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Paludisme

Le paludisme est causé par un protozoaire Q sanguin (hématozoaire Q) de la classe des sporozoaires Q (classe pas famille
QX) ET appartenant au genre Plasmodium. Plus de 2 milliards de sujets y sont exposés (54 % de la population mondiale).
Le paludisme doit être évoqué devant toute fièvre au retour de pays tropicaux. 300 cas/an en Algérie environ
Agents causals :
1. Espèces plasmodiales :
Cinq espèces plasmodiales sont les agents du paludisme humain :
- P. falciparum est le plus répandu en régions tropicales et intertropicales ; il est responsable d'une létalité élevée ;
- P. vivax déborde ces régions pour intéresser aussi des zones à climat plus tempéré (Algérie) ; il est absent en Afrique
centrale et de l'Ouest ; il entraîne très exceptionnellement des formes graves, voire le décès
- P. ovale est retrouvé essentiellement en Afrique intertropicale ; il est plus rare
- P. malariae, localisé sous forme de foyers dans toutes les régions d'endémie palustre
- P. knowlesi, morphologiquement proche de P. malariae, agent d'un paludisme simien, a été reconnu récemment en
Asie du Sud-Est, responsable de rares cas humains, parfois fatals.
2. Cycle parasitaire :
■ Cycle asexué (schizogonique) chez l'homme :
Étape hépatique ou exoérythrocytaire :
Le moustique inocule des sporozoïtes QA qui atteignent le foie et s'y multiplient (cette phase qui dure en moyenne 1 semaine
est asymptomatique).
Pour P. falciparum, P. malariae et P. knowlesii, tous les hépatocytes parasités vont libérer des mérozoïtes en une seule fois
dans la circulation sanguine. Pour P. vivax et P. ovale, la persistance dans le foie de formes parasitaires latentes (hypnozoïtes)
est à l'origine de passages sanguins successifs à des intervalles de plusieurs mois, expliquant une incubation plus longue
possible et des recrudescences tardives.
Étape sanguine ou érythrocytaire :
Les mérozoïtes pénètrent dans les hématies, se transforment en trophozoïtes puis par multiplication en schizontes. Le cycle
de maturation érythrocytaire varie selon l'espèce et dure 24 heures (P. knowlesi), 48 heures (P. falciparum, P. vivax, P.
ovale), ou 72 heures (P. malariae Q), expliquant la périodicité parfois observée des accès de fièvre qui traduisent l'éclatement
simultané d'un grand nombre d'hématies. Après plusieurs cycles, apparaissent dans les hématies les formes sexuées non
pathogènes, gamétocytes mâles et femelles.
■ Cycle sexué (= sporogonique QA+++++) chez l'anophèle femelle :
400 espèces dans le monde, dont 60 transmettent le paludisme
Lors d'une piqûre chez une personne impaludée, le moustique absorbe les gamétocytes. Leur transformation finale en
sporozoïtes nécessite selon les espèces plasmodiales des températures d'au moins 17 à 20 °C et une hygrométrie > 60 %.

3. Chimiorésistance :
Des souches de P. falciparum Q résistantes à la chloroquine sont présentes aujourd'hui dans presque toutes les zones
d'endémie palustre. La résistance à la chloroquine se double parfois d'une résistance à d'autres antipaludiques ; une
résistance à la quinine existe dans quelques foyers en Asie du Sud-Est et en Amazonie Q+, ce qui explique la recommandation
mondiale de ne plus utiliser ces produits en monothérapie en zone d'endémie. Des souches de sensibilité diminuée ou
résistantes aux dérivés de l'artémisinine ont été récemment décrites [en Asie du Sud-Est, la survenue de telles résistances est
possible en Amérique du Sud et en Afrique Q]. De rares souches de P. vivax résistantes à la chloroquine ont été signalées
dans quelques pays d'Asie, en Amazonie et en Océanie.
La résistance est définie par la persistance ou la réapparition de la parasitémie malgré un traitement bien conduit.
Actuellement, des méthodes de biologie moléculaire permettent d'évaluer la sensibilité des souches aux antipaludiques. Les
résultats, en raison de leurs délais d'obtention, ne peuvent être attendus chez un patient pour le choix en première intention d'un
antipaludique. Le recueil de ces données est réalisé par le Centre national de référence du paludisme.
Épidémiologie :
1. Répartition géographique :
L’Afrique intertropicale, Madagascar et les Comores sont de loin les plus touchés (90 % de la totalité des cas mondiaux)
par le paludisme. P. falciparum y prédomine. L’Amérique centrale et le bassin amazonien, Haïti et la République Dominicaine,
l'Asie méridionale et du Sud-Est sont concernés à un moindre niveau. À un bien moindre degré, le paludisme sévit en
Méditerranée orientale Q, au Moyen-Orient et en Océanie. Les Antilles, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et La
Réunion en sont indemnes. Le paludisme autochtone est en phase d'élimination sur l'ile de Mayotte en 2015 (< 20 cas par an) et
en régression en Guyane avec < 500 cas par an (- 85 % depuis 2003, mais prévalence élevée dans certaines régions minières).
Les voyages touristiques et professionnels vers les zones d'endémie et la fréquence croissante de retours temporaires
d'émigrés dans leur pays d'origine expliquent la majorité des cas, dont > 80 % à P. falciparum avec une très grande majorité
en provenance d'Afrique intertropicale. Sept cas d'importation sur 10 sont observés chez des émigrés retournant dans leur pays
d'origine. Le paludisme de port ou d'aéroport est exceptionnel.
2. Réservoir des parasites :
Le réservoir est strictement humain Q, à l'exception de P. knowlesi pour lequel les singes macaques sont le réservoir naturel.
3. Transmission :
Les hématozoaires sont transmis par la piqûre indolore, invisible et non prurigineuse de l'anophèle femelle qui ne fait pas
de bruit, le soir et surtout la nuit à condition que la température soit > 18°C. Une seule piqûre infectante suffit pour acquérir
un paludisme. La transmission par voie placentaire est possible.
Une transmission suite à une transfusion (éventualité fréquente en Afrique) ou par greffon, par exposition au sang chez des
soignants ou par toxicomanie a été rapportée dans des cas exceptionnels.
4. Facteurs protecteurs : Drépanocytose (hétérozygote), déficit en G6PD et groupe Duffy négatif
Physiopathologie :
La présence des hématozoaires dans le foie est sans conséquence clinique. Cette phase dure au minimum 1 semaine pour P.
falciparum, 10 à 15 jours pour les autres espèces plasmodiales. Cette phase définit une incubation minimale. Les symptômes
débuteront en fait plusieurs jours ou semaines après le début de la phase sanguine. Les signes cliniques apparaissent lorsque
la parasitémie dépasse un seuil, variable selon les individus.
L'hémolyse est la principale cause de l'anémie libère une substance pyrogène (hémozoïne) et de [l'ictère en cas de
parasitisme intense]. L'organisme réagit principalement par l'hyperplasie des cellules macrophagiques expliquant la
splénomégalie et l'hépatomégalie. Il existe une consommation périphérique des plaquettes.
P. falciparum est la seule espèce à assurer sa schizogonie érythrocytaire au niveau des capillaires viscéraux, cérébraux
notamment, entraînant dans ses formes graves des lésions tissulaires liées à une production de cytokines et une hypoxie
secondaire à la séquestration des érythrocytes parasités qui adhèrent aux parois endothéliales et forment des « rosettes »
(agglomérats d'hématies parasitées avec des hématies saines). Les perturbations métaboliques et hydroélectrolytiques
majorent la gravité de l'infection due à cette espèce plasmodiale.
Il s'agit alors d'un syndrome de défaillance multiviscérale.
Il n'y a pas d'immunité naturelle, mais l'homme vivant en zone d'endémie soumis à des réinfections périodiques peut
développer progressivement une immunité partielle (ou prémunition). Cet état limite la parasitémie et les effets pathogènes
du parasite, ce qui peut aller jusqu'au portage parasitaire asymptomatique (paludisme-infection) en zone endémique.
Cette prémunition disparaît si le sujet n'est plus exposé à des piqûres infectantes : c'est le cas d'émigrés retournant en
vacances dans leur pays d'origine.
Clinique :
L’incubation : 10 à 20 jours
1. Forme commune du paludisme non compliquée (forme simple) :
La phase d’invasion :
• Fièvre continue, irrégulière, sans périodicité, céphalée ++, courbature, malaise général, nausée, vomissement, diarrhée
• Légère hépatomégalie sans splénomégalie (pas encore l’hémolyse !)
• Tableau d’embarras gastrique fébrile Q+++
Phase d’état :
La symptomatologie initiale est celle d'une fièvre Q évoluant par pics, associée à des frissons, et à un syndrome algique
(céphalées Q, myalgies Q). Il peut exister des troubles digestifs souvent au premier plan chez l'enfant (anorexie, nausées,
vomissements Q, douleurs abdominales et diarrhée Q).
Une toux peut aussi être présente chez l'adulte. Une hépatomégalie et une splénomégalie, fonction de la répétition des accès,
sont inconstantes.
Après quelques jours, la fièvre peut devenir récurrente et régulière. Ces accès se répètent tous les 1 (P. knowlesi), 2 (fièvre
tierce pour P. falciparum, P. vivax, P. ovale) ou 3 (fièvre quartes pour P. malariae) jours selon l'espèce plasmodiale en cause,
mais leur périodicité n'est pas toujours régulière.
L’accès se fait en 3 stades :
- Frisson +++ qui dure 1 à 2 heures
- Chaleur : T° > 40°C, brutale, pouls accéléré, faciès congestif et qui dure 1 à 4 heures
- Sueur : profuses avec chute de la température, asthénie, courbature, hépatosplénomégalie et qui dure 1 à 4 heures suivi
d’une sensation de bien-être et sommeil profond
Ces accès se répètent tous les 2 ou 3 jours pendant 10 jours puis rechutes pour OVM et K et aggravation pour F.
Certains patients doivent bénéficier d'une grande attention, car ils sont à risque de complications : le jeune enfant Q, la
personne âgée, la femme enceinte (suivi médico-obstétrical), le sujet splénectomisé, immunodéprimé Q ou atteint de
comorbidités [ATCD de paludisme grave ou mauvaise observance d’une chimioprophylaxie ne sont pas des FDR QX]
2. Formes graves et l’accès pernicieux :
Apanage essentiellement de P. falciparum, elles peuvent apparaître soit d'emblée, soit après des manifestations cliniques
non reconnues comme palustres ou dont le traitement était inadapté ou tardif → [l’accès palustre grave est le plus souvent
évitable et dus à un retard de diagnostic le plus souvent Q et/ou d’un traitement d’un accès palustre simple à falciparum]
Tout patient adulte avec un paludisme à P. falciparum, mais aussi plus rarement à l'une des 4 autres espèces plasmodiales,
comportant au moins un des critères du tableau T107-1 (notamment ceux gradés++ et +++ au plan pronostique) doit être
rapidement évalué avec le réanimateur ; mais sans retarder le début du traitement antipaludique. Au terme de cette
évaluation, le patient est hospitalisé soit en réanimation ou en unité de surveillance continue, soit en médecine selon les
spécificités locales, à condition d'être à proximité d'une réanimation et que le transfert du patient puisse être organisé facilement
si évolution péjorative.
Chez l'enfant, les critères de gravité d'un paludisme à Plasmodium falciparum sont légèrement différents. En l'absence de
données disponibles sur la valeur pronostique de chaque critère de gravité, la prudence conduit à transférer en réanimation
tout enfant présentant un des signes de gravité. Cependant, en cas d'hyperparasitémie isolée, l'enfant peut être gardé en unité
de surveillance continue ou en service de pédiatrie générale, sous réserve d'une surveillance permanente.
Des formes graves de paludisme à P. vivax peuvent être observés, notamment en Asie du Sud-Est ; les principales
complications aiguës sont respiratoires (jusqu'à l'œdème pulmonaire lésionnel), plus rarement métaboliques (acidose
lactique), hémorragiques ou cérébrales (troubles de la conscience Q et convulsion Q) ou rénales (IR Q). Le paludisme à P.
knowlesi se présente classiquement comme un accès simple sans spécificité, mais il peut évoluer vers une forme grave
hyperparasitémique partageant la même sévérité clinique potentiellement létale que le paludisme grave à P. falciparum (mais
sans atteinte cérébrale).
Enfin, une rupture ou un infarctus de la rate peut se voir avec toutes les espèces plasmodiales, en particulier dans les
tableaux d'évolution subaiguës avec P. falciparum sous chimioprophylaxie insuffisamment efficace et P. vivax. Il faut
évoquer cette hypothèse devant une splénalgie ou un collapsus brutal inexpliqué justifiant une échographie en urgence et une
prise en charge médicochirurgicale adaptée.
T107-1 : Critères du paludisme grave d'importation de l'adulte à Plasmodium falciparum # §
Pronostic Fréquenc
Critères cliniques ou biologiques
péjoratif e
Toute défaillance neurologique incluant :
+++ - obnubilation, confusion Q, somnolence Q, prostration, convulsion(s) +++++
- coma avec score de Glasgow < 11
Toute défaillance respiratoire incluant :
+++ - si VM ou VNI : PaO2/FiO < 300 mmHg +
- si non ventilé : PaO2, < 60 mmHg et/ou SpO2 < 92 % en air ambiant et/ou FR > 30/min
- signes radiologiques : images interstitielles et/ou alvéolaires
Toute défaillance cardiocirculatoire incluant :
- pression artérielle systolique < 80 mmHg et/ou présence de signes périphériques d'insuffisance
+++ ++
circulatoire (< 60 mmHg Q chez l’enfant < 5 ans)
- nécessité de drogues vasopressives et lactate > 2 mmol/L
++ Hémorragie (définition clinique) hémoglobinurie macroscopique = accès grave Q+ +
+ Ictère Q : clinique ou bilirubine totale > 50 μmol/L QA +++
+ Anémie profonde : hémoglobine < 7 g/dl QA, hématocrite < 20 % Q +
A
+ Hypoglycémie Q+++ : glycémie < 2,2 mmol/L Q +
Acidose :
+++ - bicarbonates plasmatiques < 15 mmol/L QA ++
- ou acidémie avec pH < 7,35 (surveillance rapprochée dès que bicarbonates < 18 mmol/L)
+++ Hyperlactatémie : > 2 mmol/L QA a fortiori > 5 mmol/L ; pas LDH QXXXXX ++
+ Hyperparasitémie : dès que parasitémie > 4 % Q +++
++ Insuffisance rénale Q : créatininémie > 265 μmol/L ou urée sanguine > 20 mmol/L +++
# Si Plasmodium vivax : mêmes critères sans parasitémie > 4 % (car rarement > 2 %), anémie ictère fréquents, quelques cas de
SDRA, rareté de l'atteinte neurologique et de l'acidose. § Si Plasmodium knowlesi : mêmes critères mais hyperparasitémie dès
que > 2 %, atteintes hépatique et rénale fréquentes, atteinte neurologique très rare. Splénomégalie ne fait pas partie de
l’accès pernicieux Q (elle avec hyperplaquettose Q sont de bon pronostic Q) ; L'abolition des réflexes ostéotendineux, en
particulier du réflexe rotulien, est considérée comme un élément de mauvais pronostic Q
3. Qui hospitaliser ?
• Tout terrain à risque Q→ : grossesse Q, enfant Q et patient splénectomisés et immunodéprimés Q
• Devant tout signe de gravité ET tout élément à risque de s’aggraver (plaquette < 50000, HB < 10 g/l QA, créatinémie >
150 et parasitémie > 2 % Q qui est différent de critère de gravité : HB < 7 et parasitémie > 4 %)
• Devant tout signe faisant suspecter une mauvaise observance de traitement
• Si impossibilité de suivi ou de consulter en cas d’aggravation
4. Paludisme viscéral évolutif ET splénomégalie palustre hyperimmune :
Rare, le paludisme viscéral évolutif est une forme subaiguë ou chronique qui s'observe :
- En zone d'endémie chez l'enfant en cours d'acquisition de sa prémunition
- Lors d'infestations parasitaires répétées chez des sujets expatriés se soumettant plus ou moins régulièrement à une
chimioprophylaxie ou prenant des traitements antipaludiques partiellement efficaces
- Chez des émigrés ne vivant plus en zone d'endémie.
Tout se passe comme si l'expression aiguë, bruyante du paludisme était atténuée pour laisser place à une infection subintrante.
Le tableau associe :
- Une altération progressive de l'état général : asthénie, anorexie, amaigrissement
- Une fébricule irrégulière à 38 °C, parfois absente
- Une anémie chronique pouvant être intense, avec ses complications propres
- Un subictère, parfois
- Une splénomégalie, constante, souvent importante avec risque d'infarctus ou de rupture splénique
- Une élévation des lgG sériques
- Une parasitémie très faible (parfois non détectable) et surtout une sérologie palustre très positive.
Le paludisme viscéral évolutif est à différencier de la splénomégalie palustre hyperimmune avec forte élévation des lgM
sériques, taux très augmenté des anticorps antipaludiques, infiltrais lymphocytaires hépatospléniques et surtout
régression très lente de la splénomégalie après traitement. La parasitémie est en règle indétectable. Ce syndrome est
d'origine dysimmunitaire. Il a été rapporté que certains patients ont présenté ultérieurement des hémopathies.
Le traitement antipaludique de ces 2 entités est mal codifié mais la tendance actuelle est de traiter comme une forme commune
4. Rupture splénique :
Tout paludisme, même paucisymptomatique, est susceptible d'être compliqué d'une rupture de rate. Ceci s'observe surtout en
cas d'infection à P. falciparum sous chimioprophylaxie inadaptée, à P. vivax, et plus rarement à P. ovale ou P. malariae.
La rupture peut être partielle avec hématome sous-capsulaire, responsable d'une douleur de l'hypochondre gauche, ou
complète avec hémopéritoine et collapsus. Il s'agit d'une urgence diagnostique et thérapeutique qui impose un avis
chirurgical immédiat.
5. Fièvre bilieuse hémoglobinurique :
Cette complication exceptionnelle s'observait surtout chez des sujets vivant en zone d'endémie, sous prophylaxie irrégulière
ou après traitements itératifs et incomplets par la quinine. Dans les heures suivant la prise de quinine, apparaissait
brutalement une hémolyse massive avec hémoglobinurie, fièvre, ictère, oligurie puis choc mais sans trouble de la
conscience au début. Des cas analogues ont été rapportés avec l'halofantrine Q ou la méfloquine. Le mécanisme est de nature
immunoallergique. [Halofantrine est le traitement de l’accès simple Q et traitement présomptif du paludisme Q]
En dehors du traitement symptomatique, l'arrêt immédiat de l'antipaludique déclencheur s'impose et le recours à
l'artésunate est indispensable pour traiter un paludisme avéré. [Quinine, halofantrine et méfloquine sont à proscrire
définitivement chez ces patients].
6. P. malaria :
Il sévit sur les 3 continents, de manière beaucoup plus sporadique (plus rare que les autres Q), il se différencie des autres
espèces par une incubation plus longue (15 à 21 jours), par une périodicité différente de la fièvre (cycle érythrocytaire de 72
heures responsable d’une fièvre quarte) et surtout par sa capacité à entraîner des reviviscences très tardives (jusqu’à 20 ans
après le retour de la zone d’endémie → très grande longévité de l’infection Q), il se caractérise par sa sensibilité constante
à la chloroquine Q (nivaquine) qui garde sa place dans les infection à p. vivax, p. ovale ou p. malariae ou p. knowlesi
Arguments du diagnostic :
1. Délai d'incubation :
Il est de 7 jours minimum après la piqûre infectante (durée de l'étape hépatique) et < 2 mois pour P. falciparum dans 95 %
des cas Q, mais ne rechute pas même sans traitement Q ! (des accès plus tardifs sont parfois observés chez des émigrés ou
des femmes enceintes). Pour P. vivax, P. ovale et P. malariae, les premières manifestations cliniques surviennent au plus tôt 15
jours après la piqûre infectante (o et v, 18 jours pour m) souvent plusieurs mois ou années après le retour. Quant à P.
knowlesii, l'incubation est de 9 à 12 jours.
• Incubation de P. falciparum est à connaitre afin d’évoquer le diagnostic :
- Incubation minimum : 7 jours +++
- Incubation maximale : 2-3 mois QA
• P. vivax et ovale : maximale = 3 ans QA+ ; P. malaria : maximale = 10 ans
2. Notion d'exposition au risque :
Devant une fièvre, le praticien doit rechercher la notion de séjour, même bref (escale de quelques heures) ou ancien, en zone
d'endémie palustre. Une exposition présumée au risque doit faire rechercher un paludisme en urgence, quels que soient les
symptômes associés à la fièvre et même si une chimioprophylaxie correcte a été suivie !!!
3. Examens biologiques :
• Examens d'orientation :
- L’hémogramme montre une hémoglobine souvent normale au début de l'accès, l'absence d'hyperleucocytose ou une
leuconeutropénie Q et surtout une fréquente thrombopénie (qui n’est pas un critère de gravité Q). Un syndrome
mononucléosique est possible. NFS = thrombopénie Q, anémie Q et leucopénie Q [pancytopénie pour toi]
- La CRP Q peut s'élever progressivement, dépassant parfois 100 mg/L. L’élévation de la procalcitonine a une valeur
diagnostique et pronostique modérée. L’électrophorèse des protéines sériques montre un profil hyper-alpha2.
- Il existe des signes biologiques d'hémolyse dont l'intensité est liée au délai d'évolution (hyperbilirubinémie libre,
élévation des LDH, baisse de l'haptoglobine). Une cytolyse hépatique modérée (< 10N) peut être observée.
NB : paludisme ne donne pas d’hyperéosinophilie QX+++++ ! comme amibe Q, trypanosomiase Q, leishmaniose viscéral
Q
• Examens de confirmation :
Les prélèvements doivent être accompagnées des renseignements épidémiologiques et cliniques indispensables : pays de
séjour, date de retour, prise ou non d'une chimioprophylaxie antipaludique et/ou d'un traitement curatif. La confirmation du
diagnostic du paludisme doit être obtenue en urgence par l'utilisation appropriée d'examens de laboratoire selon un algorithme
prenant en compte les performances et la disponibilité
Goutte épaisse et frottis sanguin :
Ces examens doivent être réalisés en urgence, sans attendre un pic fébrile. Ils permettent la mise en évidence des parasites.
On en attend :
- Le diagnostic positif de paludisme Q
- Le diagnostic d'espèce Q
- La parasitémie Q (densité parasitaire exprimée en nombre d'hématies parasitées/μL ou en pourcentage)
- Il permet aussi le suivi après traitement Q+++++++++ : à J3 Q, J7 Q et J28 Q
Ces examens microscopiques doivent être lus en urgence par un biologiste qualifié et averti. La réponse doit être
communiquée au clinicien par le laboratoire dans les 2 heures QB suivant le prélèvement en indiquant la ou les espèces
identifiées (associations possibles) et la parasitémie.
La valeur prédictive négative du frottis-goutte épaisse n'est pas de 100 %. Tout prélèvement sanguin s'avérant négatif doit
donc être renouvelé après 12 à 24 h, pour détecter les faibles parasitémies (P. falciparum sous chimioprophylaxie, autres
espèces, accès « décapité » par traitement probabiliste) si la suspicion clinique persiste.
Tests de diagnostic rapide (TDR) par détection antigénique :
Si la recherche microscopique reste l'examen de référence, des techniques immunologiques utilisant des bandelettes
antigéniques permettent un diagnostic rapide sur sang total. Les antigènes recherchés sont [des protéines (HRP-2, pLDH)] Q
spécifiques d'espèce ou de genre. [HRP2 et pLDH dans TDR, pas goutte épaisse QXXX]
[Leur sensibilité (pas sensibilité QX) est > 95 % pour des parasitémies > 100 parasites/μL → il peut y avoir de faux négatif
si parasitémie faible Q] mais de l'ordre de 70 % pour des parasitémies plus faibles, voire nettement moins pour P. ovale.
Leur spécificité pour le paludisme est de 90 à 95 %. Elles permettent parfois le diagnostic d'espèce quand l'examen
microscopique ne le permet pas. Elles ne nécessitent pas d'expertise particulière. Les tests de diagnostic rapide doivent être
associés au frottis-goutte épaisse pour le diagnostic microscopique du paludisme Q++
Les résultats de ces tests doivent aussi être rendus au clinicien dans les 2 h suivant la réception du prélèvement.
Cependant, le test utilisant l'antigène HRP-2 peut rester positif 2 à 3 semaines après un paludisme. [Ce test ne pourra pas
être utilisé pour le diagnostic d'une rechute après traitement Q].
Biologie moléculaire :
Récemment, la biologie moléculaire (PCR) est devenue la technique la plus sensible et la plus spécifique pour le diagnostic du
paludisme d'importation. La recherche de paludisme par PCR permet la détection de parasitémies très faibles et
l'identification des espèces plasmodiales.
Elle constitue la seule méthode permettant de différencier P. knowlesi et P. malariae. Dans ce contexte, la PCR se positionne
actuellement comme la méthode de référence pour le diagnostic de recours (et non d'urgence) en cas de difficultés
diagnostiques.
Cependant, des techniques de biologie moléculaire rapides avec un délai de rendu de résultat < 1 heure sont disponibles et
seraient compatibles avec le diagnostic d'urgence, avec une sensibilité qui permet d'exclure, en cas de résultat négatif, un accès
évolutif. Leur positionnement doit être discuté localement en fonction de l'organisation des laboratoires.
Sérologie :
La sérologie établit l'immunité anti-plasmodium lors d'infestations répétées, l'intérêt de la sérologie est rétrospectif
(rattacher au paludisme un épisode fébrile Q ou au paludisme viscéral une HSMG Q) ou épidémiologique Q. Elle a un intérêt
aussi dans le paludisme transfusionnel Q+, possible, est exceptionnel ; le sang peut être contaminé alors que la sérologie est
encore négative chez le donneur mais ces quelques faux négatifs ne remettent pas en cause, à ce jour, les stratégies de
sélection des donneurs et de dépistage du paludisme.
Au total : la confirmation diagnostique est une véritable urgence. Pour cela on aura recours aux examens suivants :
- Frottis sanguin Q
- Goutte épaisse Q
- Test de diagnostic rapide Q (indispensable en urgence en attendant la confirmation du diagnostic microscopique par
un laboratoire expérimenté)
4. Diagnostic différentiel :
L’enquête étiologique d'une fièvre avec notion de séjour en zone tropicale impose la recherche urgente de paludisme étant
donné sa fréquence et sa gravité potentielle, mais le praticien doit évoquer en parallèle d'autres infections, exotiques ou
cosmopolites et garder à l'esprit de la possibilité d'associations morbides. Tout comme la recherche microscopique de
paludisme, les hémocultures sont systématiquement pratiquées (mais à ne pas cocher si contexte évocateur QX !). Selon le
contexte épidémiologique, le délai depuis le retour, les symptômes et les examens biologiques standard, et le cadre nosologique
(hépatite ? pneumonie ? fièvre isolée ? ...), on pourra s'orienter vers une infection cosmopolite (urinaire, respiratoire, biliaire,
intestinale, grippe, infection à VIH) ou plus spécifiquement tropicale, bactérienne (fièvre typhoïde, rickettsiose, leptospirose,
borréliose ...), virale (hépatites virales, arbovirose, fièvre virale hémorragique, infection à VIH), parasitaire (amoebose
hépatique, leishmaniose viscérale, bilharziose ou autre helminthose en phase d'invasion, trypanosomose africaine).
Attitude thérapeutique :
Le choix du médicament pour le traitement du paludisme d'importation dépend de l'espèce en cause.
1. Les antipaludiques :
Les antipaludiques sont essentiellement des médicaments agissant sur les formes érythrocytaires des parasites Q++++
(schizonticides). Action essentielle d’interférer avec la synthèse de l’ADN parasitaire au niveau des hématies et d’agir au
niveau des membranes cellulaires

• Les combinaisons à base de dérivés de l'artémisinine (ACT)


Elles sont indiquées en 1ère intention dans le paludisme non compliqué d'importation à P. falciparum. Elles sont caractérisées
par la rapidité de la clairance parasitaire. Leur tolérance générale est bonne. Sur le plan cardiaque, ces deux associations
peuvent être responsables d'un allongement du QT mais sans conséquence clinique dans les études réalisées. Elles partagent
donc les contre-indications suivantes : antécédents familiaux de mort subite ou d'allongement de l'intervalle QT,
antécédents personnels d'allongement de l'intervalle QT, prédispositions cardiaques d'arythmie, désordres électrolytiques
(hypokaliémie, hypomagnésémie), association avec (ou d'utilisation récente) d'autres médicaments connus pour augmenter
l'intervalle QT et insuffisance hépatique sévère.
Chez les patients présentant un risque plus élevé de développer une arythmie cardiaque ou un allongement de l'intervalle QT,
une surveillance ECG est recommandée au cours des 24 à 48 heures suivant le début du traitement par ACT. Un allongement
du QTc > 500 ms (risque majoré de troubles du rythme ventriculaire) contre-indique la poursuite du traitement par ACT et
justifie la mise en place d'un autre traitement antipaludique curatif.
Association artéméther-luméfantrine :
L’artéméther-luméfantrine (cp 20 mg/120 mg) est indiqué en 1ère intention dans le traitement curatif du paludisme non
compliqué de l'adulte et de l'enfant de > 6 mois et pesant au moins 5 kg.
Cet antipaludique, d'efficacité rapide, y compris sur des souches de P. falciparum chloroquinorésistantes ou
multirésistantes, doit être administré avec un repas ou une boisson lactée à raison de 1 prise de 4 cp à H0, H8, H24, H36,
H48 et H60 (soit 1 prise 2 fois par jour pendant 3 jours chez l'adulte et l'enfant > 12 ans, soit > 35 kg). Chez l'enfant entre 5 kg
et 35 kg, la posologie est à adapter en fonction du poids. Cette association est envisageable après le 1er trimestre de
grossesse
Artéméther-luméfantrine = vérifier espace QT à l’ECG Q (comme quinine)
Association arténimol-pipéraquine (aussi appelée dihydroartémisininepipéraquine)
L’arténimol-pipéraquine (cp 40 mg/320 mg) est également un traitement de 1ère intention du traitement curatif autorisé en
France pour le traitement du paludisme à P. falciparum de l'adulte et l'enfant de > 7 kg depuis son AMM européenne en 2012.
Cette association antipaludique est rapidement efficace, y compris sur des souches chloroquinorésistantes ou
multirésistantes. Elle doit être administré à jeun avec un peu d'eau, sans aliment à raison d'une prise quotidienne à heure fixe
pendant 3 jours.
Chez l'adulte de 75 kg et plus, la posologie est de 4 cp/j pendant 3 jours (aucune donnée permettant d'adapter au-delà de 100
kg) ; pour un poids entre 36 et 75 kg, la posologie est de 3 cp/j sur 3 jours.
L’association arténimol-pipéraquine n'est pas recommandée pendant le premier trimestre de grossesse.
Les patients ne doivent pas recevoir > 2 cures d'arténimol-pipéraquine par an et il faut respecter un intervalle minimal de
deux mois entre les cures du fait de la longue demi-vie de la pipéraquine.
• Atovaquone-proguanil :
Cette association est recommandée en 2ème intention pour le traitement du paludisme à P. falciparum du fait d'une absorption
digestive irrégulière et d'une clairance parasitaire plus lente exposant à une moindre efficacité que les ACT. Elle se prescrit
chez l'adulte et l'enfant de > 40 kg (environ 12 ans) en 1 prise de 4 cp (cp 250 mg/100 mg) à 24 heures d'intervalle pendant 3
jours consécutifs Q (soit 12 cp au total) avec un repas ou une boisson lactée.
Chez la femme enceinte, les troubles digestifs (notamment vomissements) sont l'effet indésirable principal, imposant parfois
un changement thérapeutique. L’atovaquone-proguanil est réservée au traitement des formes simples en cas de suspicion de
chloroquinorésistance ou de multirésistance et en l'absence d'autres alternatives.
• Artésunate :
Ce dérivé de l'artémisinine (quinghaosu) se caractérise par un pouvoir parasiticide très rapide et puissant sur les souches
plasmodiales circulantes.
L’artésunate IV a fait preuve d'une meilleure efficacité que la quinine dans le paludisme grave à P. falciparum (1/3 de
mortalité en moins). Ce médicament est uniquement disponible en milieu hospitalier dans le cadre d'une ATU nominative à
validation différée, nécessitant un indispensable prépositionnement de cette molécule dans les hôpitaux susceptibles de prendre
en charge des cas de paludisme grave.
La posologie est de 2,4 mg/kg à H0, H12, H24 puis tous les jours pendant 3 jours, puis relais par un traitement oral de première
ligne à pleine dose, de préférence l'une des deux ACT ; en cas de contre-indication à l'usage de la luméfantrine ou de la
pipéraquine, utiliser atovaquone-proguanil.
Depuis mars 2013, il est le traitement de référence du paludisme grave à P. falciparum, le traitement IV par quinine (avec
dose de charge pour l'adulte) restant la recommandation dans les hôpitaux ne disposant pas d'un prépositionnement
d'artésunate.
L’utilisation d'artésunate pour un paludisme grave peut être suivie par une anémie hémolytique tardive en rapport avec le
mécanisme d'épépinage (pitting) splénique qui permet l'expulsion « mécanique » du trophozoïte de l'hématie infectée. Un
suivi spécifique est recommandé : recherche des signes cliniques d'anémie et des stigmates biologiques d'hémolyse à J7, J14,
J21 et J28, en parallèle au suivi parasitologique (frottis à J3, J7, J28).
• Quinine :
Elle reste active face à la chimiorésistance mais elle peut manquer d'efficacité sur quelques souches de P. falciparum en
provenance d'Asie du Sud-Est (zones frontalières Thaïlande-Myanmar-Laos-Cambodge) et d'Amazonie.
La quinine orale est devenue un médicament de 3° intention.
La voie IM est à proscrire Q (risque de nécrose musculaire).
La forme IV est indiquée dans 2 situations :
- En cas de vomissements empêchant la prise des associations d'ACT ou d'atovaquone-proguanil. Elle est relayée dès
que possible (24 à 48 heures) par une cure complète d'un antipaludique oral, de préférence un ACT
- En cas de paludisme grave quand l'artésunate n'est pas immédiatement disponible.
Dans les paludismes graves ou les accès palustres avec vomissements, on utilise les sels de quinine IV quelle que soit
l'espèce en cause. La posologie est de 8 mg/kg/8 h en 3 perfusions d'au moins 4 h dans du sérum glucosé Q 5 % ou 10 % ou
de 24/mg/kg en IVSE Q sur 24 h. Cette dernière modalité d'administration est à privilégier en cas de paludisme grave avec une
dose de charge de 16 mg/kg sur 4 h chez l'adulte en l'absence de contre-indication (T107-2).
Des signes d'imprégnation en quinine, ou cinchonisme (céphalées, vertiges, nausées, acouphènes, hyperacousie,
amaurose) surviennent fréquemment après 2 jours de traitement. [Un surdosage, notamment par administration trop rapide,
peut entraîner une hypoglycémie Q, des troubles visuels, une hypotension Q artérielle, des troubles de la conduction (pas de
rythme QX) intracardiaque Q, voire la mort]. Dans les formes graves, ou en cas d'insuffisance hépatique ou rénale, ou lors
de poids extrêmes, il est utile de doser la quinine (objectif : 10-12 mg/I). La quinine n'est pas contre-indiquée pendant la
grossesse Q. [Hypoglycémie = effet secondaire de la quinine, pas chloroquine QX]
Méfloquine (uniquement chez l'enfant en curatif) :
Cet amino-alcool a une demi-vie longue. La méfloquine (cp 250 mg) est active sur les souches résistantes à la chloroquine.
Elle est indiquée dans le traitement curatif des accès simples de l'enfant quand les ACT ne sont pas possibles. Ses effets
secondaires potentiels, parfois gênants en prophylaxie (sensations vertigineuses et nauséeuses), peuvent être plus graves au
cours de traitements curatifs, allant jusqu'à de rares manifestations neurologiques (dont convulsions) ou psychiatriques,
réversibles.
Elle est contre-indiquée chez les sujets prenant des bêtabloquants très ralentisseurs, chez ceux ayant des antécédents de
troubles psychiatriques ou de convulsions, chez les enfants de < 5 kg et chez la femme qui allaite. La posologie est de 25
mg/kg en 3 prises sur un seul jour en curatif.
Chloroquine Q++ :
Parmi les amino-4-quinoléines, seule la chloroquine (cp 100 et 300 mg, c. mes. 25 mg) est encore utilisée pour les espèces
plasmodiales autres que P. falciparum Q. La dose recommandée est de 10 mg/kg immédiatement (maxi : 600 mg), puis 5
mg/kg (maxi : 300 mg) à H6, H24 et H48 dans le traitement des formes simples, sans vomissement, causées par P. vivax
(sauf si présomption de résistance à la chloroquine), P. ovale, P. malariae, P. knowlesi. Médicament bien toléré aux doses
recommandées et pouvant être prescrit chez la femme enceinte Q, la chloroquine peut être mortelle par toxicité cardiaque
après une prise unique de 25 mg/kg.
Primaquine : intra-hépatique !
La plupart des antipaludiques n'agissent que sur les parasites intraérythrocytaires et n'empêchent pas la persistance des
hypnozoïtes de P. vivax ou P. ovale. Les amino-8-quinoléines, dont la primaquine, agissent contre les formes parasitaires
hépatiques, empêchant les rechutes causées par ces 2 espèces plasmodiales. La primaquine peut être prescrite dès le premier
épisode à la posologie de 30 mg/j chez l'adulte pendant 14 jours en complément d'un traitement par la chloroquine. Ce
médicament est à utiliser avec précaution, avec notamment des modalités d'administration adaptées, chez les sujets
déficients en G6PD QB (risque d'hémolyse grave ; dosage préalable indispensable) (on peut dans certains cas avoir recours au
protocole allégé de l'OMS) et n'est disponible [qu'en ATU nominative] Q (primaquine est délivrée sur ATU Q). La
tafénoquine, approuvée par la FDA en 2018, pour la cure éradicatrice de P. vivax en dose unique et la prophylaxie de P.
falciparum et P. vivax n'est pas encore disponible en France et en Europe. La primaquine reste contre-indiquée chez les
patients avec un variant B de déficit en G6PD Q, les femmes enceintes, allaitantes et les enfants de < 6 mois.
2. Indications :
• Paludisme à P. Falciparum :
Tout retard au traitement d'un paludisme peut être fatal si P. falciparum est en cause.
Le paludisme grave doit être toujours traité par voie veineuse Q (artésunate ou à défaut quinine) en réanimation (grave = IV
même s’il ne vomit pas !). Il est recommandé d'hospitaliser les jeunes enfants dans tous les cas.
En cas de vomissement unique, il est possible d'administrer une première dose par voie orale, mais la survenue d'un nouveau
vomissement dans l'heure suivant la prise impose un passage à la quinine IV sans dose de charge. Les formes non
compliquées, sans intolérance digestive, sont traitées par voie orale. Le paludisme non compliqué avec vomissements itératifs
doit être traité par voie intraveineuse avec apport contemporain de glucose et relais oral dès que possible après contrôle ECG
Les deux antipaludiques de première ligne sont les ACT. Atovaquone-proguanil et [quinine IV sont utilisables uniquement en
2ème intention (en raison principalement de leur profil de tolérance)]
Après 3 jours d’artésunate, un traitement par anti-palustre oral de 1ère ligne à pleine dose doit être instauré, de préférence
contenant un dérivé de l’artémisinine [après 3 jrs d’artésunate : artéméther-luméfantrine PO Q et contrôle du parasitémie Q]
La présence des gamétocytes à J3 de traitement de falciparum ne traduit pas un échec du traitement et ne modifie pas la
PEC [gamétocytes à J3 = succès du traitement, relais par artéméther-luméfantrine Q]
La prise en charge ambulatoire est réservée aux patients adultes ne présentant aucun des critères d'hospitalisation suivant :
signe(s) de gravité, terrain à risque (splénectomie, grossesse, âge avancé, comorbidités notamment), intolérance digestive
empêchant un traitement oral, plaquettes< 0,5 G/L, hémoglobine< 10 g/dL, créatinine > 150 μmol/L, parasitémie > 2 %, facteurs
socioculturels ou économiques compromettant l'achat et/ou la bonne observance du traitement, personnes vivant seules,
éloignement d'un centre hospitalier, absence de médicaments immédiatement disponibles en pharmacie, impossibilité de suivi,
notamment aux 3° et 7° jours du traitement. La première prise est supervisée dans la structure de santé et la surveillance est
organisée. [Accès palustre falciparum simple = atovaquone-proguanil Q ou artéméther-luméfantrine Q]
Particularités chez la femme enceinte :
Chez la femme enceinte, le paludisme non compliqué à P. falciparum justifie une hospitalisation (urgence thérapeutique Q)
et peut être traité par la quinine ou l'atovaquone-proguanil lors du 1er trimestre. A partir du 2ème trimestre, l'artéméther-
luméfantrine doit être privilégié.
Particularités chez l'enfant :
Le traitement de première ligne est une des 2 ACT : artéméther-luméfantrine QB ou arténimol-pipéraquine QB. La
méfloquine et l'atovaquone-proguanil sont des médicaments de deuxième intention, indiqués par exemple en cas
d'intolérance, de contre-indication ou d'échec d'un traitement par ACT. La quinine orale est devenue un médicament de
troisième intention.
Chez le nouveau-né, le traitement est en général débuté par artésunate IV QB. La quinine IV peut être discutée. Le relais per
os peut se faire par un ACT (discussion au cas par cas). Un contact avec un centre expert en prise en charge du paludisme
pédiatrique est recommandé dans cette situation.
T107-3 : Indications et modalités d'administration des antipaludiques selon les formes cliniques du paludisme à
Plasmodium falciparum chez l'adulte
Forme non compliquée sans vomissements Forme non compliquée avec vomissements
En première intention : - Quinine intraveineuse en perfusion lente (> 4 h) dans sérum
Artéméther-luméfantrine PO ou arténimol-pipéraquine glucosé à 5 % à raison de 8 mg/kg de quinine-base toutes les 8
PO heures ou en continu avec pousseseringue électrique à raison
En deuxième intention : de 24 mg/kg/j. Dès l'arrêt des vomissements, relais PO
Atovaquone-proguanil PO préférentiellement par une des deux associations à base de
En troisième intention : dérivés de l'artémisinine
Quinine PO
Paludisme grave de l'adulte, la femme enceinte et l'enfant
- Prise en charge en réanimation :
• Administration en urgence d'artésunate IV (2,4 mg/kg à H0, H12, H24 puis tous les jours pendant 3 jours, puis relais par
un traitement oral de première ligne à pleine dose, de préférence par l'une des deux associations comprenant un dérivé de
l'artémisinine (chez l’enfant avec forme grave, artésunate IV en 1ère intention Q comme l’adulte même si VMT !)
• Si artésunate non immédiatement disponible, débuter quinine en continu à la seringue électrique ou en perfusion d'une durée
de 4 h dans du sérum glucosé à 5 ou 10 % dose de charge de 16 mg/kg chez l'adulte sur 4 h puis, 4 heures après la fin de la
dose de charge, 8 mg/kg toutes les 8 h ; un relais par artésunate IV est souhaitable le plus tôt possible, dans les 24 heures.
Surveillance électrocardioscopique et glycémique jusqu'à disparition des signes de gravité et de la parasitémie (quininémie
optimale : 10 à 12 mg/I).
La dose de charge n'est pas recommandée chez l'enfant et ne doit pas être pratiquée en cas de traitement antérieur par quinine
(dans les 2 jours précédents), par halofantrine ou méfloquine (dernière prise< 12 h) ou si allongement espace QTc.
• Si l'état clinique et la surveillance ECG le permettent chez un patient ayant repris une alimentation orale, le relais est pris
par un des 3 antipaludiques de 1ère ligne (traitement complet de 3 jours), voire par la quinine PO (durée totale
d'administration de quinine : 7 j).
• En cas de paludisme avec forte suspicion de multirésistance (zones frontalières Thaïlande-Myanmar-Laos-Cambodge ou
Amazonie) : quinine associée à la doxycycline : 200 mg/j x 7 j.
- Traitements associés :
Glucose 30 % IV à 1 ml/kg si hypoglycémie majeure (surveillance systématique des glycémies capillaires toutes les heures
durant la dose de charge, puis toutes les 4 heures, car risque d'hypoglycémie induite par la quinine)
Apports hydroélectrolytiques modérés (risque d'œdème aigu du poumon lésionnel)
Transfusion de concentrés globulaires si Hb < 7 g/100 ml ou selon le terrain
Traitement antibiotique en cas de sepsis sévère ou choc
Oxygénothérapie, éventuellement assistance ventilatoire
Épuration extrarénale si nécessaire
■ Paludismes à P. vivax, P. ovale, P. malariae et P. Knowlesi :
Tout paludisme dû à une espèce non identifiée doit être traité en urgence comme un paludisme à P. falciparum.
[Tout paludisme à P. malariae, sévère et/ou hyperparasitémique, au retour d'Asie du Sud-Est est considéré comme pouvant
être P. knowlesi Q++++ et doit être traité par artésunate IV ou à défaut par quinine IV comme P. Falciparum].
La présence de vomissements justifie le recours à la quinine IV selon le protocole pour le paludisme non grave à P. falciparum
; l'artésunate IV n'a pas cette indication en 2019 en France.
[Le traitement du paludisme non compliqué à P. non falciparum (P. vivax, P. ovale, P. malariae) repose sur la chloroquine
per os QB+++ ou un ACT (non grave non falciparum qui ne vomit pas = chloroquine voie orale en 3 jours QA)]
Ce dernier sera préféré en cas d'infection mixte ou de paludisme à P. vivax survenant au retour d'une zone de résistance à la
chloroquine.
Pour P. vivax et P. ovale, le traitement de l'accès par chloroquine est associé à un traitement par primaquine Q+ (30 mg/j
pendant 14 jours sur ATU après vérification de l'absence de contre-indication) pour éradiquer les hypnozoïtes hépatiques (et
ainsi éviter les récidives). La primaquine n'est pas indiquée pour P. malariae ni pour P. knowlesi.
3. Suivi du traitement :
Quelle que soit la forme plasmodiale responsable du paludisme, la surveillance est à la fois clinique (température et fonctions
vitales) et biologique (hématologie, biochimie). Elle est identique chez l'adulte et chez l'enfant.
Les formes compliquées doivent bénéficier d'un suivi parasitologique quotidien jusqu'à négativation. Pour tous les
paludismes, un suivi parasitologique microscopique est recommandé à H72 (la parasitémie doit être < 25 % de la valeur
initiale), J7 (la parasitémie doit être négative) et J28 pour vérifier l'efficacité du traitement.
La chimioprophylaxie antipaludique n'est pas reprise après un traitement curatif. Le patient est informé de la possibilité
d'une rechute clinique.
Étant donné le risque de rupture splénique qui existe avec toutes les espèces plasmodiales, toute activité physique et sportive
est proscrite pendant 14 jours après le début du traitement pour tout patient atteint de paludisme, même pauci- ou
asymptomatique.
Le paludisme d'importation dans les DROM-COM et le paludisme autochtone sont à déclaration obligatoire (selon TB : les
cas d’importation ne sont pas à déclaration obligatoire Q). Les cas de paludisme d'importation inhabituels du fait du pays
de contamination, ou d'évolution défavorable doivent être signalés au Centre National de Référence du paludisme.
Prévention :
La prophylaxie individuelle s'adresse aux expatriés et aux voyageurs, touristes ou émigrés en visite familiale dans leur pays
d'origine. Il existe plusieurs candidats vaccins en expérimentation pour la population vivant en zone d'endémie. En 2019,
aucun vaccin n'a montré une efficacité suffisante à l'échelon individuel et collectif.
La première mesure à prendre en termes d’efficacité concernant la prévention du paludisme est la protection antivectorielle
Q+++. La chimioprophylaxie seule n’assure pas une protection totale
1. Protection contre les piqûres d’anophèles ou Protection Personnelle Anti Vectorielle :
Indispensable complément de la chimioprophylaxie, elle repose sur :
- Utilisation de moustiquaires imprégnées d'insecticides pendant le sommeil, et pour des séjours prolongés,
aménagement des locaux par la pose de fins grillages métalliques aux ouvertures
- Répulsifs cutanés reconnus pour leur efficacité antimoustiques et leur innocuité humaine, à appliquer lors de la veillée,
en lotion, aérosol ou crème, sur les parties découvertes
- Dès la tombée de la nuit, port de vêtements amples, couvrants et de chaussettes, au mieux, imprégnés d'insecticides.
- Insecticides d'utilisation domestique : aérosols, tablettes insecticides se sublimant à la chaleur électrique, plaquettes de
résine imprégnées 1 de dichlorvos, tortillons de résines imprégnées de pyrithrénoïdes.
2. Prévention médicamenteuse :
La chimioprophylaxie reste le pilier de la prévention même s'il faut en connaître les limites : même bien prise et adaptée, elle
n'empêche pas l'infestation, ni les manifestations cliniques tardives d'un paludisme à P. vivax ou P. Ovale (hypnotique !)
Elle fait essentiellement appel à 5 antipaludiques qui ne sont délivrés que sur prescription médicale. Le tableau T107-4 détaille
les molécules.
La chimioprophylaxie s'adresse aux sujets se rendant surtout en zone d'endémie avérée à P. falciparum Q (de nombreuses
grandes villes, sauf en Inde et en Amazonie, et de nombreux lieux de séjours touristiques situés en Asie et Amérique latine sont
actuellement indemnes). En cas de séjour conventionnel en Asie du Sud Est ou en Amérique du Sud, la prophylaxie anti-
paludique n'est ainsi plus recommandé (BEH 2018). Elle doit être efficace dès l'arrivée en zone de transmission. Les prises
doivent [débuter 10 jours Q avant l'arrivée pour la méfloquine afin d'évaluer la tolérance], ou [le jour de l'arrivée pour les
autres molécules : chloroquine Q : du 1er jour au dernier jour du voyage + 8 semaines après Q] chloroquine est active
contre les formes intra-érythrocytaires QA
La chimioprophylaxie est maintenue pendant tout le séjour et pendant un délai de 4 semaines Q après la sortie de la zone à
risque, sauf pour la méfloquine (hebdomadaire 10 jours avant et 3 semaines après Q car longue demi-vie) et l'atovaquone-
proguanil (7 jours après Q car activité parasitaire sur P. falciparum au cours de sa phase hépatique). La durée maximale
d'administration autorisée de l'atovaquone-proguanil est limitée à 3 mois. Chloroquine, chloroquine-proguanil, méfloquine
sont autorisés chez la femme enceinte (ainsi qu'atovaquone-proguanil s'il n'y a pas d'autre alternative).
• Si prophylaxie vers zone non résistante : chloroquine 100 mg/j QA le jour du départ, durant tout le séjour et 4 semaines
après le retour
• Si prophylaxie vers zone résistante : méfloquine 1 cp de 250 mg/semaine, une semaine avant le départ, pendant tout le
séjour et 3 semaines après [méfloquine seulement pour groupe 3 Q]
NB : la doxycycline et la chloroquine doivent être poursuivis 4 semaines après le retour Q
Groupe de résistance :
• Groupe 1 : Zone sans chloroquinorésistance. – Ce groupe concerne essentiellement les pays d’Amérique centrale
(Mexique Q), Haïti et la République dominicaine → chloroquine Q++++++++++
• Groupe 2 : Zone de chloroquinorésistance isolée. – Inde Q en partie et Sri Lanka → chloroquine-proguanil QB
(Savarine® ou Malarone®) ou atovaquone-proguanil
• Groupe 3 : Zone de prévalence élevée de chloroquinorésistance et de multirésistance → atovaquone-proguanil,
doxycycline (possible si 1er trimestre Q) ou méfloquine per os QB si pas accès grave – Le nombre de pays classés dans ce
groupe augmente constamment. On y trouve maintenant tous les pays d’Afrique subsaharienne (l’est et centre) Q. Ce
groupe comprend aussi tout le bassin amazonien et les zones dites de multirésistance d’Asie du Sud-Est Q (en particulier
les régions frontalières entre la Thaïlande, le Laos, le Cambodge, le Myanmar et le Vietnam). On y trouve également
désormais Madagascar et la Guyane française Q.
Le choix de l'antipaludique doit tenir compte :
- Des zones visitées, selon les résistances aux médicaments antipaludiques
- De l'intensité de la transmission ;
- Des conditions, de la durée et de la période du séjour ;
- De l'âge et du poids du voyageur ; De ses antécédents pathologiques ;
- D'une possible interaction avec d'autres médicaments
- D'une précédente intolérance à un antipaludique ;
- D'une grossesse en cours ou envisagée ;
- De l'évaluation de l'observance en fonction des modalités de prise ;
- Des capacités financières du voyageur.
3. Traitement présomptif d'urgence (ou de réserve) :
Ce traitement de réserve peut être discuté individuellement dans des circonstances qui incitent à ne plus poursuivre une
chimioprophylaxie voyages fréquents et répétés ou expatriations prolongées de > 6 mois.
L’hypothèse d'un paludisme doit être évoquée lors d'un épisode fébrile survenant 7 jours ou plus après l'arrivée en zone
d'endémie. Le recours à un traitement présomptif antipaludique en automédication peut se justifier chez un voyageur situé à
> 12 heures d'une structure de soins. Ce traitement de réserve utilisera préférentiellement l'artéméther-luméfantrine ou
l'arténimol-pipéraquine, en tenant compte pour cette dernière association du risque d'allongement de l'espace QTc sous
traitement. Dans ce dernier cas, on préfèrera l'association atovaquone-proguanil. Il est nécessaire de préciser au patient la
nécessité de consulter un médecin dès que possible afin de ne pas négliger une autre infection. De plus, il doit être rappelé
que le traitement d'épreuve est limité aux zones isolées et n'a pas sa place après le retour en métropole.
4. Cas particulier de la femme enceinte :
La chimioprophylaxie est particulièrement recommandée lors de la grossesse en raison des risques maternels et fœtaux en
cas de paludisme.
La chloroquine Q et l'association chloroquine-proguanil Q peuvent être prescrites sans réserve Q en termes d'embryo-
foetoxicité sous réserve de l'actualisation des RCP en cours. Leur efficacité est cependant limitée dans les zones de
résistances à la chloroquine : leur choix se limite donc aux situations où il n'y a pas d'autres solutions (contre-indication des
autres molécules). En l'absence de contre-indication, la méfloquine peut être utilisée Q.
En cas d’allaitement, les antipaludéens passent dans le sang du bébé Q+ mais ne sont pas CI Q+++++++
Les données sont rassurantes quant à l'utilisation de l'atovaquone-proguanil, et ce pendant toute la durée de la grossesse
(www.lecrat.org). La doxycycline est déconseillée. Principal effet secondaire de la doxycycline : phototoxicité Q
Quelques remarques :
Le signe biologique le plus courant en faveur d’un paludisme évoluant depuis longtemps est : la neutropénie Q+++
Il peut exister une association entre plusieurs espèces chez le même malade Q

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