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Dans l'acte 3 scène 2 de "Phèdre" de Racine, La tirade du personnage éponyme

constitue un moment saisissant où l'héroïne dévoile avec intensité ses tourments


émotionnels et sa lutte contre la cruauté divine. À travers ses mots chargés
d'émotion, Phèdre explore des thèmes universels tels que l'amour interdit et la
rébellion contre des forces supérieures. Cette analyse approfondie se penchera sur
trois axes majeurs : l'amour interdit et la honte, la cruauté divine, ainsi que la rébellion
contre l’autorité divine. En examinant ces axes, nous mettrons en lumière la
complexité des sentiments de Phèdre et la tragédie inhérente à ses expériences.

Comment la tirade de Phèdre dévoile-t-elle les dilemmes de la cruauté divine, de


l'amour interdit et de la rébellion, contribuant ainsi à l'exploration tragique de la
condition humaine ?

Axe1 : l'amour interdit et la honte.

Racine utilise un vocabulaire intense et expressif pour dépeindre l'amour interdit de


Phèdre. L'interjection "Ô toi" souligne le caractère passionné et intense de l'appel de
Phèdre à Vénus, Elle exprime son désespoir cela renforce le ton dramatique de la
scène. Le terme "la honte" dans « qui vois la honte où je suis descendue » montre que
Phèdre est consciente de la nature immorale de ses propres sentiments (son amour
interdit pour Hippolyte), elle ressent une culpabilité morale intense en raison de cet
amour interdit. L’idée de Phèdre étant « descendue dans la honte » crée une image
mentale montrant une chute morale profonde. La question rhétorique « suis-je assez
confondue ? » exprime l'introspection profonde de Phèdre et son doute quant à son
propre état d'esprit, elle explore sa propre culpabilité et mesure l'ampleur de sa
détresse émotionnelle, ce qui est souligné par l’adverbe « assez » ce questionnement
met en évidence la complexité psychologique du personnage. En somme
l'exploration par Racine de l'amour interdit et de la honte à travers les mots expressifs
de Phèdre révèle une profonde détresse émotionnelle, soulignant la complexité
morale du personnage.

Axe2 : la cruauté divine.


Dans cette scène la cruauté divine se dévoile à travers le désespoir de Phèdre, offrant
un aperçu poignant des tourments infligés par des forces supérieures. L’adjectif
« implacable » dans l’expression « implacable Vénus » met l'accent sur un aspect
plus sévère de la déesse, souvent associé à la cruauté, cela peut être interprété
comme une perception de la déesse en tant qu'entité qui ne tolère pas les
transgressions. Dans Le vers « Tu ne saurais plus loin pousser ta cruauté » l’usage de
l’expression « plus loin » prouve que Vénus a déjà infligé une cruauté considérable à
Phèdre, le verbe « pousser » crée une image de l'extension de cette cruauté vers des
limites extrêmes, cela souligne l'idée que Vénus, en tant que déesse, a délibérément
intensifié la douleur de Phèdre au point où elle ne peut être exacerbée davantage. La
phrase « Ton triomphe est parfait, tous tes traits ont porté. » L'adjectif « parfait »
souligne que le triomphe de Vénus n'est pas seulement une victoire, mais une victoire
complète et sans défaut, Phèdre reconnaît que tous les plans de la déesse ont été
menés à bien, ce qui intensifie le sentiment d'impuissance de Phèdre face à la cruauté
divine. En parlant des « traits » de Vénus dans « tous tes traits ont porté » ils
représentent les moyens par lesquels la déesse exerce sa vengeance, et Phèdre admet
que chacun de ces traits a atteint son objectif. Phèdre utilise le terme « Cruelle »
dans le vers « Cruelle, si tu veux une gloire nouvelle, » pour s'adresser directement à
Vénus. Cette apostrophe renforce l'idée que Phèdre ressent la cruauté divine de
manière personnelle.
Axe 3 : La rébellion contre l’autorité divine.
La rébellion d'Hippolyte contre l'autorité divine incarne un affrontement symbolique
entre volonté humaine et puissance divine. Dans la phrase « si tu veux une gloire
nouvelle, Attaque un ennemi qui te soit plus rebelle » l’expression « gloire nouvelle » ici
Phèdre implique que la déesse pourrait trouver un défi plus digne en s'attaquant à quelqu'un
d'aussi rebelle qu'Hippolyte. Cela sous-entend que défier l'autorité divine est une action
d'une grande audace et d'une grande importance. Hippolyte est décrit comme un "ennemi
plus rebelle". Cette caractérisation renforce l'idée qu'il est un opposant farouche à
l'influence et au pouvoir de Vénus, soulignant son indépendance et sa résistance aux
émotions et désirs traditionnellement associés à la déesse. Dans le vers « Hippolyte te fuit,
et bravant ton courroux » le verbe d’action « bravant » suggère un acte de défi ou de
résistance, cela met en évidence un caractère de force chez Hippolyte, qui se dresse contre
les puissances divines. « Ton courroux » fait référence à la colère de Vénus. Dans la
mythologie, défier une divinité peut entraîner des conséquences sévères. Le vers « Jamais à
tes autels n'a fléchi les genoux » met en lumière un contraste frappant entre Hippolyte et
Phèdre ; Hippolyte représente une certaine moralité stoïque et une force de caractère face à
l'amour et à la passion, tandis que Phèdre symbolise la vulnérabilité humaine et la faiblesse
face aux mêmes forces. L'expression "ton nom semble offenser" suggère une aversion
d'Hippolyte pour même la mention de Vénus. Cette réaction est significative de son rejet non
seulement des avances de la déesse, mais aussi de son pouvoir et de son autorité en général.
Les "superbes oreilles" d'Hippolyte symbolisent sa fierté et son indépendance, il trouve
offensant même l'évocation de son nom, ce qui souligne son désir de se distancer
complètement des forces divines. Le vers « Déesse, venge-toi, nos causes sont pareilles. »
l’appellation « déesse » sert à attirer l’attention de Vénus envers le discours de Phèdre ce qui montre
son importance, peut aussi être interprétée comme un ton de supplication ; Phèdre, dans son
désespoir, se tourne vers une force supérieure pour obtenir de l'aide, reflétant son état
d'impuissance et de détresse. Le verbe au mode impératif « venge-toi » reflète l'état émotionnel
intense de Phèdre. Elle est dépassée par ses propres sentiments d'humiliation et de désespoir, et
dans cet état, elle cherche à voir d'autres souffrir comme elle a souffert, en particulier Hippolyte,
l'objet de son amour non partagé. « Nos causes sont pareilles. » fait référence à la similarité des
situations de Phèdre et la déesse ; Hippolyte a rejeté l'influence de Vénus et, par extension, l'amour
de Phèdre. L’expression « Qu'il aime ! » est un souhait de Phèdre pour que Vénus fasse tomber
Hippolyte amoureux, comme elle-même a été contrainte d'aimer. Cela reflète le désir de Phèdre de
voir Hippolyte soumis à la même force irrésistible.
En somme, la tirade de Phèdre explore avec une profondeur émotionnelle et une finesse
tragique les thèmes de l'amour interdit, de la cruauté divine et de la rébellion contre
l'autorité des dieux. Racine, à travers un langage intense, expose les tourments de Phèdre
face à un amour prohibé et à la cruauté implacable de Vénus. La rébellion d'Hippolyte ajoute
une dimension de défi audacieux à l'autorité divine. Ainsi, la scène dépeint une toile
complexe de désespoir, de culpabilité et de résistance, capturant la tragédie inextricable des
relations entre les mortels et les puissances divines.

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