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Texte 3  Alcool d’Apollinaire (1913), modernité poétique ?

« Les Colchiques » (vers 1 à 15)


Introduction
• Guillaume Apollinaire  poète français du XXe siècle
• Alcool (1913) = Recueil particulièrement autobiographique  écrit principalement
suite à ses ruptures amoureuses  raconte ses souffrances
• « Les Colchiques » écrit en 1902 durant sa relation amoureuse, évoque avec un
tableau mélancolique son amour pour Annie Playden.
• Titre porteur de sens  renvoie une image négative de la femme car c’est une plante
venimeuse qui fait référence à l’automne
• Apollinaire avec son recueil réinvente un lyrisme nouveau en mélangeant tradition et
modernité.
• Sans ponctuation, ni régularité de mètre ou de rime.
Comment ce poème renoue-t-il tradition et modernité ?
I. Un paysage bucolique (v 1 à 7) II. Cadre bucolique détruit (v 8
à 12)
III. Le retour au calme (v 13 à 15)

I/ Un paysage bucolique (v 1 à 7)
- v.1 « est »  présent de vérité général  impression d’une scène immuable.
« vénéneux », « joli »  antithèse  cela inverse l’ordre positif/négatif afin de
mettre « vénéneux » en valeur.
« automne »  terme prosaïque rare en poésie  volonté d’innover (=
modernité). Dans ce poème, « automne » apparait anaphoriquement à trois reprises
(v.1, v.6, v.15)  place le poème sous l’égide de la mélancolie.
- v.2-3  Alexandrin brisé ralentit le rythme du texte, il est accompagné de l’adverbe
« lentement », renforcé par l’assonance en [an] (« paissant », « lentement »,
« empoisonnent »).
- v.4-5 « colchique », « couleur », « comme »  allitération occlusive en [k], consonne
dure qui montre le danger.
- v.5  L’absence de ponctuation donne l’impression agrammaticale que ce sont les
yeux qui fleurissent  cela accentue la comparaison entre la femme et la fleur ce qui
est aussi mise en évidence par la comparaison introduite par « comme ».
- v.1-5  « Le pré », « vaches », « paissant », « colchique », « lilas », « fleurit »,
« fleur »  champ lexical de la nature  paysage bucolique
- v.6 « Violâtre comme leur cerne et comme cet automne »  La comparaison femme-
fleur est négative comme l’indique « Violâtre », ‘âtre’ = suffixe négative. + diérèse qui
laisse imaginer « violent ». Cela donne une image négative du « cerne », symbole de
mort  On se demande ainsi si la femme n’est pas elle-même victime de son poison.
- v.7 « Et ma vie / pour tes yeux / lentement / s’empoisonne » = tétramètre (= vers
composé de 4 éléments rythmiques) régulier qui imite un rythme funéraire  symbolise
l’amour malheureux pour Annie Playden

II/ Cadre bucolique détruit (v 8 à 12)


- v.8-10  assonance en [a] (« fracas », « harmonica ») + allitération en [k] (« école »,
« hoquetons, « colchiques ») qui imite le vacarme des enfants  cela provoque la
rupture de la lenteur et de l’harmonie visible dans le choix du mot « harmonica ».
- v.11 « paupières »  Progression dans le champ lexical du regard : « yeux »,
« cernes », « paupières ». Cela imite aussi la progression de la mort, en effet nous
pouvons associer éveil à « yeux », fatigue à « cernes » et mort à « paupières », cette
progression dépeint notamment l’effet que provoque le poison.
- v.12  Répétition de « battent »  insiste sur la violence de l’amour.
« dément »  qualifie l’état du poète  la nature reflète ses émotions.
« tes paupières / qui battent comme les fleurs »  comparaison étrange mais qui
a son origine dans la floraison inversée des colchiques. Les vers ne sont plus des
alexandrins  montre la puissance du poison qui agit même sur la métrique. Mais si
on décide d’élider (= ne pas compter les syllabes se terminant par un e devant les
consonnes), on retrouve des alexandrins  volonté de bouleverser les codes.

III/ Le retour au calme (v 13 à 15)


- v.13  retour au calme marqué par l’adverbe « doucement », mis en valeur par
l’intensif « tout » et le retour de l’assonance en [an].
- v.14-15 « Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent / Pour toujours » 
euphémisme  impression que le poète disparait. De plus, nous pouvons constater
que le poème se referme sur lui-même.  La fin du poème est donc plutôt
énigmatique.

Conclusion
Nous pouvons conclure qu’Apollinaire renoue tradition et modernité. En effet, on
perçoit dans « Les colchiques » le début d’une transition entre la poésie lyrique,
statique et contemplative, et une poésie du mouvement dans le cadre de la modernité
cubiste et plus tard surréaliste. Apollinaire prend ainsi le contrepied de Ronsard qui
assimile la femme aimée à une rose dans « Mignonne allons voir si la rose… ». Au
lieu de célébrer la beauté de la rose, Apollinaire y substitue des colchiques
« violâtre(s) » qui annoncent la mort du lyrisme amoureux traditionnel.

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