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Ministère de l’Enseignement Supérieur REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE

et de la Recherche Scientifique UNION-DISCIPLINE-TRAVAIL

Institut National Polytechnique


Félix HOUPHOUET-BOIGNY
(INP-HB) Yamoussoukro

Classe Préparatoire des Grandes


Écoles Commerciales et Économiques
Option Scientifique (CPGE-ECS)

École Préparatoire Commerciale

COURS D’ECONOMIE GENERALE


Niveau : ECS 1

Les objectifs généraux du programme : Le programme d’économie a pour objectif de doter


les étudiants de la voie scientifique de connaissances qui leur permettront de mieux saisir les
enjeux économiques contemporains. La maîtrise des notions et des mécanismes développés
dans ce programme seront particulièrement utiles aux étudiants pour la poursuite de leurs
études dans les écoles de commerce et les facultés de sciences économiques.

Chargé du cours : Dr TIEMELE ECS 1 : ECONOMIE GENERALE


Enseignant-chercheur : INP-HB (DFR-GCEA) 1
Année Académique 2021-2022
PREMIÈRE PARTIE : LES FONDAMENTAUX
DE L’ECONOMIE ET L’HISTOIRE DE LA PENSEE
ECONOMIQUE

Chapitre 1 : LES FONDAMENTAUX DE L’ÉCONOMIE


 Objectif général
Connaître le champ d’intervention de la science économique et se familiariser avec les notions
de base de l’économie.
 Objectifs spécifiques
-Définir la science économique
- Différencier les différents types de biens
- Distinguer les différents types de besoins
- Présenter les principales lois économiques

INTRODUCTION
Le point de départ de l’activité économique réside dans certaines catégories de sentiments tels
que le désir de se nourrir, se loger, se vêtir, etc, que les humains éprouvent et qu’ils
s’efforcent de satisfaire par des moyens qu’ils chercheront dans leur environnement.
Cependant, en tant que matière d’enseignement, l’analyse économique est relativement
récente. En outre, Adam Smith (1723-1790) en publiant son ouvrage, La Richesse des nations,
en 1776, est considéré comme le pionnier de l’analyse économique moderne. L’étude de
l’économie suscite par ailleurs plusieurs interrogations dont celle-ci nous semble
fondamentale : pourquoi étudier l’économie ?

Section 1 : PRÉSENTATION DE L’ÉCONOMIE


1- Origine de l’économie
Le mot économie provient du grec « oîkos », qui signifie maison, et « nomos » qui représente
les règles. L’économie serait donc, dans un premier temps, l’ensemble des règles de conduite
des activités domestiques. Le terme va connaître par la suite un élargissement de son domaine
d’action à la cité ou à la nation et prendre l’appellation d’« économie politique », à ne pas

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confondre avec la notion de « politique économique » qui désigne l’action de l’État sur
l’économie afin d’atteindre des objectifs économiques.

2- Définition de l’économie
Plusieurs définitions de l’économie sont proposées par des auteurs selon leur époque et leur
courant de pensée. Selon Paul A. Samuelson dans l’Économique 1, les économistes
contemporains sont généralement d’accord sur une définition libellée à peu près comme suit :
« la science économique recherche comment les hommes et la société décident, en faisant
ou non usage de la monnaie, d’affecter des ressources productives rares à la production
à travers le temps de marchandises et services variés et de répartir ceux-ci, à des fins de
consommation présentes ou futures, entre les différents individus et collectivités
constituant la société. Elle analyse donc les coûts et profits qui résultent de meilleures
structures d’utilisation des ressources ».

Toutefois, nous proposons la définition de l’économiste français Edmond MALINVAUD, qui


nous semble relativement plus simple. Selon lui, « l’économie est la science qui étudie
comment des ressources rares sont employées pour la satisfaction des besoins (illimités)
des hommes vivant en société». Elle s’intéresse d’une part aux opérations essentielles que
sont la production, la distribution et la consommation des biens, d’autre part aux institutions
et aux activités ayant pour objet de faciliter ces opérations.

3- Objet de l’économie
La science économique pour se distinguer des autres sciences sociales et humaines qui ont
aussi pour objet l’être humain, se définit une façon particulière d’étudier les comportements
humains qui lui est propre. Elle part du constat que les hommes éprouvent des besoins
illimités mais que les ressources dont ils disposent pour les satisfaire n’existent qu’en nombre
limité (phénomène de rareté) et qu’en conséquence ils doivent faire des choix. La science
économique est ainsi perçue comme la science des choix ou science des décisions.
En somme, l’économie en tant que science s’attache dans un premier temps à décrire,
mesurer, et comprendre les choix effectués par les agents économiques. Dans un second
temps, elle cherche à bâtir des lois et des modèles pouvant servir à guider l’action politique.

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4- Problème économique fondamental
La rareté constitue le problème fondamental en économie, c’est à dire le fondement de
l’économie. Elle désigne le fait qu’une ressource n’est pas disponible à volonté ou à satiété.
Elle implique trois questions fondamentales qui constituent des problèmes majeurs que toute
société s’attèle à résoudre à savoir :
 Que ou quoi produire ? C'est-à-dire quels biens faut-il produire et en quelles
quantités ? En d’autres termes, lesquels des multiples biens et services doit-on choisir
de produire et dans quelles proportions ?
 Comment produire ? C'est-à-dire de quelle manière ces biens doivent-ils être
produits ? En d’autres termes, par qui, avec quelles ressources et selon quels procédés
techniques ?
 Pour qui produire ? C'est-à-dire pour qui ces biens doivent-ils être produits ? En
d’autres termes, qui doit être habilité à profiter des biens et services proposés par
l’appareil productif ?
Le problème de la rareté peut s’illustrer par la « frontière des possibilités de production »
d’une économie. Si l’on considère qu’il n’est possible de produire que deux biens X et Y, la «
frontière des possibilités de production » prend l’allure de la courbe de la figure 1 ci-après :

Figure 1 : Frontière des possibilités de production

NB : On appel frontière des possibilités de production, l’ensemble des combinaisons de deux


biens (X et Y) qui peut être produit en utilisant toutes les ressources disponibles. Elle traduit
un arbitrage compte tenu des ressources limitées, accroitre la production du bien X implique
de diminuer celle du bien Y.

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Les choix de production efficaces se situent sur la frontière (en A et B par exemple). A
l’intérieur de l’espace des possibilités de production, l’économie se priverait de la possibilité
de produire plus de biens X et Y (en C). Il convient donc de choisir entre produire plus de
biens X et relativement moins de bien Y, ou l’inverse.
La frontière dépend des ressources dont dispose l’économie (volume de travail, matières
premières, biens fabriqués dans le passé), mais également de l’état d’avancement du progrès
technique. Ce dernier permet d’ailleurs de déplacer la frontière vers la droite et vers le haut (le
schéma indique en pointillé un déplacement de la frontière des possibilités de production
grâce au progrès technique dont bénéficie la production de bien Y).

Section 2 : NOTION DE BESOIN


1- Définition
Le besoin est une sensation de manque qu’un individu ou un groupe d’individus cherche(nt) à
combler. On définit le besoin économique comme un manque qui peut être satisfait par
l’acquisition ou la consommation de biens et services, qui sont produits en quantités limités.

2- Caractéristiques des besoins


Les besoins sont caractérisés par leur multiplicité, leur satiabilité et leur interdépendance.

2-1- La multiplicité
Elle exprime le fait qu’il est quasiment impossible de dresser une liste exhaustive des besoins
dans la mesure où on distingue les besoins qui possèdent un caractère absolu, que l’on ressent
quelle que soit la situation des autres individus, et ceux qui ont un caractère relatif, que l’on
éprouve au contact des autres.

2-2- La satiabilité
Elle exprime le fait que l’intensité d’un besoin diminue au fur et à mesure qu’il est satisfait.
C’est le cas notamment des besoins à caractère absolu (boire et manger par exemple).

2-3- L’interdépendance
Elle désigne le fait qu’il peut exister des liens entre des besoins. Par exemple, l’achat d’une
voiture engendre le besoin de carburant.

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3- Types de besoins
Les besoins peuvent être classés selon leurs natures ou selon leur champ d’application.
3-1- Selon la nature
On distingue :
- Les besoins physiologiques, ou primaires, ou vitaux, ou fondamentaux : ce sont des besoins
de première nécessité ou de survie.
Exemple : Se nourrir, se loger, se vêtir.
- Les besoins de civilisation, psychologiques, secondaires ou sociaux : ce sont des besoins
qui naissent avec l’appartenance à une société ou à une collectivité.
Exemple : se divertir, se déplacer….
3-2- Selon le champ d’application
On distingue :
- Les besoins individuels : ce sont des besoins éprouvés ou exprimés individuellement.
Exemple : communiquer.
- Les besoins collectifs : ce sont des besoins éprouvés ou exprimés par une collectivité ; ils
sont satisfaits par des biens utiles à plusieurs personnes en même temps.
Exemple : Être éclairé dans la rue par des lampadaires, s’instruire, se soigner.

Remarque : Les besoins dépendent de la période considérée, de l’individu, et de la société


dans laquelle celui-ci évolue. En outre, les besoins sont souvent interdépendants. Par exemple,
l’achat d’une voiture engendre le besoin de carburant.

Section 3 : NOTION DE BIEN

1- Définition
Un bien est un moyen ou une ressource qui permet de satisfaire un besoin. L’économie ne
s’intéresse qu’aux biens rares, que l’on appelle biens économiques, et écarte donc du domaine
d’étude les biens libres qui, par opposition aux biens rares, sont disponibles en abondance,
comme l’air, l’eau, le soleil, le vent.
Les biens économiques se caractérisent par le fait qu’ils nécessitent un sacrifice pour être
produits (ils sont issus du travail humain ou sont susceptibles d’être commercialisé), tandis
que les biens libres s’obtiennent gratuitement et sans travail humain.

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2- Les types de biens économiques
Les biens économiques peuvent être classés selon plusieurs critères.
2-1- Selon la durée
On distingue :
- Les biens non durables : ce sont des biens qui sont détruits ou qui disparaissent par usage.
Exemple : les aliments, le carburant, etc.
- Les biens semi-durables : ce sont des biens qui ont une durée d’utilisation relativement
courte.
Exemple : les fournitures, les petits matériels, etc.
- Les biens durables : ce sont des biens qui ont une durée de vie longue. Ils représentent les
biens d’équipement.
Exemple : les biens immobiliers, les biens mobiliers, etc.

2-2- Selon l’emploi ou la finalité


On distingue :
- Les biens de consommation finale ou biens finals : ce sont les biens qui servent à satisfaire
directement les besoins des individus.
­ Les biens de production : ce sont les biens qui servent à produire d’autres biens.
Remarque : on distingue deux types de biens de production que sont : les biens durables (ou
biens d’équipement des entreprises) et les biens intermédiaires qui sont détruits au cours du
processus de production, ou transformés et incorporés au produit final ; on les appelle biens
intermédiaires ou biens de consommation intermédiaire.
Exemple de biens intermédiaires : les matières premières.

2-3- Selon la nécessité


On distingue :
- Les biens primaires : ce sont les biens de première nécessité.
- Les biens secondaires : ce sont des biens nécessaires, mais pas indispensables.

2-4- Selon l’aspect ou la nature physique


On distingue :
­ Les biens matériels : ce sont les produits qu’on peut toucher, voir, sentir ou stocker. On les
appelle communément « biens ».

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- Les biens immatériels : ce sont des biens qu’on ne peut ni toucher, ni voir, ni sentir, ni
stocker. On les appelle communément « services ». Le service désigne une activité humaine
qui permet de satisfaire des besoins.

2-5- Selon les liens qui existent entre eux


On distingue :
Les biens complémentaires : ce sont des biens qui sont utilisés conjointement pour satisfaire
un besoin. Ils sont appelés des « compléments ».
Exemple : la pile et la torche ; la voiture et le carburant, etc.
- Les biens substituables : ce sont des biens qui sont susceptibles de satisfaire un même
besoin. On les appelle des « substituts ».
Exemple : le beurre et la margarine ; le parfum et l’eau de Cologne, etc.

3- Bien public et bien privé


3-1- Les biens publics
Ce sont des biens qui peuvent être consommés par une personne sans que les quantités
consommées par les autres individus ne soient réduites.
Exemple : l’éclairage public.

3-2- Les biens privés


Ce sont les biens dont la consommation par une personne exclut les autres individus.
Exemple : Les crèmes glacées.

Remarque : La consommation d’une glace par un individu, empêche un autre individu de


consommer la même glace. Donc pour une offre donnée de crèmes glacées, la consommation
d’un individu réduit la quantité disponible que les autres individus peuvent consommer : il y a
ici un effet d’exclusion.

Section 4 : NOTIONS DE RATIONALITÉ ET D’ARBITRAGE

1- Notion de rationalité
La rationalité suppose en effet que l’acteur choisit toujours la ou les actions qui, parmi celles
qui lui sont disponibles, lui permet(tent) d’atteindre le mieux possible l’objectif qu’il

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poursuit. Cette hypothèse de rationalité du comportement individuel est fondamentale en
microéconomie. Cependant tout comportement n’est pas nécessairement rationnel pour la
microéconomie. Pour arriver à restreindre le champ des comportements possibles, on fait
toujours l’hypothèse que l’objectif que vise à satisfaire le comportement d’un acteur possède
un minimum de cohérence interne. La propriété logique qui joue un rôle fondamental à cet
égard est la notion de transitivité. Tout objectif d’un acteur sera donc supposé avoir la
propriété de générer un classement transitif de tous les objets de choix (A doit toujours mieux
satisfaire l’objectif de l’acteur que C dès lors que B satisfait mieux l’objectif que C et que A
satisfait mieux l’objectif que B). En d’autres termes si A est préféré à B et B est préféré à C,
alors A est préféré à C.

2- Notion d’arbitrage
Les agents économiques effectuent des choix afin de maximiser leur satisfaction en fonction
de leur moyen. Ces choix sont des arbitrages économiques entre différentes possibilités. Les
agents économiques sont considérés comme rationnels. C’est la rationalité qui conduit leur
arbitrage.

Section 5 : LES AGENTS ÉCONOMIQUES


1- Définition
Un agent économique est une personne physique ou morale qui prend des décisions d'ordre
économique et qui réalise des opérations économiques. L'agent économique dispose d’une
autonomie de décisions et d'actions économiques : c’est un centre de décision économique
indépendant.

2- Les différents agents économiques


On distingue traditionnellement cinq catégories d’agents économiques regroupés selon la
fonction principale qu’ils exercent. Ce sont :
 les ménages dont la fonction principale est de consommer. On regroupe sous le terme
« ménages » l'ensemble des individus partageant le même domicile, qu’ils aient ou
non des liens de parenté. On distingue les ménages ordinaires (célibataires, familles) et
les ménages collectifs (casernes, hospices...) ;
 les entreprises dont la fonction principale est de produire des biens et services
destinés à la vente (biens et services marchands) ;

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 les institutions financières qui ont pour fonction principale la production de services
d’intermédiation financière et/ou d’activités financières auxiliaires. Elles assurent le
financement de l’économie ;
 les administrations privées qui produisent des services non marchands destinés à des
groupes particuliers de ménages et/ou des services marchands sans but lucratif
destinés aux ménages ;
 les administrations publiques qui procèdent à la redistribution des revenus et
permettent la satisfaction des besoins collectifs.

Remarque : Les opérations effectuées entre les agents résidents et les agents non-résidents
sont retracées sous le nom de « Reste du monde » ou « Extérieur ».

Section 6 : LES OPÉRATIONS ÉCONOMIQUES

1- Définition
Une opération économique est un acte par lequel un agent économique manifeste sa
participation à la vie économique.

2- Les types d’opérations économiques


On distingue :
 Les opérations sur biens et services : elles indiquent la provenance et la destination des
biens et services. Dans une économie nationale, les biens et services rencontrés
proviennent de la production nationale et des importations. Ces biens et services sont
utilisés pour la consommation, l’investissement et l’exportation ;
 Les opérations de répartition : elles sont ainsi qualifiées car elles concernent la
répartition des revenus créés entre les différents agents. Cette répartition des revenus
prend différentes formes (rémunération du travail, paiement de dividendes, loyers et
intérêts) ;
 Les opérations financières : elles recouvrent l’ensemble des relations entre agents à
capacité de financement et agents à besoin de financement. Elles portent sur les
créances et les dettes entre agents, et montrent comment les agents à besoin de
financement ont couvert ce besoin et, symétriquement, comment les agents à capacité

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de financement ont employé cet excédent (variations de monnaie ou devises,
emprunts, remboursement, etc.).

Section 7 : NOTION D’ÉQUILIBRE

De manière générale, un équilibre est une situation dans laquelle chaque acteur individuel
atteint au mieux son objectif particulier étant données les actions entreprises par les autres
acteurs et le contexte institutionnel qui les délimite. Exprimé autrement, un équilibre est une
situation dans laquelle aucun acteur individuel n’a d’intérêt particulier à modifier son
comportement.
A un système de prix d’équilibre, les décisions individuellement optimales des uns et des
autres sont par définition mutuellement compatibles. Pour chaque bien de l’économie, la
quantité totale de ce bien que souhaitent consommer l’ensemble des consommateurs est, à
l’équilibre, précisément égale à la quantité totale de ce bien produite et vendue par les
entreprises.

NB : L’insistance parfois trop importante que mettent les économistes sur les situations
d’équilibre n’est pas exempte de tout vice. En particulier, elle tend à occulter tous les
phénomènes de transition qu’entraîne le passage d’une situation d’équilibre à une autre.
L’étude du passage d’un équilibre à un autre est parfois appelée statique comparative. Comme
son nom l’indique, la statique comparative consiste en une comparaison de deux situations
(statiques) d’équilibre distinctes. La statique comparative répond ainsi à des questions de type
: qu’est-ce qui arrive à la consommation (d’équilibre) de sucre en poudre lorsque les revenus
des consommateurs augmentent ? Comment variera la quantité consommée (d’équilibre) de
véhicules à carburant diesel suite à une augmentation de la taxe actuellement prélevée sur ce
type de carburant ?, etc. Quand les micro économistes répondent à des questions de ce genre,
ils comparent deux situations d’équilibres : celle prévalant avant le changement examiné
(revenu dans un cas, taxe sur carburant diesel dans l’autre) et celle prévalant après le
changement.

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Section 8 : LES MÉTHODES DE LA SCIENCE ÉCONOMIQUE

1- Hypothèses, lois et modèles en science économique

Les économistes font apparaître des lois qui semblent gouverner le comportement des agents.
Une loi est fondée sur des hypothèses plus ou moins contraignantes qui représentent des
simplifications de la réalité. Hypothèses et lois permettent alors de construire des modèles qui
donnent une représentation théorique du fonctionnement de l’économie. Comme dans toute
démarche scientifique, les modèles sont confrontés aux faits : la validité d’une théorie repose
sur la capacité de ses conclusions à expliquer les faits.

2- Approche positive et approche normative


Une analyse positive explique pourquoi les choses et les comportements sont ce qu’ils sont.
Elle vise donc à montrer le monde « tel qu’il est » : c’est une analyse descriptive. Par contre,
une analyse normative cherche à définir ce que doivent être les choses et les comportements, à
expliquer « comment doit être » le monde.

3- Individualisme méthodologique et holisme


L’individualisme méthodologique est une méthode d’analyse des faits économiques et
sociaux qui part du principe que les phénomènes étudiés peuvent être expliqués à partir des
comportements individuels, alors que le holisme considère que les comportements individuels
s’inscrivent dans un contexte global prédéterminé (les normes et les règles d’une société, la
catégorie sociale d’appartenance etc). En conséquence, l’étude du contexte global est
nécessaire pour comprendre les actes individuels.

4- Microéconomie et macroéconomie
4-1- Définition
L’analyse microéconomique relève de l’individualisme méthodologique et prend pour point
de départ l’analyse économique à l’échelle d’un agent. Elle choisit un agent type puis, pour
passer aux grandeurs globales, elle propose d’agréger les décisions individuelles. A l’inverse,
la macroéconomie s’intéresse aux relations entre les grandeurs globales. Donc, en
microéconomie, le point de départ est l’analyse à l’échelle d’un agent économique, tandis
qu’en macroéconomie il se situe à l’échelle de tous les agents économiques. Remarque : Les

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conclusions de l’analyse microéconomique ne sont pas forcément généralisables au niveau
macroéconomique. On distingue généralement quatre problèmes d’ordre macroéconomique
qui se traduisent en quatre objectifs fondamentaux (selon Kaldor) : la stabilité des prix
(l’inflation), le plein emploi (le chômage), la croissance économique (la crise économique),
l’équilibre extérieur (le déséquilibre des échanges extérieurs).

4-2- Les interactions entre microéconomie et macroéconomie


Une décision microéconomique peut par effet d’entraînement avoir des conséquences au
niveau macroéconomique.

Décisions microéconomiques Phénomènes macroéconomiques

Les entreprises décident d’augmenter leurs prix. Inflation


Les entreprises décident d’augmenter les salaires Hausse de la consommation nationale
de leurs employés.
Les entreprises licencient un grand nombre Hausse du chômage
d’employés.
Les entreprises renouvellent leurs parcs de Hausse de la productivité
machines.
Tableau 1 : Exemple de décisions microéconomiques qui peuvent avoir des répercussions au
niveau macroéconomique.

Une décision macroéconomique peut par effet d’annonce avoir des conséquences au niveau
microéconomique.

Phénomènes macroéconomiques Décisions microéconomiques


Annonce d’une hausse de la croissance Augmentation de la production par les
entreprises
Annonce de la baisse de l’inflation Baisse des prix par les entreprises pour ne
pas être chères que les concurrents.
Annonce de relance budgétaire par l’État Investissement par les entreprises
Tableau 2 : Exemple de décisions macroéconomiques qui par effet d’annonce a des
conséquences au niveau microéconomique.

NB : il est important de noter que la macroéconomie ne s’appuie pas toujours sur une théorie
particulière des comportements individuels. Par exemple, quand une entreprise décide seule à
son niveau de diminuer les salaires de ses employés pour augmenter ses profits, elle peut
atteindre ses objectifs. Par contre, lorsque toutes les entreprises décident de diminuer les

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salaires de leurs employés pour augmenter leurs profits, le profit global des entreprises peut
au contraire tendre à la baisse car la diminution des salaires de l’ensemble des employés
tirerait les revenus à la baisse, ce qui conduirait les employés à ne pas consommer
convenablement les produits des entreprises. Par conséquent, on aboutira à une baisse des
profits de ces dernières.

CONCLUSION
L’économie, en tant que science et en tant qu’art, est étudiée pour toute une série de raisons :
pour comprendre les problèmes qui se posent aux citoyens et aux familles ; pour aider les
gouvernements tant des nations avancés que des nations sous-développées à promouvoir une
forte croissance et à améliorer la qualité de vie, tout en évitant la dépression et l’inflation ;
pour analyser les modèles les plus caractéristiques de comportements social ; pour
comprendre et changer les inégalités de la répartition du revenu et des chances.
Associée à d’autres sciences humaines ou sociales – la psychologie, la sociologie, l’histoire,
la science économique utilise les méthodes déductives de la logique et de la géométrie et les
méthodes inductives faisant appel à l’observation statistique et empirique.

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Chapitre 2 : HISTOIRE DE LA PENSÉE ÉCONOMIQUE

INTRODUCTION
L'histoire de la pensée économique examine les grandes théories économiques de manière
rétrospective. La réflexion économique apparaît chez les philosophes grecs (Aristote, Platon),
qui étudient l'économie domestique et la gestion de la cité. Au Moyen Âge, c'est la morale
chrétienne qui inspire la pensée économique (Saint Augustin, Saint Thomas d'Aquin). Entre le
XVI et le XVIIIe siècle, les mercantilistes, qui préconisent l'abondance de métaux précieux,
l'intervention de l'État et le développement de la population, rendent la réflexion économique
autonome, mais ne constituent pas encore un courant économique structuré. Au milieu du
XVIIIe siècle, les Physiocrates, avec François Quesnay, donnent une analyse économique
globale sous forme de circuit et peuvent être considérés comme des précurseurs. À partir de la
fin du XVIIIe siècle, de véritables analyses théoriques se développent, avec des économistes
dont les idées se rapprochent suffisamment pour pouvoir être considérés comme appartenant à
des « écoles de pensées ».

Section 1 : LES PRÉMICES DE LA PENSÉE ÉCONOMIQUE


1- L’antiquité gréco-romaine
La pensée antique n’est pas une pensée économique au sens propre, mais elle fait appel, par le
biais de la philosophie, à des concepts économiques intéressants. Les premiers signes de la
pensée économique apparaissent en Grèce Antique, notamment avec les philosophes. Trois
auteurs se sont particulièrement illustrés par leurs réflexions économiques : Xénophon, Platon
et Aristote.

1-1- Xénophon : l’économique comme art de la gestion domestique


C’est à Xénophon (vers 426 – 354 av. J-C.), élève de Socrate, que l’on doit le terme
«Économie ». En effet, L’Économique (Oikonomikos en grec), « L’art et la manière de bien
manager un grand domaine agricole », œuvre de Xénophon, traite du management d’un grand
domaine foncier, au plan humain et technique. Dans cette œuvre, Xénophon aborde divers
sujets à savoir : l'essence de la valeur, au sens économique du terme, l'éducation et le rôle de
la femme, la supériorité de l'agriculture sur l'artisanat, l'art de commander et de se faire obéir
(le leadership) « un don des dieux ». Xénophon s’intéresse particulièrement à l’agriculture et

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met en évidence son importance dans la production des richesses. Selon lui la terre ne « ment
pas » et « traite bien qui la traite bien ». Sur la façon de bien conduire un domaine, on
retiendra aussi que pour Xénophon, c’est à la femme que revient le rôle de l’entretien de la
maison (oikos), tandis que la politique est l’affaire des hommes et le travail celui des seuls
esclaves.

1-2- Platon : de la cité « réelle » à la Cité « idéale »


Les réflexions économiques de Platon (428 - 347 av. J.- C.) sont principalement développées
dans ses deux ouvrages majeurs que sont « La République » et « Les Lois », dans lesquelles il
imagine une cité parfaite qui repose sur le partage des biens, la morale et la justice. Cette cité
repose également sur l’éducation qui doit être parfaite pour qu’elle perdure.
Dans La République, il imagine une cité parfaite fondée sur la division du travail où chaque
homme est spécialisé dans une activité. C’est en fonction des aptitudes de chacun que le
système est créé ; les classes inférieures (les artisans et les commerçants) sont ainsi chargées
de la vie économique, alors que les classes dites supérieures (les gardiens dirigeant la cité
dont la principale qualité doit être la sagesse et les guerriers la défendant dont la principale
qualité doit être le courage) sont écartées de toute activité économique (elles se chargent de la
politique).

Par ailleurs, Platon envisage également un communisme intégral (et donc une société sans
propriété privée) qui passe par un strict contrôle « collectif » des pratiques et des relations
économiques. Lorsqu’il s’interroge dans Les Lois sur les cités possibles qui seraient à même
de se rapprocher de cet idéal, Platon y confirme que prospérité et richesse ne doivent pas être
une fin en soi et que les seules quêtes de ces cités doivent être la justice et l’harmonie sociale,
fondées sur le respect des vertus morales cardinales (sagesse, courage, justice, tempérance).

1-3- Aristote et la condamnation morale de l’enrichissement


Aristote (384-322 avant J.-C.) fut élève de Platon pendant 20 ans, avant de quitter l’école pour
cause de divergence théorique avec son maître. Il évoque les questions économiques dans
deux de ses écrits : La Politique et L’Ethique à Nicomaque, dans lesquels il expose sa
méthode d’observation des faits. Aristote, au contraire de Platon, s’oppose au communisme,
qui selon lui ne permet pas l’ordre au sein de la société. La propriété privée est pour lui
synonyme de paix sociale car les hommes ne prennent pas soin de ce qui ne leur appartient
pas directement. Ainsi, on ne peut faire reposer une société sur la mise en commun des biens.
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Aristote opère également une distinction entre l’économie (qui signifie l’autoconsommation,
et donc le travail directement pour se nourrir) et la chrématistique (l’acquisition de richesses,
et donc la consommation), en se fondant sur le même postulat que Platon : le but même de la
vie ne doit pas être l’accumulation de richesse. Selon lui, l’acquisition de richesses « naturelle
» (et donc nécessaires à la vie) permet la satisfaction naturelle et la survie du groupe. En
revanche, il existe une forme dégénérée de la chrématistique, la "chrématistique mercantile"
par laquelle on acquiert des biens à outrance, des biens superflus.

On voit ainsi la distinction entre les biens utiles à la vie, et les biens superflus. L’activité
économique doit donc se limiter à la satisfaction des besoins familiaux, et ne pas rechercher
l’enrichissement, sans quoi elle remet en cause l’ordre naturel. Aristote est le premier à définir
les trois fonctions monétaires : étalon des valeurs, moyen d’échange et réserve de valeur
(instrument d’épargne). De son point de vue, la monnaie est avant tout un « moyen »
d’échange. Puisque telle est sa nature, faire de la monnaie une finalité de l’activité
économique, une richesse en elle-même, est donc lui faire jouer un rôle contre-nature, et va
donc à l’encontre de l’ordre naturel. C’est donc par perversion que la monnaie est devenue «
principe et fin de l’échange commercial ». L’activité économique est donc condamnée dès
lors qu’elle s’écarte de la seule juste satisfaction des besoins familiaux ; l’enrichissement
(monétaire) est banni et la pratique de l’usure (bien souvent confondue avec celle de l’intérêt)
est également condamnée : faire payer un intérêt, c’est faire du profit avec la monnaie elle-
même, c’est encore une fois faire de la monnaie la finalité et non le moyen de la transaction,
alors qu’elle n’a pas été instaurée pour cet usage.

2- L’économie médiévale
L’économie au Moyen Age est dominée par la religion, par le dogme et la foi, essentiellement
dans la formulation qu’en a donné Saint Thomas d’Aquin (1226 - 1274) dans sa Somme
Théologique, qui s’inscrit parfaitement dans le prolongement d’Aristote. Elle est basée sur :
- la méfiance vis-à-vis de la richesse
On s’en tient à la parole biblique : « il est plus facile à un chameau de passer par le chas d’une
aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume des cieux ».
­ la condamnation de l’usure
L’usure et l’intérêt étaient interdits condamnés (« tu ne prêteras point ton argent à intérêt, et tu
ne prêteras point tes vivres à usure ».

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­ l’exaltation du travail
Le travail est glorifié (« tu gagneras ton pain à la sueur de ton front »). Les moines donnent
l’exemple comme l’indique la devise des bénédictins ora et labora (prie et travaille)
- la propriété privée
La propriété privée est acceptée mais le propriétaire a des devoirs vis-à-vis de Dieu et des
pauvres.
- le juste prix
Le prix ne doit contenir que la juste rémunération du travail. Profiter de la pénurie pour
augmenter les prix mène tout droit en enfer. Déjà à Rome les spéculateurs étaient condamnés
à la lapidation.

La loi de l’offre et de la demande est donc connue mais elle est rejetée comme immorale.

Section 2 : LES PRÉCURSEURS


1- Les mercantilistes
1-1- Définition du mercantilisme
Le mercantilisme est une doctrine économique qui se situe historiquement à la fin du Moyen
âge (XVIe et XVIIe siècle) et marque aussi la fin de la prééminence des doctrines de l'Église
dans l'organisation sociale. Il prône le développement économique par l'enrichissement des
nations au moyen du commerce en général, du commerce extérieur en particulier, mais aussi
de l'industrialisation.
NB : Les mercantilistes ne sont pas des « penseurs » et ils ne forment pas une école constituée
portant un regard commun sur les réalités économiques. Ce sont plutôt des « hommes de l’art
», marchands et financiers le plus souvent, « fonctionnaires » parfois, qui, dans le cadre de
leurs activités, sont aux prises avec les questions économiques, en tirent des conceptions
pratiques dont ils essaient de déduire des convictions plus générales.

1-2- La doctrine mercantiliste


Le mercantilisme est très hétérogène (diversité dans le temps et dans l’espace). Les thèmes
économiques sont principalement la réflexion sur le commerce international, le rôle de la
monnaie et l’intervention de l’État dans l’économie.

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 Le commerce international
Pour les auteurs mercantilistes, le commerce est source d’enrichissement, dans la mesure où
il est la meilleure manière d’accumuler de l’or. Comme la richesse repose sur l’or que détient
un pays, il faut exporter beaucoup et être payé en or ou convertir les gains en or. Les
importations sont limitées car elles sont considérées comme néfastes. Les mercantilistes
développent ainsi une pensée protectionniste, en instaurant des barrières tarifaires entre les
pays.
 Le rôle de la monnaie
Pour les mercantilistes, la richesse est monétaire, la plupart des mercantilistes associant la
richesse à la possession de métaux précieux, notamment l’or. Les auteurs mercantilistes des
XVIe et XVIIe siècles considèrent donc l’accumulation de richesse monétaire (or notamment)
comme une finalité en soit, aboutissant au bullionnisme (issu du mot anglais bullion qui
désigne l’or en barre) ou au chrysohédonisme (attitude visant à atteindre le bonheur par la
possession d’or). Toutefois, il y a un clivage entre ceux qui pensent que l’augmentation de la
quantité de monnaie dans l’économie a des effets inflationnistes, et ceux qui pensent qu’elle
permet de soutenir l’activité économique. Chez les bullionistes, la quantité de monnaie est
confondue avec la richesse du pays : un pays riche, est un pays qui dispose de beaucoup de
monnaie (d’or). A ceux-là, on oppose les auteurs dont l’analyse est plus fine et qui sont les
précurseurs de la théorie quantitative de la monnaie (Jean Bodin).

 Le rôle de l’État
Pour les mercantilistes, l’État doit intervenir dans l’économie, car la meilleure manière de
garantir un commerce extérieur excédentaire est que l’État mette en place une politique
tarifaire protectionniste. Il doit ainsi favoriser les importations de produits de base et de
matières premières, et l’exportation de produits finis et manufacturés. Il doit au contraire
décourager, voire interdire les importations des produits finis et manufacturés et les
exportations de produits de base et de matières premières.
Plus généralement, ils réclament une intervention systématique de l’État dans tous les
domaines de la vie économique visant à pérenniser, protéger et développer l’activité des
marchands : établir des règlements qui protègent les métiers nationaux de la concurrence
extérieure, dicter des normes de fabrication très strictes afin d’évincer la concurrence
extérieure (protectionnisme de norme), adopter une politique fiscale qui n’écrase pas trop les
artisans, les marchands et les financiers, etc.

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1-3- Les variantes du mercantilisme
Le mercantilisme se décline différemment selon les pays. On distingue ainsi trois types de
mercantilisme :

 Le mercantilisme espagnol (ibérique)


Il a été plus particulièrement « bullionniste », car soucieux de tirer le métal précieux de
l’exploitation des colonies et de le garder. Il est né de la préoccupation spécifique de
l'Espagne de conserver l'or qui venait de ses conquêtes, en vue d’accroître sa richesse (au XVI
siècle, l'Espagne a colonisé l'Amérique du sud et contrôlé l'exploitation des mines d'or du
Mexique et du Pérou). Il est représenté par Ortiz et Olivarès.

 Le mercantilisme français
Il est principalement « industrialiste ». Il préconise l’enrichissement de l’État, mais est
surtout caractérisé, à partir de la fin du XVIe siècle, par l’accent mis sur la nécessité du
développement de l’artisanat et de l’industrie à l’intérieur du royaume. En outre l’État doit
donner l’exemple en créant des manufactures (usines). Il est représenté par des hommes tels
que Jean Bodin (15301596), Antoine de Montchrestien (1575-1621) ou Jean-Baptiste Colbert
(1619-1683).

 Le mercantilisme anglais
Il fait l'apologie de l'enrichissement par le commerce en général et le commerce maritime en
particulier. En effet, les auteurs anglais recommandent diverses mesures dont : l'augmentation
des droits de douane, source de recettes pour l’État et en même temps moyen de réduction des
importations ; la subvention des exportations pour accroître la compétitivité de l'économie ;
l'accumulation de métaux précieux en vue d’augmenter la masse monétaire, de maintenir des
taux d'intérêt très faibles, de stimuler l’investissement et la production. Il est représenté par
Thomas Gresham (1519-1579), Thomas Mun (1571-1641), William Petty (1623-1687),
David Hume (1711-1776), Josiah Child (1630-1699), John Locke.

NB : L’écossais John LAW (1671-1729) a expérimenté le mercantilisme fiduciaire qui est


basé sur l'idée que le développement économique (donc l'enrichissement de l'État) ne peut se
faire que s'il existe un système bancaire, basé sur la circulation de billets émis par une banque

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centrale pour suppléer à l'insuffisance de la monnaie en vue de financer les besoins de
l'activité, ces billets étant eux-mêmes gagés sur l'or détenu par la banque.

2- Les physiocrates
2-1- Définition
La physiocratie est une doctrine du XVIIIe siècle qui soutenait que la terre (c’est-à-dire
l’agriculture) était la seule source de richesse. Les physiocrates considéraient par ailleurs la
paysannerie comme la seule classe productive, les autres activités (industrie, commerce) étant
considérées comme stériles. La physiocratie est l’œuvre d’économistes français dont le chef
de file est le médecin François Quesnay (1694 -1774), auteur du tableau économique (1758).

2-2- La doctrine physiocrate


La physiocratie s’oppose fondamentalement au mercantilisme. En effet, pour les physiocrates
:
 La richesse est réelle, c'est-à-dire qu’elle est constituée de biens matériels et non pas
de monnaies (or ou argent). La monnaie apparaît essentielle à la circulation des
richesses ;
 L’agriculture, seule, est productrice de richesses. En outre, les physiocrates,
contemporains de la « révolution agricole » qui précède immédiatement la Révolution
industrielle, considèrent que seule l’agriculture est à même d’accroître le montant de
richesses. Au contraire, l’industrie est réputé être « stérile », car ne faisant que
transformer les richesses, mais ne créant pas de surplus ;
 Il existe un ordre naturel qui décrit la circulation des richesses entre les différentes
classes de la société.
Les physiocrates posent les bases du libéralisme en considérant que la propriété privée est
primordiale. Ils préconisent déjà le « laissez faire, laissez passer ».

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Section 3 : LES VÉRITABLES COURANTS DE LA PENSÉE ÉCONOMIQUE

1- Les classiques
Les économistes classiques sont contemporains de la révolution industrielle. L'appellation «
classique » est due à Karl Marx qui constate chez les différents auteurs de cette époque une
convergence de critères d'analyse : une même théorie de la valeur, une étude des rapports de
classe, une défense du libéralisme économique. Les principaux auteurs classiques sont :

 Adam Smith (1723-1790), Recherche sur la nature et les causes de la richesse des
nations (1776) ;
 Thomas Robert Malthus (1766-1834), Essai sur le principe de population (1798) ;
 Jean Baptiste Say (1767-1832), Traité d'économie politique (1803) ;
 David Ricardo (1772-1823), Principes de l'économie politique et de l'impôt (1817) ;
 John Stuart Mill (1806-1873), Principes de l'économie politique (1848).

1-1- L'adhésion à la théorie de la valeur travail


Adam Smith (1776) et David Ricardo (1817) distinguent, pour leur raisonnement, la valeur
d'usage et la valeur d'échange des biens. La valeur d'usage dépend de la satisfaction que le
bien procure à la société, la valeur d'échange correspond à la quantité d'autres biens que l'on
peut obtenir en échange du bien produit. Ils ne s'intéressent qu'à la valeur d'échange et
indiquent que la valeur d'un bien provient de la quantité de travail nécessaire à sa fabrication.
Ricardo précise que le travail est à la fois direct (le travail proprement dit) et indirect par
l'intermédiaire des machines utilisées en production (ces biens de production ont
nécessairement été créés grâce à du travail).
Les richesses produites proviennent donc de la plus ou moins grande quantité de travail
disponible dans l'économie. Pour cette raison, Smith considère qu'il est primordial de mieux
produire pour produire plus, en divisant le travail en tâches élémentaires. Il cite pour cela
l'exemple d'une manufacture d'épingles. Il montre à travers cet exemple que la division du
travail est source d'augmentation de la productivité, grâce à l'élimination des pertes de temps
de passage d'une tâche à l'autre, et à l'effet d'expérience obtenue dans la répétition de la tâche.

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1-2- Une analyse macroéconomique en termes de classes sociales
Les auteurs classiques voient l'économie comme une science de l'accumulation des richesses.
Ils s'interrogent logiquement sur la manière d'augmenter les richesses produites, mais aussi
sur la façon de les répartir. Ils proposent alors une division de la société en classes sociales
(les travailleurs, les capitalistes et les propriétaires terriens), chacune obtenant une partie du
revenu global. Ainsi, les travailleurs sont rémunérés au minimum de subsistance, ou taux de
salaire naturel. Ricardo (1817) indique que « le prix naturel du travail est celui qui fournit aux
ouvriers, en général, le moyen de subsister et de perpétuer leur espèce sans accroissement ni
diminution ». Les salaires gravitent nécessairement autour du salaire naturel car, si les
travailleurs percevaient des salaires plus élevés ils seraient conduits à élever une famille plus
nombreuse, augmentant le nombre de bras disponibles sur le marché du travail. Il en
résulterait automatiquement une baisse des salaires.

Cependant, Ricardo précise que le salaire naturel n'est pas absolument fixe et constant, mais
qu'il varie dans le temps et selon les lieux.
Le panier de biens qu'il permet d'obtenir dépend du contexte social. Les propriétaires fonciers
sont eux rémunérés grâce à la rente que leur procure la terre qu'ils louent. Or, pour accroître la
production agricole, il est nécessaire de mettre en culture des terres de moins en moins fertiles
(loi des rendements décroissants). Les récoltes réalisées sur ces terres sont moins importantes
que sur les premières, pour un même volume de travail. Il en résulte que le loyer de la terre est
moins élevé (sinon personne ne voudrait de ces terres), et les prix des produits agricoles plus
élevés. Par différence avec le loyer des terres les plus fertiles, on obtient la rente des
propriétaires terriens qui possèdent les meilleures terres.

Pour Ricardo, la hausse du salaire naturel consécutive à la hausse des prix des denrées
agricoles (puisque le salaire naturel se fixe au niveau du minimum de subsistance) grève les
profits des entrepreneurs. Il faudrait pouvoir payer le blé moins cher pour faire baisser le
salaire naturel. En ayant recours, par exemple, aux importations de blé en provenance de
l'étranger.

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1-3- Des adeptes du libéralisme économique
Pour les classiques, le libéralisme économique est l'état idéal et naturellement favorable à
l'augmentation des richesses produites. Ce libéralisme économique peut s'illustrer par la
phrase célèbre du physiocrate Vincent de Gournay : « laissez faire les hommes, laissez passer
les marchandises ». Elle indique que l'État ne doit pas intervenir et qu'aucun obstacle à la
circulation des marchandises ne doit être érigé.

On retrouve cette idée dans le principe de la « main invisible » d'Adam Smith. Selon ce
principe, tout individu qui poursuit un intérêt purement individuel, voire égoïste, œuvre pour
l'intérêt collectif, ou la prospérité générale.

Pour Jean-Baptiste Say (1803), les crises générales de surproduction sont impossibles,
simplement parce que « les produits s'échangent contre les produits ». Cette « loi des
débouchés », ou loi de Say, a été reformulée par Keynes (1936) sous l'expression « l'offre crée
sa propre demande ». La production crée un montant de revenus distribués nécessairement
égal en valeur à cette production, puisque le prix d'un bien comprend des revenus distribués
aux salariés, aux autres producteurs auprès desquels l'entreprise s'approvisionne, aux
propriétaires de l'entreprise, voire à l'État sous forme d'impôts et taxes. Ces mêmes revenus
donnent lieu à une consommation et à une épargne.
L'épargne est intégralement investie car sinon son détenteur se priverait d'une rémunération
possible. Finalement, que cela soit sous forme de biens de consommation, ou de biens de
production, les revenus contribuent entièrement à une demande de biens auprès des
producteurs.

Si globalement la valeur des biens produits est égale à la valeur des biens demandés, il se peut
tout de même que des déséquilibres sectoriels apparaissent. Mais, si sur un marché l'offre est
supérieure à la demande, c'est qu'il existe nécessairement au moins un autre marché pour
lequel la demande est supérieure à l'offre. Dans ce cas, J.-B. Say montre que les mécanismes
de l'offre et de la demande conduisent à un rééquilibrage dans tous les secteurs, sans qu'une
intervention de l'État soit nécessaire.

Pour les économistes classiques en général, l'État doit se contenter de remplir ses fonctions
régaliennes (Police, Justice, Armée), même si l'on trouve déjà chez Adam Smith l'idée que

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l'État doit prendre en mains les activités utiles à la nation, mais délaissées par le marché, dans
le cadre de la production de biens publics.

Enfin, Ricardo (1817) et Smith (1776), notamment, sont des partisans du libre-échange. Ils
montrent que chaque pays a intérêt à ouvrir ses frontières, et à se spécialiser dans les
productions pour lesquelles il est avantagé, car le total des richesses produites par l'ensemble
des pays en situation de libre-échange, est supérieur au total produit en autarcie. D'ailleurs,
Ricardo prône le libre échange pour favoriser l'importation en Angleterre de blé français.
L'abolition des corn laws en 1846 marquera la victoire du libre-échangisme sur le
protectionnisme. Favorisant la baisse du prix du blé, et donc du salaire naturel, l'ouverture des
frontières anglaises devait permettre aux capitalistes d'accroître leurs profits, donc leurs
investissements pour poursuivre la révolution industrielle.

2- L'économie chez Marx


Dans ce contexte de révolution industrielle, Karl Marx (1818-1883) est indigné par le
spectacle de la misère et de l'ampleur des crises capitalistes. À la fois philosophe, économiste
et historien, il va proposer la première analyse d'ensemble du système capitaliste et de ses
crises. Mais Marx se veut également un homme d'action, ce qui va l'amener à militer pour
renverser le système capitaliste au profit du communisme, le socialisme ne constituant qu'une
période transitoire. Il s'appuie, pour sa démonstration, sur la théorie de la valeur travail, et
procède à une analyse en termes de classes sociales (prolétaires et bourgeois capitalistes).

2-1- L'exploitation des prolétaires par les capitalistes


Marx (Le capital, 1857) reprend la théorie de la valeur travail dans sa version ricardienne.
Nous savons que la valeur des biens correspond au temps de travail moyen qu'ils incorporent
pour leur réalisation. Ainsi, cette valeur se décompose en travail « mort », déjà incorporé dans
les moyens de production, et en travail « vivant » mis en œuvre au cours de la production.
Toutefois, en économie capitaliste, la force de travail est considérée comme une marchandise
qui s'échange sur un marché. Le déséquilibre offre-demande, sur le marché du travail, conduit
alors à une baisse du prix de cette marchandise : le salaire. C'est parce qu'il existe une « armée
industrielle de réserve », ou population au chômage, que l'offre de travail est toujours
supérieure à la demande. En définitive, la rémunération de la force de travail est inférieure à
la valeur que celle-ci produit. La différence, appelée plus-value, est accaparée par les

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propriétaires des moyens de production, qui peuvent s'en servir pour exploiter d'autres
individus ou classes.

En effet, l'exploitation est rendue possible par le fait que les prolétaires n'ont à vendre que leur
force de travail pour subsister, force de travail qui nécessite, pour être mise en œuvre, des
moyens de production détenus par d'autres, les bourgeois capitalistes. Ce qui distingue le
capitaliste du prolétaire c'est que seul le premier détient la propriété privée des moyens de
production. Si la journée de travail est de 8 heures et que 5 heures suffisent pour assurer
l'entretien de la force de travail (salaire fixé au minimum de subsistance), la plus-value
dégagée est donc de 3 heures.
L'appropriation de la plus-value constitue le fondement de l'exploitation des prolétaires par les
capitalistes.

2-2- La baisse tendancielle du taux de profit


Marx note c la valeur du travail mort (machines et biens achetés déjà produits), qu'il appelle
aussi « capital constant » car sa valeur est simplement transmise dans le produit final à l'issue
du processus de production. Il note également v, le prix du travail vivant, ou « capital variable
» au sens où son utilisation dans le processus de production conduit à une création de valeur.
En somme, pour produire, le capitaliste avance une somme égale à c  v et récupère une
somme égale à c  v  p , si l'on note p la plus-value réalisée. On peut alors exprimer le taux
de profit de ce capitaliste comme le rapport entre le bénéfice réalisé (la plus-value p) et le
p
capital investi ( c  v ) : Taux de profit = p /(c + v) ou encore v  e où e  p
1 c 1 g v
v
désigne le taux d'exploitation de la force de travail, ou taux de plus-value, et g = c/v la
composition organique du capital. e correspond au pourcentage de plus-value extorquée aux
prolétaires, g renvoie à l'intensité capitalistique de la combinaison de production (plus ou
moins de machines, ou plus ou moins d'hommes, pour produire).

Marx indique que la concurrence entre capitalistes conduit à l'achat de machines toujours plus
récentes parce qu'elles intègrent le progrès technique et plus productives (elles permettent de
produire plus de marchandises dans un même temps de travail). La loi de l'accumulation
(investir toujours plus de plus-value réalisée) amène à une suraccumulation de capital. Ainsi,

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les capitalistes investissent toujours plus de capital constant c, pour un volume donné de

capital variable v. Il en découle une hausse de c qui conduit à faire baisser le taux de profit.
v

La loi de la baisse tendancielle du taux de profit exprime que la hausse de la composition


organique du capital c/v tend à faire baisser les profits des capitalistes. Cette loi n'est que
tendancielle, pour Marx, car d'autres effets entrent en jeu qui contrecarrent la baisse du taux

de profit. Les capitalistes peuvent par exemple augmenter le taux d'exploitation p en


v
allongeant la durée de travail des ouvriers pour un même salaire versé (si les ouvriers
travaillent 9 heures, la plus-value dégagée est désormais de 4 heures).
En somme, seul le travail vivant est à l'origine de la plus-value, mais la concurrence entre
capitalistes conduit à une hausse de la part du travail mort par rapport au travail vivant, ce qui
limite les possibilités de plus-value. Pour Marx, le capitalisme porte en lui les germes de sa
propre fin.

2-3- Crises du capitalisme et passage au socialisme


Les crises capitalistes résultent de la baisse tendancielle du taux de profit. Même si des effets
jouent en sens inverse, le fait d'utiliser de plus en plus de machines et des hommes de moins
en moins bien rémunérés réduit à la fois les possibilités de plus-value et les débouchés des
entreprises.
Les crises du système capitalistes sont donc à la fois des crises de surproduction et des crises
de sous consommation : surproduction de capital, et sous consommation de biens. La
surproduction entraîne une baisse des prix et la faillite des entreprises les moins performantes.
Les crises apparaissent donc comme des mécanismes de régulation du système capitaliste.
Mais, de crise en crise, le système est appelé à disparaître. Puisque le système capitaliste
repose sur l'exploitation des prolétaires, et que celle-ci n'est possible que parce qu'existe la
propriété privée, Marx préconise le passage à la propriété collective des moyens de
production qui permettra d'abolir l'exploitation. Ainsi disparaît la classe capitaliste et avec elle
la notion de classes sociales, puisqu'il n'en reste plus qu'une, celle des prolétaires.

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3- Les néoclassiques
L'école néoclassique marque une rupture dans l'évolution de la théorie économique,
contrairement à ce que laisse entendre le préfixe « néo ». Si la science économique était
jusque-là la science de l'accumulation des richesses, elle devient la science de la rareté et de
l'allocation des ressources, au sens où Lionel Robbins (1932) la définit. Elle s'appuie sur une
nouvelle conception de la valeur, et une approche microéconomique en termes d'équilibre sur
le marché. Comme les classiques, les néoclassiques sont dans l'ensemble des défenseurs du
libéralisme économique.
Les principaux auteurs néoclassiques sont :
 Stanley Jevons (1835-1882), Théorie de l'économie politique (1871) ;
 Carl Menger (1840 - 1921), Les fondements de l'économie politique (1871) ;
 Léon Walras (1834-1910), Éléments d'économie politique pure ou théorie de la
richesse sociale (1874) ;
 Vilfredo Pareto (1848-1923), Manuel d'économie politique (1907) ;
 Alfred Marshall (1842-1924), Principes d'économie politique (1890) ;
 Arthur Cécil Pigou (1877-1959), L'économie du bien-être (1920).

3-1- La théorie de la valeur utilité


Au début des années 1870, trois auteurs ont mis en évidence, isolés les uns des autres, le
concept d'utilité marginale sous des appellations différentes : Stanley Jevons (1871), Carl
Menger (1871) et Léon Walras (1874).

Les insuffisances de la théorie de la valeur travail, sur lesquelles butaient Ricardo et Marx eux
mêmes, ont conduit les auteurs néoclassiques à l'abandonner au profit de la valeur utilité que
l'on retrouvait déjà dans les écrits d'Aristote, mais aussi chez Richard Cantillon (1697-1734)
et Condillac (1714-1780). Ce qui fait la valeur d'un bien n'est pas la quantité de travail
nécessaire à sa fabrication, mais l'utilité qu'il procure à celui qui le consomme. Plus
précisément, la valeur d'un bien résulte de la dernière unité du bien consommée. Celle-ci est
décroissante à l'image de la satisfaction qu'apporte la consommation successive de crêpes : si
la première satisfait la gourmandise et la faim, la dixième risque d'écœurer et être source de
désutilité, ou insatisfaction. En somme, il faut distinguer l'utilité totale d'un bien (celle
procurée par les 10 crêpes mangées) qui est en général croissante, et l'utilité marginale (celle
apportée par la consommation de la dernière unité) qui est, elle, décroissante. Mais

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l'acquisition du bien est aussi source d'insatisfaction, puisque l'on doit payer un prix, c'est-à-
dire se séparer d'une quantité de monnaie. Tant que l'insatisfaction liée au prix est inférieure à
l'utilité de la consommation, l'individu continuera à acheter du bien, pour peu qu'avec une
même dépense il ne puisse obtenir plus d’utilité en achetant un autre bien.
Avec l'utilité marginale, la valeur d'un bien devient subjective, puisqu'elle diffère d'un
individu à l'autre, et s'oppose à la valeur travail qui se voulait objective. Valeur et prix de
marché se distinguent à nouveau : la valeur d'un bien pour un individu se mesure au prix qu'il
est disposé à payer pour obtenir ce bien (son prix de réserve), prix qui peut être différent de
celui constaté sur le marché.

3-2- Une approche microéconomique


L'approche des néoclassiques relève de l'individualisme méthodologique. En choisissant un
individu type pour étudier son comportement, on suppose que la somme des comportements
types donnera une explication des phénomènes globaux. Les détracteurs de l'approche
microéconomique des néoclassiques parlent d'homo economicus.
Cet individu type est supposé rationnel, qu'il ait un comportement de consommateur ou de
producteur. Le premier va chercher à maximiser sa satisfaction compte tenu des prix des biens
et du budget dont il dispose. Le second s'efforcera de maximiser son profit sous une contrainte
technique de production.
Tous deux utilisent le raisonnement à la marge. C'est pourquoi d'ailleurs, les premiers auteurs
du courant néoclassique étaient qualifiés de « marginalistes ». Par exemple, un producteur va
embaucher successivement des individus tant que ce que rapporte le dernier embauché (donc
à la marge) est supérieur à son coût. En somme, tant que la production marginale en valeur,
supplément de production en valeur qui découle du dernier employé, est supérieure au salaire
nominal versé. À l'image des terres de moins en moins fertiles, la production marginale, ou
productivité marginale, est décroissante. Les néoclassiques considèrent, en effet, que la loi des
rendements décroissants s'applique à l'industrie.
Il convient de préciser que cette approche exclut la notion de classes sociales que l'on trouvait
chez Marx et les classiques. Sont ici niés, dans un premier temps, les rapports de force
sociaux.

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3-3- La théorie de l'équilibre
Les agents économiques expriment leurs besoins sur les marchés, qui permettent de
déterminer les prix. La théorie néoclassique distingue notamment : le marché des biens et
services, le marché du travail et le marché des capitaux. On peut tout d'abord raisonner en
terme d'équilibre partiel, sur un seul marché, comme le fait Alfred Marshall (1890). Sur le
marché des biens et services, pour chaque consommateur par exemple, la demande de biens
est une fonction décroissante du prix, alors que pour chaque producteur l'offre est une
fonction croissante. L'agrégation des fonctions d'offre et de demande individuelles donne
ensuite les courbes d'offre et de demande sur le marché. L'équilibre est obtenu au point de
rencontre des deux courbes.
L'analyse montre que l'équilibre est efficace au sens de Pareto, ou encore est un optimum
de Pareto (Manuel d'économie politique, 1906). Un optimum de Pareto désigne une
situation dans laquelle on ne peut améliorer la satisfaction d'un individu sans être obligé de
détériorer celle d'au moins un autre. Sous certaines conditions, le premier théorème
fondamental de l'économie du bien-être montre que tout équilibre de marché est une situation
optimale au sens de Pareto. Ces conditions sont celles de la concurrence pure sur des marchés
parfaits :
- Atomicité : présence d'une multitude d'agents de telle sorte qu'aucun ne puisse à lui seul
influencer le marché ;
- Homogénéité : les agents et les biens ne se distinguent que par leurs caractéristiques
intrinsèques ;
- Transparence : tous les agents disposent de la même information ;
- Libre entrée : absence de positions acquises, de barrières légales, techniques ou financières.
La flexibilité des prix fait de l'équilibre obtenu un équilibre stable, y compris sur le marché du
travail. Les individus qui n'acceptent pas de travailler pour un niveau de salaire égal à celui du
marché du travail sont des chômeurs « volontaires ». On envisage enfin une approche en
équilibre général, présentée par Léon Walras, c'est-à-dire une analyse de l'équilibre simultané
de tous les marchés de l'économie. Dans cette économie où le rôle de la monnaie est joué par
un bien, la loi de Walras nous indique que si n-1 marchés sont en équilibres, le nième marché
l'est aussi. Il s'agit d'une conséquence de la loi de Say puisque l'offre est globalement égale à
la demande. Toutefois, le rôle de la monnaie qu'implique la loi de Say est limité et ne semble
pas correspondre à la réalité observable. Keynes (1936) va proposer une explication différente
du rôle de la monnaie, en critiquant la loi de Say.

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4- L'analyse keynésienne
John Maynard Keynes (1883-1946) observe la grande crise des années trente et refuse de
croire que les mécanismes autorégulateurs du marché permettent de résoudre les problèmes de
chômage et de déflation (baisse cumulée des prix et de la production). Il ne raisonne donc pas
en termes de marché mais plutôt sous l'angle du circuit économique qui met en relation les
grandes variables économiques, et ce à court terme. Il fait part de ses réflexions dans un
ouvrage fondamental de la science économique, La théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et
de la monnaie en 1936.

4-1- Une analyse macroéconomique en termes de circuit


Dans ce circuit, ce n'est pas l'offre qui crée la demande, mais la demande qui constitue le
point de départ. Plus exactement, en situation d'incertitude sur l'avenir, les entrepreneurs font
des prévisions sur le volume de la demande qui va s'adresser à eux. Cette anticipation de la
demande est appelée « demande effective » par Keynes. La demande effective est une
anticipation de la demande globale à venir faite par les entrepreneurs.
C'est à partir de ces prévisions que les entrepreneurs vont déterminer le volume à produire et
par conséquent le niveau de l'investissement et de l'emploi, nécessaires pour réaliser cette
production. Cependant, si les prévisions des entrepreneurs sont pessimistes, le niveau de
l'emploi peut très bien être inférieur à celui qui permettrait d'embaucher toute la main d'œuvre
disponible. On se situe donc en équilibre de sous-emploi (des facteurs de production). Le
chômage n'est donc pas forcément volontaire : il existe bien des individus qui désirent
travailler au salaire en vigueur sur le marché du travail mais qui ne trouvent pas d'emploi.

4-2- La possibilité de crises de surproduction


Keynes montre que les déséquilibres peuvent être durables entre l'offre et la demande,
simplement parce que l'épargne n'est pas nécessairement réinvestie. La loi de Say indique une
parfaite identité entre épargne et investissement : toute épargne est nécessairement investie
car il est rationnel pour un individu de préférer une épargne rémunérée à une épargne non
rémunérée. John Maynard Keynes ne voit pas les choses ainsi. Selon lui, la monnaie peut être
demandée pour elle-même et thésaurisée par les agents économiques. En effet, elle est utile
pour les transactions que l'on prévoit sur une courte période (demande de monnaie pour motif
de transaction), mais elle constitue aussi une précaution en cas de dépenses exceptionnelles
non prévues (demande de monnaie pour motif de précaution). En outre, placer son épargne et

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détenir des titres financiers n'est pas toujours rationnel. En cas de chute des cours, l'épargnant
perd beaucoup plus que s'il s'était contenté de conserver son épargne sous forme liquide. En
situation d'incertitude sur l'évolution des cours, les agents économiques sont parfois appelés à
ne pas investir, et à conserver la monnaie en attente d'une meilleure occasion de la placer
(demande de monnaie pour motif de spéculation).
Dès lors, la somme des revenus distribués à l'occasion de la production ne revient pas
intégralement sous forme de demande aux entreprises. Il peut y avoir une surproduction
durable, en raison de la fuite dans le circuit que représente la thésaurisation (épargne
thésaurisée). L'offre ne crée pas une demande strictement égale en valeur.

4-3- Une intervention nécessaire de l'État


Keynes a donné une explication des déséquilibres durables que connaît le système capitaliste.
Il conteste en outre que la baisse des salaires sur le marché du travail, dans une logique de
marché, puisse résoudre le chômage. Au contraire, elle serait néfaste à la consommation des
ménages et réduirait la demande effective. Keynes n'en conclut surtout pas qu'il faudrait dans
ce cas augmenter les salaires, mais plutôt éviter de baisser les salaires nominaux, quitte à ce
que les entreprises relèvent leurs prix. Il se rapproche ici curieusement d'une logique
néoclassique qu'il combat : la résorption du chômage par la baisse du taux de salaire réel.
Par contre, un soutien de la demande, c'est-à-dire de la consommation des ménages et de
l'investissement, peut s'avérer judicieux pour modifier les anticipations des entrepreneurs.
Plus optimistes quant à leurs perspectives de débouchés, ceux-ci pourraient être à même de
produire plus et donc d'embaucher davantage. C'est dans le cadre de la politique budgétaire
que Keynes envisage ce soutien à court terme, s'opposant au laisser faire des auteurs
néoclassiques qui prônent les vertus des mécanismes automatiques de retour à l'équilibre des
marchés à long terme.

Pour John Maynard Keynes, dans Essais sur la monnaie et l'économie, 1930 : « Le long terme
est un horizon peu intéressant. À long terme nous serons tous morts. Les économistes
n'apportent rien si, en pleine tempête, tout ce qu'ils trouvent à dire c'est qu'une fois l'orage
passé, la mer sera calme».
Si les idées keynésiennes ont longtemps inspiré les politiques économiques menées dans les
pays développés pendant les trente glorieuses, la crise des années soixante-dix a parfois
conduit à les contester.

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Section 4 : LA PENSÉE ÉCONOMIQUE CONTEMPORAINE
Les analyses économiques contemporaines peuvent être classées en deux grandes catégories :
celles qui reprennent le champ d'analyse d'un grand courant et celles qui s'en distinguent.
Les premières sont qualifiées d'orthodoxes, les secondes d'hétérodoxes. En tenant compte des
problèmes économiques nouveaux rencontrés, et de l'insuffisance des modèles de base, les
idées des principaux courants sont alors renouvelées. Par contre, la pensée hétérodoxe
s'efforce de bâtir des modèles originaux grâce à l'apport d'autres disciplines telles que la
sociologie, l'histoire, les sciences de la décision.

1- Le prolongement de l'analyse keynésienne


Il existe plusieurs voies empruntées par ceux qui ont voulu reprendre l'esprit de Keynes : celle
de la synthèse des idées keynésiennes et classiques, celle qui oppose la logique de circuit
économique à celle de marchés en équilibres, et celle qui s’efforce de donner des fondements
microéconomiques à la macroéconomie keynésienne.

1-1- Une synthèse des modèles néoclassiques et keynésiens


Dès 1937, John Hicks tente de montrer que l'analyse keynésienne n'est qu'un cas particulier de
l'approche néoclassique, à prix fixes. C'est dans le cadre du modèle IS/LM de Hicks et Hansen
(1953) que sont réunies les principales conclusions de cette étude.
Ce modèle servira de base à la définition des politiques économiques menées dans l'après-
guerre. Celles-ci s'illustrent par le stop and go qui stipule qu'une politique budgétaire
expansionniste se heurte à des effets inflationnistes qu'il convient de limiter en pratiquant une
politique de freinage des dépenses publiques, laquelle induit un chômage que l'on combat en
relançant l'activité économique par le recours au déficit budgétaire, etc.

1-2- La pensée post keynésienne


Les principales avancées de l'analyse keynésienne résident dans le rôle attribué aux banques
dans le circuit économique. La monnaie ne serait pas exogène mais endogène, c'est le
processus de création monétaire qui est à l'origine de tout le circuit économique. La monnaie
n'est créée qu'en réponse à une demande des agents économiques qui font des paris sur
l'avenir.

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En prolongeant la tradition de circuit qu'ils observent chez Quesnay (1758) et Marx (1857),
les post keynésiens écartent la vision walrasienne d'une économie comme simple
juxtaposition de marchés interdépendants. Pour eux, les flux économiques sont hiérarchisés
avec, au sommet, les flux de financement de l'économie.

1-3- La nouvelle école keynésienne


La nouvelle économie keynésienne (NEK) quant à elle s'efforce de suivre l'intuition féconde
de Keynes selon laquelle le fonctionnement des marchés est imparfait : les prix ne s'ajustent
pas de manière automatique aux variations de l'offre et de la demande, mais plutôt de manière
lente. Ces imperfections résultent pour les auteurs de la NEK, de l'information insuffisante
dont bénéficient les acteurs des marchés ou d'une information mal partagée (asymétrie
d'information). Par ailleurs, et contrairement à Keynes qui raisonnait essentiellement d'un
point de vue macroéconomique, les auteurs de la Nouvelle Économie Keynésienne s'efforcent
de donner des fondements microéconomiques à leurs modèles macroéconomiques.

2- Le renouveau des idées classiques et néoclassiques


Le modèle néoclassique de base est rapidement contesté dans ses hypothèses, notamment les
conditions de la concurrence pure et parfaite. C'est en relâchant une à une ces hypothèses que
de nouveaux modèles apparaissent.

2-1- Le monétarisme
Pour les monétaristes dont le chef de file est Milton Friedman, de l'École de Chicago, l'origine
de l'inflation est toujours monétaire. Par une reformulation de la théorie quantitative de la
monnaie, Friedman montre qu'il faut procéder à un contrôle strict de la masse monétaire en
circulation dans l'économie. Il conteste en outre l'efficacité des politiques keynésienne de
soutien de la demande. Selon lui, les ménages pensent que le supplément de revenu dont ils
bénéficient, à l'occasion de ces politiques, n'est que transitoire. Ne voulant pas s'habituer à un
niveau de consommation trop élevé, ils préfèrent épargner ce surcroît de revenu. L'effet sur la
demande est donc nul.

2-2- L'école des choix publics


Les principaux auteurs de ce courant sont James Buchanan et Gordon Tullock (1962). Ils
s'efforcent d'étudier la cohérence des décisions publiques. Pour cela, ils montrent que les

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dirigeants politiques sont des individus comme les autres auxquels il convient d'appliquer le
principe de rationalité. L'homme politique recherche son intérêt personnel au travers de
l'action publique : le pouvoir. Pour se faire réélire, il peut très bien pratiquer une politique de
hausse des dépenses publiques juste avant un scrutin, même si la situation économique ne
l'exige pas. Il faut donc en conséquence encadrer de manière précise le champ d'action des
décideurs publics, et toujours comparer les vices et vertus de l'intervention de l'État à ceux des
marchés.

2-3- La nouvelle économie classique (NEC)


Elle s'appuie sur la théorie des anticipations rationnelles de John Muth (1961) qui veut que
chaque agent économique prenne ses décisions en tenant compte de toute l'information
disponible sur le moment. Robert Lucas (1971) et Robert Barro (1974) montrent ainsi que les
politiques économiques keynésiennes sont totalement inefficaces. Par exemple, si les
dépenses de l'État augmentent, chacun s'attend à une hausse future des impôts. En
conséquence, le supplément de revenu perçu serait épargné en vue du prélèvement fiscal
futur. L'effet sur la consommation des ménages est nul. En outre, selon le principe
d'équivalence ricardienne, remis au goût du jour par Robert Barro, il revient au même que le
déficit budgétaire soit financé par l'emprunt ou par l'impôt, puisque dans les deux cas les
ménages ne modifient pas leur consommation.

3- Les nouvelles voies de recherche en économie


On peut considérer qu'il existe des approches qui innovent tant au niveau macroéconomique
(croissance endogène) qu'au niveau microéconomique (avec les apports de l'outil que
représente la théorie des jeux).

3-1- Les nouvelles théories de la croissance


Les théories de la croissance endogène montrent que l'intervention de l'État dans l'économie
se justifie pour développer la recherche et la formation. En effet, les théories traditionnelles
de la croissance expliquent que la hausse de la production résulte en grande partie d'un
progrès technique exogène, résultat hasardeux des activités de recherche isolées d'individus
ingénieux. Les théories de la croissance endogène montrent au contraire que le progrès
technique ne peut naître qu'au sein de structures organisées (grandes entreprises, organismes
publics), et qu'il est donc endogène à l'activité économique, à la production. Parce qu'ils

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profitent à l'ensemble des agents économiques, et qu'ils ne peuvent être mis en œuvre par un
seul, les investissements en formation et en recherche, qui permettent l'émergence du progrès
technique, relèvent d'une logique publique. Ce sont eux qui sont à l'origine de la compétitivité
des agents économiques nationaux, compétitivité cruciale pour accroître la production des
richesses et développer les emplois dans l'avenir.

3-2- La nouvelle microéconomie


Elle s'appuie pour l'essentiel sur l'étude de la concurrence imparfaite grâce aux apports de la
théorie des jeux, de l'économie des incitations et de l'information. Elle conserve l'hypothèse
de rationalité des individus, mais montre que lorsque les individus ne disposent pas de la
même information, les mécanismes de marché peuvent conduire à des impasses. Georges
Ackerlof (1970), du courant de la NEK, étudie le marché des voitures d'occasion et indique
que les acheteurs et les vendeurs sont en situation d'asymétrie d'information. Les vendeurs
connaissent mieux l'état de leur véhicule que les acheteurs, et le dissimulent s'il est mauvais.
Si l'on ne peut distinguer les bons des mauvais véhicules, un prix unique s'établira sur le
marché. À ce prix, les possesseurs de voitures en bon état refuseront de vendre, jugeant qu'ils
pourraient obtenir un meilleur prix. Il ne reste donc plus sur le marché que les mauvaises
voitures. Les acheteurs, en raisonnant comme nous venons de le faire, penseront n'avoir
affaire qu'à des véhicules en mauvais état et n'achèteront pas au prix du marché. Le
mécanisme de marché, en asymétrie d'information, ne permet aucun échange si le prix ne
baisse pas, et en tout cas élimine les voitures de bonne qualité. L'intervention de l'État est
alors nécessaire pour exiger, par exemple, un contrôle technique au moment de la transaction.

Pour sa part, la théorie des jeux permet de souligner que la poursuite d'intérêts individuels ne
conduit pas toujours à l'intérêt général, ou que l'équilibre obtenu n'est pas efficace au sens de
Pareto. Elle trouve une application dans la compréhension des décisions d'entreprise en
situation de concurrence imparfaite, comme dans la coordination internationale des politiques
économiques.
Au total, la nouvelle microéconomie s'éloigne du modèle purement libéral, elle modifie la
vision d'une économie régulée par la concurrence pure sur des marchés parfaits. Elle inspire
autant le courant de la nouvelle économie keynésienne que le courant de la nouvelle économie
classique.

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DEUXIEME PARTIE : LES PROBLÈMES
ÉCONOMIQUES CONTEMPORAINS ET LA
DISSERTATION ÉCONOMIQUE

Chapitre 1 : LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE

INTRODUCTION
La croissance économique est une notion relativement récente dans l’histoire de l’humanité.
Elle constitue cependant le phénomène majeur qui va bouleverser les comportements
traditionnels des sociétés. L’étudier, c’est d’abord la présenter et comprendre les mécanismes
qui l’animent, mais c’est aussi prendre la mesure des mutations qu’elle entraîne tant sur le
plan économique que social.

Section 1 : NOTIONS DE BASE

1- Définition de la croissance économique


La croissance est l’augmentation sur une ou plusieurs périodes longues d’un indicateur de
dimension pour une nation (le produit national brut, le produit intérieur brut, etc.). Les
comptables nationaux utilisent deux variantes du PIB pour calculer la richesse créée : le PIB
en volume (mesure de l’évolution du PIB entre deux périodes en corrigeant des effets de
l’inflation. L’évaluation du PIB s’effectue donc en prenant le prix des biens et des services à
une année de référence) et le PIB en valeur (mesure de l’évolution du PIB aux prix courants).
En période d’inflation, la croissance en valeur est gonflée par l’augmentation des prix.
Généralement, on retient le produit intérieur brut (PIB) à prix constants, comme indicateur de
croissance. La variation relative de cet agrégat sur deux périodes consécutives est appelée
taux de croissance (TC).

PIBn  PIBn1
TC  100
PIBn1

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2- Quelques précisions importantes

 La croissance économique ne veut pas dire forcément amélioration du bien-être, la


croissance peut en effet s’accompagner d’un creusement des inégalités.
 La croissance ne veut pas dire non plus économie saine, une croissance forte entraîne
généralement un regain d’inflation (une hausse des prix), elle peut également se
traduire par une hausse des importations et un déséquilibre de la balance commerciale.
 Quand l’augmentation de richesses enregistrées par une nation est de courte durée
(quelques trimestres), les économistes préfèrent parler d’expansion (phase d’un cycle).
 Quand l’augmentation de richesses provient d’une simple hausse quantitative des
facteurs de production (capital, travail), on parle de croissance extensive ; quand cette
augmentation de richesses a pour origine une meilleure organisation du travail
(exemple du taylorisme, du fordisme), on parle de croissance intensive.
 Les économistes parlent encore de croissance autocentrée lorsqu’elle repose sur des
dynamiques internes (rôle de la consommation des ménages) et de croissance
extravertie lorsqu’elle découle de l’ouverture de l’économie.

3- La croissance équilibrée
Les économistes parlent généralement de croissance équilibrée, c’est-à-dire d’une croissance
telle que le taux d’accroissement de l’offre soit égal à celui de la demande sur le marché des
biens et services. Les forces du marché seraient ainsi autorégulées, dès qu’une hausse des prix
apparaît, la demande diminue, et l’offre s’ajuste. Une croissance équilibrée satisfait les
conditions du carré magique : création d’emplois, faible niveau d’inflation, budget et balance
commerciale équilibrés.

Section 2 : LES FACTEURS DE LA CROISSANCE

La croissance s’explique par la combinaison efficace de plusieurs facteurs : la quantité et la


qualité du travail, la quantité et la qualité des équipements et matières utilisés, et surtout un
environnement propice. Ces facteurs peuvent être regroupés en deux catégories, à savoir les
facteurs de production et les facteurs environnementaux.

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1- Les facteurs de production
Classiquement, on distingue le facteur travail, le facteur capital et les ressources naturelles. A
ceux- ci, il faut ajouter le progrès technique, dont l’apport ne fait aucun doute.

1-1- Le facteur travail


Le facteur travail désigne la population disponible pour exercer une activité rémunérée, c’est-
à-dire la population active. Une population active nombreuse et bien formée contribue
fortement à la croissance. De plus une forte démographie constitue un débouché important
pour les entreprises, ce qui conditionne une production importante, et donc la croissance
économique.
Cependant, la croissance démographique n’est pas perçue par tous comme facteur de
croissance économique. En effet, les malthusiens, considérant qu’une population nombreuse
est cause de chômage, de misère et de conflits sociaux, préconisent la réduction de la
fécondité, surtout celle des pauvres.

1-2- Le facteur capital


Le capital est l’ensemble des ressources immobilisées, destinées à la production de biens et
services. Il contribue à la croissance dans la mesure où il permet :
- une plus grande productivité (gains de productivité) ;
­ la mécanisation de la production et l’industrialisation des sociétés agricoles ;
- une production de masse (standardisation) qui génère des économies d’échelle.

1-3- Les facteurs naturels


Le facteur « ressources naturelles » comprend essentiellement les matières premières
agricoles, minérales et énergétiques.
L’apport de ce facteur dans l’essor de la production est indéniable dans la mesure où il
constitue :
 Le socle de l’industrialisation et notamment des industries lourdes (c’est le cas des
minerais) ;
 La raison d’être des firmes de transformation (c’est le cas des matières premières
agricoles) ;
 Le moteur de la production industrielle (c’est le cas des énergies).

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1-4- Le progrès technique
Le progrès technique désigne les phénomènes permettant l’amélioration des techniques de
production ou l’apparition de nouveaux produits grâce à l’innovation. En d’autres termes c’est
l’amélioration des techniques qui sont utilisées dans un processus de fabrication. La
technologie désigne par ailleurs l’ensemble des procédés méthodiques fondés sur des
connaissances scientifiques, employés à la production.
Le progrès technique est facteur de croissance dans la mesure où il favorise :
 L’augmentation de la production ;
 Une plus grande productivité des facteurs (travail et capital notamment) ;
 Des économies d’échelle, entrainant la baisse des prix et l’augmentation de la
demande ;
 De nouveaux débouchés ;
 L’accroissement des profits des entreprises grâce aux gains de productivité, facilitant
le financement de nouveaux investissements ;
 L’augmentation des salaires entrainant la hausse du pouvoir d’achat, ce qui permettra
d’étendre la demande à de nouveaux marchés ;
 L’augmentation des recettes fiscales, permettant à l’État de développer une politique
d’investissements publics et de dépenses de transfert ;
 La réduction du temps et de la pénibilité du travail, favorisant la consommation dans
le secteur des loisirs ou du tourisme.
En somme, il est important d’observer qu’aujourd’hui, le progrès technique explique presqu’à
lui seul l’enrichissement des nations.

2- Les facteurs liés à l’environnement


Outre les facteurs de production qui ont une incidence directe sur le niveau de croissance,
d’autres facteurs l’influence implicitement. Ce sont :
 Un climat social apaisé ;
 Une bonne conjoncture économique ;
 Une justice crédible ;
 Un système bancaire et financier approprié ;
 La bonne gouvernance ;
 Des infrastructures économiques conséquentes et en bon état ;
 Des conditions d’investissement (un code d’investissement) attrayantes.

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Section 3 : LES THÉORIES DE LA CROISSANCE
Comment expliquer la croissance ? Depuis plus de deux siècles, les économistes s’interrogent
sur les causes de la croissance. 1- Les précurseurs et Joseph Schumpeter

 Adam Smith (Recherches sur la nature et les causes de la Richesse des Nations, 1776),
met en évidence le rôle de la division du travail (surplus, marché, gains de
productivité) comme facteur de croissance. Cette division du travail se trouve
renforcée par la participation du pays au commerce international (théorie de l’avantage
absolu). L’optimisme de Smith apparaît à travers les traits d’une croissance illimitée
(elle dure tant que l’on peut étendre la division du travail et le marché) ;
 Robert Malthus (Essai sur le principe de population, 1798) considère que la croissance
est limitée en raison de la démographie galopante. Il attribue la misère en Angleterre
au décalage entre deux lois : la loi de progression arithmétique des moyens de
subsistances et la loi de progression géométrique des populations. La sortie de cet état
passe par la mortalité, la baisse de la natalité et le célibat ;
 David Ricardo (Des principes de l’économie politique et de l’impôt, 1817) souligne
que la croissance est limitée par la loi des rendements décroissants. La valeur ajoutée
se répartit entre trois agents : les propriétaires fonciers (rente foncière), les salariés
(salaire de subsistance) et les capitalistes (profit). Précisons que le profit des
capitalistes est résiduel, c’est-à-dire qu’il intervient une fois le salaire et la rente
foncière payés. Lorsque la population s’accroît, il convient d’augmenter la production
agricole, or les nouvelles terres mises en culture sont de moins en moins productives.
Le coût de production va donc s’élever, entraînant inévitablement la hausse des
salaires et de la rente foncière. Les profits vont se réduire jusqu’au moment où les
capitalistes ne seront plus incités à investir. L’économie atteint la situation d’état
stationnaire. Afin de retarder cette situation, Ricardo préconise d’augmenter les gains
de productivité dans l’agriculture grâce au progrès technique et de s’ouvrir au
commerce international (théorie de l’avantage comparatif) ;
 Karl Marx (Le Capital, 1867) a été le premier économiste à proposer un modèle
formel de croissance, à l’aide de ses schémas de reproduction élargie. Il considère que
la croissance est limitée dans le mode de production capitaliste en raison de la baisse
tendancielle des taux de profit. En effet, la recherche d’une plus-value toujours plus
importante (notamment grâce à des salaires bas, que Marx appelle ‘‘minimum de

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Subsistance’’) et la concurrence entre capitalistes devraient provoquer une
paupérisation des ouvriers et un blocage dans le développement du système capitaliste
(crise) ;
 Joseph Schumpeter (Capitalisme, Socialisme et démocratie, 1942) fait du progrès
industriel la clé du changement. Pour lui, « l’impulsion fondamentale qui met et
maintient en mouvement la machine capitaliste est imprimée par les nouveaux objets
de la consommation, les nouvelles méthodes de production et de transport, les
nouveaux marchés, les nouveaux types d’organisation industrielle – tous éléments
créés par l’initiative capitaliste ». En d’autres termes, le progrès industriel est porté par
des innovateurs qui cherchent à emporter le gros lot. L’analyse schumpetérienne est
intéressante car elle ne repose pas seulement sur le progrès technique, sur l’évolution
des connaissances ou les grandes inventions (avec le cycle des révolutions
industrielles successives). Schumpeter y ajoute un héros, le chef d’entreprise qui prend
le risque de lancer un nouveau produit ou une nouvelle façon de produire , et une
structure (la concurrence monopolistique) qui assure à celui qui a réussi son pari d’en
percevoir une rétribution financière. Mais attention, il y aura peu d’élus pour beaucoup
d’appelés. La « destruction créatrice » laissera certains derrière elle, cependant elle
finira par être bénéfique pour tous. Le système tout entier produira plus de richesse.

2- Les postkeynésiens
A la suite de la crise de 1929, de nombreux économistes inspirés par les travaux de J. M.
Keynes, vont s’interroger sur les possibilités d’une croissance équilibrée. Les modèles de
Domar et Harrod vont chercher à rendre compte des conditions et caractéristiques essentielles
de l’équilibre d’une économie capitaliste en croissance. Le point de départ de Domar est de
considérer que l’investissement exerce une double influence sur l’économie :
 Dans un premier temps, il s’agit de l’effet revenu. A court terme, l’investissement
constitue une demande supplémentaire et entraîne une hausse des revenus via le
principe du multiplicateur. L’effet revenu associé à une augmentation de
l’investissement de I , est égal à I 1/ 1  c   c’est-à-dire I 1/ s  où s  (1  c)

sachant que c et s représentent respectivement les propensions marginales à


consommer et à épargner ;
 Dans un second temps, il s’agit de l’effet capacité. A long terme, l’investissement doit
engendrer une stimulation de la capacité de production, via le principe de

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l’accélérateur. L’investissement accroît les capacités de production dans une
proportion égale à 1/ v où v est le coefficient de capital et correspond à l’inverse de la
productivité moyenne du capital soit v  K / Y (où K est le stock de capital et Y la
production). L’effet de capacité est donc égal à I (1/ v) .
Pour qu’il y ait croissance équilibrée, il faut que les revenus supplémentaires engendrés par
l’effet multiplicateur permettent d’absorber la production supplémentaire obtenue. En d’autres
termes, l’effet de revenu doit être égal à l’effet de capacité. Cette condition est vérifiée si
l’investissement augmente à un taux constant égal au rapport entre la propension marginale à
épargner et le coefficient de capital soit I / I  s / v . Harrod montrera par la suite que la
croissance est par nature instable. Pour ce dernier, le taux de croissance I / I nécessaire pour
les entrepreneurs (ou taux de croissance garanti) pour réaliser leurs espérances de profit est
compatible avec le chômage des hommes.
L’égalité entre s / v et le taux de croissance naturel de la population active ( n ) est purement
fortuite. Si ( s / v) est inférieur à ( n ) c’est l’expansion permanente dans l’inflation. Dans le
cas contraire c’est la dépression sans fin.

3- Le modèle néoclassique de Solow (1956)

Robert Solow (Prix Nobel en 1987) attribue l’origine de la croissance par tête au montant de
capital technique investi (machines, équipements, logiciels, infrastructures…). Lorsque
l’investissement par tête dépasse le montant de la dépréciation du capital par tête existant,
chaque travailleur dispose d’un équipement plus performant et peut produire davantage.
Toutefois, lorsqu’on augmente le capital par tête, la production augmente, mais pas de façon
proportionnelle (c’est le principe des rendements décroissants). Ainsi à force d’augmenter le
capital par tête, va venir un moment où la production par tête augmentera moins vite que cela
ne coûte. La croissance par tête va cesser, c’est ce que Solow appelle l’état régulier. L’état
régulier dépend du coût relatif du capital. Si ce dernier diminue (un renchérissement du coût
du travail incitera les entreprises à substituer du capital au travail), alors l’investissement par
tête va augmenter de nouveau jusqu’à ce qu’un nouvel état régulier soit atteint.
Pour résoudre cette situation, Solow a dû imaginer l’intervention d’un autre facteur, le progrès
technique, pour expliquer la croissance à long terme. Ce facteur permet de produire plus. Il
est miraculeux car il engendre des externalités positives.

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4- La théorie de la croissance endogène
Le modèle de Solow n’expliquait pas la croissance, il signalait simplement que grâce au
progrès technique, la croissance peut perdurer. Pour les tenants de la théorie de la croissance
endogène, le progrès technique ne tombe pas du ciel. La croissance est ainsi assimilée à un
phénomène autoentretenu par accumulation de quatre facteurs principaux : la technologie, le
capital physique, le capital humain et le capital public.

Pour Romer (1986), le changement technique provient d’une idée mise en forme et testée.
Cependant, entre l’émergence d’une idée nouvelle et sa mise en œuvre concrète, il peut y
avoir un très long chemin (test, essais-erreurs, etc) qui nécessite le concours de plusieurs
personnes. Bref des coûts de mise au point qui peuvent être très élevés. En revanche, une fois
ces étapes franchies, si l’idée est acceptée, le produit qui en résulte peut être multiplié avec un
coût bien moindre (ainsi le premier disque compact, le premier ordinateur ont nécessité des
efforts colossaux de la part de ceux qui les ont mis au point, cependant leur reproduction à
l’identique a été beaucoup plus facile). Le propre des idées qui provoquent des changements
techniques, est qu’une fois les plâtres essuyés, elles donnent naissance à des rendements
croissants (les exemplaires suivants coûtent beaucoup moins chers), voire fortement croissants
(duplication d’un logiciel). Si bien que pour celui qui s’est efforcé de transformer l’idée en
produit, le risque existe que des concurrents en profitent et que lui ne récupère jamais son
investissement initial, alors que ces concurrents s’enrichissent. Des droits de propriété
intellectuelle limiteront ce risque : brevets ou copyright protègent l’inventeur qui dispose d’un
monopole d’exploitation (limité dans le temps) sur l’œuvre ou le produit tiré de son travail. Le
changement technique sera d’autant plus intense que les innovateurs espèreront en tirer un
profit important.

Le capital physique, c’est l’équipement dans lequel investit une entreprise pour la production
de biens et de services. Romer (1986) a cependant renouvelé l’analyse en proposant un
modèle qui repose sur les phénomènes d’externalités entre les firmes : en investissant dans de
nouveaux équipements, une firme se donne les moyens d’accroître sa propre production mais
également celles des autres firmes concurrentes ou non. L’explication donnée à ce
phénomène réside dans le fait que l’investissement dans de nouvelles technologies est le point
de départ à de nouveaux apprentissages par la pratique. Parmi les formes d’apprentissage, on
peut citer l’amélioration des équipements en place, les travaux d’ingénierie (agencement des

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techniques existantes), l’augmentation de la compétence des travailleurs…Or ce savoir ne
peut être approprié par la firme qui le produit. Il se diffuse inévitablement aux autres firmes.
L’investissement a un double effet : il agit directement sur la croissance et indirectement sur
le progrès technique.

Le capital humain a été mis en évidence par deux économistes de l’École de Chicago,
Theodor Schultz et Gary Becker, et est au centre des études menées par R.E Lucas (1988). Le
capital humain désigne l’ensemble des capacités apprises par les individus et qui accroissent
leur efficacité productive. Chaque individu est en effet, propriétaire d’un certain nombre de
compétences, qu’il valorise en les vendant sur le marché du travail. Dans ce schéma,
l’éducation est un investissement dont l’individu attend un certain retour. Il est alors naturel
de souligner que la tendance plus que séculaire dans les pays occidentaux à un allongement de
la durée moyenne de la scolarité est une cause non négligeable de la croissance.

Le capital public correspond aux infrastructures de communication et de transport. Elles sont


au cœur du modèle élaboré par Barro (1990). En théorie, le capital public n’est qu’une forme
de capital physique. Il résulte des investissements opérés par l’État et les collectivités locales.
Le capital public comprend également les investissements dans les secteurs de l’éducation et
la recherche. En mettant en avant le capital public, cette nouvelle théorie de la croissance
souligne les imperfections du marché. Outre l’existence de situations de monopole, ces
imperfections tiennent aux problèmes de l’appropriation de l’innovation. Du fait de
l’existence d’externalités entre les firmes, une innovation, comme il a été dit précédemment,
se diffuse d’une façon ou d’une autre dans la société. La moindre rentabilité de l’innovation
qui en résulte, dissuade l’agent économique d’investir dans la recherche développement.

Dans ce contexte, il pourra incomber à l’État de créer des structures institutionnelles qui
soutiennent la rentabilité des investissements privés et de subventionner les activités
insuffisamment rentables pour les agents économiques et pourtant indispensables à la société.

5- L’École de la régulation

La théorie de la régulation est une théorie économique qui tente d’expliquer le passage de la
croissance à la crise, sans invoquer de chocs externes. A partir des travaux fondateurs de

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Michel Aglietta et de Robert Boyer, elle apparaît au milieu de la décennie de 1970, passable
de la croissance à la crise aux États-Unis et en Europe, signifiant la fin des Trente Glorieuses.
Cette école précise que la généralisation de l'échange marchand rend les crises possibles. Il
introduit une notion intermédiaire, celle de régime d'accumulation, suggérant que de telles
contradictions peuvent être surmontées : « On désignera sous ce terme l'ensemble des
régularités assurant une progression générale et relativement cohérente de l'accumulation du
capital, c'est-à-dire permettant de résorber ou d'étaler dans le temps les distorsions et
déséquilibres qui naissent en permanence du processus lui-même ». En ce sens, les crises
économiques majeures sont des crises de mutation entre une régulation ancienne qui ne
permet plus la croissance économique et une nouvelle régulation qui permettra de résoudre les
causes profondes de la crise. L'origine même de ces régularités apparaîtra au travers des
formes institutionnelles, définies comme la codification d'un ou plusieurs rapports sociaux
fondamentaux. R. Boyer introduit cinq formes institutionnelles (la monnaie, le rapport
salarial, la concurrence, les modalités d'adhésion au régime international, l'État) intervenant
dans la détermination du régime d'accumulation.

Section 4 : LES ANALYSES EMPIRIQUES DE LA CROISSANCE


Les analyses empiriques cherchent d’une part à rendre compte de la dimension historique de
la croissance, d’autre part à revenir sur les déterminants de cette croissance (productivité du
travail, productivité du capital et progrès technique).

1- Les étapes de la croissance de Rostow (1960)


Rostow (1960) considérait que l’on pouvait dire de toutes les sociétés qu’elles passent par
l’une des cinq phases suivantes : la société traditionnelle, les conditions préalables au
démarrage (ou décollage), le démarrage (ou décollage), le progrès vers la maturité, et l’ère de
la consommation de masse.

1-1- La société traditionnelle


Ce qui caractérise le plus la société traditionnelle, c’est que « le rendement potentiel par
individu ne peut dépasser un niveau maximum ». D’une façon générale, la société
traditionnelle doit consacrer une partie conséquente de ses ressources à l’agriculture. Par la
même occasion, la civilisation agricole lui a imposé une structure sociale hiérarchisée dans
laquelle les liens de famille et de clans jouent un rôle primordial. Le centre de gravité

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politique se trouve dans les régions, entre les mains de ceux qui possèdent la terre (le
propriétaire foncier).

1-2- Les conditions préalables au démarrage


La seconde étape est une voie de transition pour les sociétés qui sont parvenues à créer les
conditions nécessaires au décollage. D’un point de vue historique, cette étape est apparue en
Europe Occidentale fin du XVIIème et début du XVIIIème siècles. La Grande Bretagne a été le
premier pays à réunir l’ensemble de ces conditions. Le progrès économique permet
d’atteindre d’autres objectifs : amélioration des conditions de vie et de l’intérêt général,
extension de l’instruction… De nouveaux hommes animés de l’esprit d’entreprise sont prêts à
mobiliser leurs énergies et leurs moyens (épargne), à prendre des risques pour réaliser des
profits. Les banques voient le jour. Les investissements se concentrent dans les transports, les
communications et les matières premières. Le commerce international se généralise à un plus
grand nombre de biens et de pays.

1-3- Le décollage
Durant la phase de décollage, la société finit par renverser les obstacles économiques,
sociaux, culturels et politiques qui s’opposaient à son émancipation. Dès lors, la croissance
devient une fonction normale de l’économie. D’une manière générale, la cause du décollage
fût essentiellement d’ordre technologique. L’économie n’a pu démarrer que lorsqu’un capital
social s’est constitué et que le progrès technique est passé de l’agriculture à l’industrie. Cette
croissance est avant tout quantitative, elle se traduit par une hausse des taux d’investissement
et d’épargne réels (de 5% à 10%). Les capitaux étrangers ont constitué une grande proportion
des investissements réalisés. La mécanisation et l’industrialisation se développent rapidement
grâce au réinvestissement des profits, elles entraînent avec elles, l’essor des services et
stimulent la demande. La classe des entrepreneurs s’élargit.

1-4- La marche vers la maturité


La société entame une longue période de progrès soutenu, c’est la marche vers la maturité.
L’économie se développe à un rythme important dans tous les secteurs. Le volume des
investissements passe de 10 à 20% du revenu national. Les industries lourdes (charbon,
sidérurgie, industries mécaniques) cèdent progressivement leur place aux industries de
machines-outils, aux industries électriques et chimiques. Le commerce international se
structure autour des spécialisations et de la division internationale du travail. La société

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renonce aux valeurs et aux institutions anciennes de manière à stimuler le processus de
croissance.

1-5- L’ère de la consommation de masse


Durant l’ère de la consommation de masse, la production de biens de consommation durables
(bicyclettes, appareils électriques, machines à coudre…) et de services constitue l’essence du
capitalisme et le symbole du consommateur souverain. D’un point de vue historique,
l’élément décisif serait l’apparition de l’automobile populaire à bon marché. Rostow situe le
tournant en 1913-1914, période durant laquelle Ford mit au point la première chaîne de
montage aux États-Unis. Rostow considère que deux phénomènes sont à l’origine de cette
transformation :
 le revenu réel par habitant s’est élevé à un niveau tel que de nombreux individus
peuvent satisfaire leurs besoins élémentaires et consacrer une part importante de leur
budget à d’autres fins ;
 la composition de la main d’œuvre s’est modifiée sous l’effet conjugué d’une montée
de la population urbaine et d’un accroissement de la population d’ouvriers qualifiés et
d’employés de bureau. Le progrès technique n’est plus une fin en soi, une grande
partie des ressources sont en effet destinées à la prévoyance et la Sécurité sociale
(c’est l’ère de l’État Providence).

2- Les travaux de Carré, Dubois et Malinvaud (1973)

Dans leur ouvrage « Abrégé de la croissance française », Carré, Dubois et Malinvaud ont
montré qu’une partie significative de la croissance économique française s’expliquait non par
l’augmentation des quantités de facteurs de production utilisés, mais par l’introduction du
progrès technique. Alors que le taux de croissance de l’économie française avait été de 5,2%
par an de 1951-1973, les contributions des facteurs travail et capital étaient respectivement de
0,55% et 1,55%. Le progrès technique expliquerait à lui seul plus de 3% de cette croissance.
Le progrès technique joue en effet un double rôle sur la croissance économique. Il stimule la
demande (création de nouveaux biens et nouveaux besoins, amélioration des produits arrivés à
maturité ou en déclin). Il stimule l’offre (amélioration de la productivité des équipements,
meilleure organisation du travail) tout en modifiant l’utilisation des facteurs de production. Il
contribue, d’une part à la substitution du travail qualifié au travail non qualifié (l’introduction
de machines plus sophistiquées nécessite des niveaux de qualification plus élevés, on observe

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ainsi une modification de la structure des emplois), d’autre part, à la substitution du capital au
travail (le progrès technique en perfectionnant les équipements les rend plus productifs et
permet d’économiser du travail. Ceci a bien sûr une conséquence non négligeable sur la
montée du chômage et la réduction de la durée du travail).

3- Les travaux de Madison (1994, 2001)

Madison (1994, 2001) a proposé une étude de la croissance et de la productivité du travail sur
longue période (1870-1998). Sur ces presque 130 années, la production par emploi a été
multipliée par un facteur d’environ 12 en France et 8,5 aux États-Unis. Compte tenu de la
baisse de la durée moyenne du travail sur la période, les gains de productivité sont près de
deux fois plus importants en termes horaires : la production par heure travaillée a été
multipliée respectivement par environ 24 et 15,5.
Il distingue cinq grandes phases : une première phase correspond à la première révolution
industrielle (1820-1870) durant laquelle l’Europe et les pays neufs (États-Unis, Canada,
Australie, Nouvelle Zélande) réalisent plus de la moitié de la croissance mondiale ; une phase
plus diffuse (1870 – 1913) ; une période de ralentissement (1913-1945) ; les trente glorieuses
(1945-1973), soit l’âge d’or de la croissance pour les pays occidentaux ; enfin une phase de
ralentissement dans les anciens pays industrialisés (à partir des années 80).

Section 5 : LES EFFETS DE LA CROISSANCE


On attend normalement de la croissance économique des effets positifs. Toutefois des
situations déplorables lui sont de plus en plus imputables.

1- Croissance économique, facteur de bien-être économique et social


La croissance économique favorise :
 Une amélioration générale du niveau de vie des populations, ainsi que de leur cadre de
vie ;
 Une réduction progressive de la pénibilité et du temps de travail ;
 Une amélioration de la qualité des produits et de leur diversité ;
 Une restructuration des secteurs économiques conduisant à la tertiarisation de la
société et à l’émergence de nouveaux secteurs ;
 La réduction de la pauvreté ;
 La création d’emplois rémunérés ;

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 Le progrès économique (amélioration du revenu par tête et des principaux indicateurs
macroéconomiques) ;
 La réalisation d’infrastructures socio-économiques ;
 Le progrès scientifique (recherche-développement) ;
 L’urbanisation et la modernisation de la société, notamment avec le développement
des TIC ;
 L’élévation de l’espérance de vie.

2- Les effets pervers de la croissance


Les nuisances nées de la croissance sont :
 Les catastrophes naturelles ;
 Les menaces sur la santé des individus ;
 Le renforcement des disparités sociales (catégorisation sociale de la population) et
régionales (dues à l’exode des populations) ;
 L’épuisement des ressources naturelles (déforestation, exploitation abusive des
ressources non renouvelables), qui compromet le développement durable ;
 La dégradation de l’environnement du fait de la pollution ;
 La marginalisation des pauvres, notamment des pays pauvres.

CONCLUSION
La croissance économique est un phénomène accompagné généralement de changements
structurels. Elle se distingue des notions telles que l’expansion, le progrès et le
développement. Depuis la révolution industrielle, la croissance a fortement contribué à
l’amélioration des conditions de vie des populations. Toutefois ces dernières décennies, les
mécontentements nés des catastrophes environnementales (écologiques et spatiales) lui sont
en partie imputables. La théorie de la croissance endogène met l’accent sur quatre facteurs qui
influencent le taux de croissance économique : les rendements croissants grâce aux gains
d’échelle ; l’intervention de l’État, notamment par l’investissement dans les infrastructures ; la
recherche-développement ou l’innovation et la connaissance ou capital humain qui
s’accumule.

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Chapitre 2 : LE CHOMAGE

INTRODUCTION
Le marché du travail est le lieu théorique de rencontre entre l'offre de travail et la demande de
travail. L'offre de travail émane des travailleurs qui proposent leur force de travail, alors que
la demande de travail provient des entreprises qui ont besoin de la force de travail pour
produire. La demande de travail constitue l'offre d'emplois, alors que l'offre de travail
représente la demande d'emplois. On peut ainsi considérer l'offre de travail comme l'ensemble
des capacités physiques et intellectuelles que les hommes mettent en œuvre pour produire des
biens et services nécessaires à leurs besoins. La demande de travail, ou offre d'emplois,
représente l'ensemble des activités rémunérées proposées par les agents économiques
producteurs de biens et services.
Deux types de déséquilibres se rencontrent sur le marché du travail : la pénurie d'emplois ou
la pénurie de main d'œuvre. Toutefois, le déséquilibre majeur de ces dernières décennies, sur
le marché du travail, est le chômage. Lorsqu'il se prolonge, il débouche sur l'exclusion d'une
partie des travailleurs : ils n'ont plus accès à l'emploi tant la suspicion d'improductivité qui
pèse sur eux est forte. En outre, le chômage conduit les agents économiques à faire des
prévisions pessimistes, en matière de consommation et d'investissement, prévisions qui
rejaillissent sur l'activité économique et le niveau de l'emploi. Lutter contre le chômage
devient une nécessité sociale et économique. Au préalable, il faut en connaître les causes.

Section 1 : LES CARACTERISTIQUES DU MARCHE DU TRAVAIL


Dans une économie, le travail représente l'ensemble des capacités physiques et intellectuelles
que les hommes mettent en œuvre pour produire les biens et services nécessaires à la
satisfaction de leurs besoins. Il s'agit de l'ensemble des forces disponibles pour produire.
Ainsi, le marché du travail est caractérisé par l’offre et la demande de travail, ainsi que des
relations entre les deux.

1- L’offre de travail
La contribution du facteur travail peut s'expliquer par une plus grande utilisation de celui-ci
(aspects quantitatifs) ou par une efficacité accrue (aspects qualitatifs).

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1-1 Les aspects quantitatifs de l'offre de travail
Le volume de travail dans une économie dépend à la fois du nombre d'actifs disponibles et du
nombre d'heures de travail qu'effectue en moyenne chaque actif.

1-1-1 La population active


La population active est définie comme l’ensemble des personnes exerçant ou cherchant à
exercer une activité rémunérée. Elle regroupe donc la population active occupée et les
chômeurs (au sens du Bureau international du travail : BIT).

Population active = Actifs occupés + Chômeurs

1-1-2 La durée du travail

La durée du travail est le temps de travail qu'accomplit un salarié dans le cadre de la


production de biens et services. Elle revêt différentes formes : durée journalière,
hebdomadaire, annuelle ainsi que la durée de vie active qui est influencée d'une part par
l'entrée des jeunes sur le marché du travail, et d'autre part de la sortie du marché du travail due
au départ à la retraite.

1-1-3 Le taux d’activité


Le taux d’activité (en %) est le rapport entre le nombre d’actifs (actifs occupés et chômeurs)
et l’ensemble de la population correspondante.

1-1-4 Le taux d’emploi


Le taux d’emploi d’une classe d’individus est calculé en rapportant le nombre d’individus de
la classe qui ont un emploi au nombre total d’individus compris dans celle-ci. On se limite le
plus souvent à la population en âge de travailler (définie, en comparaison, comme les
personnes âgées de 15 à 60 ans en Côte d’Ivoire).

1-1-5 Les causes de l'évolution de l'offre de travail


L'évolution de la population active est, tout d'abord, largement tributaire de l'évolution
démographique. Toutefois, le fait majeur de l'augmentation de la population active ces
dernières décennies est constitué par la montée de taux d'activité féminin.

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Le taux d'activité est le rapport entre le nombre d'actifs d'une population concernée et la
totalité de cette population. Par exemple :

Taux d'activité féminin

1-2 Les aspects qualitatifs de l'offre de travail

1-2-1 La qualité du facteur travail

La qualité du facteur travail renvoie à la notion de productivité. La productivité du travail est


le rapport entre un volume de production réalisé et le volume de travail nécessaire à cette
production.

Productivité du travail

1-2-2 Les explications de l'évolution de la qualité du facteur travail


Si la productivité mesure la qualité de la main d'œuvre, cette dernière évolue dans le temps en
fonction de trois caractéristiques individuelles des personnes actives : le niveau de
qualification, l'âge, le sexe. Tout d'abord, l'éducation est en effet une source de qualité de la
main d'œuvre. Ainsi, l'âge moyen de fin d'études et le niveau de diplôme peuvent représenter
une source d'évaluation de ce niveau d'éducation.
Ensuite, on indique traditionnellement que la productivité féminine est inférieure à celle de la
main d'œuvre masculine. L'explication ne tient pas dans d'hypothétiques inégalités naturelles,
mais dans le fait que les femmes subissent un certain nombre de handicaps au cours de leur
vie active (maternité par exemple) qui freinent l'accès à de plus grandes qualifications
professionnelles.
Enfin, on observe une relation entre l'âge et la productivité. L'expérience, et donc la
productivité, augmente dans un premier temps avec l'âge, avant de décliner au fur et à mesure
que les capacités physiques et intellectuelles s'épuisent avec le vieillissement. Mais l'évolution
de la productivité est aussi le résultat d'un effet de structure, car il existe en effet des
différences de productivité entre branches.

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1-2-3 Les sources d'amélioration de la qualité du facteur travail
Une explication fondamentale de la productivité du travail provient de la plus grande
qualification de la main d'œuvre obtenue grâce à la formation initiale et continue. Dès lors,
on parle de capital humain pour caractériser le facteur travail. L'économiste Gary Becker, prix
Nobel d'économie en 1992, avance l'idée selon laquelle les dépenses de formation contribuent
à constituer du capital humain, au même titre que les dépenses d'investissement d'une
entreprise amènent à introduire du progrès technique dans le capital technique. En
conséquence, la formation représente un facteur essentiel de la productivité du travail que les
entreprises et l'État prennent de plus en plus en compte. La théorie du capital humain souligne
que la productivité des travailleurs dépend pour une part importante de leur expérience dans
l'entreprise et à leur poste de travail dans cette entreprise.

2- La demande de travail
2-1 L'évolution des emplois
Les emplois proposés par les entreprises sont de plus en plus des emplois de types particuliers
: on parle de formes particulières d'emploi, ou encore de formes précaires d'emplois (FPE).
Les FPE concernent l'ensemble des emplois qui ne sont pas des contrats à durée indéterminée
(CDI), c'est-à-dire des emplois marqués par l'absence de relation stable et durable entre
employeur et salarié.

2-2 Les effets du progrès technique sur l'emploi


Le progrès technique est facteur de bouleversements et sa diffusion se heurte à ceux qui ont
intérêt à la conservation des situations acquises (résistance au changement). Il crée et détruit
des emplois (processus de « destruction créatrice » de Schumpeter, 1942), provoquant un
changement de la structure des emplois. Il ne conduit pas nécessairement à une augmentation
des qualifications, même s'il s'agit d'une tendance générale, car la machine élimine aussi du
travail qualifié.

3- Les déséquilibres sur le marché du travail : le chômage


Les déséquilibres sur le marché du travail désignent les décalages entre l'offre et la demande
de travail. Ils déterminent généralement le chômage, ce qui n'exclut pas qu'il peut y avoir des
déséquilibres partiels en sens inverse, c'est-à-dire des offres d'emplois non satisfaites, en
raison, par exemple, d'un manque de mobilité géographique et professionnelle de la main

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d'œuvre. Il convient donc de définir la notion de chômage, d'en présenter les principales
mesures pour ensuite repérer les inégalités face au phénomène.

3-1 Définition du chômage


En application de la définition internationale adoptée en 1982 par le BIT, un chômeur est une
personne en âge de travailler (15 ans ou plus) qui répond simultanément à trois conditions :
­ être sans emploi, c’est-à-dire ne pas avoir travaillé, ne serait-ce qu’une heure, durant une
semaine de référence ;
- être disponible pour prendre un emploi dans les quinze jours ;
- avoir cherché activement un emploi dans le mois précédent ou en avoir trouvé un qui
commence dans moins de trois mois.

Le chômage, au sens du BIT, est la situation des personnes en âge de travailler qui sont sans
emploi, à la recherche d'un emploi, et disponibles pour occuper un emploi. Il convient de
préciser que la définition indique que seul le travail rémunéré est pris en compte (dans le
cadre d'une activité salariée ou non salariée, c'est-à-dire indépendante). Le chômage se
caractérise non pas par une absence de travail, mais par une absence d'emploi rémunéré.

3-2 Les mesures du chômage


Le nombre de chômeurs constitue le stock de chômage à un instant donné. Le rapport entre le
nombre de chômeurs et la population active correspond au taux de chômage.

Taux de chômage =

On peut par ailleurs déterminer la part du chômage, qui est un indicateur qui rapporte le
nombre de chômeurs à la population totale (et non plus seulement aux actifs).

Part du chômage = taux de chômage x taux d’activité.

NB : L’étude des taux de chômage n’est pas suffisante pour comprendre l'ampleur du
chômage. Elle doit être complétée par des analyses plus fines, prenant en compte les flux
d’entrée et de sortie du chômage. On détermine à cet effet des indicateurs de fluidité tels que :

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 l’indice d’ancienneté au chômage, qui mesure la durée moyenne de chômage que
subissent les chômeurs ;
 l’indice de vulnérabilité au chômage, qui mesure pour l’ensemble des chômeurs,
suivant leur catégorie d’appartenance, le risque de se retrouver au chômage. Il est égal
au nombre de chômeurs recensés au sein de chaque catégorie, rapporté au nombre
d’actifs effectivement employés dans celle-ci ;
 l’indice d’employabilité, qui équivaut au nombre de chômeurs à la recherche d’un
emploi depuis un an ou plus rapporté au nombre total de chômeurs. Il mesure la
difficulté à retrouver un emploi.

3-3 Les différents types de chômage


On distingue :
 Le chômage conjoncturel : il est lié au ralentissement de l'activité économique. - Le
chômage structurel : il est lié aux modifications des structures de l'économie, telles
que le déclin d'activités traditionnelles (sidérurgie, textile), l'internationalisation des
économies, la tertiarisation des activités etc.
 Le chômage frictionnel : c'est un chômage de courte durée qui correspond au temps
nécessaire pour passer d'un emploi à un autre. Il résulte d'une mobilité trop importante,
ou trop insuffisante de la main d'œuvre. On le considère comme un chômage
incompressible.
 Le chômage « naturel » : c'est la somme du chômage frictionnel et du chômage
structurel.
 Le chômage partiel : il correspond à une réduction forcée du temps de travail décidée
par l'entreprise pour un temps limité, en cas de réduction passagère de l'activité. Il est
en partie indemnisé.
 Le chômage technique : il concerne un arrêt partiel ou total du travail qui résulte de
causes externes à l'entreprise (défaillance d'un fournisseur pour cause de grève par
exemple).

3-4 Les inégalités face au chômage


 Le chômage est différent selon le sexe : quel que soit l'âge, le taux de chômage des
femmes apparaît toujours supérieur à celui des hommes.

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 Le chômage est fonction du diplôme : selon des enquêtes emplois menées par
l’INSEE, plus on grimpe dans la hiérarchie des diplômes ou des niveaux d'études, plus
le taux de chômage diminue.
 Le chômage est fonction de l'âge des actifs : le taux de chômage apparaît plus élevé
pour les jeunes travailleurs. Cependant, les différences entre travailleurs jeunes et âgés
s'observent surtout en matière d'employabilité et de vulnérabilité.

La vulnérabilité est le risque de tomber au chômage. Elle est mesurée par le rapport du
nombre de personnes au chômage depuis moins d'un mois à la population active occupée.

L'employabilité correspond à la probabilité de sortir du chômage. Elle se mesure par le


rapport du nombre de chômeurs ayant au moins un an d'ancienneté au nombre total de
chômeurs.

NB : Les jeunes se caractérisent par une forte vulnérabilité, mais aussi par une forte
employabilité, tandis que les travailleurs âgés s'illustrent quant à eux par une faible
vulnérabilité et une faible employabilité.

3-5 Le chômage de longue durée


On appelle chômeur de longue durée (CLD) toute personne qui se trouve au chômage depuis
plus d’un an. Le chômage de longue durée a fortement augmenté depuis les années 1980. On
note toutefois une corrélation entre l’évolution du chômage global et le CLD à moyen et long
termes. Les analyses montrent que la probabilité de retrouver un emploi diminue au fur et à
mesure que la durée du chômage s’allonge. Seule une reprise forte et durable est susceptible
de provoquer une baisse significative du CLD. Parmi les actifs, ce sont les jeunes qui ont le
taux de chômage de longue durée le plus élevé alors que parmi les chômeurs, la part de CLD
croît avec l’âge. Le chômage de longue durée est traditionnellement plus répandu chez les
femmes mais, ces dernières années, le CLD féminin s’est rapproché de celui des hommes.
Les plus diplômés sont moins exposés au CLD.

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3-6 La structure du chômage

Le chômage a fortement augmenté depuis le milieu des années 1970. Toutefois, certaines
catégories sont clairement plus touchées que d’autres (les femmes, les jeunes, les non
diplômés et, parmi les catégories socioprofessionnelles, les ouvriers et les employés - Source
INSEE). Pour les chômeurs de longue durée, la situation est particulièrement difficile car la
probabilité de retrouver un emploi est faible. Au-delà du chômage, la croissance du sous-
emploi passe aussi par le développement des emplois précaires et du temps partiel. Le risque
de chômage diminue à mesure que le niveau de diplôme s’élève.

Section 2 : LES ANALYSES THEORIQUES DU MARCHE DU TRAVAIL


Le chômage se caractérise par un décalage entre l'évolution de la population active et le
volume des emplois. L'explication de cet écart partage les économistes entre ceux qui pensent
que le chômage est « volontaire », voire naturel, et ceux qui considèrent qu'il est involontaire.
Le point de départ des analyses théoriques est le modèle de la concurrence pure et parfaite
dont on relâche peu à peu les hypothèses, pour mieux rendre compte de la réalité, des faits
observés ou « faits stylisés ».

1- Évolutions divergentes de l'offre et de la demande de travail


1-1 Évolutions comparées de l'emploi et de la population active
L’accroissement de la population active est dû à l'évolution démographique, à la montée de
taux d'activité féminin et à l'immigration. Toutefois, il semble que la croissance de la
population active est régulière alors que la croissance des emplois s'est ralentie ; en d’autres
termes l'évolution de l'emploi s'est modifiée et non l'évolution de la population active.

1-2 Les effets du progrès technique sur le chômage


Il est possible de dire que le chômage provient pour partie d'une inadéquation entre l'offre et
la demande de travail, surtout en raison du progrès technique. En effet, le progrès technique
est à la fois créateur et destructeur d'emplois. En ce sens, ses effets sur l'emploi sont
indéterminés. Il détruit des emplois dans les secteurs où il se diffuse au détriment des
personnes insuffisamment qualifiées. Bien entendu, il est créateur d'emplois dans les secteurs
dits « de pointe » ou émergents.

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En somme, le progrès technique s'il ne s'accompagne pas lors de sa diffusion, d'actions de
formation, peut condamner au chômage une partie de la main d'œuvre. Tout dépend de la
capacité de réponse du système d'éducation et de formation, en temps et en qualité. Le progrès
technique est à l'origine d'un « déversement de main d'œuvre » selon A. Sauvy.
Ce déversement se produit depuis les secteurs dans lesquels s'implante le progrès technique
vers d'autres secteurs. Certes, on avance souvent l'idée que les emplois qui servent à
construire des machines compensent les emplois perdus. C'est en grande partie contestable
car, au niveau macroéconomique, cela signifierait que la production globale est obtenue avec
un même volume de population active : le progrès technique ne serait dans ce cas pas
rentable. En outre, la production de ces machines peut se faire à l'extérieur du pays. Et, pour
finir, la qualification de la main d'œuvre qui a perdu son emploi n'est pas forcément adaptée
aux nouveaux emplois créés.

Cependant, le mécanisme du « déversement de main d'œuvre » trouve sa source ailleurs. On


peut en effet penser que le progrès technique conduit à faire baisser les prix des biens dans les
secteurs dans lesquels il est mis en œuvre. Cette baisse des prix a deux effets bien connus des
micro économistes. Tout d'abord, elle provoque un effet de substitution en vertu duquel les
ménages consomment une plus grande quantité du bien concerné. Mais elle est aussi à
l'origine d'un effet de revenu : la baisse du prix de ces biens accroît le pouvoir d'achat du
revenu des ménages et les amène à consommer d'autres biens, plus généralement des services
comme le montre la montée de l'emploi dans le tertiaire. Déversement de main d'œuvre :
c’est une théorie économique indiquant que des progrès techniques améliorant la productivité
engendrent un transfert (déversement) des emplois d'un secteur d'activité vers un autre. Cette
thèse est formulée par l'économiste et démographe français Alfred Sauvy.

2- Le chômage « volontaire » : le chômage classique


2-1 Le chômage est fonction du prix du travail
Pour les économistes classiques et néoclassiques, le travail est considéré comme un bien qui
s'échange sur un marché. La demande de travail augmente au fur et à mesure que le prix du
travail (le salaire réel) diminue, alors que l'offre de travail diminue dans le même temps.
Les individus arbitrent en effet entre leurs loisirs et le travail (qui est une renonciation aux
loisirs). Leur budget temps est réparti entre travail et loisirs : plus le salaire réel est élevé sur
le marché du travail, plus il permet de compenser la renonciation aux loisirs, plus l'offre de

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travail augmente. Il faut ici comprendre que le travail est source de désutilité, puisque l'on
renonce au temps libre, mais également d'utilité grâce à la quantité de biens que le salaire réel,
obtenu en contrepartie du travail, permet d’obtenir.
Toutefois, la hausse du salaire réel engendre deux effets sur l'offre de travail. Un effet de
substitution, tout d'abord, dans la mesure où l'individu remplace du temps libre par du temps
de travail, comme nous venons de le voir. Mais aussi un effet dit de revenu qui joue en sens
inverse : lorsque le salaire réel horaire augmente par exemple, l'individu peut être incité à
travailler moins longtemps tout en conservant un même salaire mensuel. En somme, pour les
néoclassiques, le lien croissant entre l'offre de travail et le salaire repose sur l'hypothèse que,
pour les individus, l'effet de substitution l'emporte sur l'effet de revenu. Pour les auteurs
néoclassiques, la demande de travail est fonction du prix du travail : l'entreprise ne demande
du travail que lorsque le salaire réel (prix du travail) est inférieur à la productivité marginale.
En d'autres termes, le niveau d'embauche s'arrête à partir du moment où le dernier embauché
coûte plus qu'il ne rapporte. En outre, le modèle néoclassique induit une substituabilité des
facteurs de production : lorsque le prix du travail est trop élevé, les entreprises adoptent une
combinaison de production plus intense en capital technique.
Ainsi, toute augmentation de l'offre de travail conduit à une situation de chômage puisque
pour le même niveau de salaire réel les individus disposés à travailler sont plus nombreux.
Un nouvel équilibre s’obtient alors par la baisse du salaire réel : la demande des entreprises
augmente et l'offre de travail diminue.

Au total, le chômage sur le marché du travail n'existe pas puisque l'offre et la demande
s'ajustent et déterminent un prix, le salaire réel pour lequel les individus arbitrent leur temps
en faveur des loisirs. Il ne peut y avoir que du chômage volontaire au sens où, pour un salaire
donné, les individus préfèrent l'oisiveté au travail. Selon Arthur-Cécil Pigou (1933), le
chômage est volontaire car il résulte de travailleurs qui n'acceptent pas de salaires réels plus
faibles.

2-2 Le chômage est fonction du coût du travail


Pour rester compétitives, les entreprises doivent maîtriser leurs coûts, en grande partie
constitués des charges de personnel. Aussi, un niveau trop élevé du coût du travail représente
un obstacle à l'embauche (le coût du travail est la somme des salaires, des cotisations sociales
et taxes assises sur la masse salariale). Cet obstacle crée un déséquilibre sur le marché du

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travail théorique, déséquilibre qui peut être durable si les mécanismes du retour à l'équilibre
ne fonctionnent pas. C'est le cas lorsque l'on observe une rigidité à la baisse des salaires du
fait de la réglementation (SMIG) ou de la puissance de négociation des syndicats. Le chômage
serait donc le résultat d'un dysfonctionnement du marché du travail qui empêche la baisse des
salaires. Jacques Rueff dénonce, dès 1931, la puissance des syndicats britanniques et
l'existence d'un système d'indemnisation du chômage dans un article célèbre, L'assurance
chômage, cause du chômage permanent. Ces deux éléments sont cause selon lui de la rigidité
à la baisse des salaires nominaux qui empêchent tout retour à l'équilibre sur le marché du
travail. Toutefois, David Card et Alan Krueger, in « Minimum wages and employment »
(1994), ont pu mener une expérience pour tester la relation entre la hausse du salaire
minimum et le niveau de l'emploi. Profitant de l'annonce d'un relèvement de ce salaire
minimum dans l'État du New Jersey, ils ont comparé la situation avec celle de l'État de
Pennsylvanie, État dans lequel aucune modification du salaire minimum n'était prévue. Ainsi,
comme le soulignent Pierre Cahuc et André Zylberberg (Les ennemis de l'emploi, 2015), la
hausse du salaire minimum n'a pas eu d'impact négatif sur l'emploi dans les fast-foods du
New-Jersey, elle aurait même eu un effet faiblement positif, en comparaison de la zone « test
» de Pennsylvanie. L'explication réside dans la position de monopsone dont bénéficient les
employeurs : ils peuvent verser des salaires inférieurs à la productivité marginale du travail,
ce qui les incite à embaucher. Ainsi, la hausse du salaire réel (salaire minimum revalorisé)
conduit un plus grand nombre de personnes à vouloir travailler sans que pour autant cette
hausse ne conduise à dépasser la productivité marginale du travail. Il demeure intéressant
d'embaucher ces personnes pour les employeurs. En somme, le chômage classique est celui
qui résulte d'un niveau trop élevé des salaires, ou plus généralement des entraves à la
flexibilité du marché du travail.

2-3 Le chômage résulte du comportement des individus


Le modèle néoclassique repose sur une circulation parfaite de l'information sur le marché du
travail. Cette hypothèse lorsqu'elle n'est pas vérifiée conduit à une forme de chômage
frictionnel. Ainsi, la théorie de la recherche d'emploi (ou job search, mise en évidence par
Alchian, 1972, d'après une intuition de Stigler) explique que certains individus quittent leur
emploi dans l'idée d'en trouver un autre mieux rémunéré. S'ils sont obligés de quitter leur
emploi, c'est justement parce que l'information est imparfaite sur le marché du travail : ils
doivent se consacrer à plein temps à la recherche d'informations sur les emplois disponibles.

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Bien entendu, le comportement rationnel des individus repose sur une analyse coût/avantage :
le coût de la recherche d'emploi (y compris l'abandon d'un salaire) doit être compensé par
l'avantage obtenu en matière de salaire avec le nouvel emploi trouvé en prenant le risque de
ne pas trouver mieux. On comprend aisément que ce comportement est source de passages au
chômage, d'autant plus réguliers et plus longs que l'information est imparfaite... et que le
système d'indemnisation améliore la rentabilité de l'opération. Il s'agit à nouveau d'une forme
de chômage volontaire, qui apparaît d'autant plus incompressible que l'information disponible
sur le marché du travail est imparfaite. De plus, le passage d'un emploi à un autre peut être
rendu obligatoire pour l'individu par l'évolution des structures de l'économie. Le temps de
formation nécessaire pour passer des emplois détruits aux nouveaux emplois conduit à un
chômage qualifié de structurel. Au total, Milton Friedman (1974) considère comme un «
chômage naturel » le chômage volontaire qui représente la somme des chômages frictionnel et
structurel.

3- Le chômage involontaire
On peut dire qu'il existe du chômage involontaire, en référence à la théorie classique, s'il
existe des individus prêts à travailler pour un salaire inférieur à celui du marché du travail,
pour une qualification équivalente, et qui ne trouvent pas d'emploi.

3-1 Le schéma keynésien


Dans le cadre d'une approche positive, Keynes part du constat que les salaires nominaux sont
rigides à la baisse. Il n'y a donc pas d'espoir que le chômage disparaisse par une diminution du
prix du travail : celui-ci ne peut descendre en dessous d'un minimum du fait de la présence
des syndicats.
Le schéma du chômage keynésien nous indique que si la demande de travail des entreprises
baisse (en raison d'anticipations pessimistes de l'évolution de la consommation, de
l'investissement et des exportations), le salaire réel reste néanmoins au niveau initial (compte
tenu de l'allure coudée de l'offre de travail), ce qui occasionne un chômage. Si la baisse des
salaires apparaît impossible, elle est en outre peu souhaitable. En effet, un niveau trop faible
des salaires nuit à la consommation des ménages, et donc à la demande qui s'adresse aux
entreprises, conduisant à une aggravation du chômage. En quelque sorte, une baisse des
salaires pourrait conduire à des anticipations pessimistes de l'évolution de la demande globale.

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Le chômage, dans la conception keynésienne, n'est pas volontaire mais peut être le signe d'un
équilibre de sous-emploi. Keynes considère que les entrepreneurs anticipent l'évolution de la
demande qui s'adresse à eux et en déduisent alors le niveau de la production à réaliser. Ce
niveau de production indique alors un niveau d'emploi. Il se peut fort bien que le niveau de la
demande effective (anticipation de la demande future) soit inférieur à la réalisation de la
demande, ce qui débouche alors sur un équilibre de sous-emploi des facteurs de production
(capacités de production inutilisées, chômage). Il est à noter que si les entreprises ne peuvent
obtenir une baisse des salaires réels par la diminution des salaires nominaux, celle-ci devient
possible grâce à une hausse des prix.

3-2 Le chômage est dû au ralentissement de l'activité économique


En vertu de la loi d'Okun (1962), on sait que l'on peut établir une relation inverse entre le
taux de croissance du PIB et le taux de chômage. Une forte croissance s'accompagne d'une
baisse du taux de chômage, une faible croissance d'une augmentation du taux de chômage.
Dans cette situation, la demande qui s'adresse aux entreprises stagne ou diminue et celles-ci
réajustent à la baisse leur volume de main d'œuvre pour l'adapter au volume de la production.
Ce faisant, les licenciements économiques se multiplient et augmentent le niveau du chômage.
En tout cas, même en l'absence de licenciements, le volume d'emplois créés peut s'avérer
insuffisant face au solde des entrées (fin d'études) et sorties du marché du travail (retraites).
Dans ce cas d'insuffisance de la demande globale, on parle de chômage keynésien.

Le chômage keynésien est celui qui résulte d'une insuffisance de la demande effective, c'est-
à-dire de la demande globale anticipée. Si les entreprises font des anticipations pessimistes,
elles investissent moins et embauchent moins, contribuant de fait à une faible progression de
la demande, et donc à un accroissement du chômage. Les débouchés pour une entreprise
dépendent des revenus versés par les autres entreprises, c'est-à-dire des anticipations faites par
ces autres entreprises sur l'évolution de la demande. En somme, la demande effective chez
Keynes (ou demande globale anticipée) est le résultat des décisions de production de toutes
les entreprises sachant que chacune décide en anticipant la décision des autres...
Bien entendu, si elles font toutes des anticipations optimistes, les effets sur l'emploi sont
positifs. On comprend pourquoi les effets d'annonce des gouvernements sont essentiels pour
influencer les anticipations des ménages, et donc des entreprises : répéter inlassablement que

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la situation économique s'améliore favorise les anticipations optimistes, lesquelles conduisent
à une amélioration de la situation économique.

3-3 La théorie du salaire d'efficience


Selon le schéma classique, l'existence du chômage devrait conduire à une baisse des salaires.
Cependant, les employeurs rationnels peuvent ne pas avoir intérêt à diminuer les salaires. A
l'origine, le salaire d'efficience vient des stratégies mises en place par les entreprises pour
dissuader les travailleurs de rechercher un emploi dans une autre entreprise, donc pour éviter
les coûts de rotation de la main d'œuvre (coût de licenciement, coût d'embauche, de
recrutement et de formation). Les firmes arbitrent en effet entre des salaires faibles
accompagnés de coûts de rotation importants, et des salaires élevés liés à de faibles coûts de
rotation.
Les employeurs peuvent, en outre, juger qu'un salaire élevé est source de motivation et de
fidélisation des salariés selon Janet Yellen (1984). Cette dernière s'est appuyée sur les études
de Leibenstein (1957) dans le domaine de l'économie du développement. Selon Leibenstein,
la productivité individuelle dans les pays en développement est une fonction du salaire réel
mesuré par la ration alimentaire que reçoit chaque travailleur. Ce ne serait donc plus la
productivité marginale qui déterminerait le salaire, comme dans le modèle néoclassique, mais
le salaire versé qui agirait sur le niveau de productivité des travailleurs.

Le salaire d'efficience est le niveau optimal de salaire qui permet d'atteindre la productivité
maximale du travail de celui qui le perçoit. Comme la baisse des salaires serait source de
démotivation, il convient de maintenir leur niveau. Ce faisant, les salaires versés dans les
entreprises sont supérieurs au salaire d'équilibre, sur le marché du travail néoclassique, qui
garantirait la résorption du chômage. Dans tous les cas, il existe donc des individus qui
souhaiteraient travailler pour un salaire inférieur à ceux pratiqués par les entreprises et qui ne
trouvent pas d'emploi, il s'agit de chômeurs involontaires.
Mais le salaire d'efficience prend aussi sa source dans la théorie des incitations (théorie qui
étudie la manière d'inciter les agents à se comporter d'une manière attendue). La théorie des
incitations repose sur le modèle Principal/Agent (ou Mandant/Mandataire) de la théorie de
l'agence, avec asymétrie d'information : le principal est moins informé que l'agent qui dispose
d'informations privées sur ses propres actions. Malheureusement, la satisfaction du principal
dépend de l'information cachée de l'agent. Il s'agit donc de lui proposer des contrats de travail

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destinés à révéler cette information cachée, car la recherche d'indications sur l'agent s'avère
coûteuse (un peu comme pour les contrats d'assurance auto). Selon Weiss (1980), le salaire de
réservation est un signal révélateur de la qualité du candidat à un poste dans l'entreprise. Le
salaire de réservation peut en effet refléter ce que le candidat aurait pu obtenir dans une autre
entreprise (et donc justifier qu'il ne souhaite pas travailler à un salaire inférieur). On suppose
que le salaire de réservation est une fonction croissante des aptitudes du candidat. Ainsi,
lorsque l'entreprise propose un salaire élevé elle va sélectionner les meilleurs : un travailleur
qui se déclare prêt à travailler pour un salaire plus faible signale qu'il a de moindres aptitudes
à l'emploi (phénomène d'anti-sélection ou sélection adverse). En raisonnant à l'inverse, si
l'entreprise propose des salaires peu élevés elle attire les individus qui disposent de plus
faibles aptitudes à l'emploi : il en résulte un phénomène d'anti sélection ou sélection adverse.
De nouveau, le salaire est déconnecté du salaire sur le marché du travail concurrentiel, ce qui
provoque du chômage involontaire.

Enfin, Shapiro et Stiglitz (1984), dans le modèle dit du « tire-au-flanc », ont lié la théorie du
salaire d'efficience au risque moral, ou encore aléa moral. Au moment de l'embauche,
l'entreprise ne peut pas toujours détecter avec précision les individus « paresseux », en raison
de l'asymétrie d'information qui existe entre le recruteur et le recruté : seul ce dernier sait s'il
est un « tire au flanc » ou non... En leur proposant un salaire supérieur à celui qu'ils pourraient
trouver sur le marché du travail, l'entreprise va encourager les salariés à maintenir à un niveau
élevé leur effort productif. En effet, adopter un comportement de « tire au flanc » ne serait pas
rationnel car les risques d'être détecté et licencié existent, avec la certitude de ne pas trouver
un emploi aussi bien rémunéré ailleurs.
Cependant, si toutes les firmes raisonnent ainsi, elles vont toutes choisir des salaires voisins et
aucune ne se distinguera des autres (le différentiel de salaire incitatif disparaît). De toutes les
façons, les salaires fixés dans les entreprises demeurent supérieurs à celui du marché du
travail concurrentiel, ce qui engendre un chômage involontaire durable.

3-4 La théorie des contrats implicites


La théorie des contrats implicites de Bailey (1974) et Azariadis (1975) montre que les
salaires dans les entreprises sont déconnectés du marché du travail parce que les salariés ont
une aversion pour le risque de fluctuations excessives de leurs revenus. En conséquence, ils
acceptent, dans des contrats plus ou moins implicites, une rémunération indépendante de la

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conjoncture. Les entreprises jouent alors le rôle d'une compagnie d'assurance contre le risque
de chômage. En période de forte activité ils « payent » une prime d'assurance, c'est-à-dire
qu'ils renoncent à une hausse de salaire qu'ils auraient pu obtenir ailleurs (sur le marché du
travail les salaires sont plus élevés). Au contraire, en période de faible activité économique, ils
touchent une « indemnité » qui correspond à la différence entre le niveau de leur salaire et le
niveau plus faible du salaire sur le marché du travail.

Par conséquent, on observe de nouveau, en période de chômage, des individus qui sont prêts à
travailler à un salaire inférieur à celui que versent les entreprises à leurs employés, et qui ne
trouvent pas d'emploi. Il s'agit là encore d'une forme de chômage involontaire. En
complément, le modèle des contrats implicites peut s'envisager en raisonnant sur la
productivité des travailleurs. Au début de l'embauche, leur productivité est faible en raison
d'une période nécessaire à l'apprentissage, à la familiarisation avec l'organisation et les
procédures de l'entreprise. Ils perçoivent un salaire qui serait donc supérieur à leur
productivité réelle (ils reçoivent une « indemnité »). Cette productivité s'accroît dans le temps
grâce à l'expérience, sans que leur salaire soit pour autant modifié (ils versent une « prime »).

3-5 Les théories de la segmentation du marché du travail


Selon ces théories, il n'existe pas un seul marché du travail.

3-5-1 Marché primaire et marché secondaire de Doeringer et Piore (1971)


Selon Peter Doeringer et Michael Piore (1971), le marché du travail est segmenté en :
 un secteur primaire ou marché primaire, qui est caractérisé par des salaires élevés, la
stabilité de l'emploi et des perspectives de carrières pour ceux qui s'y trouvent. C'est
souvent le cas dans les grandes entreprises dans lesquelles on observe des marchés
internes du travail ;
 un secteur secondaire ou marché secondaire, représenté par des salaires faibles, une
rotation importante de la main d'œuvre, pas de perspective de carrière dans
l'entreprise.

Ce marché secondaire regroupe surtout des entreprises de petite taille pour lesquelles les
recrutements se font surtout en externe (marché externe du travail). On remarque que la
mobilité entre les deux secteurs est réduite, et que le dualisme s'observe à l'intérieur même des

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firmes : elle garantit une forme de cohésion sociale de l'organisation. Il est à noter que
Doeringer et Piore expliquent ce dualisme par l'incertitude de l'environnement : une partie de
la firme demeure stable face aux changements de l'environnement, l'autre partie servant de
zone tampon face à ces changements (flexibilité organisationnelle).

A priori, on pourrait penser que le marché secondaire fonctionne selon un mode concurrentiel,
alors que le marché primaire serait imparfait. Toutefois, les chômeurs ne sont pas «
volontaires» car ils accepteraient de toute évidence un emploi du secteur primaire, même à un
taux de salaire inférieur à celui que proposent les firmes, y compris sur le marché secondaire.

3-5-2 Modèle insiders et outsiders de Lindbeck et Snower (1986)

Selon Lindbeck et Snower, un conflit oppose non pas les employeurs et les employés, mais
les insiders (qui disposent d'un emploi dans la firme) et les outsiders (les chômeurs), les deux
catégories étant définies par rapport à une entreprise donnée. Moins les insiders sont
nombreux plus ils peuvent obtenir, par l'intermédiaire des syndicats, des salaires élevés
pénalisant ainsi la création d'emplois et donc l'embauche des chômeurs. On peut alors
expliquer l'hysthérèse du chômage, ou effet d'hystérésis (persistance d'un phénomène après
que les causes qui en étaient à l'origine ont disparu), selon Blanchard et Summers (1986). En
effet, plus le nombre de chômeurs (outsiders) est important, plus le nombre d'insiders est
faible, plus les salaires négociés sont élevés, moins le nombre d'emplois créés est grand.

L'effet d'hystérésis peut aussi s'expliquer, notamment pour les chômeurs de longue durée, par
la théorie du capital humain. Une longue période d'inactivité conduit à une perte de capital
humain pour les chômeurs (perte d'expérience, inadaptation aux nouvelles techniques et
technologies) qui les rend encore moins employables. Des actions de formations sont rendues
nécessaires pour reconstituer le capital humain des chômeurs de longue durée.

3-6 Action syndicale et chômage (théories de la négociation)

Les théories de la négociation partent de la réalité de la fixation des salaires : les contrats de
travail résultent en grande partie de conventions collectives, et sont donc négociés entre les
institutions représentatives (syndicat/patronat). Les salariés trouvent un intérêt à l'action
syndicale dès que celle-ci élève le salaire au-delà de leur salaire de réserve (ou salaire de

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réservation). Si tous les individus sont identiques, le salaire de réserve est le salaire d'équilibre
en situation de concurrence.

La défense d'un niveau de salaire au-delà du salaire d'équilibre sur le marché du travail, par
les syndicats, conduit à réduire le nombre d'emplois proposés par les entreprises, donc à la
pérennisation du chômage. C'est ce que met en évidence le modèle des droits à gérer de
Nickell (1982) : les négociations entre firmes et syndicats ne portent que sur le niveau des
salaires (l'emploi est déterminé unilatéralement par la firme). Dans ce cas, le salaire est
d'abord négocié entre firme et syndicat, puis la firme détermine le niveau de l'emploi en
égalisant salaire et productivité marginale. Ainsi, toute hausse du pouvoir de marchandage du
syndicat entraîne une hausse du salaire négocié et donc une baisse de l'emploi. L'action
syndicale serait donc défavorable à l'emploi. On constate que ce type d'analyse remet
violemment en cause l'existence même des syndicats : ils seraient non seulement inutiles,
mais aussi néfastes pour les chômeurs.

Section 3 : LES INTERPRETATIONS DU CHOMAGE

1- Les interprétations « classiques » du chômage


1-1 La théorie néoclassique du marché du travail
Selon les économistes néoclassiques, le marché du travail est un marché identique aux autres
(Lionel Robbins). Sur ce marché, il existe un niveau de salaire réel (W/P)* pour lequel le
plein emploi est assuré. Un salaire réel supérieur à (W/P)* conduit à un chômage. La baisse
du salaire réel doit permettre un retour au plein emploi car elle provoque une diminution de
l’offre de travail et une hausse de la demande de travail.

La flexibilité du salaire réel permet de réguler les déséquilibres sur le marché du travail. Les
interventions publiques sont, dans cette optique, source de rigidités et donc de chômage. Le
salaire minimum, les allocations chômage et le contrôle des licenciements conduisent à un
salaire réel supérieur au salaire d’équilibre. La lutte contre le chômage passe par la
restauration des mécanismes concurrentiels sur le marché du travail.

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1-2 La théorie du capital humain (Gary Becker)
Le capital humain (KH) désigne l’ensemble des capacités productives innées ou acquises de
l’individu. La productivité d’un individu dépend de son capital humain. L’accumulation du
KH s’effectue au sein de la famille, par le biais de l’expérience professionnelle et grâce à la
formation.
L’investissement en KH peut être réalisé par les entreprises, qui en attendent un surcroît
d’efficacité, et par les individus, qui espèrent une hausse de leur rémunération. Le modèle
néoclassique de base ne fournit pas d’explication valable de la dispersion des salaires puisque
les individus sont supposés identiques. Les différences de salaires s’expliquent par celles des
dotations en KH puisque la productivité des individus en dépend. Les salariés les moins
qualifiés et les jeunes sont fortement touchés par le chômage en raison d’un coût du travail
trop élevé par rapport à leur productivité. Les plus âgés sont pénalisés par l’évolution des
qualifications que provoquent les mutations de l’appareil productif. Leur adaptation
nécessiterait un investissement coûteux en formation qui risquerait de ne pas être amorti
à cause de la proximité de la retraite. La théorie du KH reprend à son compte les
recommandations néoclassiques en faveur d’une déréglementation du marché du travail. Elle
préconise par ailleurs des efforts de formation en vue d’améliorer l’employabilité des
chômeurs.

1-3 La théorie de la recherche d’emploi (George Stigler)


Les salariés doivent faire des recherches afin de trouver les emplois correspondant à leurs
qualifications et à leurs exigences. L’appariement (compatibilité) entre les emplois offerts et
l’offre de travail n’est donc pas immédiat, ce qui explique l’existence d’un chômage de
frottement à court terme.
Cette recherche engendre un coût : les frais afférents à celle-ci, ainsi que les salaires non
perçus. Le salarié accepte d’assumer ce coût car il espère en retirer un gain en termes de
salaires et de conditions de travail. L’existence d’allocations chômage permet aux chômeurs
de prolonger cette recherche et de retarder leur entrée sur le marché du travail. Elles
augmentent le salaire de réservation, c’est-à-dire le salaire à partir duquel les personnes au
chômage acceptent de reprendre un emploi. Les allocations chômage sont ainsi accusées de
faire tomber les chômeurs dans une «trappe à inactivité» source de chômage de longue durée.
Ces analyses justifient les réorientations des politiques de l’emploi au cours des années 1990,

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en particulier le durcissement des critères d’éligibilité aux allocations chômage ainsi que la
réduction de leur durée et de leur montant.

1-4 La courbe de Beveridge


Les imperfections du fonctionnement du marché du travail aboutissent à la coexistence du
chômage et d’emplois non pourvus. La courbe de Beveridge relie les taux de chômage (U)
aux taux d’emplois vacants (V). Cette relation est décroissante. Lorsque le taux de chômage
s’élève, le taux d’emplois vacants diminue car les chômeurs ont tendance à accepter plus
facilement n’importe quel emploi. À l’inverse, quand le taux de chômage baisse, les chômeurs
deviennent plus sélectifs et le taux d’emplois vacants augmente. Le taux de chômage
structurel correspond au taux de chômage, qui est égal au taux d’emplois vacants.

Les explications de la courbe de Beveridge reposent sur des arguments multiples :


 l’inadéquation des qualifications de certains salariés, due aux évolutions structurelles ;
 la faiblesse des incitations à la reprise d’un emploi (dans la droite ligne des analyses
de la théorie de la recherche d’emploi) ;
 l’insuffisante efficacité des politiques et des institutions de traitement du chômage
(Pôle emploi).
Des rigidités croissantes sur le marché du travail se traduisent par un glissement de la courbe
de Beveridge sur la droite. À l’inverse, un marché du travail plus flexible permettra un
abaissement de cette courbe et une diminution du chômage structurel.

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Ci-dessous la courbe de Beveridge

V*

U* U

2- Les interprétations « keynésiennes »


2-1 Le principe de la demande effective
Keynes et les post-keynésiens estiment que le niveau de l’emploi n’est pas déterminé par celui
du salaire réel. Il dépend de la demande effective, c’est-à-dire la demande anticipée par les
entreprises. Lorsque ces anticipations sont pessimistes, les entreprises réduisent
l’investissement et le niveau de l’emploi. Les revenus distribués diminuent et, avec eux, la
demande globale (mécanisme du multiplicateur). Dans ces conditions, la baisse du salaire réel
risque d’entraîner une nouvelle réduction de la demande globale et une dégradation des
anticipations. Ce cercle vicieux peut induire une récession. Rien n’assure que le niveau de la
production mis en œuvre par les entreprises garantisse le plein emploi et aucun mécanisme ne
permet un retour automatique à l’équilibre. Seule la hausse de la demande globale est de
nature à réduire le chômage. Or les entreprises ne peuvent pas augmenter les salaires car il est
probable que la faiblesse de la demande réduise leur rentabilité. L’État doit relancer
l’économie grâce à la politique conjoncturelle, c’est-à-dire à un bon dosage de politique
budgétaire et fiscale et de politique monétaire.

2-2 La rigidité des salaires dans les analyses néo-keynésiennes


Les néo-keynésiens considèrent que si les salaires réels étaient flexibles, ils permettraient en
effet une réduction du chômage ; mais les salaires sont rigides. Ils estiment cependant que
cette rigidité est rationnelle. En effet, selon les théories du salaire d’efficience (Akerlof,

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Stiglitz et Yellen), la motivation des salariés et donc leur productivité dépendent du salaire.
Les entreprises préfèrent ne pas réduire les salaires en période de chômage plutôt que risquer
de subir une baisse de la productivité. La théorie des contrats implicites (Azariadis, Baily et
Gordon) envisage la relation salariale comme une relation d’assurance. Les salariés, redoutant
des fluctuations de revenus, accepteraient implicitement des progressions de salaire plus
faibles que celles de la productivité en échange d’une stabilité de celui-ci en période de
récession. La rigidité des salaires conduit à un salaire réel supérieur au salaire d’équilibre.
Dans ces analyses, le chômage est bien une conséquence d’un coût salarial trop élevé. Il faut
donc abaisser ce coût sans diminuer le salaire net perçu par les salariés, afin de ne pas nuire à
l’efficacité productive. C’est pourquoi les néo-keynésiens préconisent de réduire les charges
sociales, notamment pour les emplois les moins qualifiés. Ils considèrent aussi que l’État doit
lutter contre les rigidités du marché du travail, qui contribuent à élever le niveau des salaires.
Ils se rapprochent, de ce point de vue, des analyses libérales.

Section 4 : LES POLITIQUES D'EMPLOI


Étant donné que les causes du chômage apparaissent multiples sinon indéterminées, les
mesures de lutte seront elles aussi variées. Il ne s'agit pas ici de présenter les politiques
économiques globales mais les politiques spécifiques de l'emploi. De manière traditionnelle,
on peut opposer les politiques dites passives de l'emploi qui visent plus à agir sur l'offre de
travail, et les politiques actives de l'emploi qui cherchent à influencer la demande de travail.

1- Les politiques qui agissent sur l'offre de travail


1-1 L'indemnisation du chômage
La demande de travail est considérée comme une donnée. Il s'agit d'accompagner la situation
de chômage par un traitement social. L'indemnisation du chômage a pour but d'éviter les
effets récessifs des pertes d'emplois. Sans indemnisation, le chômage conduit à une réduction
massive de la demande qui est préjudiciable aux débouchés des entreprises, et donc à l'emploi
dans ces entreprises. L'indemnisation repose essentiellement sur une logique d'assurance. Les
allocations sont payées grâce aux allocations versées par les actifs occupés. Pour bénéficier
d'une indemnisation, il faut avoir cotisé au préalable. Le niveau d'indemnisation doit tenir
compte du phénomène « d'aléa moral » qui, en cas d'indemnisation trop importante, pourrait
conduire certains chômeurs à ne pas rechercher véritablement un emploi. Selon les théoriciens

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néoclassiques, plus l'écart entre l'indemnisation et le salaire minimum est faible, plus
l'incitation à demeurer au chômage est forte.

1-2 Réduire l'offre de travail


Il s'agit de réduire la population active par diverses mesures : l'abaissement de l'âge de la
retraite, le développement des retraites anticipées, la limitation de l'immigration, l'incitation à
quitter le marché du travail (aides familiales etc.), retarder l'arrivée des jeunes sur le marché
du travail. Ces mesures présentent des coûts qui ne sont pas toujours couverts par les
avantages qu'elles apportent. Dans le cadre d'un départ en retraite (préretraite), le coût du
remplaçant n'est pas toujours inférieur à celui du sortant. Ainsi se trouvent limités les effets
bénéfiques d'une diminution de l'âge de la retraite pour l'entreprise :
 le départ crée un appel d'air qui provoque des promotions en chaîne. Le coût financier
de ces progressions hiérarchiques et salariales peut dépasser l'économie apparente ;
 si le partant avait bénéficié de formations et de promotions internes, s'il avait un
salaire inférieur à celui qu'il faut proposer pour attirer une personne confirmée (théorie
des contrats implicites), à compétence comparable mais formation initiale plus élevée,
certaines entreprises se rendent compte que leur positionnement salarial se situe en
dessous des moyennes externes.

1-3 Le partage du travail


L'idée part d'un calcul simple. Si 20 millions de salariés qui travaillent 40 heures acceptent de
ne travailler que 35 heures par semaines, 100 millions d'heures sont libérées, ce qui
correspond à peu près à 2 860 000 créations d'emplois. Cependant, la réduction de la durée du
travail ne conduit pas automatiquement à l'embauche de nouveaux salariés si elle est
compensée par des gains de productivité, autrement dit si les salariés en place parviennent à
effectuer le même travail qu'avant en un temps réduit.

2- Les politiques en direction de la demande de travail


2-1 Réduire le coût du travail
Dans une optique néoclassique, la réduction du chômage passe par la baisse du prix du
travail, voire l'abandon du SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel garanti) qui constitue
un obstacle au bon fonctionnement du marché du travail. Cela permet de procéder à des
embauches puisque le coût du travail devient inférieur à la productivité marginale du travail.

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Il est alors possible d'embaucher jusqu'à ce que la productivité marginale (supposée
décroissante) atteigne le nouveau coût du travail.
La baisse des salaires conduit à améliorer la compétitivité des entreprises : elles peuvent
gagner des parts de marché à l'étranger, augmenter leur production et créer des emplois.
Toutefois, pour que la baisse du coût du travail ne nuise pas à la consommation des ménages,
il est possible d'envisager une baisse des cotisations sociales patronales.

2-2 Améliorer le fonctionnement du marché du travail


Un certain nombre d'actions des pouvoirs publics visent à restreindre l'inadéquation entre
l'offre et la demande de travail. On pense notamment aux diverses actions de formation
professionnelle, aux contrats de qualifications, d'apprentissage, d'adaptation, d'orientation, de
retour à l'emploi, d'initiatives emplois, ainsi qu'aux stages de formation pour adultes et pour
les jeunes.
L'idée est aussi d'améliorer la flexibilité du travail qu'il s'agisse d'une flexibilité quantitative,
qualitative ou salariale. La flexibilité du travail concerne la capacité de l'offre de travail à
s'adapter, en qualité et en quantité, aux changements de l'environnement de l'entreprise.

2-3 Créer des emplois particuliers


L'État prend en charge, partiellement ou totalement le salaire et les charges sociales dans le
cas d'embauches qui concernent des cibles particulières : les jeunes, les chômeurs de longue
durée, les chômeurs âgés. Il peut s'agir de la création d'emplois publics, de dispositifs visant à
permettre l'insertion des jeunes ou des travailleurs âgés. Cependant, ces aides à l'emploi
présentent des effets pervers : favoriser l'emploi d'une catégorie d'actifs peut conduire à un
effet de substitution au détriment d'autres catégories. C'est pourquoi le « Contrat de génération
» lancé par le gouvernement Ayrault en 2013, en France, se propose de lier l'embauche d'un
travailleur jeune au maintien dans l'emploi d'un travailleur âgé.

CONCLUSION
Comprendre et cerner le phénomène du chômage a fait dire à Bernard Gazier, spécialiste de
l'économie du travail, qu'il s'agissait d'aller « de la mesure du flou au flou de la mesure ». La
définition et la mesure sont arbitraires et ne règlent pas totalement le problème du chômage :
les frontières entre 1'emploi, l'inactivité et le chômage ne sont pas clairement identifiées. Les
causes du chômage sont multiples. On peut cependant recenser des causes conjoncturelles,

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comme l'insuffisance de la demande globale et/ou un coût du travail trop élevé, et des causes
structurelles comme les problèmes d'inadéquation de l'offre de travail à la demande. Le
chômage apparaît à la fois comme un problème social et un problème économique, et les
politiques de l'emploi sont souvent impuissantes à le réduire. Il n'y a alors que peu de chance
que ce volant de chômage soit réduit par des actions simplement conjoncturelles. L'action à
long terme, et notamment le soutien à l'innovation accompagné de politiques de formation de
la main d'œuvre, semble plus que jamais nécessaire.

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CHAPITRE 3 : L’INFLATION ET LES POLITIQUES
DE STABILITE DU NIVEAU GENERAL DES PRIX

INTRODUCTION
Si la hausse des prix est un phénomène ancien, l’usage du terme inflation est récent ; les
dictionnaires économiques du XIXe siècle ne le mentionnaient pas encore. Ce n’est qu’au
début du XXe siècle, notamment au sortir de la première guerre mondiale, que le mot est
apparu, et signifiait une hausse abusive de la quantité de monnaie.
La maîtrise de l’inflation est un des éléments du carré magique de Kaldor, c’est à dire un des
quatre objectifs majeurs de la politique économique au même titre que la croissance, le plein
emploi et l’équilibre extérieur. A ce titre, la stabilité des prix est recherchée. Pourtant, les
objectifs en termes d’inflation ont évolué au cours du temps.
Pendant les années 1950 et 1960, l’inflation était tolérée, c’était un moindre mal. Dans les
années 1980 et 1990, elle était combattue avec vigueur par les banques centrales. Depuis la
crise de 2008, plusieurs banques centrales ont pratiqué des politiques d’abondance monétaire,
allant même jusqu’à monétiser la dette publique, ce qui peut laisser craindre un retour futur de
l’inflation. Comment expliquer alors ces changements d’attitude ? L’inflation serait-elle
devenue bienfaisante ou moins néfaste ? Nous répondrons à toutes ces questions dans ce
chapitre. Après avoir défini l’inflation, nous présenterons les causes, les conséquences ainsi
que les moyens mis en œuvre pour lutter contre l'inflation.

Section 1 : DEFINITION DE L’INFLATION ET DES TERMES


AFFERENTS
1- L’inflation
L'inflation est définie comme la hausse durable du niveau général des prix. Une augmentation
ponctuelle de ceux-ci ne peut pas être considérée comme de l’inflation. La hausse des prix
doit se propager à l’ensemble de l’économie et se reproduire au cours des périodes suivantes.
Elle suppose l’existence de mécanismes d’ajustement favorisant la reproduction des hausses
de prix. L’inflation implique une perte de pouvoir d’achat de la monnaie.
On distingue l’inflation rampante, correspondant à une hausse modérée et l’inflation
galopante qui correspond à un taux d’inflation à deux (2) chiffres.

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NB : On peut se centrer sur la monnaie et donner une autre définition. L’inflation peut alors
être définie comme la baisse du pouvoir d’achat de la monnaie.

2- La déflation
Elle se définit comme la baisse du niveau général des prix. Elle est généralement associée à
une récession, c’est-à-dire à une diminution du produit intérieur brut. Il s'agit du phénomène
inverse à celui de l'inflation. La plupart du temps, elle est associée à une récession
économique avec une hausse du chômage.
La déflation n'est pas un phénomène souhaitable en économie car elle témoigne d'une
difficulté à écouler la production et d'une insuffisance de la demande. Elle signifie
concrètement moins d’entrées d'argent, moins de revenus donc de croissance et plus de
chômage. Ce phénomène s’est produit pendant la grande dépression des années 30. On
désigne par politique déflationniste une politique qui vise à contracter la demande globale par
une baisse des salaires par exemple pour baisser les coûts et les prix.

3- La désinflation
C’est la baisse du taux d’inflation : le niveau général des prix augmente toujours mais à un
rythme moins important qu’auparavant.
Exemple : si l’inflation passe de 10% à 7% puis à 4%, le niveau général des prix augmente
toujours mais à un rythme moins rapide.

4- L’hyperinflation
Elle est définie par un taux d’inflation d’au moins 50% par mois (soit un taux annuel
supérieur ou égal à 12 975%). Par exemple une hyperinflation a été observée entre 1921 et
1925, parallèlement dans quatre (4) pays : l’Allemagne, l’Autriche, la Hongrie et la Pologne,
où elle s’est caractérisée par une évolution de la masse monétaire et du niveau des prix.

5- La stagflation
Elle désigne une période au cours de laquelle on observe de manière concomitante une
inflation élevée et un ralentissement de la croissance économique accompagné d’une hausse
du chômage. Caractéristique de la situation du début des années 70, précisément après le
premier choc pétrolier (1973), le phénomène de stagflation remet en cause les théories de
Phillips qui établissaient une relation inverse entre le taux de chômage et le taux d'inflation.

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En effet, la courbe de Phillips est remise en cause depuis les années 70 au cours desquelles il a
été observé qu'un niveau élevé d'inflation n'était pas incompatible avec une augmentation du
taux de chômage.

Section 2 : MESURE DE L’INFLATION


L'indice des prix à la consommation (IPC) est l'instrument de mesure de l'inflation. Il permet
d'estimer, entre deux périodes données, la variation du niveau général des prix des biens et
des services consommés par les ménages sur le territoire national. Cet indice est obtenu en
pondérant l’ensemble des prix des biens et services qui composent le panier de consommation
en fonction de leur importance relative dans le budget total d’un consommateur typique.

1- Formule de calcul
L’indice des prix à la consommation est un indice de Laspeyres des prix. Il mesure l’évolution
du niveau moyen des prix d’un « Panier de provisions » dont la composition est gardée
identique à celle de la période de base.

q p
Il se détermine de la manière suivante : I t /0 ( p)  100
0 t

q p
0 0

NB : Comme la composition du panier reste inchangée d’une année à l’autre, la variation en


% de l’IPC d’une année à l’autre, reflète uniquement l’évolution des prix et non pas
l’évolution des quantités.

2- Application
Les mesures en 2003 et en 2005 des prix unitaires et des quantités consommées des articles
A, B, C et D sont données dans le tableau ci-après :

Articles 2003 2005


Prix P0 Quantité Q0 Prix P1 Quantité Q1

A 5 10 7 80
B 20 12 30 25
C 10 50 12 90
D 3 20 4 200

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TAF : Calculer l’indice synthétique des prix (indice des moyennes arithmétiques pondérées)
en 2005 calculé sur la base 100 en 2003 avec la pondération Laspeyres. Déduire le taux
d’inflation(TxI).
Résolution

I 2/0 
q Q2
j
0
j

100 
q Q0
j
0
j

(7 10)  (30 12)  (12  50)  (4  200)


I 2/0  100
(5 10)  (20 12)  (10  50)  (3  200)
I 2/0  131,65
131, 65  100
T I  100  31, 65%
100

Section 3 : LES CAUSES DE L’INFLATION


1- L’inflation par la monnaie
Pour les auteurs néoclassiques et monétaristes, l’inflation résulte d’une émission de monnaie
trop importante. La justification de cette idée repose sur l’existence d’une relation
économique, appelée « Théorie Quantitative de la Monnaie » ou équation d’Irving Fisher.
Cette dernière s’exprime ainsi :
M .V  P.Y ou M .V  P.T , où :
M représente la masse monétaire en circulation ;
V la vitesse de circulation de la monnaie ;
P le niveau général des prix ;
Y le volume de production ou de transactions ( T ).

Cette équation souligne qu’une augmentation de la quantité de monnaie provoque de façon


mécanique une hausse du niveau général des prix, si on suppose la vitesse de circulation de la
monnaie et le volume des transactions stables. Il en découle que l’évolution de la masse
monétaire doit être corrélée à l’évolution du volume de la production, afin d’éviter une
situation inflationniste.

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2- L’inflation par la demande
Sur le marché concurrentiel d’un produit, l’excès de demande par rapport à l’offre entraine la
hausse du prix. Ce modèle micro-économique est transposé au niveau macro-économique et
permet d’expliquer l’inflation par la demande, qui est due au fait que la demande excède
durablement l’offre sur les marchés. Comprendre l’inflation par la demande revient donc à
rechercher les origines de l’excès de la demande et de l’insuffisance de l’offre.

2-1- Origine de l’excès de demande


L’excès de demande de bien sur les marchés ou dans une économie, peut provenir de :
 la hausse des dépenses de consommation du fait de la hausse des salaires ou de la
hausse du crédit (en 1976, R. Barre affirmait « Les Français vivent au-dessus de leur
moyen ») ;
 la hausse des dépenses d’investissement des entreprises financées par le crédit
bancaire sans épargne préalable ;
 la hausse des dépenses publiques avec déficit budgétaire ;
 la hausse de la demande extérieure ;
 l’accroissement des revenus provenant d’un excédent courant (entrée de devises).

2-2- Origine de l’insuffisance de l’offre


L’insuffisance de l’offre sur les marchés ou dans une économie peut provenir :
 du blocage des importations (contingentement, mesures prohibitives,…) ;
 l’inélasticité de l’offre due à divers goulots d’étranglements : pénurie de matières
premières, d’énergie, d’outillage, de main d’œuvre spécialisée, absence de capitaux.
Keynes a en effet mis en évidence durant la seconde guerre mondiale, que dans une économie
de guerre, les facteurs de production sont en partie orientés vers l’armement, ce qui entraine
la rigidité de l’offre. Si le gouvernement fixe les prix, la population peut être confrontée à des
pénuries, ce qui la contraint à l’épargne (épargne forcée). Si les prix sont par contre libres, il y
a hausse des prix.
Keynes a aussi mis en évidence la notion d’écart inflationniste, qui traduit un excédent de la
demande globale sur l’offre globale en situation de plein emploi ou voisine du plein emploi.
Ceci est montré par le graphique à 45°, où il existe un niveau de revenu tel que l’offre égale à

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la demande (O = D). Lorsque le revenu national est inférieur à ce niveau, la demande est
supérieure à l’offre.

Il peut être comblé par la hausse des prix ou par une hausse de la production.

3- L’inflation par les coûts


L’inflation est due à la hausse excessive des coûts de production : matières premières (chocs
pétroliers), charges fiscales et financières, salaires et charges sociales. L’inflation importée
rentre dans cette catégorie.
L’idée directrice est que l’inflation provient d’un accroissement de la rémunération des
facteurs de production supérieur à celui de leur productivité. Cette hausse incite les chefs
d’entreprise à élever le prix des biens et services offerts pour retrouver leur équilibre
financier. Ce qui peut entrainer des revendications de nouvelles hausses de salaires, d’où le
mécanisme de propagation de l’inflation.
Au niveau de l’enchainement, l’inflation est souvent causée au départ par la hausse des prix
des matières premières qui se répercute sur les produits finis. Les salaires étant en général
indexés sur l’inflation, cela entraine une hausse des salaires, par un phénomène d’inflation de
second tour.
Pour Keynes, l’inflation s’explique par l’évolution des coûts salariaux : « L’accroissement de
la quantité de monnaie ne produit aucun effet sur les prix tant que l’augmentation de la
demande effective se traduit par une baisse du chômage. Aussitôt que le plein-emploi est
atteint, la hausse de la demande effective entraîne la hausse des salaires et des prix ».

On peut traduire cette phrase par le schéma suivant :


Sous-emploi : hausse de la demande => baisse du chômage => salaires et prix sont stables
Plein emploi : hausse de la demande => hausse des salaires => hausse des prix (surchauffe
économique).

Pour le courant keynésien, l’inflation est le résultat plus ou moins inéluctable de la croissance
économique et des hausses de salaires qu’elle engendre. L’inflation par les coûts rejoint donc
l’idée d’inflation de croissance. La croissance exerce une pression sur les ressources
disponibles, et notamment une hausse des salaires, d’où la hausse de la demande et des coûts,
ce qui peut faire apparaître une spirale inflationniste.

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4- L’inflation importée
La hausse des prix des produits importés a un effet direct sur l’indice des prix. Elle engendre
un processus inflationniste car elle incite les salariés à réclamer des hausses de salaire et les
entreprises à augmenter leurs prix. C’est clairement le mécanisme qui a été à l’œuvre à la
suite du premier choc pétrolier, en 1973.

5- L’inflation par les structures


5-1- Les structures économiques
En raison de l’obsolescence ou l’inadaptation de l’appareil de production, l’offre ne peut
suivre la demande en raison d’une productivité insuffisante.
Exemple : l’immédiat après-guerre.

5-2- Les structures institutionnelles : thèse des régulationnistes


Le XXe siècle fut particulièrement inflationniste. Or au XXe siècle est apparu le mode de
régulation monopoliste, avec de nouvelles formes institutionnelles : oligopoles, conventions
collectives, secteurs protégés de la concurrence, économie d’endettement ayant pour
corollaire les prix rigides à la baisse, salaires nominaux déterminés par des conventions
collectives et/ou indexés sur les prix.
Trois enseignements découlent de l’interprétation régulationniste :
 l’inflation est cumulative, la baisse des prix comme mécanisme de rappel a disparu ;
 l’inflation est associée à la croissance qu’elle contribue à entretenir : la hausse
continue des salaires assure des débouchés croissants ;
 l’inflation se manifeste différemment selon les pays car le cadre institutionnel est
différent: rôle de l’État, conventions collectives, degré de concurrence, système
monétaire et financier.

Michel Rocard, dans L’inflation au cœur, 1975, adoptait ce type d’analyse : « L’économie
française serait passée d’une économie de concurrence à une économie de domination. Or, en
économie de domination, le prix de vente qui était l’arbitre de l’économie de concurrence
devient une variable dominée par l’entreprise, et fixée par l’entreprise elle-même en fonction
de ses critères propres ».

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5-3- Les structures psychologiques
Le sociologue Georges Katona, Analyse psychologique du comportement économique, 1951,
prétend que les causes de l’inflation sont d’ordre psychologique, en raison du rôle
prépondérant des anticipations. Les individus sont convaincus que le processus est cumulatif
et sans fin (spirale). Ces prévisions sont auto-réalisatrices : les anticipations d’inflation créent
les conditions de sa réalisation et renforcent sa poursuite. Le mimétisme des agents participe
au mouvement. Il propose donc comme solution de casser la spirale des anticipations.

5-4- Les structures sociales


Selon la théorie sociologique de l’inflation, présentée par Aujac (1950), l’inflation est due à la
lutte pour le partage du revenu national. Pour accroître sa part, chaque catégorie sociale tente
d’infléchir les prix relatifs en sa faveur. Chaque catégorie adopte plus ou moins la même
stratégie et l’inflation se trouve accrue, d’où de nouvelles revendications et une spirale
prix/salaires. De plus, l’inflation devient un mode de résolution des conflits. L’accroissement
de certains prix ou salaires peut résoudre certaines tensions sociales, masquer certaines
contraintes (mécontentement des agriculteurs, médecins) : Ex : la baisse des prix agricoles se
transforme en hausse moins rapide que les autres produits. Pour Jean Marczewski, Inflation et
chômage en France, 1977, les prix agricoles, fixés administrativement, sont responsables de
l’inflation.

L’inflation arbitre en quelque sorte le fonctionnement social. Christian Goux, 1972, explique
l’inflation par l’affrontement entre salariés et entrepreneurs ; les premiers défendent leur
niveau de vie tandis que les seconds leurs profits nécessaires à l’investissement. Pour Marx,
l’inflation est le résultat d’un conflit entre patrons et salariés, mais aussi le moyen
d’augmenter les profits. Plus la masse des capitaux engagés est élevée, plus le prix des
produits doit être élevé pour financer et rentabiliser cette accumulation du capital. En outre, la
concentration des entreprises pousse au monopole et à la hausse des prix. On ne peut ici citer
toutes les explications structurelles de l’inflation tant elles sont nombreuses.

Pour terminer, on peut mentionner celle de Charles Levinson, L’Inflation mondiale et les
Firmes multinationales, 1976, pour qui l’inflation est due aux FMN qui ont un pouvoir
excessif, elles ont souvent une situation d’oligopole ou de monopole, elles ont la possibilité de
se soustraire aux mesures anti-inflationnistes prise dans tel ou tel pays en jouant sur leurs

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implantations ; selon lui il faut édifier un syndicalisme mondial afin de constituer un pouvoir
compensateur.

Section 4 : LES CONSEQUENCES DE L’INFLATION

Le débat sur les conséquences de l’inflation est complexe. Tous les économistes s’entendent
pour voir dans l’hyperinflation un mal absolu. Les débats sont plus vifs, en revanche, dès lors
que les taux d’inflation restent raisonnables. Pour certains, l’inflation est nécessaire car elle
serait un « lubrifiant » indispensable au bon fonctionnement de l’économie alors que, selon
d’autres, combattre les tensions inflationnistes est une priorité pour les politiques
économiques.

1- L’inflation favorise les agents endettés

La charge de remboursement d’un emprunt à taux fixe devient moins lourde dans un contexte
de hausse des prix. L’inflation diminue le coût réel de l’endettement en fonction de la
différence entre le niveau des taux d’intérêt nominaux et le niveau général des prix. Ainsi
l’inflation favorise les agents structurellement endettés comme l’État et les entreprises. Par
ailleurs elle améliore, « toutes choses égales par ailleurs », la rentabilité financière des
entreprises. En effet, en période d’inflation, les entreprises sont d’autant plus incitées à
recourir au financement externe que leurs taux de profit internes sont supérieurs au taux
d’intérêt des capitaux empruntés. Une telle situation élève la rentabilité de leurs fonds propres
(effet de levier). Les entreprises se trouvent ainsi stimulées par les perspectives de gains et
incitées à investir. L’inflation induit donc une croissance de la production et de l’emploi.

D’après la courbe de Phillips, qui établit une relation inverse entre l’inflation et le chômage,
un haut niveau d’emploi apparaît compatible avec un taux d’inflation élevé. L’inflation peut
aussi favoriser le crédit à la consommation et, donc, la consommation. L’effet peut être
amplifié si les ménages anticipent l’inflation (ils préfèrent acheter aujourd’hui des produits
qu’ils paieraient plus cher demain).

Ces effets positifs pour la croissance économique peuvent toutefois être contrebalancés par
des évolutions défavorables.

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Les épargnants et les créanciers sont lésés. Ils risquent de réclamer une hausse des taux
d’intérêt afin de se couvrir contre le risque d’inflation. Une inflation durable peut donc
pénaliser les futurs emprunteurs.
Les conséquences sur le niveau d’épargne sont plus ambiguës. Les agents peuvent considérer
que l’inflation réduit la valeur de leur patrimoine et désirer le reconstituer (ils diminuent leur
consommation et accroissent leur épargne). Ils peuvent estimer au contraire que l’effort
d’épargne est mal rémunéré et augmenter excessivement leur consommation, ce qui attise les
tensions inflationnistes. L’insuffisance d’épargne risque alors de pénaliser l’investissement
futur.

2- L’inflation entraîne des modifications dans la répartition des revenus


Tous les prix et revenus n’évoluent pas de manière identique, de sorte que les prix relatifs sont
modifiés. Certains y gagnent, d’autres y perdent. Les agents pénalisés sont tout d’abord les
titulaires de revenus fixes ou imparfaitement indexés sur l’inflation (les retraités, par
exemple). C’est aussi le cas des agents fortement exposés à la concurrence internationale, qui
peuvent difficilement obtenir des hausses de salaires leur garantissant le maintien de leur
pouvoir d’achat. Les gagnants opèrent le plus souvent dans les secteurs abrités de la
concurrence internationale, où les contraintes de coûts sont plus faibles et les hausses de
salaires plus supportables. Les salariés les plus qualifiés sont également plus préservés que les
autres. L’inflation favorise donc, dans certains contextes, l’accroissement des inégalités. Les
agents peuvent certes anticiper l’inflation pour se prémunir contre les pertes de pouvoir
d’achat, ce qui limite les distorsions évoquées ci-dessus.

Cependant, ces prévisions sont rarement parfaites ; par ailleurs, elles conduisent le plus
souvent à accentuer les tensions inflationnistes. Certains considèrent pourtant que l’inflation
permet d’atténuer les tensions autour du partage de la valeur ajoutée. En effet, dans une
économie en croissance, il est normal que les prix relatifs évoluent (en fonction des gains de
productivité et des déséquilibres entre l’offre et la demande). L’inflation permettrait de
dissimuler ces évolutions et de les rendre plus acceptables, dans la mesure où tous les prix et
revenus augmentent.

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3- L’inflation, source d’incertitude, fausse l’allocation des ressources

En économie de marché, les prix relatifs doivent refléter les raretés relatives afin d’orienter les
agents économiques dans l’allocation de leurs ressources.
L’inflation bouleverse les prix de telle sorte qu’ils ne reflètent plus les fondamentaux de
l’économie. Les entreprises ne sont plus à même d’anticiper correctement l’évolution de leurs
coûts et de leurs recettes. Cela complique dangereusement l’évaluation de la rentabilité de
certaines stratégies, de l’investissement en particulier. On aboutit à des comportements
attentistes (des projets rentables ne sont pas entrepris par peur du risque) ou, au contraire, à
des investissements dont la rationalité économique n’est pas assurée mais dont la rentabilité
est artificiellement poussée à la hausse en raison de la baisse du poids réel des dettes. Dans les
périodes suivantes, les capacités de production risquent de ne pas correspondre à l’état de la
demande et de contraindre les entreprises à des ajustements brutaux. La croissance devient
plus chaotique et incertaine.

4- Inflation et déséquilibres extérieurs


Lorsqu’un pays a un taux d’inflation supérieur à celui de ses principaux partenaires
économiques, la compétitivité-prix de ses produits recule. Cela conduit plus ou moins
rapidement à une dégradation du solde des échanges extérieurs (les exportations diminuent
alors que les importations augmentent). Cette évolution peut exercer un effet défavorable sur
la croissance économique et l’emploi, dans une économie fortement ouverte sur l’extérieur. Il
s’ensuit par ailleurs des tensions sur le taux de change de la monnaie. La dépréciation de ce
taux peut certes rétablir théoriquement la compétitivité de la production nationale. Cependant,
l’ajustement peut être long et laisser place à une nouvelle dégradation du solde commercial à
moyen terme (courbe en J); la dépréciation provoque un renchérissement des prix des biens
importés (particulièrement de ceux qui ne peuvent pas être remplacés par une production
nationale, comme les hydrocarbures pour la France). Cela accentue les tensions inflationnistes
(inflation importée) et risque de creuser les déficits initiaux si les exportations n’augmentent
pas (ce qui peut être le cas si le rétablissement de la compétitivité n’est pas suffisant).

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5- Inflation et chômage (courbe de Philips)
5-1- Les analyses keynésiennes de la courbe de Philips
Dans les années 1950, les économistes keynésiens se sont appuyés sur la courbe de Phillips
pour mettre en évidence une relation inverse entre le chômage et l’inflation (Solow et
Samuelson) : si le chômage diminue, l’inflation s’accélère ; à l’inverse, si le chômage
augmente, l’inflation baisse. Cette relation s’expliquerait par le fait que lorsque le chômage
diminue, les entreprises doivent consentir des augmentations de salaires plus élevées pour
attirer la main-d’œuvre et elles subissent donc des hausses de coûts de production (sous
réserve que le taux de croissance des salaires soit supérieur à celui de la productivité). Il
existerait un taux de chômage permettant d’assurer la stabilité des prix (le Non Accelerating
Inflation Rate of Unemployment – NAIRU). Selon cette analyse, l’inflation serait un mal
nécessaire dès lors que l’on cherche à atteindre le plein emploi.

Elle est un fondement des politiques de relance menées dans les années 1960 (à l’image des
politiques de «stop and go» en Grande-Bretagne) : lorsque le chômage atteint un niveau jugé
insupportable, l’État relance l’activité au risque d’une accélération de l’inflation ; lorsque
celle-ci menace l’équilibre extérieur et la stabilité de la monnaie, une politique restrictive est
engagée pour enrayer l’inflation au prix d’une hausse du chômage.

5-2- Les analyses monétaristes de la courbe de Philips


Les économistes monétaristes s’opposent à cette analyse, qui justifie les politiques de relance
en période d’augmentation du chômage. M. Friedman estime que le NAIRU est un taux de
chômage naturel. Le chômage naturel résulte de l’inadéquation entre les offres et les
demandes de travail (chômage structurel) et des frictions sur le marché du travail qui retardent
les appariements entre les offres et les demandes (chômage frictionnel). Les économistes
monétaristes estiment que le taux de chômage effectif gravite autour de son taux naturel,
contrairement aux économistes keynésiens, qui retiennent une forte composante
conjoncturelle du chômage. Ainsi, si les pouvoirs publics décident d’une politique de relance
et qu’elle s’accompagne de création monétaire, l’inflation s’accélère. Et elle réduit le salaire
réel. À court terme, les salariés ne perçoivent pas la baisse de leur pouvoir d’achat. Ils ne
revendiquent pas de hausse de salaires. La demande de travail des entreprises augmente et le
chômage diminue. À la période suivante, les salariés perçoivent la baisse de leur pouvoir
d’achat et revendiquent des hausses de salaire (anticipations adaptatives).

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La demande de travail diminue et le taux de chômage revient à son niveau initial mais avec
des prix plus élevés. La politique de relance est efficace temporairement mais au prix d’une
accélération de l’inflation.
Les «nouveaux classiques» (Lucas, Barro) radicalisent la critique monétariste. Pour eux, les
agents ne sont pas victimes d’illusion monétaire et ont des anticipations rationnelles. Ils
anticipent immédiatement l’accélération de l’inflation et le maintien du chômage. Ils
réclament des hausses de salaire et le chômage ne diminue pas. Il n’y a pas d’arbitrage entre
l’inflation et le chômage, même à court terme.

6- Les risques de la déflation


La baisse des prix peut également exercer des effets dangereux : les ménages préfèrent
reporter leurs achats (pour payer moins cher plus tard) et les entreprises subissent une hausse
du taux d’intérêt réel défavorable à l’investissement. Elles compriment par ailleurs leurs
marges et les salaires. Ces facteurs se combinent pour réduire fortement la demande et
risquent d’engager l’économie vers la récession.

Section 5 : LES POLITIQUES DE LUTTE CONTRE L’INFLATION


Durant les « Trente Glorieuses », l’inflation est tolérée dans les pays de l’OCDE au nom de la
croissance économique et du plein emploi. À la fin des années 1970 et surtout au début de la
décennie suivante, elle devient le principal objectif de la politique économique. Les pouvoirs
publics disposent en outre de plusieurs instruments pour lutter contre l’inflation.

1- La lutte contre l’inflation d’origine monétaire : les politiques monétaires restrictives

Quand l’inflation est d’origine monétaire, on la combat en utilisant la politique monétaire. En


suivant la logique monétariste, la lutte contre l’inflation passe par un ralentissement de la
croissance de la masse monétaire. Initialement, ces politiques se sont traduites par la volonté
d’agir directement sur l’évolution de la masse monétaire (politique d’encadrement du crédit –
plan Barre de 1976) : la banque centrale fixait un taux de croissance de la masse monétaire et,
donc, des crédits. Cette politique s’est révélée relativement inefficace. On lui reproche d’être
trop rigide et de figer les positions concurrentielles des établissements de crédit. Par ailleurs,
il s’est avéré de plus en plus difficile de contrôler l’évolution de la masse monétaire, du fait de
la liberté de circulation des capitaux. Peu à peu, la politique monétaire appuyée sur les taux

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directeurs des banques centrales s’est généralisée (la hausse des taux aboutit in fine à une
diminution des crédits et, donc, de la masse monétaire). Les banques commerciales
répercutent la hausse des taux directeurs sur les taux d’intérêt débiteurs qu’ils proposent aux
entreprises et aux particuliers. Ainsi, si les taux d’intérêt augmentent, il y aura moins de
recours au crédit de l’économie. La consommation et les investissements diminuent, la baisse
de la demande entraîne donc une baisse de l’inflation.
Pour être efficace, la politique monétaire doit être crédible auprès des agents. Ils doivent
considérer que les autorités ne changeront pas d’objectif en cours de route. C’est pourquoi les
États ont rendu les banques centrales indépendantes du pouvoir politique.

2- La lutte contre l’inflation par la demande : les politiques budgétaires et fiscales

Dans ce cas, l’État peut agir sur l’inflation en réduisant la demande, c’est-à-dire le revenu
disponible des ménages. Pour cela, l’État doit réduire le déficit budgétaire en réduisant les
dépenses publiques (baisse des allocations, réduction du nombre de fonctionnaires,
ralentissement du programme de travaux publics,…) et en accroissant la pression fiscale
(TVA, IGR,…).
La réduction du déficit budgétaire (baisse des dépenses et hausse des impôts) permet d’agir
directement sur le niveau de la demande globale.
Le recours à l’emprunt sur les marchés financiers plutôt que le financement monétaire pour
couvrir le déficit budgétaire s’est par ailleurs généralisé dans la majorité des pays de l’OCDE.

3- Lutte contre l’inflation par les coûts : la politique des revenus

Cette politique vise à fixer des normes de progression des revenus compatibles avec la
stabilité des prix. En théorie, les salaires doivent progresser en fonction des gains de
productivité. Dans la pratique, ces politiques ont toutefois cherché à protéger le pouvoir
d’achat des salariés, et les salaires ont été indexés sur l’inflation. Ces indexations favorisaient
les anticipations inflationnistes; c’est pourquoi elles ont été supprimées dans tous les pays de
l’OCDE à partir des années 1980. Les politiques de revenus représentent par ailleurs une
intrusion de l’État dans le mécanisme de répartition primaire. Cette intrusion est peu
appréciée des économistes libéraux, qui estiment que seuls les mécanismes de marché
permettent d’aboutir à une répartition optimale des revenus.

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L’État peut aussi mener des politiques de réduction des coûts des facteurs de production en
subventionnant certains prix tels ceux de l’énergie ou en réduisant les impôts supportés par les
entreprises.

4- Lutte contre l’inflation structurelle : la politique de la concurrence

Inspirée par les analyses de l’économie de l’offre dans les années 1980 (Laffer, Gilder et
Stigler), elle vise à lutter contre les entraves à la concurrence en vue de limiter les marges de
manœuvre en matière de prix. Elle repose sur le démantèlement des monopoles, notamment
dans les services publics en réseaux (téléphonie, électricité, gaz, transports). Les opérations de
concentration risquant de déboucher sur des positions dominantes sont écartées. Les ententes
en matière de prix et de répartition des marchés sont interdites et condamnées.

L’État peut donc s’efforcer de restaurer les lois du marché en permettant que se développe la
concurrence, facteur de baisse des prix (lutte contre les ententes, les abus de position
dominante).

5- Le contrôle des prix (blocage partiel ou total de certains prix)

Cet instrument a été fréquemment mobilisé, en France, au cours des « Trente Glorieuses ». Il
permet de stopper momentanément l’augmentation des prix. Cependant, il agit sur les
symptômes et pas sur les causes. La sortie du blocage des prix peut être l’occasion de
phénomènes de rattrapage et, donc, d’un redémarrage de l’inflation.

CONCLUSION
L’inflation a depuis longtemps constitué un problème majeur de déséquilibre macro-
économique. Elle modifie la répartition initiale des revenus et favorise les agents endettés au
détriment de ceux qui détiennent des revenus fixes. Elle est source de déséquilibres extérieurs
et de blocages de la croissance car elle fausse l’allocation des ressources. Elle est longtemps
apparue comme un moindre mal pour favoriser la croissance économique et l’emploi. Cette
capacité à arbitrer entre l’inflation et le chômage a été remise en cause par les économistes
monétaristes.

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Considérée essentiellement comme un phénomène monétaire, l’inflation est aussi le
symptôme de dysfonctionnements plus profonds de l’économie réelle : excès de demande par
rapport aux capacités d’offre, hausse des coûts des facteurs supérieurs aux gains de
productivité et, plus généralement, dérèglement des mécanismes concurrentiels. Les
politiques de lutte contre l’inflation visent à agir sur chacun de ses déterminants. Depuis le
milieu des années 1970, la politique monétaire est cependant l’instrument principal de lutte
contre l’emballement des prix.

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CHAPITRE 4 : L’ENDETTEMENT PUBLIC

INTRODUCTION
Le phénomène de l’endettement est une conséquence naturelle des activités économiques. Il
survient du fait que certains pays ou institutions ont des excédents financiers et d’autres des
besoins de financement. L’endettement permet donc à un pays d’investir des capitaux au-delà
de ses propres disponibilités financières en empruntant des excédents de capitaux. La dette
ainsi créée est supposée générer la croissance et favoriser le développement. Toutefois, pour
générer des ressources et pouvoir rembourser l’emprunt, ce dernier doit être utilisé de manière
efficace et dans des secteurs productifs. Aussi, dès le lendemain de leur indépendance et dans
la perspective de parvenir au développement économique et social, les pays africains se sont
rendus compte que les infrastructures d’équipement et de production déjà en place étaient
insuffisantes pour amorcer un quelconque décollage économique. L’écart entre le besoin
d’investissements nécessaires et les ressources disponibles était énorme. C’est pourquoi la
plupart de ces pays ont dû s’appuyer sur un fort endettement qu’ils doivent désormais gérer,
l’augmentation des besoins ayant très vite dépassé les capacités de financement.

La résultante est un ensemble d’augmentations successives du montant de la dette. La dette


extérieure a donc pris de l’ampleur et le cercle vicieux de l’endettement s’est installé. Le
poids de la dette aggravé par la pauvreté a ainsi freiné tout effort de développement. Nous
verrons, après la présentation de la dette, les causes de l’endettement des États, notamment
des PVD, les conséquences de l’endettement et les politiques de gestion de la dette.

Section 1 : PRESENTATION DE LA DETTE PUBLIQUE D’UN PAYS ET


TERMES CONNEXES
La dette publique d’un pays est le total des dettes contractées par des emprunteurs publics
(État, collectivités territoriales et organismes publics) auprès de particuliers, de banques,
d’entreprises ou d’autres États. La dette de l'État représente généralement la majeure partie de
la dette publique d'un pays. Elle se compose de la dette intérieure contractée auprès des agents
économiques résidents et la dette extérieure contractée auprès des prêteurs étrangers.
La dette extérieure peut revêtir diverses formes, selon la nature du créancier. On distingue
ainsi :

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 La dette multilatérale, si l’emprunt est obtenu d’un organisme multilatéral (la
Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International, la BAD, etc) ;
 La dette bilatérale, si le créancier est un autre État ; son rééchelonnement et sa
remise sont négociés au sein du club de Paris ;
 La dette bancaire, si le créancier est une banque privée extérieure ; son
rééchelonnement est négocié au sein du club de Londres.

Le Club de Paris est un groupement des principaux États créanciers, dont la présidence et le
secrétariat sont assurés par le trésor français. Le Club de Londres est quant à lui le cadre de
négociation entre gouvernements débiteurs et banques créancières.

Section 2 : CAUSES DE L’ENDETTEMENT PUBLIC


La dette publique varie au cours de l'histoire, suivant des processus souvent similaires qui se
déclinent toutefois en différents points. Les facteurs à l’origine de cette dette peuvent être
exogènes ou endogènes.

1- Causes exogènes
1-1- La crise pétrolière de 1973
En 1973 le premier choc pétrolier avec le renchérissement du pétrole qu'il comportait a été
l'un des facteurs déterminants de l’endettement des pays. Parmi les pays importateurs de
pétrole, ceux qui étaient suffisamment riches et qui pouvaient par conséquent obtenir du crédit
auprès des banques, ont évité de réduire leur niveau de vie suite à la détérioration des termes
de l'échange. Ils ont réglé la note pétrolière accrue en faisant des emprunts. Pour leur part, les
pays de l'OPEP ont déposé leurs excédents commerciaux auprès des banques. C'est ainsi que
se sont développés les « euromarchés ». Les banques internationales qui ont reçu cette manne
pétrolière l’ont prêté aux autres pays qui l'utilisaient pour financer leurs importations de
pétrole. C'est ce qu'on a appelé le recyclage des pétrodollars.

En plus des pays riches, les banques privées ont également accordé des crédits importants aux
« nouveaux pays industrialisés » (NPI) comme le Brésil, l'Argentine, le Mexique, la Corée du
Sud et quelques autres qui représentaient pour ces banques des débouchés réels à cause de
leurs taux de croissance impressionnants. En effet, lancés dans de vastes politiques de «

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développement » par l'industrialisation, ces pays avaient besoin de sommes considérables
pour financer leurs vastes projets d'infrastructures.

1-2- La crise pétrolière de 1979


En 1979, le deuxième choc pétrolier a entrainé le rétrécissement des marchés mondiaux qui a
eu pour corollaire la baisse des prix de la plupart des matières premières et des produits
agricoles, la hausse des taux d'intérêt nominaux et réel et l’appréciation du dollar. Ces trois
éléments ont simultanément joué contre les pays débiteurs. Ceux-ci se mettent alors à
contracter de nouveaux emprunts dans le seul but de rembourser les anciens. La dette continue
alors d’augmenter. En 1982, le Mexique arrête ses remboursements. A sa suite, plusieurs
autres pays ne sont plus capables de payer leur dette. De nombreuses banques, parmi
lesquelles les plus importantes des États-Unis, ont prêté à ces pays insolvables des montants
qui dépassent largement leurs fonds propres. C’est alors que va intervenir le FMI en proposant
une autre voie de règlement des dettes.

1-3- L’intervention du FMI


Les pays incapables de subvenir au service de leur dette extérieure ont la possibilité de faire
appel à l'aide du FMI. Celui-ci peut alors leur accorder de nouveaux crédits et jouer
l’intermédiaire pour organiser, avec l'accord des banques créditrices, le rééchelonnement des
dettes. La stratégie du FMI consiste en effet à convaincre les banques à accorder des délais
supplémentaires au débiteur et surtout à augmenter le montant total en ajoutant de nouveaux
crédits. Les banquiers, ayant pour règle d'or de ne jamais jeter l'argent encore bon après celui
qui est perdu, l’ont pourtant fait avec l’appui du Fonds. Cette stratégie qui ne fait que reporter
l'éclatement de la crise tout en l'aggravant, ne peut s'expliquer que parce que les banques se
retrouvent le dos au mur. Si les pays endettés arrêtaient de payer les intérêts les grandes
banques américaines et internationales seraient en faillite, et le système bancaire entier
s'écroulerait. Dès lors il vaut mieux continuer le jeu qui s'éternise, au mépris des souffrances
des populations innocentes.

1-4- Les politiques anti-inflationnistes des années 1980


Les politiques anti-inflationnistes menées par les pays industrialisés au début des années 1980
se sont traduites par une poussée des taux d'intérêt, très préjudiciable aux pays endettés. En
effet, leur dette étant contractée presque exclusivement à taux variable, ces pays se sont vus

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étouffés par le fardeau que constituait désormais la charge de la dette. Un second effet de ces
politiques a été le ralentissement très sensible de l'économie mondiale qui par contrecoup a
entraîné une diminution des exportations des PED et une baisse des cours des matières
premières, si bien qu’une pénurie en devises est apparue pour les débiteurs. A la suite du
Mexique, de nombreux pays vont se retrouver en cessation de paiement.

2- Causes endogènes

Les crédits obtenus par les gouvernements du sud n'ont pas toujours été utilisés
rationnellement. Au lieu de financer des investissements productifs, seuls susceptibles de
renforcer leur capacité exportatrice et de générer les flux de devises nécessaires au
remboursement de la dette, des gouvernements des pays endettés se sont lancés dans des
programmes d'investissement à rentabilité plus que douteuse et trop souvent inadaptés aux
besoins locaux. De plus, certains dirigeants du Sud ont détourné à leur profit, bien souvent
avec la complicité des créanciers, des sommes considérables si bien qu’aujourd’hui de
nombreux pays doivent rembourser les dettes contractées par d’anciens dictateurs tandis que
ceux-ci profitent en toute impunité de fortunes illégalement acquises.

La situation n’a cessée, depuis 1982, de se dégrader. D’après la Banque mondiale, la dette des
PED s’élève en 2001 à environ 2450 milliards de dollars tandis qu’elle était d’environ 560
milliards de dollars en 1980. Dans le même temps, les PED ont remboursé 3400 milliards de
dollars (à titre d’intérêt ou d’amortissement). Ainsi, les pays du Sud ont remboursé six fois
leur dette de 1980 pour se retrouver quatre fois plus endettés.

Section 3 : CONSEQUENCES DE L’ENDETTEMENT PUBLIC


1- Dette publique et croissance économique

Si l’origine du débat sur l’endettement public et la croissance est relativement ancienne, ce


sont les théories récentes sur la croissance endogène qui ont contribué à son renouveau.

1-1- Cadre théorique.


L'endettement permet à un pays d'investir des capitaux au-delà de ses propres disponibilités
financières en empruntant des excédents de capitaux (Klein, 1994). En général, trois raisons
théoriques justifient le recours d’un pays à l’emprunt extérieur.

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 S’endetter pour financer un investissement, lorsque l’épargne est inférieure à
l’investissement. Un pays peut renfermer un potentiel d’investissement productif sans
pour autant disposer d’un niveau d’épargne intérieure suffisant pour financer cet
investissement. Dans ce cas, il peut recourir à l’épargne extérieure pour la réalisation
de cet investissement afin de donner lieu à une accélération de la croissance
économique.
 S’endetter pour échapper à un ajustement face aux déséquilibres intérieurs ou
extérieurs. Un déficit du compte courant insoutenable nécessite un ajustement par des
changements de politiques économiques. Cependant, pour éviter des changements de
politique économique, un pays peut recourir à l’emprunt extérieur. Toutefois, la
théorie suggère que les emprunts extérieurs ont un impact positif sur les
investissements et la croissance jusqu’à un certain seuil car au-delà, l'impact de
l’endettement extérieur sur le développement devient négatif.

 S’endetter pour lisser les fluctuations de la consommation en cas de baisse du revenu.


Si un déficit du compte courant résulte de chocs exogènes négatifs (dégradation des
termes de l’échange, catastrophes naturelles, récession du côté des principaux
partenaires) qui donnent lieu à une baisse du revenu, alors le pays peut :
 soit réduire ses dépenses de consommation et d’investissement (absorption)
proportionnellement à la baisse du revenu pour remédier à ce problème. Dans
ce cas, il n'y a pas dégradation du compte courant ;
 soit contracter une dette extérieure pour maintenir le niveau d’absorption. En
effet, si cette baisse du revenu n’est que temporaire, le pays sera convié à
contracter une dette extérieure.
Dans tous les cas, à long terme, le recours régulier aux emprunts extérieurs finit par relâcher
les efforts du pays emprunteur et par le rendre dépendant de l’épargne extérieure, mettant
ainsi en doute sa capacité à honorer ses engagements de remboursement de la dette
antérieurement contractée : il faut alors emprunter pour rembourser une dette antérieure tandis
que les taux d’intérêt s’y rapportant, augmentent : c’est la mise en route d’une spirale
d’endettement qu’on appelle « la trappe à l’endettement ».

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1-2- Les théories de l’endettement
La théorie du surendettement (ou Debt overhang) suggère que les emprunts extérieurs, au-
delà d’un certain seuil, ont des effets pervers sur la croissance économique. Cela signifie que
les emprunts supplémentaires vont décroître la probabilité de rembourser.

Le modèle à double déficit de B. Chenery et Alan M. Strout (1966) souligne que


l’endettement est lié à un déséquilibre, et suivant les cas, il s’agit du déséquilibre épargne
investissement, du déficit budgétaire et du déficit de la balance courante. Par conséquent, le
modèle préconise que l’épargne externe conditionne le développement économique si les
déséquilibres épargne-investissement et importation-exportation peuvent être comblés.

Sur le plan interne, il s’agit, selon ces auteurs, d’accumuler l’épargne nécessaire pour financer
l’investissement interne, et sur le plan externe, de trouver les ressources nécessaires pour
financer le déficit de la balance des paiements.

Dittus (1989) a mis en évidence une relation entre la pression fiscale et le remboursement de
la dette. Il dénote l’existence des coûts associés à l’endettement, qui entraîne une croissance
artificielle basée sur un investissement supérieur à l’effort du pays et déclenche, par la suite,
un ajustement par l’inflation.

1-3- Études empiriques


Les études empiriques relatives à l’impact de la dette sur la croissance économique ont connu
de l’ampleur dans les pays en voie de développement depuis la crise de l’endettement dans les
années 80. Toutes les études effectuées sur un panel de pays telles que les études de Barry
Eichengreen et Richard Portes (1986), Elbadawi et al. (1996), Patillo et al. (2004), Clemens et
al. (2003), ont constaté que l’endettement excessif a un effet négatif sur le taux de croissance.
Les travaux de B. Eichengreen et R. Portes (1986) se sont intéressés à l’identification des
déterminants du stock de la dette d’une trentaine de pays à un moment donné de leur
économie.
Ils ont abouti à la conclusion selon laquelle l’endettement excessif et le défaut de paiement
tendent à réduire le taux de croissance réelle et la crédibilité de l’État. Elbadawi et al. (1996)
ont confirmé l’effet du surendettement sur la croissance économique au niveau de 99 pays en
voie de développement et ont tenté d’identifier le canal par lequel l’endettement agit
négativement sur la croissance. Pour cela, ils ont identifié trois canaux de transmission des

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impacts de la dette sur la croissance. Il s’agit de l’effet de la dette sur la croissance, l’effet de
la dette sur la liquidité en raison de la ponction due au service de la dette et, enfin, l’effet de la
dette (de manière indirecte) sur les dépenses du secteur public et sur les déficits.

L’étude a conclu que c’est l’accumulation de la dette qui a un impact négatif sur la croissance.
Quant à Clemens et al. (2003), ils ont estimé un modèle de croissance en retenant l’hypothèse
du fardeau virtuel de la dette. Ils aboutissent à la conclusion selon laquelle une diminution de
6 points du service de la dette en pourcentage du PIB va accroître le taux d’investissement de
0,75 à 1 point et la croissance de 2 points. Par ailleurs, ils estiment que si la moitié du service
de la dette est annulée sans hausse du déficit budgétaire, la croissance augmentera dans
quelques PPTE de 0,5 point par an.

Dans une étude complémentaire Patillo et al. (2002) ont appliqué un modèle de
comptabilisation de la croissance à un groupe de 61 pays en développement et ont constaté
que le doublement du niveau moyen de leur dette extérieure réduit de près d’un point la
croissance tant du capital physique par habitant que de la productivité totale des facteurs.
Partis de la courbe de Laffer, leur étude leur a permis de prouver que la dette aurait une
relation en forme de U inversée avec la croissance. Les résultats obtenus confirment la thèse
du surendettement car ils trouvent qu’au-delà de 160-170 % du ratio de la dette sur les
exportations et 35-40% de la dette sur le PIB en valeur nominale, la dette rend négative la
croissance. Néanmoins, une limite apparaît dans leur analyse, puisque le raisonnement est
appliqué aux PPTE, mais est basé sur un échantillon incluant de non PPTE.

S’agissant des études spécifiques menées au niveau des pays, les avis sont partagés. Pour
Borensztein (1990), le service de la dette est un déterminant essentiel qui influence
négativement l’endettement extérieur aux Philippines. Il a conclu que l’encours et le ratio du
service de la dette sur les exportations ont globalement un effet inverse sur la formation du
capital privé et incitent l’endettement du pays.

En analysant le problème d’endettement de l’Ouganda, Barungi et al. (2000) ont identifié les
problèmes liés à un endettement ainsi que ses implications sur l’économie du pays. Leur
principale préoccupation étant de savoir si l’économie peut atteindre un taux de croissance de
5 % tout en maintenant un investissement intérieur adéquat, vu la forte dépendance du pays

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vis-à-vis des capitaux étrangers. Cette inquiétude se justifie par le fait qu’une large portion de
la dette de ce pays n’est pas éligible au rééchelonnement. Pour Uzochukwu (2005),
l’accroissement des indicateurs de la dette extérieur, notamment le ratio du service de la dette
et celui de l’encours sur exportations, constitue la principale cause de la lenteur de la
croissance au Nigeria.

Par contre, Wejeweera et al. (2005) ont mis en évidence le lien entre la croissance
économique et l’endettement au Sri Lanka durant la période 1952- 2002 et ont abouti à des
résultats contraires. Ils indiquent que le pays n’a pas un problème de surendettement et que
l’endettement n’est pas le principal obstacle à la croissance, parce que, probablement, le stock
de la dette totale n’est pas trop élevé.

L’étude de Desta (2005) a également abouti à la conclusion selon laquelle ce n’est pas le
paiement du service de la dette qui constitue un frein à la croissance en Éthiopie mais plutôt le
taux de change effectif réel et l’inflation.
Au terme de cette revue de la littérature qui nous a permis de fouiller en profondeur sur la
question relative au lien entre l’endettement extérieur et la croissance économique, force est
de constater que l’endettement extérieur a, pour la plupart des cas, un effet négatif sur la
croissance économique des pays en voie de développement, et plus particulièrement ceux de
l’Afrique subsaharienne. Il n’y a donc pas eu les résultats escomptés ; bien au contraire, les
pays se retrouvent avec des niveaux d’endettement élevés.
Si pour certains, c’est le paiement du service qui constitue un obstacle à la croissance, pour
d’autres, c’est l’accumulation de la dette elle-même, ou les deux. Ces contradictions peuvent
provenir soit de la variabilité des méthodes utilisées par les économistes, soit des
particularités (situation économique, secteurs porteurs de croissance et disponibilités de
données) des pays étudiés.

2- Lien entre le déficit budgétaire (public) et l’accroissement de la dette publique


2-1- Définition de déficit budgétaire

Le déficit budgétaire est la situation dans laquelle les recettes de l'État (impôts et cotisations
sociales) sont inférieures à ses dépenses (administration, éducation, dépenses sociales...) au
cours d'une année. De façon mécanique, la dette publique résulte de l'accumulation des

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déficits budgétaires passés des administrations publiques. Elle est en effet le produit de
l'accumulation des besoins de financement passés des administrations publiques, résultant des
différences entre les produits (les recettes fiscales, en particulier) et les charges (notamment
les dépenses budgétaires) de ces administrations. La dette augmente donc à chaque fois qu'un
déficit public est financé par emprunt.

2-2- Impact du déficit budgétaire sur l’activité économique

Un déficit budgétaire a un impact économique qui peut, selon certains économistes, être un
stimulant pour l'activité économique par l'intermédiaire d'une politique de relance selon les
principes du keynésianisme, ou simplement être un moindre mal dans certaines situations de
récession.
Pour d'autres économistes, un déficit budgétaire est toujours le signe d'une mauvaise gestion
des fonds publics et de l'argent du contribuable et à ce titre il doit être évité. Les économistes
libéraux insistent sur les effets néfastes du déficit public, qui peut engendrer un accroissement
de la dette publique.

2-3- Comment financer le déficit ?


Pour financer son déficit budgétaire, l'État peut recourir :
 à l'emprunt (ce qui déplace le problème dans le temps, suppose la confiance des
créanciers, et a de toute façon un coût puisqu'il faut payer des intérêts) ;
 à des réserves préalablement accumulées à partir d'excédents budgétaires réalisés les
années antérieures ;
 à une hausse d'impôt, en supposant que les taux n'atteignent pas le point de rupture où
ils détruisent le gisement fiscal ;

NB : Pour financer son déficit budgétaire, l'État peut également recourir au financement
monétaire, c'est-à-dire à la création monétaire. Dans ce cas la Banque centrale consent une
avance à l'État en créditant le compte du Trésor public ; la masse monétaire s'accroît donc.
Toutefois ce mode de financement du déficit budgétaire est risqué ; si l'accroissement de la
masse monétaire est plus rapide que celui de la production, alors le rythme de l'inflation va
s'accélérer. Par ailleurs, l’émission monétaire n'est plus une méthode utilisée depuis des
décennies dans les pays développés, et est même impossible dans les États qui ont confié la

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gestion de la monnaie à une banque centrale indépendante. C'est le cas des États de l'Union
européenne avec la Banque centrale européenne.

Section 4 : LA GESTION DE LA CRISE DE LA DETTE


1- Cas des pays en développement (PED)

Face aux problèmes d’endettement et dans la perspective de stimuler la croissance des pays
pauvres, en particulier ceux de l’Afrique au Sud du Sahara, les pays créanciers se sont
concertés pour assouplir graduellement les modalités de remboursement. A cet effet, deux
gammes de solutions ont été proposées aux autorités des pays concernés pour adapter la
charge de l’emprunt à leur capacité réelle à servir durablement la dette. La première gamme
se rapporte à des réaménagements techniques de la dette provenant exclusivement du Club de
Paris et du Club de Londres. La deuxième gamme de solutions s’appuie sur un système
d’allégement global de la dette (y compris les emprunts multilatéraux) qui rendrait
économiquement et socialement supportable le poids de la charge de la dette. Il s’agit de
l’initiative d’allégement de la dette des pays pauvres très endettés (PPTE).

1-1- Les principaux acteurs


 Le FMI
Le FMI depuis les années 80 joue un rôle capital dans la gestion de la crise d'endettement qui
sévit et menace le monde entier surtout le système financier international. Son statut de
garant de la stabilité financière internationale l’oblige à intervenir concrètement dans la
gestion de cette crise de 1982 qui s'est propagé à l'ensemble des PED. Il a joué le rôle
d'interlocuteur entre les pays débiteurs et créanciers que se soit dans le cadre des dettes
bilatérales du club de Paris ou club de Londres. Plusieurs accords relatifs aux dettes publiques
ont été conclus dans le cadre du Club de Paris à travers la condition de Toronto en 1988 ainsi
que ceux relatifs aux dettes privées prérogatives du Club de Londres.
Les dettes multilatérales y compris ses dettes et celles de la Banque mondiale ont été aussi
restructurées. Face à la persistance du problème, malgré les efforts entrepris, il a fait l'objet de
critique de la part des universitaires, des dirigeants mais aussi et surtout de la population des
PED, principale victime de l'échec des politiques appliquées. La crédibilité du FMI a été ainsi
mise en jeu.

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 Le Club de Paris
Le Club de Paris, formé en 1956 face aux difficultés de paiement de l’Argentine, a pour but
de réaménager, voire de rééchelonner les dettes des pays débiteurs. Le Club n'est pas une
organisation internationale et n'a pas une liste de membres, mais il constitue un forum où le
débiteur et ses créanciers se rencontrent sous la supervision du trésor français.
Trois principes guident les assises du club :
 Le Club ne se penche que sur les cas de défaut imminent et, en règle générale, procède
à un rééchelonnement sur une période de 12 à 18 mois. Le Club ne se prononce pas
sur les besoins de nouveaux financements.
 Il ne se réunit que si le pays débiteur est déjà en accord avec le FMI pour la mise en
œuvre d'un programme d'ajustement structurel.
 Chaque créancier présent au club doit supporter une part du poids du programme de
rééchelonnement équivalente à son exposition vis à vis du débiteur.
1-2- Les solutions

 Les solutions précédant l’Initiative PPTE


Les premiers mécanismes traditionnels internationaux de réduction de la dette mis en œuvre
sont, entre autres, les Plans Baker et Brady, les Termes de Toronto (1988), les Termes de
Londres (1991), les Termes de Naples (1995) et les Termes de Lyon (1996). La technique de
réaménagement en rééchelonnement de la dette ne servant qu’à repousser les échéances dues,
le pays débiteur voit ses échéances futures s’alourdir. Et si la situation économique du pays se
détériore du fait d’une mauvaise conjoncture internationale sur les cours des principales
spéculations ou des facteurs internes, le pays se trouvera dans l’obligation de redemander des
rééchelonnements successifs.

 Le plan Baker (1985)


C'est en octobre 1985, lors de l'assemblée générale du FMI à Séoul, que le plan Baker fut
présenté. Il fut le premier plan d’envergure internationale pour répondre à la question des
dettes souveraines, du nom du Secrétaire américain du Trésor James Baker. Pour stimuler les
banques dans une opération à laquelle elles étaient particulièrement réticentes, les promoteurs
du plan Baker proposèrent une option : ou bien, elles acceptaient de réinjecter de l’argent
frais, ou bien elles acceptaient la restructuration des dettes avec, comme préalable, un
abandon de créances. Baker propose d'accorder des prêts supplémentaires de 20 milliards de

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dollars sur trois ans aux quinze pays les plus endettés, essentiellement en Amérique latine,
pour leur permettre de poursuivre leur développement économique.
Salué au départ comme « une approche positive et constructive », ce plan sera enterré un peu
plus de trois ans après devant son échec évident, les banques commerciales internationales
ayant insuffisamment répondu à l'appel d'apport substantiel d'argent frais. Les grands pays
occidentaux reconnaissent alors qu'il faut s'orienter dans une voie nouvelle : celle-ci prendra
la forme d'une réduction volontaire de la dette ou du service de la dette.

En somme, le plan Baker fut un semi-échec quatre (4) ans après sa mise en œuvre, de très
nombreux pays étant encore incapables de faire face à leurs échéances. A ce plan, succéda
alors le plan Brady.

 Le plan Brady (1989)


Le plan Brady, présenté le 10 mars 1989 par le secrétaire américain de l'époque, Nicholas
Brady, prévoit une réduction de la dette extérieure d'une quarantaine de pays, soit par le
rachat, soit par titrisation. Cette dernière consistait à échanger des créances anciennes sur
lesquelles les banquiers acceptaient une perte en valeur nominale ou en intérêts contre de
nouveaux instruments obligataires d'une maturité plus longue et bénéficiant d'une garantie de
remboursement des autorités monétaires internationales. Ces propositions ne se sont pas
imposées sans mal. En témoignent les réactions à chaud de Horst Schulmann, alors directeur
de l'Institut de finance international représentant l'ensemble des grandes banques
internationales, et qui déclarait en mars 1989 : « Ni la dette, ni l'environnement international
ne sont la cause des difficultés des pays endettés du tiers-monde, mais la gestion de leur
économie ». Ce plan a pourtant marqué le véritable tournant de la crise de la dette.

Le Mexique fut le premier pays à l'appliquer, suivi par une quinzaine d'autres, sous des
schémas financiers qui ont légèrement évolué au fil du temps. Les derniers accords ont porté
sur la dette ivoirienne et vietnamienne. Nombre des pays concernés, grâce à cette réduction de
dette, et avec une politique stricte d'ajustement macroéconomique, ont pu, au cours des années
90, retrouver la voie des marchés de capitaux internationaux.

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 Les termes de Toronto
Lors du sommet économique de juin 1988 à Toronto, le Groupe des G7 (Canada, États-Unis,
Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie et Japon) accepte de réduire d'un tiers dans le
cadre du club de Paris, la dette officielle des pays éligibles à la FASR (Facilité d'ajustement
structurel renforcé). Plus tard, cet accord a été entériné par la FMI et la Banque mondiale en
vue de réduire les dettes publiques des pays d'Afrique admissible au club de Paris. L'accord
fut ensuite étendu à d'autres pays à partir de 1990.

Un menu d'options est offert aux créanciers et chacun a essayé de défendre sa proposition :
- Option A : Réduire le stock de la dette d'un tiers et rééchelonner le reste sur quinze ans.
Ici, il y aura une annulation pure et simple d'un tiers des services de la dette (principal et
intérêt) et rééchelonnement du restant au club de Paris sur une période de grâce de huit ans ;
proposition soutenue par la France.
- Option B : Rééchelonner la dette sur vingt cinq ans. Cela se manifeste par un allongement
de la période de remboursement du service de la dette sur 25 ans au lieu de 15 ans. Cette
proposition est soutenue par les États-Unis.
- Option C : Rééchelonner la dette à un taux d'intérêt réduit. Le taux d'intérêt sera réduit à
3,5% ou à la moitié du taux initial si celui-ci est inférieur à 7% et un rééchelonnement sur 14
ans incluant une période de grâce de 8 ans, proposition préférée par la Grande Bretagne,
l'Allemagne, la Suisse, la Norvège, l'Italie et le Pays–Bas.

Les critères d'admissibilité aux conditions de Toronto sont : Pays admissible aux prêts de
l'Association Internationale pour le Développement de la Banque mondiale, soit un pays dont
le revenu par tête inférieur à 580 dollars en 1989 (610 dollars en 1990 et 635 en 1991) ;
- Pays lourdement endetté s'il a un des deux ratios supérieurs à un seuil critique pour la
période 1989-1991:
 Valeur présente du service de la dette sur le PNB supérieur à 80% ;
 Valeur présente du service de la dette sur les exportations supérieures à 200%.
D'octobre 1988 à mars 1991, 26 accords ont été signés, impliquant 19 pays. Entre l988-1990,
la Banque mondiale estime que 29% des créanciers du club de Paris ont choisi l’option A,
contre 26% pour la B et 45% pour la C.
Les initiatives françaises sur l'endettement deviennent plus généreuses. Le président
Mitterrand annonce l'annulation pure des créances de la France envers 35 pays africains. En

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juin 1990, la France annonce, lors du sommet franco-africain de la Baule, un plan de
réduction des taux d'intérêt sur les prêts accordés par la caisse centrale de coopération
économique en faveur des pays intermédiaire d'Afrique.

Les différentes mesures prises dans le cadre du Club de Paris ont été toujours faits avec le
concours du FMI.
 Les termes de Londres
En décembre 1991, les créanciers du Club de Paris ont convenu de mettre en œuvre un
nouveau traitement pour la dette des pays les plus pauvres. Ce nouveau traitement, dit "des
termes de Londres", augmentait le niveau d'annulation de 33% tel que défini dans les termes
de Toronto à 50%. 23 pays ont bénéficié des termes de Londres entre 1991 et 1994, date à
laquelle ces termes ont été remplacés par ceux de Naples.

Les crédits non-APD étaient annulés à hauteur de 50%.


En ce qui concerne les crédits APD, ils étaient rééchelonnés à un taux d'intérêt au moins aussi
favorable que le taux concessionnel initial qui s'appliquait à ces prêts. Par ailleurs, le
rééchelonnement mis en œuvre par le Club de Paris améliorait les perspectives de
recouvrement des dettes en réduisant la probabilité de défaut.
Les termes de Londres incluaient aussi la possibilité pour les pays créanciers de conduire, sur
un plan bilatéral et de manière volontaire, des conversions de dette avec le pays débiteur.
Ces opérations de conversions pouvaient en principe être menées sans limite pour les crédits
d'aide publique au développement, et, pour les crédits non-APD.

 L’Initiative PPTE
Cette nouvelle approche axée sur la lutte contre la pauvreté a une plus grande portée, car elle
tient compte des dettes des organismes multilatéraux.
Initiée par les institutions de Bretton-Woods, ces dernières ont accepté d’assouplir les
modalités d’application de l’initiative de réduction de la dette des pays pauvres très endettés
(PPTE). Elle a ensuite été renforcée et soutenue par les pays industrialisés lors du Sommet du
G7 de Cologne en juin 1999, ce qui a conduit à la mise en œuvre de l’Initiative PPTE
renforcée. L’initiative PPTE renforcée a pour objectif de réduire à un niveau viable
l’endettement de 42 pays représentant 8% de la dette totale des pays en développement. De ce
point de vue, les objectifs PPTE peuvent paraître modestes. L’initiative PPTE constituait

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néanmoins la première tentative de traitement de l’ensemble de la dette (bilatérale,
multilatérale et privée) de manière globale, et c’est aussi la première à inclure une réduction
de la dette due aux institutions multilatérales.

L’initiative PPTE consiste en deux étapes. Durant la première, le pays potentiellement


admissible établit un bilan de sa mise en œuvre des programmes de la Banque mondiale et du
FMI sur trois ans. À ce stade, appelé point de décision, les institutions de Bretton-Woods
déterminent si, après mise en œuvre de tous les mécanismes traditionnels d’allègement de
dette, la dette du pays en cause dépassera encore un seuil chiffré préétabli. En ce cas, un
programme d’allègement de dette est établi. Afin d’obtenir les remises maximales, le pays
doit encore poursuivre une série de réformes pendant trois ans ou plus. Ceci fait, le pays
atteint ce que l’on appelle le point d’achèvement et les allègements promis deviennent
effectifs. Toutefois, entre les points de décision et d’achèvement, le service de la dette est déjà
allégé sur une base provisoire. Au total, lorsqu’elle est menée à bien, l’Initiative apportera une
réduction des deux tiers de leur dette aux pays admissibles.

 Le nouveau cadre de gestion de la dette des pays à faible revenu : le Cadre de viabilité
de la dette (CVD)
Le CVD a été adopté en 2005 par la Banque mondiale et le FMI comme nouveau cadre de
gestion de la dette des pays à faible revenu (PFR). Parmi les PFR, le CVD s’applique à ceux
qui ne se sont jamais engagés dans l’initiative PPTE, ou à ceux qui en ont mené à bien le
processus. Une caractéristique importante du CVD est, qu’à la différence de l’initiative PPTE,
il ne sert pas à calculer des allègements de dette. Sous le régime PPTE, l’abaissement du seuil
d’endettement avait pour conséquence de signaler la nécessité d’un plus large allègement.
Sous le régime du CVD au contraire, la conséquence de l’abaissement du seuil d’endettement
est de réduire l’accès à des prêts non concessionnels et de faire dépendre la couverture du
financement des objectifs de développement et de lutte contre la pauvreté par des dons, toute
remise de dette supplémentaire étant exclue. Une autre différence avec l’initiative PPTE est
que le CVD ne repose pas sur des indicateurs chiffrés préétablis mais sur des seuils
d’endettement spécifiques à chaque pays. Les seuils d’endettement particuliers à chaque pays
sont établis sur la base de la qualité de leur situation politique et institutionnelle, mesurée en
utilisant la méthode des Évaluations des politiques et des institutions nationales (EPIN). Cette
méthode évalue le contexte politique et institutionnel d’un pays par rapport à un ensemble de

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critères préétablis pour aboutir à une note fondée sur une estimation fixée d’avance de ce qui
peut être considéré comme un bon résultat. En fonction de leur note EPIN, les pays sont
classés en trois groupes (mauvais, moyen et bon), et se voient assigner pour chacune des
mesures budgétaires utilisées, une plage de seuils d’endettement.

2- Gestion du déficit public et de la dette publique : cas des pays de l’Union Européenne

Pour lutter contre un risque de dérapage de l’endettement des États membres de l’Union
européenne, une politique budgétaire européenne stricte a été mise en œuvre.

2-1- Règles budgétaires imposées aux États membres de l’Union européenne

Des règles strictes ont été imposées aux États membres de l’Union européenne par le Traité de
Maastricht (en 1992) et le Pacte de stabilité et de croissance (en 1997) pour éviter l’apparition
de déficits publics excessifs. Parmi elles :
 un déficit public maintenu en dessous du seuil de 3 % du PIB ;
 le montant de la dette publique limité à 60 % du PIB.

Après la crise financière de 2008, de nombreux États membres de l’Union européenne ont
dépassé ces seuils et, dans certains cas, les déficits publics ont atteint des proportions
inquiétantes. Des plans d’austérité ont été instaurés dans plusieurs pays (en Grèce, en Irlande,
au Portugal, en Espagne et à Chypre). Un Fonds européen de stabilité financière (FESF) a été
mis en place temporairement en mai 2010 notamment afin d’éviter à la Grèce un défaut de
paiement et de préserver autant que possible la stabilité financière de la zone euro.

Pour renforcer la discipline budgétaire au sein de l’Union européenne, un nouveau pacte


budgétaire européen (le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de
l’Union économique et monétaire) a été signé le 2 mars 2012 par 25 pays de l’Union
européenne (le Royaume-Uni et la République Tchèque ayant refusé de le signer). Ce texte
prévoit des contraintes plus fortes :
 la « règle d’or budgétaire » impose un déficit structurel (c'est-à-dire un déficit corrigé
des effets du cycle économique, notamment sur les recettes, et hors dépenses

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inhabituelles dues aux aléas de la conjoncture économique) qui ne doit pas dépasser
0,5 % du PIB ;
 des sanctions financières systématiques sont prévues en cas de non-respect des règles
du pacte de stabilité.

2-2- Création du Mécanisme Européen de Stabilité Financière (MESF)

Le Mécanisme Européen de Stabilité Financière (MESF) a commencé à fonctionner fin 2012


en remplacement du Fonds européen de stabilité financière (FESF). Le MESF peut, dans le
cadre d’un programme européen d’assistance financière, accorder des prêts aux États
européens ayant de graves difficultés de financement afin d’éviter des défaillances.
En contrepartie, les États bénéficiaires doivent s’engager à prendre des mesures précises qui
conditionnent l’octroi des prêts. Le MESF dispose de fonds propres apportés par les États
membres de la zone euro. Les États ne faisant pas partie de la zone euro peuvent eux aussi
participer aux opérations de soutien à la stabilité. La France est le 2e contributeur du MESF
derrière l’Allemagne avec une participation qui s’élève à 20,4% de son capital (27,1% pour
l’Allemagne). Le MESF peut également lever des fonds en émettant des obligations sur les
marchés financiers.

CONCLUSION
La crise de la dette qui a débuté en 1982 est la conséquence d’un certain laxisme de la part des
créanciers quant aux prêts accordés, d’une mauvaise utilisation des sommes reçues par les
dirigeants des pays en développement et de la politique anti inflationniste menée au début des
années 1980 par les pays occidentaux. Cette crise a été gérée, avec l’accord des créanciers,
par les institutions financières internationales. Ainsi, le FMI et la Banque mondiale ont
conditionné toute restructuration de dette à l’adoption de programmes d’ajustement structurel
qui, loin de régler les maux dont souffrent les PED, ont conduit à la crise des années 1990 et
se sont traduits par une mise sous tutelle des économies des pays en développement. Si les
institutions financières internationales tentent d’infléchir leurs politiques, celles-ci participent
toujours d’une logique libérale. En définitive, si l’on veut redonner une certaine liberté
d’action aux PED, il convient de supprimer cet instrument de domination que constitue leur
dette extérieure. Une telle annulation trouve des justifications tant économiques que
politiques.

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CHAPITRE 5 : LES CRISES FINANCIERES

INTRODUCTION
De nombreuses crises ont affecté les économies nationales depuis plusieurs décennies. Celle
de 1929, celle de 1973 ou plus récemment celle de 2008. Ces grandes crises ont à chaque fois
touché l’ensemble des agents économiques : les entreprises (entrainant des faillites), les
ménages (réduisant leur pouvoir d’achat ou faisant croitre le chômage), les banques (les
rendant plus réticentes à financer les projets), les États et les finances publiques. Dans un
monde où les économies nationales sont de plus en plus interconnectées et liées à la finance
internationale, les probabilités des crises à s’étendre à l’échelle mondiale sont immenses. Si
on analyse les crises qui se sont déroulées depuis le milieu des années 1980, on se rend
compte que ce sont surtout les crises bancaires et financières qui ont tendance à se multiplier.
Ces crises s’expliquent en particulier par un phénomène qui s’appelle la théorie du « cycle du
crédit ». Dans ce chapitre, en premier lieu, nous définirons les notions nécessaires à la
compréhension des crises financières et présenterons les différentes formes de crises
financières. En second lieu, nous indiquerons les différentes phases des crises et exposerons
les causes des crises financières. Troisièmement, nous traiterons de la manifestation des crises
financières, et en dernier ressort, nous présenterons les processus de régulation des marchés
financiers.

Section 1 : DEFINITIONS
En économie, la crise est le moment où la conjoncture se retourne à la baisse, c’est- à-dire le
moment qui clôt une phase d’expansion économique et ouvre une phase de récession, voire de
dépression. On parle de crise financière pour qualifier un retournement de la conjoncture
dans le système financier. Les crises financières sont favorisées par un contexte particulier :
innovations financières, système financier libéralisé, facilité d’accès au crédit. La titrisation
est un procédé par lequel une banque qui détient une créance émet une obligation adossée à
cette créance, qu’elle vend sur les marchés financiers. En réalisant cette opération, elle
transfère le risque de non remboursement du prêt à un autre agent. Elle a entraîné une
augmentation du crédit en minimisant le risque de crédit.

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L’aléa moral est un risque provenant d’une situation d’asymétrie d’information. Ainsi les
opérateurs financiers peuvent prendre des risques non anticipés, parce qu’ils savent qu’il
existe un prêteur en dernier ressort (État ou banque centrale) qui pourra les couvrir.
L’assurance d’un sauvetage financier conduit à prendre davantage de risques. Par exemple,
avec le phénomène de la titrisation, les banques ont pu prendre davantage de risques et ont
accordé des crédits à des ménages peu solvables, car elles savaient qu'elles pourraient
revendre les crédits sous forme de titres et se débarrasser du risque. Il y a eu une asymétrie
d'information entre les banques qui vendaient ces titres et les acheteurs, qui ont été mal
informés des risques que représentaient ces titres, fondés sur des créances faites à des
ménages qui risquaient de faire défaut.

Un établissement "too big to fail" est un établissement "trop gros pour faire faillite". Son
poids financier rend impossible le fait que les autorités monétaires puissent le laisser tomber,
en raison de l’effet majeur qu’une faillite entraînerait. En l’absence d’intervention, l’économie
risque la crise systémique. Le poids d’une banque, mesuré par le total de son bilan permet
d’estimer l’ampleur des conséquences de sa faillite éventuelle. Les difficultés d’une banque
s’étendent vite à d’autres banques et à l’économie tout entière. Les pouvoirs publics se
refusent donc à ne pas secourir une banque trop importante. Le principe "too big to fail" part
d’une bonne intention : éviter le risque systémique dû à la faillite d’un grand établissement.

Risque systémique : risque de dégradation brutale de la stabilité financière qui compromet la


capacité du système financier à remplir sa fonction fondamentale, l’offre de services
financiers, avec des répercussions sur l’économie réelle ou risque de crise financière
généralisée provoqué par la défaillance d’un participant qui entraîne dans sa chute d’autres
défaillances d’établissements financiers (effet domino).

Plusieurs situations présentent des risques systémiques :


 L'interdépendance des institutions financières : si les institutions sont
interdépendantes, en se prêtant des fonds les unes aux autres, il peut y avoir un effet
de contagion en cas de difficulté d'une institution. En effet, suite à un choc, par
exemple si une banque fait défaut, les difficultés se propagent au système financier et
provoquent des faillites en chaîne, touchant l'ensemble des marchés financiers, c'est
l'"effet domino".

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 L'exposition commune des différentes composantes d'un marché à un choc (par
exemple si toutes les institutions du marché détiennent un grand nombre de parts dans
une entreprise, si celle-ci fait défaut, toutes les institutions seront en difficulté).
 Les déséquilibres financiers : lorsque certaines économies mondiales dégagent de forts
excédents (capacité de financement) et d'autres de grands déficits (besoins de
financement), le déséquilibre est un risque systémique. En effet, d'une part, dans les
économies à capacité de financement, l'accumulation d'excédents incite les agents à
réaliser des placements financiers de plus en plus risqués. D'autre part, les économies
mondiales sont rendues très interdépendantes, et un changement dans une économie
peut avoir de grandes répercussions sur d'autres. Ainsi, lorsque les déséquilibres se
creusent, la probabilité d'une crise globale augmente. Le risque systémique a des
répercussions sur l'économie réelle. D'une manière générale :
 L'effondrement des cours de titres engendre un effet de richesse négatif (perte de
revenu pour les agents qui détiennent des titres).
 La structure financière des entreprises se dégrade (la valeur de leurs actifs financiers
se dégrade), elles ont plus de mal à obtenir des financements et deviennent plus
vulnérables.
 L'offre de crédit se contracte et limite les capacités d'investissements des agents
(ménages, entreprises, État). Cela fait diminuer le niveau de production, ce qui affecte
le niveau d'emploi. Dans cette situation de risque systémique, les agents formulent
des anticipations pessimistes, ce qui limite la reprise de la production. Dans ce cas, la
crise s'auto-entretient.

Le Credit crunch : phénomène d’assèchement des possibilités de crédit auprès des


établissements bancaires. Réglementation prudentielle : normes contraignantes visant à
réduire le risque systémique en forçant les banques et les agents financiers à éviter une prise
de risque excessive. Une bulle spéculative : il y a bulle lorsque la différence entre le cours
d’une action et le rendement économique d’une entreprise est trop grande. La bulle
spéculative est une situation où les cours des actions augmentent du fait du comportement
mimétique des spéculateurs, sans rapport avec la valeur réelle des entreprises. Cette bulle se
développe à cause d’anticipations auto-réalisatrices des opérateurs de marché : tous se
procurent des titres en espérant qu’ils vont prendre de la valeur, la demande augmente, et les
titres prennent effectivement de la valeur. Au moment où ces anticipations se retournent, on

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parle d’éclatement de la bulle : les agents liquident leurs titres, qui perdent alors de la valeur.
Sur les marchés des capitaux, la hausse des prix ne se traduit pas forcément par une baisse de
la demande, en raison de comportements mimétiques. Il y a mimétisme, car les investisseurs
achètent parce que d’autres achètent. On peut considérer qu’une des motivations de l’adoption
du comportement mimétique est que l’information sur le marché manque : l’agent suit alors
des leaders supposés mieux informés que lui.

La volatilité désigne l'amplitude des fluctuations du cours d'un actif. Un actif est volatile si
son cours varie fortement sur une courte période.

Le Paradis fiscal : territoire sur lequel l’impôt sur les bénéfices ou les revenus de capitaux
supporté par les non-résidents est insignifiant et dont les autorités se montrent "peu
coopératives" pour fournir à des pays tiers des renseignements sur les patrimoines ou les
revenus des personnes qui y ont des comptes.

Section 2 : LES DIFFERENTES FORMES DE CRISES FINANCIERES


Les crises financières peuvent prendre la forme de :
 Krach boursier ou crise boursière : très forte chute des cours des actions. Ajustement
brutal à la baisse sur les marchés boursiers, lié à l'éclatement d'une bulle spéculative.
Une grande partie des titres perdent brusquement leur valeur, car tous les agents
cherchent à les revendre. Crise de change : effondrement de la valeur de la monnaie.
Ajustement violent du taux de change de la monnaie d'un pays vis-à-vis des autres
monnaies. Il peut par exemple s'agir du cas où une monnaie est victime d'une attaque
spéculative (les agents financiers détenteurs de cette monnaie cherchent à la vendre
pour faire diminuer sa valeur), comme en a été victime la livre sterling en 1992.

 Crise bancaire : les banques sont en situation d'illiquidité ou d'insolvabilité, et de ce


fait n'arrivent plus à obtenir d'argent sur les marchés de capitaux. Elles ne peuvent
alors plus accorder de crédits et risquent de ne pas rembourser les agents qui leur ont
confié leurs fonds. C'est le cas des faillites bancaires de 2008.

 Crise de la dette souveraine : c'est une situation dans laquelle un État a des difficultés
à rembourser sa dette. Elle peut venir du simple doute des agents financiers sur les
capacités de l'État à rembourser sa dette, car si ces agents sont méfiants, ils cessent de

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prêter à l'État, or cet État pouvait compter sur l'emprunt pour rembourser ses premiers
créanciers. C'est par exemple la crise qu'a connue la Zone Euro en 2010.

Section 3 : LES CAUSES DES CRISES FINANCIERES


Plusieurs explications permettent de comprendre ces crises financières :
 un système financier libéralisé laisse une grande liberté aux acteurs sur les marchés.
L’interdépendance entre les marchés financiers, entre les banques ainsi qu’entre le
secteur bancaire et les marchés financiers se propage à l’ensemble du système
financier national et international.
 L’abondance de liquidités et le crédit facile. Les prêteurs imprudents sont devenus
incapables de sélectionner les bons projets (risque de crédit).
 Le développement d’innovations financières. En créant des opportunités nouvelles de
placement, les innovations financières sont des facteurs de déstabilisation. La
titrisation, au cœur de la crise des subprimes, fournit un exemple de l’augmentation du
risque systémique issue des innovations financières (risque de marché).
 L’augmentation des inégalités. Quand les inégalités s’accroissent, les ménages les plus
modestes sont contraints d’emprunter, ce qui augmente le risque bancaire. A l’opposé
les ménages les plus aisés, dont les revenus et le patrimoine progressent rapidement,
alimentent la spéculation par leurs apports de capitaux sur les marchés d’actifs.

Section 4 : LES PHASES DE CRISES


Selon Charles Kindleberger la crise se déroule en cinq phases :
 L’Essor : période de croissance économique et d'expansion du crédit. Elle rend
favorable une hausse du prix des actifs (par exemple dans les années 1990 aux États-
Unis).
 L’Euphorie : dans la continuation de l'essor, le crédit est accordé de plus en plus
facilement, car les investisseurs recherchent les placements les plus rentables et
financent des projets de plus en plus risqués. Les risques de crédit sont sous-estimés.
(Cela a par exemple été le cas aux États-Unis, avec le système des "subprimes". Les
garanties hypothécaires des prêteurs ont donné confiance aux investisseurs qui ont
accordé des prêts à des ménages peu solvables.)

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 Le Paroxysme et retournement : les agents peuvent brusquement prendre conscience
des risques trop grands qui ont été pris, notamment lorsque les projets risqués
échouent et que des débiteurs font défaut. Les fragilités du système apparaissent et les
anticipations des agents se retournent brusquement, c'est-à-dire qu'ils deviennent
pessimistes (aux États-Unis, en 2007, lorsque le prix des logements a diminué, il n'a
plus été possible pour les banques prêteuses de compenser les défauts de paiement des
ménages en vendant leurs habitations. On s'est alors rendu compte que des prêts
avaient été accordés beaucoup trop facilement).
 Le Reflux et pessimisme : dans un contexte pessimiste, les agents cherchent à tout prix
des liquidités, la méfiance s'accroît envers les autres agents. Plus personnes ne veut
prêter d'argent, et le crédit se fait rare. C'est le "credit crunch". Les agents cherchent
alors à vendre leurs titres pour avoir des liquidités, et les cours des titres chutent
brutalement.
 La Déflation de la dette et restructuration : la baisse des cours appauvrit les agents, qui
vendent alors d'autant plus de titres pour compenser cette baisse, ce qui fait à nouveau
baisser leurs cours. Il y a donc une baisse auto-entretenue des prix des actifs, ainsi que
des revenus, car les entreprises sont en difficulté. L'intervention publique est cruciale
durant cette phase pour amorcer la reprise (aux États-Unis, de grandes banques ont fait
faillite, nécessitant l'intervention du Trésor public. Cette crise s'est propagée au reste
du monde).

Section 5 : MANIFESTATION DES CRISES FINANCIERES : CAS DE


LA CRISE DES SUBPRIMES

Quand une vague d’optimisme touche un domaine d’activité, le prix des actions des
entreprises de ce secteur grimpe et comme tout le monde pense que l’augmentation va se
poursuivre, chacun achète ces titres et une "bulle" se forme. Cette hausse fournit des garanties
aux emprunteurs qui s’endettent davantage et achètent plus d’actions. Les prix grimpent
encore et l’emballement s’auto-entretient jusqu’à l’explosion. La crise est systémique quand
elle se diffuse à l’ensemble des marchés financiers à l’échelle planétaire. Concernant le cas de
la crise des subprimes intervenue aux États-Unis, on note qu’à partir de 2002 le marché de
l’immobilier connaît un essor considérable. Les taux d’intérêt sont au plus bas et les banques
développent un marketing très persuasif pour vendre des crédits, d’abord à des ménages aisés

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(clientèle "prime"), puis à des catégories moins favorisées ("subprime"). Chaque agent est
gagnant : l’emprunteur qui espère devenir propriétaire, le banquier qui transfère le risque à
d’autres (titrisation), le courtier qui touche une commission, le créancier qui ne risque rien
tant que le prix de l’immobilier est orienté à la hausse (il récupère son argent en saisissant le
bien immobilier).

Une subprime est un prêt immobilier proposé à un emprunteur au revenu modeste avec un
taux d’intérêt élevé. Aux États-Unis, il s’est agi d’emprunts immobiliers accordés à des
ménages à faibles revenus à taux variables.

Quand les taux d’intérêt ont augmenté, ces ménages se sont retrouvés dans l’impossibilité de
rembourser leurs crédits. Mais surtout ces crédits immobiliers ont été titrisés sous forme de
titres de créances que s’échangeaient les banques sur les marchés financiers. On parle de
créances douteuses, c’est-à-dire dont le risque de non-recouvrement est élevé. En 2006, les
crédits "subprime" ont représenté 24 % des nouveaux crédits immobiliers octroyés aux États-
Unis. Ces prêts ont participé à la création d’une bulle immobilière ; tant que le prix de
l’immobilier augmente, la maison acquise et mise en hypothèque, garantit le bon déroulement
de l’opération. En cas de défaillance, le crédit sera remboursé par la vente de la maison. Mais
le prix de l’immobilier plonge.

Les taux d’intérêt passent de 1 % à 5 %, ce qui provoque l’insolvabilité des clients. Des
millions d’américains perdent leur logement. Les établissements de crédits qui ont effectué
ces prêts sont au bord de la faillite (Lehman Brothers, l’une des plus prestigieuses banques
d’investissement au monde, fait faillite en septembre 2008). De nombreuses banques
étrangères ont racheté les crédits transformés en titres financiers (titrisation) et se retrouvent
dans une situation délicate. Les actions des banques s’effondrent ce qui entraîne une chute
généralisée des cours boursiers. La crise est financière.

On parle de crise de liquidité quand plus aucun agent n’est prêt à prêter aux autres : le
financement est temporairement asséché. Les défauts de paiement dans l’immobilier ont
fragilisé les banques qui ont cessé de se prêter les unes aux autres créant une crise de liquidité.
Les banques ne se prêtant plus mutuellement ont des difficultés à rembourser les titres arrivés
à échéance, la valeur des titres diminuant, la valeur de l’actif des banques diminue et devient

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inférieure à leur passif. La crise des subprimes engendre la crise financière qui se transforme
en crise économique et en crise de la dette en Europe selon le cheminement suivant : les
banques ayant des difficultés de paiement, elles accordent moins facilement de crédits. Les
entreprises n’arrivent plus à financer leurs productions et c’est alors la sphère économique qui
subit les conséquences de cette crise. Le taux de croissance ralentit, le chômage augmente et
les revenus baissent. C’est la crise économique. En 2009, les États-Unis, l’Europe et le Japon
enregistrent même un taux de croissance négatif. La mondialisation des échanges
internationaux propage la crise économique à l’ensemble des pays. La globalisation financière
propage l’instabilité sur toutes les places financières du globe. La crise finit par atteindre les
États qui augmentent les dépenses publiques pour sortir de la crise. Ils aident les banques pour
éviter leur faillite (too big to fail), les ménages défavorisés (aides sociales). La crise entraîne
une baisse des recettes fiscales et les déficits budgétaires prennent de l’ampleur. Les États
doivent emprunter (dette souveraine), alors que certains sont déjà fortement endettés. Les
marchés financiers s’interrogent sur leur capacité à être solvables. Par conséquent les taux
d’intérêt des obligations deviennent élevés pour certains pays qui doivent considérablement
réduire leurs dépenses publiques, ce qui se répercute négativement sur la croissance. C’est la
crise de la dette publique.

Section 6 : LA REGULATION DES MARCHES FINANCIERS

La régulation désigne l'ensemble des mécanismes et des règles qui assurent le bon
fonctionnement et la stabilité des marchés en évitant l'apparition de crises qui risquent de faire
disparaître le marché.

1- Les objectifs d'une régulation financière

 Assurer la confiance dans le système bancaire, notamment à travers l'établissement de


règles prudentielles et le choix d'une politique monétaire.
 Organiser le fonctionnement des marchés, en favorisant la transparence afin de réduire
les asymétries d'information.
2- Les réglementations prudentielles

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Elles sont un ensemble de règles imposées aux acteurs par les pouvoirs publics pour éviter la
faillite des institutions financières. Les objectifs visés par les réglementations prudentielles :
protéger les déposants et stabiliser le système monétaire et financier pour limiter le risque
systémique.

On distingue deux types de réglementation prudentielle :


 La réglementation micro prudentielle porte sur le risque de faillite individuelle des
institutions financières. Elles imposent à chaque institution des règles pour qu'elle ne
fasse pas faillite, ou pour limiter les conséquences négatives de cette faillite.
 La réglementation macro prudentielle porte sur les risques d'une crise systémique. Elle
tient compte du fait que la faillite d'un établissement n'a pas seulement des
conséquences sur cet établissement, mais aussi sur tout le reste de l'économie. En
effet, la faillite de cet établissement peut entraîner la faillite d'autres institutions à qui
le premier devrait de l'argent, mais cela peut aussi avoir pour conséquence une
diminution générale du niveau de confiance et mettre toute l'économie en difficulté.
La réglementation macro prudentielle consiste donc à trouver des règles permettant de
limiter les interdépendances et les conséquences sur d'autres établissements des
difficultés d'une institution financière. Depuis la fin des années 1980, différents
accords appelés « accords de Bâle » ont mis en place des règles prudentielles
internationales de sécurité bancaire et financière.

 Les Accords de Bâle I, 1988. Ils ont mis en place un dispositif prudentiel pour assurer
la solvabilité et la stabilité du système bancaire international en fixant un ratio de
sovabilité, nommé ratio Cooke. C'est un volume minimum de fonds propres (c'est-à-
dire de capital disponible) dont une banque doit disposer par rapport aux crédits
qu'elle accorde, car on estime que ce volume de fonds propres doit lui permettre
d'éviter une situation d'insolvabilité. Il était alors de 8%, ce qui signifie que les
banques devaient toujours détenir en fonds propre au minimum 8% des crédits qu'elles
accordent afin d'éviter le risque de crédit.
 Les Accords de Bâle II, 2006. Ils modifient la définition des fonds propres et le calcul
du ratio afin de tenir compte à la fois des risques de crédit (risque que les débiteurs
fassent défaut), des risques de marché (risque que les actifs détenus par les banques
perdent de leur valeur) et des risques opérationnels (risques de pertes liés à un mauvais

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fonctionnement de l'établissement bancaire). De manière générale, elles tendent à
diminuer les exigences qui pèsent sur les établissements bancaires.
 Les Accords de Bâle III, 2010 : après la crise financière de 2007 qui a révélé que les
règles prudentielles ne suffisaient pas à écarter le risque de crise systémique, les
accords de Bâle III redéfinissent ces règles. La nature des fonds propres est redéfinie
afin de mieux tenir compte des risques que comportent les actifs qui peuvent y être
inclus. Au ratio de solvabilité (qui vise à éviter une situation d'insolvabilité pour la
banque) s'ajoute un ratio de liquidité, qui impose aux banques de toujours disposer
d'un volume minimal de liquidités en fonction du volume et de la nature des titres
qu'elles détiennent. La prise en compte de la liquidité en plus de la solvabilité vient du
lien entre les deux. La crise de 2007 a montré que si une banque a un problème
d'illiquidité (elle manque de liquidités à court terme tout en étant solvable à moyen
terme), cela peut faire perdre confiance aux investisseurs. Ceux-ci peuvent refuser de
prêter de l'argent à cette banque, ou faire augmenter les taux d'intérêt. La crise de
liquidité se transforme alors en crise de solvabilité, car la banque peut devenir
insolvable (c'est-à-dire que ses créances ne suffisent plus à rembourser ses dettes) si
elle est obligée d'emprunter de l'argent à des taux très élevés.

Section 7 : CRISES JUMELLES DANS LES PAYS RECEMMENT


OUVERTS A LA GLOBALISATION FINANCIERE

Si les crises de change frappent maintenant plus rarement les pays développés, elles sont
devenues plus fréquentes pour les pays nouvellement financiarisés. En se combinant aux
crises bancaires renaissantes, elles ont engendré un type de crise financière nouvelle pour la
période d’après-guerre : les crises jumelles. Ces crises jumelles se manifestent par la
combinaison d’une spéculation intense contre la monnaie nationale et une vague de
défaillances bancaires. Elles associent une méfiance à l’égard de la stabilité du taux de change
(et donc du régime de change), et une méfiance à l’égard de la liquidité ou de la solvabilité
des intermédiaires bancaires, qui rétroagissent l’une sur l’autre en se renforçant mutuellement.
Les pays asiatiques n’ont pas inventé la crise jumelle, mais celle-ci a été la forme dominante
de crise financière pendant l’épisode 1977-1998 : Indonésie, Malaisie, Philippines, Thaïlande,
Corée, ont eu à affronter simultanément une crise de change et une crise bancaire. A priori, en
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avenir certain, il est possible de développer trois hypothèses alternatives simples concernant
cette simultanéité :
 selon une première conception, la crise de change et la crise bancaire ont les mêmes
causes (Reinhart et Végh, 1996). Une des causes communes étant souvent, pour les
pays émergents, un programme de stabilisation… trop réussi qui provoque une
euphorie excessive. In fine, ce sont les tensions sur le déficit courant et
l’accroissement de l’endettement extérieur, qui résultent du programme de
stabilisation (de son succès, dans un premier temps), qui provoquent le déclenchement
d’une attaque spéculative contre la monnaie dont la crise bancaire est la conséquence
indirecte, les capitaux fuyant et le marché des changes s’effondrant ;
 dans un deuxième modèle, la crise bancaire entraîne la crise de change (Velasco,
1987) par l’intermédiaire de l’émission de monnaie domestique excessive provoquée
par le secours exceptionnel en liquidité que la Banque centrale apporte au système
bancaire pour le stabiliser ;
 dans un troisième modèle, c’est au contraire la crise de change qui entraîne la crise
bancaire (Stoker, 1994) ; les banques ne résistent pas aux pertes de change dues à la
dévaluation, qui s’ajoutent aux pressions sur leur solvabilité induites par la perte de
réserves non stérilisée (Réserves qui ne sont pas annulées par les effets des
interventions des banques centrales sur l’offre de monnaie par la réalisation des
opérations opposées sur les marchés d’actifs nationaux et étrangers) de la Banque
centrale amenant une contraction du crédit bancaire.

CONCLUSION
Depuis une trentaine d’années, les crises financières ont tendance à se multiplier. Ces crises
s’expliquent notamment par un mécanisme étroitement lié à la stratégie des banques : le cycle
du crédit. Par leurs comportements, les banques contribuent parfois à générer ou alimenter
encore davantage les situations de récession. En 2008, la crise des « subprimes » aux États-
Unis est l’un des exemples les plus révélateurs. Depuis pourtant, les pouvoirs publics, les
chefs d’États, ont décidé de mettre en place de nouvelles règles destinées à mieux encadrer les
activités bancaires et empêcher ce genre de situation de se renouveler.

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CHAPITRE 6 : L’INTEGRATION ECONOMIQUE ET
MONETAIRE

Section 1: APPROCHE THÉORIQUE DE L’INTÉGRATION


ÉCONOMIQUE

L’intégration a plusieurs dimensions, commerciale, financière, monétaire, économique par


convergence des économies, sectorielle par coopération et politique. Chacune de ces
dimensions peut être évaluée par des indicateurs et être analysée par différents corpus
théoriques. C’est un processus dont les formes sont diverses. Elle se caractérise par une
intensification des mouvements d’échanges avec la suppression des obstacles internes (zone
de libre-échange), avec un tarif extérieur commun (union douanière) et une mobilité des
facteurs (marché commun), par une coordination des politiques économiques ou sociales
(union économique), par des projets de coopération mis en place par des acteurs (coopération
régionale ou fonctionnelle), par des interdépendances entre les économies conduisant à des
convergences économiques (intégration des marchés et coopération institutionnelle), par la
mise en place de règles ou de transfert de souveraineté munies de structures institutionnelles.

Les États membres des organisations économiques internationales ne sont pas nécessairement
originaires d’une même région du monde. Ce type d’organisation peut en effet être fondé
sur une solidarité de ses membres autre que géographique ; cette solidarité peut ainsi être
de natures économique (par exemple l’OCDE), ethnique (par exemple la Ligue Arabe),
politique (par exemple l’Organisation des États américains OEA). Il existe donc des
organisations régionales transcontinentales (par exemple l’OTAN).

Les organisations régionales d’intégration (par exemple l’Union africaine UA) sont
globalement plus récentes que les organisations régionales de coopération (par exemple
l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe OSCE). Sur le plan juridique, ce
sont également des personnes morales de droit public qui appartiennent à la famille
des sujets dérivés du droit international.

La qualification d’organisation sous-régionale est parfois utilisée pour marquer l’existence


d’une solidarité plus restreinte à l’intérieur d’une zone géographique donnée. Ainsi, la
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Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ou la Communauté
de l’Afrique de l’Est (CAE) peuvent aussi être qualifiées d’organisations sous-régionales,
parce qu’elles ne rassemblent pas tous les États du continent africain.

Plusieurs auteurs et théories économiques et de sciences politiques ont largement structuré le


débat relatif à l’intégration économique et monétaire.

1. La théorie libérale des unions douanières de Jacob Viner (1950)

Cette théorie s’attache aux effets sur le commerce de la suppression des frontières douanières.
L’auteur estime que la pression du marché, c’est-à-dire une libération accrue des échanges,
permet à l’intégration de se poursuivre. Celle-ci ne nécessite que l’organisation d’une
coopération intergouvernementale pour se réaliser. Cette conception libérale est développée
par Bela Belassa en 1961, lequel retient un scénario par étapes de l’unification économique,
à l’établissement des tarifs préférentiels succèdent la zone de libre échange, puis l’union
douanière, le marché commun, l’union économique et enfin l’intégration économique
complète.

2. La théorie de l’intégration monétaire

Développée à compter des années 1960 par R. Mundell (1961), R. McKinnon (1963) puis P.
Kenen (1969), elle envisage l’intégration monétaire comme une possibilité. L’intérêt pour un
pays donné de participer à une telle union repose sur une analyse coûts/avantages dont le bilan
découle dans une large mesure du degré de convergence réelle de ce pays avec les autres
membres de l’union monétaire. Baptisée théorie des «zones monétaires optimales», elle
envisage l’intégration monétaire comme une voie possible à la réalisation de
l’unification économique

L’optimalité est définie à travers un certain nombre de critères: le niveau d’intégration


commerciale, la mobilité géographique des facteurs de production, la prédominance de chocs
symétriques ou encore l’existence de mécanismes d’ajustement aux chocs asymétriques.

La question posée alors est de déterminer si l’intégration monétaire est l’instrument ou le


point final de l’intégration économique. Pour les «économistes», l’union monétaire couronne
les efforts en termes de convergence des structures économiques; à l’opposé, les
«monétaristes» estiment que l’unification monétaire exerce un rôle moteur sur la convergence
structurelle, réelle.

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3. Le triangle d’incompatibilité de Robert Mundell

Le théorème du «triangle d’incompatibilité» (politique monétaire autonome, changes fixes et


liberté des mouvements de capitaux) a été formalisé par Robert Mundell dans les années 1960
et appliqué à l’intégration européenne par Tommaso Padoa-Schioppa au début de la décennie
1980. Selon ce théorème, lorsque les capitaux sont parfaitement mobiles au niveau
international, il est difficile (impossible) pour un pays de mener une politique monétaire
indépendante tout en recherchant une stabilité des changes avec ses principaux partenaires
commerciaux.

Section 2 : APPROCHE DÉFINITIONNELLE ET LES ÉTAPES DE


L’INTÉGRATION ÉCONOMIQUE
1. Approche définitionnelle
L’intégration économique qu’elle soit régionale ou internationale est le processus
d'unification des politiques économiques entre différents États et qui passe par l'abolition
partielle ou totale des restrictions tarifaires (taxes, droits de douane) et non tarifaires sur le
commerce.

Certains pays se sont regroupés en zones d'intégration économiques régionales, zones


économiques ou communautés économiques afin de faciliter leurs échanges et de favoriser
leur développement ou leur croissance. Ces communautés se sont bâties sur des critères
d'intérêt économique et commercial.

2. Les étapes de l’intégration économique

À mesure qu’augmentent les échanges et les investissements internationaux, on assiste à


une organisation économique ou encore une intégration économique de plus en plus
poussée de certains groupes de pays. L’exemple le plus manifeste est celui de l’Union
européenne. Ce qui était autrefois une série de pays autarciques est devenu un ensemble
économique complètement intégré. Même si les relations entre pays suivent rarement un
cheminement aussi précis, l’organisation économique formelle se fait par étapes, la
première étant la réduction et la suppression des obstacles au commerce, et la dernière, la

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création d’une union économique. L’intégration économique résulte d’une construction.
Elle ne peut pas se faire du jour au lendemain.

A la suite de Bela Balassa (The theory of economic integration, 1961), on distingue


généralement cinq grandes étapes dans le processus d’intégration économique ou
d'unification économique. Ces cinq étapes se mettent en place après l'établissement des tarifs
préférentiels. Ce sont la zone de libre échange, l’union douanière, le marché commun, l’union
économique et enfin l’intégration économique complète.

NB : les tarifs préférentiels constituent une forme de réduction des droits de douane sur les
marchandises à l’entrée sur le marché d’un pays ou d’une zone déjà constituée. Les tarifs
préférentiels s'appliquent pour les pays ayant des relations privilégiées avec une union déjà
constituée suite à un accord d'union douanière ou issue du système de préférences
généralisées (SPG). Dans c’est condition, les marchandises (ou pays) qui y répondent
peuvent bénéficier d'une préférence tarifaire (réduction ou suspension des droits de
douane).

a. Les accords de libre-échange

La première étape de l’intégration économique est l’accord de libre-échange (ALE) ou


l’accord commercial préférentiel (ACP). L’ALE suppose l’élimination des tarifs et des quotas
d’importation entre les pays signataires. Il peut se limiter à quelques secteurs ou viser la
totalité des échanges. Il peut aussi prévoir des mécanismes officiels de résolution des
différends. L’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en est un exemple.

À part un calendrier commun de libéralisation du commerce, l’ALE impose peu de


restrictions aux États parties. L’ALE ne comporte aucune autre forme d’harmonisation des
règlements, normes ou politiques économiques, pas plus que le libre mouvement des capitaux
et de la main-d’œuvre, à moins que les pays signataires ne s’entendent pour les y inclure. Ils
conservent également leurs propres politiques commerciales à l’égard de tous les pays non
parties à l’accord.

Toutefois, pour qu’un ALE fonctionne, les membres doivent se fixer des règles d’origine
concernant les biens provenant de pays tiers. Les biens produits à l’intérieur de la zone (et
visés par l’ALE) peuvent passer les frontières en franchise, mais ils doivent satisfaire aux

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règles d’origine, c’est-à-dire que preuve doit être faite qu’ils ont réellement été produits à
l’intérieur du pays exportateur. Faute de règles d’origine, les pays tiers qui cherchent un
accès commercial dans la zone de l’ALE choisiront le pays où la barrière tarifaire sera la plus
faible pour pénétrer dans l’ensemble de la région.

b. L’union douanière

L’union douanière (UD) pousse plus loin la notion de libre-échange puisque, outre la
suppression des obstacles internes au commerce, elle exige des pays parties qu’ils
harmonisent leurs politiques commerciales extérieures. Cela suppose l’imposition d’un tarif
extérieur et de quotas d’importation communs sur les produits provenant de pays tiers, de
même qu’une possibilité de s’entendre sur les recours commerciaux, comme les mesures
antidumping et les droits compensateurs. L’UD peut également interdire l’utilisation des
recours commerciaux à l’intérieur de la zone. En général, les membres d’une UD mènent
leurs négociations commerciales multilatérales en tant que bloc unique. Les pays qui font
partie d’une UD établie n’ont plus besoin de règles d’origine, puisque tout produit entrant
dans la zone est assujetti aux mêmes tarifs douaniers ou quotas d’importation, quel que soit
son point d’entrée.

L’élimination des règles d’origine est le principal avantage de l’UD par rapport à la zone de
libre-échange. L’application des règles d’origine exige que tous les États membres d’une
ALE maintiennent une lourde documentation et qu’ils fassent respecter les règles aux
frontières. Ce processus coûte cher et peut soulever des différends dans l’interprétation des
règles et divers retards. L’UD entraîne donc d’importantes économies et des gains
d’efficience sur le plan administratif.

Cependant, pour accéder à ces avantages, les pays doivent renoncer à une certaine liberté dans
le domaine des politiques, à savoir celle de fixer indépendamment leur politique
commerciale. Corrélativement, à cause de l’importance croissante des mesures commerciales
et économiques en tant qu’outils de politique étrangère, les UD limitent aussi quelque peu
l’indépendance des pays en matière de politique étrangère.

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c. Le marché commun

Le marché commun (MC) représente un pas important dans l’intégration économique. Au-
delà des dispositions habituelles de l’UD, il supprime les obstacles à la circulation des
personnes, des capitaux et d’autres ressources à l’intérieur de la zone, tout en éliminant les
barrières non tarifaires au commerce, par exemple le traitement réglementaire des normes sur
les produits.

En règle générale, l’établissement d’un MC exige une grande harmonisation des politiques
dans plusieurs domaines. La libre circulation de la main-d’œuvre, par exemple, exige des
ententes sur les compétences et les attestations des travailleurs. Habituellement, le MC est
également associé intentionnellement ou par voie de conséquence à une convergence poussée
des politiques budgétaires et monétaires, en raison de l’interdépendance économique
croissante au sein de la région et de l’effet que les politiques d’un pays membre peuvent avoir
sur celles des autres. Il en résulte nécessairement des restrictions plus sérieuses à la capacité
des pays de mener leurs politiques économiques de façon indépendante.

Le principal avantage de l’établissement d’un MC réside dans les éventuels gains d’efficacité
de l’économie. Lorsque la mobilité n’est pas entravée, la main-d’œuvre et les capitaux
peuvent répondre plus facilement aux signaux économiques à l’intérieur du MC, ce qui
entraîne une répartition plus efficace des ressources.

d. L’union économique

L’union économique est la forme la plus poussée d’intégration économique. Elle suppose un
MC auquel s’ajoute l’harmonisation d’un certain nombre de domaines stratégiques clés. Plus
particulièrement, l’union économique comporte une coordination officielle des politiques
monétaires et budgétaires ainsi que des politiques relatives au marché du travail, au
développement régional, aux transports et à l’industrie. Puisque tous les pays doivent
essentiellement partager le même espace économique, il serait illogique pour eux d’appliquer
des politiques divergentes dans ces domaines.

Par ailleurs, l’union économique s’accompagne souvent d’une monnaie commune et d’une
politique monétaire unifiée. La suppression des incertitudes liées aux taux des changes
améliore le fonctionnement de l’union en permettant aux échanges commerciaux de se faire

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d’une façon efficace sur le plan économique sans être inutilement touchés par les fluctuations
des devises. Cela est vrai aussi du choix d’un emplacement pour les entreprises.

Cette intégration exige des institutions supranationales qui adoptent des lois sur le commerce
pour assurer une application uniforme des règles à l’intérieur de l’union. Les pays membres
renoncent à leur capacité législative dans ce domaine, mais continuent de voir au respect de
ces lois à l’échelon national.

e. L’union économique et monétaire ou intégration économique globale

Elle constitue la phase ultime de l’intégration puisqu’elle crée une monnaie unique gérée par
une banque centrale commune (la BCE, par exemple). Les États abandonnent ainsi un des
principaux éléments de leur souveraineté : le droit de battre monnaie. En réalité, l’intégration
économique et monétaire est une union économique complétée d’une unification des
politiques économiques, financières, sociales et monétaires.

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Formes de l’intégration Caractéristiques Exemples
- Absences d’obstacles - AELE (1960) : GB,
tarifaires (DD) et non tarifaires Suisse, pays nordiques
à l’intérieur de la zone. - ALENA (1992) : USA,
Zone de libre échange - Protection nationale en Canada, Mexique
dehors de la zone -APEC (1995) : NPI
d’Asie, Japon
- AFTA (2002) : les pays
de l’ASEAN
- Zone de libre échange - CEE (1957-1968) : Italie,
- Tarif extérieur commun Allemagne, France, Benelux
Union douanière
vis-à-vis du reste du - MERCOSUR (1992) Brésil,
monde Argentine, Uruguay…

- Union douanière
- Libre circulation des -CEDEAO
Marché commun
hommes et des capitaux -Marché unique européen
- Harmonisation fiscale et (1986-1992)
réglementaire

- Marché unique
Union économique -Politiques communes -UE (1992-1999)

- Union économique
Intégration économique -Monnaie unique -UE (1992-1999)
globale

Tableau récapitulatif des étapes de l’intégration économique

Section 3 : L’INTÉGRATION ÉCONOMIQUE EN AFRIQUE

1- Cas de la CEDEAO

1-1-États des lieux de la CEDEAO

La CEDEAO est une organisation internationale régionale. Son but principal est de
promouvoir la coopération et l'intégration avec pour objectif de créer une union économique
et monétaire entre les pays de l’Afrique de l'Ouest. Elle fut créée le 28 mai 1975 et compte
aujourd'hui 15 États membres : Bénin, Burkina Faso, Cap Vert, Côte d’Ivoire, Gambie,

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Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone et
Togo.

1- 2- Les institutions spécialisées de la CEDEAO


a. Les institutions financières
Pour permettre le déroulement en douceur des transactions financières et des devises, la
CEDEAO a développé une banque pour l’investissement et le développement (BIDC :
Banque pour l’Investissement et le Développement de le CEDEAO) siège à Lomé. Il s’agit
d’un groupe bancaire comprenant une société holding et deux filiales spécialisées dont le
Fonds Régional de Développement de la CEDEAO (FRDC) et la Banque Régionale
d'Investissement de la CEDEAO (BIDC). Nous avons également l'Agence Monétaire de
l'Afrique de l'Ouest (AMAO) et l’Institut Monétaire de l'Afrique de l'Ouest (IMAO).
L’AMAO est née suite à la transformation de la chambre de compensation de l’Afrique de
l’ouest qui avait été crée en 1975 en tant qu’institution pour améliorer le commerce sous
régionale. Le mandat de l’AMAO est d’assurer le suivi, la coordination et la mise en œuvre
du programme de coopération monétaire de la CEDEAO, d’encourager et de promouvoir
l’application du taux de change et d’assurer la mise en place d’une zone monétaire unique en
Afrique de l’ouest.
En ce qui concerne l’IMAO les États membres sont : la Gambie, le Ghana, la Guinée, le
Nigeria, la Siera Leone et le Liberia. Il a été mis en place en 2001 suite à la déclaration
d’Accra sur la création d’une deuxième zone monétaire en vue de faciliter la création d’une
banque centrale commune et l’introduction d’une monnaie commune aux États participants.

b. Les institutions politiques

· La Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement :

Elle est l'organe « suprême » de la communauté. Selon OMONIYI ADEWOYE, cette


qualification « d'organe suprême » rend compte de la philosophie politique des États membres
de la CEDEAO caractérisée par un manque de « constitutionnalisme ». De ce fait, la
Conférence des Chefs d'État et de gouvernement constitue l'institution souveraine dans
laquelle se concentrent tous les pouvoirs essentiels et importants de la communauté. Elle a
pour rôle de déterminer la politique générale et les principales orientations de la
Communauté, de donner des directives, d'harmoniser et de coordonner les politiques
économique, scientifique, technique, culturelle et sociale des États membres, d'assurer le

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contrôle du fonctionnement des Institutions de la Communauté, ainsi que le suivi de la
réalisation des objectifs de celles-ci ... ». Elle se réunit au moins une (1) fois par an et sa
présidence est assurée chaque année par un État membre élu par la Conférence.

· Le Conseil des Ministres :

Il occupe le deuxième échelon dans la pyramide institutionnelle de la Communauté. Il est


composé de délégués gouvernementaux notamment des Ministres des Affaires étrangères de
la CEDEAO et d'un Ministre désigné par chaque Etat. L'analyse de l'alinéa 3 de l'article 10
relatif aux fonctions du Conseil des Ministres révèle qu'il est chargé de veiller au
fonctionnement et au développement de la Communauté. A cet effet, il donne des directives
aux autres institutions communautaires relevant de son autorité et oriente ainsi les activités du
Secrétariat ainsi que des organismes techniques et spécialisés. En outre, le Conseil des
Ministres constitue à la fois un organe de décision et d'exécution. Ainsi, le Conseil des
Ministres peut prendre à l'unanimité ou à la majorité des deux tiers de ses membres des
« règlements ».

· Le Secrétariat Exécutif remplacé en 2006 par la commission de la CEDEAO

Il figure à la fois dans le Traité de 1975 et celui de 1993. Principal organe exécutif de
l'organisation, le Secrétariat Exécutif est dirigé par un secrétaire exécutif assisté de secrétaires
exécutifs adjoints. Ainsi, le Secrétaire exécutif est le premier responsable administratif de la
communauté. Il est chargé à cet effet, de l'administration courante de la communauté et de
toutes ses institutions. Nommé par la Conférence des Chefs d'États et de gouvernement pour
un mandat de quatre (4) ans, renouvelable une fois, le secrétaire exécutif ne peut être démis de
ses fonctions que par la Conférence des Chefs d'États sur recommandation du Conseil des
Ministres.

Cependant, il faudrait relever une dernière évolution sur la place qu'occupe cet organe dans la
pyramide institutionnelle de l'organisation régionale. En effet, lors du Sommet d'Abuja de
2006, les Chefs d'États et de Gouvernement ont approuvé une modification des institutions de
l'organisation. Ainsi, le Secrétariat Exécutif est remplacé par une Commission.

· Le Parlement de la Communauté

De prime abord, il faudrait dire que la création de cette institution parlementaire est
révélatrice de la volonté d'incarner l'intégration et de l'ancrer dans l'existence quotidienne des
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États et des citoyens. Car l'existence des parlements suppose l'effacement des frontières par
l'unité de la représentation des peuples. Elle peut de même attester le désir d'intégration au-
delà de la simple coopération. Mais s'il est vrai que la création du parlement peut traduire une
logique supranationale, en pratique, cette assemblée n'a aucun pouvoir de décision. Il ne peut
que faire des recommandations en matière de Droits de l'Homme et émettre des avis sur
certains sujets. En outre, comme tout autre parlement, celui de la CEDEAO est chargé de
voter les lois de la Communauté.

Ayant son siège à Abuja au Nigéria, il est composé des députés des différents États membres
et plus précisément de cent vingt (120) membres désignés au sein des parlements respectifs
des États membres, à raison de cinq (5) sièges au minimum par État, les quarante-cinq (45)
autres étant répartis entre les États en fonction de leur population. Le bureau du parlement est
composé de cinq (5) membres au minimum et de dix (10) membres au maximum dont un
président et quatre vices présidents. Ses plénières sont dirigées selon les dispositions du traité,
du protocole, des décisions et règlements de la communauté notamment le Protocole du 6
Aout 1994 relatif au Parlement de la CEDEAO.

c. L'institution judiciaire de la communauté

La Cour de Justice de la Communauté représente l'organe judiciaire de la communauté. Elle a


pour rôle d'assurer le respect du droit et du principe d'équité dans l'application et
l'interprétation du traité constitutif de la communauté ainsi que les protocoles et conventions
annexes. A cet effet, elle est compétente pour connaitre de tout différend pouvant lui être
soumis par les États membres ou les institutions de la communauté conformément à
l'article...du traité. Son Statut, sa Composition et ses Compétences sont définis par le
Protocole AP du 1er Juillet 1991, relatif à la Cour de Justice de la CEDEAO. En dehors de ces
instances de « décision » ou de « conception » consacrées aussi bien par le Traité de 1975 que
par sa version révisée de 1993, nous pouvons remarqué d'autres institutions à caractère social
et technique telle que l’OOAS (Organisation Ouest Africaine de la Santé) et le Conseil
Économique et Social (à créer).

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2- Cas de l’UEMOA

L'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), crée à Dakar (Sénégal) est une
organisation qui regroupe 8 pays (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mail,
Niger, Sénégal et Togo). Elle a pour mission de réaliser l'intégration économique des États
membres, à travers le renforcement de la compétitivité des activités économiques dans le
cadre d'un « marché ouvert et concurrentiel et d'un environnement juridique rationalisé et
harmonisé ».

À l’UEMOA est rattaché la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest ou


BCEAO, établissement public international regroupant les 8 pays, sise à Dakar. Cette Banque
été créé en 1962 et se concerte avec les pays membres dans les tâches suivantes :
• Émission monétaire : frappe du franc CFA BCEAO (code monétaire : XOF), qui a cours
légal dans les pays membres de l'UEMOA ;
• Application de la politique monétaire commune ;
• Fixation des taux d'intérêt
• Gestion et contrôle des réserves de change, ainsi que de la dette extérieure ;
• législation bancaire et financières des États membres de l'Union ;
• Assistance aux États membres de l'Union dans leurs relations avec les institutions
financières et monétaires internationales.
Un accord monétaire avec la France a fait que le franc CFA BCEAO a été convertible avec le
franc français jusqu'en fin 1999, par un taux fixe (révisable) et garanti par le dépôt par la
BCEAO d'un fond de réserve à la Banque de France, constitué par les apports des banques
centrales nationales (BCN) de chacun des pays. Fin 1999, lorsque l'euro a remplacé le franc
français, l'accord monétaire avec la France a été maintenu (en concertation avec la BCE),
mais redéfini par un taux fixe avec l'euro garanti par la Banque de France, en échange du
maintien du fond de réserve.

La Côte d’Ivoire, détient plus de 40% de la masse monétaire en circulation dans la zone
monétaire de ces pays. De ce fait, il est de tradition que le poste de Gouverneur revienne
toujours à la Côte d’Ivoire.

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3- Cas de la CEMAC

La CEMAC est une organisation internationale créée en juin 1999. Elle a pour mission, entre
autres, de créer un véritable marché commun africain. Elle comprend le Cameroun, le
Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée Équatoriale, le Tchad ainsi que São Tomé
et Príncipe.

Section 4 : L’INTÉGRATION ÉCONOMIQUE EUROPEENNE

1-La naissance de l’UE


Les premières étapes de la construction européenne allaient surtout stimuler le commerce
entre pays européens qui ne demandait qu’à reprendre après la reconstruction favorisée par les
fonds américains prêtés dans le cadre du plan MARSHALL. Le 9 mai 1950, Robert
SCHUMAN (1886-1963), ministre français des Affaires étrangères, propose de créer une
communauté des ressources de charbon et d'acier, d’abord entre la France et l'Allemagne, puis
avec d’autres pays européens. Aussitôt acceptée, cette proposition allait se concrétiser par la
signature le 18 avril 1951, par l'Allemagne, la Belgique, la France, l'Italie, le Luxembourg et
les Pays-Bas, du Traité de Paris instituant la Communauté du charbon et de l'acier
(CECA).

Le 25 mars 1957, six pays (Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg et Pays-Bas)
signent le Traité de Rome qui crée la Communauté économique européenne (CEE ou
Marché commun). Mais ce n’est qu’en 1968 que l'Union douanière est réalisée entre les six
pays.

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2- Quelques étapes de la construction européenne

Il convient aussi de mentionner que l’UE s’est en partie « peuplée » grâce à la défection des
membres d’un autre bloc commercial concurrent, L’Association Européenne de Libre-
échange (AELE) créée en 1960 à l’instigation du Royaume-Uni et bientôt désertée par lui en
1973, date à laquelle ce pays rejoignit l’UE (qui n’était encore que la CEE), entraînant avec
lui le Danemark. En 1986, le Portugal déserta aussi l’AELE pour rejoindre la CEE. Puis, en
1995 ce furent l’Autriche, la Suède et la Finlande. Aujourd’hui il ne reste plus que 4 pays
membres de l’AELE : l’Islande (qui a adhéré en 1970), le Liechtenstein (1991) et la Norvège
(membre fondateur de 1960). Cependant les pays de l’AELE, à l’exception de la Suisse, ont
formé avec l’UE un Espace Économique Européen en 1994, accord de libre-échange qui
recouvre une bonne part des accords entre pays membres de l’UE (mais de nombreuses
différences persistent).

Au sein de l’UE à 27, 15 pays font partie de la zone euro au 1er janvier 2008 (Voir carte). De
plus, Le Monténégro et le Kosovo utilisent l’Euro de facto.

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3- Les politiques économiques, monétaires et financières de l’UE

3-1- La politique économique de l’UE

La politique économique de l'Union, se fixe comme objectifs de coordonner la politique


économique des États membres sur le marché intérieur avec la définition d'objectifs
communs. Cette politique engage l'ensemble des États membres dans une « union
économique et monétaire » et entérine la création d'une monnaie dite « unique », l'euro (€).
Le pacte de stabilité et de croissance (PSC) détermine quant à lui les engagements budgétaires
pris par les États de l'Union ayant introduit la monnaie unique.

La politique économique de l'Union définit également une stratégie économique. Cette


stratégie économique s'inscrit dans le cadre défini par les traités européens, dont les principes
sont énoncés dans toute une série d'articles. Les principes fondamentaux sont les suivants :

 libre circulation des marchandises dans le marché intérieur de l'UE : pas de contrôle des
marchandises aux frontières entre États membres et pas de droits de douane.
 liberté des mouvements de capitaux : toutes les restrictions aux mouvements de capitaux
entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites.
 libre concurrence : les ententes entre entreprises dominantes sur un marché (ententes sur
les prix ou les quantités de production) sont interdites, les abus de position dominante sont
interdits, et les interventions de l'État sont interdites si elles sont susceptibles de fausser la
concurrence, par exemple en autorisant l'accès aux entreprises publiques à du crédit à taux
d'intérêt moindre que celui supporté par les entreprises privés.
 la privatisation des entreprises publiques n'est pas obligatoire, mais les États doivent
veiller à ne pas fausser la concurrence, et ne doivent donc pas donner aux entreprises
publiques des avantages concurrentiels. La Commission européenne se limite en général à
promouvoir la libéralisation des services. Par exemple, dans le domaine des transports,
elle réclame qu'il soit rendu possible la mise en concurrence de la SNCF avec des sociétés
privées de transport.

Le Conseil européen de Lisbonne (2000) a défini l'objectif commun qui vise à faire de l'Union
européenne entre 2000 et 2010, « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus
dynamique du monde d'ici à 2010, capable d'une croissance économique durable
accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande
cohésion sociale ».

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À mi-parcours, en 2004, l'analyse de la stratégie de Lisbonne a montré que celle-ci avait été
jusqu'alors un échec parce que les États membres n'avaient pas tenu leurs engagements pris
selon la méthode ouverte de coordination, non contraignante. La stratégie a été recentrée en
2005 sur la croissance économique et l'augmentation de l'emploi.

La stratégie de Lisbonne est arrivée à terme fin 2010 dans un contexte de crise financière
mondiale. L'Union européenne a alors fixé un nouveau projet – Europe 2020 - qui définit la
stratégie de croissance pour l'Union avec pour mots d'ordre, « une économie intelligente,
durable et inclusive ». Cette stratégie fixe les objectifs nationaux dans les domaines de
l'emploi, la recherche et l'innovation, le changement climatique et l'énergie, l'éducation ainsi
que la lutte contre la pauvreté.

3-2- La politique monétaire et financière de l’UE

L'euro est aujourd'hui la deuxième monnaie de réserve dans le monde, la deuxième monnaie
au monde pour les transactions financières, derrière le dollar américain, et depuis octobre
2006, la première monnaie au monde pour ce qui est de la quantité de billets en circulation.

Actuellement, l'euro est ainsi la monnaie effective de 19 États membres sur 27, définissant
la zone euro, ainsi que, de facto, de certains États et territoires ; à savoir, le Kosovo et
le Monténégro qui n'ont pas d'accord formel et Andorre, Monaco, Saint-Marin et
le Vatican sur la base d'accords monétaires antérieurs à l'euro. Tout pays appartenant à
l'Union européenne doit adhérer à l'euro. Seul le Danemark a obtenu une dérogation lors de la
rédaction du traité de Maastricht, toutefois, ce pays fait partie de l'Union économique et
monétaire. La Suède a, quant à elle, retardé l'échéance à la suite d'un référendum défavorable.
Les nouveaux États membres doivent pour leur part satisfaire aux critères de convergence
économique avant de pouvoir remplacer leur monnaie nationale par l'euro.

Les grandes orientations de la politique monétaire sont définies par la Banque centrale
européenne, située à Francfort-sur-le-Main, qui est chargée de gérer son émission et de
garantir sa valeur vis-à-vis des autres monnaies, notamment le dollar américain. Mis en
circulation depuis le 1er janvier 2002 sous sa forme fiduciaire pour les particuliers, mais en
usage dès le 1er janvier 1999 pour les entreprises, il succède à l'European Currency
Unit (ECU), soit « l'unité de compte européenne », mise en service en 1979.

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a. Les règles budgétaires imposées aux États membres de l’Union européenne

Des règles strictes ont été imposées aux États membres de l’Union européenne par le Traité de
Maastricht (en 1992) et le Pacte de stabilité et de croissance (en 1997) pour éviter l’apparition
de déficits publics excessifs. Parmi elles :
 un déficit public maintenu en dessous du seuil de 3 % du PIB ;
 le montant de la dette publique limité à 60 % du PIB.

Après la crise financière de 2008, de nombreux États membres de l’Union européenne ont
dépassé ces seuils et, dans certains cas, les déficits publics ont atteint des proportions
inquiétantes. Des plans d’austérité ont été instaurés dans plusieurs pays (en Grèce, en Irlande,
au Portugal, en Espagne et à Chypre). Un Fonds européen de stabilité financière (FESF) a été
mis en place temporairement en mai 2010 notamment afin d’éviter à la Grèce un défaut de
paiement et de préserver autant que possible la stabilité financière de la zone euro.

Pour renforcer la discipline budgétaire au sein de l’Union européenne, un nouveau pacte


budgétaire européen (le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de
l’Union économique et monétaire) a été signé le 2 mars 2012 par 25 pays de l’Union
européenne (le Royaume-Uni et la République Tchèque ayant refusé de le signer). Ce texte
prévoit des contraintes plus fortes :
 la « règle d’or budgétaire » impose un déficit structurel (c'est-à-dire un déficit corrigé
des effets du cycle économique, notamment sur les recettes, et hors dépenses
inhabituelles dues aux aléas de la conjoncture économique) qui ne doit pas dépasser
0,5 % du PIB ;
 des sanctions financières systématiques sont prévues en cas de non-respect des règles
du pacte de stabilité.

b. La création du Mécanisme Européen de Stabilité Financière (MESF)

Le Mécanisme Européen de Stabilité Financière (MESF) a commencé à fonctionner fin 2012


en remplacement du Fonds européen de stabilité financière (FESF). Le MESF peut, dans le
cadre d’un programme européen d’assistance financière, accorder des prêts aux États
européens ayant de graves difficultés de financement afin d’éviter des défaillances.

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En contrepartie, les États bénéficiaires doivent s’engager à prendre des mesures précises qui
conditionnent l’octroi des prêts. Le MESF dispose de fonds propres apportés par les États
membres de la zone euro. Les États ne faisant pas partie de la zone euro peuvent eux aussi
participer aux opérations de soutien à la stabilité. La France est le 2e contributeur du MESF
derrière l’Allemagne avec une participation qui s’élève à 20,4% de son capital (27,1% pour
l’Allemagne). Le MESF peut également lever des fonds en émettant des obligations sur les
marchés financiers.

4- L’UE des 28 à l’UE des 27

Avec un afflux de migrants et réfugiés politiques et économiques en provenance d'Afrique et


d'Asie qui augmente de manière très significative depuis 2014, l'Union européenne traverse
une nouvelle crise mettant à mal son unité politique et sociale. Plus d'un million de personnes
entrent de manière non officielle dans l'Espace Schengen en 2015 et la politique de répartition
de ces personnes parmi les pays membres, décidée au niveau communautaire, est rejetée par
une partie de l'opinion publique et des gouvernements. L'Allemagne choisit d'en accueillir une
grande partie mais en raison des flux physiques de personnes se déplaçant des pays d'Europe
du Sud vers ceux du nord et des problèmes engendrés, certaines des frontières intérieures et
extérieures de l'Espace sont fermées.

Le 23 juin 2016, une majorité de la population du Royaume-Uni décide par référendum de


sortir de l'Union européenne, un nouveau gouvernement est formé en ce sens et la majorité
des gouvernements européens pressent celui-ci d'activer la procédure de sortie dans les
meilleurs délais sans certitudes concernant les conséquences qui en découleront pour le
Royaume-Uni ou l'Union européenne. Cette démarche s'inscrit dans la succession de crises
que traverse l'Europe et qui mène à un retour de politiques nationales davantage
conservatrices ; deux référendums relatifs à l'UE sont également rejetés en 2016 aux Pays-
Bas et en Hongrie. À la suite de la décision du Royaume-Uni de sortir de l'Union, le 28 juin
2016, la Haute représentante de l'Union pour les Affaires étrangères et la Politique de
sécurité, Federica Mogherini, se déclare en faveur d'une « réflexion en profondeur » sur l'UE,
dont elle souhaite réaffirmer le rôle. Elle présente dans ce contexte incertain la
nouvelle stratégie globale de l'Union sur la politique étrangère et de défense commune.

Le 29 mars 2017, le Royaume-Uni devient le premier État membre à activer l'article 50 du


TUE lançant officiellement la procédure de retrait du pays de l'Union européenne qui se

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traduit par des négociations prévues sur une durée de deux ans afin de défaire les différents
liens.

Après de longs mois de négociations, le Parlement européen et la chambre des


communes finissent par se mettre d'accord. Cette dernière ratifie l'accord le 9 janvier 2020 et
le parlement ratifie l'accord le 29 janvier suivant. La sortie de l'Union européenne étant
effective à minuit le 31 janvier 2020. Le Royaume-Uni ne fait alors plus partie de l'Union
européenne. Cependant, une période de transition s'ouvre durant laquelle les traités d'échanges
sont négociés.

En dépit de la multiplication des crises qu'elle doit gérer, l'Union européenne reste un pôle
attractif pour ses voisins. Certains États, comme l'Islande, envisagent de relancer
leur processus d'adhésion ou d'intensifier leurs efforts dans ce sens, comme c'est le cas pour
les États des Balkans ; tandis que d'autres entités politiques dont l'Écosse et la Catalogne
souhaitent rester dans l'Union européenne tout en accédant à l'indépendance ou à une plus
grande autonomie politique.
L'Union européenne n'a pas toujours été aussi vaste qu'aujourd'hui. Lorsque le processus de
coopération économique entre pays européens a débuté, en 1951, seuls l'Allemagne, la
Belgique, la France, l'Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas y participaient.

Au fil des ans, un nombre croissant de pays ont décidé d'y adhérer. L'Union compte
aujourd'hui 27 pays membres. Le Royaume-Uni s’est retiré de l’Union européenne le 31
janvier 2020.

Les 27 pays membres de l’UE sont : Allemagne, Italie, Autriche, Lettonie, Belgique, Lituanie,
Bulgarie, Luxembourg, Chypre, Malte, Croatie, Pays-Bas, Danemark, Pologne, Espagne,
Portugal, Estonie, Roumanie, Finlande, Slovaquie, France, Slovénie, Grèce, Suède, Hongrie,
la république Tchèque et Irlande.

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CHAPITRE 7 : LA DISSERTATION ECONOMIQUE

L’analyse des phénomènes économiques à travers une dissertation ou un exposé se présente


généralement en trois (3) parties : l’introduction, le développement, la conclusion

Section 1 : L’INTRODUCTION
Elle comprend cinq sous-parties :
- le contexte de l’étude,
- la situation du problème,
- la problématique,
- l’intérêt de l’étude,
- l’annonce du plan.

1. Le contexte de l’étude

Il s’agit du cadre général dans lequel s’insère le sujet. Le cadre général situe le sujet à partir
de son évolution c’est-à-dire à partir de l’histoire et de l’actualité. C’est dans le contexte que
le sujet se définit. Le cadre fait ressortir les grandes caractéristiques du sujet, en fait le
contexte de l’étude permet d’asseoir un aperçu général sur le sujet. Ainsi, on restera dans un
cadre superficiel.

Exemple : L’importance de l’agriculture vivrière dans l’économie ivoirienne.

Le contexte ne doit pas commencer par l’agriculture vivrière, ici le cadre général fera ressortir
le développement de l’agriculture dans les pays sous-développés à partir de l’histoire
coloniale. Ainsi l’économie agricole présente-t-elle une principale caractéristique :
l’agriculture d’exportation et l’agriculture vivrière. L’agriculture d’exportation relève des
cultures d’exportation développées par l’État colonial et ensuite par les nouveaux États, c’est
le cas notamment du café, du cacao, du coton, du palmier à huile, du cocotier, de l’hévéa, de
l’ananas, de la banane, etc. A côté de cette agriculture apparaît l’agriculture vivrière
représentée généralement par les céréales (riz, maïs, sorgho, mil), tubercules (igname, taro,
patate, des racines, manioc), les produits d’élevage, de la pêche et enfin les produits de

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cueillette, bref, tout ce qui entre dans la consommation alimentaire de la population. Tout ce
qu’on sait c’est que c’est dans le contexte de l’étude qu’on va parler de l’agriculture.

2. Situation du problème
Ce paragraphe précise davantage le cadre général de l’étude, il donne plus d’informations par
rapport au sujet et permet d’en mieux cerner les contours. C’est également dans ce paragraphe
que certaines définitions peuvent être données. Ces définitions concernent les concepts qui
apparaissent les plus importants pour mieux comprendre le sujet, la définition est essentielle
afin d’éviter l’ambigüité des termes ou la confusion des concepts.

3. La problématique
C’est la réflexion centrale qui découle du terme ou du sujet, elle permet de savoir la principale
réflexion qui devra être menée, elle peut se traduire sous forme affirmative ou interrogative.
En général la problématique est liée ou est proche du terme central. Elle peut être simplement
la reprise du sujet sous une forme différente ou plus originale. La problématique peut
comporter deux éléments : Une problématique centrale et des questions de problématique.
- La problématique fait ressortir l’idée forte de la réflexion. Les questions de problématique
précisent les différentes parties ou les différents éléments de cette problématique centrale.

Exemple de problématique centrale : Quel est l’impact de la production vivrière sur le


développement économique et social de la Côte d’Ivoire ? Questions de problématique. On
peut en retenir plusieurs.
- Quelle est la politique vivrière mise en œuvre en Côte d’Ivoire ?
- Quels sont les résultats de cette politique ?
- Quelles en sont les principales limites ?
- Quelles sont les perspectives pour une meilleure dynamique du développement des produits
vivriers ?

4. L’intérêt du sujet
L’introduction devrait pouvoir montrer l’importance du sujet dans la compréhension du
phénomène précis ou des autres faits économiques, comment se situe le phénomène par
rapport à la compréhension de l’histoire et de l’actualité, comment cette étude peut aider à la

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compréhension d’autres faits analogues ou connexes. Il s’agira non de dire mais de montrer
l’intérêt de cette étude.

Exemple : ce sujet est important car la compréhension du phénomène, l’analyse du


phénomène peut permettre la compréhension des limites des politiques mises en place dans
les pays sous développés et surtout permettre de réelles approches en vue de l’action.

5. L’annonce du plan
Le développement des idées, dans le corps du sujet doit nécessairement être précédé de la
présentation et de l’annonce du plan, le plan devra être fondamentalement lié à la
problématique centrale et surtout aux questions de problématique.

Section 2 : LE DEVELOPPEMENT DES IDEES

Deux points essentiels seront relatifs au développement des idées : d’une part la justification
du sujet, d’autre part la présentation du plan et l’évolution des idées.

1. Justification du sujet

Justifier c’est montrer comme vrai, juste, réel par des arguments, par des preuves. La
justification de l’analyse économique en termes de dissertation sera basée sur la méthode
dialectique. La dialectique est l’ensemble des moyens mis en œuvre dans la discussion en vue
de démontrer ou de réfuter. Ainsi la méthode dialectique est une démarche dynamique de la
réalité par l’action des contraires (thèse et antithèse). Le plan de rédaction et surtout les actes
de problématique devraient pouvoir aboutir à mettre en œuvre cette méthode dialectique.

2. L’organisation du plan et l’évolution des idées

La méthode dialectique en se référant au plan va s’appuyer sur des principales idées relevées
dans l’introduction. Ces principales idées seront non seulement liées à la problématique
centrale mais aussi et surtout aux questions de problématique. C’est ainsi que la méthode va
aboutir à la présentation de la réflexion à partir de deux parties. Ces principales parties seront
à leur tour subdivisées.

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Les différentes questions de problématique vont justement représenter ces sous-parties en
d’autres termes lorsque la problématique fait ressortir cinq questions de recherche, on devrait
trouver au moins 5 sous-divisions.

Première partie : toujours par rapport à la méthode dialectique va présenter les données pour
les faits.
Deuxième partie : sera consacrée à l’analyse de ces données et aux propositions. Aussi de
l’importance de la qualité des données et des faits dépendra la pertinence de l’analyse et des
propositions. La présentation des faits dans la première partie retiendra donc certains
éléments relatifs au contexte de l’étude et à la situation du problème en précisant les
différentes dimensions. Mais cette partie retiendra surtout comme sous-partie les questions de
problématique relatives à la présentation des données.

Exemple : les deux premières questions de problématique relevées dans l’introduction. Quant
à la deuxième partie, elle fera ressortir d’une part les limites et les causes de ces limites,
d’autre part des propositions en termes de perspectives. On notera que cette seconde partie
devra relever de l’originale de la réflexion et de la pertinence de l’analyse c’est-à-dire que
c’est ici qu’on attend le plan. Il faut enfin retenir que la présentation matérielle doit être
intuitivement équilibrée. Cet équilibre devra se retrouver entre les deux grandes parties, entre
les sous-parties à l’intérieur des parties et enfin entre le nombre de sous-partie.

Section 3 : CONCLUSION

Contrairement à ce qui apparaîtrait souvent, la conclusion n’est pas un appendice de la


réflexion. La conclusion est aussi importante que l’introduction et le corps du sujet. Une
absence de conclusion reste toujours un goût d’inachevé. Deux éléments déterminent la
conclusion :
- Le premier relatif à un bref résumé de deux ou trois lignes faisant ressortir les points les plus
importants de la réflexion, il ne s’agit donc pas de résumer chaque partie.
- Le second va concerner l’ouverture vers d’autres horizons de la réflexion, il s’agira de
s’élever au-dessus du sujet pour aboutir ou pour déboucher à des enseignements qui
apparaissent comme fondamentaux dans le but de mener l’action en termes de

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développement. L’intérêt du sujet (Cf. introduction) devrait permettre une meilleure
appréciation de cette ouverture vers les aspects globaux de la réflexion.

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TROISIEME PARTIE : THEORIE DU
COMPORTEMENT DU CONSOMMATEUR ET DE
LA DEMANDE

CHAPITRE 1 : LA THÉORIE DU CONSOMMATEUR

INTRODUCTION
La théorie du consommateur occupe une place centrale dans la théorie néoclassique. Elle s’est
construite autour de la notion d’utilité, et s’est particulièrement intéressée à l’utilité
marginale. Le consommateur, selon la théorie microéconomique néoclassique, est rationnel.
Il cherche à atteindre le panier optimal de consommation étant donné le budget limité dont il
dispose pour ses acquisitions. Il doit donc opérer des choix entre les biens souhaités. Pour les
effectuer à bon escient, il établit une hiérarchie de ses préférences qu’il confronte avec ses
moyens limités. Il choisit la combinaison de bien lui apportant la plus grande satisfaction,
c'est-à-dire l’utilité maximale. La recherche de l’utilité maximale sera menée en deux étapes :
une première approche sera effectuée en termes d’utilité marginale impliquant une étude
cardinale, la seconde en termes d’indifférence aboutissant à une étude ordinale.

Section 1 : NOTION D’UTILITÉ

1- Mesure de l’utilité

Au sein de l’école néoclassique, deux approches de la détermination de l’utilité furent


admises : l’approche cardinale et l’approche ordinale.

1-1- Mesure cardinale de l’utilité


Les défenseurs de cette théorie (Stanley Jevons, Léon Walras, Carl Menger et Alfred Marshall
qui l’utilisa avec des réserves) admettaient que le consommateur était capable d’attribuer une
valeur à l’utilité que lui procurait tout bien ou combinaison de biens. En d’autres termes, la
mesure cardinale de l’utilité consistait à attribuer à chaque panier ou combinaison de biens un

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nombre qui mesure la grandeur de l’utilité qui lui correspond : l’utilité est donc mesurable et
additive.
Remarque : l’approche cardinale de la mesure de l’utilité est généralement contestée pour les
raisons suivantes :
 Il est quasiment impossible à un consommateur de déterminer une unité de mesure de
la satisfaction retirée de la consommation de biens. En d’autres termes, la mesure
cardinale de l’utilité n’est pas pertinente ;
 Le caractère additif de l’utilité reste peu convaincant.

1-2- Mesure ordinale de l’utilité

Pour les théoriciens de l’utilité ordinale (Vilfredo Pareto, Eugen Slutsky, John Hicks, Paul
Samuelson), qui ont d’ailleurs rejeté la théorie de l’utilité cardinale, ce qu’un consommateur
peut faire, c’est de classer raisonnablement les biens ou paniers de biens en fonction de
l’utilité qu’ils lui procurent. Ils ont alors admis que l’utilité est certes mesurable, et qu’elle
dépend des quantités consommées, mais qu’elle n’est pas additive. L’utilité ordinale établit en
outre une relation de préférence - indifférence.

2- L’utilité totale
2-1- Définition

C’est la satisfaction totale qu’un individu retire de la consommation d’une certaine quantité de
bien ou combinaison de biens.
Soit X et Y les biens consommés par un individu. L’utilité totale de celui-ci est notée :

UT ( X , Y ) ou U ( X , Y )

On peut ainsi définir pour un produit donné une fonction d’utilité de forme U  f ( X ) .

La fonction d’utilité est l’expression mathématique de l’ordre de préférence dans lequel le


consommateur classe les biens qu’il consomme. Elle associe à chaque panier de
consommation X un nombre U ( X ) tel que le panier X 2 est préféré au panier X 1 si et

seulement si le niveau d’utilité de X 2 est supérieur à celui de X 1 .

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2-2- Conditions d’existence de la fonction d’utilité ou des préférences du
consommateur (hypothèses sur les préférences)

Il n’est pas évident que l’on puisse trouver pour les consommateurs des fonctions à valeur
réelle qui soient des fonctions d’utilité. Il faut que les préférences du consommateur
remplissent certaines conditions pour qu’elles puissent être représentées par une fonction
d’utilité. Il existe trois (3) conditions suffisantes d’existence d’une fonction d’utilité :

 La relation de préférence est une relation complète (ou symétrique) : c’est-à- dire que

pour tout panier de bien X et pour tout autre panier de bien Y , X  R ,


*
Y  R* , il

existe les possibilités suivantes : X(x1 , x 2 ) est aussi préféré que Y(y1 , y2 ) ou bien

Y(y1 , y2 ) est aussi préféré que X(x1 , x 2 ) , ou encore ces deux relations sont vérifiées
simultanément, ce qui implique alors que le consommateur est indifférent entre les

deux paniers. X(x1 , x 2 )  Y(y1, y2 ) . Cette relation implique que le consommateur


est capable de faire un choix ;
 La relation de préférence est aussi réflexive : c’est-à-dire que tout panier est « au

moins aussi désiré » que lui-même X(x1 , x 2 ) est aussi préféré que X(x1 , x 2 ) ou
encore que tout panier est au moins aussi désirable qu’un panier identique ;
 La relation de préférence est transitive. A partir des paniers X, Y et Z on définit les
relations suivantes :

Si(x1 , x 2 ) (y1 , y 2 ) 
 alors (x1 , x 2 ) (z1 ,z 2 )
Et(y1 , y 2 ) (z1 , z 2 ) 

La relation de transitivité permet au consommateur de faire le meilleur choix.

2-3- La fonction d’utilité dans le cas d’un seul bien X

Il s’agit de déterminer l’allure de la fonction d’utilité lorsque la consommation de tous les


biens autres que le bien X est supposée constante. Elle est notée U  f ( X )  U ( X ) . Une
telle fonction indique que les variations de l’utilité totale sont uniquement fonction du bien X.

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Les utilités procurées par l’acquisition de différentes quantités du bien X sont additives, donc
la fonction d’utilité est continue et elle admet des dérivées de premier et deuxième ordres.

L’expression U  f ( X ) indique que l’utilité est cardinale et mesurable et peut être


représentée comme suit :
L’expression U = f(X) indique que l’utilité est cardinale et mesurable et peut être
représentée

comme suit :

Utilité

UT

U2

U1

0 x1 x2 X

Figure1 : Fonction d’utilité additive et mesurable

3- L’utilité Marginale
3-1- Définition
C’est l’utilité apportée par la dernière unité consommée (acquise) d’un bien. Elle représente la
variation de l’utilité totale résultant de la consommation d’une unité supplémentaire d’un
bien, les quantités des autres biens restant constantes (inchangées).
Elle est notée :

U (x, y) U (x, y)
UmX  pour le Bien X et Umy  pour le bien Y
x y

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TABLEAU 1 : utilité totale et utilité marginale
Utilité totale Utilité marginale
Unité du produit A
1 10 10
2 19 9
3 27 8
4 34 7
5 40 6
6 44 4
7 45 1
8 45(satiété) 0

Il apparaît dans ce tableau que l’utilité apportée par chaque unité supplémentaire de produit
(utilité marginale) tend à diminuer avec l’accroissement des quantités consommées.

Remarque : La valeur d’un bien est fournie par l’utilité marginale et non l’utilité totale.

3-2- La loi d’égalisation des utilités marginales pondérées

Compte tenu du caractère limité du revenu du consommateur, plus il achète un bien, moins il
peut acheter d’autres biens. Il met ainsi en balance le supplément de satisfaction procuré par
chaque acquisition avec les avantages supplémentaires inhérents à d’autres acquisitions
possibles. Son calcul économique se mène donc à partir d’un système de préférence
hiérarchisé en termes de comparaison d’utilités marginales.

APPLICATION 1

Un consommateur doit répartir un revenu de 10UM entre l’achat de deux biens A et B, et


rechercher la combinaison des quantités de A et de B lui permettant d’obtenir le bien-être
maximum. Les produits A et B coûtent respectivement 1UM et 3UM.

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Le tableau des utilités marginales est le suivant :

Unité de produit 1 2 3 4 5 6
Utilité marginale A
(UmA) 10 9 8 7 6 4
Utilité marginale B
(UmB) 24 21 18 15 9 3

TAF : Déterminez les différentes décisions d’achat possibles, en sachant que :

Um
-L’utilité marginale pondérée (UmP) est : UmP  ;
prix
­ Le consommateur achète le produit pour lequel l’utilité marginale pondérée est plus grande.

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(2) (3)

(4) Comparaison des


Produit A (prix 1UM) Produit B (prix 3UM)
(1)
utilités
Utilité
Unité de Utilité Utilité marginale Utilité marginale marginales pondérées (5) Décision d’achat
marginale
produit marginale pondérée
pondérée (Um) (Um /franc)
(Um) (Um/Prix)
(Um/Prix)
(a) (b) (b)
Uma1 Umb1
= 10 > =8 Achat d’1 unité de A
1 10 10 24
(a) 8
Pa Pb
Uma2 Umb2
=9> =7 Achat de 2 unités de A
2 9 9 21 7
Pa Pb
Uma3 Umb3 Achat de 3 unités de A + 1unité
=8≥ =6
3 8 8 18 6 de B
Pa Pb
Uma4 Umb4 Achat de 4 unités de A + 2 unités
=7≥ =5
4 7 7 15 5 de B
Pa Pb
5 6 6 9 3

6 4 4 3 1
Tableau 2 : Loi d’égalisation des utilités marginales pondérées des biens A et B pour un revenu de 10 UM

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Les colonnes 2a et 3a montrent les goûts des acheteurs dans l’absolu mais elles ne tiennent pas
compte de leurs préférences compte tenu des prix.

Les colonnes 2b et 3b tiennent compte des prix respectifs des 2 produits en indiquant une
pondération de l’utilité marginale par les prix (utilité marginale par franc).

Dans la colonne 4 on constate que l’utilité marginale de la première unité de A pondérée par le
prix de A (Uma1 /Pa) est supérieurs à l’utilité marginale de la première unité de B pondérée par
le prix de B (Umb1 /Pb). Le consommateur a donc intérêt à choisir le bien A et en acquérir une
unité.

Le consommateur poursuit ses comparaisons et obtient que les utilités marginales pondérées
d’une troisième unité de A et de la première unité de B le conduit à acquérir 3 unités de A et

1 unité de B puisque chaque bien lui apporte, dans cette hypothèse, la même utilité marginale
pondérée.

Cependant ces achats ne lui ont pas permis de répartir tout son revenu (10F) puisque :
(3A x 1F) + (1B x 3F) = 6F. Il doit donc poursuivre ses achats et il acquiert une quatrième unité
de A et une seconde unité de B, achats pour lesquels se vérifie l’égalisation des utilités
marginale pondérées :

Uma 4 Umb2

pa pb

Il a ainsi affecté tout son revenu puisque (4A x 1F) + (2B x 3F) = 10F et obtenu la combinaison
lui assurant le maximum de satisfaction ou d’utilité totale (34 utils de A + 15 utils de B soit au
total 49 utils). Toute autre combinaison lui apporterait une satisfaction inférieure.
L’exemple décrit ici montre que la combinaison optimale sera obtenue lorsque le consommateur
aura reparti son revenu disponible de sorte qu’il y ait égalité des utilités marginales pondérées.

Uma Umb Uma pa


  
pa pb Umb pb
La loi d’égalisation des utilités marginales peut être libellée ainsi : Le consommateur, pour
atteindre une situation d’équilibre, doit répartir son revenu de sorte que soient égalisées les
utilités marginales par unité monétaire dépensée des différents biens achetés.

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4- Relation entre utilité totale et utilité marginale
L’utilité marginale (Um) est la variation de l’utilité totale (UT) résultant de la consommation
d’une unité supplémentaire d’un bien. La théorie marginaliste considère que l’Um d’un bien est
décroissante. Donc les dérivées partielles des U’Xj si elles existent doivent être négatives c’est-
 2U
à- dire : 0
x 2 j

APPLICATION 2

On considère les utilités totales (UT) suivantes relatives à un bien X.

Quantités x UTx Umx


0 0 -
1 200 200

2 300 100

3 330 30

4 340 10

5 340 0
TAF :
6 336 -4
1- Déterminer à l’aide de deux graphiques superposés les relations entre UT et Um.

2- Commenter.

OBSERVATION : Ces données indiquent qu’au fur et à mesure que la consommation du bien
X augmente, l’UT croit à taux décroissant. Quant à l’Um, elle décroit dès la deuxième unité
consommée : c’est la loi de l’Um décroissante.

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Point de
Utx satiété ou de
300 saturation
250
Point
200

150 Point
Utx
100 d'inflexion

50

0 Qx

0 1 2 3 4 5 6 7

250
Umx

200
150
100 Um
50
0 --4 Qx

-50 0 1 2 3 4 5 6 7

Figure 2 : Relation entre Utilité totale et Utilité


marginale

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Commentaire :
- Lorsque les quantités consommées du bien X augmentent, l’UT croit de façon plus que
proportionnelle de l’origine au point d’inflexion c'est-à-dire dans la partie convexe de la
courbe d’UT ;
­ A partir du point d’inflexion, l’UT devient concave, elle continue de croître mais à taux
décroissant jusqu’au point de satiété (ou point de saturation) qui est entre 4 et 5 unité de X.
Au point de satiété, l’UT atteint son maximum. A partie de ce point, l’UT décroit de façon
continue et l’Um est nulle. Au-delà du point de satiété l’UT devient décroissante et l’Um < 0.
­ L’allure décroissante de la courbe d’Um étaie la loi de l’Um décroissante qui stipule que
l’Um des quantités additionnelles d’un bien diminue lorsqu’on augmente les quantités
consommées de ce bien.

Application 3

1 1/2
Soit la fonction d’utilité suivante : U ( X , Y )  X Y . Si le consommateur consomme X = 1
2
et Y = 4, déterminer :
1- L’utilité totale
2- Les utilités moyennes UMx
et UMy.
3- Les utilités marginales Umx et Umy .

Correction
1
1. UT  U (1, 4)  (1) x(4)  2
2
1
X 1/ 2Y
U ( X ,Y ) 2 Y
2. UM X   
X X 2 X 1/ 2
1
X 1/ 2Y
U ( X ,Y ) 2 1 1
UM Y    X 1/2 
Y Y 2 2
1
3. UmX  U X, ( X , Y )  YX 1/2  1
4
1 1/2 1
UmY  UY, ( X , Y )  X 
2 2

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Section 2 : NOTION DE COURBE D’INDIFFÉRENCE

1- Définition
La courbe d’indifférence (imaginée par EDGEWORTH et reformulée par PARETO) est le
lieu géométrique des points ou combinaisons de biens X et Y qui procurent au consommateur
le même niveau de satisfaction. En d’autre termes c’est la courbe qui relie les combinaisons
de biens X et Y dont la consommation procure le même niveau de satisfaction ou d’utilité
totale au consommateur. Soit la fonction d’utilité suivante : U = U(X, Y). La courbe
d’indifférence est définie comme l’ensemble de toutes les combinaisons (X, Y) qui vérifient
l’équation U(X, Y) = U, U étant le niveau d’utilité totale constante.

2- Représentation graphique
L’ensemble des combinaisons (X, Y) qui procurent le même niveau d’utilité implique :
 que les biens X et Y sont infiniment divisibles ;
 qu’ils sont substituables, c'est-à-dire que le consommateur peut décider de consommer
moins d’un bien et plus de l’autre ou vice versa, tout en maintenant son utilité totale
constante.

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La figure ci-dessous (ci-contre) indique l’allure possible de la courbe d’indifférence.

U = cste

0 X

Figure 3 : courbe d’indifférence

Remarque :
Une série de courbes d’indifférence correspondant à différents niveaux de satisfaction
constitue une carte d’indifférence. En supposant que la satisfaction du consommateur
augmente avec la taille de son panier de biens, plus une courbe d’indifférence est éloignée de
l’origine, plus elle correspond à une utilité plus élevée.

La figure ci-dessous représente une carte d’indifférence.

U2

U1

U0

0 X

Figure 4 : carte d’indifférence

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3- Propriétés des courbes d’indifférence

-Le sujet garde la même satisfaction totale en se déplaçant le long de la même courbe
d’indifférence. Toute courbe d’indifférence située au-dessus ou à droite d’une autre apporte
au consommateur une satisfaction plus élevée.
-Deux courbes d’indifférence ne peuvent pas se couper. Soient deux courbes U1 s’interceptant
en C, A un point de U2 et B un point de U1. Supposons que A est préféré à B. A et C étant
situés sur la courbe U2, alors le consommateur est indifférent aux deux combinaisons et par
transitivité C devrait être préféré à B. Or C et B sont situés sur la même courbe U1. Il ya donc
contradiction lorsqu’on considère que A est préféré à B. Par conséquent l’intersection des
courbes d’indifférence est logiquement impossible en raison de la propriété de transitivité.

A U2

B U1

0 X

Les courbes d’indifférence sont décroissantes, convexes par rapport à l’origine (le TMS est
décroissant le long d’une courbe d’indifférence).

Remarque : les courbes d’indifférence dont il est question sont des courbes typiques et sont de
la forme U (X, Y)  AX Y  , A 0,0  1 et 0  1 . Ce sont des courbes du type Cobb-
Douglas.

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4- Courbes d’indifférence atypiques
4-1- Cas des biens parfaitement substituables
Deux biens sont parfaitement substituables (substituts parfaits) si le consommateur est disposé
à substituer l’un des biens à l’autre à un taux constant. Le taux marginal de substitution du
bien X au bien Y noté (TMSx/y) est constant et la courbe d’indifférence est linéaire. La
fonction d’utilité est de la forme U (X, Y)  aX  bY , avec a 0 et b 0.
U (X, Y)  U 0 , on a aX  bY  U 0

X  0, Y  U 0 / b ; pour Y  0, X  U 0 / a

0 X

Figure 5 : Cas des biens substituts

4-2- Cas des biens parfaitement complémentaires

Deux biens sont dits parfaitement complémentaires lorsqu’ils sont toujours consommés
ensemble dans des proportions fixes.
La fonction d’utilité est de la forme U(X, Y) = min (aX, bY), a et b étant des nombres réels
positifs indiquant les proportions dans lesquelles les biens sont consommés. Les courbes
d’indifférence sont orthogonales.

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Y

0 Y

Figure 6 : Cas de biens complémentaires

4-3- Cas où l’un des deux biens en présence n’est pas désiré (bien neutre)

Dans ce cas la courbe d’indifférence peut être une droite verticale ou une droite horizontale.
Les fonctions d’utilité sont respectivement U(X, Y) = X = a et U(X, Y) = Y = b.

U0 U0

0 X 0 X

Figure 7 : Bien Y non désiré Figure 8 : Bien X non désiré

4-4- Courbe d’indifférence concave

Les fonctions d’utilité concaves sont de la forme U ( X , Y )  aX 2  bY 2

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Y

0 X

Figure 9 : Fonction d’utilité concave

5- Taux marginal de substitution


5-1- Définition
Le taux marginal de substitution du bien X au bien Y noté TMSX/Y mesure le nombre d’unités
de Y qui doivent être sacrifiées pour une unité supplémentaire de X, tout en maintenant
constant le niveau de satisfaction.

5-2- Formulation mathématique

Soit la fonction d’utilité totale U = U(X,Y). La variation de l’utilité totale résultant du


changement de valeur des variables explicatives X et Y s’exprime par la différentielle totale
du premier ordre de la fonction U.
Si la fonction d’utilité U est continue et dérivable, la différentielle totale de U est :
U U
dU ( X , Y )  dX  dY .
X Y
Sur une même courbe d’indifférence, les variations de X et de Y n’entraînant pas de
changement de valeur de U (car U = cste), on a donc :

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U U
dU ( X , Y )  0  dX  dY  0
X Y

UmX dY
 UmX .dX  UmY .dY  0  
UmY dX
. On en déduit que :

UmX dY UmX dY
TMS X /Y   ou TMS X /Y  
UmY dX UmY dX

Mathématiquement, le taux marginal de substitution de X à Y noté TMSX/Y est donc égale à


l’opposé du rapport de la variation de Y (∆Y) sur la variation de X (∆X) ;
Y
TMS X /Y  
X

Il est aussi égal à l’inverse du rapport de l’utilité marginale de Y(Umy) sur l’utilité marginale
de X (Umx) soit :

Y 1 Y UmX
TMS X /Y    ou TMS X /Y   
X UmY X UmY
UmX

Graphiquement, le TMS est donné par la valeur absolue de la pente (ou l’opposé de la pente)
de la tangente à la courbe d’indifférence.

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Y

Y1 A

Y

Y2 B

0 X

X1 X2

X

Figure 10 : Taux marginal de substitution de X à Y

Section 3 : LA DROITE DE BUDGET


1- Définition
La droite de budget représente l’ensemble des couples de biens X et Y qui peuvent être
achetés par le consommateur lorsqu’il dépense la totalité de son revenu.
Soit les biens X et Y et Px et P yleurs prix respectifs. L’équation de la droite de budget est
ainsi définie X .PX  Y .PY  R , avec R le revenu du consommateur.

Il vient par ailleurs Y   PX / PY . X  R / PY , avec  PX / PY le coefficient directeur et R / PY


l’ordonnée à l’origine.

2- L’espace budgétaire (espace de budget)

L’espace budgétaire représente l’ensemble de tous les couples de biens qui peuvent être
achetés par le consommateur lorsqu’il dépense tout ou partie de son revenu.

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L’ensemble (E) des combinaisons (X, Y) contenues dans l’espace budgétaire est défini par la
relation E  (X, Y)  
 
/ X .PX  Y .PY  R, X  0 et Y  0 .

3- Les déplacements de la droite de budget


3-1- Les variations du revenu

La variation du revenu du consommateur entraîne un déplacement de la droite de budget


parallèlement à sa position initiale.
Une hausse du budget entraîne un déplacement de la droite de budget vers la droite, tandis
qu’une baisse du budget entraîne un déplacement de la droite budgétaire vers la gauche.

A,

A,,

B ,, B B,

Figure 11 : Effets des variations du revenu sur la droite de budget

3-2- Les variations de prix


-Variation du prix d’un bien
La variation du prix d’un des biens provoque un pivotement de la droite de budget et entraîne
ainsi le changement de la pente de celle-ci.
Par exemple lorsque Px augmente, la valeur absolue de la pente de la contrainte budgétaire
augmente.

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A

B ,, B B,
Figure 12 : Effets des variations du prix du bien X sur la droite de budget

-Variation simultanée des prix des deux biens


Une variation proportionnelle des prix des biens entraîne un déplacement de la droite de
budget parallèlement à sa position initiale (car la pente demeure la même).
Lorsque la variation des prix n’est pas proportionnelle, la droite de budget se déplace avec un
changement de pente.

Section 4 : DÉTERMINATION DE L’ÉQUILIBRE DU CONSOMMATEUR :


MAXIMISATION DE L’UTILITÉ DU CONSOMMATEUR

Le programme de maximisation de l’utilité du consommateur comporte des données, des


variables et des hypothèses.
Les données sont : la fonction d’utilité, le revenu du consommateur et les prix des différents
biens.
Les variables sont : les quantités des biens que le consommateur achète.
Les hypothèses sont : le consommateur est supposé rationnel.
On peut résoudre le problème de maximisation de l’utilité du consommateur par deux
méthodes de calcul :
- La méthode de substitution ;
- La méthode du multiplicateur de Lagrange.

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1- La méthode de substitution
1-1- Présentation de la méthode
Soit la fonction d’utilité U = f(X, Y) (1) et la contrainte budgétaire R = Px.X + Py.Y (2).
Le problème du consommateur rationnel consiste à maximiser la fonction d’utilité sous
contrainte budgétaire. Il devra pour cela trouver la combinaison (X, Y) qui satisfasse sa
contrainte budgétaire et maximise en même temps son utilité.
On peut réécrire l’équation (2) sous la forme : Y  R / PY  PX / PY . X , pour PY  0 (3)

En substituant l’équation (3) dans l’équation (1), on obtient une fonction d’utilité fonction de
X1 seul, c'est-à-dire U  f ( X , ( R / PY  PX / PY . X ))
Il suffit donc de dériver U (équation 4) par rapport à X pour obtenir la quantité de X et
déduire celle de Y en utilisant la valeur de X dans l’équation (3).

1-2- Conditions de détermination d’un optimum


La détermination d’un optimum résulte de la réalisation de deux conditions :

U
- Condition de premier ordre ou condition nécessaire :  U ,(X )  0
X

-Condition de second ordre ou condition suffisante :

 2U
 U ,, ( X 1 ) 0  existence d’un maximum.
X 2

 2U
 U ,, ( X 1 ) 0  existence d’un minimum.
X 2

1-3- Application

Soit la fonction d’utilité suivante : U(X,Y) = XY. Les prix des biens X et Y sont
respectivement P= 2 et Py= 5 et le revenu du consommateur est R = 100.
T.A.F.
1) Déterminer l’équation de la contrainte budgétaire.
2) Déterminer les quantités X  et Y  qui maximisent l’utilité du consommateur.

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Correction

1) Contrainte budgétaire

R  PX X  PY Y  100  2 X  5Y

2) Déterminer les quantités X  et Y  qui maximisent U

En exprimant Y en fonction de X, la contrainte budgétaire devient :


Y = 20 – 2/5.X et la fonction d’utilité devient à son tour :
U = X(20 – 2/5.X) = 20X – 2/5.X2

Condition nécessaire (C.I.O.)

U
 0  20  4 / 5 X  0  X  25 .
X

En substituant X dans la contrainte budgétaire, on obtient :

Y = 20 – 2/5 x 25 ⟹ Y = 10.

Condition suffisante (C.II.O.)


 2U
Pour que cette combinaison maximise l’utilité du consommateur, il faut que soit
X 2
 2U  2U
négative, c'est-à-dire 0 .  4 / 5 0 . Donc le consommateur maximise son utilité
X 2 X 2
en consommant X   25 et Y   10 .

2- La méthode de Lagrange
2-1- Présentation de la méthode

Supposons la fonction objectif U = f(X, Y) et la contrainte budgétaire R  PX X  PY Y

La méthode de Lagrange consiste à former à partir de la fonction objectif et de la contrainte


budgétaire, la fonction L  f ( X , Y )   ( R  XPX  YPY ) où λ est un multiplicateur.
Cette méthode permet de trouver les valeurs de X et Y qui seront solutions du problème de
maximisation de la fonction U sous contrainte budgétaire.

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 MaxU ( X , Y )
Le programme de maximisation se pose comme suit : 
 scR  XPX  YPY

Le Lagrangien (L) est : L( X , Y ,  )  U ( X , Y )   ( R  XPX  YPY )

2-2- Conditions de détermination d’un maximum

Les conditions nécessaires (CIO) de détermination du maximum

Elles sont obtenues par annulation de la différentielle totale première de la fonction L, c'est-à-

L L L L
dire : dL  dX1  dX 2  ...  dX n  d   0
X1 X 2 X n 

L L
Or dL  0 si  0 (i  1,..., n) et  0 . Donc les conditions nécessaires de détermination
X i 
du maximum sont obtenues lorsque les dérivées partielles premières de la fonction L sont
L L
nulles, c’est dire  0 (i  1,..., n) et 0.
X i 

Calculons et annulons les dérivées partielles du 1er ordre par rapport à X, Y et  .

 L
 X UmX   PX  0

 L
 UmY   PY  0
 Y
 L
 L  R  XPX  YPY  0

Les conditions nécessaires (CIO) sont obtenues en résolvant les deux (2) premières équations
du système précédent. On a:

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UmX   PX UmX PX
  
 Y
Um   PY UmY PY

Les conditions suffisantes du maximum ou du minimum (C.II.O)

Elles nécessitent la détermination de la matrice hessienne bordée (H) à partir des dérivées
partielles secondes de la fonction de Lagrange. Soit :

LXX LXY LX  U XX U XY  P1
H  LYX LYY LY   UYX UYY  P2
L X LY L  P1  P2 0
Ensuite, on calcule le déterminant de cette matrice, noté det (H) ou H . En utilisant la

méthode de SARRUS, on calcule le déterminant de H :

U11 U12  P1 U11 U12


H  U 21 U 22  P2 U 21 U 22
 P1  P2 0  P1  P2

Enfin, on conclut en analysant le signe de det H.


En effet, lorsque :
H 0 , il s’agit d’un maximum ;
H 0 , il s’agit d’un minimum.

2-3- Application 5
Soit la fonction d’utilité suivante : U(X, Y) = X.Y. Les prix des biens X et Y sont
respectivement PX = 2 et PY = 5 et le revenu du consommateur est R = 100.
T.A.F.
1) Déterminer les fonctions de demande marshallienne.

2) Déterminer les quantités X  et Y  qui maximisent l’utilité du consommateur.


3) Déduire la valeur maximale de l’utilité du consommateur.

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Solution
1) Détermination des fonctions de demande marshallienne
U  XY et R  XPX  YPY

 Max U  XY

 S / C R  XPX  YPY

L( X , Y ,  )  XY   ( R  XPX  YPY )

 L
 X  Y   PX  0 (1)

 L
  X   PY  0 (2)
 Y
 L
   R  XPX  YPY  0 (3)

(1) Y PX
 
(2) X PY

YPY
X (4)
PX

 PY 
(4) dans (3)  R  PX   Y  YPY  0
 PX 

 R  YPY  YPY  0

 R  2YPY  0
R
Y  (5)
2 PY

R
PY
 PY
(5) dans (4)  X  (5)
2 PX

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R
X 
2 PX

2) Déterminons les quantités X  et Y  qui maximisent l’utilité du consommateur

100
Y   10
25

100
X   25
2 2
Remarque
UmX PX
A l’équilibre, TMS X /Y   . Cette égalité (condition d’équilibre) permet de résoudre
UmY PY
plus facilement le programme de maximisation de l’utilité sous contrainte du revenu par la
méthode de Lagrange.
En l’appliquant à notre exemple, on a :

 Max U  XY

 S / C R  XPX  YPY

L( X , Y ,  )  XY   ( R  XPX  YPY )

L( X , Y ,  )  XY   (100  2 X  5Y )

 L
 X  0  Y  2 (1)

 L
  0  X  5 (2)
 Y
 L
   0  100  2 X  5Y  0 (3)

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PX
A l’équilibre, TMS X /Y 
PY

(1) Y 2
  . Condition d’équilibre vérifiée car TMS  X et
PX 2

(2) X 5 X /Y
Y PY 5

X 2 2
  Y  X (4) . En remplaçant (4) dans (3), on obtient les quantités d’équilibre
Y 5 5
X  et Y 

2 
100  2 X  5  X   0  100  2 X  2 X  0
5 

 X  X   25
2
 Y  Y   X   10
5
3) Déduction de la valeur maximale de l’utilité du consommateur

R R R2
U   U 
2 PX 2 PY 4 PX PY

 1002
A.N : U   250
4 25

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3- Détermination graphique de l’équilibre du consommateur

R / PY

N A

B U0

0 M R / PX X

Figure 13 : Équilibre du consommateur

Au point A, la pente de la tangente à la courbe d’indifférence est égale à la pente de la droite


PX UmX
de budget . Or la Pente de la droite de budget est et TMS X /Y  = Pente de la courbe
PY UmY
d’indifférence.

PX UmX
La condition d’équilibre du consommateur est donc :   TMS X /Y
PY UmY
Le consommateur maximise alors sa satisfaction globale compte tenu de son revenu s’il
choisit la combinaison A.

4- Les variations de l’équilibre du consommateur


Il s’agit de déterminer les effets des variations de prix ou du revenu sur l’équilibre du
consommateur.

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4-1- Les variations du prix d’un bien : la courbe de « consommation – prix »
La courbe de « consommation – prix » est le lieu géométrique (représentation graphique) des
points d’équilibre du consommateur résultant des variations de l’un des prix, les autres prix et
le revenu nominal restant inchangés (constants).
Ci-dessous, l’illustration de la courbe de consommation-revenu (dans la pratique, elle est soit
horizontale soit verticale).

R / PY
Courbe de consommation-prix

Y1 U3

Y2 U2

Y3 U1
0 X3 X2 X1 R / PX 2 R / PX 1 X
Figure 14 : Courbe de consommation-prix

4-2- Les variations du revenu nominal : la courbe de « consommation – revenu »


La courbe de « consommation – revenu » ou « chemin d’expansion du revenu » est le lieu
géométrique des points d’équilibre obtenus lorsque le revenu nominal du consommateur
change, les prix des biens restant constants. Elle permet de déterminer la courbe d’Engel, qui
désigne quant à elle la représentation de la demande par rapport au revenu, les prix étant
maintenus constants.

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Illustration ci-dessous

U3

Courbe consommation-revenu

U1 C

A B U2

0 R1 R2 R3 X

Figure 15 : Effet d’une variation de revenu

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CHAPITRE 2 : THEORIE DE LA DEMANDE

INTRODUCTION

La théorie de la demande cherche à identifier les raisons qui sous-tendent la demande d’un
bien par un consommateur. La demande d’un bien désigne la relation entre la quantité
optimale de ce bien et les valeurs possibles des variables qui la déterminent. Elle est fonction
des variables qui influencent le choix du consommateur à savoir : le prix du bien considéré,
les prix des autres biens, le revenu du consommateur, ses goûts et préférences, son patrimoine
ou sa richesse, etc. Cependant, l’analyse microéconomique élémentaire de la fonction de
demande privilégie les trois premières variables, c’est-à-dire le prix du bien, les prix des
autres biens et le revenu du consommateur.

Section 1 : CHOIX OPTIMAL DU CONSOMMATEUR

Le calcul du consommateur revient toujours, en définitive, à déterminer un panier optimal.


Cependant ce panier optimal peut-être déterminé à partir de deux situations différentes :
l’approche primale et l’approche duale.

1- L’approche primale
Elle consiste à maximiser la fonction d’utilité sous contrainte du revenu. Cette approche a
déjà été étudiée au chapitre 1.

2- L’approche duale
Elle consiste à minimiser le revenu dépensé sous contrainte d’un niveau d’utilité donné. En
d’autres termes dans l’approche duale, le niveau d’utilité est fixé et l’on cherche la dépense
minimale (revenu minimum) qui permet d’atteindre ce niveau d’utilité.
Le comportement du consommateur est alors formalisé par le programme suivant :

min  XiPi, i  1, 2,..., n




 S / C U 0  U ( Xi )

Le lagrangien, dans le cas de la résolution de ce programme d’optimisation se présente


comme suit :

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L( X i ,  )   XiPi   (U0  U ( Xi))

Section 2 : LES FONCTIONS DE DEMANDE

1- Les fonctions de demande ordinaires ou marshalliennes


1-1- Détermination

Les fonctions de demande marshallienne (ou normale) des biens X et Y sont obtenues à parti
des conditions du premier ordre du programme de maximisation de l’utilité du consommateur
sous contrainte de son budget. Déjà fait au chapitre 1.

1-2- Degré d’homogénéité


Une fonction est dite homogène de degré , si en multipliant les variables déterminantes par
une valeur positive k, la fonction est multipliée par k  ,  , ∈ R.
Soient les fonctions de demande X  X ( PX , PY , R) , et X ,  X , ( P, X , P,Y , R , ) avec
P, X  kPX et P,Y  kP et R,  kR
Si X
,
( P, X , P,Y ,R , )  X , (kPX ,kPX ,kR)  k X (kPX ,kPX ,kR) , alors la fonction X est dite
homogène de degré  .
Deux interprétations sont possibles :

-Lorsque   0, X , ( P, X , P,Y , R , )  k  X (PX , PX , R)  X , R) = X. Cela traduit le fait que la


hausse des prix des biens et du revenu du consommateur d’un coefficient k n’affecte pas les
demandes des biens X et Y. On dit que le consommateur n’est pas victime d’illusion
monétaire.
- Lorsque  > 0, la hausse des prix des biens et du revenu du consommateur d’un coefficient
k affecte aussi les quantités demandées des biens X et Y, qui peuvent augmenter ou diminuer
selon la fonction de demande du consommateur. Dans le cas de la diminution, on dit que le
consommateur est victime d’illusion monétaire.

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Application :

Soit la fonction d’utilité U ( X , Y )  X 1/2Y 1/2 et la contrainte budgétaire R  XPX  YPY .


T.A.F :
1) Déterminer l’expression des fonctions de demande marshallienne des biens X et Y.
2) Déduire les arguments de ces fonctions.
3) Montrer que le consommateur n’est pas victime d’illusion monétaire.

1-3- La fonction d’utilité indirecte


Soient U  U ( X1 , X 2 ,..., X n ) une fonction d’utilité directe et V une fonction d’utilité indirecte.

U a pour arguments les quantités physiques de biens X i ,i  1, 2,..., n ( X i  0) .

Soit X i,  X i ( P1 , P2 ,..., Pn ,R) , X i,i  1, 2,..., n , les fonctions de demande marshallienne.
La fonction d’utilité indirecte est déterminée de la façon suivante : V  U ( X i ) sont alors les

prix et le revenu, c’est-à-dire V  V (P1 , P2 , Pn , R) . En définitive, la fonction d’utilité indirecte


désigne la fonction d’utilité (V) obtenue en remplaçant les arguments de la fonction d’utilité
directe par l’expression des fonctions de demande marshallienne des biens. Elle désigne
l’utilité maximale que l’on peut atteindre pour des niveaux donnés de prix des biens et de
revenu du consommateur.

1-4- L’identité de Roy


L’utilité de l’identité de Roy est d’obtenir les fonctions de demande marshallienne à partir de
V V
la fonction d’utilité indirecte, grâce à la formule : X i  / où V désigne la fonction
Pi R
d’utilité indirecte.

Application

1 1
Un consommateur a une fonction d’utilité de la forme U ( X , Y )   
X Y
Le revenu et les prix sont respectivement R, Px et Py.

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T.A.F. :
1) Déterminer les fonctions de demande marshallienne des biens X et Y.
2) Montrer que la fonction d’utilité indirecte est V  ( PX1/2  PY1/2 )2 / R où R désigne le
revenu du consommateur et Px , Py les prix des biens x et Y.
3) Vérifier l’identité de Roy.

2- Fonctions de demande hicksienne ou compensées


2-1- Détermination
Les fonctions de demande hicksienne sont déterminées à partir du programme dual du
consommateur. Elles sont obtenues au point d’équilibre du consommateur où celui-ci
minimise ses dépenses d’achat des biens X et Y sous contrainte de son utilité constante. Elles
ont pour arguments les prix des biens et l’utilité, et se présentent sous la forme :

X i  X i ( Pi ,U 0 )

Remarque : la demande hicksienne représente la demande que le consommateur exprimerait


si son revenu était ajusté de sorte qu’en dépit de la variation du prix d’un bien, il conserve son
revenu réel constant. Elle est donc appelée demande compensée.

2-2- Fonction de revenu compensé ou fonction de dépense


La contrainte budgétaire du consommateur étant donnée par la formule R   Pi X i , en

remplaçant les Xi par les fonctions de demande compensée, on obtient la fonction de revenu
compensé, soit R   Pi X i .

La fonction de dépense ainsi obtenue dépend des prix (Pi) et de l’utilité (Uo).

On démontre par ailleurs que la dérivée de la fonction de revenu compensé par rapport au prix
R
d’un bien est égale à la demande compensée de ce bien, c’est-à-dire  Xi
Pi
(Lemme de Shephard).

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2-3- Rationnement et prix implicite
Dans l’analyse du comportement du consommateur, on suppose qu’il n’y a pas de contrainte
quantitative sur le marché. Mais en réalité, il y a souvent des contraintes.
Soit U le niveau d’utilité optimale en l’absence de toute contrainte quantitative. Le prix
implicite est le prix qui prend en compte la contrainte en quantité, tout en préservant le niveau

d’utilité U .

La détermination du prix implicite P’i du bien Xi se fait de la manière suivante :


1ère étape : détermination des demandes marshalliennes et du niveau d’utilité optimale U ;

2ème étape : détermination des demandes hicksiennes pour le niveau d’utilité U , soit
X i ( Pi , Pj ,U ) et X j ( Pj , Pi ,U ) .

3ème étape : Comme Xi est limité à X°i, pour déterminer P’i, il suffit de résoudre l’équation,
X i ( Pi , Pj ,U )  X0i dans laquelle Pi est remplacé par P’i.

APPLICATION
Un consommateur a une fonction d’utilité de la forme U ( X , Y )  X 1/2Y 1/2 . La quantité
disponible du bien X est 4. On donne R = 20 et Px,y = (2 ; 5).

TAF :
1) Montrez que le consommateur est rationné par rapport à sa demande concurrentielle.
2) Déterminez le prix implicite P’X du bien X.

Section 3 : DÉCOMPOSITION DE L’EFFET TOTAL : L’EFFET DE SUBSTITUTION


ET L’EFFET REVENU
1- Généralités

L’analyse de la courbe de consommation-prix a permis de comprendre qu’une variation du


prix d’un bien ceteris paribus, se traduit par un déplacement du point d’équilibre du
consommateur, c'est-à-dire un réajustement des quantités des deux biens. Ce réajustement des
quantités demandées entre deux positions d’équilibre est appelée effet-prix ou effet-total. En
d’autres termes l’effet-total de la variation du prix d’un bien est égal à la variation totale de la
quantité demandée lorsque le consommateur se déplace d’un point d’équilibre à un autre.

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La variation du prix d’un bien modifie par ailleurs le rapport des prix des deux biens en
présence. A partir du moment où ces biens sont substituables, cela va inciter le consommateur
à réaliser une substitution entre eux. La variation de la quantité demandée consécutive à la
variation du prix représente l’effet de substitution.

Cette variation du prix entraîne également une variation du pouvoir d’achat, qui correspond à
l’effet-revenu. En d’autres termes, l’effet revenu désigne la variation de la quantité demandée
suite à la variation du pouvoir d’achat qu’entraîne la variation du prix d’un bien. Ces effets
ont été mis en évidence par Eugen Slutsky (1915) et John Richard Hicks (1946).

2- La méthode d’Eugen Slutsky (1880-1948) : mise en évidence de l’effet de substitution


à pouvoir d’achat constant
2-1- L’effet de substitution

Selon Slutsky, l’effet de substitution est la variation de la quantité demandée d’un bien
consécutive à la variation du prix de ce bien, le revenu réel du consommateur restant constant.
En d’autres termes malgré la variation du prix d’un bien, le consommateur désire accéder au
panier optimal, c'est-à-dire bénéficier du même pouvoir d’achat. Pour cela il lui faudrait une
variation compensatrice de son revenu nominal (∆R).

Application
Un consommateur a une fonction d’utilité de la forme U ( X , Y )  2 X 1/2Y 1/2
Situation 1 : PX= 2 ; PY= 5 ; R = 20.
Situation 2 : P’X = 4 ; PY= 5 ; R = 20.
T.A.F : Déterminez l’effet de substitution.
Résumé
Supposons un ménage qui dispose d’un revenu R et qui consomme deux biens X et Y ayant
pour prix respectifs PX et PY (situation initiale S0).
On suppose par la suite que le prix du bien X varie et devient P’X. On a alors :
Situation 0 : R = PxX+ PyY (1). Cette droite de budget est tangente à la courbe
d’indifférence initiale (équilibre initial E0) et coupe [OX) en R/PX.
Le consommateur désirant conserver son pouvoir d’achat initial, on aura :

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Situation 1 : R’ = XP’X+ YPY(2), avec R’ = RC = revenu compensé.
Le pouvoir d’achat étant constant, cette nouvelle droite de budget passe par l’équilibre initial
(E0) et coupe [OX) en R’/P’X.

(2) – (1) ⟹ R’ – R = X (P’X – PX), soit ΔR = XΔPX , avec ΔR la variation compensatrice du


revenu. L’effet de substitution ΔXS est la variation de la demande du bien X quand le prix de
ce bien et le revenu deviennent respectivement P’X et R’.

X S  X S ( P, X ,R , )  X ( PX ,R)

2-2- L’effet - revenu


Le revenu du consommateur passe de R’ à R, les prix restant constants (P’X, P’Y ).
L’effet - revenu (ΔXR ) est la variation de la demande du bien X quand le revenu passe de R’
à R et que le prix de ce bien reste P’X .

X R  X R ( P, X ,R)  X ( P, X ,R , )

2-3- L’effet total

ET  ES  ER  X S  X R (appelée identité de Slutsky).


X ( P, X , R , )  X ( PX , R)  X ( P, X , R)  X ( P, X , R , )
ET  X ( P, X , R)  X ( PX , R)   X
La variation totale de la demande,  X , est la variation due au changement de prix du bien X,
le revenu étant maintenu constant.
Remarque : Il est plus fréquent d’utiliser l’identité de Slutsky exprimée en taux de variation.

3- La méthode de John Hicks (1904-1989) : mise en évidence de l’effet de substitution à


utilité constante

Selon Hicks, l’effet de substitution est la variation de la demande d’un bien suite à la variation
du prix de ce bien, le niveau d’utilité du consommateur demeurant constant.

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3-1- Résolution graphique

On détermine l’équilibre initial E0, lorsque le budget du consommateur est R = XPX+YPY et


que le niveau d’utilité est U0. Avec la variation du prix du bien X qui passe de PX à P’X, on
détermine le nouvel équilibre qu’on appelle E1, la contrainte budgétaire devenant
R = P’XX + PyY. Le consommateur étant censé conserver son utilité, pour déterminer l’effet
de substitution, on dessine une droite de budget imaginaire parallèle à la deuxième
(R = P’xX + PyY) et tangente à U0.

3-2- Détermination algébrique


Algébriquement, l’analyse hicksienne peut être tenue par trois (3) raisonnements différents.

1ère Méthode
-Déterminer l’équation du chemin d’expansion (avec la nouvelle valeur du prix) ;
-Substituer l’équation déterminée dans la fonction d’utilité (U0 = U(Xi) les valeurs initiales) ;
-En déduire XS.

2ème Méthode
-Déterminer U0, avec les valeurs initiales ;
-Exprimer Y en fonction de X et U0 ;
-Déterminer la pente de la fonction obtenue,
-Déterminer la pente de la droite de budget de la période finale (période 2)
-Résoudre l’équation pente (Uà) = pente (R), puis déduire Xs.

3ème Méthode
Minimiser le revenu sous contrainte de l’utilité (avec les nouveaux prix).

min  XiPxi,1,2,..., n
Soit 
S / C U 0  U ( Xi)

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3-3- L’effet - revenu
Il correspond à la variation de la quantité demandée suite à la variation du pouvoir d’achat
qu’entraîne la variation du prix du bien.

Section 4 : NOTION D’ÉLASTICITÉ


L’élasticité est la mesure de la sensibilité d’une variable par rapport à une autre. Elle se
détermine en faisant le rapport de deux variations relatives. Elle est sans unité. On distingue
l’élasticité prix directe, l’élasticité prix croisée et l’élasticité revenu.

1- L’élasticité prix directe


1-1- Définition
C’est la variation en pourcentage (%) de la quantité demandée d’un bien résultant d’une
variation de 1% du prix de ce bien. Soit X = f (Px, Py, R). L’élasticité prix directe est :
X Px X Px
 X / PX  /  
X Px Px X
Pour des petites variations, c’est-à-dire lorsque Px  0 au lieu de calculer les variations on
dX Px
calcule les dérivées. L’élasticité est donc :  X / PX   .
dPx X

Application
La fonction de demande d’un bien est donnée par l’expression P  10 / X 1/2

TAF : déterminer l’élasticité de la demande de ce bien.

Résolution
La demande peut s’exprimer sou la forme : X  100 / P2
X P
 X / PX   . En remplaçant X par sa valeur dans l’expression  X / P , on obtient :
P X
 X / PX  200 / P3  P3 /100  2
Remarque : Lorsque les quantités demandées d’un bien et les prix varient sur différentes
périodes, le coefficient d’élasticité de la demande par rapport au prix se calcule de la façon
suivante :

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X P X P1  P 2
 X / PX  /  
X 1  X 2 P1  P2 P X 1  X 2

1-2- Interprétation des différentes valeurs

L’élasticité-prix directe est normalement négative, mais peut avoir un signe positif en cas
d’exception à la loi de la demande (effet Giffen, effet Veblen). Les différentes interprétations
de l’élasticité-prix directe sont :

 X / PX 0 signifie que le bien X a une demande normale par rapport au prix. On distingue

par ailleurs quatre interprétations possibles :


- Lorsque  X / PX   , la demande est dite parfaitement élastique ; une variation infinitésimale
du prix provoque une variation infiniment grande de la demande ;
- Lorsque   X / PX 1 , la demande est dite relativement élastique ; la variation du prix
provoque une variation finie, mais plus que proportionnelle de la demande ;
- Lorsque  X / PX  1 , on parle d’élasticité unitaire ou linéaire ; une variation du prix provoque
une variation proportionnelle de la demande ;
- Lorsque 1  X / PX 0 , la demande est dite relativement inélastique ; à une variation du
prix correspond une variation moins que proportionnelle de la demande.

 X / PX  0 signifie que le bien X a une demande parfaitement inélastique ; une variation du


prix ne provoque aucune variation de la demande. En d’autres termes la demande est
totalement insensible aux variations de prix.

 X / PX 0 signifie que le bien a une demande anormale. La demande augmente avec le


prix, ce qui est paradoxal. On distingue deux types de bien :
­ Bien de Giffen : c’est un bien inférieur, qui n’a pas de bien substitut et qui représente un
pourcentage considérable du revenu de l'acheteur. Par exemple : le pain.
- Bien de Veblen : Il a été introduit pour expliquer le gaspillage. L’effet Veblen concerne
avant tout les classes aisées, mais l'exemple des vêtements de marque auprès des jeunes moins
favorisés est une bonne illustration de l'effet Veblen.

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En somme lorsque valeur absolue de  X / PX 1 , la demande est dite élastique et lorsqu’elle
est < 1, la demande est dite inélastique ou rigide.

Remarque : lorsque l’augmentation du prix d’un bien entraîne une baisse de sa demande,
ceteris paribus, on dit que ce bien est ordinaire. Dans le cas contraire, on parle de bien de
Giffen. En effet, Sir Robert Giffen, économiste irlandais, a observé pendant la famine de
1850, une augmentation de la consommation de pommes de terre par les paysans irlandais,
tandis que le prix des pommes de terre venait d’augmenter (le paradoxe de Giffen).

2- L’élasticité prix croisée


2-1- Définition
L’élasticité-prix croisée de la demande du bien X par rapport au prix du bien Y (  X / PY ), est la
variation en pourcentage de la quantité demandée du bien X lorsque le prix du bien Y varie de
1%, le prix du bien X demeurant constant.
Elle a pour formule :

X Py X Py
 X / PY  /  
X Py Py x

2-2- Interprétation des différentes valeurs


L’élasticité croisée permet de déterminer les relations entre deux biens X et Y. Ainsi :

 X / PY 0 signifie qu’une augmentation du prix du bien Y entraine une augmentation de la


demande du bien X. Les deux biens X et Y sont donc concurrents ou substituables (substituts
bruts).

 X / PY 0 signifie qu’une hausse du prix du bien Y entraine une diminution de la demande de


X. Les deux biens sont dits complémentaires (compléments bruts).

 X / PY  0 signifie que les deux biens sont indépendants.

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3- L’élasticité - revenu
3-1- Définition
C’est la variation en pourcentage de la quantité demandée d’un bien consécutive à la variation
du revenu du consommateur (de 1%). Elle mesure donc la sensibilité de la demande aux
variations du revenu du consommateur. Elle a pour formule :

X R X R
 X /R  /  
X R R x

3-2- Interprétation des différentes valeurs


L’élasticité - revenu permet aussi de déterminer la nature des biens. Ainsi :

0  X /R 1  biens normaux (biens nécessaires) ; il s’agit de biens dont la demande varie


moins que proportionnellement aux variations de revenu ; le consommateur consomme donc
une quantité incompressible (la consommation d’un tel bien ne varie pratiquement pas) de ces
biens quel que soit son pouvoir d’achat.

 X /R 1  biens supérieurs ou de luxe ; il s’agit de biens dont la demande varie plus que
proportionnellement aux variations du revenu.

 X /R 0  biens inférieurs ; il s’agit de biens dont l’augmentation du revenu (notamment du


niveau de vie) entraîne une diminution de la quantité. Ce sont des biens de faible qualité
auxquels existent des substituts de meilleure qualité et plus chers que le consommateur ne
peut acquérir avec l’augmentation de son revenu. Beaucoup de biens alimentaires sont
concernés par cette catégorie.

APPLICATION
La consommation de riz d’un ménage passe de 50 kg à 100 kg lorsque son revenu varie de
150 UM à 400 UM. Calculez l’élasticité-revenu (  X /R ) de la demande de ce ménage.

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Réponse

L’élasticité-revenu du consommateur est :


100  50 150
 X /R  
400  150 50
50 15
 X /R   = 0,6 0 < 0,6 < 1 ⇒ le riz est un bien normal.
250 5
Interprétation : Lorsque le revenu augmente de 1%, la quantité de riz consommée augmente
de 0, 6%.

Exercice (élasticité de la demande par rapport au revenu)

Cissé gagne 400 UM par mois. Il dépense en achats de biens de consommation la totalité de
son salaire à raison de :
- 50% en alimentation ;
- 10% en logement, électricité et eau ;
- 12% en habillement ;
- 28% en dépenses diverses.
TAF
1) Quelle est sa dépense mensuelle en UM pour chacune de ces 4 catégories de dépenses ?
2) Il bénéficie d’une augmentation de salaire de 10%, les prix restant stables. Les coefficients
d’élasticité de sa demande de biens en fonction de son revenu sont :
­ 0,5 pour l’alimentation ;
­ 0 pour le logement, l’électricité et l’eau ;
­ 0,8 pour l’habillement ;
- 1 pour les dépenses diverses.
Calculer ce que sera, après l’augmentation de 10% du salaire :
a) La dépense mensuelle en UM de Cissé pour chacune des quatre catégories de dépenses ;
b) Le coefficient d’élasticité de sa demande totale.

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Solution

1) La dépense mensuelle du salarié pour chacune des quatre catégories de dépenses est :
50
- Alimentation ( D1 )   400  200 F
100
10
- Logement, électricité, eau ( D2 )   400  40 F
100

12
- Habillement ( D3 )   400  48F
100

28
- Dépenses diverses ( D4 )   400  112 F
100

Total 1 = 200F + 40F + 48F + 112F = 400 F

1) L’augmentation de 10% des salaires a entrainé une variation des salaires de


10
R  400   40 F
100
a) La nouvelle dépense en alimentation (D’) est :

D,
D1 0,5  D1  R
 0,5  D, 
R R
R
0,5  200  40
D,   10
400
D,  200  D,  D,  200  10  210F

- La nouvelle dépense en logement, éclairage, chauffage (D’’) est :

D ,,
D2
 0  AD ,,  0
R
R

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Année Académique 2021-2022
D,,  40  0  40F

- La nouvelle dépense en habillement (D’’’) est


D,,,
D3 0,8  D3  R
 0,8  D,,, 
R R
R

0,8  48  40
D,,,   3,84
400
D,,,  48  3,84  51,84 F
La nouvelle dépense en dépenses diverses (D’’’’) est :

D,,,,
D4 1 D4  R
 1  D,,,, 
R R
R
1112  40
D,,,,   11, 2
400
D,,,,  112  11, 2  123, 2 F

Total 2 = 210 + 40 + 51,84 + 123,2


Total 2 = 425,04F

b) L’élasticité de sa demande totale est :

425, 04  400
 RD  400  0, 626
440  400
400

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Année Académique 2021-2022
Section 5 : NOTION DE SURPLUS DU CONSOMMATEUR

1- Définition
Le surplus (ou rente) du consommateur désigne la différence entre la somme maximale qu’il
est disposé à payer pour obtenir une certaine quantité d’un bien et la dépense qu’il supporte
effectivement. On appelle prix de réserve ou de réservation le prix unitaire qu’il est disposé à
payer.

2- Illustration
Supposons que pour acquérir 3 unités d’un bien, un individu soit disposé à payer 4000 F par
unité. Le vendeur, lors de l’achat, facture le bien à 3500 F. le surplus (S) de cet individu est
donc : S = 3 x 4 000 – 3 500 x3 = 12 000 – 10 500 = 1 500 F. On peut l’illustrer
graphiquement de la façon suivante : (faire le graphique).
En considérant la fonction de demande de façon générale, le surplus du consommateur se
calcule de la façon suivante.
S  aireOABQ0  aire OP0 BQ0

Q0
aireOABQ0   P(Q)dQ et aire OP0 BQ0  P0 Q0
0

Q0
S   P(Q)dQ  P0Q0
0

APPLICATION

La demande d’un bien est Q = -1/2 P + 5. Un consommateur achète une certaine quantité de
ce bien au prix P0 = 2.
Calculer le surplus de ce consommateur.
Résolution :

Q   1 P  5  P  2Q  10
2

P0  2  Q0   1  2  5  4
2
4
S   (2Q  10)dQ  2  4
0

4
  Q 2  10Q   2  4
0

 42  40  8  D  16

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3- Variation du surplus du consommateur
Supposons qu’un consommateur achète une quantité Q0 d’un bien au prix P0. A t1, le prix
baisse à P1 et la quantité passe à Q1.
T.A.F :
1) Illustrer graphiquement la situation.
2) Déterminer la variation du surplus (∆S) du consommateur.

Résolution
Le surplus initial (S0) du consommateur est représenté par l’aire du triangle ABP0. Quant au
surplus final (S1), il est représenté par l’aire ACP1. La variation du surplus (∆S) est donc :
S  S1  S0
Q1 Q0
  PdQ PQ
1 1   PdQ P0Q0
0 0

Q1 Q0
  PdQ  PdQ P0Q0  PQ
1 1
0 0

Q1 Q0
  PdQ   PdQ P0Q0  PQ
1 1
0 0

Q1
S   PdQ P0Q0  PQ
1 1
Q0

4- Effets de l’intervention de l’État (la subvention et de la taxation des prix) sur le


surplus du consommateur

L’un des principes essentiels de la théorie libérale est la non intervention économique de
l’État. Mais en réalité l’État intervient pour des raisons d’ordre socio-économique, soit en
subventionnant un bien, soit en taxant un bien.

4-1- L’effet de la subvention sur le bien-être du consommateur

Supposons un consommateur dont la demande d’un bien a pour expression P = aQ + A, avec


a < 0. Le consommateur achète initialement le panier B (Q0, P0). Le gouvernement dans un
souci d’améliorer le panier de la ménagère, le prix P0 étant considéré trop élevé par les
consommateurs, subventionne le bien en question d’un taux θ (θ = taux de subvention du prix
du bien).

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T.A.F :
1) Déterminer la variation du surplus du consommateur, le nouveau panier étant C (Q1, P1).
2) Faire la représentation graphique.
3) Reprendre dans le cas d’une taxation du prix du bien en question

Résolution
θ étant le taux de subvention, on a : P1 = P0(1 - θ) ⟹ P1 car > 0. L’équilibre initial du
consommateur étant B (Q0, P0< P0), le surplus correspondant est le triangle ABP0. Avec la
subvention, le nouveau surplus est le triangle ACP1 (C étant le surplus). La variation du
surplus du consommateur due à la subvention est donc l’aire du trapèze P0 BCP1. ∆S = aire P0
BCP1 = (grande base + petite base) x hauteur/2.

4-2- L’effet de la taxation des prix sur le bien-être du consommateur

Reprenons l’exemple précédent mais supposons cette fois la taxation (imposition) du prix du
bien en question.

Résolution
L’équilibre initial du consommateur est représenté par le point B (Q0, P0). Avec la taxation du
prix du bien par l’État, le nouveau prix devient P1, tel que P1, P1BCP1> P0. Au prix P0, le
surplus est l’aire du triangle ABP0. Il devient au prix P1 l’aire ACP1. On note donc une
variation négative du surplus représentée par l’aire du trapèze P0

Section 6 : ARBITRAGE -TRAVAIL-LOISIR

1- Généralités
Le travail est une activité humaine caractérisée par une certaine pénibilité et ayant pour but de
rechercher un gain (revenu). Quant au loisir, il désigne toute activité ne donnant pas lieu
directement à un revenu. En d’autres termes, le loisir est perçu comme le temps dont on peut
librement disposer en dehors de ses occupations habituelles et des contraintes que celles-ci
imposent.

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2- Cas pratique

Soit L0 le temps maximal dont dispose un individu et R son revenu disponible, avec :
L0 = L + l où L = temps de travail et l = temps de loisir ;R = wL + W 0 où w = taux de salaire
et W0 = revenu non salarial. On suppose que cet individu achète une quantité Q d’un bien au
prix P. La contrainte budgétaire de cet individu est donc : R = P.Q
R = P.Q ⟹ wL + W0 = P.Q
⟹ w(L0 – l) + W0 = P.Q
⟹ wL0- wl + W0 = P.Q
⟹ wL0+ W0= P.Q + wl.

wL0 + W0= ressources potentielles de l’individu. Ces ressources potentielles peuvent être soit
consacrées à des dépenses de consommation (P.Q), soit utilisées partiellement sous forme de
loisir. Tout se passe comme si l’individu achetait le temps de loisir (l) à un prix égal au taux
horaire de salaire (w).

3- Programme d’optimisation

La fonction d’utilité du consommateur dans ce contexte est de la forme U = U(q, l),


où q = quantité de bien de consommation et l = la consommation de loisir.
max U (q, l )
Le programme de maximisation se présente comme suit : 
 sc wL0  W0  P.q  wl
Le lagrangien est donc :
L(q, l ,  )  U (q, l )   (wL0  W0  P.q  wl )

4- Application
Soit un consommateur qui a pour fonction de consommation U (Q, l) = Q2l, où Q est un bien
de consommation et l la consommation de loisir. Il n’a que son temps libre (L0 = 14) comme
ressource. Il peut partager ce temps libre entre le travail (L) et le loisir (l).

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TAF :
1) Quelle est sa contrainte budgétaire sachant que est le taux de salaire et P le prix du bien de
consommation.
2) Déterminer sa demande de loisir, l’offre de travail et sa demande de bien de consommation.

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Année Académique 2021-2022
QUATRIEME PARTIE : ANALYSE DU
COMPORTEMENT DU PRODUCTEUR

INTRODUCTION GENERALE
La théorie néoclassique du comportement du producteur se propose d’expliquer comment une
firme ou producteur devrait organiser sa production afin de maximiser le profit qui découlerait
de son activité. Le profit étant donné par la différence entre la recette et le coût de production,
le problème économique du producteur ou de la firme pourrait être posé comme un problème
de maximisation de la production sous une contrainte de coût ou un problème de minimisation
du coût sous une contrainte de production. En effet si la firme se trouve en face de plusieurs
technologies qui lui coûtent un même montant, elle devra choisir celle qui donnerait lieu à une
plus grande production. Par ailleurs si elle est en présence de plusieurs technologies qui
donnent lieu à un même niveau de production, elle devrait choisir celle qui coûte le moins. La
théorie postule à cet égard qu’une firme rationnelle est celle qui utilise les facteurs de
production (inputs) jusqu’au point où leur productivité marginale en valeur sera égale à ce que
le facteur lui coûte. Aussi, elle avance qu’une firme rationnelle exploite toutes les possibilités
d’affaires que l’économie ou le marché lui offre afin de maximiser son profit.

Chapitre 1 : ANALYSE DE LA PRODUCTION


Introduction
La production est l’activité de l’homme qui consiste à combiner certains biens appelés inputs
selon une technologie donnée afin de générer un bien ou un ensemble de biens (appelés
outputs). La théorie de la production cherche à analyser la façon dont l’entrepreneur, pour un
état donné de la technologie, combine différents facteurs de production pour obtenir un
produit d’une manière économiquement efficace.
L’analyse de la production se construit essentiellement autour de la fonction de production
qui, par définition, est l’expression algébrique de la relation technologique entre l’output de la
firme et les inputs qu’elle utilise pour réaliser sa production. Si l’output est représenté par Y et
les n inputs par Xi (avec i = 1, 2, …, n), la fonction de production peut, sous une forme

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générale, s’écrire : Y = f(X1, X2,…, Xn). Il est important de mener l’analyse de la production
en fonction de l’horizon temporel car dans le court terme, il existe certains facteurs de
production qui demeurent constants alors que dans le long terme, tous les facteurs deviennent
variables. Ainsi, nous procéderons à l’analyse de la production en fonction des deux horizons
temporels, à savoir le court terme et le long terme. Dans la suite du cours, nous supposerons
que la firme pour produire, utilise deux facteurs : L et K. Le premier représente le facteur
travail et le deuxième représente le facteur capital.

Section 1 : ANALYSE DE LA PRODUCTION DANS LE COURT TERME

1- Définition de la fonction de production de court terme

Dans le court terme, on note que le facteur capital (K) est fixe car ce n’est pas du jour au
lendemain qu’une firme peut revoir ses équipements ou sa capacité productive installée. Seul
le facteur travail (L) peut varier dans le court terme. Ainsi, les variations de la production sont
dues aux variations de L mais cela ne veut pas dire que K cesse d’être un déterminant de Y.
L’utilisation du facteur variable devrait se faire en tenant compte de la capacité installée,
c’est-à-dire du facteur fixe. Il ne faudrait pas le sous-utiliser ni l’utiliser de manière abusive.
La fonction de production de court terme peut alors s’écrire sous la forme suivante :
Y = f(L,K0), avec L ˃ 0 et K0 ˃ 0 et Y = quantité produite, où le capital K = K0 = ensemble
des facteurs fixes ; et le travail L = ensemble des facteurs variables.

2- Concept de productivité

Puisque le facteur capital (K) est fixe dans le court terme, il intervient comme paramètre et la
fonction de production définie ci-dessus devient fonction de (L) seul. Cette fonction de
production permet de déterminer 3 grandeurs : la productivité totale (PT), la productivité
moyenne (PM) et la productivité marginale (Pm).

2-1- Productivité totale ou produit totale (PT)


Elle se définit comme la quantité produite Y, obtenue en combinant une quantité de facteur
variable (L) avec un niveau donné de facteur fixe (K0).
PT = f(L,K0) = Y

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2-2- Productivité moyenne ou produit moyen (PM)

La productivité moyenne du facteur travail (PML) est le rapport de la productivité totale à la


quantité de travail utilisé et renseigne sur la contribution moyenne de chaque unité de travail
(L) dans la production, soit :
Y f ( L, K 0 )
PML  
L L

Exemple : Pour une fonction Cobb-Douglas notée Y  X1 X 2  , les produits moyens des deux

facteurs sont donnés respectivement par PMX1  X1 1 X 2  et PMX 2  X1 X 2  1


.
NB : il est possible que les unités de mesure de l’output et de l’input i soient discordantes.
Pour bien analyser la sensibilité de la production par rapport à l’input Xi, il est préférable de
calculer l’élasticité de la production par rapport au facteur. L’élasticité de Y par rapport à Xi
est donnée par :

PmXi dY Xi
Y , Xi   
PMXi dXi Y

Exemple : Compte tenu des résultats obtenus ci-dessus, on établit que pour une technologie
Cobb-Douglas, l’élasticité de la production par rapport au facteur X1 est égale à a et pour X2,
elle est égale à ß.

2-3- Productivité marginale ou produit marginal


La productivité marginale ou rendement factoriel est donné par le rapport des variations de la
production et de l’input dont la variation a été à la base de la variation de la production. La
productivité marginale du facteur travail (PmL) exprime donc la variation de la productivité
Y
totale résultant d’une variation de la quantité de travail. PmL 
L
Lorsqu’on est en présence d’une fonction continue et dérivable, le produit marginal est donné
par la dérivée de Y par rapport à l’input concerné, soit :

Y ,
PmL   f L ( L, K0 )
L

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Exemple : Pour la fonction de production Cobb-Douglas retenu ci-dessus (Y  X1 X 2  ) , le

produit marginal de X1 est PmX1  X1 1 X 2  et celui de X2 par PmX 2  X1 X 2  1

NB : Lorsque la productivité marginale d’un facteur devient négative, cela suppose que la
firme en fait un mauvais usage ou un usage excessif et qu’il faudrait en réduire l’usage.

3- Représentation graphique

O, M

Y ou PT

Zone I C Zone II Zone III

0 A B L

PM ou C

Pm PML

PmL

0 B, M, L

Figure 1 : Relation entre production totale, moyenne et marginale : loi de la


production marginale décroissante.

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L’observation de la figure 1 montre que dans un premier temps, le produit marginal du facteur
variable est positif et évolue à un rythme croissant. Après un certain moment, il demeure
positif mais il évolue à un rythme décroissant. Après un certain seuil, il devient négatif et
rejaillit négativement sur l’échelle de production.
Par ailleurs, il ressort des deux graphiques superposés qu’une firme rationnelle ne peut pas
organiser sa production dans la zone III car dans cette zone, le produit marginal du travail est
négatif. Il en est de même pour la zone I car dans cette zone le produit marginal est supérieur
au produit moyen du travail. Ceci suppose que dans la zone I, le facteur fixe est sous-exploité
or la rareté des ressources nous impose de ne pas gaspiller. L’utilisation du facteur fixe
devient optimale lorsque le produit moyen du travail atteint son maximum et devient égal au
produit marginal.

La zone II est qualifiée de zone de validité de la fonction de production en ce qu’elle n’est pas
caractérisée par une sous-utilisation du facteur fixe ni par une sur-utilisation anti-économique
de ce dernier. Dans cette zone, on vérifie que le produit marginal de L est positif et évolue à

un rythme décroissant, soit : f L, ( L, K0 ) 0 et f L,, ( L, K0 )  0

NB : On dit que le facteur fixe est sous-utilisé lorsque l’élasticité de l’output par rapport au
facteur variable est supérieure à un (zone I) et on dit qu’il connaît une sur-utilisation
économiquement tolérable lorsque l’élasticité est comprise entre zéro et un (zone II appelée
zone de validité). Lorsque l’élasticité devient négative, on parle d’une sur-utilisation
antiéconomique (zone III).

3-2- Loi de la productivité marginale décroissante ou des rendements décroissants

Lorsqu'on associe de plus en plus de facteur variable X1 à une quantité donnée de facteur fixe
X2, l'accroissement de la production peut être, soit plus fort, soit identique, soit plus faible que
l'accroissement du facteur variable. Même si dans la réalité toutes les situations sont
possibles, le bon sens et la logique conduisent cependant, lorsqu'on généralise, à privilégier la
dernière hypothèse, connue sous le nom de « loi des rendements décroissants » (ou loi de la
productivité marginale décroissante, ou enfin hypothèse des rendements factoriels
décroissants) qui stipule que lorsque l’on accroit l’utilisation d’un facteur de production

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variable, la quantité des autres facteurs étant fixe, on atteint un point au-delà duquel le produit
marginal décroit.

Section 2 : ANALYSE DE LA PRODUCTION DANS LE LONG TERME

Dans le long terme, tous les inputs deviennent variables. Ainsi, la firme a une plus grande
marge de manœuvre en termes de possibilité de combinaison des facteurs. Si les deux sont
substituables, la firme peut réaliser un même niveau de production en se servant de plusieurs
combinaisons d’inputs. Le lieu géométrique de ces différentes combinaisons d’inputs est
appelé isoquant ou courbe d’isoproduit.

1- Représentation graphique de l’isoquant (ou courbe d’isoproduit)

K1 A

K2 B Y0

0 L1 L2 L

Figure 2 : un isoquant

Les combinaisons A et B ne sont pas identiques mais puisqu’elles sont sur le même isoquant,
elles donnent lieu à un même niveau de production Y0. Le passage de A à B se traduit par une
diminution de la quantité utilisée de K et un accroissement de la quantité utilisée de L. Ces
variations n’ont pas altéré ou accru l’échelle de production car l’ajustement des quantités des
deux facteurs s’est fait en fonction de la productivité marginale de chaque input. Étant donné
que sur l’isoquant, le niveau de production est constant, on peut écrire : Y0 = f(L, K).

Remarque : un accroissement de l’un ou l’autre des deux (2) facteurs variables engendre une
augmentation de l’output.

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K

K1 A D
P2

K2 B

K3 C P1

0 L1 L2 L3 L

Figure 3 : Carte d’isoquants

L’output (P1) peut être obtenu indifféremment avec les combinaisons A,B ou C. L’output
(P2) est obtenu en maintenant constant le capital K1 mais en augmentant le facteur L de L1 à
L2 à L1

2- Taux marginal de substitution technique (TMST)

La différentielle de la relation Y0 = f(L, K) donne :


dY0 = PmL.dL + PmK.dK = 0. Après arrangement, on arrive à définir le taux marginal de
substitution technique (TMST) comme étant le rapport des productivités marginales des deux
inputs, soit :

dK PmL
TMS L / K   
 L PmK

Exemple : Pour une technologie Cobb-Douglas d’expression Y  L K  , le taux marginal


de substitution technique est donné par :

K
TMS L / K 
L
NB : Géométriquement, le taux marginal de substitution technique peut s’interprété comme la
pente à un point précis de l’isoquant. Lorsqu’on passe de A à B, on constate que la pente de
l’isoquant décroît. Ceci tient au fait que le facteur K en devenant relativement rare, voit son
produit marginal augmenter et le facteur L en devenant relativement abondant, voit son
produit marginal diminuer, d’où une baisse du TMST.

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3- Élasticité de substitution

Lorsque l’on passe de A à B, on observe également un changement du rapport des facteurs


(K/L) ou de la combinaison des inputs. Ceci est dû au fait que le passage de A à B se traduit
par un changement du TMST, c’est-à-dire un changement du rapport des productivités
marginales des facteurs. Pour calculer la sensibilité du rapport des facteurs par rapport au
TMST, Hicks a proposé le concept d’élasticité de substitution. Il s'agit d'un indicateur
permettant de mesurer l'impact d'une modification de la structure des prix relatifs des facteurs
sur la combinaison productive. Ce dernier s’écrit comme suit :
K K PL
d( ) d( ) d( )
TMST  ln( K / L)
 L    L  PK
dTMST K / L  ln TMST K / L PL / PK

Exemple : dans le cas d’une fonction de type Cobb-Douglas, le logarithme népérien du


 K
TMST est : ln TMST  ln  ln . En calculant l’élasticité de substitution, on obtient 1.
 L

4- Rendements d’échelle et fonctions de production homogène


4-1- Rendements d’échelle

Lorsque l’on s’intéresse à l’effet d’une variation équi-proportionnelle de tous les facteurs de
production sur l’output, on procède à l’analyse des rendements d’échelle. Ces derniers
peuvent être croissants, constants ou décroissants. Soit t, un scalaire par lequel on augmente
les quantités utilisées de tous les facteurs. On dira qu’une technologie est caractérisée par :
(1) des rendements constants à l’échelle si f(tL, tK) = tY ;
(2) des rendements croissants à l’échelle si f(tL, tK) < tY ;
(3) des rendements décroissants à l’échelle si f(tL, tK) > tY.

Dans la situation (1), on observe un accroissement de la production dans les mêmes


proportions que les inputs alors que dans la situation (2), il y a accroissement plus que
proportionnel et dans la situation (3), il y a accroissement moins que proportionnel.

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Année Académique 2021-2022
Exemple : Pour la fonction de production Cobb-Douglas notée Y  X1 X 2  , m     . La
nature des rendements d’échelle dépendra de la valeur prise par les différents paramètres. On
aura des rendements d’échelle constants si     1 , des rendements d’échelle croissants si
   > 1 et des rendements d’échelle décroissants si    < 1.

4-2- Fonctions de production homogène

Une fonction de production est dite homogène de degré m, lorsqu’en multipliant tous les
facteurs de production par une constante t, on obtient une expression de la forme :

f (tL, tK )  t m f ( L, K )
Dans ces conditions, une technologie à rendements d’échelle constants doit être homogène de
degré 1, une technologie à rendements d’échelle croissants doit être homogène d’un degré
supérieur et une technologie à rendements d’échelle décroissants doit être homogène d’un
degré inférieur de l’unité.

Propriétés des fonctions de production homogènes


1ère propriété : Les dérivées 1ères d’une fonction homogène de degré (m) sont des fonctions
homogènes de degré (m-1).
2ème propriété : Lorsqu’une fonction de production à deux (2) variables est linéairement
homogène (ou est à rendements d’échelle constants), il est possible de la ramener à une
fonction de production à une variable.

5- Théorème d’Euler
Lorsqu’une fonction de production est linéairement homogène, le théorème d’Euler s’exprime
sous forme d’identité.

Q Q
Soit Q  f ( K , L) avec  f K,  PmK et  f L,  PmL
K L
Alors f K, .K  f L, .L  Q
Sous forme générale, le théorème d’Euler établit que pour une fonction de production
homogène de degré m, on vérifie l’égalité ci-après :

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Année Académique 2021-2022
 Xif ,
Xi  m. f ( Xi )  mQ avec f Xi
,
 Pm (production marginale).

NB :
Si on suppose que les facteurs de production sont rémunérés à leur productivité marginale, en
appliquant, le théorème d’Euler, il s’en suit que la rémunération totale des facteurs est égale à
la production. En d’autres termes, la production est juste suffisante pour rémunérer les
facteurs de production. Puisque toute la production sert à rémunérer les facteurs de
production, il n’y a pas de résidu et on dit qu’il y a épuisement total du produit (règle de
l’épuisement du produit dans le cas d’une fonction de production homogène de degré 1) : dans
ce cas, le profit est nul.
Si l’on considère un producteur quelconque, son offre sera soit nulle, soit indéterminée. En
effet, puisque les rendements sont constants, le coût unitaire est le même quelque soit le
niveau de production. Donc si le prix de l’output est inférieur à ce coût unitaire, il n’y aura
pas de production : s’il lui est juste égal, il peut y avoir production mais le niveau de celle-ci
sera indéterminé. Le profit étant nul, quelle que soit la quantité produite, le prix de vente est
égal au coût.

Enfin, si le prix de l’output est supérieur au coût unitaire, l’entrepreneur a intérêt à développer
indéfiniment sa production.

Section 3 : DIFFERENTES FONCTIONS DE PRODUCTION

1- La fonction Leontief

La fonction Leontief est une fonction à facteurs ou inputs complémentaires. Supposons que
pour obtenir une unité d’output, il soit nécessaire d’utiliser v unités de capital et u unités de
travail, v et u étant des coefficients techniques, fixes. Pour obtenir une quantité Q d’output il
K L
faudra donc unités de capital et unités de travail, si la firme dispose de K et L, les
V U
quantités respectives de capital et de travail.
Le capital et le travail étant utilisés dans des proportions fixes, on peut déduire que toutes les
K L V
combinaisons efficientes vérifient les égalités : Q   K L
V U U

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V
Le rapport nous indique la proportion selon laquelle le travail et le capital doivent être
U
combinés dans la production. Les quantités de capital et de travail nécessaires pour obtenir Q
étant fixées, toute quantité excédentaire de K ou de L reste inutilisée. La fonction de
K L
production se présente alors sous la forme : Q  min( , ) , ce qui signifie que la
V U
production s’établit à un niveau défini par la quantité disponible du facteur le moins abondant.

Si on fait varier l’un des facteurs de production l’autre restant constant, le niveau de
production ne change pas. En d’autres termes la productivité marginale du facteur variable est
égale à zéro. La variation de la production est proportionnelle à la variation des inputs. Le
TMST n’a donc pas de signification ici, car la substitution n’est pas possible. Cette fonction
de production est homogène de degré un (1) car un accroissement équi-proportionnel des deux
facteurs entraîne une variation dans les mêmes proportions de l’output.

2- La fonction Cobb-Douglas

La fonction Cobb-Douglas a été introduite en 1928 par deux américains, Charles William

Cobb et Paul Douglas. Elle se présente comme suit : Q  AK  L avec :


– Q = quantité produite ;
– A= constante de dimension ou paramètre d’efficacité technologique ;
– K et L les quantités des facteurs capital et travail ;
–  et  les élasticités de la production (output) ou les paramètres de distribution du produit
(Q) par rapport aux facteurs K et L. Ainsi a indique de quel pourcentage (%) Q s’accroît
lorsque la quantité de capital augmente de 1%.
La fonction Cobb-Douglas a les caractéristiques suivantes :
– Ses isoquants sont strictement convexes par rapport à l’origine des axes ;
– Elle est homogène de degré (    ) ;
– Son élasticité de substitution est égale à 1.
Cette fonction est beaucoup utilisée à cause de la simplicité qui caractérise sa manipulation.
Mais fort malheureusement, elle présente un inconvénient majeur : elle a une élasticité de
substitution qui est toujours égale à l’unité et pourtant il est possible d’avoir des valeurs de
l’élasticité de substitution différentes de l’unité.

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Remarque :
Dans le but de faire face à la faiblesse que présente la fonction Cobb-Douglas, à savoir rendre
compte d’observations où l’élasticité de substitution mesurée avait été trouvée différente de
l’unité, la fonction CES que l’on appelle aussi SMAC (des noms de Solow, Minhas, Arrow et
Chenery) a été proposé en 1961.

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Chapitre 2 : ANALYSE DES COÛTS

Introduction
La théorie néoclassique de l’entreprise admet que l’entrepreneur recherche un maximum de
profit. Ce comportement rationnel de l’entrepreneur le conduit à définir les choix optimaux de
production et de demandes rationnelles des facteurs. L’entreprise produit donc des biens et
des services en étant soumise à une contrainte technique traduite par sa fonction de
production. L’utilisation de facteurs entraîne des coûts de production de diverses natures. Les
conditions physiques de la production, le prix des ressources et la conduite économiquement
efficiente d’un entrepreneur concourent à déterminer le coût de production d’une entreprise.
Étant donné que l’analyse de la production a été envisagée en fonction de l’horizon temporel,
nous envisagerons aussi l’analyse des coûts en deux temps. La fixité d’un facteur dans le
court terme a des conséquences sur la structure des coûts et même sur les décisions à prendre
par la firme en termes de production.

Section 1 : GENERALITES

Pour produire son output Q, la firme doit acheter les inputs L et K sur le marché des facteurs
respectivement aux prix s et u. Ainsi, on peut définir le coût de production comme étant la
somme des dépenses engagées par la firme pour générer l’output Q.
On écrit : C = s.L + u.K.
Puisque les inputs L et K concourent à la réalisation de l’output Q, on peut également
exprimer le coût de production comme une fonction de Q. On écrit alors : C = C(Q).

Section 2 : ANALYSE DES COUTS A COURT TERME

1- Le coût total de production (CT) de court terme

A court terme, le facteur K est maintenu constant alors que le facteur L est variable. Ainsi, la

fonction de coût total s’écrira : CT  s.L u.K0 .

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On distingue deux composantes du coût total, à savoir le coût variable et le coût fixe. Le coût
variable (CV) correspond au produit s.L tandis que le coût fixe (CF) correspond au produit
u.K0. Ainsi, la fonction de coût total peut aussi s’écrire :
CT = CV + CF = g(Q) + CF.

Représentation graphique

Compte tenu de l’évolution de la production dans le court terme (rendements croissants,


constants et puis décroissants), la courbe de coût total aura dans un premier temps une pente
positive mais décroissante et ensuite une pente positive et croissante. Ainsi, la courbe de coût
total aura l’allure de la lettre S renversée.

Coût CT
total

CF

0 Q

Figure 1 : courbe de coût total de court terme

1-1- Le coût fixe total (CFT)


Le coût fixe représente l’ensemble les dépenses effectuées par l’entreprise pour l’acquisition
des facteurs fixes. Ces dépenses sont en effet effectués quel que soit le niveau de production
(même si la production est nulle). Le coût fixe ne dépend donc pas de l’échelle de production.
Remarque : on peut déterminer le coût fixe moyen (CFM), qui est égal au coût fixe total
(CFT) divisé par la quantité produite (Q).
CFT
CFM 
Q

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Représentation graphique

Coûts

CFT

CFM Q

0 1

Figure 2 : courbes de coût fixe moyen et de coût fixe total de court terme

1-2- Le coût variable total (CVT)


C’est la somme des dépenses effectuées pour acquérir les facteurs de production variables.
Ces dépenses augmentent à mesure que la firme augmente sa production ; le coût variable
dépend du volume de la production Q.
Remarque : on peut déterminer le coût variable moyen (CVM), qui est égal au coût variable
total (CVT) divisé par la quantité produite (Q).
CVT
CVM 
Q

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Représentation graphique

Coûts unitaires CVM

0 Q

Figure 3 : courbe du coût variable moyen

2- Le coût total moyen (CTM) de court terme

Le coût moyen ou coût total moyen désigne le coût de production d’une unité d’output. Il
s’obtient par le rapport entre le coût total de production et la quantité d’output généré, soit :
CT
CTM 
Q
Le coût moyen étant le rapport du coût total avec le volume de production y, on arrive à
établir que le coût moyen est égal à la somme du coût variable moyen et du coût fixe moyen,
soit :
CFT CVT
CTM    CFM  CVM
Q Q
Remarque :
– A court terme, le CTM et le CVM sont distincts à cause de la présence de coûts fixes.
– Le prix du produit permettant de faire face à l’ensemble des coûts variables est la condition
de fonctionnement de l’entreprise ; le minimum du CVM est le seuil de fermeture de
l’entreprise.
– Tout comme la courbe de coût total, la courbe de coût variable aura dans un premier temps
une pente positive mais décroissante et ensuite une pente positive et croissante. Ainsi, la
courbe de coût variable aura elle aussi l’allure de la lettre S renversée.

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3- Le coût marginal

Il représente l’impact d’une variation de Q sur le coût total. En d’autres termes c’est le coût
supporté par la firme pour générer une unité additionnelle d’output. En présence de données
discrètes le coût marginal est donné par le rapport suivant :

Lorsqu’on se trouve par contre devant une fonction de coût continue et dérivable, on peut
calculer le coût marginal en calculant la dérivé de CT par rapport à Q, soit :
dCT
Cm   g , (Q)
dQ
Remarque : La dérivée du coût total est égale à celle du coût variable car la dérivée du coût
fixe est nulle. Ceci montre que la courbe représentative du coût variable aura la même allure
que celle de la courbe de coût total.
Représentation graphique

Coût marginal

Cm

CVM

Figure 4 : courbe du coût marginal

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Section 3 : ANALYSE DES COUTS A LONG TERME
1- Le coût total de long terme
1-1- Définition
A long terme, tous les facteurs de production sont variables. En considérant que la firme
n’emploie que deux facteurs, le capital (K) et le travail (L), le coût total de production sera
CT = f (K, L).
En supposant que le capital et le travail ont pour coûts unitaires respectifs u et s, le coût total
sera : CT = uK + sL.
La représentation graphique de CT est appelée courbe d’isocoût et désigne le lieu de toutes les
combinaisons des facteurs K et L que l’entrepreneur est en mesure de se procurer pour un
niveau donné de coût. En d’autres termes, l’isocoût est l’ensemble des combinaisons de (K, L)
qui entraînent le même coût total. Il a une pente négative égale au rapport des prix des
facteurs de production.

isocût

0 L

Figure 5 : Courbe d’isocût

1-2- La courbe de coût total de long terme (CTL)

La courbe de coût de long terme est une courbe enveloppe des courbes de coût de différentes
sous-périodes qui forment la longue période. Elle décrit le coût de production minimum de
chaque volume de production quand la firme peut ajuster de façon optimale tous ses moyens
de production.

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Représentation graphique

CT
CTK1
,,
C CTK2 CTK3
CTL

C,

Q1 Q2 Q3 Q

Figure 6 : courbe de coût total de long terme

-A chaque taille d’usine correspond une courbe de coût total de court terme ;
-Une usine de petite taille à un coût total = CTk1;
-Celle de taille moyenne à un coût total = CTk2;
-Et celle de grande taille à un coût total = CTk3.

Chaque niveau de production (Q) peut être atteint avec différentes tailles d’usine, et à des
niveaux de coûts différents. Par exemple, le niveau de production (Q3) peut être atteint avec
l’un des trois coûts C, C’, C’’.Si en longue période, l’entrepreneur pense qu’il devra produire
la quantité (Q3), il choisira la taille d’usine qui permet de produire avec le minimum de coût
c’est-à-dire l’usine de grande taille CTk3. En définitive, on retient que la courbe de coût total
(CT) de long terme est représentée par les minima des courbes de CT de court terme.

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2- Le coût moyen de long terme
2-1- définition
Le coût moyen de long terme est le rapport entre le coût total de long terme (CTL) et la
CT
production. Il est donné par l’expression : CT 
Q
2-2- La courbe de coût moyen de long terme (CML)
La courbe représentative du coût moyen de long terme a une concavité tournée vers le haut.
C’est une courbe enveloppe qui ramasse plusieurs courbes de coût moyen de courtes périodes.
La configuration générale des courbes de CM s’exprime par une courbe en forme de « U ».
Cette configuration particulière s’explique par la notion des rendements d’échelle.

En définitive, la courbe de coût moyen de long terme, est celle qui joint les points
minima des courbes de coût moyen de court terme. C’est la courbe-enveloppe des
courbes de CM de court terme.

En longue période, pour un niveau donné d’output, l’entrepreneur choisit la taille de


l’équipement qui lui permet de produire avec le minimum de CM (c’est la même taille qui
permet également de produire avec le minimum de CT).

NB : Les courbes de coût moyen de court et de long termes se ressemblent dans la mesure où
elles ont chacune une forme en U. Les raisons sont cependant très différentes :
– La courbe de coût moyen de court terme (CMCT) a une forme en U, parce que la baisse du
coût fixe moyen finit par être plus que compensée par la hausse du coût variable moyen, cette
dernière survenant parce que le produit moyen atteint un maximum et puis décline.
– La forme en U de la courbe de coût moyen de long terme (CM LT) s’explique par les
rendements d’échelle croissants ou décroissants dans la fonction de production.

3- Le coût marginal de long terme (CmLT)

La courbe de coût marginal de long terme indique le montant minimum d’accroissement du


coût lorsque le produit augmente et le montant maximum que l’on peut économiser lorsque le
niveau du produit est réduit. Elle a la même allure que la courbe de coût marginale de court
terme. Elle coupe la courbe de coût moyen lorsque cette dernière atteint son minimum.

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Pour un niveau donné d’output Q, le coût marginal de long terme (CmLT) doit être égal au
coût marginal de court terme (CmCT) associé à la taille optimale de l’usine pour produire une
quantité Q.

Représentation graphique

CM CmCT
Cm
CMCT CmLT
CMLT

0 Q1 Q2 Q

Figure 7 : Courbe de coût marginale de long terme

Analyse du graphique
- Le CMLT est minimum pour le volume de production tel que les courbes de CMLT et de
CmLT se coupent en un point C.
– Pour un établissement donné, au point A correspondant au produit Q1 sont égaux. Par
conséquent, le coût total de court terme et aussi égal au coût total de long terme. En effet,
CMCT= CTCT/Q et CMLT= CTLT/Q ; si CMCT, CMCT et CMLT = CMLT, alors CTCT = CTLT.
– Pour des produits plus petits que Q1, CMCT est plus élevé que CMLT et le coût total de court
terme est donc plus élevé que le coût total de long terme. Par conséquent pour un
accroissement du produit en direction de Q1, le coût marginal de long terme, quelle que soit sa
valeur, doit être supérieur au coût marginal de court terme. Donc Cm LT se situe au-dessus de
CmCT à gauche du point A.
– Pour un accroissement du produit au-delà de Q1, CMCT est supérieur à CMLT et le coût total
de court terme dépasse le coût total de long terme.

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– Le déplacement de Q1 vers les points situés à sa droite s’est fait d’un point où le coût total
de court terme et le coût total de long terme sont égaux vers des points où le coût total de
court terme excède le coût total de long terme. Par conséquent le taux de variation du coût
total ou coût marginal doit être plus important pour la courbe de court terme que pour celle de
long terme. En conclusion, on retient que quel que soit la valeur du CmLT, elle doit être
supérieure à celle du CmCT à gauche de Q1; par contre, elle doit être inférieure à CmCT à
droite de Q1.

Section 4 : LE PROBLEME ECONOMIQUE DU PRODUCTEUR

1- La maximisation du profit

Le problème économique de base de la firme est celui de maximiser son profit. Ce dernier est
fonction de la quantité d’output et a pour expression : π(Q) = RT(Q) – CT(Q).
La recette totale (RT) de l’entrepreneur est égale au produit du nombre d’unités vendues (Q)
et du prix unitaire (P) de l’output, c’est-à-dire RT = P.Q.
Son profit (π) peut alors s’écrire sous la forme : π = PQ – CT(Q). La maximisation du profit
vérifie les deux conditions suivantes :
– Condition nécessaire : on annule la dérivée première π de par rapport à Q, c’est-à-dire
d
 0  P  Cm  P  Cm (coût marginal).
dQ
d 2
– Condition suffisante : la dérivée seconde doit être négative, c’est-à-dire 0
dQ

d 2 d 2
Or  CT ,, (Q)  Cm, (Q) donc 0  Cm, (Q) 0 . On en déduit donc que le Cm
dQ dQ
doit être croissant pour la valeur de l’output qui maximise le profit.

En somme, pour maximiser son profit, l’entrepreneur doit choisir le niveau de production
pour lequel le Cm est croissant et égal au prix de vente (généralement le prix du marché) du
produit.

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2- La maximisation de la production sous-contrainte du coût total
Supposons qu’un entrepreneur dispose d’un montant M pour acheter les inputs (K, L) aux prix
unitaires respectifs u et s. Le coût total de production est donné par la relation M = uK + sL.
Si l’entrepreneur est disposé à dépenser totalement le montant M pour réaliser le niveau de
production le plus important possible, il est amené à résoudre le programme primal suivant :

maxQ  f ( K , L)

 sc M  uK  sL
Le lagrangien associé à ce programme est : £(K, L,  )  f(K, L)   (M uK sL)

3- La minimisation du coût de production (ou dépenses) sous-contrainte du niveau


d’output

L’entrepreneur s’étant fixé comme objectif la quantité Qo d’output, il veut déterminer le


coûtminimum pour atteindre cet objectif. La détermination de ce coût minimum revient à
résoudre le programme dual de l’entreprise qui se présente de la façon suivante :

min uK  sL

 s.c Q0  f ( K , L)
Le lagrangien qui en découle est : £(K, L,  )  uK  sL   (Q0  f ( K , L) o

Section 5 : GESTION OPTIMALE DE LA FIRME

Il est question ici de définir les règles à observer par une firme qui se veut techniquement
efficace et qui voudrait faire une entrée réussie sur le marché dans lequel elle aura à vendre
son output.

1- Gestion optimale dans le court terme


1-1- Méthode algébrique
Puisque K est fixe dans le court terme, le problème de maximisation du profit peut s’écrire :
Max  P. f ( L, K0 )  (sL  uK0 )

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En dérivant la fonction de profit par rapport à L et en annulant la dérivée, on obtient :
P.PmL – s = 0. Le produit P.PmL donne le produit marginal en valeur du facteur L, c’est-à-
dire le produit marginal du facteur L valorisé au prix auquel l’output est vendu, c'est-à-dire P.
On peut établir que : P.PmL = s.
Cette relation suggère que la firme arrêtera d’engager des unités additionnelles du facteur L
lorsque le produit marginal en valeur du facteur sera égal à ce que le facteur coûte à la firme.
On peut encore établir qu’à l’équilibre, on doit observer l’égalité : PmL = s/P.
Ceci laisse entendre que la firme rémunère le facteur en fonction de sa productivité marginale.
Cette dernière correspond donc au salaire réel, c’est-à-dire au rapport salaire sur prix.

1-2- L’approche graphique


La fonction de profit peut être écrite comme suit :
  P.Q (sL  uK0 )
En résolvant cette relation par rapport à Q, on obtient l’isoprofit qui est une équation qui met
en relation Q et L afin de réaliser un même niveau de profit.
  uK 0 s
Soit Q   L
P p
En dérivant Q par rapport à L, on obtient la pente de la droite d’isoprofit qui est positive et
égale à s/P. On peut ainsi dans un plan (L, Q), représenter des droites parallèles représentant
différents niveaux de profit. Si on ajoute au graphique la courbe de production, la quantité du
facteur (L) à utiliser (L*) est celle qui égalise la pente de la fonction de production (PmL) à la
pente de la droite d’isoprofit (s/P). En d’autres termes, L* s’obtient au point de tangence entre
la courbe de production et la droite d’isoprofit.

2- Gestion optimale dans le long terme


Dans le long terme, le problème de maximisation du profit s’écrit comme suit :
max   Pf ( L, K )  (sL  uK )
En dérivant la fonction de profit par rapport à L et K et en annulant les deux dérivées, on
obtient :
P.PmL – s = 0 ou P.PmL = s,
P.PmK – u = 0 ou P.PmK = u.
Ces résultats montrent que la firme devrait engager les deux facteurs en fonction de leurs
productivités marginales. En faisant le rapport des productivités marginales en valeur des

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deux facteurs, on arrive à établir que pour être techniquement efficace, la firme doit égaliser
son taux marginal de substitution technique au prix relatif des facteurs, soit :
PmL s
TMST   .
PmK u

Graphiquement, cette condition d’équilibre est établie en faisant un rapprochement de la pente


de l’isoquant avec la pente de l’isocoût.

3- Taille optimale de la firme


Admettons que l’on soit en présence d’une firme utilisant deux facteurs de production : L et
K. Dans le court terme, le facteur K est fixe alors que L est variable. Pour réaliser la
production Q0 dans le court terme, la firme doit utiliser la quantité du facteur LCT compatible
à la norme fixée par K.

Isoquant
K

KCT A

E Isocoût

K*

Q0

0 LCT L* L

Figure 8 : Équilibre du producteur

Il se dégage de ce graphique que la réalisation de Q0 dans le court terme (point A) coûte plus
cher que si l’on se trouvait au point E, point qui peut être envisagé dans le long terme. Si la
firme avait la possibilité de faire varier le facteur K, elle l’aurait fait mais sa fixité ne le lui
permet pas. Ceci montre que dans le long terme, la firme a la possibilité de s’ajuster de

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manière à maximiser son profit alors que dans le court terme, c’est le facteur fixe qui
détermine les possibilités de production.

4- Sentier d’expansion de la firme


Dans le graphique ci-dessous, on considère que le budget dont dispose la firme pour réaliser
sa production croît, ce qui lui permet aussi d’accroître sa production. Durant ce processus
d’accroissement de la firme, elle est appelée à observer les règles d’une bonne gestion. Ainsi,
elle est tenue de respecter le critère d’efficacité technique : TMST = s /u.

K
Sentier d’expansion

E3

E2

E1

0 L

Figure 9 : Sentier d’expansion de la firme


On définit le sentier d’expansion de la firme comme étant la courbe ou droite faite des
différentes combinaisons d’inputs permettant à la firme de réaliser son équilibre pour
différents niveaux de budget alloué à sa production. Elle peut être représentée par une
fonction appelée eutope et qui met en relation K et L à partir de la condition d’efficacité
technique.
Exemple : Pour une technologie Cobb-Douglas Q  L K  , à l’équilibre on doit vérifier
K s
l’égalité suivante : TMST   .
L u

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s
Ainsi, on peut écrire l’eutope comme suit : K  L
u
NB : Si l’on veut passer de la fonction de coût donnée par la somme des dépenses engagées
pour disposer des deux inputs à une fonction de coût qui dépend du niveau de l’output Q, on
se sert de l’eutope.
Exemple : En considérant la fonction de production de type Cobb-Douglas ci-dessus, on
arrive à établir que :
 
-le coût total est donné par : CT  sL


     
-la fonction de production s’obtient par : Q   L , ce qui permet de déduire que
  u 
 /(   )
 u 
L  Q1/(   )
s

 /(   )
   u 
CT  s  Q1/(   )
-
 s

Section 6 : OFFRE DE LA FIRME

La fonction d’offre met en relation l’output et le prix auquel il est vendu sur le marché. La
décision d’offrir un bien sur le marché dépend du niveau du prix auquel il est vendu ainsi que
de la structure des coûts. La firme devra en effet observer l’égalité P = Cm.

1- Le seuil de fermeture
Si le prix du marché est PF, un niveau de prix qui permet à la firme de ne couvrir que son coût
variable, la firme pourrait arrêter de produire car la perte qu’elle va enregistrer sera identique
à celle qu’elle connaîtrait si elle ne produisait pas.

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2- Le seuil de rentabilité
Si le prix se situe au niveau de PR, un niveau de prix qui permet de couvrir toutes les charges
productives, on dira que la firme est au niveau du seuil de rentabilité car elle ne réalise ni
bénéfice ni perte.

3- La courbe d’offre
Généralement c’est pour des niveaux de prix supérieurs à PR que la firme décide d’offrir son
bien sur le marché. On conclut ainsi que la courbe d’offre de la firme correspond à la partie
ascendante de la courbe de coût marginal en partant du seuil de rentabilité.

Cm
CM

CVM

PR

PF

0 Q

Figure 10 : courbe d’offre de la firme

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