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La poésie Baudelairienne est traversée par de nombreux paradoxes :

notamment entre Spleen et Idéal, Baudelaire est tiraillé entre une


aspiration vers un monde imaginaire, un paradis d’un côté et le monde réel
de l’autre.
Charles Baudelaire est un poste du XIXe siècle à la croisée de plusieurs
mouvements littéraires.
Ila écrit les Fleurs du Mal, un recueil de poèmes cherchant à trouver la
beauté dans le mal.
Le texte est le poème XXII de la première section spleen et Idéal déjà
présent dans la 1ère édition. C’est un des seuls sonnets réguliers du
recueil, il fait partie des poèmes de l'idéal. Par correspondances grâce à
l'odeur, le poète a une vision d'un ailleurs exotique et parfait presque un
paradis terrestre. Ainsi, comment les sensations provoquent-elles une
évasion vers un ailleurs exotique et intérieur ?
Dans une première partie, nous verrons le départ vers une île exotique
grâce à la femme entre les vers 1 et 8.
Et, dans un second temps, nous étudierons la description d’un port idéal
rêvé entre les vers 9 et 14.

a) V1-4:
Ouand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne,
Je respire l'odeur de ton sein chaleureux,
Je vois se dérouler des rivages heureux
Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone;

Ce poème décrit un rêve comme on le voit par l'apposition « les deux yeux
fermés ». Le lieu est imaginaire, intérieur.
Baudelaire insiste sur la temporalité avec l'adverbe « quand » et le
complément circonstanciel de temps « un soir chaud d'automne ». Nous
sommes donc dans l'été indien, propre à la rêverie.
Cependant, cela reste quand même assez flou avec l'article indéfini
« un ».
La première personne, le sujet lyrique, est mise en avant avec l'anaphore
en « je ». Face à ce « je » on observe un autre personnage une femme
évoquée par métonymie par « ton sein chaleureux », elle pourrait être
une figure maternelle.
On a déjà un aspect de synesthésie entre « respirer », « vois »,
« chaud » et le toucher est même mis en avant avec la dérivation entre
« chaud » et « chaleureux ».
Se dessine alors une parfaite harmonie, caractérisée par une suite
d'enjambements qui ne forment qu’une seule phrase sur tout le quatrain.
Nous sommes donc bien dans un poème de l'idéal, renforcé par les rimes
riches : «automne», «monotone », « chaleureux » et « heureux ».
Le paradoxe entre « je vois » et les deux yeux fermés montre une vision
intérieure.
Avec «se dérouler des rivages heureux », on devine que le sujet lyrique
est dans un
léger mouvement, il est surement dans un bateau.
Par hypallage « des rivages heureux » décrivent son bonheur à lui dont
l’éternité est soulignée par le mot monotone.
L’isotopie de la lumière au dernier vers de ce quatrain avec « éblouir » et
« soleil » qui montre que nous sommes bien dans un poème de l'idéal.

b)V5-8 :
Une île paresseuse où la nature donne
Des arbres singuliers et des fruits savoureux ;
Des hommes dont le corps est mince et vigoureux,
Et des femmes dont l’œil par sa franchise étonne.

Une île apparaît, elle est encore floue comme le souligne l’article indéfini
« une ». Elle est liée à l'exotisme, à l'idéal.
Par hypallage, cette île est paresseuse, elle désigne sûrement le sujet
lyrique dans son bateau (ici c'est une paresse positive).
Ici, nous avons une isotopie de la nature avec : « nature », « arbres » et
« fruits » qui la personnifie. Le verbe donner lui donne un visage
maternel. On est comme dans un Eden, un paradis perdu.
Le parallélisme du vers 6 ainsi que la structure en une seule phrase faite
avec les enjambements sur tout le quatrain insiste sur l’idéal de ce poème.
La multiplication des pluriels ainsi que les allitérations en [s] et en [r]
quant à elle soulignent l’abondance présentée.
L’adjectif « savoureux » fait entrer un nouveau sens dans le poème :
« le goût ».
Il y a un nouveau parallélisme aux vers 7-8, « hommes » et « femmes »
est une antithèse qui montre une complémentarité positive entre les deux
sexes.
Les hommes sont caractérisés par leur beauté, leur corps avec deux
adjectifs mélioratifs
« mince » et « vigoureux ».
Les femmes sont désignées par leur caractère franc. La franchise a deux
aspects : être honnête mais aussi libre. C’est ce qui est représenté par
métonymie avec l'oeil qui peut désigner l’expression « les yeux sont le
miroir de l’âme. »
a) V.9-11:
Guidé par ton odeur vers de charmants climats,
Je vois un port rempli de voiles et de mats
Encor tout fatigués par la vague marine,

A nouveau une seule el même phrase constitue ce tercet avec des


enjambements.
« Guidé par », le passif montre la paresse bienheureuse du poète dans
son bâteau.
Les synesthésies reviennent par répétition : « odeur » fait écho au vers 2
et « je vois » au vers 3.
L’odeur est liée à la femme comme on le voit avec l’utilisation de la
deuxième personne du singulier « ton ». On devine que cette femme est
réelle et que c'est son odeur qui provoque cette vision merveilleuse.
Au premier vers il y a une polysémie du mot charmant : tout d’abord beau,
agréable mais aussi ensorcelant pour le poète qui ne peut y échapper.
La vision se fait de plus en plus précise, le poète voit un port avec des
bateaux présentés par synecdote « de voiles et de mâts ». On devine un
port d’arrivée où l’on a envie de rester avec des bateaux fatigués. Cet
adjectif pourrait aussi désigner le sujet lyrique dans son rêve. Cette
description du port forme une hypotypose, un tableau vivant, animé par le
poète
b) V12-14
Pendant que le parfum des verts tamariniers;
Qui circule dans l'air et m'enfle la narine,
Se mêle dans mon âme au chat des mariniers.

Dans un effet circulaire, on a une nouvelle mention de la temporalité avec


l’adverbe « Pendant ».
À nouveau, nous avons un moment d'explosion des synesthésies qui se
mêlent dans trois vers.
Apparait enfin le dernier sens : l’ouï avec « le chant des mariniers ». Ce
dernier n’était pas présent à l’écrit, mais il était bel et bien là depuis le
départ avec les sons de la poésie en elle-même.
On peut voir le retour de la première personne du singulier avec « mon »
qui désigne le sujet lyrique. Cependant, ce dernier n’est jamais sujet des
verbes.
ll y a une fusion du sujet lyrique et du monde qui l'entoure, mise en valeur
avec "se mêle " au début de dernier alexandrin. Ce mélange est aussi
représenté par l’allitération en [m] sur tout le vers 14 et la rime très riche
entre « tamariniers » et « mariniers ».

Dans ce poème l'odorat permet le de part vers un monde idéal, un paradis


perdu. Baudelaire met ici en lien des correspondances tous les sens sont
évoqués et se mêlent grâce au pouvoir de la poésie. Ainsi ces sensations
nous permettent d'accéder à un ailleurs exotique et rêvé. Dans le roman :
A la recherche du temps perdu de Marcel Proust, nous retrouvons le même
mécanisme avec la madeleine de Proust.Cependant, cette fois c’est le
goût qui est à l’origine de la vision

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