Vous êtes sur la page 1sur 8

Dr K.

Apoline SONDO/ep OUEDRAOGO


Maître de Conférence Agrégé de Maladies infectieuses
UJKZ : UFR/SDS
MASTER I MEDECINE 2019

LA FIEVRE JAUNE

Objectifs
1. Définir la Fièvre jaune
2. Décrire les signes cliniques et para cliniques du typhus amaril à la période
d’état
3. Citer 5 éléments du diagnostic de certitude (direct et indirect) de la fièvre
jaune
4. Citer au moins 6 diagnostics différentiels de la fièvre jaune
5. Énumérer 4 mesures de prévention de la fièvre jaune

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 1
1-Généralités

1.1. Définition

La fièvre jaune est une arbovirose (virus transmis par les arthropodes) due au virus
amaril, à tropisme hépatorénal, transmis par la piqûre de moustique appartenant au
genre Aedes et Haemagogus.

1.2. Intérêts

Epidémiologique
-Elle sévit dans 34 pays d’Afrique noire et 11 pays d’Amérique latine. Environ 200000
cas par an selon l’OMS.
C’est une maladie zoonose épidémique, très contagieuse, à déclaration obligatoire et
soumise au règlement sanitaire international.
Elle fait partie des maladies dites ré-emergentes, avec les autres fièvres
hémorragiques africaines.
Elle est responsable d’épidémies en Afrique : en 2008 et 2009 (Côte d’Ivoire,
Burkina, Faso, Guinée), au Sénégal en 2002, 2003, 2005 et 2006, en Ouaganda en
2016.
C’est une maladie d’actualité et le Burkina Faso a connu une épidémie en 2008 en
2010 et en 2011
-Pronostic : urgence médicale, mise en jeu du pronostic vital ; la létalité est élevée
du fait de sa gravité (15-50%)
-Thérapeutique
Pas de traitement étiologique d’où prévention+++ qui repose surtout sur la
vaccination antiamarile, incorporée dans le programme élargi de vaccination.

1.3 Les modalités épidémiologiques


Trois modalités épidémiologiques ont été décrites
 Le cycle selvatique ou fièvre jaune sporadique : sévit parmi les vertébrés
sauvages notamment le singe de façon enzootique avec poussées épizootiques

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 2
dans les grandes forêts. Les vecteurs sont des moustiques zoophiles comme A
africanus, A luteocephalus, A furcifer, A taylori…. En pénétrant dans les zones
forestières, l’homme peut s’infecter accidentellement.

 Le cycle rural ou fièvre jaune épidémique rurale se déroule à la lisière des forêts. Il
donne lieu à des cas sporadiques et à de petites épidémies. Le vecteur est A
simpsoni (Afrique) et A Haemagogus (Amérique)

 Le cycle urbain ou fièvre jaune épidémique urbaine. Le vecteur est Aedes Aegypti.
Il réalise des épidémies rapidement extensives.

2 Signes
2.1. Type de description : l’hépatonéphrite amarile (typhus amaril)
 Incubation : brève et silencieuse (3-6 jours)
 Invasion : brutale marquée par
une fièvre à 39-40°C et des frissons
Un syndrome algique intense et généralisé prédominant au niveau
céphalique donnant des céphalées en coup de marteau, au niveau lombaire en coup
de barre lombaire et au niveau épigastrique
 Troubles digestifs : nausées, vomissements…
 Signes nerveux : agitation et délire
 Période d’état
Elle est caractérisée par la succession de 2 phases (phase rouge et phase
jaune), entrecoupée d’une période de rémission trompeuse
 Phase rouge : Elle correspond à la période virémique et dure 3 jours et
marquée par :
- une fièvre élevée et une exacerbation du syndrome algique, de la
symptomatologie digestive et neurologique
- Apparition d’un syndrome congestif donnant au patient un faciès
vultueux ( rouge et bouffi) avec des lèvres et des paupières oedématiées, une langue
rouge vif : c’est le masque amaril
- le syndrome hémorragique est discret : epistaxis, gingivorragies …
- Le syndrome rénal se traduit par une oligurie.

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 3
 Phase de rémission : Elle survient au quatrième- cinquième jour et dure
moins de 24 heures Les signes régressent avec sensation de bien être qui
inaugure l’installation de la phase jaune

 Phase jaune (phase hépatorénale) : elle s’installe au quatrième jour


- la fièvre est à 40° avec dissociation du pouls,
- les signes digestifs réapparaissent et
- l’atteinte hépatique se manifeste par
. un ictère d’intensité variable
.un syndrome hémorragique profus avec vomissement de sang noirâtre
(vomito négro), moelena, puis se généralise rapidement intéressant les
téguments et toutes les muqueuses avec purpura, gingivorragies,
épistaxis, hématuries, métrorragie : « tout est congestif au début, tout
saigne à la fin »
. une encéphalopathie : syndrome irritatif, agitation et des troubles de la
conscience de profondeur variable
- L’atteinte rénale se manifeste par une anurie

L’exploration para clinique confirme l’atteinte hépatorénale :


Au niveau du foie :
- Une cytolyse majeure : élévation des transaminases
- Une insuffisance hépatocellulaire : chute du taux de prothrombine
- Hyper bilirubinémie surtout conjuguée
Au niveau du rein :
- protéinurie massive et hyperazotémie
-↑ créatininémie
-Cylindrurie , Hématurie
L’hémogramme est normal

 Evolution
 Surveillance
- Clinique (Clinique: SF, constantes, examen des appareils, hémorragie,
conscience, ictère…)
- Stigmates biologiques d’atteinte hépatique et rénale
 Modalités
L’évolution se fait vers la guérison ou la mort entre le 5è et le 7è jours dans un
tableau de défaillance hépatique (coma hépatique) ou rénale (coma urémique) ou
par choc hémorragique.
La guérison se fait au prix d’une asthénie résiduelle très importante. Passé le 11è
jour, l’évolution est toujours favorable.

2.2. Formes cliniques


Formes inapparentes : purement sérologiques , plus fréquentes

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 4
Formes frustres: syndromes pseudo-palustre ou grippale bénignes
Formes suraiguës: Mortelles en 2-3jours sans atteintes hépatiques et rénales,
fréquente à l’acmé de l’épidémie
Formes atypiques: atteintes viscérales dissociées ou inhabituelles : Rénale,
cadiovasculaire avec collapsus ou neuro-encéphalitique.

3 Diagnostic
3.1 Diagnostic positif
 Arguments épidémiologiques
- Absence de vaccination
- Notion de contage
- Contexte d’épidémie
 Arguments cliniques
-Fièvre ictèro hémorragique
-Hépatonéphrite aigue fébrile

Arguments paracliniques
Eléments d’orientation : signes biologiques d’hépato-néphrite (cf)
Les éléments de certitude obtenus après acheminement des prélèvements au niveau
du laboratoire de référence, P3, P4.

 Diagnostic direct
Le virus peut être recherché dans la première semaine de la maladie à partir du
sang, des urines, du foie des reins, des ganglions, de la rate et de l’encéphale.
Isolement du virus dans le sang et les urines.
- L’isolement se fait par inoculation au souriceau nouveau et par culture
cellulaire
- L’identification se fait surtout par des techniques de biologie
moléculaire (RT-PCR)
Diagnostic indirect
- Sérologie : les anticorps apparaissent vers le 4è jours et persistent
pendant des années
- L’Elisa par immunocapture permet de distinguer les IgM des IgG.
- L’histopathologie à partir de ponction biopsie hépatique et rénale
recherche des corps de Councillman.

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 5
En pratique, le diagnostic indirect est fait et le sang envoyé au centre Muraz qui est
le centre de référence nationale pour les fièvres hémorragique ; la confirmation est
obtenue par l’institut pasteur de Dakar.

Arguments de santé publique

Définition OMS du cas pour la surveillance de la Fièvre jaune

 Cas présumé
Une maladie caractérisée par une fièvre d’apparition brutale suivie d’un ictère dans
les 2 semaines suivants les premiers symptômes
ET
De l’une des manifestations suivantes :
- Saignement nasal, gingival ou gastro-intestinal
- Décès survenu dans les 3 semaines suivant l’apparition de la maladie

 Cas confirmé
Un cas présumé qui est confirmé par les résultats de laboratoire OU lié à un autre
cas confirmé ou à une flambée

 Flambée
Une flambée de Fièvre jaune est définie par l’existence d’au moins un cas confirmé

3.2Diagnostic différentiel
• A la phase de début
– Paludisme simple
– Fièvre typhoïde,
– Méningite
– Grippe,
– Hépatite virale,
– Autres arboviroses : dengue, fièvre de Lassa et chikungunya
– Septicémies
– Infections à rickettsie, leptospirose, MNI

A la phase d’état
– Paludisme grave, fièvre bilieuse hémoglobinurique
– Hépatites fulminantes
– Autres fièvres Hémorragiques (Dengue, F. V. Rift, Ebola…)

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 6
– Méningococcémie,
– Sepsis sévères avec défaillance multiviscérale
– Leptospiroses, Rickettsiose
– Hépatite toxique: médicamenteuses ou non, intoxication au
Tétrachlorure de Carbone

3.3Diagnostic Etiologique
 Germe
Le virus
Le virus amaril est un virus à ARN monocaténaire, enveloppé, du genre Flavivirus et
de la famille des Togaviridae
Le réservoir de virus
Il est constitué par le singe, le moustique et l’homme.
Le vecteur : ce sont des arthropodes du genre Aedes et Haemagogus
Porte d’entrée : Transmission se fait par la piqure de moustique
Terrain : Sujets réceptifs
- Sujets non vaccinés
-Certaines professions
- Agriculteurs
-Forestiers
-Chasseurs

4. Traitement
Buts
-Assurer l’homéostasie
- Eviter les complications
-Traiter les complications

Moyens
-Solutés de réhydratation et électrolytes
-Transfusion sanguine (Sang frais) ou Plasma de convalescent
-Antipyrétique : Paracétamol (50 mg/kg/24 heures en 3 prises)
-Anti émétiques, anticonvulsivants : diazépam ou phénobarbital, vitamine K1

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 7
4.1 Traitement curatif
Le traitement est uniquement symptomatique. Il repose sur :
- Rééquilibration hydro électrolytique, antiémétique
- Transfusion sanguine
- Vitaminothérapie K
Eviter l’acide acétyla salicylique et autres anti inflammatoires

4.2 Traitement préventif


 Isolement du malade sous moustiquaire
 Déclarer la maladie
 Lutte antivectorielle
Assainissement
Destruction des gîtes larvaires
Insecticides
 Vaccination

Le vaccin anti- amaril 17 D Rockefeller administré en sous cutané dès 9 mois intégré
dans le PEV. Ce vaccin s’administre à une dose de 0.5 ml par voie sous cutanée. Il
protège à partir du 10è jour à vie. Les contre-indications ne sont valables qu’en
dehors des épidémies. Ce sont la grossesse, l’immunodépression et l’allergie aux
œufs.

 Vaccination des voyageurs


 Surveillance épidémiologique

Conclusion
La fièvre jaune est une arbovirose grave, justifiant l’importance de la lutte
antivectorielle et de la vaccination de masse à l’échelle nationale.

Pr Ag Ouédraogo/ Sondo KA p. 8

Vous aimerez peut-être aussi