettre fin à
l’instance avant son extinction par l’effet d’un jugement, ou en vertu de la loi »
Trois enseignements peuvent être tirés de ces dispositions :

1
Décret n° 20011151 du 31 décembre 2001 modifiant le Code de Procédure civile
- D’abord, l’initiative d’un procès civil, ou encore l’introduction de l’instance
appartient aux seules parties. Le juge civil, ne peut en principe se saisir d’office pour
trancher un conflit d’intérêt privé. Il ne peut se substituer aux parties, ni pour former
une demande, ni pour introduire une nouvelle instance après annulation du jugement.
- Ensuite, les parties conduisent l’instance. Il leur appartient d’accomplir les actes
de procédure en respectant les dispositions légales relatives aux formes et aux
délais.
Notons que ces charges limitent la liberté des parties pour répondre à des impératifs
d’intérêt général, tel que la bonne administration de la justice et le délai raisonnable du
procès.
- Enfin les parties ont la liberté de mettre fin à l’instance avant que celle-ci ne
s’éteigne par l’effet du jugement ou en vertu de la loi. Ainsi donc les parties peuvent
se désister de l’instance, éteindre le litige et l’instance par voie de conséquence, en
concluant une transaction, ou encore rester inactive pendant plus de deux ans et solliciter
le prononcé de la péremption d’instance2

B) Le pouvoir régulateur du juge

Laisser aux parties une totale maîtrise du déroulement de la procédure entraîne sans nul doute
des inconvénients :
- D’abord, le prononcé d’un jugement dans un délai raisonnable est une exigence
légale. Confier aux parties la maîtrise de l’élément temporel du procès fait courir le
risque d’un ralentissement inévitable du cours du procès, car l’un des litigants a toujours
intérêt à différer une condamnation éventuelle. Le juge doit donc être doté de pouvoirs
régulateurs, afin que les délais soient respectés par toutes les parties et d’une façon
générale par tous les acteurs du procès (experts notamment).
- Ensuite l’accomplissement des actes de procédure doit se faire dans le respect des
droits de la défense et de l’équité, c’est-à-dire de l’égalité des armes ; il convient que
le juge dispose de prérogatives assurant la sécurité et l’égalité dans le déroulement du
procès.

2
Article 240 du CPC issu décret de 2001
Ainsi donc, le juge aura pour mission de veiller au bon déroulement de l’instance3, à cet
effet, il a le pouvoir d’impartir des délais et d’ordonner des mesures nécessaires.
Ces pouvoirs de régulation sont surtout effectifs, dans le cadre de la mise en état de l’affaire.
Dans les procédures devant le TGI ou devant la Cours d’appel, le juge de la mise en état ou le
conseiller de la mise en état, veille au déroulement loyal de la procédure, à la ponctualité
de l’échange des conclusions et de la communication des pièces.
Il fixe au fur et à mesure, les délais nécessaires à l’instruction de l’affaire, il peut accorder des
prorogations de délais ; il peut également fixer un calendrier de la mise en état.

Ces prérogatives du juge de la mise en état sont assorties de sanctions. Ainsi donc, si l’un
des avocats ne respecte pas l’obligation d’accomplir les actes de procédure dans les délais
impartis, il peut ordonner une clôture partielle, il peut aussi radier l’affaire du rôle si tous les
avocats s’abstiennent d’agir.

Paragraphe 2 : Le principe dispositif

Ce principe résulte des dispositions de l’article 1.4 et suivant du code de procédure civile.
Aux termes des dispositions de l’article 1.4 du code de procédure civile sénégalais :
« Les parties fixent l’objet du litige par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en
défense.
Une fois l’instance liée, elles ne peuvent modifier les éléments du débat par l’introduction de
demandes nouvelles, sauf si cellesci se rattachent à la demande initiale par un lien suffisant.
Le juge ne peut ni statuer sur des choses non demandées, ni omettre de statuer sur des choses
demandées, ni adjuger plus qu’il n’a été demandé ».

Il signifie que les parties ont la maîtrise de la matière du procès 4 (A) ; le rôle du juge étant de
statuer étant de statuer sur les questions qui lui sont soumises (B), mais ne saurait participer à
la délimitation de ces questions.

3
DESIRY, « Le rôle du juge dans le déroulement de l’instance civile », D. 1956, chron. 145 ; J. NORMAND, « Le juge
et le litige », 1965
4
MOTULSKY H., « La cause de la demande dans la délimitation de l’office du juge », Ecrits Dalloz 1973, p. 101
Le procès devient ainsi la chose des parties, parce qu’il s’agit de régler un différend d’intérêt
privé, et que la liberté des plaideurs concerne aussi bien le choix de recourir ou non à un juge
étatique et de définir les éléments qui seront soumis à ce juge.

A) La détermination des termes du litige par les parties

Prérogatives des parties. Dans le procès civil, les parties ont exclusivement le pouvoir de fixer
l’objet du litige.
L’objet du litige est déterminé par l’ensemble des prétentions des parties, qui figurent pour le
demandeur, dans l’acte introductif d’instance et pour le défendeur dans ses conclusions.
Le juge est limité dans sa saisine ; il doit donc se prononcer sur tout ce qui lui est demandé, et
ne peut accorder plus que ce qui lui est demandé.
Il ne peut statuer selon la formule latine « ultra petita » et « infra petita ».

Lorsque le juge se prononce sur des prétentions qui ne lui ont pas été demandées, ou s’il a omis
de se prononcer sur l’une des prétentions des parties, sa décision peut être rétractée par voie de
requête (requête civile), conformément aux dispositions de l’article 287 et suivant du code de
procédure civile.

Charges des parties : allégations et preuve des faits, concentration des moyens. Si les
plaideurs ont le pouvoir de fixer l’objet du litige, il leur incombe la charge d’alléguer les faits
propres à fonder leurs prétentions5. C’est ce qui résulte des dispositions 1.5 du code de
procédure civile de la république du Sénégal, qui dispose, sans ambiguïté
que : « les parties apportent à l’appui de leurs prétentions les faits propres à les fonder et pro
uvent conformément à la loi les faits qui sont contestés ».
Il n’appartient donc pas au juge de rechercher d’office la preuve des faits en palliant la carence
des parties.

Il incombe en outre aux parties de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées
sur la même cause, car l’instance lie le juge et ne pourront modifier les éléments du litige par
l’introduction de nouvelles demandes, sauf si celles-ci se rattachent à la demande initiale par
un lien suffisant.

5
Cette exigence procédurale est appelée « concentration des moyens », elle conforte le principe
dispositif en augmentant les charges processuelles des parties et la responsabilité
professionnelle des auxiliaires de justice.

B) Le rôle du juge dans le procès civil : trancher les litiges

L’article 1.6 du code de procédure civile, précise que le juge tranche le litige conformément
aux règles de droit qui lui sont applicables. A cet effet, il doit donner ou restituer aux faits et
actes litigieux leur exacte qualification, sans s’arrêter aux dénominations que les parties lui ont
proposées.
Exemple : En matière contractuelle, si les parties agissent sur le fondement de la garantie des
vices cachés, le juge doit vérifier si les conditions d’application de l’article 296 et suivant6 du
COCC sont remplies, sans être lié par la qualification de « défaut caché », invoqué par les
parties. S’il estime que le défaut est apparent, ou n’est pas suffisamment grave pour rendre la
chose impropre à son usage normal ou pour en diminuer l'utilité, il disqualifie le vice et déboute
le demandeur.

Notons qu’en aucun cas, le juge ne peut statuer en équité, sauf dans les hypothèses prévues par
les textes : c’est le cas lorsqu’il décide d’octroyer des frais irrépétibles à l’un des plaideurs, qui
a supporté injustement les frais du procès.

Dans son rôle de trancher les litiges, le juge peut relever d’office les moyens de pur droit, quel
que soit le fondement juridique invoqué par les parties, après avoir provoqué les explications
de celle-ci.

6
Article 296 du COCC « Sont exclus de la garantie, les vices apparents dont un acheteur diligent aurait pu se
convaincre jusqu'au moment de la délivrance, en procédant à un examen attentif de la chose.
Il est tenu compte à cet égard de la qualité et des connaissances techniques de chacune des parties
contractantes. »
ARTICLE 297 Gravité des vices
« Le vice doit être d'une suffisante gravité pour rendre la chose impropre à son usage normal ou pour en diminuer
l'utilité à tel point qu'elle n'aurait pas été acquise au prix convenu »
Paragraphe 3 : Le principe du contradictoire

Le principe du contradictoire signifie que les parties au procès doivent être placées dans une
situation qui ne désavantage aucune d’entre elles.
Cette égalité entraîne une possibilité de prendre connaissance de tous les documents et pièces
du procès et la faculté de discuter de ces éléments.

Le respect de la contradiction est considéré comme l’un des éléments de l’équité ; il est donc
un principe essentiel du procès.
La contradiction doit être distinguée des droits de la défense même si elle s’inscrit dans le cadre
plus large du respect de droits de la défense.
En effet, les droits de la défense visent :
- le droit, pour le défendeur d’être informé de l’introduction de l’instance, pour être à
mesure de comparaître ;
- l’obligation pour le juge d’observer une stricte neutralité et de motiver ses jugements ;
- la possibilité d’exercer un contrôle sur les décisions de justice par le biais des voies de
recours
Le principe du contradictoire conduit quant à lui à placer les parties dans une situation
processuelle telle qu’elles ont la possibilité de prendre connaissance de tous les éléments
présentés par l’adversaire et de les discuter.
Le respect de la contradiction concerne aussi bien les parties (A) que le juge (B).

A) Le respect du contradictoire par les parties

Cette règle postule, d'une manière générale, un déroulement loyal de la procédure entre les
parties.
Les principales illustrations en sont les suivantes :
- il est tout d'abord nécessaire d'informer l'adversaire de l'existence de la procédure menée
contre lui. Le principe du contradictoire pose la nécessité d'être entendu ou au moins
appelé.
- Il convient ensuite de respecter les délais d’ajournements7 ; délais qui doivent
impérativement séparer le moment où l’assignation est délivrée (servie) au défendeur et
celui où l’audience doit se tenir. L’observation de ces délais est dictée par des
considérations liées au respect des droits de la défense, car ils permettent au défendeur
de préparer sa défense en attendant de comparaitre devant le juge.
- Si les parties ont la liberté de porter à la connaissance du juge tous les points de fait et
de droit qu'elles estiment utiles, les éléments ainsi invoqués sont soumis à discussion
contradictoire : le CPC leur impose l'obligation de communiquer et signifier leurs
conclusions, pièces, moyens et preuves en temps utile.
- Par ailleurs, quand la loi autorise une procédure unilatérale ou que les circonstances ne
permettent pas d'instaurer « ab initio » le contradictoire (ex. : ordonnances sur requête,
procédure par défaut), son respect est néanmoins garanti a posteriori par l'existence
d'une possibilité de recours contre les décisions faisant grief rendues au cours
d'instances non contradictoires. (recours en opposition ou rétractation).

B) Le respect du contradictoire par le juge

Le juge doit tout d'abord faire respecter le principe du contradictoire par les parties8. Il dispose
pour ce faire d'un pouvoir d'injonction et de sanction : fixation de délais, d'astreintes, pouvoir
d'écarter les pièces communiquées tardivement.

7
Ces délais varient suivant que le défendeur est domicilié au Sénégal ou à l’étranger. Pour les défendeurs
domiciliés au Sénégal, le délai d’assignation est :
- de cinq jours pour ceux qui sont domiciliés dans le lieu où siège le tribunal compétent ;
- de dix jours pour ceux qui sont domiciliés dans le ressort de ce tribunal ;
- de quinze jours pour ceux qui sont domiciliés dans les ressorts limitrophes ;
- de trente jours pour ceux qui sont domiciliés dans les autres parties de la République.

Si le défendeur demeure hors du territoire de la République le délai est de :


- deux mois pour ceux qui demeurent en Europe, en Afrique, à Madagascar et à la Réunion ;
- de trois mois pour ceux qui demeurent en Amérique ;
- de quatre mois pour ceux qui demeurent dans tous les autres pays.

Les délais prévus seront doublés en cas de guerre.


8
Même en cas d'urgence et dans le cadre d'une procédure orale : Dijon, 29/1/04, Proc 05 n° 249
Il doit aussi respecter lui-même ce principe. Le juge ne peut ainsi retenir dans sa décision des
éléments dont les parties n'auraient pas discuté contradictoirement9.
Il doit inviter les parties à présenter leurs observations lorsqu'il soulève un moyen, même de
droit ou d'ordre public10. Il en va de même lorsqu'il procède à une requalification.

Section 2 : Le formalisme de l’instance


Le procès civil ne peut se dérouler qu’au moyen d’actes de procédure, soumis à des conditions
de forme globalement strictes et contraignantes11.
Le formalisme procédural est en effet une garantie de sécurité juridique ; car il permet d’assurer
une réelle information des parties, et rend effectif l’exercice des droits de la défense.
Tous ces arguments justifient que les actes de procédures ne sauraient être laissés à la volonté
des parties.
Le formalisme de l’instance englobe aussi bien les actes (paragraphe 1), que les délais
(paragraphe 2) de procédure.

Paragraphe 1 : Les actes de procédure

Même si la procédure civile sénégalaise, n’ignore pas le principe de l’oralité, elle n’en réserve
pas moins une place de choix aux écrits, qui ont l’avantage d’assurer une preuve précise des
actes effectués par les plaideurs, de leur contenu et de la date exacte à laquelle ils ont été
accomplis.
Des règles minutieuses concernent leur rédaction et leur notification (A) et régissent les
sanctions de leur inobservation (B).

A) Le formalisme des actes de procédure

Les actes de procédure sont rédigés par écrit dans le cadre des procédures de droit commun, par
les magistrats (jugements, ordonnances) et les auxiliaires de justice tels que :

9
Civ. II, 11/1/06, D 06 1149 : viole l'article 16 CPC le juge qui statue sans avoir invité les parties à s'expliquer sur
l'absence au dossier des pièces qui figuraient au bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions et dont
la communication n'avait pas été contestée.
10
Mixte 10/7/81, D 81 637 CABANNES; GP 81 627 VIATTE
11
Ces actes devant en outre le plus souvent être effectués dans un délai déterminé ; ou encore faisant courir eux
même un nouveau délai, durant lequel devra être accompli l’acte de procédure suivant
- les avocats (requêtes, conclusions, sommation…) ;
- les huissiers de justice (qui rédigent des exploits tels que : les assignations, les actes
d'appel, les sommations, les constats, les procès-verbaux ;
- les greffiers, qui authentifient les jugements et reçoivent certains actes.

Malgré leur diversité, la plupart des actes de procédure requièrent l’intervention d’un huissier
de justice ; soit que ce dernier porte à la connaissance de leurs destinataires, par voie de
signification, les actes de procédures rédigés par d’autres (magistrats, greffiers, avocats), soit
qu’il rédige lui-même l’acte de procédure et le signifie éventuellement ensuite.
L’objet de ce sous-titre est donc d’étudier le formalisme des actes d’huissier, en mettant l’accent
sur leurs mentions (1) d’une part, avant d’envisager leur notification (2).

1) Les mentions des actes d’huissier

La rédaction des actes d’huissier est régie à la 3ème partie du code de procédure civile.
Indépendamment des mentions spécifiques, propres à chaque type d’acte déterminé
(notamment les actes introductifs d’instance), tous les exploits d’huissier de justice doivent
contenir impérativement, les mentions prévues à l’article 821 du code de procédure civile.

La première mention concerne la date avec les jours, mois et an. Cette indication est d’une
importance particulière, notamment lorsqu’il s’agit d’un acte de procédure, qui le plus souvent
doit être accompli dans un certain délai, ou qui fait lui-même courir un délai durant lequel devra
être effectué un acte postérieur.
C’est dire qu’il est indispensable de savoir exactement, à quelle date l’acte a été effectué.

La seconde série de mentions concerne l’identification du requérant :


- si le requérant est une personne physique, l’exploit indique ses nom, prénoms ;
profession et domicile, et s’i y a lieu l’élection de domicile ;
- si en revanche le requérant est une personne morale, l’exploit indique sa dénomination ;
son siège social, et l’organe qui la représente légalement.

La troisième série de mentions concerne le nom, les prénoms, demeure de l’huissier et signature
de l’huissier.
La quatrième série de mention concerne le nom, les prénoms et demeure du requis (s’il s’agit
d’une personne morale, sa dénomination et son siège social), si l’acte doit être signifié.

Enfin la cinquième série de mention concerne l’objet de l’acte.

2) La notification des actes de procédure

Les actes de procédure, qu’ils émanent des parties elles-mêmes ou de leurs conseils, ou des
magistrats, doivent être portés à la connaissance des intéressés : on dit qu’ils leurs sont notifiés.
Cette notification permet un exercice effectif des droits de la défense : puisqu’elle informe
exactement l’adversaire du contenu de l’acte, et qu’elle constitue généralement le point de
départ d’un délai accordé pour répondre et accomplir les actes suivants.
La notification revêt plusieurs formes qu’il convient d’analyser.

a) La signification

Lorsque la notification de l’acte de procédure est faîte par acte d’huissier de justice, elle porte
alors le nom de signification.
En principe, aucune signification, exécution ou constat ne peut être fait avant six heures du
matin et après sept heures du soir, mais aussi les jours de fête légale, si ce n’est en vertu de la
permission du juge dans le cas où il y aurait péril en la demeure12.
L’article 822 et suivant du code de procédure civile envisage plusieurs modalités de
significations :
- La signification peut être faîte à personne : C’est le cas lorsque l’huissier remet en mains
propres l’acte de procédure à son destinataire. La signification à personne peut se faire
en tout lieu, même sur le lieu de travail.
- La signification peut se faire à domicile ou à résidence : dans ce cas l’acte de procédure
peut être remise à la personne, parent, allié ou serviteur, trouvée au domicile ou à la
résidence du destinataire, par l’huissier à charge par lui d’indiquer la qualité déclarée;
s’il ne trouve aucune de ces personnes il remet la copie à un voisin dont il indique le
nom et l’adresse.

1212
Article 831 du CPC
- La signification peut se faire au maire, ou au chef d’arrondissement : si la personne
interpellée lors de la signification à domicile ou à résidence, refuse de recevoir l’acte ou
ne peut présenter sa carte d’identité, l’huissier remet sans délai la copie au maire ou à
un adjoint ou encore, à défaut de ceux-ci, au chef d’arrondissement.

b) La notification ordinaire

Elle se fait en principe par lettre recommandée avec accusé de réception. La notification est
réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire ; elle est réputée
faite à domicile quand l'avis est signé par une personne munie d'un pouvoir à cet effet.

B) Les sanctions de l’inobservation du formalisme des actes de procédure

Le non-respect du formalisme des actes des actes de procédure est susceptible d’entraîner
l’application de plusieurs sanctions cumulatives.
Ce non-respect peut tout d'abord se traduire par des sanctions disciplinaires et une
condamnation à des dommages-intérêts à l’encontre des auxiliaires de justice ayants effectué
pour leurs clients des actes de procédure nuls ou inutiles, frustratoires13.

Cependant la sanction la plus importante concerne l’acte lui-même, qui peut être annulé par le
juge.
Il existe deux formes de nullité dont les régimes sont distincts : la nullité pour vice de forme (1)
et la nullité pour irrégularité de fond (2).

1) La nullité pour vice de forme des actes de procédure

Le régime de la nullité des actes de procédure est prévu par l’article 826 du CPC. Il est strict
et obéit aux règles suivantes :

13
Article 825 à propos des nullités des exploits du fait de l’huissier de justice : « Si un exploit est déclaré nul par
le fait de l’huissier, celui-ci est condamné aux frais de l’exploit et de la procédure annulée, sans préjudice de tous
autres dommages et intérêts de la partie, s’il y a lieu.
- D’abord, il n’y a pas de nullité sans texte, c’est ce que prescrit l’alinéa 1 de l’article
susvisé. En d’autres termes, aucun exploit ou acte de procédure ne peut être déclaré nul
si la nullité n’en est formellement prévue par la loi.

- Ensuite, il n’y a pas de nullité sans grief, ce qui signifie qu’aucune nullité ne peut être
prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause
l’irrégularité. Le prononcé de la nullité d’un acte de procédure est ainsi –aux termes de
l’alinéa 2 de l’article 826 du CPC -, subordonné à la preuve apportée par le demandeur
à la nullité, que le vice de forme qui affecte l’acte a entravé ses droits de la défense14. Il
n’appartient donc pas au juge de relever d’office le grief causé au demandeur à la nullité,
alors que ce dernier n’invoque aucun préjudice.

- Enfin, nonobstant les règles ci-dessus invoquées, la nullité d’un acte de procédure
pourra être prononcée si une formalité substantielle a été omise. Le caractère substantiel
est attaché dans un acte de procédure à ce qui tient à sa raison d’être et lui est
indispensable pour remplir son objet. Ainsi par exemple, la mention de la date dans un
acte procédure, et notamment un acte d’huissier de justice, correspond à une formalité
substantielle. L’objet d’une assignation est une mention substantielle aussi. Leur défaut
dans l’acte introductif d’instance est sanctionné par la nullité.

L'invocation de la nullité doit respecter le formalisme et le régime des exceptions de procédure.


Les irrégularités doivent donc être soulevées au fur et à mesure de l'accomplissement des actes
: la nullité est couverte si une défense au fond ou une fin de non-recevoir a été invoquée
auparavant.
Les irrégularités doivent encore être invoquées simultanément, ou conjointement s'il y en a
plusieurs.
Une régularisation est possible avant forclusion s'il ne subsiste aucun grief15.

14
Cass. 2ème civ., 10 mars 2014 N° 13-15676
15
Exemple : omission de signature d'un rapport d'expertise : D 95 71
2) La nullité pour irrégularité de fond des actes de procédure

L'irrégularité ici n'affecte pas l'instrumentum mais la manifestation de volonté.


Sont concernés :
- le défaut de capacité d'ester en justice ;

- le défaut de pouvoir d'une personne figurant au procès comme représentant d'une


personne morale ou d'une personne atteinte d'une incapacité d'exercice ;

- et le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une


partie en justice (ex. : absence de mandat de représentation ad litem).

Le régime des nullités pour irrégularité de fond est nettement plus souple que celui des nullités
pour vice de forme :

- les nullités pour irrégularité de fond peuvent être invoquées sans texte et sans grief ;

- elles peuvent en outre être soulevées en tout état de cause, sous réserve de dommages-
intérêts éventuels en cas d'invocation tardive à des fins dilatoires ;

- elles doivent être relevées d'office si elles ont un caractère d'ordre public et le juge a par
ailleurs la faculté de relever d'office la nullité pour défaut de capacité d'ester en justice ;

- Enfin, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue
lorsque la régularisation est possible.

Paragraphe 2 : Les délais de procédure

En procédure, le délai est le temps que la loi donne à une personne pour comparaitre devant le
tribunal où elle est appelée, relever ou non appel d’un jugement, et accomplir en conséquence
l’acte de procédure adéquat.
L’utilité des délais est indiscutable, car il faut laisser aux plaideurs le temps de la réflexion et
du choix (par exemple, le délai d’action).

La détermination des délais doit être placée dans le contexte du procès équitable, mais aussi
dans la protection des droits de la défense.

Il existe plusieurs sortes de délais :


- les délais légaux ;
- et les délais judiciaires (exemple : les délais en matière de mise en état).
- Certains sont des délais de forclusion, destinés à combattre l'inertie des parties, d'autres
sont des délais d'attente pour permettre au plaideur de s'organiser (ex. : délai de
comparution).

Deux questions seront examinées : la computation (calcul) des délais (A) et la sanction de leur
non-respect (B).

A) La computation des délais de procédure

Le régime de la computation des délais de procédure est prévu à l’article 827 du code de
procédure civile.
Aux termes des dispositions de cet article : « tous les délais de procédure prévus par le présent
Code sont francs… »
Ce qui signifie qu’en ce qui concerne le point de départ du délai, le jour de la notification ou de
la remise de l’acte n’est point compté dans le délai fixé.
Quant au jour d’échéance du délai, il n’est point aussi pris en compte.
De plus, lorsque le dernier jour d’un délai quelconque de procédure est un jour férié ou un
samedi, ce délai est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable qui suit le jour férié ou le samedi.

Notons que certains délais de procédure peuvent être augmentés conformément aux dispositions
des articles 40 et 41 du CPC (délais d’ajournement).
B) La sanction du non-respect des délais de procédure

L’inobservation de la plupart des délais de procédure est sanctionnée par la déchéance ou


forclusion. Ce qui entraîne l’irrecevabilité de l’acte accompli sans délai. Il en est ainsi en
particulier des délais d’exercice des voies de recours.
La déchéance est dangereuse, car contrairement à la prescription, lorsqu’elle est encourue, le
droit lui-même est perdu, car l’acte qui devait être accompli (exemple : déclaration d’appel)
dans un certain délai, cesse de pouvoir l’être utilement, le délai étant expiré.
De plus les fins de non-recevoir résultant de l’inobservation des délais dans lesquels doivent
être exercées les voies de recours, sont relevés d’office par le juge.

Dans certains cas, le législateur (article 14 du CPC) permet au juge d’exonérer de la


forclusion, le plaideur qui l’a encouru en ordonnant un relevé de forclusion.
C’est le cas lorsqu’un jugement a été rendu par défaut. Le juge peut relever le défendeur de la
forclusion résultant de l’expiration du délai d’opposition, si sans qu’il y ait faute de sa part, il
n’a pas eu connaissance de la décision en temps utile pour exercer son recours, ou s’il s’est
trouvé dans l’impossibilité d’agir.

Notons que tous les délais de procédure ne sont pas prescrits à peine de forclusion. Parfois le
non-respect d’un délai de procédure est sanctionné par la péremption de l’instance (lorsque
conformément aux dispositions de l’article 240 du CPC, il y a inertie de la part des plaideurs
pendant trois ans). Le non-respect des délais du calendrier de la mise en état, peut être
sanctionné par la radiation de l’affaire du rôle, ou de la clôture partielle.
CHAPITRE 2 : L’INSTANCE

L’instance peut être définie comme un lien de droit d’origine légale qui unit le demandeur et le
défendeur et qui crée des droits et des obligations de nature processuelle, s’ajoutant au rapport
juridique préexistant entre les parties.

Le lien juridique d’instance, oblige également le juge de statuer à peine de déni de justice et
d’exercer les pouvoirs qui lui sont reconnus par le CPC pour mener l’instance à son issue, dans
les délais raisonnables.

Le lien d’instance a un caractère très formel (les actes de procédure sont soumis à des exigences
très nombreuses) et évolutif, puisqu’il comprend une succession, d’actes qui vont de la demande
au jugement.

Le régime juridique de l’instance est caractérisé par des règles générales qui s’appliquent à
toutes les procédures (section 1), seront évoquées ensuite les règles particulières aux diverses
procédures (section 2)

Section 1 : Les dispositions communes à toutes les instances

Elles sont relatives aux parties à l’instance (paragraphe 1), à l’objet de l’instance (paragraphe
2), à la saisine de la juridiction (3), et aux débats (paragraphe 4)

Paragraphe 1 : Les parties à l’instance

La procédure contentieuse requiert au moins deux parties ou plus qui s’affrontent.


Mais elles ne le font pas souvent directement car elles agissent généralement par représentation.

Il convient donc d’identifier les parties (A) à l’instance car la loi leur reconnaît un certain
nombre de prérogatives et d’obligations, avant d’évoquer les règles de la représentation à
l’instance (B).
A) L’identité des parties à l’instance

Il convient de distinguer la qualité de partie (1) à l’instance de celle des tiers (2) qui peuvent
toutefois devenir partie en cours d’instance.

1) La qualité de partie

Sont parties à l’instance, les personnes qui ont pris l’initiative de saisir le juge en formulant une
demande, mais aussi celle contre qui l’action en justice est dirigée.

Généralement, les parties sont au nombre de deux il s’agit du demandeur et du défendeur.


Ces parties sont souvent des sujets de droit qui réclament la sanction d’un droit subjectif. Mais,
il arrive que l’une des parties soit le Ministère Public à qui la loi confie l’exercice ou la défense
en justice dans certaines matières, exemple : en matière d’état civil des personnes.

Il peut arriver que l’instance ne concerne exceptionnellement qu’une seule partie, il s’agit des
procédures gracieuses où la demande n’est pas dirigée contre une personne, mais consiste à
solliciter du juge qu’il se prononce sur le bien-fondé d’un droit subjectif.

A l’inverse, une instance peut mettre en cause plus de deux parties.


En pareille hypothèse, on parle de litisconsortium et les parties prennent l’appellation de
litisconsorts.
Notons que la participation de plusieurs parties à une même instance n’a pas d’incidence sur la
situation de celle-ci. En effet, chacune exerce elle-même et pour elle seule son action et se
défend contre celle qui l’a attaqué. Cette règle est écartée toutefois si entre litisconsorts, il existe
un lien de solidarité et de l’indivision.

2) La qualité de tiers

Par opposition aux parties, les tiers sont tous ceux qui ne sont pas concernés par l’instance : soit
qu’ils n’ont pas formé la demande en justice ; soit que celle-ci n’est pas dirigée contre eux.

Mais cette distinction partie tiers n’est pas absolue :


- D’abord, certains tiers voient leur situation affectée par l’issue d’une instance : il s’agit
des héritiers ou des ayant causes universels d’une partie décédé. En effet, en
continuation de la personne du de cujus, la décision rendue envers ce dernier aura
autorité de la chose jugée envers ces héritiers.

- Ensuite, les créanciers chirographaires et les ayant causes particuliers se voient ouvrir,
pour la défense de leurs intérêts, une voie de recours alors qu’ils n’ont pas été partie à
l’instance : il s’agit de la tierce opposition.

- Enfin, il existe des tiers qui vont devenir partie à l’instance : c’est le cas d’abord des
héritiers d’une partie décédé en cours d’instance. Ensuite, et plus spécialement encore,
il existe des tiers qui vont intervenir directement à l’instance soit volontairement, soit
de manière forcée.

L’intervention volontaire peut être principale ou accessoire. Il y a intervention volontaire


principale lorsqu’un tiers se mêle volontairement à une instance déjà née pour élever une
prétention contre l’une ou l’autre des parties. L’intervention volontaire est accessoire si le
tiers au lieu d’élever une prétention, soutient celle formulée par l’une des parties.

Quant à l’intervention forcée, elle suppose qu’un tiers soit appelée à l’instance par l’une des
parties. On distingue 3 formes d’interventions forcées d’abord :
- la mise en cause qui a pour objet de constater une situation qui est nécessaire à l’issue
du litige qui oppose les parties ;

- ensuite la demande en déclaration en jugement en commun qui consiste à rendre


opposable à un tiers le jugement à intervenir et l’empêcher d’utiliser la voie de recours
extraordinaire qui constitue la tierce opposition,

- et enfin l’appel en garantie qui suppose la condamnation du tiers en lieu et place de la


partie appelante en garantie.

L’intervention fait donc du tiers une partie à l’instance, toutefois il faut nuancer les propos car
l’intervenant ne dispose pas toujours de toutes les prérogatives reconnues aux parties.
Par exemple : l’intervenant volontaire accessoire ne dispose pas du droit d’exercer des voies de
recours et ne peut pas être condamné aux dépends.
B) La représentation des parties à l’instance

En principe, la représentation en justice appelée ad litem n’est pas obligatoire. En effet,


dans certaines matières, les parties peuvent présenter directement leur prétention au juge.

Ensuite, nonobstant le fait que la représentation se fait souvent par le biais d’un ministère
d’avocat, ce dernier n’est pas le seul qui peut être habilité par mandat ad litem.
En effet, si en vertu de l’article 4 de la loi n°2009 -25 du 8 juillet 2009 qui a abrogé certaines
dispositions de la loi du 4 janvier 1984 portant ordre des avocats, seuls les avocats ont qualité
pour plaider, postuler, assister et représenter les parties en toute matière devant les juridictions,
plusieurs exceptions sont ainsi consacrées par la loi n°87 – 30 du 28 décembre 1987.

C’est ainsi qu’aux termes de l’article 5, le ministère d’avocat n’est pas obligatoire devant le
tribunal d’instance mais il faut être muni d’un pouvoir écrit spécial et être agrée par le juge.

La même solution est appliquée devant les tribunaux du travail où les parties peuvent se faire
représenter soit par un travailleur appartenant à la même branche d’activité, soit par un
représentant syndical. Mais le représentant en matière de droit du travail doit être agrée par le
président du tribunal du travail.

Toutefois, la représentation ad litem par ministère d’avocat est rendue obligatoire par la loi dans
certains cas.

Il en est ainsi en cas de :


- procédure de désaveu,
- de même la procédure devant la Cour Suprême requiert l’intervention d’un avocat
sauf : en matière de litige individuel de travail, en matière électorale et en matière de
recours pour excès de pouvoir ;
- Enfin, le ministère d’avocat est aussi obligatoire pour les personnes morales de droit
privé sauf : pour les sociétés nationales ou d’économie mixte.
En ce qui concerne les pouvoirs reconnus au mandataire ils dépendent des termes du mandat.
Paragraphe 2 : L’objet de l’instance

C’est le litige tel qu’il est porté à la connaissance du juge : il s’agit des demandes (A) et des
moyens de défense formulés par les parties (B).

A) Les demandes en justice

Toute action en justice suppose une demande initiale (1) à laquelle peut venir se greffer une
demande incidente (2).

1) La demande initiale

La demande initiale ou demande introductive d’instance est celle qui entraîne la naissance de
l’instance en déclenchant le procès. C’est l’acte par lequel un plaideur, exerçant l’action en
justice, prend l’initiative du procès en saisissant une juridiction et en lui soumettant ses
prétentions.
La demande introductive d’instance peut prendre diverses formes en fonction de la juridiction
saisie (requête écrite signée du demandeur ou de son mandataire, comparution du demandeur
accompagnée d’une déclaration dont le procès-verbal est dressé par le juge, assignation notifiée
conformément aux articles 821 et suivants).

L’effet essentiel de la demande est de donner naissance au lien juridique d’instance, c’est-à-
dire un état de droit nouveau, de nature purement procédurale, qui dérive de l’exercice de
l’action et qui vient s’ajouter au rapport de droit originaire, préexistant entre les parties.
C’est ce lien d’instance, postérieur au lien de droit fondamental, qui fait obligation aux parties
de diligenter, la procédure sous les charges qui leur incombent et dans les délais prescrits et
d’assumer le paiement des frais de justice.

Notons que la naissance de l’instance, doit être distinguée de la juridiction, même si on


considère généralement que l’instance ne naît qu’à compter de l’enrôlement de l’affaire

Outre la naissance, la demande en justice interrompt le délai de prescription, c’est-à-dire qu’elle


efface le délai de prescription acquis, et fait courir un délai de même durée que l’ancien. Cette
interruption produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance, c’est-à-dire jusqu’à ce que le
litige trouve sa solution définitive.

Enfin, la demande initiale vaut aussi mise en demeure pour l’adversaire de sorte que les intérêts
moratoires commencent à courir dès la notification de la demande.

2) Les demandes incidentes

En règle générale, le litige est fixé dans ses éléments constitutifs par la demande introductive
d’instance et les conclusions ultérieures, qui déterminent la matière à juger.
Mais il arrive très souvent que l’étendue du lien d’instance se trouve plus ou moins largement
modifié en cours de procès. Il en est ainsi en cas de demande additionnelle et de demande
reconventionnelle.
Toutes ces demandes ont en commun d’être formées à l’occasion d’une instance, introduite par
une demande initiale.
Le lien avec la demande initiale est important, puisque les demandes incidentes, les demandes
incidentes ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien
suffisant.

En droit procédural, les demandes incidentes sont au nombre de deux :

- D’abord la demande reconventionnelle : c’est la demande qui est formée par le


défendeur qui entend obtenir un avantage, autre que le simple rejet de la prétention de
son adversaire, en émettant une prétention contre le demandeur. Le juge a ainsi une vue
d’ensemble des contestations qui opposent les deux parties ; et le défendeur initial qui
obtient la condamnation du demandeur, peut s’il est lui aussi condamné, solliciter la
compensation entre les deux dettes. Les demandes reconventionnelles sont admises en
1ère instance, comme en appel.

- Ensuite, la demande additionnelle est formée par toute partie (demandeur initial,
reconventionnel, ou tiers intervenant), qui modifie ses prétentions antérieures, en les
augmentant ou en les diminuant.

Le régime procédural des demandes incidentes est prévu à l’article 193 et suivant du CPC.
C’est ainsi qu’entre parties ayant toutes constitué avocat, les demandes incidentes sont formées
par simple acte contenant les moyens et conclusions, avec offre de communiquer les pièces
justificatives.
Le défendeur à l’incident donne sa réponse par conclusions.
Entre parties dont l’une d’elles ou aucune d’elles n’a constitué avocat, les demandes incidentes
sont formées par acte extrajudiciaire notifié au plus tard huit jours avant l’audience sans
augmentation de délai à raison des distances.
Précisons que toutes les demandes incidentes sont formées en même temps; et qu’elles sont
jugées par préalable s’il y a lieu.

B) Les moyens de défense des parties au procès

Le CPC retient trois moyens de défense ; il s’agit :


- des défenses au fond ;
- des exceptions de procédure ;
- et des fins de non-recevoir ;

1) Les défenses au fond

Elles peuvent être définies comme le moyen soulevé par le défendeur, tendant à faire rejeter par
le juge la prétention formulée par le demandeur, pour des raisons tenant au fond du droit.
Il s’agit donc d’une contestation tendant à prouver que le droit n’existe pas ou
n’a pas l’étendue invoquée par le demandeur.

Sur le plan procédural et compte tenu de son importance, la défense au fond peut être soulevée
à tout moment, donc en tout état de cause, et ceci même devant les juridictions de recours. Mais
cette règle a une limite qui consiste en l’impossibilité d’invoquer pour la première fois un
moyen de pur fait ou mélangé à un moyen de droit devant la Cour Suprême car cette dernière
est seulement juge de droit.

2) Les exceptions de procédure

L’exception de procédure est constituée par tout moyen qui tend :


- soit à déclarer la procédure éteinte ou irrégulière,
- soit à la déclarer suspendue.

L’exception de procédure porte donc, non pas sur le droit invoqué mais, sur la procédure mise
en œuvre. Elle a pour effet généralement donc, d’arrêter la procédure ou de la suspendre mais
elle n’empêche pas le demandeur de reprendre la procédure ou de la continuer.

Les exceptions de procédure sont nombreuses, on en cite parmi tant d’autres :


- l’exception d’incompétence,
- l’exception litispendance,
- l’exception de connexité ;
- l’exception de nullité des actes de procédure,
- l’exception de garantie…

En termes de procédure, l’exception de procédure doit être soulevée en in limine litis (au tout
début du procès). Ainsi, sur le plan chronologique, l’exception de procédure doit être invoquée
avant un moyen de défense ou une fin de non-recevoir. L’invocation de ces derniers empêche
de la soulever ensuite.

Toutefois, cette règle est assouplie dans certains cas, il en est ainsi de :
- l’exception d’incompétence matérielle et l’exception de communication de pièces qui
peuvent être soulevées en tout état de cause et même après conclusion au fond,
- l’exception de nullité d’un acte de procédure pour vice de forme peut être soulevée
au fur et à mesure de leur accomplissement.

Notons que l’obligation de soulever l’exception de procédure in limine litis ne concerne que les
actes réalisés au début de l’instance mais que pour ceux qui sont réalisés ultérieurement, cette
règle ne saurait jouer mais, dès leur réalisation, il faut en soulever les nullités qui les affectent.

Il faut souligner également que le code de procédure civile organise une


chronologie dans l’invocation des exceptions de procédure dans le but de faire échec aux
manœuvres dilatoires d’un défendeur qui multiplie les incidents pour retarder la décision du
juge. Ainsi, l’exception de caution doit être soulevée en premier, ensuite l’exception
d’incompétence territoriale en enfin toutes les autres exceptions doivent être invoquées en
même temps sous peine d’irrecevabilité.

3) Les fins de non-recevoir

La fin de non-recevoir est un moyen de défense dirimant (prohibitif, contraignant) qui empêche
même le juge de se prononcer sur le fond de l’affaire et ce, normalement, de manière définitive.
En effet, celui qui oppose une fin de non-recevoir conteste le droit d’agir de son adversaire (au
même titre que celui qui introduit une défense au fond et contrairement à celui qui introduit une
exception de procédure. Cette précision est utile pour faire la distinction entre les différents
moyens de défense).

Constitue donc une fin de non-recevoir, le moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire
irrecevable en sa demande, sans examen au fond pour défaut de droit d’agir.

Elle tend à démontrer que l’action n’existe pas pour :


- défaut d’intérêt à agir,
- de qualité à agir,
Ou parce qu’elle est éteinte par :
- l’autorité de la chose jugée ou
- la prescription ou encore
Ou parce qu’elle impossible par :
- l’effet de l’insertion dans un contrat d’une clause de conciliation, médiation préalable
- l’effet d’une clause compromissoire

Les fins de non-recevoir peuvent être soulevées en tout état de cause et le juge est obligé de les
soulever d’office si elles sont d’ordre public (article 129 ter, in fine).
Mais cette règle ne concerne pas les fins de non-recevoir fondées sur l’expiration d’un délai qui
doivent être invoquées in limine litis et donc en même temps que les exceptions de procédure.

Le fait que la fin de non-recevoir puisse être soulevée en tout état de cause
ne permet pas au défendeur de retarder son invocation. Autrement, le juge peut le condamner à
des dommages et intérêts pour s’être abstenu, dans une intention dilatoire, de la soulever plus
tôt (article 129 ter, 2ème phrase).
Il faut enfin remarquer, que les fins de non-recevoir peuvent être couvertes par une
régularisation mais celle-ci ne joue que pour les irrecevabilités qui peuvent être couvertes ce
qui n’est pas le cas de l’expiration du délai de procédure qui une fin de non-recevoir
procédurale.

Paragraphe 3 : La saisine de la juridiction


La demande en justice intéresse d’abord les parties, car le demandeur cite son adversaire à
comparaître devant le juge en lui signifiant un acte introductif d’instance.
Pour que le juge soit acteur de l’instance, il doit être saisi. Dans une optique de simplification
des procédures, certaines formes d’introduction de la demande en justice se confondent avec la
saisine du tribunal ; il en est ainsi de la présentation volontaire devant le juge et de la déclaration
devant le greffe de la juridiction compétente.
Mais le plus souvent, il revient au plaideur le plus diligent de saisir le juge par l’enrôlement de
l’affaire (A). Mais le procès ne peut avoir lieu sans consignation (B) d’une somme suffisante
pour garantir le paiement des droits de timbre et d’enregistrement.

A) L’enrôlement de l’affaire

Aux termes des dispositions de l’article 54 du Code de procédure civile, le tribunal est saisi, à
la diligence de l’une ou de l’autre partie, par la remise au secrétariat du greffe au plus tard
l’avant-veille de l’audience de l’original de l’assignation ou d’une copie de la requête.

L’accomplissement de ces formalités permet d’enrôler l’affaire.


L’enrôlement consiste à faire inscrire l’affaire au registre tenu au greffe du tribunal saisi, appelé
rôle général. Il s’agit d’un registre tenu au greffe sur lequel sont inscrites, dans leur ordre de
présentation, toutes les affaires portées devant le Tribunal C’est au demandeur de prendre
l’initiative de l’enrôlement au plus tard l’avant-veille de l’audience, en remettant l’original de
l’assignation au greffier.
B) La consignation

L’article 56 du CPC énonce que sauf dans les cas d’assistance judiciaire, le demandeur est tenu
lors de l’enrôlement de son acte introductif d’instance de consigner au greffe de la juridiction
qu’il entend saisir une somme suffisante pour garantir le paiement des droits de timbre et
d’enregistrement au droit fixe.
Le barème des provisions est fixé par un arrêté interministériel du 14 septembre 199316 (Arrêté
n° 008766/MJ/ACS DU 149-1993 fixant le barème des provisions).

A défaut de paiement de la provision, la demande est irrecevable et la décision d’irrecevabilité


est considérée comme une mesure d’administration judiciaire qui ne peut faire l’objet d’aucune
voie de recours.
Mais, il faut préciser que lorsque le litige porte sur une matière régie par le code de la famille,
la procédure est gratuite (article 28 du Code de procédure civile). Cette gratuité ne concerne
que les droits d’enregistrement et de timbre, à l’exclusion des droits de délivrance qui sont dus.

16
Article 1er.- Le montant de la provision à verser par le demandeur qui introduit une instance civile, est fixé
comme suit :
- Devant la Cour d’Appel : Instance devant aboutir à un arrêt : 24.000 Frs (soit droits d’enregistrement :
16.000, droits de timbre : 8.000)
- Devant le Tribunal de grande instance: - Instance devant aboutir à un jugement : 10.000 Frs (soit droits
d’enregistrement : 8.000, droits de timbre : 2.000 à 8.000) - Instance devant aboutir à une ordonnance
: 6.000 à 8.000 (soit droits d’enregistrement : 4.000, droits de timbre : 2.000 à 4.000)
- Devant un Tribunal d’instance : - Instance devant aboutir à un jugement : 8.000 Frs (soit droits
d’enregistrement : 4.000, droits de timbre : 4.000) - Instance devant aboutir à une ordonnance : 6.000
à 8.000 Frs (soit droits d’enregistrement: 4.000; droits de timbre : 2.000 à 4.000) - Instance devant
aboutir à un jugement application de l’article 87 du Code de la Famille : 4.000 Frs (soit droits
d’enregistrement : 2.000; droits de timbre : 2.000)

Article 2.- Tout enrôlement est subordonné à la justification du versement de la provision, conformément aux
dispositions des articles 56 et suivants du Code de Procédure Civile.

Article 3.- Le demandeur qui introduit une instance civile, versera en outre, une provision sur frais de délivrance
des actes en matière civile et commerciale. Le montant de cette provision est fixé comme suit :
- Devant la Cour d’Appel : - Instance devant aboutir à un arrêt : 8.000
- Devant le Tribunal de grande instance : - Instance devant aboutir à un jugement : 6.000 - Instance devant
aboutir à une ordonnance de référés : 2.400
- Devant un Tribunal d’instance : - Instance devant aboutir à un jugement : 4.000 - Instance devant aboutir
à une ordonnance de référés : 2.400 - Instance devant aboutir à un jugement en matière d’état civil :
600
Paragraphe 4 : Les débats

Dans le procès civil, les débats sont en principe publics et oraux (A) et le
Président du tribunal au cours des débats dispose d’importants pouvoirs de police
(B).

A) Le principe de la publicité et de l’oralité des débats

Le principe de la publicité des débats est posé à l’article 60 du CPC. Aux termes des dispositions
de l’article visé : « les audiences sont publiques, à moins que cette publicité ne soit dangereuse
pour l’ordre ou les mœurs, auquel cas la juridiction saisie le déclare par arrêt ou jugement
préalable, le ministère public entendu ».
La publicité permet au citoyen de vérifier que le juge fait application des exigences du procès
équitable, mais aussi et surtout elle sert de garantie de transparence du procès.

Cependant, lorsque la publicité des débats risque d’entrainer des troubles (des manifestations)
ou lorsque l’affaire est relative aux mœurs, le tribunal peut par jugement, après audition du
Ministère public, décider que les débats se feront à huit clos.
En tout état de cause, que les débats soient publics ou non, le dernier alinéa de l’article 60 du
CPC précise que « sauf dispositions légales contraires, les jugements, en toute matière, sont
prononcés publiquement et doivent être motivés, à peine de nullité ».

Dans la pratique, la procédure est souvent écrite, les parties ou leurs avocats versent aux débats,
à cet effet, des mémoires ou des conclusions.
Mais, selon l’article 66 du CPC « à l’audience, les parties ou leurs mandataires sont autorisés
à présenter des observations orales ou à développer leurs conclusions déposées et jointes au
dossier ».
Les parties plaident selon un ordre. Le demandeur d’abord, ensuite le défendeur et si le
demandeur le requiert la parole peut lui revenir. Mais, le défendeur doit répliquer, il a la parole
en dernier.
Il appartient alors au juge de faire cesser les plaidoiries, s’il le juge nécessaire.
Dans certains cas, le Ministère public peut intervenir dans les débats, notamment, lorsqu’il est
partie jointe. Dans ce cas, il intervient pour donner son avis sur une question portée à sa
connaissance.

Selon l’article 57 du CPC, certaines affaires sont obligatoirement communiquées au Ministère


public ; il s’agit des affaires qui concernent l’état des personnes, les personnes présumées
absentes, l’ordre public, la causes des incapables, les récusations, et renvois pour causes de
parenté, les règlements de juges…

Le procureur de la République peut néanmoins prendre communication de toutes les autres


causes dans lesquelles il croit son ministère nécessaire. Le tribunal peut même l’ordonner
d’office. La communication du dossier se fait au Parquet.
Une fois les plaidoiries achevées, les parties vont remettre au juge leurs dossiers et les débats
seront alors clos, sauf si le juge autorise leur réouverture.

B) La police des débats

Le président du Tribunal a la police des débats. Tout ce qu’il ordonne pour le maintien de l’ordre
à l’audience est exécuté ponctuellement à l’instant. La même disposition est observée dans les
lieux où les magistrats et les greffiers exercent les fonctions de leur état.
En vertu de l’article 62 du CPC « les parties sont tenues de s’exprimer avec modération et de
garder en tout le respect dû à la justice; si elles y manquent, le juge les y rappellera d’abord
par un avertissement; en cas de récidive, elles pourront être condamnées à une amende qui
n’excédera pas la somme de 10.000 francs ».
Si un ou plusieurs individus, quels qu’ils soient, interrompent le silence, donnent des signes
d’approbation ou d’improbation, soit à la défense des parties, soit aux discours et ordres des
magistrats, causent ou excitent du tumulte de quelque manière que ce soit, et si, après
l’avertissement du président, ils ne rentrent pas dans l’ordre sur le champ, il leur sera enjoint de
se retirer et les résistants seront saisis et déposés à l’instant dans la maison d’arrêt pour 24
heures.
Si le trouble est causé par un individu remplissant une fonction près le tribunal, il peut en outre
être suspendu à temps de ses fonctions.
Aux termes de l’article 64 du CPC si le trouble se trouve causé par un avocat, le
Président pourra, après un avertissement resté sans effet, lui enjoindre de se retirer de
l’audience, ce qui sera exécuté sur le champ.

Section 2 : Les règles particulières aux diverses procédures

Le déroulement de l’instance répond certes à des règles communes que nous avons évoquées,
dans nos développements précédents. Ces règles communes sont complétées par un arsenal de
règles spéciales.
Il s’agira ici d’étudier de manière concise les règles spécifiques aux procédures ordinaires
(procédures devant le TGI, le TI, le Tribunal du travail) (paragraphe 1), avant d’envisager les
règles applicables aux procédures particulières (référé, procédures sur requête) (paragraphe 2)
devant les juridictions civiles et commerciales.

Paragraphe 1 : Les règles particulières aux procédures ordinaires

Il ne s’agit pas ici de revenir sur le déroulement de l’instance, car pour l’essentiel, son régime
a été largement étudié dans nos développements ultérieurs. Mais plutôt, d’analyser certaines
règles qui s’appliquent spécifiquement à la procédure en fonction de la juridiction saisie.
A cet égard deux règles particulières méritent d’être soulignées :
- d’abord, il arrive que dans les procédures ordinaires contentieuses, que l’instance soit
précédée d’une étape préalable de conciliation (A) ;
- ensuite, depuis l’avènement du décret du 31 décembre 2001, le déroulement de la
procédure contentieuse devant les juridictions civiles est précédé d’une phase
d’instruction des affaires enrôlées (B).

A) Le préalable à la procédure contentieuse : la conciliation

La justice civile, on ne cesse de le répéter, est l’affaire des parties. On a aussi évoqué le fait
que le procès civil mettait en jeu des intérêts purement privés ; d’où la nécessité d’impliquer
d’avantage les parties dans le processus de dénouement de leur litige, en leur donnant l’occasion
de trouver une solution amiable à leur différend par le biais de la conciliation préalable.
En principe, il résulte de l’article 30 du Code de procédure civile que les instances devant le
tribunal de grande instance sont dispensées du préliminaire de conciliation.
Devant le tribunal d’instance, la conciliation est également en principe une faculté pour le juge
et les parties (article 7 du CPC).

Cependant l’obligation de conciliation peut se poser dans un litige. Elle peut résulter de la
volonté des parties ou du juge :
- d’abord, les parties peuvent comparaitre volontairement aux fins de conciliation devant
le juge compétent ;
- ensuite, le demandeur a la faculté de citer le défendeur en conciliation en respectant les
délais d’ajournement ;
- enfin, le juge saisi peut en tout état de la procédure tenter la conciliation des parties, ces
dernières pourront être assistées de leurs conseils.

Devant le tribunal de grande instance ou d’instance, il arrive souvent que le préliminaire de la


conciliation résulte souvent des exigences même de la loi :
- il en est ainsi en matière d’injonction de payer, où en cas d’opposition formée par le
débiteur, le tribunal est tenu de procéder à une tentative de conciliation. En effet, en
vertu de l’article 12 de l’acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement
et des voies d’exécution de l’OHADA « la juridiction saisie sur opposition procède à
une tentative de conciliation ». Ce n’est qu’en cas d’échec de la tentative de conciliation
que le tribunal statue sur la demande en recouvrement de la créance.

- Il en est de même devant le Tribunal d’instance en cas de divorce contentieux. En vertu


de l’article 169 du Code de la famille, lors de la première comparution devant le tribunal
d’instance, le juge a l’obligation de procéder à une tentative de conciliation, en tenant
aux époux des observations qu’il croit nécessaires pour opérer la réconciliation, hors la
présence des conseils des parties. Ce n’est que lorsque la conciliation échoue que la
phase contentieuse est ouverte.

- Dans la pratique aussi, on peut noter que le tribunal de grande instance a institué une
audience des conciliations présidée par un juge. Au cours de cette audience spéciale qui
se tient en chambre du conseil, le juge procède à la conciliation des parties. Si la
conciliation aboutit le juge assisté du greffier dresse un procès-verbal de conciliation.
Ce procès-verbal est signé par les deux parties et déposé au greffe. Cette conciliation
met fin à l’instance et le procès-verbal de conciliation signé par le juge et les parties
constitue un titre exécutoire (V. article 33 de l’acte uniforme sur les procédures
simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution de l’OHADA). Si la tentative de
conciliation échoue, ou n’a pas lieu, on entrera dans la procédure contentieuse.

B) La mise en état de l’affaire

Il est rare qu’une affaire puisse être plaidée et jugée dès la première audience. Dans la plupart
du temps, il est nécessaire de procéder à une instruction.

L’instruction des affaires renvoie à leur mise en état. La mise en état d’une affaire consiste à
mettre l’affaire en état d’être jugée. C’est-à-dire qu’il s’agit de permettre aux parties d’échanger
leurs conclusions, de veiller à la communication des pièces, de procéder à des enquêtes ou
expertises pour que le dossier puisse être jugé dans des délais raisonnables.

Le décret du 31 décembre 2001 a institué le juge de la mise en état chargé d’instruire les affaires.
En vertu de l’article 54-2 du code de procédure civile, toutes les affaires qui ne sont pas en état
d’être jugées sont renvoyées à l’audience du juge de la mise en état. Ce juge est désigné au
début de chaque année judiciaire par ordonnance du Premier président de la Cour d’appel, du
président du tribunal de grande instance et du tribunal d’instance (article 54-3 du CPC).
Il faut d’une part analyser le déroulement de la mise en état (1) avant d’étudier d’autre part la
clôture de la mise en état (2)

1) Le déroulement de la mise en état

Au cours du déroulement de l’instruction des affaires, le juge de la mise en état se voit


reconnaitre des compétences (a) et des pouvoirs considérables (b).

a) La compétence du juge de la mise en état

Lorsqu’il est saisi, la juridiction de la mise en état a jusqu’à son dessaisissement une
compétence exclusive pour statuer sur certaines questions.
En effet selon l’article 54-13 du CPC, le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur
les exceptions de procédure (exception de nullité d’un acte de procédure, d’incompétence, de
connexité…), à l’exclusion des fins de non-recevoir (défaut de qualité à agir, d’intérêt, chose
jugée…) et des défenses au fond.
Le juge de la mise en état peut accorder une provision au créancier lorsque l’existence de
l’obligation n’est pas sérieusement contestable. La provision est une avance sur une somme
due.
Il est compétent pour ordonner des mesures provisoires, même conservatoires, à l’exception
des saisies conservatoires, des nantissements ou des hypothèques conservatoires.
Enfin le juge de la mise en état ordonne, même d’office toute mesure d’instruction appropriée
(enquête, expertise…)

b) Les pouvoirs du juge de la mise en état

Le juge de la mise en état dispose de larges prérogatives dans le cadre de la conduite de


l’instance.
Selon l’article 54-4 du Code de procédure civile, le juge de la mise en état veille au déroulement
loyal de la procédure, à la ponctualité de l’échange des conclusions et à la communication des
pièces.
A cet égard, il peut entendre les avocats ou les parties et leurs adresser des injonctions. Il fixe
des délais pour accomplir des actes et peut accorder des prolongations de délais.
Il peut ordonner la jonction des instances présentant un lien de connexité ou à des disjonctions.
Enfin, il a le pouvoir de constater l’extinction de l’instance notamment en cas de décès du
demandeur ou de désistement d’instance.

Si les deux parties s’abstiennent d’accomplir les actes de procédure dans les délais, le juge de
la mise en état peut ordonner d’office la radiation de l’affaire par une décision non susceptible
de recours (article 54-22).
Mais, le juge de la mise en état voit de plus en plus ses pouvoirs étendus même en dehors de
l’instance. Ainsi, il peut constater la conciliation entre les parties (article 54-10 du CPC) et
statuer sur les dépens (article 54-14 du CPC). Ainsi, lorsque les parties se concilient en cours
de procédure, le juge de la mise en état constate la conciliation intervenue entre les partie et
ordonne la radiation de l’affaire du rôle.
2) La clôture de la mise en état

La clôture de l’instruction est la fin de la mise en état. En principe, après la clôture de


l’instruction, aucune pièce ou conclusion ne peut être déposée par les parties. C’est pourquoi
dans la pratique judiciaire, avant de procéder à la clôture le juge de la mise en état renvoie
l’affaire pour vérification.
Pendant ce temps, le juge vérifie l’état du dossier (dépôt de toutes les conclusions et des pièces)
statue éventuellement sur les exceptions de procédure (exception d’incompétence, de
connexité, de non communication des pièces, de nullité d’un acte de procédure…)

La clôture de l’instruction peut être d’abord ordonnée lorsque qu’à la fin de l’instruction,
l’affaire est en état d’être jugée (article 54-23). A cet effet, le juge va rendre une ordonnance de
clôture qui renvoie l’affaire devant le tribunal pour être jugée.
Par ailleurs, la clôture de l’instruction peut être ordonnée par le juge de la mise en état lorsque
l’une des parties n’a pas accompli les actes de procédure dans les délais (article 54-21).

L’ordonnance de clôture ne peut faire l’objet d’aucun recours. Lorsque l’affaire est clôturée, la
cause et les parties sont renvoyées devant la chambre collégiale pour la mise de l’affaire en
délibéré.
Mais, en vertu de l’article 54-26 du CPC l’ordonnance de clôture peut être révoquée en cas de
cause grave dûment justifiée depuis qu’elle a été rendue. Il en est ainsi par exemple, lorsqu’une
partie après la clôture de l’instruction, entend déposer des pièces déterminantes pour l’issue du
litige.
La révocation de l’ordonnance de clôture peut être décidée par une ordonnance motivée d’office
par le juge de la mise en état ou à la demande des parties, ou même par une décision du tribunal.
La révocation de l’ordonnance de clôture permet la réouverture des débats et de l’échange des
conclusions et pièces.

Paragraphe 2 : Les règles applicables aux procédures spéciales

Le déroulement de l’instance est parfois aménagé, parce-qu’ il s’agit de sanctionner un défaut


de comparution d’une partie, de trouver une solution rapide pour répondre à l’urgence, ou
encore de prendre en compte la nature gracieuse de la demande.
Trois procédures seront donc envisagées : la procédure par défaut (A), les procédures d’urgence
(B), et la procédure gracieuse (C).

A) La procédure par défaut

Elle est à distinguer de la procédure contradictoire, qui aboutit à un jugement contradictoire,


lorsque les adversaires acceptent le débat et exercent leurs droits de la défense, en
comparaissant en personne ou par l’intermédiaire d’un représentant habileté par la loi.

Dans la pratique, cela ne se passe pas souvent ainsi, car l’un des plaideurs ou encore les deux
plaideurs peuvent ne pas comparaître. Ce défaut de comparution va donc affecter le caractère
contradictoire de la procédure, et peut aboutir à un jugement rendu par défaut.

Lorsqu’une juridiction est ainsi amenée à rendre une décision par défaut, le plaideur défaillant
s’il est condamné, dispose d’une voie de recours spéciale : l’opposition, qui va lui permettre de
demander à la juridiction qui a rendu la décision, de la rétracter, en considération des
explications qu’il va fournir.
Aux termes de l’article 101 du CPC, cette opposition n’est recevable que pendant quinze jours
à compter de la signification à personne; à ce délai s’ajoute celui déterminé aux articles 40 et
41. Pendant ce délai, le jugement ne peut être exécuté à moins que l’exécution provisoire n’ait
été ordonnée avant l’expiration desdits délais.

L’opposition va donc aboutir à un second examen du même procès, par le même tribunal, à la
lumière à la lumière des arguments présentés par le défaillant.

En droit procédural sénégalais, le défaut est sanctionné différemment, selon qu’une seule partie
s’est présentée au procès (1), ou selon que les deux parties ne se sont pas présentées (2).

1) Le défaut de comparution d’une partie

Ce défaut de comparution de l’une des parties, est régi par les dispositions de l’article 12 du
CPC, pour la procédure applicable devant le Tribunal d’instance et 96 pour la procédure
applicable devant le Tribunal de grande instance.
Il résulte en principe de ces dispositions que si l’une des parties, dûment convoquée ne
comparaît pas ou ne se fait pas représenter, la juridiction compétente statue par défaut, sauf si
la partie comparante consent à un renvoi.
Il se peut aussi que le défendeur ne comparaisse pas parce-que les délais d’ajournement ne sont
pas observés par le demandeur, ou parce-qu’ il n’a pas été informé de la procédure. Dans ce
cas, le juge doit ordonner qu’il soit réassigné à nouveau et les frais de la première citation seront
à la charge du demandeur.

Notons enfin que si la partie se présente à la barre avant la fin de l’audience où l’affaire est mise
en délibéré, le juge peut rabattre le défaut et ouvrir à nouveau les débats.

2) Le défaut de comparution des deux parties

Si aucune des parties ne comparaît à l’audience, ou n’a constitué avocat, le président peut selon
les cas prononcer la radiation de l’affaire (article 96 alinéa 2 du CPC), ou convoquer les parties
défaillantes par un agent d’exécution commis par simple ordonnance. Cette convocation portera
mention de ce que le jugement à intervenir aura les effets d’un jugement contradictoire. A
l’expiration du nouveau délai de comparution il sera statué par un seul jugement contradictoire
entre toutes les parties (article 12 CPC).

B) Les procédures d’urgence

La procédure civile, sert les intérêts des litigants. Elle intègre dans le déroulement de l’instance,
la notion d’urgence, pour faire en sorte que son caractère formel et contraignant, ne soit pas un
frein au dénouement efficace de certains contentieux qui nécessitent une célérité.
Deux catégories de procédure mettent en avant l’urgence : il s’agit de la procédure de référé (1)
et des procédures sur requête (2).
1) La procédure de référé

Le référé est une procédure contradictoire qui conduit au prononcé d’une ordonnance
provisoire, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal, le pouvoir
d’ordonner immédiatement des mesures nécessaires.
Il s’agit d’une procédure rapide et simple qui se déroule devant un juge unique (le président de
la juridiction ou le magistrat nommé par lui).
La procédure de référé est prévue à l’article 247 ; elle permet au plaideur de demander au
juge dans tous les cas d’urgence :
- de prononcer des mesures dictées par l’urgence qui ne se heurtent à aucune
contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. L’urgence est une
question de fait que le juge apprécie souverainement à la date de prononcé de sa
décision. On la retrouve chaque fois qu'une réponse judiciaire est nécessaire pour
empêcher la réalisation ou l’aggravation d’un préjudice qui serait irrémédiable.
Dans les cas d’urgence, la mesure ne peut être prise qu’en l’absence de contestation sérieuse.
En effet, dès lors que l’adversaire peut contester la réalité ou la régularité de l’obligation avec
des moyens sérieux de faits ou de droit, la demande en référé est irrecevable (et seul le juge du
fond peut apprécier ces éléments).

Le plaideur peut demander au juge aussi des référés, même en l’absence d’une
contestation sérieuse de prescrire :
- une mesure conservatoire (donner une autorisation, suspendre la réalisation d’une
opération) ;
- une mesure de remise en état (injonction à un propriétaire des lieux de rétablir l’eau)
Ces mesures conservatoires tendent à prévenir un dommage imminent ou à faire cesser un
trouble manifestement illicite (occupation d’un sans droit ni titre d’un immeuble)

Le juge des référés peut accorder :


- une provision sur une obligation non sérieusement contestable, qui constitue une
sorte d’avance sur la condamnation définitive prononcée par le juge du fond. L’octroi
de la provision est subordonnée à une absence de contestation importante portant sur
des éléments de faits ou de droit (exemple : caractère imprécis des clauses du contrat
invoquées, non établissement de la non-conformité des marchandises livrées.
Enfin tout juge des référés peut :
- prononcer des condamnations à des astreintes pour l’exécution de ses propres
décisions. Il peut les liquider à titre provisoire, à condition qu’il se soit réservé ce
pouvoir dans son ordonnance.
En ce qui concerne le déroulement de l’instance en référé, le législateur a mis l’accent sur la
simplicité et la célérité de la procédure.
En effet aux termes de l’article 248, l’instance est introduite par voie de demande en référé à
une audience tenue à cet effet, par le président du tribunal ou par le juge qui le remplace aux
jour et heure indiqués par le tribunal.
Dans les cas qui requièrent célérité, le président ou celui qui le remplace peut permettre
d’assigner, soit à l’audience soit en son hôtel, à heure indiquée, même les jours de fête.

Le juge des référés prend des ordonnances sur référés qui ne préjudicient pas au principal ; elles
sont donc exécutoires par provision sans caution, si le juge n’a pas ordonné qu’il en soit fournie
une.
Les ordonnances de référé ne sont pas susceptibles d’opposition. Quant à l’appel il n’est
recevable que s’il est interjeté dans le délai de quinze jours après la signification de
l’ordonnance ; il est aussi jugé en urgence.

Notons enfin que les minutes des ordonnances sur référé sont déposées au greffe ; et en cas
d’absolue nécessité, le juge peut ordonner l’exécution de son ordonnance sur la minute et même
avant l’enregistrement.

2) Les Procédures sur requête

Les présidents des juridictions de fond peuvent prendre des ordonnances sur requête, dans les
cas où le requérant est fondé à obtenir une décision provisoire sans appeler la partie adverse, la
procédure n’étant pas contradictoire.
Les procédures sur requête sont prévues à l’article 820-1 et suivant du CPC. Elles résultent pour
l’essentiel de lois spéciales (rectification des actes d’état civil, en matière de successoral) ; elles
peuvent également être dictées par des mesures d’urgence lorsque les circonstances exigent
qu’elles ne soient pas prises contradictoirement.
Le requérant présente une requête en double exemplaire, contenant ses motivations doit être.
La requête doit être répondue, dans les 48 heures, par une ordonnance motivée qui y fait droit
en tout ou partie ou qui la rejette ; elle est apposée au pied de la requête et est exécutoire sur
minute.

Deux voies de recours sont prévues pour les ordonnances sur requête :

- S’il n’est pas fait droit à la requête, l’appel peut être interjeté dans les cinq jours
de la décision par requête établie en trois exemplaires adressée, selon le cas, au
président du tribunal de grande instance ou au premier président de la Cour d’appel ;

- En revanche, s’il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge,
pour qu’il modifie ou rétracte son ordonnance. Aucun délai n’est prévu.

C) La procédure en matière gracieuse

Le juge statue en matière gracieuse, lorsqu’en l’absence de litige, il est saisi d’une demande
d’une demande dont la loi exige qu’elle soit soumise à son contrôle, en raison de la nature de
l’affaire ou de la qualité du requérant.

La procédure gracieuse suppose donc l’absence de litige, d’adversaires, et l’exigence légale


d’un contrôle du juge, qui autorise, homologue, ou défend.

Le gracieux n’implique pas systématiquement l’absence de conflits d’intérêts (exemple :


divorce par consentement mutuel), mais suppose que les parties se présentent devant le juge
après avoir surmonté leur différend, et qu’elles lui demandent de donner acte de leur accord,
après avoir contrôlé sa conformité au droit et à leurs intérêts.

Le formalisme est simplifié ; car la demande est formée par requête remise au greffe de la
juridiction saisie.

Le juge dispose d’importants pouvoirs d’instruction de l’affaire. Il peut aussi relever son
incompétence territoriale, fonder sa décision sur tous les faits relatifs à la situation, y compris
ceux qui n’auraient pas été allégués par le demandeur, à condition de solliciter les observations
de ce dernier.
Le juge procède à toutes les investigations utiles, entend sans formalité les personnes
susceptibles de l’éclairer et celles dont les intérêts risquent d’être affectés par la décision
ultérieure.
CHAPITRE 3 : LE DENOUEMENT
DE L’INSTANCE : LE JUGEMENT

Le jugement est le principal mode d’extinction de l’instance. Il est défini comme l’acte
juridictionnel par lequel le juge tranche le litige qui lui est soumis.
Mais, techniquement, on admet qu’un jugement est une décision rendue par un tribunal alors
qu’une ordonnance est une décision rendue par un président de tribunal ou par un juge.

Tous les jugements ne mettent pas fin à l’instance. En effet, les jugements avant dire droit ayant
pour objet de prescrire une mesure en vue de préparer le jugement définitif de l’affaire
(expertise, enquête…) ne dénouent pas l’instance.
Après l’accomplissement de la mesure ordonnée par le jugement (dépôt du rapport d’enquête
ou d’expertise) l’instance est simplement reprise.

L’étude du jugement dans la procédure civile, suppose d’analyser l’élaboration des actes
juridictionnels (section 1), avant d’évoquer leurs effets procéduraux (section 2)

Section 1: L’élaboration des jugements

L’élaboration du jugement (paragraphe 1) est souvent précédée de certaines opérations tendant à la


préparation de la décision à rendre (Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : Les opérations préalables à l’élaboration du


jugement

Les préalables au jugement visent les étapes préliminaires au jugement définitif des affaires. Il
s’agit de la mise en délibéré (A) et du délibéré (B).
A) La mise en délibéré

Dans les affaires simples où il n’y a guère de difficultés, il arrive que le jugement soit rendu
sur-le-champ. On dit que le jugement est rendu sur le siège.
Par ailleurs, dans les cas moins simples, les juges se retirent dans la chambre du conseil pour
revenir ensuite prononcer le jugement. Dans les deux cas le jugement est rendu le même jour.
Cependant, dans la plupart des cas le prononcé du jugement est renvoyé à une date ultérieure et
le président du tribunal indique la date à laquelle l’affaire sera jugée.
On dit que l’affaire est mise en délibéré. La mise en délibéré est une prérogative exclusive du
tribunal et non du juge de la mise en état qui lorsque l’affaire est en état d’être jugée clôture
l’instruction et renvoie la cause et les parties devant le tribunal pour mise en délibéré.
La mise en délibéré par le tribunal permet aux juges de mieux mûrir la décision avant son
prononcé.

B) Le délibéré
C’est la phase de réflexion que s’accorde le tribunal après avoir entendu les parties avant de
prononcer sa décision. On dit en pratique que le tribunal vide son délibéré lorsqu’il a prononcé
publiquement sa décision.
C’est aussi le moment où, lorsque le tribunal ne statue pas à juge unique, les magistrats discutent
entre eux en vue de s’accorder sur la décision qui sera rendue.
Le délibéré est régi principalement par deux principes fondamentaux : le principe de la majorité
et le principe du secret :
- Le principe de la majorité signifie qu’au cours des délibérations, le jugement est pris à
la majorité des magistrats composant la chambre. Ni le président de chambre, ni les
titulaires dans la chambre n’ont une voie prépondérante. C’est la loi de la majorité qui
s’impose. Il arrive souvent que les présidents de chambre soient minorisés au cours de
délibération.
- Le délibéré est en outre régi par le principe du secret. Les magistrats sont tenus de garder
le secret des délibérés, ils doivent se garder de révéler à des tiers les positions prises par
les membres de la chambre au cours des délibérations. D’ailleurs, l’obligation de garder
le secret des délibérés est inscrite dans la formule du serment prêté par les magistrats
avant leur entrée en fonction.
Paragraphe 2 : L’élaboration des jugements

Nous étudierons la rédaction des jugements (A) et ensuite la classification des jugements (B)

A) La rédaction des jugements

Une fois que les jugements sont prononcés à l’audience publique, ils doivent être
dactylographiés.
En vertu de l’article 73 du CPC, ils doivent comporter un certain nombre de mentions, les noms
des magistrats qui ont rendu le jugement, les noms des représentants du Ministère public, les
noms, profession et domicile des parties, le dispositif des déclarations des parties, le dispositif
des jugements avant dire droit.
Les motifs des jugements doivent aussi être inscrits dans le jugement.

En outre, le jugement doit être revêtu de la signature du greffier et du juge.


Selon l’article 75 bis du CPC, le greffier audiencier a l’obligation, sous la surveillance du
greffier en chef, d’assurer dans les deux semaines du prononcé du jugement, la dactylographie
et la présentation de la décision à la signature du magistrat qui l’a rendue.

Le président du Tribunal et le greffier signent chaque jugement dans un délai maximum de 25


jours à compter de son prononcé. Mais, ces délais ne sont pas toujours respectés dans la pratique
en raison du volume important du contentieux surtout au tribunal de grande instance de de
Dakar.

B) La classification des jugements

Le jugement, il faut le rappeler est l’acte par lequel le juge dit le droit. Ces actes juridictionnels
se caractérisent par leur diversité ; et il est donc revenu à la doctrine d’opérer leur classification
en tenant compte de plusieurs critères.
Ainsi donc classiquement on distingue :
1) Les jugements rendus en premier ressort et les jugements rendus en premier et
derniers ressort

Selon qu’on peut faire appel, ou non de la décision rendue, on distingue les décisions rendues
en premier ressort et les décisions rendues en premier et dernier ressort.
Les premières peuvent faire l’objet d’appel, tandis que les secondes, en raison du faible taux de
la valeur du litige soumis au juge, ne pourront faire l’objet d’appel.

2) Jugements contradictoires et jugements par défaut

Selon que les plaideurs ont ou non comparu, on distingue les jugements contradictoires et les
jugements par défaut.
Le jugement contradictoire est un jugement rendu dans une instance où les parties ont comparu
personnellement ou se sont fait représentées par leurs conseils ou représentants.
Le jugement par défaut est une décision rendue à l’issue d’une instance à laquelle l’une ou les
deux parties n’ont ni comparu ni été représentées (articles 12 et 96 du CPC). Seul le défaut de
comparution du défendeur peut donner ouverture à opposition.

3) Jugements contentieux et jugements gracieux

Si l’on s’attache à l’existence même ou à l’inexistence du litige, on est conduit à distinguer les
jugements contentieux et les jugements gracieux.

Le jugement est dit contentieux quand le juge tranche un litige après un débat entre deux parties
au moins, sur leurs prétentions.
Le jugement est contraire gracieux, quand il n’y a ni litige, ni adversaire (du moins dans
l’immédiat). Le juge ne tranche donc pas une contestation mais se contente d’opérer un contrôle
exigé par la loi, en vue de donner un effet juridique à un acte privé (exemple : le jugement de
divorce par consentement mutuel (article162 du code de la famille), le jugement homologuant
un concordat dans une procédure collective, le jugement d’homologation du partage amiable
en matière de succession (article 464 du Code de la famille)...
4) Jugements sur le fond et jugements avant-dire-droit.

Selon la nature de la question résolue par le jugement, on distingue les jugements sur le fonds
(que l’on qualifie parfois de jugements définitifs) et les jugements avant dire droit.

Un jugement est rendu sur le fond, quand il tranche la contestation soumise au juge dans son
dispositif, tout ou partie du principal, une exception de procédure, une fin de non-recevoir, ou
enfin un incident autre que ce ceux relatifs à une mesure d’instruction, ou à une mesure
provisoire.
On le constate, le jugement rendu sur le « fond », ne porte pas exclusivement sur le fond du
droit, puisqu’il peut aussi porter sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir, ou
sur un incident sauf, s’il est relatif à une mesure d’instruction ou à une mesure provisoire.

Notons que dans la pratique, on distingue par ailleurs la décision définitive (décision sur le fond
du droit) et la décision irrévocable, qui met un terme à un litige, en ce sens qu’elle n’est plus
susceptible d’une quelconque voie de recours ordinaire ou extraordinaire (sous réserve de la
tierce opposition, ou du recours en révision).

A l’opposé du jugement sur le fond, le jugement avant dire droit, ne tranche pas une
contestation, mais ne fait que prendre des mesures destinées :
- soit à sauvegarder dans l’immédiat une situation de fait, ou les intérêts des plaideurs
- soit à préparer la solution future de la contestation, en ordonnant des mesures
d’instruction (expertise, enquête ou autre…), ou une mesure provisoire (provision,
garde provisoire d’un enfant) sans trancher le principal du litige.

Les jugements avant dire droit se subdivisent en deux catégories. Il s’agit des jugements
préparatoires et des jugements interlocutoires.
Selon les dispositions de l’article 263 alinéa 1er du CPC, les jugements préparatoires sont les
jugements rendus pour l’instruction de la cause et qui tendent à mettre l’affaire en état de
recevoir un jugement définitif (exemple : un jugement désignant une expertise pour évaluer la
valeur vénale d’un immeuble).
En vertu des dispositions de l’article 263 alinéa 2 du CPC, les jugements interlocutoires sont
des décisions rendues lorsque le tribunal ordonne avant dire droit une mesure qui préjuge du
fond du litige.

Section 2 : Les effets procéduraux des jugements

Le jugement définitif produit des effets substantiels puisqu’il modifie la situation juridique des
parties (exemple : le jugement peut déclarer une partie créancière, ou propriétaire). Afin ces
effets ne puissent pas être contestés, la loi attache au jugement des attributs procéduraux
particuliers, dont le but est d’assurer l’immutabilité de la décision du juge. Ces effets sont pour
l’essentiel, l’autorité de la chose jugée (paragraphe 1), le dessaisissement du juge (paragraphe
1), et la force exécutoire (paragraphe 3)

Paragraphe 1 : L’autorité de la chose jugée

Un adage latin nous apprend que « res judicata pro veritate habetur », ce qui signifie que la
chose jugée doit être tenue pour vérité.
L’autorité de la chose peut être définie comme une présomption légale, dont la fonction est
d’assurer l’immutabilité du contenu du jugement.
Seul donc l’exercice d’une voie de recours permet en effet de la remettre en cause.
Une fois les recours expirés, la solution du litige devient irrévocable.

L’autorité de la chose jugée s’applique uniquement aux seules décisions contentieuses


définitives, et non aux décisions gracieuses.
Notons aussi que seul le dispositif du jugement a autorité de la chose jugée, à l’exclusion des
autres énonciations et des motifs.

L’effet procédural de l’autorité de la chose jugée d’une décision, permet au bénéficiaire du


jugement de l’opposer à la partie qui remet en cause ledit jugement, en formant une demande
identique à celle qui a été tranchée, devant un autre juge, ou le même juge.
L’autorité de la chose jugée est invoquée en tout état de cause, sous forme d’une fin de non-
recevoir ; et le juge saisi peut toujours la relever d’office.
Notons enfin que l’autorité de la chose jugée est relative ; en effet l’acte juridictionnel ne crée
de droits et d’obligations qu’à l’égard des parties, et ne peut pas nuire aux tiers ou créer de
droits à leur profit. Cependant les tiers doivent respecter la chose jugée (on parle d’opposabilité
absolue du jugement). Si l’exécution du jugement du jugement leur cause préjudice, ils peuvent
former tierce opposition pour que la décision leur soit déclarée inopposable.

Paragraphe 2 : Le dessaisissement du juge

Le jugement rendu sur le fond dessaisit le juge car il met un terme à la contestation entre les
plaideurs.
Le juge ne peut donc plus revenir sur sa décision (sauf si la décision est provisoire, comme un
jugement avant-dire-droit ou une ordonnance de référé et qu’il survient un élément nouveau).

Il est cependant des cas ou après le jugement prononcé sur le fond, l’affaire peut revenir devant
le juge qui a statué. Il en est ainsi :
- si un jugement est dépourvu de clarté ou rendu en des termes ambigus ou obscurs. Dans
ce cas, il appartient au juge qui l’a rendu de l’interprété s’il n’est pas frappé d’appel ;
- en cas d’erreur ou d’omission matérielle (erreur de calcul, erreur d’orthographe), qui
affectent un jugement ; dans ce cas, le juge qui a statué peut réparer le jugement ;
- lorsque le juge a omis de se prononcer sur demande, lorsque le juge s’est prononcé sur
des choses non demandées, ou s’il a accordé plus que ce qui a été demandé ; dans ces
cas, une partie peut le saisir à nouveau par voie de requête civile, pour qu’il complète
son jugement, ou rétablir le véritable exposé des prétentions et moyens.
Certains recours enfin constituent des voies de rétractation (opposition, recours en révision,
tierce opposition), et permettent ainsi au juge de revenir devant le même juge pour qu’il réforme
sa décision.

Paragraphe 3 : La force exécutoire du jugement

Le jugement constitue un titre exécutoire, car il autorise le gagnant à recourir aux procédures
forcées d’exécution, à défaut d’exécution volontaire, sous réserves qu’il soit revêtu de la
formule exécutoire (qui est l’ordre donné au pouvoir exécutif de prêter main-forte à l’exécution
de la décision.
Le jugement ne peut être exécuté contre celui auquel il est opposé, qu’après lui avoir été notifié,
à moins que l’exécution n’en soit volontaire ou qu’elle soit ordonnée au seul vu de la minute.
Notons que les jugements non susceptibles de recours suspensif d’exécution (appel et
opposition), acquiert dès son prononcé l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire (c’est
le cas des décisions rendues en premier et dernier ressort).

Si le jugement est susceptible de recours suspensif (appel ou opposition), le délai d’exercice du


recours, comme l’exercice du recours, suspendent l’exécution.

Enfin certaines décisions sont immédiatement exécutoires, alors même qu’elles sont
susceptibles d’appel ; on parle d’exécution à titre provisoire (c’est le cas des ordonnances de
référés).

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