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Publicité et esthétique
J. Morange
Morange J. Publicité et esthétique. In: Droit et Ville, tome 7, 1979. Colloque Bayonne - 17 juin 1978 : La réforme de la
responsabilité et de l'assurance en matière de construction. pp. 101-123;
doi : https://doi.org/10.3406/drevi.1979.1013
https://www.persee.fr/doc/drevi_0396-4841_1979_num_7_1_1013
PAR
J. MORANGE
Maître
àdelaDroit
Faculté
dePublic
conférence
de Droit agrégé
de Limoges.
Publicité et esthétique, comment comprendre le rapprochement
des deux termes ?
Signifie-t-il que la publicité doit être belle, ou tout au moins ne
pas être laide ? Dans ce premier sens, ce sera le problème des publi¬
citaires. Il n’est pas à négliger et un certain nombre d'entre eux en
est conscient. La profession compte de véritables artistes, même
si, comme c'est souvent le cas, on ne les reconnaît qu’après leur
mort. Une récente exposition n'a-t-elle pas été consacrée avec
succès à l'«art de l'affiche » ? Dans un autre domaine, celui de la
politique, l'Espagne démocratique a pu exposer officiellement, pour
la première fois depuis la guerre civile, les affiches traduisant de
façon particulièrement vivante, les idéologies opposées de l'époque.
A condition qu'elle renonce à la banalité ou à la vulgarité, l'affi¬
che peut faire sourire, s’intégrer à la vie quotidienne ou faire rêver.
Elle peut constituer un élément de gaieté et de décoration. Les
couloirs du métro, beaucoup de halls de gare et d'autres lieux publics,
ont tout à gagner à leur présence.
D'autres supports publicitaires présentent un intérêt différent. Les
enseignes et les divers éléments du mobilier urbain sont liés à
l’atmosphère et à l’histoire d'une ville et d'une région. Il est sur¬
tout dommage qu'une trop grande uniformisation dans les for¬
mes et dans les matériaux aient largement fait disparaître cette
harmonie et cette intégration à la vie régionale et locale. La
publicité lumineuse a largement contribué à créer ou à maintenir
des centres d’attraction ou d'animation. Elle peut même être à l’ori¬
gine d’un certain sentiment de sécurité lorsqu'elle pallie la carence
en éclairage de certaines agglomérations. Les enseignes fournis¬
sent parfois, en outre, des renseignements utiles aux consom¬
mateurs.
Mais cette vue un peu idyllique de l’insertion de la publicité
dans le tissu urbain est, hélàs, loin de correspondre toujours à
la réalité.
Pour quelques publicités réussies, combien choquent, agacent ou
enlaidissent ! Il est rare que l'on prenne conscience globalement
104 DROIT ET VILLE
bles(1)des
Décret
voiesn°ouvertes
76-148 du
à la11 circulation
février 1976publique.
relatif à la
J.O.
publicité
14 février
et aux
1976.enseignes visi¬
(2) On trouvera l'ensemble des textes importants annexés au Rapport de la
Commission des Affaires culturelles (N° 448 seconde session ordinaire de 1977-1978.
Annexe au procès-verbal de la séance du 16 juin 1978).
Les textes actuellement en vigueur relatifs à l'affichage et à la publicité sont
regroupés dans la brochure n° 1081 éditée par les journaux officiels.
DROIT ET VILLE 105
ment
Pavard
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63,
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1978).
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12
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J.O.
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Débats
un
communes
mettre
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à la
parle¬
libre.
dis¬
un
DROIT ET VILLE 109
Elles ont pour but de créer des zones dans lesquelles l'affichage
est, soit interdit, soit réglementé de façon plus ou moins sévère.
Toute publicité est interdite :
— sur les immeubles classés parmi les monuments historiques
ou inscrits à l'inventaire supplémentaire;
— sur les immeubles qui, bien que non classés ni inscrits, pré¬
sentent un caractère esthétique, historique ou pittoresque et figurent
sur une liste arrêtée par l'autorité administrative;
— sur les monuments naturels et dans les sites classés;
— dans les parcs nationaux et les réserves naturelles.
Cette mesure qui vise à protéger les édifices et les lieux les plus
précieux est traditionnelle. Elle existe, à quelques variantes près
depuis 1943 (9), voire pour certains monuments depuis 1902.
Le projet de 1978 reprend également une distinction dégagée depuis
1943 mais en allant plus loin. Désormais, les principes applicables
seront totalement opposés selon qu'on se trouve « hors aggloméra¬
tion » ou dans une agglomération.
Dans le premier cas, c’est le principe de l'interdiction qui est posé.
On estime que la publicité est en quelque sorte incongrue en rase
campagne et qu'elle y constitue une atteinte beaucoup plus grave
qu’ailleurs à l'environnement.
Des « périmètres » ne peuvent en effet être institués « qu'à proxi¬
mité d'établissements commerciaux, industriels ou de centres artisa¬
naux ou dans des groupements d'habitations, notamment dans des
lieux dits importants » (10).
Au contraire, dans les agglomérations, la publicité est « admise »
ce qui ne signifie aucunement qu'elle y soit totalement libre.
Elle sera normalement soumise à un régime de droit commun (n).
Celui-ci résultera, plus précisément, des prescriptions contenues dans
un décret pris en Conseil d’Etat. Mais en accord avec le gouverne¬
ment, le Sénat a tenu à prévoir, dans la loi même, « que le pouvoir
réglementaire indiquerait notamment en fonction des procédés et des
dispositifs utilisés, les emplacements où la publicité peut être réa¬
lisée sur les bâtiments et sur les toitures, les conditions d'implan-
les (9)
nationaux
sites
Article
inscrits
et réserves
5; On
et ylestrouvait
naturelles
abords une
des
n’yinterdiction
monuments
figuraient pas.
(tombée
historiques.
en désuétude)
Par contre,concernant
les parcs
(10) Projet, article 5 : Il est précisé que les mots agglomération et lieu-dit
sont pris en matière de circulation routière.
(11) Projet, article 6.
110 DROIT ET VILLE
(12) Il est bien sûr impossible de connaître pour l’instant ce que serait le
contenu des textes d’application puisque la loi n'est pas encore votée définitive¬
ment. fait
Carat On peut
au nomtoutefois
de la Commission
en avoir unedes
idée
Affaires
en se culturelles
reportant au(p. rapport
44) : de M. J.
« A l’intérieur des agglomérations la publicité non lumineuse ne pourrait dans
le régime de droit commun :
a) être apposée sur les monuments naturels, les plantations, les lampadaires,
les poteaux électriques ou télégraphiques ou sur les équipements intéressant la
circulation routière, ferroviaire, maritime ou fluviale;
b) être apposée sur les murs des bâtiments d’habitation autres que les murs-
pignons aveugles ou les murs-pignons ne comportant qu'un minimum d'ouver¬
tures;
c) être apposée sur des clôtures autres que les murs ou les palissades;
d) masquer en tout ou partie une baie ou un élément de décor architectural;
e) s'élever au-dessus de l'égout du toit ou de la corniche de la terrasse en te¬
nant lieu;
f) dépasser les limites du mur qui la supporte;
g) dépasser de plus d'un tiers de sa hauteur la limite supérieure de la palissade
qui la supporte;
h) dépasser une surface unitaire de 4 mètres carrés pour les publicités apposées
le long des voies dont la largeur est inférieure à 12 mètres, cette surface étant
portée à 16 mètres carrés pour les voies dont la largeur est égale ou supérieure
à 12 mètres;
i) dépasser une surface totale sur un même mur ou une même palissade, supé¬
rieure à un pourcentage déterminé de la surface du mur ou de la palissade;
j) pour la publicité sur portatif, être située à l'intérieur des communes de
moins de 10.000 habitants;
k) pour la publicité sur portatif, être située à moins de 10 mètres de la limite
un
mitoyenne
bâtimentdud’habitation;
fonds sur lequel est installé ce dispositif et d’un fonds comportant
1) pour la publicité sur portatif, être située à moins de 50 mètres d'une autre
publicité
cités apposées
sur ce
dosportatif
à dos sur
préexistant,
un même lepanneau.
portatif pouvant supporter deux publi¬
dans
Desdes
dérogations
cas limites.à » ces prescriptions pourraient être accordées par le maire
DROIT ET VILLE 111
2) Dispositions particulières.
loi.(13) La liste en est arrêtée par l’autorité administrative, cf. article 5 du projet de
(14) Rapport de la Commission des Affaires culturelles, p. 53.
(15) Actuellement les trois-quarts de Paris intra muros constituent des sites
inscrits.
l'Est... Parmi les quartiers concernés, on trouve Pigalle, les gares du Nord et de
112 DROIT ET VILLE
important que celui des simples affiches (16). En conséquence ils sont
soumis à un régime d'autorisation.
C'est à ce régime que seraient soumis les véhicules publicitaires.
— Les véhicules publicitaires
Il peut s'agir d'aéronefs faisant de la publicité à basse altitude, de
bâteaux circulant le long des plages munis d’un dispositif publici¬
taire. L’Administration ne disposait à leur égard d'aucun moyen
de droit (I7).
Le risque était grand surtout que certaines firmes utilisent de
plus en plus des véhicules terrestres, automobiles en particulier.
Compte tenu de la réduction globale de l'espace publicitaire résultant
de la loi, il était à craindre que certains publicitaires ne soient
tentés d'utiliser au maximum ce type d'équipements. Cela aurait pu
être un moyen idéal de tourner la loi. Il aurait suffi de faire sta¬
tionner régulièrement un tel véhicule dans un lieu où, par ailleurs,
l’affichage est totalement interdit. Aussi le texte voté prévoit-il
que ce type de publicité peut être interdit, soumis à autorisation ou à
des prescriptions
Conseil d'Etat. générales dans des conditions fixées par décret en
Mais, et ceci a été très clairement précisé lors des débats, la loi
ne visera aucunement les mentions portées sur les véhicules uti¬
litaires des entreprises artisanales ou commerciales dont le minis¬
tre a précisé qu’elles étaient assimilables à des enseignes ou à des
enseignes publicitaires.
relles,
décret
droit
(16) commun.
Celles-ci
M.
soient
J. Carat
respectées.
seraient
(rapport
données
Selon
p. 45),
le rapporteur
àcescondition
dispositifs
de que
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certaines normes
pourraient des affaires
dans le fixées
régime
cultu¬
par
de
a) être réalisés sur les monuments naturels, les plantations, les poteaux électri¬
ques ou télégraphiques ou sur les équipements intéressants la circulation routière,
ferroviaire, maritime ou fluviale;
b) dépasser les limites du mur pignon ou du garde corps du balcon qui les
supporte;
c)être réalisé à moins de trois mètres du niveau du sol;
d) s'élever au-dessus de la ligne de l'égout du toit ou de la corniche de la ter¬
rasse en tenant lieu qu’après avis de l’architecte des bâtiments de France, ni
dépasser cette ligne de plus du sixième de la hauteur de la façade de l'immeuble,
le dépassement ne pouvant excéder six mètres.
(17) En l’absence de texte précis, le Conseil d’Etat appliquait ici les principes
généraux de sa jurisprudence en matière de police. L'autorité administrative
peut réglementer une activité pour des motifs tirés des nécessités de la sécurité
publique à condition qu’elle ne le fasse pas de manière générale et absolue. Elle
ne peut pas prendre l’initiative de l’interdire, ou de la soumettre à autorisation
lorsque le législateur n’est pas intervenu.
C.E. 2 avril 1954 Petronelli, Rec. 208 à propos des véhicules publicitaires.
sur
C.E.
les nuages.
15 décembre 1961, Chiaretta Rec. 709 à propos de la publicité lumineuse
DROIT ET VILLE 113
II. QUI ?
La réglementation de la publicité
(18) Des explications très précises sont données dans le rapport de la Commis¬
sion des Affaires culturelles (p. 63) :
— Le dispositif comportant les mentions « A. Durand bijoutier horloger » ou
les mentions « Société de construction mécanique X » est une enseigne.
— Le caisson lumineux qui comporte la mention « Montres X » et est fixé sur
la devanture de la bijouterie ci-dessus, est une enseigne publicitaire.
114 DROIT ET VILLE
en—outre
comme
mentions
Le dispositif
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les
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enseigne
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J.O. véhicules
p. 2497-2498.
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Au
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et
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(20) On en
de vote.
trouve une illustration, parmi d’autres, dans les motivations des
J.O. Sénat, débats parlementaires, Séance du 11 octobre 1978, p. 2530.
116 DROIT ET VILLE
(21) Ce sont, en effet les associations locales d'usagers prévues à l’article 19,
c'est-à-dire celles qui remplissent les conditions fixées à l'art. 40 de la loi du
10 juillet
code de l'urbanisme.
1976 sur la protection de la nature ou aux articles L 121-8 et L 160-1 du
(22) J.O. Sénat-Débats parlementaires 5 octobre 1978 p. 2370.
Le(23)
projet
R. Ducos-Ader
de loi sur l'affichage.
: « Technique
D. 1978
législative
Chronique
en matière
p. 272. de libertés publiques ».
118 DROIT ET VILLE
dement
tout
clairement
jusqu'à
J.O.
(24)ouCette
Sénat-Débats
l’interdiction
àpartie
l'article
indiqué
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DROIT ET VILLE 119
HI. Comment ?
Le Contrôle de la publicité
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(28) Cf.ad’Etat
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DROIT ET VILLE 121
1) Un renforcement de la dissuasion.
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(34)
(35)
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(38)
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J.O.
J.O.,
Rapport
Article
1978,
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Débats
28débats
p.21.
32
et
2517
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Article
parlementaires
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DROIT ET VILLE 123
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