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Fièvre typhoïde

1/ Introduction
1.1/ Définition

Toxi-infections généralisées, endémo épidémiques très contagieuses, dues à l’ingestion de


bacilles à Gram négatif appartenant à l’espèce Salmonella enterica dont 4 sérotypes sont
responsables de la maladie : Salmonella typhi et Salmonella paratyphi A, B et C
1.2/ Intérêt
- Problème de santé publique dans PVD : ce sont des " maladies des mains sales" ou maladies
du péril fécal, à déclaration obligatoire
- Gravité: complications fréquentes et imprévisibles (Fièvres à surprises)
- Prévention: hygiène alimentaire, vaccination
- Traitement: résistance au chloramphénicol et avènement des fluoroquinolones

2/ SIGNES
2.1/ Type de description : Forme commune de la fièvre typhoïde du sujet jeune non
vacciné
→ Incubation : 7 à 15j, silencieuse ou diarrhée fugace (12è ou 48è Heure) suivie d’une
anorexie et d’un malaise généralisé.
→ Invasion ou phase de septicémie ou phase des oscillations ascendantes de Jacoud :
Elle est d’installation progressive, marquée par les signes évocateurs suivants (CIVEF):
céphalées frontales tenaces, constipation, insomnie, vertiges, épistaxis (rare) et fièvre
d’installation progressive, sans frissons.
Il s’y associe des signes moins spécifiques à type d’inconfort gastrique, toux sèche, asthénie
et anorexie.
L’examen retrouve : une fièvre (38 – 40°C) avec une courbe de température progressivement
croissante donnant l’aspect typique de courbe en escalier, un début de dissociation pouls-
température, une langue saburrale (sèche et recouverte d’un enduit blanchâtre), un
gargouillement de la FID, une discrète splénomégalie et des râles bronchiques.
A ce stade, le diagnostic est évoqué devant l’existence d’un contage et l’absence de
vaccination. La réalisation d’une hémoculture permet de confirmer la maladie et de débuter le
traitement. 
→ Phase d’état ou phase toxique ou 2ème septénaire
A cette phase, le tableau est complet et traduit une infection généralisée avec des signes
généraux importants et une atteinte multi-viscérale surtout digestives et neuropsychiques.
- Signes généraux : dissociation pouls-température nette marquée par une courbe de
température en plateau à 40-41°C alors que le pouls est mou dicrote et en retard (<100
battements/min) sur la température. Asthénie intense, abattement, bradypsychie, négligence
corporelle.
- Signes digestifs : diarrhées faite de 5 à 6 selles par jour, très fétides et d’aspect "jus de
melon" avec un abdomen ballonné et sensible, un gargouillement de la fosse iliaque droite,
une langue saburrale ou fuligineuse (enduit couleur de suie), une splénomégalie et parfois une
hépatomégalie.
- Signes neuropsychiques : tuphos ++ caractérisé par un état de torpeur avec prostration,
indifférence à l’entourage et délire doux, onirique, vespéral ; mouvements carphologiques et
insomnie.

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- Signes ORL : angine de Bouveret-Duguet caractérisée par des exulcérations fugaces,
indolores, ovalaires, unilatérales ou bilatérales siégeant au niveau des piliers antérieurs du
voile du palais et parfois au niveau amygdalien.
- Signes cutanés : tâches rosées lenticulaires à type de macules congestives ± moins saillantes,
arrondies et fugaces, siégeant aux confins du thorax et de l’abdomen et à la racine des
cuisses.
L’examen sera complet, à la recherche systématique de complications au niveau des différents
appareils et système.
Les signes paracliniques d’orientation sont : une accélération de la VS, une CRP élevée et
une leuconeutropénie. La confirmation du diagnostic est apportée par le sérodiagnostic de
Widal et Félix, la coproculture et hémoculture,
→ Evolution
- Eléments de surveillance :
Réalisation d’un examen clinique biquotidien en particulier digestif (aspect de l’abdomen et
des selles), cardio-vasculaire, neurologique…
Prise de constantes : courbe de température et pouls, TA, FR, diurése
Réalisation d’examens paracliniques : NFS, coproculture, ECG
- Modalités évolutives
* Guérison rapide sous traitement (2 semaines) parfois spontanée et plus tardive (4 semaines),
avec pour critères de guérison : 2 coprocultures négatives en 48H d’intervalle ou 7j
d’apyrexie.
* Décès dans les formes suraiguës ou après complications
* Complications à redouter sous traitement ou non : nombreuses et inopinées +++
On distingue selon le mécanisme en cause :
. Les complications septiques à type d’hépatite, de cholécystite et plus rarement d’ostéites ou
d’ostéoarthrites surtout chez les drépanocytaires, endocardites, de néphrotyphus, pneumo
typhus, phlébites etc…
. Les complications liées à l’imprégnation toxinique responsable d’atteintes intestinales
(hémorragies, perforations, appendicite, pancréatite), cardio-vasculaires (myocardite,
collapsus, troubles du rythme) et cérébrales (encéphalite, méningite, troubles psychiques).
* Rechutes : liées souvent à un portage chronique, vésiculaire.
2.2/ Formes cliniques
2.2.1. Formes symptomatiques
- Formes frustes ou typhus levissimus ou typhus ambulatoires : fièvre prolongée,
traînante avec altération progressive et importante de l’état général. Elles sont parfois
révélées par des complications.
- Formes suraiguës ou malignes : incubation courte, début brutal, tableau d’emblée
sévère avec défaillance cardio-vasculaire et troubles neuropsychiatriques.
- Formes trompeuses : prédominance de certains symptômes tels qu’une défaillance
cardiaque, une pneumonie ou une bronchite, un syndrome méningé, une néphrite
aiguë, une hépatite aiguë, une ataxie, parfois des complications digestives….
2.2.2. Formes selon le terrain
- Enfant : formes aigues et trompeuses, faisant évoquer une appendicite ou une gastro-
entérite aigue.
- Femme enceinte : formes graves avec risque d’avortement ou d’accouchement
prématuré.
- Sujet vacciné : formes frustres et bénignes
- Personne âgée : forme insidieuse avec adynamie importante et risque élevé de
décompensation cardiaque.
2.2.3. Formes associées

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- Typhomalaria : caractérisé au début par des accès de fièvre intermittente ou des clochers
thermiques évocateurs et à la phase d’état par une fiévre irrégulière, une hépatomégalie, une
anémie. Forme grave à cause du risque de survenue de complications ou d’un accès
pernicieux
- Fièvre typhoïde associée à une amibiase : syndrome dysentérique sévère avec altération
importante de l’état.

3/ DIAGNOSTIC
3.1. Diagnostic positif
- Arguments épidémiologiques : absence de vaccination, consommation d’aliments
suspects, contexte épidémique ou de toxi-infection alimentaire communautaire (TIAC),
contact avec un malade
- Arguments cliniques :
CIVEF, dissociation pouls-température, tuphos+++, diarrhée d’aspect jus de melon, tâches
rosées lenticulaires.
Entérocolite aiguë, atteintes extra-digestives diverses
- Arguments biologiques : leuco neutropénie
Mise en évidence du germe par hémoculture, coproculture, myéloculture, culture des
urines, du LCR ou de pus.
Mise en évidence des ac dirigés contre les constituants du germe : sérodiagnostic de
Widal et Félix (agglutinines-O >1/100 à partir du 8ème jour et agglutinines-H >1/200 à partir
du 12ème jour). Cet examen est cependant peu spécifiques avec de nombreux faux-positifs.
3.2. Diagnostic différentiel
- Paludisme : Zone d’endémie, fièvre irrégulière, frissons intenses, hépatomégalie, goutte
épaisse positive.
- Brucellose : Groupes à risques (bergers, vétérinaires, employés d’abattoirs, bouchers)
Fièvre ondulante sudoro-algique, adénopathies périphériques, arthrites, orchites.
Hémoculture et sérodiagnostic de Wright positifs.
- Tuberculose : Contage, toux chronique, AEG. IDR positive, lobite apicale avec
excavations et bacilloscopie positive.
- Autres septicémies : Contexte clinique (porte d’entrée), fiévre, frisson solennel, sueurs,
métastases suppurées.

3.3. Diagnostic étiologique


- Germes :
 Salmonelles majeures : Salmonella enterica sérotype typhi (Bacille d’EBERTH)
et sérotypes paratyphi A, B, C. Germes à parasitisme intracellulaire facultatif,
munies de flagelles (ag H), d’une paroi qui contient l’endotoxine (ag O) et une
capsule (ag capsulaire ou " Vi ") pour S. typhi et paratyphi C.
- Porte d’entrée : digestive par transmission oro-fécale directe ou indirecte
* Contamination indirecte +++ (eau souillée, légumes crus contaminés, fruits de mer
et coquillages contaminés, laitages, charcuterie, aliments mal conservés…)
* Contamination directe (selles, linge souillé…)
- Terrain : hémoglobinopathies, infection à VIH et autres causes d’immunodépression …
4/ TRAITEMENT
4.1. Traitement curatif
4.1.1. Buts
- Lutter contre les germes
- Eviter la survenue de complications
- Traiter les complications

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4.1.2. Moyens
- Conseils hygiéno-diététiques : repos, régime semi-liquide sans résidus (lactés,
bouillons) ou diéte hydrique. Insister sur la réhydratation et les balnéations.
- Antibiotiques
* Phénicolés (Chloramphénicol, Thiamphénicol) : 50mg/kg/j sans dépasser 3g/j chez
l’adulte pendant 14 à 21 jours. Doses progressives.
* Bétalactamines : Ampicilline ou Amoxicilline 6g/j pendant 14 à 21 jours.
C3G : Ceftriaxone 75mg/kg/j sans dépasser 4g/j pendant 5 à 10 jours.
* Fluoroquinolones : Péfloxacine 400mg x2/j, Ofloxacine 200 x2mg/j, Ciprofloxacine:
500mg x2/j pendant 07 à 10 jours.
* Macrolides: Azithromycine 1000 mg/j en PU pendant 7jours.
- Adjuvants :
Corticoïdes (méthyl prednisolone : 1mg/kg/J en dose unique ou en 24- 48 H)
Antipyrétiques antalgiques : paracétamol (en cas d’hyperthermie majeure)
Sang et dérivés (Plasma) ou succédanés (colloïdes et cristalloïdes)
- Chirurgie : digestive, orthopédique
4.1.2. Indications
Hospitalisation systématique et surveillance rigoureuse +++
- Formes simples : Conseils hygiéno-diététiques, antibiothérapie à dose curative
- Formes graves ou compliquées : diète hydrique, antibiothérapie à doses progressives,
fractionnées ou arrêt. Corticothérapie, transfusion, réanimation et chirurgie.
b/ Salmonelloses mineures
- Entérocolites du sujet immunocompétent : mesures hygiéno-diététiques, traitement
adjuvant (réhydratation, antipyrétiques), antibiothérapie pendant 3 à 5 jours.
NB : Les antidiarrhéiques sont contre-indiqués.
- Entérocolite du sujet immunodéprimé : antibiothérapie systématique pendant 07 jours.
- Formes systémiques : antibiothérapie à base de C3G ou de fluoroquinolone pendant 02
semaines si bactériémie isolée ou 02 à 06 semaines si suppurations associées et chirurgie si
nécessaire.
4.2. Traitement préventif 
- Déclaration obligatoire
- Vaccination : * Typhim Vi (vaccin polyosidique capsulaire) : 1 injection puis des
rappels tous les 03 ans (à partir de 02 ans). Protection : 95%
* Vaccin oral, vivant atténué (Suisse)
* TAB (vaccin bactérien inactivé) : 3 inj en sous cutané à 15j
d’intervalle, puis rappel tous les 5 ans. Effets secondaires importants.
- Mesures d’hygiène individuelle : Hygiéne des mains, hygiène de l’eau de boisson,
hygiène des aliments (cuisson, désinfection, bonne conservation).
- Mesures d’hygiène collective: lutte contre le péril fécal (construction de latrines en
milieu rural, système d’évacuation et de traitement des déchets en milieu urbain,
réglementation de l’utilisation d’engrais humain, contrôle de l’industrie alimentaire…)
5/ CONCLUSION
Maladies du péril fécal et des mains sales
Maladies aux complications multiples, inopinées et souvent graves.
Prévention par la vaccination mais surtout le respect des mesures d’hygiène individuelles et
collectives.

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