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Titre Dans l’antiquité= chant ou poème en l’honneur d’un dieu ou d’un héros/Chrétiens=chant à la

louange de Dieu/Moyen-Age= chant poème célébrant une personne ou une chose.


Titre annonce ce qui va être célébré. Montre aussi la fascination du poète pour la beauté.
Vers 1 Question s’adressant à la beauté (sans ?), ici questionne l’origine de la beauté par le premier mot
du poème le verbe « viens ».
Poète s’adresse directement à la beauté en la tutoyant. Il la personnifie donc dès le début du
poème.
L’interrogation montre aussi que la beauté est un mystère sur lequel s’interroge le poète.
Ce vers 1 est séparé en deux hémistiches qui présentent deux termes antinomiques « ciel
profond »// »abîme » > antithèse qui montre bien le caractère ambivalent de la beauté, la dualité
de la beauté (idée que l’on va retrouver souvent dans le poème).

Vers 2 Débute par un rejet « ô Beauté » > mise en valeur par le rejet qui montre l’importance de celle-ci
mais aussi la vénération éprouvée par le poète. Vénération exprimée aussi par l’interjection
lyrique ou apostrophe rhétorique « ô » > le poète interpelle la beauté. La majuscule personnifie la
beauté. Personnification renforcée par le GN « ton regard ».
Regard qualifié grâce à deux adjectifs qualificatifs (contenus dans le même hémistiche)« infernal et
divin » > 2 adjectifs opposés (infernal veut dire : qui vient de l’enfer) antonymes qui montrent
bien la dualité de la beauté. La conjonction de coordination « et » montre bien le caractère
indissociable du bien et du mal dans la beauté> les contraires sont liés.
Vers 3 L’adverbe « confusément » renvoie aux antonymes >conséquence : la dualité est inextricable. La
beauté est facteur de désordre, elle brouille les pistes et subvertit les valeurs traditionnelles. On
retrouve également les antonymes « le bienfait et le crime » qui montrent à nouveau la dualité de
cette beauté. (+ conjonction de coordination « et »). (contenus dans le même hémistiche).
Vers 4 Une comparaison est mise en valeur par le verbe « comparer » et fait référence à l’ivresse (thème
important chez Baudelaire, cf section « Vin »). La beauté perd donc le poète qui s’y perd comme
ivre de la dualité qu’elle entraine.
er
Conclusion 1 quatrain= le poète présente ici l’objet de sa vénération. Vénération qui perd le poète car la beauté
n’est pas si facile à appréhender, elle est double et c’est là le travail du poète que de réussir à la saisir.
[Ce quatrain est construit pour les vers 2,3 et 4 sur la construction en enjambement]
Vers 5 Le vers 5 débute avec le pronom personnel « tu », qui montre bien que le poète s’adresse à elle et
le verbe « contenir » fait référence à tout ce qu’elle est. Encore une fois une antithèse est utilisée
ici « le couchant et l’aurore » : antithèse qui met en valeur en plus de sa dualité le fait que la
beauté est tout, elle est partout même quand on la croit absente (cf Une Charogne).
Le GN « ton œil » est la première référence à un sens , ici celui de la vue (on en aura d’autres plus
loin dans le poème)> la référence aux sens montre bien que la beauté est partout et qu’elle peut
être sentie par tous les sens.
Vers 6 Ici c’est l’odorat qui est évoqué « des parfums » et le verbe utilisé « tu répands » fait référence à
nouveau au fait qu’elle inonde tout, qu’elle peut être partout. Le deuxième hémistiche du vers
amène une comparaison étonnante, et assombrit en fait le premier hémistiche par cette référence
au « soir orageux ». Ces parfums évoqués dans ce vers amène également l’idée sous-tendue par la
personnification, que la beauté est comparée à une femme, une femme sensuelle, c’est donc une
allégorie de la beauté qui est mise en place.
Vers 7 Ici deux nouveaux sens vont être évoqués le toucher par « tes baisers » et le goût par « ta
bouche ». Ainsi la beauté est bien partout et peut être ressentie par tous les sens. La vue n’est pas
le seul concerné.
L’image du « philtre » montre que la beauté a le pouvoir de transformer le poète, elle a un pouvoir
sur le poète puisque cette potion est destinée à susciter l’amour. Il ne maîtrise donc pas ce qu’il
ressent et est assujetti au pouvoir de la beauté par une action magique de celle-ci.
L’amphore renvoie encore une fois à l’ivresse qui se dégage du ressenti du poète face à la beauté
(l’amphore est une vase à deux anses servant souvent à conserver le vin).
Vers 8 Vers en enjambement avec le vers précédent. Ici on peut voir par le caractère encore une fois
étonnant de l’image choisie : la beauté a même le pouvoir d’inverser les règles. Ici la parallélisme
de construction met en évidence un paradoxe, le héros devient lâche (on peut presque parler ici
d’oxymore entre « héros » et « lâche »et l’enfant courageux. La beauté fait perdre le sens
commun, et la modernité de Baudelaire est donc aussi d’inverser la logique. La beauté brouille
donc à nouveau les pistes et subvertit les valeurs traditionnelles. L’antithèse entre les deux
adjectifs « lâche »  et « courageux » renforce encore un peu l’idée de dualité de la beauté.
Dans ce 2ème quatrain, le poète personnifie encore davantage la beauté en faisant d’elle une femme sensuelle mais
montre aussi le pouvoir de celle-ci sur ce qui l’entoure mais surtout sur le poète.
Vers 9 Le 3ème quatrain débute comme au 1er vers par une adresse directe à la beauté, le poète la
questionne à nouveau sur son origine : vient-elle du bien ou du mal ? « gouffre noir » étant la
métaphore de l’enfer. Ici encore une fois l’antithèse entre le « gouffre » et les « astres ».
Vers 10 « Le Destin » est comparé à un chien (image dégradante) : immense pouvoir car le Destin chez les
Grecs étaient au-dessus des Dieux ce qui constitue un paradoxe.
La beauté est encore ici comparée à une femme sensuelle irrésistible par le GN « tes jupons »,
sont-ce ses charmes qui font qu’on la suit ? l’adjectif « charmé » amène cette idée, cette
soumission serait due au pouvoir de séduction de la beauté (charmé peut également vouloir dire
envouté, donc comme pour « philtre » on a ici à nouveau l’idée de sorcellerie). De plus la
comparaison avec le « chien » > idée de soumission à la beauté, soumission avilissante pour le
poète.
Vers 11 Dans ce vers > encore présence d’une antithèse « joie » et « désastre », la beauté serait
indifférente à ce qu’elle engendre, à ce qu’elle laisse derrière elle (verbe « semer » qui est déjà
une référence au hasard car quand on sème c’est un peu sans logique). La locution « au hasard »
montrant bien l’irresponsabilité de la beauté puisqu’elle assujetti le destin lui-même. Elle est donc
encore une fois facteur de désordre (ce qui contredit le vers « Là tout n’est qu’ordre et beauté »
du poème « L’Invitation au voyage »), elle brouille encore les pistes pour le poète qui ne sait plus
qui elle est vraiment, ce qu’elle est vraiment.
Vers 12 Encore une antithèse entre « tout » et « rien », ce vers montre bien la tyrannie de la beauté, qui
serait à la base de tout mais est jugée à nouveau d’irresponsabilité par le poète « ne réponds de
rien ». La beauté est tout mais elle est aussi celle qui assujetti tout et donc même le poète.
Dans ce 3ème quatrain, la beauté montre donc un caractère tyrannique, elle est celle qui gouverne à la destinée de
tous et le poète lui-même devient l’esclave de celle-ci car il est incapable de savoir si elle est le bien ou le mal.
Vers 13 La dualité de l’origine de la beauté est encore ici évoquée « ciel » ou « enfer ». L’interjection
« qu’importe » en fin de vers en apposition derrière la virgule, montre bien que le poète en réalité
ne se soucie pas réellement de l’origine de la beauté, c’est le plaisir lié à celle-ci qui est important.
Baudelaire ne juge pas la beauté selon si elle fait le bien ou le mal (même s’il associe
« qu’importe » à des antithèses). Baudelaire est prêt à pactiser avec le diable pour atteindre la
beauté, si cela peut lui permettre de l’atteindre et de vivre quelques moments de jouissance
esthétique. Cette interjection se retrouve une deuxième fois au vers 17 et au vers 18 qui marque
l’insistance du poète sur cette idée.
Dans le poème de la Section « Mort », « Le Voyage », on retrouve la même forme de vers en
s’adressant à la mort « Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu’importe ? / Au fond de
l’Inconnu pour trouver du nouveau ! » vers 143.
Vers 14 Affirme du caractère monstrueux de la Beauté par la triple épithète « énorme, effrayant, ingénu ».
Le premier adjectif est intéressant en ceci qu’il dit que la Beauté se définit par son absence de
norme. Elle est étymologiquement hors (ex) des normes (norma), ce qui l’éloigne à coups sûr des
préceptes classiques de régularité et d’une certaine conception du beau qui veut que celle-ci
réside dans l'harmonie et la proportion des formes. On se rappellera que, selon Baudelaire, « le
beau est toujours bizarre » (voir note) et surtout qu’il laisse entrapercevoir un idéal, celui « D'un
Infini que j'aime et n'ai jamais connu » vers 16.
Les trois adjectifs utilisés mettent bien en évidence le caractère protéiforme de la beauté et
toujours avec des caractères mélioratifs (« ingénu ») et dévalorisants (« effrayant », « énorme »).
Ce faisant, Baudelaire reprend de Platon l’idée que le beau est la clef d’un infini à la fois entrevu et
insaisissable, mais alors que chez Platon, le beau coïncide avec le bon (c’est que l’on appelle le
fameux kallos kaghatos), la question de son origine ruine l’opposition entre le bien et le mal, le
ciel et l’enfer parce que précisément la Beauté est au-delà de toute dimension morale. Son
incarnation terrestre dispense à la fois le « bienfait » et le « crime » et prend la forme d’une
femme fatale à la fois satanique et divine.
Oxymore « beauté »/ « monstre » : la beauté fascine aussi par son aspect monstrueux=
rapprochement inhabituel qui montre la modernité de Baudelaire.
Répétition de l’interpellation déjà utilisée au vers 2 qui montre le désir d’engager le dialogue avec
la beauté.
Vers 15 Vers qui débute par une proposition subordonnée hypothétique : hypothèse d’un soulagement
rendant « l’univers moins hideux » v.20 mais l’interrogation finale du vers 20 montrera le
caractère incertain de ce soulagement. Dans ce vers, le « je » apparait par le pronom « m’» et les
deux pronoms personnels « je » au vers 16. Le poète est donc vraiment présent et est celui qui
s’interroge et qui interpelle la beauté pour mieux la saisir (mais est-ce possible ?).
Vers 16 Voir vers 14

Vers 17 On retrouve donc l’interjection « qu’importe » mais elle est accompagnée d’un point
d’interrogation qui peut entrainer l’idée de doute, cela importe-t-il si peu ? Ici le poète s’interroge
et cette question se poursuit sur tout le quatrain.
Un vocabulaire élogieux est utilisé ici « Ange » vers 17, « fée aux yeux de velours » vers 18,
« unique reine » vers 19 > c’est ici l’admiration du poète qui est évoquée, il valorise la beauté.
Vers 18 « Qu’importe » ouvre le vers et par la répétition, le poète renforce l’idée de la moindre
importance de l’origine, de l’identité de la beauté. Présence ici d’une proposition subordonnée
hypothétique qui répéte l’hyptohèse d’un soulagement rendant « l’univers moins hideux » vers
20.
Vers 19 Accumulation « Rythme, parfum, lueur » est une référence aux sens qui sont si présents dans le
poème
Reste que la Beauté — toute synesthésique (« Rythme, parfum, lueur ») — rend le monde (au
moins un instant moins laid, mais surtout supportable (au « je » que l’avant-dernière strophe avait
introduit). Les « instants moins lourds » renvoient évidemment à la pesanteur spleenétique du
temps.
L’adjectif « unique » montre bien la soumission du sujet à sa reine, le poète serait l’esclave
assujetti, le vassal et la beauté, la suzeraine.

Vers 20 Voir vers 15. Le point d’interrogation montre bien le caractère incertain de ce qu’avance le poète.
Il n’est pas capable même à la fin du poème de livrer une certitude sur la beauté. Elle reste
insaisissable, son origine n’est pas vérifiable. Alors peut-être est-elle une peu du bien un peu du
mal ? Mais la conclusion du poème montre que la beauté améliore le monde et permet de résister
au spleen. Donc peu importe son origine.

Le champ lexical du divin est très présent dans le poème avec « ciel » vers 1 et 13, « divin » vers 2, « astres » vers 9,
et « Dieu » vers 17 opposé au champ lexical du diabolique avec « abîme » vers 1, « infernal » vers 2, « gouffre noir »
vers 9, « enfer » vers 13 et « Satan » vers 17. Par ces champs lexicaux, Baudelaire s’interroge sur l’origine de la
beauté. Emane-t-elle du bien ou du mal ? Cette interrogation ouvre le poème mais qui ouvre aussi le 3 ème quatrain, le
4ème et le 5ème. C’est ici le caractère insaisissable de la beauté qui est mis en évidence en regroupant les notions
contraires du bien et du mal.

Conclusion

Ce poème allégorique est une sorte de communication que fait Baudelaire à l’égard de son propre art. Il assure selon
son cœur, la bouleverse, lui fait parfois mal mais le fascine en même temps. Baudelaire rejette la conception
classique de la Beauté. Celle-ci est désormais terrible. Elle regarde du côté du Diable et du crime. Mais c’est à travers
le chaos esthétique que Baudelaire réinvente au milieu du 19ème siècle la poésie, ouvrant la voie à Rimbaud,
Verlaine et Mallarmé.

Dans hymne à la beauté, le poète n'associe plus la beauté à la statue froide et figée mais à un être hybride
entre ange et démon, Dieu et Satan. La connotation morale est tout à fait absente . Le poète en proie au
spleen est en quête d'ivresse, de sensations fortes et la beauté est finalement comparable au vin ouvrant les
sens sur le paradis artificiel. Baudelaire manifeste une certaine dévotion pour la beauté car elle favorise
l'évasion hors du temps qui emprisonne l'homme et le rappelle à son tragique destin de mortel.  La beauté
devient donc un remède pour lutter contre le spleen, l'ennui, l'angoisse. C'est une certaine forme de l'Idéal
qui promet à l'homme consolation.

Dans Hymne à la beauté, nous n'avons pas de connotations morales mais seulement esthétiques.

Notes :

Dans Curiosités esthétiques (recueil de textes de critiques d’art), Baudelaire écrit : « Le beau est toujours
bizarre. Je ne veux pas dire qu’il soit volontairement, froidement bizarre, car dans ce cas il serait un monstre
sorti des rails de la vie. Je dis qu’il contient toujours un peu de bizarrerie, de bizarrerie naïve, non voulue,
inconsciente, et que c’est cette bizarrerie qui le fait être particulièrement le Beau. C’est son immatriculation,
sa caractéristique. Renversez la proposition, et tâchez de concevoir un beau banal ! »

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