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Réussir l'ECN-Médecine Moléculaire (Ellipses, 2019)
Réussir l'ECN-Médecine Moléculaire (Ellipses, 2019)
La Médecine Moléculaire est à la Biologie Médicale, ce qu'est la Médecine Interne pour les grandes spécialités
cliniques. Elle est une composante essentielle du diagnostic, du traitement et du suivi des pathologies
associant le diagnostic biochimique et la biologie moléculaire du génome de manière totalement intégrée.
Elle s'appuie sur les examens de biochimie de première ligne, la biochimie spécialisée, la biologie moléculaire
du génome, ainsi que sur les biomarqueurs innovants et les technologies de pointe d'étude du génome, de
l' épigénome, du transcriptome, du protéome et du métabolome. La Médecine Moléculaire est donc un
maillon central de la pratique médicale d'aujourd' hui et de la Médecine de précision de demain. Elle apporte
les éléments essentiels pour disséquer les mécanismes, diagnostiquer les pathologies et définir la prise en
charge thérapeutique adaptée et personnalisée à chaque patient.
Je tiens à saluer l'importance du travail collectif réalisé par le Collège National de Biochimie et Biologie
Moléculaire Médicale pour produire cet ouvrage collectif destiné aux futurs médecins. Il apportera aux
étudiants du deuxième cycle des études médicales, le corpus de connaissances requises pour l'utilisation
des examens de Biochimie et Biologie Moléculaire dans la pratique de leur future spécialité médicale,
chirurgicale ou biologique, à l'orée de leur entrée dans le troisième cycle des études médicales. Il leur
permettra, lorsqu'ils seront devenus des praticiens, de mieux utiliser la biologie médicale dans leur démarche
diagnostique et thérapeutique. Il représente également un Vade-Mecum indispensable pour celles et ceux
qui orienteront leur cursus de troisième cycle vers la préparation de l'option de spécialité de Médecine
Moléculaire du DES de Biologie Médicale
Pr Jean-Louis GUEANT
Université de Nancy, président de la section 44 Biochimie-Biologie Moléculaire, Physiologie,
Biologie Cellulaire et Nutrition du CNU-Santé
Président de la Commission Nationale de Biologie Médicale
PRÉFACE DES AUTEURS
ITEM 265 A
TROUBLES DE L'ÉQUILIBRE
ACIDO-BASIQUE ET DÉSORDRES
HYDROÉLECTROLYTIQUES
Jean-Paul CRISTOL et Nicolas PALLET
1. INTRODUCTION
Le pH est le logarithme inverse de la concentration en ions H• (pH= - loglO [H•]). Le pH normal chez
le sujet sain est de 7,40 ± 0,02.
La stabilité du pH dépend de 3 principaux mécanismes :
les systèmes tampons de l'organisme :
► systèmes tampons intra-cellulaires. Ce sont surtout les protéines et les ions phosphates;
► (principalement osseux) et l'hémoglobine;
► systèmes tampons extracellulaires : le principal système tampon est représenté par le couple
bicarbonates-CO2 extracellulaire.
pH C03 H- PaC0 2
Acidose
Métabolique Diminué < 22 mmol/1 <36 mmHg
Respiratoire Diminué >26 mmol/1 >44 mmHg
Alcalose
Métabolique Augmenté >26 mmol/1 >44 mmHg
Respiratoire Augmenté < 22 mmol/1 <36 mmHg
Il. ACIDOSES
A. Réponse à l'ITEM
Devant une acidose il faut :
■ savoir identifier le trouble initial et la réponse compensatrice;
■ savoir classer les acidoses métaboliques en fonction du trou anionique;
■ savoir conduire le traitement des acidoses métaboliques et respiratoires.
A. Séméiologie
La polypnée traduit la réponse adaptative (dyspnée de Kussmaul), qui permet de réduire la
concentration de CO2 dans le sang. Elle est ample, profonde, et survient malgré l'absence
de pathologie pulmonaire associée (dyspnée sine materia).
Éléments de gravité :
la polypnée peut en soi provoquer une détresse respiratoire par épuisement respira
toire chez des sujets à risque;
Il l'acidose peut induire une hyperkaliémie, parfois menaçante, par transfert du potas
sium du secteur intracellulaire au secteur extracellulaire;
■ l'existence d'une acidémie profonde (pH < 7,25) impose l'hospitalisation en secteur
de soins continus.
B. Apprécier la compensation
En cas d'acidose métabolique simple, la baisse des CO 3 H- entraîne une baisse prévisible
de la PaCO2 selon une des deux formules suivantes :
Si la PaCO 2 est plus importante que l'attendu (ou le /J,. PaCO2 plus faible), il faut suspecter
un trouble mixte associant un trouble ventilatoire limitant la compensation.
12 Troubles de l'équilibre acido-basique et désordres hydroélectrolytiques
Trou anionique (mmol/1) = Na+ - (CO 3 H- + Cl-) il est voisin de 12+4 mmol/1
J - --
(ou 16 mmol/1 si le K+ est pris en compte)
■ Un trou anionique > 16 est élevé. On peut considérer que la baisse des bicarbonates
est liée à une consommation par un excès d'acide organique. L'acide organique est
un donneur d'H+ et l'anion résultant est responsable de l'augmentation du trou
anionique. L' électroneutralité est alors respectée sans modification du Chlore. Les
acidoses à trou anionique élevé sont donc des acidoses normochlorémiques.
160 .............................................................................................................................
■ Défaut d'élimination d'acides: c'est le cas des insuffisances rénales aiguës ou chro
niques. Dans ce cas, les anions indosés sont les phosphates, sulfates ou les acides
organiques.
■ Apport exogène: intoxications: l'intoxication à l'aspirine (acide acétylsalicylique),
les alcools toxiques: méthanol, éthylène glycol, propylène glycol, l'acide nalidixique.
---
En condition physiologique: le TAu est légèrement positif. Il est le reflet de la
concentration de NH4+ urinaire.
En situation d'acidose:
Si le TAu est négatif, l'élimination de NH4 • est importante, la réponse rénale est adaptée
(le rein réagit en augmentant l'excrétion urinaire de ff+ sous la forme de NH4 •). En
effet l'équilibre ionique est neutre et le NH4 • n'est pas pris en compte dans le calcul
du TAu. Ainsi le TAu devient négatif (CI- > Na• + K•). Le pouvoir d'acidification du
rein est intact, la cause de l'acidose est extrarénale. Le TAu est légèrement positif. Il
est le reflet de la concentration de NH4 • urinaire.
En effet l'équilibre ionique est neutre et le NH4+ n'est pas pris en compte dans le calcul
du TAu. Ainsi le TAu devient négatif (Cl- > Na+ + K•). Le pouvoir d'acidification du
rein est intact, la cause de l'acidose est extrarénale.
Si le TAu est positif, l'élimination de NH4 • est faible, la réponse rénale est inadaptée,
il s'agit alors d'une cause rénale.
Causes extrarénales d'acidose métabolique à trou anionique plasmatique normal:
► il s'agit essentiellement de diarrhées qui induisent une perte digestive de
bicarbonates. Les autres causes sont essentiellement les anastomoses urété
ro-intestinales dans le cadre des néo-vessie (mais l'interprétation du bilan
14 Troubles de l'équilibre acido-basique et désordres hydroélectrolytiques
urinaire est difficile car il intègre aussi les sécrétions de la muqueuse digestive),
les apports d'acide chlorés (chlorhydrate d'arginine, chlorure d'ammonium
...) ou les acidoses de dilution.
+
Acidose Métabolique
a
no,mal
..
,ii---Trou Anlonlque
.....
HH,l Ankn
.....
HH,l Anions
O. Conduite du traitement
La prise en charge des acidoses métaboliques ne s'envisage que par le traitement étiologique
lorsqu'il est possible.
Acidose métabolique aiguë :
► un pH < 7,10 est une urgence vitale;
► assurer la clairance du CO2 au besoin par la ventilation mécanique (en cas d'épui
sement respiratoire) ;
► assurer l'alcalinisation en cas d'acidose métabolique aiguë associée à une hyperk
aliémie ou au cours d'une intoxication par des produits à effet stabilisant de
membrane. Le soluté le plus utilisé reste le bicarbonate de sodium isotonique
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 A 15
(14 %0). L'alcalinisation est discutée dans les acidocétoses diabétiques pour
lesquelles l'insuline et la réhydratation suffi.sent ou dans les acidoses lactiques;
► l'épuration extra rénale est indiquée en cas de surcharge volémique.
A. Définition
L'acidose respiratoire est définie par une acidose (pH < 7,38) avec une augmentation
de la PaC02 • L'hypercapnie est toujours secondaire à une hypoventilation alvéolaire
et l'hypoxémie est donc systématique.
En situation chronique, il existe une compensation rénale visant à élever les bicarbonates
et corriger le rapport [C03 H-]/PaC02 • Le pH dépend de l'importance de l'hypercapnie
et de la compensation métabolique. Cette dernière est en général retardée de 24 à
48 heures, ce qui permet de distinguer les hypoventilations alvéolaires aiguës (sans
compensation) des acidoses chroniques (avec compensation).
B. Sémiologie
Les signes cliniques sont liés à l'hypercapnie (agitation, troubles de vigilance, hypertension,
sueurs, vasodilatation avec érythème) et à l'hypoxémie (polypnée, cyanose, détresse
respiratoire).
On peut retrouver des signes de la maladie initiale : cardiaque, pulmonaire ou neurologique.
Éléments de gravité :
la sévérité est liée à l'importance de l'hypoventilation alvéolaire et à la pathologie
sous-jacente plus qu'à l'acidose elle-même;
■ une hypoventilation alvéolaire avec acidémie (pH < 7,35) doit inciter à une prise en
charge spécifique dans un secteur de soins intensifs ou de réanimation.
C. Démarche Étiologique
Il convient de distinguer les acidoses respiratoires d'origine neuromusculaire des acidoses
respiratoires d'origine thoracopulmonaire.
Causes neuromusculaires
► Les atteintes du système nerveux central peuvent être envisagées : vasculaire,
infectieuse ou traumatique. Les médicaments dépresseurs de la commande respi
ratoire (morphiniques ou autre hypnotiques) sont une cause classique. Enfin, il
existe des causes acquises (syndrome de Pickwick) ou congénitales (syndrome
d'Ondine) d'hypoventilation alvéolaire centrale.
Il Causes thoracopulmonaires
► Elles sont liées aux affections aiguës ou chroniques thoracopulmonaires. Les causes
chroniques sont représentées par les insuffisances respiratoires chroniques liées à
un mécanisme obstructif ou restrictif. L'ensemble des causes d'insuffisance respi
ratoire aiguë ou de décompensations aiguës d'une pneumopathie chronique, peut
conduire à une acidose respiratoire qui témoigne d'un épuisement respiratoire.
16 Troubles de l'équilibre acido-basique et désordres hydroélectrolytiques
D. Prise en charge
Le principe de traitement repose sur le traitement de l'hypoventilation alvéolaire et la prise
en charge étiologique. Une assistance ventilatoire invasive ou non invasive doit être discutée.
V. ALCALOSES
A. Réponse à l'ITEM
Devant une alcalose il faut :
■ savoir identifier le trouble initial et la réponse compensatrice;
■ savoir classer les alcaloses métaboliques et comprendre l'approche par analyse du
volume extracellulaire;
■ savoir conduire le traitement des alcaloses métaboliques et respiratoires.
A. Définition
L'alcalose métabolique est dé.finie par une alcalose (pH > 7,42) liée à une augmentation des
bicarbonates plasmatiques. Elle est en général associée à une hypoventilation alvéolaire
compensatrice.
La situation d'une alcalose métabolique dépend d'un des trois mécanismes suivants:
1) perte d'acides d'origine urinaire ou digestive;
2) apport de bicarbonates ou d'un autre alcalin au milieu extracellulaire;
3) perte defluides riches en Chlore/pauvre en bicarbonate (vomissements).
Son maintien est favorisé par une déshydratation extracellulaire du fait des mécanismes
impliqués. Cette déshydratation est responsable d'une activation du système rénine
angiotensine-aldostérone qui majore l'alcalose ou l'entretient. Elle est aussifavorisée par
une déplétion en chlore. En.fin l'hypokaliémie et l'alcalose métabolique sont souvent associées
et tendent à se majorer l'une l'autre.
B. Séméiologie
Les signes cliniques liés à l'alcalose sont non spécifiques et rares :
signes neurologiques avec troubles de la vigilance;
■ signes musculaires (faiblesse musculaire, tétanie ou myoclonies) liées à la baisse du
calcium ionisé;
■ signes cardiovasculaires en partie liés à l'hypokaliémie de transfert qui accompagne
l'alcalose (troubles du rythme auriculaire ou ventriculaire);
■ signes respiratoires (hypoventilation alvéolaire) secondaire à la réponse ventilatoire.
C. Apprécier la compensation
La réponse compensatrice peut être prédite afin de détecter d'éventuelles formes mixtes
Si la PCO2 est moins élevé que ne le prédit la formule, il faut suspecter un trouble mixte
avec alcalose respiratoire associée.
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 A 17
D. Démarche diagnostique
1. Alcalose de contraction du volume extracellulaire
La perte de Volume extracellulaire (perte de NaCl) est avant tout rénale :
► excès de diurétiques;
► tubulopathie congénitale (Bartter ou Gitelman, équivalent à la présence d'un
« diurétique endogène»);
► hypercalcémie ou hypomagnésémie.
■ Perte de NaCl d'origine mixte, liée à des pertes de digestives hautes (vomissements,
aspirations gastriques) :
► perte de Cl digestive et perte de Na rénale.
■ Perte extrarénale
► Adénome villeux.
E. Principe de traitement
Le traitement est avant tout étiologique :
correction des anomalies hydroélectrolytiques associées : correction de la déshydra
tation extracellulaire, d'une hypokaliémie, d'une hypercalcémie;
■ arrêt des diurétiques de l'anse, des alcalins...;
traitement d'un hyperminéralocorticisme.
Les alcaloses métaboliques sévères (pH > 7,60) engagent le pronostic vital et nécessitent
une prise en charge en milieu spécialisé.
18 Troubles de l'équilibre acide-basique et désordres hydroélectrolytiques
A. Définition
L'alcalose respiratoire est définie par une alcalose (pH > 7,42) liée à une hyperventilation.
La compensation métabolique est en général retardée.
B. Séméiologie
Comme pour l'alcalose métabolique, on peut noter:
■ signes neurologiques avec troubles de la vigilance. L'alcalose peut aggraver une ischéme
cérébrale;
■ signes musculaires (faiblesse musculaire, tétanie ou myoclonies) liées à la baisse du
calcium ionisé;
■ signes cardiovasculaires en partie liés à l'hypokaliémie de transfert qui accompagne
l'alcalose (troubles du rythme auriculaire ou ventriculaire);
■ éléments de gravité:
► la sévérité est liée à l'importance de l'alcalose, aux conséquences vasculaires qui
en découlent, et aux troubles métaboliques associés. Enfin, au cours des alcaloses
respiratoires avec pathologie pulmonaire, la sévérité de cette dernière est en général
au premier plan.
C. Démarche diagnostique
Les alcaloses respiratoires sont principalement liées aux pathologies pulmonaires ou à
une atteinte centrale.
1. Insuffisance respiratoire aiguë avec hyperventilation
Elle concerne potentiellement l'ensemble des pathologies pulmonaires (pneumopathies
bactériennes, œdème aigu du poumon, syndrome de détresse respiratoire aigu, pneumopathies
infiltratives diffuses) et vasculaires (embolie pulmonaire). L'hypoxémie est en général le
principal mécanisme de l'hyperventilation.
2. Pathologies centrales
Il peut s'agir en général d'atteintes centrales (encéphalites infectieuses ou méningoencéphalites,
tumeurs, traumatismes), d'encéphalopathies hépatiques, d'intoxications aux salicylés ou
d'hyperventilations psychogènes (anxiété, douleur).
D. Principe de traitement
Il s'agit avant tout de corriger l'hyperventilation. Ainsi, la correction de l'hypoxémie suffit
le plus souvent à corriger l'alcalose.
19
FICHE FLASH
d Le pH normal varie de 7,38 à 7,42. Il est déterminé par la concentration relative d'acide (CO2 ) et
de base (bicarbonates).
0 La prise en charge repose principalement sur la recherche étiologique.
GJ Les acidoses métaboliques se définissent par une baisse du pH artériel(< 7,38)(acidémie) avec une
baisse des bicarbonates(< 22 mmol/1).
La classification des acidoses métaboliques repose sur le calcul du trou anionique. Les acidoses à trou
anionique augmenté ou acidose normochlorémique sont secondaires à:
1, l'augmentation de la production endogène (acidose lactique, acidocétose);
't un excès d'apport d'acide par intoxication;
3 un défaut d'élimination d'acide par insuffisance rénale. Les acidoses métaboliques à trou anionique
normal sont des acidoses hyperchlorémiques. Elles sont essentiellement dépendantes, soit de pertes
digestives basses de bicarbonates, soit d'une acidose tubulaire. L'approche thérapeutique est avant tout
étiologique et les indications à l'alcalinisation sont rares au cours des acidoses métaboliques.
Id Les acidoses respiratoires reflètent une hypoventilation alvéolaire d'origine neuromusculaire ou
thoracique et sont des urgences thérapeutiques.
d Les alcaloses métaboliques dépendent de mécanismes d'entretien - alcalinisation poursuivie, toxique,
déshydratation extracellulaire, hypokaliémie ou hypercalcémie, dont la prise en charge permet le plus
souvent de contrôler le trouble acido-basique.
20
Type IV
Type 1 (Distale) Type Il (Proximale)
Hyperkaliémique
Défaut de reabsorption Défaut de production de NH/
Mécanisme Défaut d'excrétion des H•
des C0 3H- par hypoaldostéronisme
pH urinaire > 5,5 Variable <5,5
TA urinaire »O Discrètement> 0 >»Ü
Kaliémie Basse Basse Élevée
Néphrocalcinose Syndrome de
Signes
Ostéomalacie Fanconi
associés
Lithiase Ostéomalacie
Uropathies obstructives
Sjéigren Hyporéninisme et hypoal
Lupus Myélome dostéronisme
Drépanocytose Cystinose IEC/ARA2/AINS
Étiologie Certaines hypercal- - Ténofovir Spironolactone, amiloride
ciurie lsofosfamide Insuffisance surrénale
Amphotéricine B Acétozolamide Anticalcineurine
Formes héréditaires Triméthoprine
Pentamidine
Si la PaCO 2 est plus basse ou plus élevée que la valeur prédite, il faut alors suspecter
un trouble respiratoire associé, une alcalose ou une acidose associée. La seule esti
mation d'une PaCO 2 "abaissée", compensatrice ne suffit donc pas et une PaCO 2
plus haute que la valeur prédite témoigne d'une acidose mixte à prendre en compte
dans la prise en charge thérapeutique.
Dans le cadre des alcaloses métaboliques, la compensation pulmonaire peut-être
prédite par l'équation suivante
-
Si la PaCO 2 est moins élevée que ne le prédit la formule, il faut suspecter un trouble
complexe avec alcalose respiratoire surajoutée.
21
QCM
,
C, Le trou anionique urinaire est utile dans les acidoses hyperchlorémiques
0, Les vomissements peuvent être responsables d'une acidose à trou anionique normal
E Les acidoses tubulaires sont responsables d'une acidose hyperchlorémique
Réponse: C
► 5. Une femme de 28 ans présente après un accouchement normal, une douleur basitho
racique droite avec une polypnée au lever du lit
Des gaz du sang réalisés en urgence donnent :
• pH: 7,49 • Bicarbonates : 25 meq/1
• PCO2 : 25 • SaO2 : 85 %
• PO2 : 75
Cocher les propositions justes
A Les GDS montrent une alcalémie d'origine respiratoire
B. La PO2 est normale
C, Il existe une hyperventilation secondaire à l'hypoxémie
0 La PCO2 est normale
E Il existe une hypoxie hypocapnie évocatrice d'embolie pulmonaire
Réponses : A, B, E
ITEM 265 B
EAU ET SEL
Jean-Paul CRISTOL et Nicolas PALLET
1. INTRODUCTION
Balance hydrosodée et principe de régulation.
Dans l'organisme, l'eau représente 50 à 70 % du poids du corps (soit 42 litres pour un homme de 70 kg).
Il existe des variations physiologiques, la proportion d'eau étant plus faible en fonction de l'âge, de
la masse grasse et du sexe féminin.
Elle se répartit entre le secteur intracellulaire (40 % soit 28 litres) et le secteur extracellulaire (20 % soit
14 litres) lui-même subdivisé en secteur interstitiel (15 % soit 11 litres) et circulant (5 % soit 3 litres).
Il existe aussi un secteur trans-cellulaire, ensemble de petits volumes, virtuels en physiologie, comme
l'eau des séreuses (péritoine, plèvre, péricarde). Toutefois, en condition pathologique, ce secteur virtuel
peut devenir très important (ascite) et peut participer au « troisième secteur».
Le principal cation du secteur extracellulaire est le Sodium (Na+ ). Le maintien du volume extracellulaire
est assuré par le capital sodé, c'est-à-dire la quantité de Na+ dans l'organisme. Les troubles du volume
extracellulaire vont être dépendants d'une dysrégulation de la balance sodée. En condition normale, la
balance sodée est régulée par un système de détecteurs, les volorécepteurs situés sur le système sanguin
de haute pression (crosse aortique, glomus carotidien, macula densa...) ou de basse pression (veine cave,
oreillette droite). Le volume interstitiel ne possède pas de volorécepteur. Les modifications de ce secteur
n'entraîneront aucune réponse du système informatif et aucune réponse rénale. Ainsi, un patient cirrhotique
24 Eau et sel
peut développer une ascite et stocker plusieurs litres d'eau et de sel dans son péritoine sans
que le rein soit «informé» de cette augmentation de volume extracellulaire. La stimulation
des volorécepteurs entraîne une réponse informative en particulier du système Rénine
Angiotensine Aldostérone (SRA). L'aldostérone est l'hormone de la rétention sodée.
Enfin le rein est le principal organe effecteur. En conditions physiologiques, les apports
alimentaires sont compris entre 85 et 170 mmol/24 heures (soit 5 et 10 g/24 heures), les
sorties sont presque exclusivement rénales. Si la balance sodée est déséquilibrée, toute
variation du capital sodé de 140 mmol entraîne une variation du VEC de 1 litre et une
variation de poids d'un kg. L'eau et le sel se répartissent entre le secteur interstitiel et le
secteur circulant en fonction de l'équilibre des pressions hydrostatiques et oncotiques,
liées à la concentration de protéines.
Le maintien du volume intracellulaire est assuré par l'osmolalité. L'osmolalité est la
concentration en osmoles par kg de solvant soit par kg d'eau plasmatique. L'osmolarité est
la concentration en osmoles par litre de solution soit par litre de plasma. En conditions
pathologiques, en cas d'hyperlipémie ou d'hyperprotidémie, l'eau plasmatique peut diminuer
et la différence entre osmolarité et osmolalité devenir plus importante.
L'osmolalité peut se mesurer par abaissement cryoscopique. La membrane cellulaire est
librement perméable à l'eau qui se déplace toujours du milieu où l'osmolalité est la plus basse
vers le milieu où l'osmolalité est la plus haute. Certaines molécules traversent librement
la membrane cellulaire comme l'urée et l'alcool et leur variation n'entraîne donc pas de
transfert d'eau, ce sont des osmoles inefficaces. Pour d'autres, comme le Na+, le glucose ou
le mannitol, la membrane est totalement imperméable et leurs variations sont responsables
de transfert d'eau: ce sont des osmoles efficaces.
À l'équilibre, l'osmolalité efficace, due aux seules osmoles efficaces est égale dans les
compartiments circulants, interstitiels et intracellulaires et est de 285±5 mosmol/kg.
L'osmolalité efficace peut-être approchée par la formule: Natrémie x 2+ glucose en mmol/1.
L'osmolalité totale peut-être estimée par la formule: Natrémie X2+ glucose+ urée en mmol/1.
Les désordres de l'hydratation intracellulaire sont liés à des troubles de l'osmolalité et sont
secondaires à des perturbations de la balance hydrique. À l'équilibre, les apports hydriques
sont représentés par l'eau ingérée (1400 ml), l'eau des aliments (850 ml), l'eau endogène
(350 ml). Les sorties sont représentées par les urines (1500 ml), les selles (200 ml) et les
pertes insensibles cutanées (500 ml) et pulmonaires (400 ml). La régulation de la balance
hydrique est dépendante d'osmorécepteurs (sensibles à l'osmolalité) et non de chémorécepteurs
(sensibles à une osmole particulière par exemple le Na + ) situés dans !'hypothalamus. La
régulation osmotique de l'hormone antidiurétique (ADH) est instantanée et à bas bruit.
Toute augmentation de l'osmolalité (de l'ordre de 1 %) entraîne une sécrétion immédiate et
modérée de l'ADH. Il existe une deuxième régulation de l'ADH par un stimulus volémique,
mais elle est tardive, explosive et inadap tée à l'osmolalité plasmatique: une baisse
importante de la volémie (de l'ordre de 10 à 15 %) entraîne une sécrétion massive d'ADH.
L'ADH entraîne une réabsorption d'eau, via l'expression des aquaporines et le récepteur V2
de l'ADH. Les aquaporines rendent le tube collecteur perméable à l'eau, la réabsorption
est sous la dépendance du gradient cortico-médullaire. Le rein est l'effecteur essentiel, la
diurèse peut varier de 0,5 litre jusqu'à plus de 10 litres par jour, l'osmolalité urinaire de
60 à 1 200 mosmlkg.
Comme le montre les figures lA et B, toute modification de l'osmolalité plasmatique va
entraîner un transfert d'eau entre les compartiments pour rétablir l'équilibre. La nouvelle
osmolalité mesurée dans le plasma reflétera donc l'état d'hydratation intracellulaire. Toute
hyposmolalité efficace plasmatique signifie une hyperhydratation intracellulaire. Toute
hyperosmolalité plasmatique signifie une déshydratation intracellulaire.
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 B 25
Figure 1A
Désordre lntltal ⇒ Na
⇒ Osmolalité \
Transfert Hyperhydratation Equilibration de
d'eau lntracellualire (HIC) l'osmolalité avec le VIC
Figure 1B
A. RÉPONSE À L'ITEM
■ Savoir reconnaître une DEC.
■ Savoir mener la démarche étiologique.
■ Connaître les principes de traitement.
B. Signification
Une DEC est liée à une baisse du capital sodé. Si le désordre est pur (perte isotonique de
sel et d'eau), la natrémie est normale.
C. Séméiologie
Clinique: Le diagnostic repose sur des signes cliniques qui permettent d'explorer le
compartiment circulant et le compartiment interstitiel.
Signe global : perte de poids.
Signe du compartiment circulant : hypotension orthostatique, tachycardie compensatrice,
jugulaires plates, baisse de la pression veineuse centrale.
26 Eau et sel
D. Étiologies
La démarche étiologique repose essentiellement sur la réponse rénale et la natriurèse
(figure 2).
Les pertes extrarénales se caractérisent par une natriurèse basse(< 20 mmol/1, rapport
Na/K urinaire > 1) et une oligurie. Il s'agit de pertes digestives(diarrhées ou vomissements,
aspirations digestives, fistules) ou cutanées(hypersudation, brûlures, anomalies qualitatives
de la sueur ou mucoviscidose).
Les pertes rénales se caractérisent par une natriurèse élevée(>20 mmol/1, rapport Na/K
urinaire > 1), diurèse normale. Il s'agit avant tout d'anomalies fonctionnelles(excès de
diurétiques, polyurie osmotique avec la glycosurie du diabète, les perfusions de mannitol,
le syndrome de levée d'obstacle, les hypercalcémies et l'insuffisance surrénale aiguë) ou
d'une maladie rénale intrinsèque(néphrites avec perte de sel).
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(NaU ,. 20 mmof,1)
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Dfarrhé# I, Sur, Algues
Cutannén: Hypercalœmle
Srulurn Isueur Tubu e
F'Tfnclpn titi
trtllltlmtmt
Figure 2
E. Principes de Traitement
Le traitement symptomatique repose sur l'administration de sel, soit per os soit iv sous
forme de soluté salé isotonique. Il doit être guidé par les critères de gravité et adapté
à la fonction myocardique. Le déficit en volume extracellulaire peut être estimé par
la formule suivante :
A. RÉPONSE À L'ITEM
Savoir reconnaître une HEC.
■ Savoir mener la démarche étiologique.
■ Connaître les principes de traitement.
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 B 27
B. Signification
Une HEC est liée à une augmentation du capital sodé. Si le désordre est pur (gain isotonique
de sel et d'eau) la natrémie est normale.
C. Séméiologie
Clinique : Le diagnostic est essentiellement clinique.
Signe global : prise de poids - pour toute augmentation du capital Na+ de 140 mmol,
- prise de 1 kg.
D. Étiologies
La démarche étiologique repose essentiellement sur la clinique. D'un point de vue biologique
la réponse rénale et la natriurèse peuvent constituer des éléments d'orientation (figure 3).
Les causes principales sont liées à un trouble extrarénal avec une diminution relative
du secteur circulant. C'est notamment le cas des cirrhoses compliquées d'ascite, des
syndromes néphrotiques et des entéropathies exsudatives. Dans ce cas, la baisse relative
du compartiment circulant stimule le SRA-aldostérone (« rein désinformé ») aggravant
la rétention sodée et entraînant un natriurèse basse. C'est aussi le cas en présence d'une
insuffisance cardiaque congestive où la baisse de la fraction d' éjection systolique entraîne
une hypovolémie efficace.
Dans d'autres cas, le trouble est lié à des maladies rénales primitives, glomérulonéphrites
aiguës, IRC et IRA si l'apport Na dépasse les capacités d'excrétion. Dans ce cas, la natriurèse
est normale.
Figure 3
E. Principes de Traitement
Le traitement symptomatique repose sur le régime hyposodé (apports inférieurs à
100 mmol/j) et/ou les diurétiques.
28 Eau et sel
A. RÉPONSE À L'ITEM
Devant une hyponatrémie il faut:
savoir apprécier l'osmolalité et le volume du secteur intracellulaire;
■ savoir identifier si le désordre du capital hydrique est isolé ou s'il s'associe à un
désordre du capital sodé (trouble du volume extracellulaire);
■ savoir reconnaître et traiter le désordre initial.
B. Signification
Une hyponatrémie se définit comme une natrémie < 135 mmol/1. Elle doit être associée à une
hypoosmolalité plasmatique(< 280 mosmol/kg) et doit témoigner d'une hyperhydratation
intracellulaire. Elle traduit toujours un excès de capital hydrique par rapport au capital sodé.
Devant une hyponatrémie mesurée il faut d'abord vérifier l'équation:
C. Séméiologie
La symptomatologie de l'hyponatrémie avec hyperhydratation cellulaire est non spécifique
et varie selon la rapidité d'installation et la sévérité de l' hypoosmolalité.
En cas d' hyponatrémie modérée et d'installation lente, le tableau est longtemps
asymptomatique.
On peut noter :
► une altération de l'état général;
► des troubles progressifs du comportement;
► des nausées;
► des céphalées.
O. Démarche étiologique
1. Évaluation de la réponse rénale selon l'osmolalité urinaire
Soit osmolalité urinaire "adaptée"(< 100 mosmol/kg) qui va traduire un désé
quilibre majeur entre les apports en eau et en osmoles. En effet, l'eau pure ne
peut être éliminée seule sans un apport d'osmole. L'osmolalité urinaire minimale
est de 60 mosmole/1 et pour éliminer 10 litres d'eau, il faut un minimum de
600 mosmoles. Dans certains cas, les apports en eau sont supérieurs aux capacités
de dilution et on boit plus qu'on ne peut uriner. C'est le cas de la potomanie, du
syndrome « tea and toast», du syndrome des buveurs de bière. Cette démarche
est surtout utile dans le cas d'une hyponatrémie à VEC normal.
■ Soit osmolalité "inadaptée"(> 100 mosmol/kg); il s'agit alors d'un trouble du méta-
bolisme de l'eau.
2. Classification en fonction du VEC donc du capital sodé
L'hyponatrémie est toujours un excès d'eau par rapport à un capital sodé qui peut
être diminué, normal ou augmenté. Dans chaque cas, on doit définir, les désordres
du capital hydrique et du capital sodé, la signification en termes de volume extra et
intracellulaire, les étiologies et les principes de traitement.
Hyponatrémie à VEC abaissée :
► il s'agit d'un excès de capital hydrique par rapport à un capital sodé diminué. Sa
traduction clinique est une hyperhydratation intracellulaire et une déshydratation
extracellulaire;
► d'un point de vue physiopathologique, il s'agit d'une perte de capital sodé, qui peut
dépasser 10 à 15 % et peut donc entraîner une sécrétion d'ADH volodépendante.
Les étiologies sont donc semblables à celles de la déshydratation extracellulaire
isolée et l' hyponatrémie est un facteur de gravité. On retrouve donc les pertes
extrarénales avec une natriurèse basse(< 20 mmol/1) dues à des pertes digestives
ou cutanées et des pertes rénales avec une natriurèse élevée(>20 mmol/1) notam
ment par excès de diurétiques, lors d'une insuffisance surrénale et lors du CSW
(Cerebral Salt Wasting, liée à une mort cérébrale).
30 Eau et sel
■ 3) Endocrinopathies:
> hypothyroïdie, insuffisance corticosurrénalienne;
> adénome à prolactine.
Hypo Natrémie
� ..,
VECNle
�.--------,
VEC Augmenté
Hyperhydratatlon IC
Signif'u:ation Hyperbydratatlon IC Hyperhydratatlon EC
E. Principes thérapeutiques
Dans tous les cas une restriction hydrique de 500 à 700 ml par jour est recommandée.
L'excès d'eau peut se calculer selon la formule suivante :
2. Rythme de correction
La vitesse de correction ne doit jamais dépasser 10 mmol/1/j dans les premières
24 heures puis 8 mmol/1/j au-delà. La correction trop rapide de l'hyponatrémie ne laisse
pas le temps aux neurones du système nerveux central de s'adapter au changement
32 Eau et sel
A. RÉPONSE À L'ITEM
Devant une hypernatrémie il faut :
savoir apprécier l'osmolalité et le volume du secteur intracellulaire;
■ savoir identifier si le désordre du capital hydrique est isolé ou s'il s'associe à un
désordre du capital sodé (trouble du volume extracellulaire);
■ savoir reconnaître et traiter le désordre initial.
B. Signification
Une hypernatrémie se définit pour une natrémie > 145 mmol/1. Elle doit être associée à
une hyperosmolalité plasmatique (>300 mosmol/kg) et témoigne d'une déshydratation
intracellulaire. Elle traduit toujours un défaut de capital hydrique par rapport au capital sodé.
Devant une hypernatrémie il faut d'abord vérifier l'équation:
Dans certains cas, on peut observer une osmolalité totale mesurée et augmentée
mais liée à des osmoles inefficaces, comme l'élévation de l'urée dans l'IRC. Cette
hyperosmolalité totale ne s'accompagne pas d'une hyperosmolalité efficace et ne se
traduit pas par une déshydratation intracellulaire.
L'hypernatrémie est une pathologie relativement rare car l'organisme est bien protégé contre
,,
l'hyperosmolalité. En effet en cas de bilan hydrique négatif, l' hyperosmolalité stimule à la
fois le centre de la soif et l'ADH et l'apport hydrique corrige le trouble. La déshydratation
extracellulaire survient sur des terrains particuliers soit par trouble du centre de la soif
(personnes âgées, hypo- ou adipsie) soit par non-accès à l'eau (nourrisson, trouble de la
conscience, grabataire, réanimation, coma, conditions climatiques extrêmes).
C. Séméiologie
■ Soif intense.
■ Perte de poids.
■ Troubles neurologiques peu spécifiques:
► somnolence;
► fièvre;
Chapitre 1. Métabolisme ionique- ITEM 265 B 33
D. Démarche étiologique
Classification en fonction du VEC donc du capital sodé.
L'hypernatrémie est toujours un défaut d'eau par rapport à un capital sodé qui peut
être diminué, normal ou augmenté. Dans chaque cas, on doit définir, les désordres
du capital hydrique et du capital sodé, la signification en terme de volume extra et
intracellulaire, les étiologies et les principes de traitement.
■ Hypernatrémie à VEC abaissé :
► Il s'agit d'un défaut de capital hydrique par rapport à un capital sodé diminué. La
traduction clinique est donc une déshydratation intra et extracellulaire.
► D'un point de vue physiopathologique, il s'agit d'une perte d'eau avec des électro
lytes, la perte d'eau étant supérieure à la perte de Na+.
• 1-1) Il peut s'agir de pertes d'origine extrarénale, dans ce cas, la natriurèse
est basse (< 20 mol/!) et l'osmolalité urinaire élevée (U/P > 3).
• 1-2) Il peut s'agir de pertes rénales. Ce mécanisme doit être évoqué devant
une polyurie osmotique. La charge osmotique intratubulaire favorise la
diurèse. L'osmolarité urinaire est inférieure à 350 müsm/1 et la natriurèse
est supérieure à 20 mmol/1. Cette polyurie osmotique peut être due à :
des solutés diffusibles, tels que l'urée, ou non diffusibles, tels que
le glucose ou le mannitol;
la surcharge osmotique des néphrons restants chez l'insuffisant
rénal chronique;
une levée d'obstacle sur les voies urinaires mal compensée.
VECAulJllenU
Dl1ordre Diminution d'eau Diminution d'eau
Exm de capital�
Slgnlfkation Dâbydratatfon IC
Hyperbydratatlon EC
Prlnclpnde Eau
traitement ± Dluritlquet
E. Principes thérapeutiques
Ilfaut apporter un traitement symptomatique, étiologique (arrêt d'un médicament, traitement
d'un diabète, administration de Minirin) et préventif (veillez à l'hydratation des personnes
sensibles, en particulier des sujets âgés).
Le traitement symptomatique repose sur des règles simples.
Il convient d'abord d'évaluer le déficit en eau :
FICHE FLASH
û Les compartiments liquidiens de l'organisme suivent la règle des 20/40/60:
► compartiment extracellulaire 20 %;
► compartiment Intracellulaire 40 %;
► eau totale 60 %.
U Le volume extracellulaire:
► dépend du capital sodé;
► estimation par la clinique +++ :
• volume circulant;
• volume interstitiel;
► estimation biologique ±:
• volume circulant: protidémie, Ht.
U Le volume intracellulaire:
► dépend de l'osmolalité, et donc de la natrémie;
► estimation par la biologie +++;
► estimation par la clinique ±.
U L'osmolalité efficace plasmatique est de 285mosmol/kg. Elle se calcule par la formule:
► Osmolalité efficace = Natrémie x2 + Glycémie.
I.J Les troubles hydrosodés:
► trouble hydrique pur: natrémie - osmolalité - hydratation intracellulaire;
► trouble sodé pur: capital sodé -hydratation extracellulaire;
► trouble mixte.
;J Les troubles de la natrémie correspondent à des troubles du capital hydrique et sont indépendants du
capital sodé.
U L'approche thérapeutique est guidée par l'analyse du capital hydrique et du capital sodé et par l'estimation
quantitative du trouble:
► déficit extracellulaire:
,,. déficit en eau (1) = 60 % x poids (kg) x (natrémie/140 - 1);
,.. excès d'eau (1) = 60 % x poids (kg) x (natrémie/140 - 1).
37
+ Mesure du Na
La méthode de référence est la spectrométrie d'absorption de flamme. Elle n'est
plus utilisée dans les automates de biochimie de pratique courante. Elle rend les
résultats en molarité (mmol/1)
Le Na+ se mesure actuellement par potentiométrie au moyen d'électrode spécifique
(!SE, Ion Selective Électrode).
Deux grands groupes de méthodes existent :
La potentiométrie indirecte, la plus fréquente sur les automates de biochimie,
qui nécessite une dilution préalable. La mesure se fait donc sur une solution.
Le résultat est rendu directement en molarité (mmol/I de solution).
La potentiométrie directe, la plus souvent utilisée sur les automates de gazomé
trie, qui travaillent sans dilution préalable. On mesure une activité ionique par
eau plasmatique et le résultat est donné en molalité. Pour plus de cohérence,
un algorithme est intégré dans l'automate qui transforme la mofalité en molarité
par litre de plasma théorique, pour une concentration en lipides et en protéines
physiologique. En utilisant ce type de méthode de potentiométrie directe, il n'y
a pas d'hyponatrémie factice liée à l'excès de substances hydrophobes.
QCM
► 5. Vous recevez un patient diabétique connu. Il vous signale une perte de poids de 3 kg
sur les derniers jours. Il présente un pli de peau et une TA à 130/70 couché, 100/70
débout, ses jugulaires sont plates. l..'.analyse biochimique donne les résultats suivants:
• glycémie: 25 mmol/1
• urée: 25 mmol/1
• créatinine: 190 µmol/1
• protéines: 70 g/1
• Na: 130 mmol/1
• Cl: 90 mmol/1
• CO3 H-: 25 mmol/1
• K: 4 mmol/1
Chapitre 1. Métabolisme ionique - QCM
LES DYSKALIEMIES
Jean-Paul CRISTOL et Nicolas PALLET
1. INTRODUCTION
Le potassium (K•) est le principal cation intracellulaire (120 à 150 mmol/1). Le pool potassique
est d'environ 50 mmol/kg (soit 45 mmol/kg pour une femme et 60 mmol/kg pour un homme). Le
pool potassique est situé à 98 % dans le compartiment cellulaire (principalement dans les cellules
musculaires) et 2 % dans le compartiment extracellulaire. Dans le milieu extracellulaire, la kaliémie
est maintenue basse, entre 3,5 et 5 mmol/1. Ce gradient induit une polarisation membranaire et est
indispensable à l'activité électrique des cellules neuromusculaires. Il est maintenu par la Na•-K•
ATPase qui exporte 3 Na• pour 2 K• importés. Cette répartition et son rôle dans la dépolarisation
membranaire explique la majorité des signes cliniques (neuromusculaires et/ou cardiaques). D'autre
part, dans l'interprétation des désordres potassiques, il faudra toujours analyser la balance interne,
c'est-à-dire les échanges entre pool potassique intracellulaire et milieu extracellulaire et d'autre part,
la balance externe du K•, c'est-à-dire la balance entrée/sortie. Le pool potassique et la kaliémie sont
donc des notions différentes et il faut se souvenir que la kaliémie peut varier par transfert du ou vers
le compartiment intracellulaire sans affecter le pool potassique global.
La régulation fine de la kaliémie est basée sur le contrôle de la balance interne et externe.
La balance interne correspond aux transferts de K et sont dépendants de l'activité de la Na•-K•-ATPase.
Les catécholamines stimulent l'entrée cellulaire du I(+ via un effet 13-adrénergique. À l'inverse la
stimulation des récepteurs a-adrénergiques inhibe, plus modérément, l'activité Na•-K-•ATPase.
Les 13-bloquants non sélectifs diminueront l'entrée de K• dans les cellules.
■ L'insuline stimule l'entrée cellulaire du K•. Cet effet est indépendant de son action sur le trans
port de glucose.
■ L'état acido-basique (Figure 1) : l'acidose ou l'acidémie, d'origine métabolique plus que respiratoire,
bloque l'entrée cellulaire du K• (inhibition de la Na•-K•-ATPase) et augmente la fuite passive de
42 Les dyskaliémies
8
7
6
SS
E 4
.§.
� 3
1.5 ---------......-----1
· 20 -10 0 10 20
Pourcentage de déplétlon ou d'excès pota11lque (o/o)
Ill. HYPERKALIÉMIE
A. Signification
1. Définition
K• > 5 mmol/1. Une hyperkaliémie d'installation brutale ou au-dessus de 7 mmol constitue
un danger vital.
C. Symptomatologie
Du fait de la répartition intracellulaire du K• les signes cliniques résultent d'une
altération des potentiels de membrane et ils sont donc essentiellement neuromusculaires
et cardiaques.
1. Signes neuro-musculaires
Ils sont non spécifiques à type de paresthésies des extrémités et de la région péribuccale.
Une faiblesse musculaire, voire une paralysie débutant aux membres inférieurs et
d'évolution ascendante est un signe de gravité. Elle est toujours accompagnée de
signes cardiaques. ---------
2. Signes cardiaques
Signes ECG de gravité croissante :
onde T ample, pointue et symétrique touchant tous les territoires;
■ anomalies de la conduction auriculaire (diminution puis disparition de l'onde P),
auriculoventriculaire (blocs sino-auriculaires et auriculoventriculaires);
■ anomalies de la conduction intraventriculaire avec élargissement des complexes QRS;
■ fibrillation ventriculaire, souvent favorisé par une hypocalcémie, une ischémie
myocardique, une intoxication digitalique.
44 Les dyskaliémies
Hyperkaliémie Hyperkaliémie
modérée avec troubles de
Ondes T pointus la conduction
et symétriques Paralysie
sinusale
--··'\,1---�· ...
_'l.._t'\._1./\. ��· JI\. .
--Y.. ....
.t lL 1L
Il Lyse cellulaire:
► toute lyse cellulaire majeure entraîne une hyperkaliémie (rhabdomyolyse,
lyse tumorale, ischémie tissulaire, hypothermie...)
■ Déficit en minéralocorticoïdes:
► insuffisance surrénalienne aiguë (évoquée devant la triade hyponatrémie,
déshydratation extracellulaire, hyperkaliémie);
► insuffisance surrénale chronique (maladie d'Addisson): syndrome d'hyporé
ninisme-hypoaldostéronisme avec acidose métabolique hyperchlorémique;
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 C 45
3. Excès d'apport
Les hyperkaliémies par excès d'apport sont rares en dehors d'un contexte d'insuffisance
rénale. En dehors de aliments riches en K•:légumineuses et légumes (lentilles, haricots,
choux, épinards), fruits et surtout fruits secs (bananes, cerises, abricots, noix, amandes,
pistaches) et chocolat), il faut rechercher les sels de régime. Des apports excessifs per
os ou en perfusion peuvent aussi entraîner une hyperkaliemie.
E. Principes de traitement
Ils dépendent de la gravité de l'hyperkaliémie et reposent sur 3 principes: la
correction des troubles de la conduction myocardique, le transfert de K• vers le milieu
intracellulaire, la diminution du pool potassique.
Toute hyperkaliémie > 7 mmol/1 ou s'accompagnant de troubles de la conduction
auriculo-ventriculaire et/ou intraventriculaire est une urgence absolue.
1. Correction des troubles de la conduction
Les troubles de la conduction associés à l'hyperkaliémie sont une urgence.
Les sels de calcium antagonisent les effets électriques cardiaques de l'hyperkaliémie en
restaurant le potentiel de repos membranaire et en diminuant l'excitabilité. Le gluconate
ou le chlorure de calcium peuvent être utilisés à la posologie de 1 à 4 g par voie IV lente.
En cas de traitement digitalique, les sels de calcium sont contre-indiqués. Il faut alors utiliser
le sulfate ou le chlorure de magnésium pour antagoniser les effets de l'hyperkaliémie à l'ECG.
2. Transfert du K• vers le compartiment intracellulaire
Ces manœuvres thérapeutiques doivent être réalisées en cas d'hyperkaliémie sévère
(> 6,) sans troubles de conduction ou après injection de sels de calcium ou magnésium.
L'association glucose-insuline: perfusion de 10 unités d'insuline associé à du
glucose (3 à 5 g) en soluté 10 à 30 % selon l'état d'hydratation du patient.
■ L'alcalinisation, impératif s'il existe une acidose métabolique associée par apport
de bicarbonate de Na.
Les agonistes �2-adrénergiques (salbutamol, albutérol) : en aérosol.
3. Diminuer le pool potassique
Les résines échangeuses d'ions: elles permettent la chélation du K• au niveau du
colon (ex: Kayexalate"). Elles peuvent être administrées per os ou en lavement
(1 g peut échanger 1 mEq de K• contre 1 mEq d'ions). Elles sont indiquées dans
les hyperkalémies chroniques (comme dans l'IRC au stade de la prise en charge)
et modérées:
► son site d'action est essentiellement le côlon;
► son action est lente, mais plus rapide par lavement; elle est par ailleurs prolongée;
► 20 à 30 g per os toutes les 6 heures, précédés de 60 g en lavement, en contrôlant
la kaliémie toutes les 3 à 6 heures.
■ Les diurétiques de l'anse (ex. : furosémide), à forte dose (80 à 120 mg en IV),
augmentent l'excrétion urinaire de potassium. Ils sont prescrits en tenant
46 Les dyskaliémies
IV. HYPOKALIÉMIE
A. Signification
Définition: K < 3,5 mmol/1. la découverte d'une hypokaliémie impose d'apprécier le
retentissement cardiaque.
B. Symptomatologie
Du fait de la répartition intracellulaire du K+ les signes cliniques sont essentiellement
neuromusculaires et cardiaques.
1. Signes cardiaques
Les signes ECG sont surtout des anomalies de la repolarisation. On peut observer selon
la gravité de l' hypokaliémie
• un sous décalage du segment ST et un aplatissement de l'onde T;
■ l'apparition d'une onde U;
■ troubles du rythme supraventriculaire (FA, tachycardie sinusale) ou ventriculaire
(ESV, torsade de pointe...).
ECG
d'hypokaliémie
avecondeU
___,,
1 '
______.,_.
tl1
tl ut
---'1.....-,,,...___
---,,
tu�
.....
---,,
'
�,>__
OndeU>T
1- �
�
2. Signes musculaires
■ Une fatigabilité musculaire voire des accès de paralysie ascendante.
■ Des myalgies et des crampes.
Une rhabdomyolyse peut survenir en cas de déplétion potassique sévère.
3. Signes digestifs
■ Constipation voire iléus paralytique.
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 C 47
4. Signes rénaux
L'hypokaliémie entraîne une polyurie-polydipsie liée à une résistance tubulaire à l'ADH.
■ À long terme une néphropathie interstitielle chronique peut survenir.
3. Pertes de potassium
Elles peuvent être rénales ou extrarénales. L'analyse de la kaliurèse permettra de
distinguer les deux situations.
1
Hypokallémle
El/miner un Transfert ce/lu/sire
Pool Potassique
1
Ku
...----- -----------. Ku> 20 mmol/24h
Ku < 20 mmol/24h Pertes rénales
P e�rar
/ �
5. Pertes rénales
La kaliurèse est supérieure à 20 mmol/1 témoignant d'une réponse rénale inappropriée.
La démarche diagnostique dépend de l'existence ou non d'une hypertension.
■ Soit l'aldostérone est élevée : il s'agit alors d'un hyperaldostéronisme dont l'exploration
nécessite le dosage de la rénine :
► hyperaldostéronisme à rénine haute :
• HTA maligne, sténose unilatérale de l'artère rénale, tumeur à rénine,
infarctus rénal;
Hypokallémle
l
Ku > 20 mmol/24h Pertes rénales
� � OHTA
HTA
l
l Acldo-Baslque ?
Hypermlnéralocortlclsme
Rénine/ Ald
a_________
Aldo Elevé:
Aldo Bas:
Excés de DOCA Rénine Haute :
(Oesoxycortlcostèrone) Rénine Basse
HTAreno-Vx Hyperaldo Ili!
Réglisse (O-glycyrrtllzlque)
HTAmaligne Hyperplasie
Cushing et
Tumeur à Renine Adenome
Sécrétion ectopique d'ACTH
Hyperaldo Il
Syndrome de Uddle
Hypokallémle
OHTA
� � Alcalose · .
Acidose Métabolique
Acidose tubulaire rénale
distale / Proximale �CIU :'
Acidocétose diabétique
Diamox CIU<:20 mmolll CIU>20mmolll
Anastomose digestive urétérale Vomissements Bartter, Gitelman
Aspiration gastrique Diurétiques
Diarrhée (récents)
congénitale avec Dépletion K
perte de Cl sévère
Diurétique tardif Hypomagnésémie
Tubulopathies
toxiques
D. Principes du traitement
Devant une hypokaliémie modérée sans signes électriques, une supplémentation orale
suffit normalement, soit par des aliments riches en K• soit par une supplémentation
médicamenteuse (Kaleorid ou diffu-K).
En cas d'hypokaliémie sévère ou avec des troubles électriques, une supplémentation iv
peut-être recommandée pour rétablir une kaliémie à 3 mmol/1. Mais le débit ne doit jamais
dépasser 1,5 g/h et le potassium doit toujours être dilué.
Dans tous les cas, la surveillance doit être régulière pour éviter de basculer d'une hypo
vers une hyperkaliémie.
51
FICHE FLASH
o Le K+ est un ion intracellulaire :
► Pour explorer le métabolisme potassique il faut:
.. considérer la balance externe:
- apports alimentaires;
- sorties quasi exclusivement rénales en physiologie;
-. considérer la balance interne:
- les principaux déterminants sont l'équilibre acido-basique et l'insuline;
'- les troubles de la kaliémie peuvent se faire par transfert sans variation du pool potassique
- les signes cliniques sont essentiellement des signes neuromusculaires et cardiaques;
- les signes ECG doivent être systématiquement recherchés et constituent une urgence vitale.
o Hyperkaliémie :
► K+ > S mmol/1.
► Urgence vitale si K+ > 7 mmol/1 si trouble de la conduction auriculo-ventriculaire ou ventriculaire.
► La démarche diagnostique nécessite de:
• rechercher une hyperkaliémie de transfert (acidose, catabolisme cellulaire, causes médicamenteuses
(bêtabloquants);
• rechercher une réduction de l'excrétion rénale de K+ (IRA ou IRC);
• rechercher une résistance à l'action de l'aldostérone (déficit en minéralocorticoïdes, IEC, ARA2,
antialdostérone).
► Le traitement repose sur:
• l'arrêt des traitements hyperkaliémiants;
• la correction des troubles de la conduction par sels de calcium ou de magnésium;
.. le transfert de K+ vers le compartiment intracellulaire par glucose-insuline, alcalinisation ou
médicaments �-adrénergiques;
• l'élimination de la surcharge potassique par résine échangeuse d'ions, par diurétiques de l'anse
ou par hémodialyse.
o Hypokaliémie :
► K+ < 3.S mmol/1.
► Signes cliniques neuromusculaires à type de faiblesse musculaire et de crampes, signes ECG avec des
troubles de la repolarisation, signes digestifs (constipation) et signes rénaux avec polyuro-polydipsie.
► La démarche diagnostique doit rechercher un transfert vers le milieu intracellulaire par alcalose,
insuline, médicaments �-adrénergiques, stimulation de l'hématopoïèse ou paralysie périodique.
► En cas de déficit du pool potassique, la recherche étiologique est basée sur la kaliurèse.
► En cas de kaliurèse basse ( < 20 mmol/1), il s'agit soit d'une carence d'apport soit d'une fuite digestive
basse.
► En cas de kaliurèse augmentée (>20 mmol/1) il s'agit de pertes rénales.
.. En cas d'HTA, c'est un tableau d'hyperminéralocorticisme
- Soit sans aldostérone élevée (Cushing, syndromes adrénogénitaux, réglisse, déficits en
11 �-hydroxydeshydrogénases) syndrome de Liddle
- Soit hyperaldostéronisme secondaire (HTA maligne, Sténose artère rénale, tueur à rénine) ou
primaire (adénome ou hyperplasie).
52
- En l'absence d'HTA:
- avec acidose métabolique (cétoacidose diabétique, acidose tubulaire);
- avec alcalose métabolique:
► à chlorurie basse: vomissements et aspirations digestives, diarrhée congénitale avec perte
de Chlore;
► à chlorurie élevée: Diurétiques, syndrome de Bartter ou de Gitelman, tubulopathies toxiques.
□ Principe de traitement:
► supplémentation per os ou iv en cas de troubles électriques avec un débit de perfusion qui ne doit
pas dépasser 1 g/h.
53
+ Syndrome de Bartter :
La réabsorption de Na et de K dans la partie large ascendante de l'anse de Henlé
est sous la dépendance d'un co-transporteur Na-K-CI (NKCC2). L'activité de ce
co-transporteur est couplée à d'autres canaux ioniques (ROMK, ou canal Chlore
(CICK) du côté capillaire péritubulaire. Les diurétiques de l'anse, bumétabide ou
furosémide inhibent ce canal.
Une mutation inhibitrice de ce canal est responsable du syndrome de Bartter.
Le syndrome de Bartter se comporte donc séméiologiquement comme un diurétique
de l'anse endogène.
+ Syndrome de Gitelman :
Dans le tube contourné distal, le Na est réabsorbé par un co-transporteur NaC/
(NCCT) lui aussi couplé à d'autres canaux ioniques. Les diurétiques thiazidiques
inhibent ce transporteur.
Une mutation inhibitrice de ce canal est responsable du syndrome de Gite/man.
Le syndrome de Gite/man se comporte donc séméiologiquement comme un diuré
tique thiazidique endogène.
QCM
► 4. Parmi les propositions suivantes, laquelle (lesquelles) est (sont) exacte(s). Une hyper
kaliémie s'observe au cours
A. Des vomissements chroniques
B. D'un syndrome de Conn
C. D'une insuffisance rénale chronique terminale
D. Des Diarrhées chroniques
E. Des acidoses métaboliques aiguës
Réponses:C,E
► 5. Quel est (sont) le(s) diurétique(s) qui provoque(nt) une baisse du potassium sanguin?
A. lndapamide
B. Hydrochlorothiazide
C. Furosémide
D. Spironolactone
E. Amiloride
Réponses:A, B,C
ITEM 265 D
LES HYPOCALCEMIES
Jean-Paul CRISTOL ET Nicolas PALLET
1. INTRODUCTION
Le calcium est avant tout un ion intracellulaire et presque exclusivement osseux:
■ calcium intracellulaire : 99 % du calcium est osseux (soit 1,2 kg), sous forme de cristaux d'hy
droxyapatite avec un rapport Ca/P variant entre 1,3 et 2,0. Environ 0,9 % est tissulaire localisé
en dehors du tissu osseux;
calcium extracellulaire: Il représente seulement 0,1 % (ou 30 mmol) (essentiellement plasmatique).
Le calcium plasmatique existe sous la forme de trois fractions :
■ le calcium lié aux protéines, non diffusible (45 %). Il est essentiellement lié à l'albumine (30 %) mais
aussi aux globulines;
■ le calcium ultrafiltrable (55 %), qui se répartit lui-même en deux catégories :
► forme libre ou ionisé : 50 %;
► forme complexée : 5 %.
Le calcium plasmatique, dosé classiquement dans les laboratoires de biochimie est le calcium total, somme
des trois fractions, sa valeur est de 2,4 ± 0,2 mmol/1.
En cas d'hypoprotidémie et surtout d'hypoalbuminémie, on observe une baisse du calcium lié aux protéines
et donc du calcium total, mais la concentration de calcium ionisé, biologiquement actif, reste constant. Le
dosage de la calcémie totale sous-estime alors la concentration de calcium ionisé actif. L'hyperalbuminémie
a l'effet inverse. Dans ces cas, il faut estimer la calcémie corrigée selon la formule suivante :
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 D 57
Ca++ corrigée [mmol/1) = Ca++ mesurée [mmol/1) + 0,02 x (40 - albuminémie [g/11)
La liaison aux protéines est sensible au pH. Toute variation de 0,1 U de pH, entraîne une
variation en sens inverse du calcium ionisé de 0,035 mmol/1. Ainsi, l'acidose augmente la
proportion de calcium ionisé et l'alcalose la diminue.
Dans les cas difficiles, entraînant des modifications de la liaison aux protéines (troubles
protéiniques sévères, hyperphosphorémie, troubles acide-basiques), il faut réaliser le
dosage du calcium ionisé sur un automate de gaz du sang, en respectant des conditions
préanalytiques strictes.
Le métabolisme du calcium est sous la dépendance de 3 principaux organes avec 3
fonctions principales : l'intestin qui absorbe le calcium, le squelette qui stocke/relargue le
calcium et le rein qui peut réguler l'élimination du calcium. Ilfaut toutefois noter qu'il existe
des pertes digestives obligatoires de calcium (par sécrétion et lyse cellulaire). Cette perte
digestive explique pourquoi, pour maintenir un bilan calcique équilibré, ilfaut consommer
une quantité minimale de calcium, (environ 10 mglj). Au niveau rénal, 70 % du calcium
est réabsorbé au niveau du tube contourné proximal, 20 % est réabsorbé au niveau de la
partie ascendante de l'anse de Henlé, et 10 % est réabsorbé, de façon active, au niveau du
tube contourné distal et de la partie proximale du tube collecteur. Cette réabsorption est
régulée positivement par la PTH. À ce niveau, la PTHfavorise la réabsorption du calcium et
est donc hypocalciurique, mais elle diminue la réabsorption des phosphates, elle augmente
ainsi la phosphaturie et diminue la phosphatémie.
La régulation du métabolisme du calcium est régulée par 3 hormones principales :
■ la parathormone (PTH) qui est hypercalcémiante et hypophosphatémiante;
■ la vitamine D active (1,25 di-OH vitamine D) qui est hypercalcémiante et hyper
phosphatémiante;
Il la calcitonine qui est hypocalcémiante et hypophosphatémiante;
Il la parathormone (PTH) :
► c'est une hormone polypeptidique de 84 acides aminés, sécrétée par les glandes
parathyroïdes;
► elle réagit rapidement aux variations calciques et est rapidement dégradée dans
le sang (Pour en savoir plus, figure 4);
► elle est régulée par la concentration en calcium ionisé. Il existe sur les cellules
parathyroïdiennes des récepteurs au calcium ionisé, couplés à une petite protéine
G. Lors de la liaison du calcium ionisé avec son récepteur, la synthèse de la PTH
est réprimée. Ce récepteur peut être stimulé par des drogues de synthèse, les calci
métiques (Cinacalcet et Etelcalcetide) qui répriment la PTH et sont donc hypocal
cémiants. En dehors du calcium ionisé, la 1,25 di-OH Vitamine D, le magnésium
et le FGF-23 répriment la sécrétion de PTH;
► la PTH est hypercalcémiante et hypophosphatémiante :
• en favorisant la résorption osseuse (elle libère du calcium et du phosphate);
• en augmentant la réabsorption du calcium et l'excrétion de phosphore au
niveau rénal;
• en convertissant, au niveau rénal, la 25 OH Vitamine D en 1,25 di-OH
Vitamine D, forme active, qui favorise l'absorption intestinale du calcium;
occidentaux (elle est présente surtout dans certains champignons). Noter que la
vitamine D2 est produite par l'action des UVB sur l'ergostérol (provitamine D2)
végétal. La vitamine D2 a une demi-vie plus courte que la vitamine D3. Compte
tenu du rôle mineur de la vitamine D2 en physiologie, la vitamine D est assimilée
à la vitamine D3;
► la vitamine D (D2 ou D3) pour aboutir à la forme active sous la forme de calcitriol
(1,25-dihydroxyvitamine D), doit subir une double hydroxylation : une 25-hydroxy
lation hépatique et une 1-alpha hydroxylation par une 1-alpha hydroxylase rénale.
C'est le calcitriol qui est responsable des effets biologiques de la vitamine D, via
la liaison à un récepteur intracellulaire, le VDR;
► un métabolite inactifde la vitamine D: le 24,25 di-OH vitamine D peut être aussi
formé par le rein sous la dépendance d'une 24-hydroxylase;
► elle augmente la calcémie et la phosphatémie en augmentant l'absorption digestive
(et rénale) du calcium et du phosphate;
► pour apprécier le taux physiologique de vitamine D, seul le dosage de la 25 OH
vitamine D3 est recommandé.
1·25(0H),1'rt03 ------------ !
lt ------- PTH
1) j
/i/f
Réabsorption digestive de Ca
\ Réabsorption tubulaire de ca /
f, ,œ
/_
1
\
Normocalcémie
1-25(�H)2VitD3 -i----___
1 PTH
Réabsorption digestive de Ca
w
/i/
� \Tr �:Jœ,
Normocalcémie
Hypercalcémie
A. Définition
Les hypocalcémies se définissent par une calcémie totale inférieure à 2,2 mmol/l.
Il convient d'éliminer les fausses hypocalcémies en lien avec une hypoprotidémie et à
une hypoalbuminémie en calculant la calcémie corrigée. Si un dosage de la calcémie
ionisée est effectué, l'hypocalcémie est définie par une concentration inférieure à
1,15 mmol/l.
B. Séméiologie
■ Manifestations neuromusculaires :
► paresthésies distales, crampes, crise de tétanie;
► deux signes «classiques» peuvent être recherchés :
• signe de Chvostek, contraction faciale déclenchée par la percussion de la
joue en dessous du zygomatique;
• signe de Trousseau ou main en accoucheur après pose d'un brassard
tensionnel.
■ Signes électrocardiographiques :
► allongement de QT puis bloc auriculo-ventriculaire.
Démarche étiologique :
La démarche étiologique d'une hypocalcémie chronique repose sur le dosage de la PTH
et de la 25 hydroxy-vitamine D (figure 3).
1. Hypocalcémie à PTH inadaptée (normale ou basse)
Devant une hypocalcémie, la réponse attendue est une augmentation de la PTH. Des
taux bas ou normaux, signent donc l'origine parathyroïdienne de l'hypocalcémie.
L'hypoparathyroïdie se traduit par une hypocalcémie et une hyperphosphatémie.
Les principales causes d'hypoparathyroïdie sont chirurgicales (chirurgie des parathyroïdes, de
la thyroïde, intervention pour des cancers ORL). Les autres causes sont rares (hypomagnésémie
profonde, amylose de la parathyroïde, causes génétiques par mutation du gène de la PTH).
Une mutation activatrice du récepteur sensible au calcium peut être responsable d'une
hypocalcémie hypercalciurique familiale.
60 Les hypocalcémies
a. Carence en vitamine D
Elle s'accompagne d'une hypocalcémie avec hypophosphatémie. La PTH étant élevée, la
calciurie est abaissée.
Les principales causes sont liées à des carences alimentaires, une malabsorption digestive
entraînant une carence en vitamines liposolubles (vitamines ADEK) (insuffisance
pancréatique, cholestase...), une exposition solaire insuffisante. Enfin, certains médicaments
peuvent interagir avec le métabolisme de la vitamine D (augmentation de la 24 hydroxylation
par les corticoïdes, diminution de la 25 hydroxylation par des antiprotéases).
b. Insuffisance rénale
Les perturbations du métabolisme phosphocalcique sont complexes en cas d'insuffisance
rénale chronique. Elles se manifestent par une hypocalcémie, une hyperphosphatémie, une
hyperparathyroïdie secondaire (avec augmentation des phosphatases alcalines osseuses
témoignant du remodelage osseux élevé). Le métabolisme de la vitamine D est altéré avec
une diminution de la forme active (1,25 di-OH-vitamine D). Les troubles phosphocalciques
sont tardifs car longtemps compensés par l'hyperparathyroïdie secondaire.
Les origines des désordres phosphocalciques sont multiples : dérégulation précoce du
système FGF-23/Klotho (figure 5), déficit en 1-alpha hydroxylase, défaut d'excrétion des
phosphates.
c. Pseudohypoparathyroïdie
Cause rare, génétique d'hypocalcémie. Il s'agit d'une hypocalcémie de l'enfance avec
hyperphosphatémie mais une PTH très élevée, liée à une résistance périphérique et rénale
de la PTH. On peut observer une baisse de la 1,25 di-OH-vitamine D, puisque la PTH
doit stimuler la 1-alpha hydroxylase.
La pseudohypoparathyroidie est associée à l'ostéodystrophie héréditaire d'Albright.
3. Hypocalcémie aiguë
Il s'agit d'hypocalcémie par transfert ou précipitation qui surviennent dans un contexte
évocateur:
précipitation intravasculaire: lors d'une chélation par du phosphate au cours d'une
lyse cellulaire aiguë (lyse tumorale, chimiothérapies), apport massif de citrate (trans
fusion importante, circuit de dialyse avec anticoagulation régionale);
■ précipitation tissulaire : sur une masse de tissus nécrosés (rhabdomyolyse, pancréa
tite aiguë);
Il « hungry-hone » syndrome : transfert massif du calcium vers l'os après traitement
chirurgical (ou médicamenteux par calcimimétique) d'une hyperparathyroïdie, plus
rarement après une immobilisation prolongée.
Chapitre 1. Métabolisme ionique - ITEM 265 D 61
l
Hypocalc6mle < 2,20 mmoVL
Donr 1'1/bumln•
---+ c,toul ti. I• o,/o.ml• oo"l'4•
Ellmln,r un• p11eudo hypoo1lo.ml•
Doser la PTH
..-------- �
PTH baaae (Inadaptée) PTH haute (adaptée)
Cau111 parathyroYdlennea Cau111 extra parathyroYdlennea
C. Conduite du traitement
Le traitement symptomatique consiste en l'apport de calcium per os (carbonate de calcium)
ou plus rarement intraveineux (gluconate ou chlorure de calciu_m).
Il faut veiller à corriger un éventuel déficit en vitamine D, essentiellement sous forme de
vitamine D3.
62
Fiche Flash
O Le calcium est un ion intracellulaire essentiellement osseux.
O La calcémie est réglée par 3 hormones principales:
► la parathormone (PTH) est hypercalcémiante et hypophosphatémiante;
► la vitamine D active (1,25 di-OH vitamine D) est hypercalcémiante et hyperphosphatémiante;
► la calcitonine est hypocalcémiante et hypophosphatémiante.
O Devant une hypocalcémie il faut tout d'abord:
► éliminer les fausses hypocalcémies liées à une hypoalbuminémie en calculant la calcémie corrigée:
Ca•• corrigée [mmol/1] = Ca++ mesurée [mmol/1] + 0,02 x (40 - albuminémie [g/1])
+ Le dosage de la PTH :
La PTH est une hormone polypeptidique de 84 acides aminés, d'une demi-vie brève.
Dans le sang, plusieurs formes circulantes existent, tronquées du côté N-terminal.
Selon les sites antigéniques de la PTH reconnus par des anticorps, les kits de dosage
peuvent identifier soit la PTH totale, soit la PTH totale et certains de ses fragments
(PTH 7-84). Les kits de PTH dits de 3" génération, sont basés sur des anticorps
reconnaissant d'une part les séquences d'acides aminés 1 à 7 et d'autre part 39-84.
Elles ne reconnaissent que la PTH totale.
- Zone 39- 84 : site des AC depuis RIA 1 • génération (C/Mlld PTH RIA)
<:aP Zone 12- 24: site des 2 ° AC des PTH seconde génération (Allegro)
.,
' '\
'\
24 Hydroxylase
Vit D inactive
1,25 diOH vitD
�
.. .. ... ...
' , ,,., ,
Vit D active
03 inactive). Ces actions s'opposent au niveau rénal à l'action de la PTH qui active
la 1-alpha hydroxylase.
Au niveau des cellules parathyroidiennes, le FGF-23, inhibe la sécrétion de PTH. Ces
boucles de rétrocontrôle assurent l'équilibre phosphocalcique.
Il a été décrit des actions pléiotropes (indépendantes du phosphate) pour le FGF-23,
certaines de ces actions ne nécessitent pas l'intervention du corécepteur Klotho.
CHAPITRE 2. MÉTABOLISME ET ALIMENTATION
ITEM 220
DIAGNOSTIC DES DYSLIPIDÉMIES
Laurence DUVILLARD
1. INTRODUCTION
Les dyslipidémies constituent l'un des principaux facteurs associés au développement de la maladie
athéromateuse, et leur mise en évidence reste fondamentale pour le diagnostic étiologique des
maladies cardiovasculaires et la mise en place de mesures préventives. Parmi les dyslipidémies,
c'est l'hypercholestérolémie LOL qui constitue le facteur de risque cardiovasculaire le plus élevé.
L'hypertriglycéridémie doit également être considérée comme facteur de risque cardiovasculaire.
VLDL: «Very Low Density lipoprotein», IDL: «Intermediate Density Lipoprotein», LDL:
«Low Density Lipoprotein», HDL: « High Density Lipoprotein»"
Chez le sujet normolipidémique à jeun, plus de la moitié des triglycérides sont dans
les VLDL et le cholestérol se répartit comme suit entre les lipoprotéines:
► VLDL:6àl0%
► LDL:60à65%
► HDL: 25à 30%
Intestin
Jl
...-..B48
Foie
J
chylomlcron
r
CIi AV LDL·R
,,........
8100
LH
LPL
CIi
AV
,,,,.........
B100 r """"'
LPL B100
LOL ..,,,,
� LDL•R
Tissus
p(lrlphérlques
CIi AV
Al J
/
J
lDl•�JF* (',�TPG) HDL3
LRP·R
I':-�
SR•BI
\ HDL2 Al
LCAT
Al
R. HDL
�
LCAT
sont aussi transférés vers les HDL ainsi que des apolipoprotéines échangeables
depuis les lipoprotéines à apoB. Ainsi, les HDL se transforment en HDL3 puis
HDL2. Elles sont catabolisées grâce au récepteur des HDL et au récepteur SR-BI
exprimé à la surface des hépatocytes et des tissus stéroïdogènes.
Indépendamment de l'âge, les éléments suivants incitent à réaliser une évaluation du RCV
global comprenant une exploration d'une anomalie lipidique:
► maladie cardio-vasculaire documentée (prévention secondaire);
► hypertension artérielle;
► diabète;
► tabagisme actuel ou arrêté depuis moins de 3 ans;
► IMC � 30 kg/m2 ou tour de taille > 94 cm chez l'homme (> 90 pour les Asia
tiques), > 80 cm chez la femme;
► insuffisance rénale chronique modérée à sévère;
► antécédent familial de maladie cardio-vasculaire précoce :
■ Si le bilan est normal, la répétition d'un bilan lipidique plus d'une fois tous les cinq ans
n'est pas justifiée en l'absence de modifications du mode de vie ou bien d'instauration
de traitement susceptible de modifier le bilan lipidique.
A. Description de l'EAL
■ La recherche d'une dyslipidémie utilise un bilan dénommé « exploration d'une
anomalie lipidique» (EAL) réalisé sur un tube sec.
► L'EAL comporte :
• l'aspect du sérum;
• la cholestérolémie totale;
68 Diagnostic des dyslipidémies
• la cholestérolémie LDL;
• la cholestérolémie HDL;
• la triglycéridémie.
Le ratio TG/5 (ou 2,2) est une estimation du cholestérol des VLDL. Si TG > 3,4 g/1 ce
dernier est surestimé et le C-LDL est sous-estimé.
Lorsque la formule de Friedewald n'est pas valide, on peut utiliser une technique
de dosage directe du C-LDL, en sachant que l'hypertriglycéridémie interfère sur
ces techniques qui ne peuvent plus être utilisées à partir d'un certain seuil qui est à
définir pour chaque trousse de dosage.
L'aspect du sérum précise s'il est limpide, opalescent ou lactescent. Il recherche par
ailleurs la présence de chylomicrons qui apparaissent sous la forme d'une couche de
crème en surface après décantation de l'échantillon pendant une nuit à 4 °C (ou par
une ultracentrifugation de courte durée).
En cas d'hypertriglycéridémie, le sérum devient opalescent voire lactescent. Cependant,
il n'y a pas de corrélation stricte entre la triglycéridémie et l'aspect du sérum car cela
dépend de la taille des lipoprotéines, avec une opalescence plus importante pour des
lipoprotéines de grande taille.
Une hypertriglycéridémie associée à un sérum limpide doit faire penser à une fausse
hypertriglycéridémie liée à la présence de glycérol libre dans le sérum. En effet, pour
quantifier les triglycérides, on dose le glycérol libéré par l'hydrolyse de ces derniers
et le glycérol libre initialement présent dans l'échantillon vient s'y ajouter.
A. Les hypercholestérolémies
1. Hypercholestérolémies polygéniques
Il Fréquentes.
■ Pas d'hérédité familiale mendélienne.
■ Apparition au cours de la vie.
■ Facteurs favorisants: mauvaise hygiène de vie, variants et/ou polymorphismes géné
tiques restant à préciser.
■ C-LDL souvent< 2,20 g/1 (à titre indicatif, pas une règle absolue).
Signes cliniques rares.
2. Hypercholestérolémie familiale
Autosomique dominante.
Forme hétérozygote :
► prévalence : 1/250 à 1/500;
► C-LDL> 1,90 g/1, souvent> 2,20 g/1, jusqu'à 4 g/1;
► signes cliniques fréquents (30 % des cas), complications cardiovasculaires à partir
de 40 ans.
■ Forme homozygote
► prévalence: 1/250 000 à 1/million;
► C-LDL: 4 à 10 g/1;
► signes cliniques dès l'enfance;
► complications cardiovasculaires dès la première décennie.
70 Diagnostic des dyslipidémies
3. Hypercholestérolémies secondaires
Hypothyroïdie, cholestase, syndrome néphrotique, anorexie, déficit en hormone de
croissance.
■ Corticoïdes, immunosuppreseurs, antirétroviraux.
B. Les hypertriglycéridémies
1. Chylomicronémie familiale
Exceptionnelles.
■ Transmission autosomique récessive.
Il Mutations du gène de la lipoprotéine lipase+++ ou d'autres protéines impliquées
dans sa synthèse ou son activité.
■ Hypertriglycéridémie souvent majeure > 10 g/1 observée à plusieurs reprises.
■ Après décantation du sérum: chylomicrons en surface avec un sérum opalescent si
élévation des VLDL ou clair en l'absence d'élévation des VLDL.
Apparition généralement dans l'enfance.
2. Chylomicronémie multifactorielle
Rare.
■ Début plus tardif.
Il Facteurs génétiques avec une déficience partielle de l'activité de la LPL ou d'autres
protéines impliquées dans son activité (hétérozygotie, polymorphisme) associée à des
facteurs favorisants (syndrome métabolique, alcool, œstrogènes, grossesse).
■ Triglycéridémie variable au cours du temps.
Fréquemment, les VLDL sont associées aux chylomicrons.
■ Expression variable chez les membres d'une même famille et chez un patient donné
au cours du temps (hypercholestérolémie, hypertriglycéridémie, dyslipidémie mixte).
Triglycéridémie: 1,5 à 5 g/1, cholestérol total: 2,5 à 3,5 g/1. ApoB élevée.
2. Dysbêtalipoprotéinémie
Plus rare, prévalence: 1/5000 à 1/10000.
■ Phénotype E2/E2 de l'apoE, en sachant qu'un faible pourcentage de ces patients
développent une dyslipidémie (nécessité de la présence de facteurs favorisants une
hypertriglycéridémie).
■ Diminution majeure de l'affinité de l'apoE pour le récepteur des LDL: diminution
du catabolisme par la voie des récepteurs des remnants des chylomicrons et des
VLDL (IDL).
■ Ces remnants peuvent être mis en évidence par électrophorèse des lipoprotéines sur
gel d'agarose objectivant la présence d'une bande large en bêta.
■ Hypertriglycéridémie et hypercholestérolémie avec une concentration sérique d'ApoB
normale ou légèrement augmentée (diagnostic différentiel avec l' hyperlipémie
combinée familiale).
3. Dyslipidémies mixtes secondaires
■ Grossesse, insuffisance rénale chronique, syndrome néphrotique, VIH.
■ Corticoïdes, anti-rétroviraux, immunosuppresseurs, diurétiques thiazidiques.
72
FICHE FLASH
D « L'exploration d'une anomalie lipidique » comporte 5 paramètres sériques: aspect du sérum, cholestérol
total, cholestérol LDL, cholestérol HDL, triglycérides.
D En l'absence d'hypertriglycéridémie supérieure à 5 mmol/1 il n'est pas obligatoire que le patient soit à
jeun pour la réalisation d'une EAL.
D Les dosages d'apolipoprotéines A1 et B sont rarement nécessaires et souvent ajoutés à l'initiative du
biologiste.
D Valeurs normales: triglycérides < 1,5 g/1 (1,7 mmol/1), cholestérol LDL < 1,6 g/1 (4,1 mmol/1), cholestérol
HDL > 0,40 g/1 (1,03 mmol/1).
D L'hypercholestérolémie familiale monogénique est associée à un risque cardiovasculaire élevé et doit être
différenciée des autres causes d'hypercholestérolémie.
D En cas de suspicion d'hypercholestérolémie familiale, elle peut, dans la majorité des cas être confirmée
par la mise en évidence d'anomalies génétiques.
D Ne pas confondre valeurs cibles et valeurs normales: les valeurs cibles sont définies en fonction du risque
cardiovasculaire et peuvent être beaucoup plus sévères que les valeurs normales.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - QCM
QCM
► 3. Quels sont le (ou les) paramètre(s) inclus dans l'exploration d'une Anomalie Lipidique
ou EAL?
A. Triglycérides
B. Cholestérol total
C Cholestérol HOL
D. Cholestérol LOL
E. Apolipoprotéine B
Réponse: A, B, C, D
ITEM 238
HYPOGLYCEMIE CHEZ L'ADULTE
ET CHEZ L'ENFANT
Laurence DUVILLARD
1. INTRODUCTION
En dehors des patients diabétiques traités (insuline, antidiabétiques oraux ) pour lesquels le diagnostic est
aisé et ne demande pas d'investigations supplémentaires, la démarche diagnostique comportera deux étapes:
affirmer l'hypoglycémie;
en rechercher l'étiologie;
L'insuline est synthétisée par les cellules 13 pancréatiques sous forme de pré-proinsuline transformée en
pro-insuline dans l'appareil de Golgi. La pro-insuline est ensuite clivée pour libérer de manière équimolaire
le peptide C et l'insuline. Néanmoins, en raison de demi-vies différentes (4 min pour l'insuline et 30 min
pour le peptide C), les concentrations plasmatiques de ces 2 molécules ne sont pas équivalentes. Une partie
de la pro-insuline est sécrétée dans le plasma, où elle exerce une faible activité insulinique et possède une
demi-vie de 30 min.
En présence d'une insulinémie élevée, les dosages de peptide Cou de la pro-insuline permettent d'affirmer
l'origine endogène ou non de l'hyperinsulinisme.
2. L'épreuve du jeûne
Elle permet de reproduire l'hypoglycémie et constitue l'examen de référence. Elle peut
être prolongée jusqu'à 72 heures.
La mesure des concentrations sériques d'insuline, de peptide Cet de pro-insuline lorsque la
glycémie est inférieure à 0,6 g/l permettent de distinguer plusieurs cas de figure répertoriés
dans le tableau 1.
Hypoglycémie Hypoglycémie
Hypoglycémie
avec sans
avec hyperinsulinisme
hyperinsulinisme hyperinsulinisme
endogène
exogène endogène
FICHE FLASH
0 Chez un patient non diabétique, l'hypoglycémie se définit par une glycémie veineuse inférieure à
2,75 mmol/1 (0,50 g/1), à condition qu'elle soit associée à des signes de neuroglucopénie rapidement
corrigés par le resucrage.
o En dehors des causes évidentes, le diagnostic étiologique peut être orienté par le dosage sérique d'insuline,
de peptide Cet de la pro-insuline réalisés au cours d'un malaise ou lors d'une épreuve de jeûne.
o L'élévation simultanée de ces trois paramètres évoque une sécrétion endogène d'insuline (prise de
sulfonylurée, insulinome, nésidioblastome, hyperplasie des cellules f3 pancréatiques).
o L'association d'une insulinémie élevée et de concentrations de peptide Cet de pro-insuline basses évoque
une origine exogène de l'insuline.
CJ Des concentrations basses de ces trois paramètres sont en faveur de la sécrétion d'autres hormones
hypoglycémiantes.
ITEM 245
1. INTRODUCTION
Le diabète est défini par la présence d'une hyperglycémie. La dérégulation du contrôle de la glycémie
peut être la conséquence de différents mécanismes physiopathologiques. On distinguera notamment
Le diabète de type 1 lié à la destruction des cellules bêta des îlots de Langerhans par un processus
auto-immun conduisant à une carence majeure en insuline. Ce diabète est souvent révélé par une
acidocétose
■ Le diabète de type 2 lié à une résistance des tissus périphériques à l'action de l'insuline ainsi qu'à un
dysfonctionnement des cellules bêta pancréatiques induisant une insulinopénie relative
■ Le diabète gestationnel transitoire au moment de la grossesse
■ Les diabètes MODY (Maturity-Onset Diabetes of the Young) liés à un défaut primaire du fonctionne
ment des cellules bêta. Ces diabètes sont non cétosiques et non insulinodépendants (bien que certaines
formes puissent nécessiter une insulinothérapie au cours de leur évolution)
L'hyperglycémie chronique est susceptible d'entraîner à long terme des complications dégénératives
microvasculaires. La biologie permet le diagnostic des complications rénales.
78 Diabète sucré de type 1 et de type 2 chez l'adulte et chez l'enfant. Complications
A. Diagnostic du diabète
1. En dehors de la femme enceinte
Le diagnostic de diabète sucré est posé si
la glycémie à jeun est > 1,26 g/1 (7 mmol/1) à 2 reprises;
ou
■ la glycémie est supérieure à 2 g/1 (11,1 mmol/1) à n'importe quel moment de la journée,
accompagnée de signes cliniques d' hyperglycémie.
2. Diabète gestationnel
■ Au moment où cet ouvrage est rédigé, l'HbAlc n'est pas utilisée en France pour poser
un diagnostic de diabète.
■ D'un point de vue biochimique, l'HbAlc est une molécule d'HbAO dont une chaîne
Ba fixée une molécule de glucose sur sa valine N-terminale (site le plus réactif
de l'HbAO). Il s'agit d'une glycation non enzymatique, processus physiologique
qui est amplifié en cas d'hyperglycémie.
■ Ne pas confondre l'HbAlc avec d'autres HbAl glyquées qui ont fixé d'autres oses
et qui ne sont pas utilisées en clinique.
■ L'HbAlc reflète la glycémie moyenne des 2 à 3 derniers mois, en sachant que les
valeurs de glycémie ont d'autant plus d'impact sur le résultat de l'HbAlc qu'elles
sont proches du jour de son dosage.
■ La suppression de la fonction amine N-terminale implique une modification de charge
dans certaines conditions de pH. Cette propriété est utilisée pour séparer l'HbAlc
et la quantifier par chromatographie d'échange ionique ou électrophorèse capillaire.
Il Les dosages d'HbAlc sont standardisés et présentent d'excellentes performances
analytiques.
■ Les techniques de référence les plus anciennes (méthode du « National Glycohemo
globin Standardization Program (NGSP)) quanti.fient la chaîne B entière de l'Hb. Les
résultats sont exprimés en pourcentage de l'Hb totale. On a reproché à ces techniques
un manque de spécificité puisqu'elles intègrent d'autres Hb modifiées que la chaîne
B glyquée. Une autre technique de référence a été développée (méthode de l'Interna
tional Federation of Clinicat Chemistry and laboratory medicine » (IFCC)), mesurant
uniquement l'hexapeptide N-terminal de la chaîne B de l'Hb, donnant des valeurs
inférieures à celles obtenues par les premières techniques de référence. Les résultats
sont exprimés en mmol/mol.
il À l'heure actuelle, les résultats et les recommandations françaises restent exprimés
en % de l'Hb totale, avec une conversion possible en unités IFCC: HbAlc (NGSP)
= 0,0915 HbAlc (IFCC) + 2,15.
Ili! Il est par ailleurs possible de quantifier l'HbAlc par méthode immunologique.
■ À la différence des méthodes immunologiques, les techniques chromatographiques
et électrophorétiques permettent de mettre en évidence les éventuels variants (HbC,
HbE, HbS...) de l' hémoglobine. Ainsi, il est recommandé de réaliser le 1er dosage d'un
patient par l'une de ces techniques.
c. Valeurs cibles
■ Diabète de type 1 : < 7 %
■ Diabète de type 2 : l'objectif est très variable en fonction du profil du patient.
80 Diabète sucré de type 1 et de type 2 chez l'adulte et chez l'enfant. Complications
2. Fructosamine
La fructosamine correspond à l'ensemble des protéines sériques glyquées.
Elle reflète l'équilibre glycémique sur les 2 à 3 dernières semaines seulement (l'albumine,
protéine majoritaire a en effet une ½ vie de 21 jours).
Les performances analytiques des techniques de dosage sont moins satisfaisantes que
pour l'HbAlc.
Il n'y a pas de valeurs cibles définies pour ce paramètre.
Son utilisation est réservée aux situations où l'HbAlc n'est pas valide, et si l'on souhaite
objectiver un changement rapide de l'équilibre glycémique.
Toute modification de la vitesse de renouvellement des protéines sériques impacte le résultat.
Albuminurie
Microalbuminurie Macroalbuminurie
normale
Albuminurie/créatininurie < 2,5 (homme) 2,5 à 30 (homme)
>30
(mg/mmol) < 3,5 (femme) 2,5 à 30 (femme)
► la kaliémie est basse, normale ou élevée : il existe une déplétion potassique au sein
de l'organisme en raison de l'hyperaldostéronisme secondaire à la déshydratation
extracellulaire, mais l'acidose a un effet hyperkaliémiant. La mise en route de
l'insulinothérapie peut entraîner une baisse importante de la kaliémie.
82 Diabète sucré de type 1 et de type 2 chez l'adulte et chez l'enfant. Complications
2. Coma hyperosmolaire
Il s'agit d'une forme grave de décompensation du diabète sucré, avec une déshydratation
intense.
Le diagnostic biologique associe :
une glycémie > 6 g/l;
■ une osmolalité plasmatique > 350 mOsm/kg;
■ l'absence d'acidose;
■ une cétonémie/urie absente ou faible.
La natrémie peut être initialement normale mais s'élève au fur et à mesure que la
déshydratation s'installe pour dépasser 150 mmol/l
Attention : si la natrémie est mesurée par potentiométrie indirecte, calculer la natrémie
corrigée (cf. ci-dessus)
83
FICHE FLASH
O Le diagnostic s'établit par mesure de la glycémie à jeun ou d'une glycémie à n'importe quel moment de
la journée.
D Le diagnostic de diabète gestationnel s'établit par une mesure de la glycémie à jeun au 1°' trimestre ou
d'une hyperglycémie provoquée par voie orale entre la 24° et la 28 ° semaine d'aménorrhée.
D La surveillance de l'équilibre glycémique à moyen terme fait appel essentiellement à l'HbA1c qui
correspond à l'HbAO ayant fixé une molécule de glucose sur son extrémité N-terminale. Elle reflète
l'équilibre glycémique des 2 à 3 derniers mois.
O L'HAS a défini une valeur cible d'HbA1c pour différents profils de patients.
O Dans certaines situations particulières, on peut quantifier la fructosamine qui reflète l'équilibre glycémique
sur les 2 à 3 dernières semaines seulement. li n'y a pas de valeurs cibles pour le dosage de la fructosamine.
D Les 2 complications aiguës du diabète sont l'acidocétose et le coma hyperosmolaire.
CJ L'acidocétose associe une hyperglycémie (>2,5 g/1), une acidose métabolique et une cétonurie franche.
□ Le coma hyperosmolaire associe une hyperglycémie majeure(> 6 g/1) et une hyperosmolalité plasmatique.
La cétonurie est basse et il n'y a pas d'acidose.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - QCM
OCM
--------------------------------------------------------------------------
► 1. En dehors de la grossesse, le diagnostic de diabète est posé si:
A. La glycémie à jeun est> 1,26 g/I (7 mmol/I) à une reprise
B. La glycémie à jeun est> 1,1 g/I (6,1 mmol/I) à 2 reprises
C. La glycémie 2 h après un repas est> 1,4 g/I (7,8 mmol/I) à une reprise
D. La glycémie est> 2 g/I quel que soit le moment de la journée à une reprise
E. LHbA1c est> 6 %
Réponse: D
► 2. l.'.HbA1c:
A. Permet d'estimer l'équilibre glycémique moyen des 2 à 3 derniers mois
B. Est sous-estimée en cas d'hémolyse intravasculaire
C. Est sous-estimée en cas de carence martiale
D. Doit être < 7 % chez un patient diabétique de type 1
E. Doit être < 6 % chez un patient diabétique de type 1 avec une hémoglobine S à l'état
hétérozygote
Réponses : A, B, D
ITEM 248
1. INTRODUCTION
La dénutrition est définie comme un déséquilibre entre les apports et la dépense énergétique de
l'organisme. Ce déséquilibre conduit à des pertes tissulaires (amaigrissement non volontaire) ayant
des conséquences fonctionnelles délétères. Lorsque les apports alimentaires ne sont pas équilibrés,
on parle de malnutrition.
La dénutrition est un problème de santé publique qui touche tous les pays, même les pays développés.
En Europe la prévalence de la dénutrition varie entre 5 et 10 %, plus fréquente chez la personne âgée,
avec une prévalence estimée d'une personne sur cinq en 2050 selon l'INSEE. Par ailleurs, la dénutrition
est plus fréquente chez les personnes hospitalisées quelle que soit la tranche d'âge. En effet, l'IMC
diminue d'un point et demi après une semaine d'hospitalisation.
Les conséquences de la dénutrition sont multiples et dépendent de l'évolution de la maladie, de la rapidité
de la cicatrisation, de l'état immunitaire du patient, et enfin de complications infectieuses. Chez l'enfant,
la dénutrition entraîne une cassure de la courbe de croissance.
L'origine peut provenir d'un apport énergétique insuffisant, ou d'origine endogène (maladies chroniques
inflammatoires, cancer ou stress métabolique), ou de situations d'agression, d'origine exogène (infections),
conduisant à une perte tissulaire par hyper-catabolisme.
La dénutrition peut être d'installation aiguë ou chronique selon les circonstances d'apparition et les
pathologies sous-jacentes. Le plus souvent, son apparition est lente et parfois masquée par la prépondérance
du tissu adipeux ou la présence d'œdèmes.
La dénutrition aiguë sera toujours la conséquence d'une pathologie associée, médicale, chirurgicale ou
traumatique. Sa gravité dépend de celle de la maladie sous-jacente et de la prise en charge.
La dénutrition chronique peut s'installer de manière indépendante ou associée à des pathologies chroniques.
Les facteurs déclenchants peuvent être d'origine socio-économique, liés au vieillissement, ou à un état
dépressif.
86 Dénutrition chez l'adulte et l'enfant
A. Mécanismes de la dénutrition
1. Carences d'apport
Les causes d'une carence d'apport peuvent être multiples, en dehors de toute pathologie
sous-jacente: le manque de ressources économiques, l'isolement, l'état dépressif, un
déséquilibre alimentaire par une typologie du type végétalisme ou végétarisme. Elles peuvent
être secondaires à d'autres pathologies: troubles du comportement alimentaire (anorexie
mentale, boulimie), mauvais état bucco-dentaire, prescription médicale d'un régime trop
restrictif (hypolipidique, hypoprotéique, hyposodé, hypocalorique, hypoglucidique), de
séquelles neurologiques, alcoolisme chronique, de séquelles chirurgicales, secondaires à
la prise de médicaments qui modifient le goût ou provoquent de la diarrhée.
B. Conséquences de la dénutrition
La dénutrition s'accompagne d'une diminution de la masse maigre, notamment de la masse
musculaire et d'une altération des fonctions physiologiques musculaires et immunitaires.
Le décès survient lorsque la perte de la masse protéique atteint environ 50 %.
1. Immunodépression
La dénutrition est la première cause d'immunodépression. Celle-ci se manifeste par des
infections plus fréquentes et plus sévères à tous les niveaux: infections respiratoires,
bactériémies, infections du site opératoire, urinaires, etc. L'incidence des infections est plus
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 248 87
élevée chez les patients dénutris. Puis, les infections elles-mêmes majorent la dénutrition
et créent un cercle vicieux, entraînant parfois le décès du patient.
2. Diminution de la masse maigre
La dénutrition entraîne une perte musculaire provoquant parfois une véritable myopathie
carencielle. La myopathie diaphragmatique, est un facteur du retard de sevrage de la
ventilation artificielle. Le muscle cardiaque, en général est préservé, mais finit à long terme
par être défaillant. Par conséquent, on peut observer une insuffisance cardiaque congestive,
aggravée par des carences en micronutriments (vitamine Bl et sélénium).
3. Atteintes neurologiques périphériques
L'atteinte neurologique périphérique est une neuropathie diffuse, caractérisée par une
atrophie musculaire distale accompagnée d'une faiblesse musculaire et d'un déficit sensitif
(« en chaussettes» ou « en gants», une hypoesthésie du tronc « en plastron» et du crâne
« en calotte»). Parfois on observe une polyradiculonévrite, c'est-à-dire une atteinte
sensitivomotrice ascendante, diffuse, atteignant les racines des nerfs crâniens (troubles
de la déglutition) et des nerfs spinaux.
6. Atteintes hématologiques
L'anémie, la leucopénie, et la thrombocytopénie peuvent être observées de manière isolée
ou globale (pancytopénie). Elles sont la conséquence de carences en micronutriments (fer,
B12, folates et cuivre).
7. Autres conséquences
Modification de la pharmacocinétique des médicaments : par modification du volume
de distribution, de la liaison aux protéines, du métabolisme hépatique et de l'élimi
nation rénale. Ces modifications, parfois cytotoxiques, obligent parfois à arrêter le
traitement médicamenteux, entraînant un cercle vicieux aggravant la dénutrition.
■ Augmentation du coût de prise en charge des pathologies et augmentation des
hospitalisations.
1. Facteurs de risque
• Niveau socio-économique défavorable.
■ Personne âgée.
■ Troubles du comportement alimentaire.
■ Maladies psychiatriques.
R Maladies neurologiques.
88 Dénutrition chez l'adulte et l'enfant
2. Diagnostic clinique
L'anamnèse détaillée de l'histoire de la perte de poids permet d'identifier les patients
à haut risque. Une perte de poids 5 % en 3 mois est équivalent à 10 % en 6 mois. De
la même façon, une perte supérieure à 10 % en 1 mois ou à 15 % en 6 mois.
■ Le diagnostic de dénutrition est posé quand la perte de poids atteint 10 % du poids
habituel.
■ Index de masse corporel (IMC) : l'IMC correspond au rapport du poids (kg) sur le carré
de la taille (exprimée en mètres-carrés). Chez le patient grabataire, la taille peut
être estimée à partir de la formule de Chumlea qui tient compte de la distance
talon-genou. Une personne est dénutrie si l'IMC est inférieur à 18,5, sauf pour
la personne âgée (Item N ° 250) en raison de la prise du poids physiologique liée
à l'âge, la dénutrition est présente quand l'IMC est < 21.
3. Diagnostic biologique
Plusieurs marqueurs biologiques de dénutrition ont été proposés, mais aucun ne
possède une sensibilité et une spécificité suffisante pour être utilisé de manière isolée,
alors ils doivent être couplés soit à l'IMC, soit à d'autres marqueurs biologiques pour
poser le diagnostic de la dénutrition. Les marqueurs biologiques les plus utilisés
sont l'albumine et la transthyrétine, qui reflètent la disponibilité des acides aminés
(Tableau 1).
■ Albumine : synthétisée par le foie, constitue la protéine sérique la plus abondante
(valeurs normales 35-50 g/1), d'une demi-vie d'environ 21 jours, elle module la pres
sion oncotique et agit comme transporteur de multiples protéines et médicaments.
Sa diminution est observée dans la dénutrition, mais également dans de multiples
circonstances : insuffisance hépatique, pathologies rénales, entéropathies à perte
de protéines, etc. Toutefois, une concentration inférieure à 30 g/1 est un signe de
mauvais pronostic.
■ La tranthyrétine (préalbumine, TTR), est principalement synthétisée et catabolisée
par le foie et excrétée par les reins et le tractus gastro-intestinal, et forme un complexe
avec la renitol binding protein (RBP). Ce complexe permet le transport du rétinol et
des hormones thyroïdiennes. Les valeurs normales sont de 0,20-0,40 g/1, mais elles
varient en fonction de l' âge et du sexe. Son intérêt dans la dénutrition est le dépistage
d'une dénutrition récente encore inaperçue sur le plan clinique, et l'appréciation de
l'efficacité des mesures thérapeutiques nutritionnelles. Elle permet de classer les
patients en 3 catégories :
► 0,11-0,20 g/1 dénutrition modérée;
► 0,05-0,11 g/1 dénutrition sévère;
► < 0,05 g/1 pronostic vital engagé.
1. Anthropométrie :
Perte de poids avant l'admission : 2 kg ou 5 % en 1 mois ou 4 kg ou 10 % en 6 mois
IMC < 18,5 kg/m2
2. Biologie :
Albumine : < 30 g/I
Transthyrétine (préalbumine, TTR en g/I)
> 0,14 : pas de risque nutritionnel
0,10 - 0,14 risque nutritionnel moyen
< 0,05 risque nutritionnel majeur
3. Prévention de la dénutrition
La prévention implique un dépistage précoce lors de la consultation systématique chez le
pédiatre, ou dès l'admission et à tout moment de l'hospitalisation. Il existe un score basé
sur des paramètres cliniques (Tableau 2).
Risque Niveau
Risque
supplémentaire de risque Risque
liéà la Schéma de prise en charge
lié aux facteurs du nutritionnel
pathologie
associés patient
Absence de facteur
0 FAIBLE Aucune prise en charge spécifique
associé
Pathologie Un seul facteur Surveillance du poids
0
mineure associé
Surveillance simple de l'alimentation sur un
Deux facteurs support écrit pendant les trois premiers jours
2 d'hospitalisation
associés
MOYEN
Absence de facteur Prescription diététique médicale
associé Consultation diététique
Pathologie Un seul facteur Mise en place d'une prise en charge diététique
2 orale
moyenne associé
Deux facteurs
3 Évaluation de l'état nutritionnel
associés
Absence de facteurs Mesure précise des ingesta. Enquête alimentaire
3
associés Mise en place d'une prise en charge diététique
ÉLEVÉ orale, voire entérale
Pathologie Un seul facteur
3 4 Discuter rapidement de l'opportunité d'une
sévère associé
alimentation parentérale, si la voie digestive
Deux facteurs est impossible au-delà de 5 jours
5
associés
a. Cancer
Les organes affectés par le cancer, ainsi que le traitement anticancéreux, vont avoir des
conséquences métaboliques et modifier la composition corporelle. Les mécanismes en lien
avec la dénutrition sont en premier lieu la perte de la masse musculaire, l'état inflammatoire
chronique, le métabolisme tumoral, les obstacles de la masse tumorale (tumeurs digestives),
les effets secondaires du traitement (diarrhées, vomissements) et enfin l'état dépressif
souvent observé dans le cancer.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 248 91
•
Modlllclll01•aucocncl'-paltlOloglecandrlule
-
1 +
1
l
AlqnenlaUon de la Anor9xle Appoftaréüs DlrrirUlon de la Dimlulon du
TIIUllee du goOI U.,adlpeux
dépense énergétique.
TIIUllee du mél8bolllme et de rodoral H nuallalt8
:
Dl!NUTRfflOH - CACHEXIE
Anorexie multifactorielle:
Anorexie,
insuffisance de dialyse,
Apports alimentaires déséquilibre
Anorexie, anémie, troubles
Réduction des apports inadéquats par alimentaire, la
sensation de fonctionnelles digestifs,
alimentaires rapport à la dépense consommation de
satiété précoce dysgueusie, défaut de
énergétique calories d'origine
dépuration des molécules,
alcoolique
anorexigènes
Augmentation de la
Non Oui Oui Oui
dépense énergétique
Accélération
Non documenté Oui Oui Oui
renouvellement protéique
Inflammation Oui Oui Oui Oui
lnsulino-résistance Oui Oui Oui Oui
Anémie, parésie digestive,
acidose métabolique,
hypoandrogénie, Alcoolisme,
résistance à l'hormone malabsorption
de croissance, défaut intestinale,
Ma/absorption
Autres facteurs de Hypoxie cellulaire d'action de l'IGF-1, insuffisance
intestinale,
dénutrition documentés hypoandrogénie hyperparathyroïdie, pancréatique,
hypoxie cellulaire
déperditions défaut de synthèse
péridialytiques de de l'IGF-1,
nutriments, catabolisme hypoandrogénie
protéique induit par la
dialyse.
92 Dénutrition chez l'adulte et l'enfant
Devant une pathologie chronique ou un cancer, il est impératif, à chaque visite médicale
au cabinet ou en institution, de poser 4 questions :
quelle est la situation actuelle? IMC;
■ la situation est-elle stable? Évolution du poids dans le temps. Attention aux amai
grissements rapides (>5% en un mois);
■ la situation peut-elle s'aggraver? Estimation des apports par rapport aux besoins
énergétiques;
■ la pathologie du patient peut-elle aggraver la dénutrition? Existe-t-il un contexte
inflammatoire surajouté : infection, chirurgie.
A. Chez l'adulte
■ Recommandations diététiques.
■ Mesures correctives permettant d'augmenter les apports oraux :
► alimentation fractionnée;
► alimentation enrichie : augmentation de l'apport protéique et/ou calorique des
plats sans augmenter la quantité;
► alimentation à texture modifiée : si troubles de la mastication, déglutition;
► compléments nutritionnels oraux : préparation nutritives ± complètes.
La prise en charge diététique avec des compléments nutritionnels oraux (CNO) est indiquée
lorsque la prise alimentaire orale est possible mais spontanément insuffisante pour couvrir
les besoins nutritionnels. Leur composition doit être adaptée aux besoins nutritionnels
particuliers du patient.
■ Règles de prescription des CNO :
► prescription précoce avant l'apparition d'une dénutrition sévère;
► apport d'un minimum de 30 g de protéines ou 400 kcal/j et au maximum 80 g de
protéines ou 1000 kcal/j;
► poursuite jusqu'à ce que les apports spontanés soient suffisants.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 248 93
B. Chez l'enfant
La prise en charge nutritionnelle chez l'enfant doit être encadrée par des professionnels de
santé. La dénutrition sévère est prise en charge à l'hôpital. Le choix de la voie (orale, entérale
ou parentérale) dépend de la gravité de la dénutrition et de la présence de troubles digestifs.
Orale : préférences alimentaires de l'enfant, mais enrichies en calories.
■ Entérale : en cas d'alimentation par voie orale impossible ou insuffisante, et si le tube
digestif est inutilisable.
► Sonde nasogastrique : attention aux risques : déplacement de la sonde, fausse
route, vomissements, accident d'inhalation.
► Gastrostomie : plus simple d'utilisation, mais réservée si l'assistance nutritionnelle
dépasse 2-3 mois.
FICHE FLASH
W Mécanismes de la dénutrition:
► 1. carences d'apport (pauvreté, dépression, végétalisme, végétarisme, troubles du comportement
alimentaire);
► 2. augmentation des besoins (situations d'agression exogène ou endogène);
► 3. augmentation des pertes (malabsorption, pathologies chroniques).
□ Conséquences de la dénutrition: Immunodépression; sarcopénie; perturbations neurologiques centrales
et périphériques, endocriniennes et hématologiques.
U Facteurs de risque: Niveau socio-économique défavorable, personne âgée, nourrisson, troubles du
comportement alimentaire, maladies psychiatriques et maladies neurologiques.
□ Diagnostic de la dénutrition: Clinique, IMC < 18,5 kg/m2 ou perte de poids avant l'admission: 2 kg ou 5 %
en 1 mois, soit 4 kg ou 10 % en 6 mois. Biologique: albumine < 30 g/1, pré-albumine inférieure à 50 mg/1.
0 Toute consultation de pédiatrie, doit comporter la détermination de l'IMC. Toute pathologie peut être
cause de dénutrition chez l'enfant. Elle doit être systématiquement recherchée chez l'enfant malade.
95
1. INTRODUCTION
La perte de poids est une cause fréquente de consultation. Elle peut s'observer dans un contexte
de maladies évolutives entraînant une altération de l'état général ou témoigner d'un trouble du
comportement alimentaire d'origine psychique.
L'amaigrissement est une perte de poids de novo, quel que soit le poids initial, la perte de poids est
évolutive (à la différence de la maigreur constitutionnelle), le plus souvent récente ou semi-récente :
2 % du poids en une semaine, 5 % en un mois, ou 10 % en six mois. Une perte involontaire de 5 kg est
toujours significative.
Diagnostic différentiel : la maigreur constitutionnelle, dont le poids est stable mais inférieur à des
normes (IMC entre 16 et 18 kg/m2), variant avec l'environnement socioculturel, les époques, la mode.
Il existe un caractère familial fréquent.
Une grande variété de pathologies sont impliquées : métaboliques, nutritionnelles, inflammatoires,
tumorales et psychiatriques.
L'amaigrissement nécessite une démarche diagnostique rigoureuse, en insistant sur l'anamnèse et
l'examen clinique. Mais 10 % des cas restent sans diagnostic.
A. Anamnèse
L'interrogatoire reconstitue l'histoire pondérale et ses circonstances. Mesure de la perte de poids, de sa
cinétique et de sa durée (IMC minimal, IMC maximal et poids de stabilisation). Rechercher une maigreur
ancienne ou séquellaire à une pathologie.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 249 97
Le contexte clinique est utile: âge, sexe, modifications du contexte familial, social ou
professionnel, antécédents (maigreur familiale ou séquellaire d'une affection antérieure),
conditions de vie, présence de signes généraux: anorexie, fièvre, asthénie; et fonctionnels
associés: diarrhées, nausées, sueurs, troubles du cycle menstruel, tremblements. On évalue
les habitudes alimentaires et l'état de l'appétit, quantification des apports alimentaires,
troubles du goût et de l'odorat. On recherche une consommation d'alcool, de tabac et de
drogues, ou des changements de l'activité physique. Enfin, il faut rechercher les antécédents
médico-chirurgicaux et les traitements prescrits ou ceux pris en automédication.
B. Enquête alimentaire
Elle peut révéler une relation de la perte de poids avec une diminution des apports
nutritionnels. Elle permet également de préciser la notion d'anorexie(+++) ou d'hyperphagie.
En effet, un appétit conservé voire une hyperphagie pourrait orienter vers une hyperthyroïdie.
D. Examens complémentaires
Les examens suivants sont utiles pour orienter le diagnostic étiologique:
■ NFS, VS, plaquettes, CRP;
■ Na, K, Cl, bicarbonates, calcium, phosphore, urée, créatininémie;
■ glycémie à jeun;
■ transaminases, phosphatases alcalines, taux de prothrombine;
■ TSH, T4 libre;
■ sérologie VIH;
■ ECBU;
■ électrophorèse des protides évaluant albumine et pré-albumine;
■ radiographie du thorax F + P;
■ échographie abdominale;
■ fibroscopie digestive haute (après 50 ans ou en cas de symptomatologie suggestive);
■ dépistage d'une malabsorption: albuminémie, vitamine B12, folates, graisses fécales,
test au D-xylose.
98 Amaigrissement à tous les âges
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Causes d'amaigrissement
L'ensemble de données clinico-biologiques pourront orienter le diagnostic, voici quelques
exemples d'orientation clinico-biologique.
E. Signes de gravité
La recherche des signes de gravité suivants est indispensable pour orienter le plus rapidement
possible le patient vers une nutrition artificielle :
IMC < 15;
• perte de poids > 30 %;
• hypotension artérielle;
• bradycardie;
• hypothermie;
• ralentissement psychomoteur;
•
•
hypoglycémie;
troubles ioniques (Na, K);
Il hypophosphorémie;
• hypoalbuminemie < 30 g/1;
• élévation des transaminases .
F. Moyens thérapeutiques
Chez le sujet présentant une maigreur constitutionnelle : encourager la consommation
d'une alimentation plus énergétique et la prise de collations.
En cas d'amaigrissement anormal lié à une pathologie chronique ou chez le sujet
âgé : conseiller une augmentation des apports caloriques en prenant des mesures
d'accompagnement social.
■ Critères de choix des modalités de prise en charge (HAS) :
► le statut nutritionnel de la personne âgée;
► le niveau des apports alimentaires énergétiques et protéiques spontanés;
► la sévérité de la (des) pathologie(s) sous-jacente(s);
► les handicaps associés ainsi que leur évolution prévisible;
► l'avis du malade et/ou de son entourage ainsi que les considérations éthiques.
Ill. EN RÉSUMÉ
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ITEM 69
TROUBLES DES CONDUITES
ALIMENTAIRES : CONNAÎTRE
LES PRINCIPALES ANOMALIES
MÉTABOLIQUES ASSOCIÉES
Rosa-Maria GUEANT-RODRIGUEZ
1. INTRODUCTION
Les troubles du comportement alimentaire (TCA) sont définis comme des comportements visant à
contrôler son poids de manière significative en nuisant à la santé physique et à l'adaptation psychosociale,
sans être liés à une affection organique ou à un trouble psychiatrique. Ces troubles ont comme point
commun, l'altération de la perception de la silhouette et du poids corporel. Même si l'origine des TCA
est souvent psychique (adaptation à des situations de stress), ils évoluent vers la mise en place d'une
sous ou surnutrition engendrant des effets négatifs pour la santé. C'est pourquoi, les TCA doivent
être repérés précocement avant d'engager le pronostic vital de l'individu.
Leur origine est multifactorielle avec des facteurs de risque (terrain génétique, anomalies biologiques
préexistantes, facteurs déclenchants comme la puberté) et des facteurs d'entretien (déséquilibres biologiques
induits par les TCA, bénéfices relationnels ou psychologiques).
Les TCA apparaissent en général à l'adolescence, autour de la puberté à cause des transformations corporelles
et psychiques caractéristiques de cette période.
La classification de l'American Psychiatrie Association (DSM-5) retient 3 types de TCA:
l'anorexie mentale (ou anorexia nervosa);
■ la boulimie (ou bulimia nervosa);
l' hyperphagie boulimique ou l'accès hyperphagique (Bing-Eating Disorder).
Il existe, cependant, d'autres formes moins fréquentes comme pica, mérycisme, restriction ou évitement
de l'ingestion d'aliments et les troubles dits non spécifiques.
102 Troubles des conduites alimentaires : connaître les principales anomalies métaboliques associées
A. Repérage cible
Le suivi de paramètres anthropométriques permet de repérer une cassure de la courbe de
croissance chez l'enfant et l'adolescent.
2. Diagnostic différentiel
■ L'examen clinique exhaustif et les examens paracliniques peuvent orienter le diagnostic
vers d'autres pathologies :
► scanner et IRM : tumeurs cérébrales : craniopharyngiomes, tumeurs du tronc
cérébral;
► NFS : hémopathies, leucémie;
► NFS, endoscopie : maladie de Crohn;
► TSH, T3, T4 : hyperthyroïdie;
► glycémie, auto-anticorps anti-insuline : diabète;
► dosage des hormones de l'axe corticotrope : panhypopituitarisme;
► troubles obsessionnels compulsifs (attention, il s'agit aussi d'une comorbidité
fréquente);
► troubles psychotiques chroniques et notamment schizophrénie;
► phobies alimentaires, autres TCA ou de l'ingestion d'aliments;
► épisodes dépressifs caractérisés.
B. Prise en charge
1. Évaluation globale
■ La prise en charge dépend du degré de gravité, cependant, il est recommandé qu'en
dehors d'une situation d'urgence vitale ou psychiatrique, toute prise en charge soit
initialement ambulatoire. Elle doit être multidisciplinaire :
► un clinicien (non-psychiatre), qui peut être le médecin de premier recours (médecin
généraliste ou pédiatre) s'il est prêt à en assumer les exigences;
► un psychiatre, pédopsychiatre ou un psychologue, du fait de la souffrance psychique
et des fréquentes comorbidités psychiatriques.
104 Troubles des conduites alimentaires : connaître les principales anomalies métaboliques associées
a. Objectif pondéral
L'objectif pondéral est à discuter avec le patient et sa famille, il doit être progressif. Il est
déterminé en fonction de l'âge, des antécédents pondéraux et du poids permettant de
restaurer les menstruations et l'ovulation pour les femmes. Dans un premier temps, un
arrêt de perte de poids est le premier objectif avant la reprise du poids, un gain de 1 kg
par mois est un objectif acceptable.
En début d'une renutrition, la réalisation d'un bilan hydroélectrolytique avec phosphorémie
est recommandée.
C. Critère d'hospitalisation
Comme indiqué précédemment, l'hospitalisation aura lieu lorsque le risque vital est engagé
(somatique ou psychologique) et que les soins consentis sont impossibles. L'indication repose
sur plusieurs critères cliniques et/ou biologiques. Ils sont différents selon la tranche d'âge.
Chez l'adulte
Perte de poids de 20 % en 3 mois
Malaises et/ou chutes ou pertes de connaissance
Anamnestiques
Vomissements incoercibles
Échec de la renutrition ambulatoire
IMC< 14 kg/m2
Signes cliniques de déshydratation
Amyotrophie importante avec hypotonie axiale
Hypothermie< 35,5 °C
Cliniques
Hypotension artérielle 90/60 mmHg
Fréquence cardiaque
Bradycardie sinusale, FC< 40 bpm
Tachycardie de repos, FC> 60 si IMC< 13 kg/m2
Hypoglycémie symptomatique< 0,6 g/I ou asymptomatique si> 0,3 g/I
Hypokaliémie< 3 mEq/I
Hypophosphorémie< 0,5 mmol/I
Natrémie:
Biologiques < 125 mmol/I( potomanie, risque de convulsions)
et paracliniques < 150 mmol/I( déshydratation)
Insuffisance rénale: clairance de la créatinine< 40 ml/mn
Cytolyse hépatique(> 10xN)
Leuconeutropénie(< 1 000/mm ou neutrophiles< 500/mm)
Anomalies de l'ECG en dehors de la fréquence cardiaque
Ill. BOULIMIE
A. Épidémiologie
La prévalence de la boulimie est de 1 à 3 % chez les femmes et de 0,1 % à 0,5 % chez les
hommes. Contrairement aux TCA qui affectent en très grande majorité des femmes,
40 % des personnes qui souffrent d'hyperphagie boulimique sont des hommes.
L'incidence de la boulimie est la plus forte dans la tranche d'âge 10-19 ans et serait
environ 2,5 fois plus importante en zone urbaine qu'en zone rurale. Les patients
souffrant de boulimie consultent peu (seulement 12 % en parleraient à un médecin
généraliste et la moitié aurait recours à un psychiatre).
B. Clinique
La forme clinique la plus fréquente est la crise normopondérale. Lors de la crise, le patient
consomme une grande quantité d'aliments, en général très caloriques de manière massive
et frénétique. La consommation massive prime et le goût est en général indifférent. La crise
survient à distance des repas, à l'abri des regards. L'accès est suivi par des vomissements
autoprovoqués. Les vomissements s'accompagnent d'un sentiment de honte et de dégoût
de soi. En dehors des vomissements, le patient peut contrôler son poids par un régime
alimentaire, en alternant l'anorexie-boulimie, puis de l'exercice physique intense, ou par
des sauts de repas.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 69 107
C. Comorbidités et complications
Les patients souffrants de boulimie ou d'hyperphagie ont souvent des problèmes dépressifs
associés, ainsi que des addictions. Les adolescents peuvent avoir une obésité dans la vie
adulte. Les complications à long terme incluent des problèmes dentaires, une obésité, un
diabète et des maladies cardiovasculaires.
E. Diagnostic différentiel
Une bonne anamnèse et un bon examen clinique permettent d'exclure une cause organique
d'hyperphagie. L'évaluation par un psychiatre permet de rechercher d'autres pathologies.
Il ne faut pas confondre l'accès boulimique avec des fringales, du grignotage, qui se
caractérisent par un choix alimentaire qui répond à une sensation de faim et par un choix
volontaire des aliments consommés :
certaines tumeurs cérébrales et certaines formes d'épilepsie;
■ syndrome de Klein-Levin( hypersomnie et hyperphagie);
■ syndrome de Kliver-Bucy(agnosie visuelle, hyperoralité, hypersexualité et hyperphagie);
■ diabète;
Il épisode dépressif;
■ trouble de la personnalité de type borderline;
■ anorexie mentale de type accès hyperphagiques/purgatifs.
F. Comorbidités
■ Troubles addictifs dans 30-40 % des cas(alcool, tabac, médicaments anxiolytiques).
■ Épisodes dépressifs fréquents.
Il Personnalité borderline.
■ Troubles anxieux et phobie sociale.
108 Troubles des conduites alimentaires: connaître les principales anomalies métaboliques associées
H. Prise en charge
Le dépistage précoce est difficile. En effet ce trouble reste souvent caché. Le patient consulte
souvent pour un désir de perte de poids, alors que le poids reste dans la normale, ou bien
pour des troubles du sommeil.
Comme pour l'anorexie mentale, la prise en charge doit être ambulatoire, et idéalement
par le couple médecin et psychiatre. Si possible elle doit associer la famille.
Un traitement par antidépresseur ISRS (fluoxétine type Prozac") à dose plus élevée que
dans la dépression est efficace.
Il ne faut pas négliger l'aspect nutritionnel en commençant par une phase de renutrition,
et de prendre en charge d' éventuelles complications sur le plan digestif (œsophagite),
dentaire, cardiovasculaire, rénal et endocrinien.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 69 109
1. Critères d'hospitalisation
À différence de l'anorexie mentale, les critères d' hospitalisation ne sont pas clairement
définis:
A. Épidémiologie
Sa prévalence est estimée autour de 3-5 %. Le sex-ratio est 1/2 homme/femme. Selon
certains auteurs, près de la moitié des obèses souffriraient d'une hyperphagie boulimique.
Les patients consultent pour la prise en charge des conséquences de l'obésité.
B. Clinique
Elle se caractérise par des épisodes récurrents d' hyperphagie incontrôlée: prise alimentaire
largement supérieure à la moyenne en moins de 2 heures, associée à une impression de
perte de contrôle des quantités ingérées. Les épisodes sont associés au moins à 3 des
éléments suivants:
manger beaucoup plus vite que la normale;
■ manger jusqu'à éprouver une sensation pénible de distension abdominale;
■ manger de grandes quantités de nourriture en l'absence d'une sensation physique
de faim;
■ manger seul parce que l'on est gêné de la quantité de nourriture que l'on absorbe;
se sentir dégoûté de soi-même, déprimé ou très coupable après avoir mangé.
Et surtout le trouble n'est pas associé à l'utilisation récurrente de comportements
compensatoires inappropriés;
110 Troubles des conduites alimentaires : connaître les principales anomalies métaboliques associées
C. Diagnostic différentiel
Le diagnostic différentiel est similaire à la boulimie
tumeurs cérébrales, certaines formes d'épilepsie;
■ syndrome de Klein-Levin;
syndrome de Klüver-Bucy;
■ obésité;
■ épisodes dépressifs;
■ troubles bipolaires;
Il troubles de la personnalité;
■ boulimie.
D. Prise en charge
Le dépistage et la prise en charge précoce sont des éléments de succès. Chez le patient
obèse, le dépistage devrait être systématique.
A. PICA
Pica est le nom du trouble alimentaire caractérisé par l'ingestion répétée de substances
non nutritives pendant au moins 1 mois (plâtre, plomb, cheveux, cailloux, papier,
plastique, etc.). Il est souvent dû à une carence martiale ou en zinc, ou à un trouble du
neuro-développement sévère.
B. MÉRYCISME
C'est la régurgitation répétée de nourritures pendant une période d'au moins un mois. Les
aliments peuvent être remastiqués, réavalés ou recrachés. Il touche les enfants de 3 mois
à un an, rarement l'adulte.
111
FICHE FLASH
O Trois troubles du comportement alimentaire (TCA) :
► l'anorexie;
► la boulimie;
► l'hyperphagie boulimie.
O Il est important d'éliminer les causes médicales non-psychiatriques devant tout TCA ainsi que d'évaluer
les nombreuses répercussions de tels troubles.
O Évaluer les répercutions organiques.
O Les comorbidités psychiatriques sont fréquentes et doivent être recherchées.
O Le risque suicidaire doit être systématiquement évalué.
O Les critères d'hospitalisation, notamment pour l'anorexie, doivent être connus.
O L'hyperphagie boulimie doit être évoquée chez tous les patients présentant une obésité.
112
+ Treasure J., Claudino A.-M., Zucker N., Eating Disorders, Lancet. Feb. 2010, 375(97 14),
p. 583-593.
doi: 10.1016/S0140-6736(09)61748-7.
+ HAS 2010. Anorexie mentale. Prise en charge
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2013-03/reco-
2clics_-_anorexie_-mentale.pdf
+ HAS 2010. Anorexie mentale. Prise en charge. Argumentaire
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-09/argu_
anorexie_mentale.pdf
+ HAS 2010. Anorexie mentale. Prise en charge. Recommandations
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-09/reco_
anorexie_mentale.pdf
+ HAS 2010. Anorexie mentale. Prise en charge. Repérage
https ://www.has-sante.fr/portai I/upload/docs/application/pdf/2010-09/fs_
anorexie_1_cdp_300910.pdf
+ HAS 2010. Anorexie mentale. Prise en charge. Premiers soins spécialisés et filières de
prise en charge.
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-09/fs_
anorexie_2_cdp_300910.pdf
+ HAS 2010. Anorexie mentale. Prise en charge. Critères d'hospitalisation
https ://www. has-sa nte. fr/portai I/upload/docs/application/pdf/2010-09/fs_
anorexie_3_cdp_300910.pdf
+ HAS 2015. Boulimie et hyperphagie boulimique Repérage et éléments généraux de
prise en charge
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2015-12/rbp_
cadrage_boulimie_mel.pdf
ITEM 250
TROUBLES NUTRITIONNELS
CHEZ LE SUJET ÂGÉ
Rosa-Maria GUEANT-RODRIGUEZ
1. INTRODUCTION
Grâce aux progrès réalisés dans les domaines de la protection sociale et de la médecine, la population de
personnes âgées (âgées de plus de 65 ans) est en constante augmentation, de 0,6 milliard aujourd'hui, elle est
estimée à 1,5 milliard en 2050. Les personnes âgées constituent un groupe de population particulièrement
fragile avec de nombreuses morbidités. Un bon état nutritionnel constitue une arme contre les maladies
et/ou ses complications. Cependant, le sujet âgé est particulièrement à risque de dénutrition.
Un déséquilibre énergétique peut engendrer une dénutrition à cause de la fragilité, liée d'une part
aux modifications physiologiques liées au vieillissement et d'autre part aux pathologies associées et
leurs problèmes socio-économiques.
Plusieurs définitions de la dénutrition ont été proposées, celle la plus adaptée pour la personne âgée est
celle du groupe francophone de gériatrie : « C'est un état de santé associant une perte de poids supérieur
à 10 % en moins de six mois, une diminution de la masse corporelle totale, en particulier aux dépens de la
masse musculaire (index de masse corporelle inférieur à 21), concourant a un risque accru de chutes et de
maladies infectieuses».
La dénutrition aggrave le pronostic fonctionnel et vital de toute maladie inflammatoire, infectieuse ou
tumorale. Elle doit donc être diagnostiquée précocement et traitée rapidement.
■ Psychosociales :
► isolement;
► maltraitance;
► faible niveau socio-économique;
► hospitalisation, institutionnalisation;
► dépression;
► deuil.
■ Troubles buccodentaires :
► appareillage inadapté;
► sécheresse buccale;
► dysgueusie;
► candidose.
■ Troubles de la déglutition :
► pathologies ORL;
► pathologies neurologiques.
■ Syndromes démentiels :
► maladie d'Alzheimer;
► maladie de Parkinson.
■ Polymédication :
► corticoïdes;
► traitements entraînant dysgueusie (IEC)/sécheresse buccale (anticholinergiques).
A. Modifications physiologiques
Les modifications physiologiques liées à l'âge chez le sujet âgé contribuent au
développement de la dénutrition.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 250 115
1. Tube digestif
La perception du goût est modifiée de manière physiologique, et liée à l'effet de nombreux
médicaments qui altèrent l' humidité buccale, et le goût. De plus, le sujet âgé présente souvent
un mauvais état bucco-dentaire. Seule une mastication indolore permet une alimentation
correcte. Dans l'estomac, il existe une hyposécrétion gastrique acide aboutissant parfois
au développement d'une augmentation de la flore microbienne et de troubles digestifs
et à une diminution de l'absorption de certains micronutriments. Cela peut provoquer
des troubles fonctionnels intestinaux : constipation, douleurs, etc. Toutes ces altérations
contribuent à une diminution de la prise alimentaire.
2. Modifications métaboliques
La masse hydrique diminue d'environ 20 % à 60 ans, les mécanismes de régulation de
l'eau sont altérés, le sujet perçoit mal la soif et le pouvoir de concentration des urines
est diminué, ayant comme conséquence des troubles d' hydratation.
Le changement de la composition corporelle avec le vieillissement a un effet profond sur
l'état et les besoins nutritionnels. À partir de 70 ans, la masse maigre et le poids total
diminuent. Cette réduction du poids corporel et la perte de masse maigre entraînent
un risque accru de sarcopénie, d'ostéoporose, de fragilité, une propension aux chutes,
aux fractures, aux infections et un risque général accru de morbidité et de mortalité.
La dénutrition est fréquente chez les personnes âgées.
Au niveau métabolique, la glycorégualtion est altérée avec d'une part, un retard de la
sécrétion du pic insulinique en réponse à l'état nourri et d'autre part, une diminution
de stockage du glucose dans le muscle. En outre, il existe une perte du calcium osseux,
et une diminution de l'absorption du calcium au niveau intestinal.
C. Hypercatabolisme
Cette situation est observée en milieu hospitalier dans toutes les formes graves de
maladies infectieuses (septicémie, abcès profond, etc.), néoplasiques (cancer terminal)
ou inflammatoires (pancréatite aiguë sévère, maladies inflammatoires systémiques).
Dans ce cas, la dénutrition s'accompagne d'une diminution précoce des marqueurs
de la dénutrition et une augmentation des marqueurs inflammatoires.
A. Données anthropométriques
La mesure du poids et de la taille doit être systématique à chaque consultation, elle devrait
même être effectuée au domicile et dans les institutions. La perte de poids est un signe
précoce de dénutrition. Au niveau hospitalier les services de gériatrie et de réanimation
doivent être équipés de chaises-balance couplées à une pesée pour les patients grabataires.
116 Troubles nutritionnels chez le sujet âgé
Chez les patients avec une cyphose dorsale, la taille est diminuée parfois de manière très
importante, dans ce cas, on mesure la distance talon-genou en cm, puis, on utilise la
formule de Chumlea pour estimer la taille du patient :
Femme: Taille (cm)= 84,9 - (0,24 x âge (années))+ (1,83 x distance talon-genou (cm))
Homme : Taille (cm)= 64,2 - ((0,04 x âge (années))+ (2,03 x distance talon-genou (cm))
C. Marqueurs biologiques
Ils doivent évaluer la composante protéique viscérale et surveiller l'évolution au cours
de la renutrition. Cependant aucun marqueur n'est spécifique de la dénutrition et ils
doivent donc être utilisés de manière isolée.
1. Albumine
De synthèse hépatique, l'albumine est la protéine sérique la plus abondante, sa demi-vie est
de 21 jours. Elle joue un rôle de transport de nombreuses molécules et assure le maintien
de la pression oncotique. Les concentrations sériques sont de 35 à 50 g/1. Une diminution
de l'albumine peut s'observer dans les états de dénutrition, dans l'insuffisance hépatique,
l'inflammation, lors des fuites protéiques glomérulaires ou digestives. Une augmentation
de l'albumine s'observe par hémoconcentration.
Le dosage de l'albumine permet le diagnostic et l'évolution de la renutrition. Cependant,
une valeur normale d'albumine n'exclue pas une dénutrition, en effet, les valeurs sériques
de l'albumine peuvent être normales dans les états d'hépatopathie chronique.
-
Dépistage d'une dénutrition chez une personne Agée
.
dosage de l'albumine
♦
1 Prise en charge rapide
l
Correction de risques nutritionnels
1
Prise en charge nutritionnelle 1
Statut nutritionnel
Normal Dénutrition Dénutrition sévère
Conseils diététiques Alimentation
Conseils diététiques Alimentation
Normaux Surveillance enrichie et CNO Réévaluation* à
enrichie Réévaluation* à 1 mois
15 jours
a. Conseils nutritionnels
Ill Respecter les repères du Programme National Nutrition Santé (PNNS).
■ Augmenter la fréquence des prises alimentaires dans la journée.
■ Éviter une période de jeûne nocturne trop longue (> 12 heures).
Il Privilégier les produits riches en énergie et/ou en protéines et adaptés aux goûts du
patient.
Il Organiser une aide au repas (technique et/ou humaine) et favoriser un environne
ment agréable.
b. !.:enrichissement de l'alimentation
Il Il consiste à enrichir l'alimentation traditionnelle avec différents produits de base
(poudre de lait, lait concentré entier,fromage râpé, œufs, crèmefraîche, beurrefondu,
huile ou poudres de protéines industrielles, pâtes ou semoule enrichies en protéines...).
■ Il a pour but d'augmenter l'apport énergétique et protéique d'une ration sans en
augmenter le volume.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 250 119
FICHE FLASH
o Dénutrition protéino-énergétique: déséquilibre entre apports et besoins alimentaires.
o Entraîne ou aggrave un état de fragilité ou de dépendance et favorise les co-morbidités.
O Facteurs de risque d'une dénutrition: psychosociales, dépendance pour les actes de la vie quotidienne
(prise alimentaire, préparation, achats).
O Troubles buccodentaires: appareillage inadapté, sécheresse buccale, dysgueusie, candidose.
o Troubles de la déglutition: pathologies ORL et neurologiques.
O Syndromes démentiels (Alzheimer, maladie de Parkinson).
o Polymédication.
o Corticoïdes.
o Traitements entraînant une dysgueusie (IEC)/sécheresse buccale (anticholinergiques).
□ Anorexie (antibiotiques, IRS).
o Somnolence (psychotropes, morphiniques).
::i Troubles digestifs (antibiotiques, colchicine, morphiniques).
o Toute affection aiguë (dont infections) ou décompensations d'une maladie chronique.
o Régimes restrictifs: sans sel, diabétique.
o Fréquence selon l'habitat du sujet âgé: 4 à 10 % à domicile; 15 à 40 % en institution et 30 à 70 % à l'hôpital.
O Critères diagnostiques:
► dénutrition: perte de poids:� 5 % en 1 mois, ou� 10 % en 6 mois; IMC: < 21 kg/m2 ;
albuminémie: < 35 g/1 (à interpréter selon l'état inflammatoire avec dosage de la CRP) et MNA
global: < 17;
► dénutrition sévère: perte de poids:� 10 % en 1 mois, ou� 15 % en 6 mois; IMC: < 18 kg/m2 et
albuminémie: < 30 g/1 (à interpréter selon l'état inflammatoire avec dosage de la CRP).
121
1. INTRODUCTION
La grossesse est une période critique pendant laquelle la nutrition maternelle et les choix de mode de vie
ont une influence majeure sur la santé de la mère et de l'enfant. Dans les pays industrialisés, les anomalies
congénitales et le faible poids à la naissance se classaient respectivement à la première et à la deuxième
place parmi les 10 principales causes de décès chez les nourrissons.
A. COÛT ÉNERGÉTIQUE
La grossesse à un coût énergétique variable selon le stade, il est quasiment nul au début de la grossesse
(150 kCal/J), puis augmente aux deuxièmes et troisièmes trimestres (350 kcal/J). Le coût énergétique
est lié aux besoins d'un accroissement du tissu adipeux et des protéines. Ceci est accompagné d'une
augmentation du métabolisme de repos après la 24• semaine. Il est estime a environ 80 000 kcal (soit
en moyenne, 285 kcal/jour). Les besoins en énergie augmentent pendant la grossesse d'environ 200,
300 et 400 kcal/jour aux 1••, 2• et 3• trimestres, respectivement, mais ces valeurs varient en fonction
de l'IMC.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 252 123
B. Gain de poids
Le poids avant la grossesse a une influence majeure sur le développement fœtal et pour
la santé de la mère. Un apport énergétique < 1500 kcal/j est associé au risque de fausses
couches, à un retard de croissance intra-utérin et à un faible poids de naissance. Les
enfants nés de femmes dont le gain de poids est insuffisant ont une probabilité de décès
plus élevée jusqu'à un an après la naissance (OR 2,23, IC 95 %) par rapport aux femmes
ayant un gain de poids normal.
Le gain de poids excessif pendant la grossesse a des conséquences sur la santé maternelle
à court et à long terme. En effet, un gain de poids excessif est responsable d'accouchement
par césarienne et d'obésité post-partum. L'association entre un gain de poids excessif,
le diabète gestationnel et la pré-éclampsie ont été rapportées, mais les preuves de ces
associations sont plus limitées. Parmi les autres conséquences métaboliques à long terme,
figurent le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires et le syndrome métabolique.
Chez l'enfant, l'obésité maternelle et un gain de poids excessifpendant la grossesse ont des
conséquences dans la période néonatale comme la macrosomie, unfaible score d'Apgar, des
convulsions, une hypoglycémie, une polycythémie et un syndrome d'aspiration du méconium.
À long terme, une prise de poids excessive entraîne un surpoids ou une obésité chez l'enfant.
Plusieurs études suggèrent également que la nutrition in utero pourrait avoir un impact de
« programmationfœtale » sur des maladies chroniques telles que le diabète, l'hypertension
et d'autres maladies métaboliques. L'hypothèse physiopathologique des complications
propose que l'excès de glucose circulant traverse le placenta, et entraîne une augmentation
de la sécrétion d'insulinefœtale. L'hyperinsulinémiefœtale peutfavoriser l'adipogénèse et
l'hypertrophie des cellules adipeuses. En outre, l'excès des acides gras libres et des triglycérides
circulants peuvent entraîner un transfert accru d'acides gras au fœtus, favorisant ainsi le
développement de cellules adipeusesfœtales plus grandes ou plus nombreuses.
Le gain du poids est calculé idéalement comme la différence entre le poids lors de la première
et la dernière visite prénatale juste avant l'accouchement et il est basé sur l'indice de masse
corporelle.
En pratique, la prise de poids doit être environ d'l kg/mois durant les 2 premiers trimestres
et 500 g/semaine au 3•trimestre. Soit un apport de+ 150 kcal/jour au 1e, et 2• trimestre et
de+ 300 kcal/jour au 3• trimestre.
Il. MACRONUTRIMENTS
La répartition suivante permet de couvrir les besoins en énergie d'une femme enceinte
pour un apport opportun variant entre 2 000 et 2 200 Kcal/jour.
A. Les glucides
Ils représentent 50 % des apports quotidiens avec le glucose comme source essentielle
d'énergie pour le fœtus. Leurs apports doivent être supérieurs à 250 g/jour en privilégiant
les glucides lents. Le métabolisme glucidique est modifié pendant la grossesse du fait
de l'hyperinsulinisme au cours des deux premiers trimestres et de l'insulinorésistance
au 3° trimestre. Un apport important de glucides est associé au risque de macrosomie.
En pratique, il faut suivre les ANC quantitatifs et qualitatifs de la population générale
(50-55 % des apports caloriques totaux).
B. Les lipides
Ils couvrent 30 % des besoins énergétiques journaliers et permettent le transport
des vitamines liposolubles (A, D, E, K). Pendant la grossesse, la qualité des lipides est
plus importante que leur quantité, en particulier pour le développement fœtal et la
croissance du nourrisson. Pour cette raison, il est nécessaire d'améliorer la proportion
de graisses poly-insaturées plutôt que d'augmenter l'apport en lipides totaux : un apport
suffisant en acide docosahexaénoïque (DHA, de la série n-3) est essentiel à la croissance et
au développement du cerveau et de la rétine. Les aliments les plus riches en DHA sont les
poissons gras (saumon, maquereau, hareng, anchois). Cependant, ces poissons stockent
des métaux lourds (mercure), alors, l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)
indique une consommation de 2 à 4 portions de poisson par semaine pendant la grossesse.
C. Les protéines
Une augmentation d'apport en protéines est indispensable pendant la grossesse, lorsque
la demande augmente afin de maintenir les tissus maternels et la croissance fœtale,
en particulier au cours du 3• trimestre. A contrario, un apport excessif en protéines
est associé à des effets potentiellement négatifs en termes de poids de naissance.
En France, pas de risque de carence en protéines. Néanmoins, on recommande
d'augmenter les protéines à partir du second trimestre, car elles sont fondamentales
pour le développement du fœtus.
Trimestre Quantité
1" 0,8 g/kg/j
2' 0,9 g/kg/j
3' 1,0 g/kg/j
D. Eau
Nécessaire pour lutter contre la constipation, si fréquente en période de grossesse.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 252 125
Ill. MICRONUTRIMENTS
Pendant la grossesse, les besoins en micronutriments augmentent plus que ceux des
macronutriments et des apports inadéquats peuvent avoir des conséquences importantes
pour la mère et le fœtus. En particulier, trois micronutriments sont particulièrement
indispensables.
A. Fer
Impliqué dans de nombreux processus enzymatiques, le fer (constituant de
l'hémoglobine, de la myoglobine et de diverses enzymes), joue un rôle essentiel dans
le transfert d'oxygène vers les tissus. La carence en fer est à l'origine de l'anémie, une
affection très répandue dans le monde, touchant 22 % des femmes en âge de procréer
en Europe et jusqu'à 50 % dans les pays en développement.
Pendant la grossesse, les besoins en fer augmentent progressivement jusqu'au
troisième mois, parallèlement à l'accumulation de fer dans les tissus fœtaux. Le
transfert du compartiment maternel au fœtus est régi par un mécanisme complexe
de transport comprenant: le foie maternel (dans lequel il est stocké sous forme de
ferritine), - la circulation sous forme Fe2 +, la capture par le placenta, le transfert au
fœtus par le Transferrin receptor-1 (TfRl), l'oxydation en Fe3 +, le stockage (sous forme
de ferritine) et le transport dans la circulation fœtale (toujours liée à la transferrine).
Le besoin total en fer d'une femme enceinte de 55 kg est d'environ 1000 mg, répartis
comme suit:
Les besoins quotidiens en fer sont d'environ 0,8 mg au premier trimestre, entre 4 et 5 mg
au 2° trimestre et de 6 mg au 3° trimestre.
Des apports inadéquats pendant la grossesse sont associés à une augmentation de la
demande en fer, exposant les femmes enceintes à un risque accru de carence en fer,
susceptible d'affecter la croissance et le développement du fœtus, d'augmenter le risque
d'accouchement prématuré, d'un faible poids du bébé à la naissance et d'hémorragies post
partum. Les apports sont souvent inadéquats si les femmes appartiennent à un groupe de
risque de carence martiale:
femmes ayant des règles abondantes;
■ ATCD de carence martiale;
■ adolescentes;
■ grossesses rapprochées ou multiples;
Ill hémoglobinopathies;
Ill végétariennes/végétaliennes;
bas niveau socio-économique.
Chez ces femmes une supplémentation en fer est indispensable à raison de 50 mg/jour
sous forme de fer ferreux: Tardyferon•, Timoferol", Inofer•. On rappelle, que le fer ferrique
(Fe 3+) peut être réduit en fer ferreux (Fe 2+) en gagnant un électron; et le fer ferreux peut
être oxydé en fer ferrique en perdant un électron.
Au cours de la grossesse, leur utilisation ne doit pas être systématique mais limitée aux
femmes ayant une anémie ferriprive ou étant à risque de carence martiale.
126 Nutrition et grossesse. Prévenir des carences nutritionnelles pendant la grossesse
B. Folates
Les folates désignent un groupe de composés présents naturellement dans les aliments
(Vitamine B9). Ils jouent un rôle crucial dans de nombreuses réactions métaboliques
telles que la biosynthèse de l'ADN et de l'ARN, la méthylation de l'homocystéine en
méthionine et le métabolisme des acides aminés. Les formes de folates métaboliquement
actives agissent comme des co-enzymes de transport facilitant le transfert d'unités
carbonées. Les folates se trouvent principalement dans les légumes à feuilles vertes, les
fruits, les céréales et les abats sous forme de polyglutamates. Les réserves hépatiques de
5 à 10 mg couvrent les besoins pour une durée d'environ 4 mois. Leur biodisponibilité
dans les aliments dépend de composés pouvant réduire leur absorption, et est d'environ
50 %. Par contre, la forme synthétique (acide folique) est absorbée à plus de 80 %.
Les folates sont essentiels pour la santé: un apport alimentaire inadéquat périconceptionnel
peut entraîner chez le fœtus des anomalies de fermeture du tube neural allant du spina
bifida simple jusqu'à l'anencéphalie, et d'autres anomalies comme les cardiopathies
congénitales. En France, l'incidence moyenne des anomalies de fermeture du tube neural
(AFTN) est d'environ une grossesse sur 1 000. On estime que 7 % des femmes en âge de
procréer présentent un risque de déficit en folates (folates plasmatiques inférieure à 3 ng/ml).
La supplémentation maternelle en acide folique est largement recommandée à toutes les
femmes en âge de procréer, en particulier pour réduire le risque d'anomalies du tube neural.
Supplémentation :
■ En prévention primaire
► La posologie est de un comprimé de 0,4 mg/jour. Pour être efficace, la prévention
doit être entreprise 4 semaines avant la conception et se poursuivre 8 semaines
après celle-ci.
En prévention secondaire
► Supplémentation systématique de 4-5 mg/jour, 4 semaines avant la conception
et 8 semaines après la conception.
C. Vitamine D
Synonyme: calciferol
La vitamine D comprend deux métabolites : 1) le cholécalciférol (vitamine D3, dérivé du
cholestérol, produit par la peau sous l'action des rayons ultraviolets); et présent dans les
aliments d'origine animale (poissons gras, aliments lactés enrichis). 2) L'ergocalciférol
(vitamine D2, dérivé de l'ergostérol, présent dans l'alimentation d'origine végétale).
La carence en vitamines D2 et D3 pendant la grossesse est délétère pour l'enfant et
peut aboutir à un rachitisme.
■ Biosynthèse de la vitamine D3.
► La synthèse endogène de la vitamine D nécessite une exposition aux rayons
ultraviolets d'une longueur d'onde comprise entre 290 et 315 nm. Les rayons UVB
réagissent avec le 7-dehydrocholesterol (provitamine D cutanée) pour produire la
pro-vitamine D3, qui est isomérisée en cholécalciférol (ou vitamine D3).
► Son activation est catalysée par des cytochromes localisés dans les cellules
hépatiques et rénales en deux étapes. La première étape est l'hydroxylation en
position 25 qui conduit à la formation de 25-hydroxyvitamine D3 (25-OH-D3),
forme de réserve de la vitamine D3, et dont la demi-vie plasmatique est de deux a
trois semaines. La seconde étape est l'hydroxylation en position 1 par la CYP27B1
mitochondriale qui conduit à la 1,25-dihydroxyvitamine D3 (1,25 diOH-D3), forme
biologiquement active, dont la demi-vie plasmatique est d'environ quatre heures.
► Une fois synthétisée, la vitamine D3 active, diffuse dans l'organisme et agit sur
ses organes cibles: l'intestin, l'os, les reins et les parathyroïdes.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 252 127
• pré-éclampsie;
• diabète gestationnel;
• allergies;
• anomalies de l'immunité;
• troubles du spectre autistique (Wagner);
• rachitisme.
■ Supplémentation
► Administration unique de 100 000 UI au 7° mois (10 mg/jour), en optimisant
l'exposition solaire.
D. Calcium
■ Minéral le plus abondant dans le corps.
■ Fonctions :
► formation osseuse;
► contraction musculaire;
► fonctionnement des enzymes et des hormones.
Les besoins de calcium fœtal atteignent un pic à 350 mg/jour au 3° trimestre, et l'absorption
du calcium par la mère devrait augmenter pour répondre à cette demande. Des études
longitudinales sur le métabolisme du calcium pendant la grossesse ont démontré que
l'absorption du calcium maternel augmentait considérablement au cours des deuxièmes
et troisièmes trimestres. Cette augmentation de l'absorption du calcium est directement
liée à l'apport en calcium maternel.
128 Nutrition et grossesse. Prévenir des carences nutritionnelles pendant la grossesse
L'absorption du calcium pendant la grossesse est influencée par les hormones calcitropes
maternelles. Au cours du 1er trimestre, la concentration d' hormone parathyroïdienne
(PTH) diminue, puis augmente jusqu'à la limite supérieure de la normale au 3• trimestre,
reflétant l'augmentation du transfert de calcium de la mère vers le fœtus. Bien que les taux
de PTH n'augmentent généralement pas, la concentration de la pro-hormone de la PTH
{protéine-récepteur d' hormone parathyroïdienne ou PTHrP) augmente dans la circulation
maternelle. Les récepteurs PTHrP sont reconnus par la PTHrP et ont donc des effets
analogues à ceux de la PTH. Cette prohormone est produite par les tissus mammaires et
fœtaux pour stimuler le transport du calcium par le placenta vers le fœtus. Le PTHrP peut
également protéger le tissu osseux maternel contre la résorption osseuse, en augmentant
l'absorption de calcium dans l' intestin grêle et la résorption tubulaire dans les reins. Le
PTHrP pourrait également favoriser la minéralisation des os chez le fœtus.
Les autres hormones calcitropes, agissant sur le métabolisme du calcium chez la mère, sont
les formes actives et inactives de la vitamine D. Les concentrations sériques de 25-OH-D3
ne ci}angent pas pendant la grossesse, mais l'augmentation de la 1-a-hydroxylase et la
synthèse supplémentaire dans le placenta permettent une augmentation de la conversion en
l,25-diOH-D3. Il existe une hypercalciurie physiologique pendant la grossesse, en raison
de l'augmentation de l'absorption du calcium. De manière intéressante, le calcium urinaire
est dans les limites normales pendant le jeûne et augmente après les repas, indiquant une
excrétion élevée liée à l'augmentation de l'absorption du calcium. Enfin, l'excrétion urinaire
de calcium augmente jusqu'à 43 % entre le début et le 3• trimestre de la grossesse.
■ Déterminer le statut de calcium maternel.
► Déterminer le taux plasmatique normal de calcium d'une femme pendant
la grossesse est un défi puisque les concentrations sériques de calcium et
d'albumine diminuent en raison de l'augmentation du volume plasmatique,
cependant, le calcium ionisé reste normal. Même en l'absence de grossesse,
le calcium sérique est considéré comme indépendant de l'apport en calcium
alimentaire et ne constitue donc pas une mesure fiable de l'état du calcium.
► L'absorption du calcium augmente pendant la grossesse et aucun apport addi
tionnel n'est nécessaire. Un excès de calcium peut entraîner une hypercalcémie
et une hypercalciurie aboutissant à une insuffisance rénale (DFG < 60 ml/mn),
à une calcification des tissus vasculaires et des tissus mous, ainsi qu'à une
néphrolithiase.
Un apport alimentaire de 1200 mg/jour de calcium pour les femmes enceintes est
recommandé par l'OMS et par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et
l'agriculture {FAO).
E. Vitamine A
Synonyme : rétinol.
Les études épidémiologiques sur l'exposition nutritionnelle à la vitamine A sont rares.
Cependant, une carence importante en vitamine A est mortelle pour l'embryon,
alors que des carences mineures, inférieures à la moitié des apports nutritionnels
conseillés (600 µg pour la femme adulte), induisent principalement des anomalies
oculaires. Des études observationnelles ont montré qu'un apport insuffisant en vitamine
A(< 500 µg) pendant la grossesse a pour conséquence une incidence trois plus élevée des
anomalies cranio-faciales, cardiaques et thymiques. Ainsi, chez la femme enceinte, une
supplémentation en vitamine A est prescrite, ainsi que les aliments riches en celle-ci,
surtout au cours du 1•r trimestre de grossesse.
Chapitre 2. Métabolisme et alimentation - ITEM 252 129
--- - - ---- -
Tableau comparatif de repères nutritionnels chez la femme adulte, enceinte et allaitante
Vitamine D Supplémentation
5 10 10 25 10
(µg/j) 100000 UI dose unique, au 7' mois
Vitamine A Ne pas dépasser 3 000 Ul/j par
600 idem 700 700 950
(mgER/j) trimestre
ACT: apports caloriques totaux; AGPI: acides gras poly-insaturés; ER: équivalent rétinol.
A. Toxoplasmose
Cette maladie parasitaire est transmise par Toxoplasma gondi et survient après l'ingestion
de viande mal cuite, de crudités mal lavées ou par contact direct avec les chats. Chez la
femme enceinte non immunisée, la toxoplasmose peut entraîner un avortement, la mort
fœtale ou une atteinte neurologique et rétinienne. Le risque de toxoplasmose congénitale
constitue un problème majeur pour la femme non immunisée.
Fréquence et manifestations cliniques de l'infection par toxoplasma gondi chez la femme
enceinte.
B. Listériose
Listeria monocytogenes est une bactérie résistante au froid mais sensible à la chaleur,
transmise par la consommation d'aliments contaminés. La listériose, relativement bénigne
pour la mère, peut passer inaperçue et prendre la forme de contractions, ou plus rarement,
se réduire à un pic fébrile. Par contre, elle peut provoquer des complications graves chez
l'enfant, telles qu'une fausse couche, une prématurité, une septicémie maternelle et néonatale
entraînant la mort du nouveau-né.
En France métropolitaine, en 2015, près de 350 cas de listériose ont été recensés, toute
population confondue. Les mesures préventives consistent à éviter de consommer du lait
cru ou des fromages au lait cru, des charcuteries a la coupe (rillettes, pâtes, produits en
gelée), les produits de saucissonerie, les graines germées réfrigérées. Il faut enlever les
croûtes de fromages, cuire les aliments d'origine animale, réchauffer correctement les
restes des plats cuisinés, bien nettoyer le réfrigérateur et se laver les mains.
V. TOXICITÉ
A. Alcool
L'éthanol peut compromettre la capacité anti-oxydante endogène, en diminuant l'efficacité
de la glutathion peroxydase, ou générer des radicaux libres, tels les produits de son
métabolisme par le cytochrome CYP2El. La présence de CYP2El dans le tissu cérébral
est significative car elle chevauche le début de l'organogenèse (jours 50 à 60). Lorsque le
CYP2El oxyde l'éthanol, il génère un radical hydroxyéthyle ou superoxyde qui cible les
chaînes latérales des acides gras poly-insaturés dans les membranes des cellules du cerveau.
Ces processus de peroxydation lipidique peuvent endommager le cerveau du fœtus pendant
l'organogenèse, se manifestant par un dysfonctionnement du SNC après l'accouchement
connu sous le nom du syndrome d'alcoolisme fœtal (SAF) caractérisé par des anomalies
physiques, mentales et comportementales. La plupart des enfants atteints du SAF présentent
un faciès particulier, un retard de croissance et parfois des lésions cérébrales irréversibles.
B. Métaux lourds
1. Mercure
L'alimentation est la principale source de contamination par le mercure, très fortement
liée à la consommation de gros poissons prédateurs. Il faut donc éviter de consommer trop
souvent ces poissons (dorade, espadon, marlin, grenadier, bar, requin, thon). Un poisson
contaminé peut contenir 23 mg de mercure/kg de poids humide, soit près de 100 000 fois
la concentration de mercure dans l'eau environnante. En 2003, l'OMS a adopté une dose
hebdomadaire maximale de 1,6 µg/kg. Les moules et les huîtres concentrent également
le mercure.
2. Plomb
Les principales voies d'absorption du plomb sont les ingestions accidentelles, mais également
l'absorption d'eau des canalisations. Le fœtus n'est pas protégé par le placenta et est
extrêmement sensible au plomb, qui provoque chez lui des troubles neurologiques pour
de faibles doses d'exposition. L'intoxication au plomb est souvent asymptomatique mais
conduit à une baisse du quotient intellectuel, de l'anémie, des troubles du comportement,
des problèmes rénaux et des pertes auditives.
131
FICHE FLASH
□ "Ëtat pondéral" (hors prise de poids):
► dénutrition: fausse couche, petit poids de naissance, carences nutritionnelles, anomalies de la
fermeture du tube neural;
► obésité: hypoglycémie, score d'Apgar bas, macrosomie, polycythémie.
□ Femmes à risque de carence:
► femmes ayant des règles abondantes;
► ATCD de carence martiale;
► adolescentes;
► grossesses rapprochées ou multiples;
► hémoglobinopathies;
► végétariennes/végétaliennes;
► bas niveau socio-économique.
□ Besoins nutritionnels:
► arrêt des restrictions (correction des déséquilibres alimentaires);
► minimum: 1 600 kCal/j.
U Macronutriments:
► protéines:� 1 g/kg/j (besoins normalement couverts par une alimentation équilibrée);
► glucides et lipides: suivre les ANR pour la population adulte.
O Micronutriments:
► fer:supplémentation systématique conseillée dès la fin du 1er trimestre, notamment chez les femmes
à risque de carence;
► calcium: > 1 000 mg (allaitement: 1 300 mg/j);
► vitamine D: une supplémentation systématique est conseillée à la fin du 2• trimestre par une dose
unique de 100000 UI per os;
► acide folique (vitamine 89): supplémentation systématique de 0,4 mg/j en prévention primaire et
5 mg/j en prévention secondaire;
► la vitamine A est contre-indiquée pendant la grossesse (ne pas dépasser 3 000 Ul/jour au,., trimestre),
car au-delà existe un risque tératogène.
132
+ HAS 2005. Comment mieux informer les femmes enceintes? Recommandations pour la
pratique
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/femmes_
enceintes_recos.pdf
+ HAS 2016 Suivi et orientation de femmes enceintes en fonction des situations à risque
identifiées. Synthèse de recommandations professionnelles
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/suivi_orienta
tion_femmes_enceintes_synthese.pdf
+ HAS 2017 Accouchement normal : accompagnement de la physiologie et interventions
médicales. Méthode Recommandations pour la pratique clinique.
https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2018-01/accou
chement_normal_-_recommandations.pdf
+ Recommandation INPES (Ministère)
http://inpes.santepubliquefrance.fr/CFESBases/catalogue/detaildoc.asp?nu
mfiche=1059
CHAPITRE 3. BIOLOGIE CARDIO-VASCULAIRE
ITEM 221
HYPERTENSION ARTÉRIELLE
Françoise MAUPAS-SCHWALM
L'hypertension artérielle (HTA) est la première maladie chronique dans le monde. Non traitée, elle
induit un risque d'accidents vasculaires cérébraux, de démence, d'insuffisance cardiaque, d'infarctus
du myocarde et d'insuffisance rénale chronique. Les valeurs tensionnelles entrent dans le cadre d'une
évaluation du risque global du patient de développer une maladie athéromateuse à 10 ans sur les
grilles SCORE communiquée par la Société Européenne de Cardiologie. L'HTA est par ailleurs un
des éléments du syndrome métabolique.
Le diagnostic de l'HTA est clinique mais le bilan biologique est un élément incontournable de la prise en
charge médicale du patient hypertendu et complète l'examen clinique et les examens complémentaires
paracliniques à différents temps de sa prise en charge médicale.
1. DÉFINITIONS DE L'HTA
On parle d'HTA résistante quand la cible tensionnelle n'est pas atteinte après
6 mois d'une prise en charge trithérapique associant un diurétique et deux agents
antihypertenseurs de classe thérapeutique différentes administrés à dose conforme.
La prise en charge des patients présentant une HTA résistante relève d'une consultation
médicale spécialisée.
3. Calcémie
L'hypercalcémie favorise l'HTA. Élevée, elle constitue une contre-indication à certains
traitements tels que la spironolactone.
La démarche diagnostique peut être complétée par une scintigraphie rénale sensibilisée par
une prise de captopril. Le diagnostic effectif se fera par dosage de la rénine dans la veine
cave inférieure et les veines rénales.
En cas d'hyperaldostéronisme primaire, l'HTA est provoquée par une sécrétion
inappropriée d'aldostérone le plus souvent liée à une hyperplasie des surrénales, ou un
adénome surrénalien sécrétant. Cette sécrétion augmentée d'aldostérone s'accompagne
d'un effondrement de la libération de rénine.
Les dosages plasmatiques de rénine et d'aldostérone, réalisés dans les conditions préanalytiques
strictes précédemment décrites, ainsi que le calcul du rapport aldostérone/rénine donnent
le diagnostic : Une aldostéronurie augmentée. La kaliémie peut être normale, ou normalisée
par des apports potassiques de suppléance ou par une prise d'amiloride.
Une suspicion clinique et/ou familiale de maladie de Vaquez conduit à demander une
numérationformule sanguine. Le diagnostic de polyglobulie sera posé sur l'augmentation de
['hématocrite (supérieur à 52 % chez l'homme, et 48 % chez la femme) ou de l'hémoglobine
(supérieure à 185 g/l chez l'homme et 165 g/l chez lafemme).
Une suspicion clinique de dysthyroïdie chez un patient hypertendu nécessite un dosage
de TSH.
Un hypercortisolisme est responsable d'une HTA fréquemment accompagnée d'hyperglycémie.
La sécrétion de cortisol subissant des variations nycthémérales, la cortisolémie peut être
dosée le matin à jeun entre 7 et 9 heures au moment du pic. Le cortisol salivaire peut être
mesuré à minuit, à l'aide de bandelette « salivettes ». Une mesure du cortisol urinaire des
24 heures peut compléter ce bilan.
L'origine périphérique ou centrale de l'hypercortisolisme peut être obtenue par un « test
au dectancyl » ou « test de freinage minute à la dexaméthasone » : on dose le cortisol
plasmatique à 7 ou à 10 heures du matin, ou le cortisol libre urinaire des 24 heures, après
administration de 1 mg de dexaméthasone au coucher.
Le phéochromocytome est une tumeur rare sécrétant des catécholamines, responsable
d'une symptomatologie clinique associant : céphalée, palpitations, et hypersudation
dans un contexte d'HTA avec une hyperglycémie souvent associée.
Le diagnostic est posé par un dosage des catécholamines, ou de leurs métabolites
(métanéphrines/normétanéphrines) réalisé sur des urines de 24 heures lors d'une poussée
d'HTA, ou sur plasma. Il est possible de compléter par un dosage de la chromogranine
A sérique (marqueur sensible et spécifique des tumeurs neuroendocrines).
139
+ Blacher J., Halimi J.M., Hanon O., Mourad J.J., Pathak A., Schnebert B., Girerd X. au
nom de la Société Française d'Hypertension artérielle (SFHTA). Recommandations
SFHTA 2013 « Prise en charge de l'hypertension de l'adulte».
+ Bouhanick B. HTA et diabète: quelle prise en charge en 2018? Arch Mal Vaiss Prat
2018; 2018 :6-10.
+ European Society of Cardiology (ESC) and the European Society of Hypertension
(ESH). Guidelines for the management of arterial hypertension. European Heart Journal
(2018) 39, 3021-3104.
+ European Society of Cardiology (ESC) and European Atherosclerosis Society (EAS).
Guidelines for the management of dyslipidaemias. European Heart Journal (2016) 37,
2999-3058.
http://www.cngof.fr/pratiques-cliniques/recommandations-pour-la-pratique-cli
nlque.
+ Fischer NOL, Williams GH. Hypertension artérielle. Harrison principes de médecine
interne 16° édition. Éditions Médecine-Sciences Flammarion.
https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2059286/fr/prise-en-charge-de-l-hy
pertension-arterielle-de-l-adulte.
+ Mourad JJ, Benainous R, Le Jeune S. Hypertension orthostatique: un paramètre
péjoratif qui sort de l'ombre? Arch Mal Vaiss Prat 2018; 2018 :14-15.
ITEM 232
INSUFFISANCE CARDIAQUE
Françoise MAUPAS-SCHWALM
L'insuffisance cardiaque (IC), aiguë et chronique, résulte d'une déficience de la fonction cardiaque dont
les étiologies sont multiples, s'accompagnant de comorbidités nombreuses liées aux conséquences.
La fréquence de l'IC (prévalence estimée à 1 - 2 % dans les pays-développés, en augmentation avec
l'âge à partir de 75 ans), en fait une problématique importante de santé publique. L'évolution de l'IC
chronique est émaillée de nombreux épisodes de décompensation, qui engagent le pronostic fonctionnel
du patient : dénutrition, risque d'iatrogénie, évolution vers la dépendance, pronostic vital.
Le bilan biologique revêt une importance considérable dans la prise en charge du patient insuffisant
cardiaque notamment par deux éléments incontournables : les peptides natriurétiques et le bilan martial.
Le dosage des peptides natriurétiques est le punctum salien actuel du diagnostic de l'IC, notamment quand
il y a difficulté à diagnostiquer l'IC sur des critères cliniques ou dans l'IC à fraction d'éjection préservée
débutante. La carence martiale est désormais individualisée au titre d'une comorbidité de l'IC dans les
recommandations 2016 de la société européenne de cardiologie.
1. DÉFINITIONS DE L'IC
L'IC est l'incapacité du cœur à pomper le sang à un débit compatible avec les besoins métaboliques
des tissus.
De nombreuses études ont permis d'améliorer la connaissance de la physiopathologie de l'IC et sa prise en
charge médicale. En effet, la classification de l'IC distingue désormais trois catégories
■ À fraction d'éjection basse(< 40%) qui correspond à l'IC «classique» à dysfonction systolique du
ventricule gauche;
■ À fraction d'éjection préservée(� 50%) qui correspond à une dysfonction diastolique du ventricule
gauche;
■ À fraction d'éjection moyennement altérée, intermédiaire, nouvellement individualisée.
L'IC est définie comme un syndrome clinique associant des symptômes (dyspnée et/ou une asthénie)
avec des signes cliniques objectifs; et une preuve d'une anomalie structurelle ou fonctionnelle du
cœur (donnée par le dosage des peptides natriurétiques et l'imagerie cardiaque) entraînant un débit
cardiaque réduit et/ou des pressions intracardiaques élevées au repos ou lors d'un stress.
Chapitre 3. Biologie cardio-vasculaire - ITEM 232 141
... Dyspnée
Orthopnée ... Turgescence jugulaire
Galop à l'auscultation cardiaque
...
Respiration de Cheyne Stokes
Hépatomégalie
Ascite
. Oligurie
Extrémités froides
Symptômes et signes diniques de l'IC
(d'après ESC Guidelines for the diagnosis and treatment of acute and chronic heart failure 2016)
La NYHA (New York Heart Association) a proposé il y a des années une classification
fonctionnelle de l'IC toujours très utilisée en pratique clinique.
Classe 1
Patients souffrant d'une maladie cardiaque mais sans limitation de l'activité physique.
L'activité physique ordinaire ne cause pas de fatigue excessive, de palpitations ou de
dyspnée.
Classe Il
Patients souffrant d'une maladie cardiaque avec une légère limitation de l'activité physique.
Ils sont à l'aise au repos. L'exercice physique entraîne de la fatigue, des palpitations ou
une dyspnée.
Classe Ill
Les patients ont une limitation marquée de l'activité physique. Ils restent confortables
au repos, mais la moindre activité physique génère de la fatigue, des palpitations, ou
une dyspnée.
Classe IV
Les symptômes de l'insuffisance cardiaque sont présents même au repos et la moindre
activité physique génère un inconfort.
Classification de la NYHA d'après « Nomenclature and Criteria for Diagnosis of Diseases of the Heart and Great
Vessels 1994 » in Hurst W et al. Clin. Cardio/.1999; 22: 385-390
142 Insuffisance cardiaque
L'IC est dé.finie comme « IC droite» lorsqu'il existe une atteinte primitive du cœur droit
et/ou lorsque les manifestations cliniques droites prédominent (œdèmes, hépatomégalie
congestive et distension veineuse).
2000 4000
.,.,.
1500 3000
i
Il. -eiositeBNP
Î 1000 2000
l
Il. _,,_ BayerBNP
i - -Roche NTproBf\p
500 1000 !Ë
Ces peptides sont sécrétés par les ventricules au niveau de cardiomyocytes particulièrement
riches en vésicules. Un prépropeptide est transformé en proBNP, et ensuite clivé par des
sérines protéases (la furine et parfois la corine), conduisant à la libération de 2 peptides :
le BNP et le peptide N-terminal du proBNP (ou NT-ProBNP).
Actuellement, seul le BNP possède une activité physiologique connue (la dénomination
de peptide natriurétique, même si habituelle, est donc en réalité impropre pour le
NT-proBNP). Le BNP a une action endocrine sur:
le système vasculaire en favorisant une vasodilatation;
■ le cerveau en diminuant l'appétence en sel et les besoins en eau;
■ le rein en augmentant la filtration glomérulaire et diminuant la réabsorption d'eau;
■ le rein, en inhibant la sécrétion de l'aldostérone par la surrénale et de la rénine par
le rein;
l'ensemble de ces actions vise à diminuer la volémie.
Le BNP a par ailleurs une action paracrine et autocrine sur les cardiomyocytes et les
fibroblastes, utile à diminuer le remodelage myocardique de l'IC en modérant la fibrose
myocardique.
Les dernières recommandations de la société européenne de cardiologie placent
le dosage de ces peptides natriurétiques dans la liste des examens essentiels au
diagnostic de l'IC avec l'électrocardiogramme et l'échocardiographie. La valeur de la
concentration plasmatique du peptide natriurétique peut être utilisée pour orienter
les patients vers une échocardiographie ou, en raison de sa bonne valeur prédictive
négative, pour poser rapidement un diagnostic d'exclusion de l'IC.
Le choix entre le BNP ou le NT-proBNP peut se faire indifféremment selon les recommandations
qui placent ces peptides dans l'algorithme décisionnel du diagnostic de l'IC. Pour certains
cliniciens le BNP, qui a une demi-vie plus courte que le NT-proBNP (22 minutes contre
120 minutes), peut avoir un intérêt pour évaluer rapidement le bénéfice d'un traitement
diurétique de l'IC, tandis que le NT-proBNP est plus stable au niveau préanalytique.
Toutefois l'utilisation pratique de ces peptides n'est pas simple. On sait qu'il existe une
différence entre la valeur du peptide correspondant au 99• percentile d'une population
saine, et la valeur seuil d'intérêt diagnostique pour l'insuffisance cardiaque avec une
Chapitre 3. Biologie cardio-vasculaire - ITEM 232 145
« zone grise» intermédiaire pour laquelle il est difficile d'admettre d'emblée un diagnostic
positif de l'IC. Par ailleurs, les concentrations sanguines de ces peptides sont à interpréter
en fonction du contexte global du patient puisque plusieurs variables peuvent modifier le
taux plasmatique de ces peptides tels que le vieillissement (les valeurs seuil des peptides
s'élèvent avec l'âge), et certaines comorbidités de l'IC par exemple l'insuffisance rénale
dont l'impact semble plus important sur le taux de NT-proBNP en le majorant, tandis que
l'obésité entraîne une baisse de la concentration plasmatique des deux peptides.
l
3. Anomalies électrocardiographiques
Un (ou plus}
.
présent
Dosage
NT-proBNP ou BNP
1,,..,,.
l
Echocardiographie
••omalk•
IC confirmée
Recherche d'une étiologie
Début clu traitement
D'après ESC Guidelines for the diagnosis and treatment of acute and chronic heart failure 2016.
De plus, la valeur du peptide natriurétique obtenue dépend de la technique de dosage
et de l'automate utilisés, ce qui a conduit la Haute Autorité Santé à préciser dans ses
recommandations pour la médecine ambulatoire « de toujours prescrire, pour le suivi
d'un patient donné, le même peptide dosé dans le même laboratoire».
L'interprétation d'une valeur d'un peptide natriurétique peut être difficile, et certains
cliniciens utilisent plus facilement ces peptides pour leur valeur prédictive négative que
pour leur intérêt dans le diagnostic positif. Il est toutefois admis qu'une valeur très élevée
du dosage de ces peptides est un marqueur d'insuffisance cardiaque et d'un mauvais
pronostic pour le patient.
L'utilisation du BNP et du NT-proBNP dans le diagnostic et le suivi du patient insuffisant
cardiaque a donc quelques limites et plusieurs études tentent d'évaluer l'intérêt d'autres
peptides bioactifs dans l'insuffisance cardiaque. L'ANP et le pro-ANP sont des peptides
natriurétiques sécrétés au niveau des oreillettes cardiaques; la pro-adrénomédulline
(MRproADM) est un peptide vasodilatateur qui aurait un intérêt pronostique dans l'IC.
Mais, actuellement, aucun autre peptide ne semble montrer un gain de performance
comparativement au BNP et au NT-proBNB dans le diagnostic ou le suivi de l'IC.
2. Dosage de la kaliémie
L'insuffisant cardiaque est à risque de dyskaliémie notamment iatrogène. La recherche
d'une dyskaliémie est impérative chez ces patients à risque d'arythmies.
Certains diurétiques, comme les diurétiques de l'anse fréquemment utilisés, peuvent
induire une hypokaliémie qui nécessitera une supplémentation.
Au cours de l'IC, le système rénine-angiotensine-aldostérone est activé par la baisse
du débit cardiaque. L'angiotensine Il aggrave la vasoconstriction périphérique, tandis
que l'aldostérone entraîne une rétention d'eau et de sel, et favorise la fibrose cardiaque.
146 Insuffisance cardiaque
3. Dosage de la natrémie
Le patient insuffisant cardiaque présente fréquemment une hyponatrémie (30 % des
IC). Il existe dans l'IC une sécrétion non osmotique d'ADH, en réaction à la baisse du
volume plasmatique efficace qui contribue à l'hypervolémie. Elle s'accompagne d'une
osmolalité urinaire élevée. Par ailleurs, les diurétiques, surtout thiazidiques, contribuent
à aggraver les pertes rénales en sodium.
La natrémie doit être surveillée chez l'insuffisant cardiaque, l'hyponatrémie étant un facteur
de mauvais pronostic de l'IC, accompagnant souvent la décompensation cardiaque. Elle
est corrélée à la durée de l'hospitalisation de l'insuffisant cardiaque et au risque de décès.
La natrémie est un des paramètres des équations ou scores de gravité de l'IC qui peuvent
être utilisés en pratique clinique.
L'anémie est plus fréquente chez les femmes, les sujets âgés, les patients insuffisants rénaux
et favorisée par l'inflammation chronique. Elle aggrave la symptomatologie de l'IC en
diminuant l'apport d'oxygène aux tissus. Elle réduit la capacité physique et augmente
l'asthénie. Elle peut aggraver d'autres pathologies telles que l'ischémie myocardique. C'est
aussi un facteur de décompensation de l'IC chronique. Elle est corrélée avec la fréquence
des réhospitalisations de l'insuffisant cardiaque et est associée à un mauvais pronostic.
La carence martiale contribue à abaisser le pic de consommation d'oxygène, à diminuer
la réponse ventilatoire à l'exercice et à réduite la capacité physique évaluée par le test de
marche de 6 minutes. Elle est ainsi associée à un risque augmenté d'hospitalisation et de
décès dans l'IC, indépendamment de l'anémie.
La ferritinémie permet d'évaluer le fer de réserve (joie, rate, moelle osseuse, macro
phages, cellules musculaires). Sa valeur peut être augmentée par une inflammation.
■ Le coefficient de saturation de la transferrine est un élément dëvaluation du fer de
transport dans le compartiment plasmatique sanguin.
■ L'hémoglobine, associée au volume globulaire moyen (VGM) et à la teneur corpuscu-
laire moyenne en hémoglobine (TCMH), est un reflet dufer fonctionnel.
On distingue la carence martiale absolue lorsque les réserves en fer (jerritinémie) et le
fer biodisponible (coefficient de saturation de la transferrine) sont diminués entraînant
secondairement une diminution de l'hémoglobinémie. Dans la carence martialefonctionnelle,
les réserves peuvent être normales mais la mobilisation dufer est insuffisante (jerritinémie
normale associée à un coefficient de saturation de la transferrine abaissé).
En cas de carence martiale, une supplémentation en fer a montré un bénéfice dans l'IC avec
une réduction significative des hospitalisations pour aggravation, une amélioration des
symptômes et de la qualité de vie. Il est recommandé d'effectuer un diagnostic étiologique
de la carence martiale pour proposer un traitement de la cause.
+ http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-chroniques-et
traumatismes/Maladies-cardio-neuro-vasculaires/l-insuffisance-cardiaque
+ Hurst W et al. The Use of the New York Heart Association's Classification of
Cardiovascular Disease as Part of the Patient's Complete Problem List. Clin.
Cardiol.1999 :22; 385-390.
+ McKee PA et al. The natural history of congestive heart failure : the Framingham study.
N Engl J Med. 1971 Dec 23; 285(26):1441-6.
+ Rahimi K et al. Risk prediction in patients with heart failure. JACC Heart Fail 2014; 2 :
+ 440-446.
Le syndrome coronarien aigu (SCA) est une urgence médicale et thérapeutique qui nécessite une prise en
charge rapide des patients. En faire le diagnostic est une priorité.
La biologie est un élément d'aide à la prise en charge médicale des patients, et l'apparition de marqueurs
ultra-sensibles, spécifiques d'une atteinte cardiomyocytaire, a considérablement amélioré le diagnostic
des atteintes myocardiques et la prise en charge de l'urgence coronaire.
A. Définition du SCA
Le SCA correspond à une situation physiopathologique engendrée par une souffrance ischémique myocardique
due à une diminution aiguë du débit sanguin coronaire. Il regroupe des entités de présentation et/ou
d' étiologie différentes actuellement bien définies par les sociétés savantes.
Les marqueurs biologiques utilisés pour révéler une atteinte lésionnelle des cellules myocardiques
sont des protéines structurelles des cardiomyocytes, libérées dans la circulation sanguine après la
mort de la cellule et dosées chez le patient.
150 Syndrome coronarien aigu
B. Étiologies du SCA
La diminution du débit intracoronaire au cours du SCA résulte le plus souvent d'une
obstruction endocoronaire aiguë par un thrombus qui se développe après rupture d'une
plaque d'athérome. Comme l'athérosclérose compliquée est la principale étiologie de
l'atteinte coronaire dans le SCA, le SCA est plus fréquent après 40 ans et chez des personnes
qui présentent des facteurs de risque cardiovasculaires pro-athérogènes.
Plus rarement d'autres étiologies que l'athérome compliqué peuvent être à l'origine d'un
SCA. Par exemple, un spasme d'une artère coronaire ou une anomalie anatomique d'une
coronaire (naissance anormale et/ou trajet intramyocardique aberrant), révélée chez un
sujet jeune à l'occasion d'une pratique sportive.
publiées en 2010 par la Haute Autorité de Santé pour la médecine ambulatoire : « Suspicion
de syndrome coronarien aigu évolutif: le téléphone, pas la biologie».
Les marqueurs biologiques ont une valeur diagnostique initiale dans les situations
où l'électrocardiogramme et la clinique ne sont pas contributifs pour le diagnostic
du SCA. Ils ont aussi un grand intérêt pour la confirmation diagnostique d'une
nécrose myocardique y compris a posteriori, c'est d'ailleurs le seul cas retenu par
la Haute Autorité de Santé pour demander un dosage de troponine en médecine
ambulatoire : l'exception est le cas où le patient est asymptomatique et consulte pour
une douleur survenue plus de 72 heures auparavant et qu'on suspecte d'être un SCA
sans complication.
E. Pronostic du SCA
Le risque est important au moment du SCA et dans les jours qui suivent. Le pronostic
dépend de différents facteurs notamment :
■ la rapidité de la prise en charge : la stratégie thérapeutique de revascularisation est
décidée en fonction de la proximité d'un centre spécialisé. 120 minutes étant le délai
maximal retenu, si le centre spécialisé est accessible dans ce délai, le patient y est
conduit en urgence médicalisée pour une angioplastie transcutanée, si le délai est
plus long, une fibrinolyse sera d'abord réalisée en urgence puis une coronarographie
secondairement;
■ des éléments anatomiques : nombre de coronaires atteintes, existence d'une sténose
du tronc coronaire gauche, possibilité de revascularisation;
de l'étendue de la nécrose myocardique, évaluée indirectement par le taux de tropo
nines sanguines;
11 de complications notamment de l'existence d'une insuffisance cardiaque;
■ de l'âge avancé;
des comorbidités (diabète, insuffisance rénale).
Le risque à long terme dépend de l'existence de troubles du rythme cardiaque, d'une
dysfonction systolique du ventricule gauche, de la persistance de facteurs de risque
cardiovasculaires et/ou de la persistance d'une ischémie myocardique.
La mortalité après un STEMI est de 4 à 12 % lors de la prise en charge hospitalière et
approximativement de 10 % après un an de suivi.
Il est possible d'utiliser des scores de risque clinico-biologiques facilement accessibles sur
internet, pour calculer le risque du patient qui a présenté un SCA : score GRACE-2, score
TIMI par exemple.
A. Ischémie myocardique
C'est une souffrance tissulaire transitoire et réversible liée à un déséquilibre entre les
besoins en les apports en oxygène au niveau du tissu myocardique. Lors d'un SCA, elle peut
générer des signes cliniques (précordialgie, blocpnée etc.) et des complications (troubles
du rythme, insuffisance cardiaque aiguë).
152 Syndrome coronarien aigu
C'est la variation de cTn au cours du temps (hausse ou baisse) qui indique si le problème est
aigu. Toutefois, une élévation de cTn indique l'existence d'une lésion cardiomyocytaire mais
ne donne aucune orientation sur les causes physiopathologiques de la lésion qui peuvent
être nombreuses, ischémiques ou non. Ainsi la complexité des circonstances à l'origine de
l'élévation de cTn peut parfois rendre difficile l'interprétation du mécanisme spécifique de
la lésion du myocarde.
Type 1. IDM en rapport avec une atteinte coronaire athéromateuse compliquée (rupture, érosion etc.) ou dissection
ayant conduit à un thrombus intralumlnal dans une ou plusieurs coronaires avec diminution du débit coronaire ou
embol distal plaquettalre. Le patient peut avoir une coronaropathle ou non.
Augmentation et/ou de baisse des valeurs de cTn avec au moins une valeur supérieure à la valeur du 99e centile avec au
moins un des signes suivant:
• Symptômes d'ischémie aiguë du myocarde• Modifications ECG ischémiques• Apparition d'ondes Q pathologiques•
Preuve sur une imagerie d'une nouvelle zone de myocarde non viable ou de nouvelles anomalie de cinétique pariétale
du mur régional compatibles avec une étiologie ischémique• Identification d'un thrombus coronaire par angiographie
(imagerie intracoronaire ou autopsie)
Type 2. IDM en rapport avec un deséquilibre de la balance apports/besoins en 02 : Toute raison qui a pu donner un
IDM (spasme, dysfonction endothéliale, trouble du rythme, anémie, hypo/hype,tenslon artérielle TA avec ou sans
hypertrophie du ventricule gauche)
Augmentation et/ou de baisse des valeurs de cTn avec au moins une valeur supérieure à la valeur du 99e centile et
preuve d'un déséquilibre entre l'offre et la demande en oxygène du myocarde sans rapport avec une athéro-thrombose
coronaire avec au moins l'un des signes suivants:• Symptômes d'ischémie aiguë du myocarde• Modifications ECG
ischémiques• Apparition d'ondes Q pathologiques• Preuve sur une imagerie d'une nouvelle zone de myocarde non
viable ou de nouvelles anomalie de cinétique pariétale du mur régional compatibles avec une étiologie ischémique.
Type 3. Mort subite sans dosage de blomarqueurs, dans des conditions compatibles avec une Ischémie myocardique
Les patients présentaient des symptômes évocateurs ischémie myocardique récente. Ils présentaient des modifications
ischémiques de l'ECG ou une fibrillation ventriculaire, mais meurent avant que les échantillons de sang pour les
biomarqueurs soient obtenus ou l'IDM est diagnostiqué à l'autopsie.
Type 4. IDM au décours d'une angioplastie.
Type 4a l'IDM procédural est défini arbitrairement par une augmentation des valeurs de cTn > SX la valeur au 99e
percentile chez les patients ayant des valeurs de cTn de base normales ou chez les patients qui ont une valeur de cTn
préprocédurale élevée stable ou en décroissance, par une hausse de cTn de 20% avec une valeur absolue
postprocédurale toujours d'au moins SX la valeur du 99e centile. En outre, l'un au moins des éléments suivants est
requis:• Modifications ECG ischémiques• Apparition d'ondes Q pathologiques• Preuve sur une imagerie d'une nouvelle
zone de myocarde non viable ou de nouvelles anomalie de cinétique pariétale du mur régional compatibles avec une
étiologie ischémique• Résultats angiographiques compatibles avec une altération procédurale de la circulation coronaire
telle que dissection coronaire, occlusion d'une artère épicardique majeure ou occlusion/ thrombus d'une branche
latérale, perturbation du flux collatéral ou embolisation distale• diagnostic post-mortem de thrombus intra coronaire lié
à la procédure. (L'apparition d'ondes Q pathologiques entre dans ce diagnostic même si la valeur de cTn
postprocédurale est <5X la valeur du 99e centile)
Type 4b Thrombose de stent à la coronarographie (ou à l'autopsie) avec variation cTn
Type 4c Resténose intra-stent ou dépendante de r angioplastie
Type 5. IDM au décours d'un pontage aortocoronaire
l'IDM au décours du pontage est défini arbitrairement par une augmentation des valeurs de cTn > lOX la valeur au 99e
percentile chez les patients ayant des valeurs de cTn de base normalesou chez les patients qui ont une valeur de cTn
préprocédurale élevée stable ou en décroissance, par une hausse de cTn de 20% avec une valeur absolue
postprocédurale toujours d'au moins lOX la valeur du 99e centile. En outre, l'un au moins des éléments suivants est
requis:• Apparition d'ondes Q pathologiques • Occlusion de greffe ou nouvelle d'une artère coronaire documentée par
angiographie• Preuve sur une imagerie d'une nouvelle zone de myocarde non viable ou de nouvelles anomalie de
cinétique pariétale du mur régional compatibles avec une étiologie ischémique. (L'apparition d'ondes Q pathologiques
entre dans ce diagnostic même si la valeur de cTn postprocédurale est <lOX la valeur du 99e centile)
lsoenzymes de CK
if
>.:<::e.,w
99°41 Il Muscle
CK3 4
➔
CK18J4--------�Cerveau
La seule indication qui peut encore exister est le diagnostic d'une récidive précoce d'IDM
car les CK/CKMB ont une demi-vie plus courte que les cTn dans le sang circulant.
C. Myoglobine
La myoglobine est une hétéroprotéine formée d'une chaîne de globine et d'un groupement
prosthétique héminique entourant un atome de fer. Elle est présente dans toutes les cellules
musculaires (1 à 2 % du poids total du muscle squelettique) et est donc aspécifique d'une
atteinte cardiomyocytaire. Sa demi-vie est de 1 à 3 heures et est élevée dans plus de 80 %
des SCA 1 h 30 après le début des symptômes. Son intérêt éventuel dans le SCA réside
dans sa valeur prédictive négative avec un dosage réalisé à la phase initiale de la prise
en charge.
D. Transaminases ASAT
Ce sont des enzymes qui catalysent le transfert réversible du groupe aminé NH2 sur les acides
a-cétoniques. On les trouve dans le foie, le myocarde et les muscles striés squelettiques.
Les ASAT s'élèvent dans les 4 à 12 heures après le début d'un IDM et se normalisent en
3 à 6 jours. Leur élévation semble proportionnelle à la taille de la nécrose et majorée
en cas de complications associées : foie «cardiaque».
E. LDH
Ce sont des enzymes ubiquitaires indispensables au métabolisme des sucres. Il existe 5
isoenzymes, les LDH-1 et 2 étant plus abondantes dans les organes riches en oxygène
dont le muscle cardiaque.
On note une élévation tardive, débutant 12 à 16 heures après un IDM, qui est maximum
entre 30 et 40 heures et se normalise à partir du 6• jour. Il existe de nombreuses causes
extracardiaques de variations du taux de LDH mais cela peut être le seul élément biologique
rétrospectif en faveur d'un diagnostic d'IDM non diagnostiqué à la phase aiguë.
+ European Society of Cardiology (ESC). 2017 ESC Guidelines for the management of
acute myocardial infarction in patients presenting with ST-segment elevation. European
Heart Journal (2019) 40, 237-269.
+ European Society of Cardiology (ESC). 2015 ESC Guidelines for the management
of acute coronary syndromes in patients presenting without persistent ST-segment
elevation. European Heart Journal (2016) 37, 267-315.
+ https://webzine.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-11/fbuts_
marcoeurs_necrose.pdf
+ https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/liste_ald_maladie_
coronarienne (2017 )
CHAPITRE 4. BIOLOGIE DIGESTIVE
ITEM 273
HÉPATOMÉGALIE ET MASSE
ABDOMINALE
Abderrahim OUSSALAH
1. PRÉAMBULE
La présente question s'articule avec l'item 273 « Hépatomégalie et masse abdominale» qui est traité dans le
Référentiel d'Hépato-gastroentérologie de la Collégiale des Universitaires en Hépato-gastro-entérologie (CDU
HGE). Les détails en lien avec les aspects cliniques, anatomopathologiques, radiologiques et thérapeutiques
ne sont pas systématiquement repris et ce afin de simplifier la lecture des objectifs tels qu'énoncés par le
Collège National de Biochimie Biologie Moléculaire Médicale et d'éviter les redondances d'informations.
Certains contextes sémiologiques ou cliniques sont volontiers développés afin d'illustrer les principaux
concepts et objectifs de l'item en lien avec la discipline de Biochimie et Biologie Moléculaire.
160 Hépatomégalie et masse abdominale
Il. HÉPATOMÉGALIE
A. Définition
L'hépatomégalie correspond à une augmentation du volume du foie. L'hépatomégalie peut
être diffuse à l'ensemble du foie ou porter sur une partie (lobe, secteur). Sur la base des
examens d'imagerie et/ou de l'aspect macroscopique, l'hépatomégalie peut être qualifiée
d'homogène ou d'hétérogène.
....--- ------.1
1
Hépatoméplle
l l
Hépatoméplle Hépatoméplle
diffuse
hétéroaëne
homolène
l H épatopathle
sous-jacente
Absence
d'hépatopathle
l
Prlnctpauxdl.,,-ta lvoquls sous-jacente
•
•
Hépatite alaüe ou chronique
Cirrhose CHC présent ?@
i
Stéatose ou stéato-hépatlte Cholanaiocarclnome 7 0 r•maaene7
Hépatopathle de surcharae
• Hémochromatose
Cholestase chronique Lésion Lésion
l
kystique solide
l
Foie conaestff
Patholoale Infectieuse
systémique Dlaanostlc retenu
de kyste blllalre ou
de kyste hydatique Principaux dlOJflOSl/cs tvoqw,
l
Référer le patient en
• Métastase
Adénome hépatocellulalre
CHC@
mllfeu spécialisé • Cholanalocarclnome 0
Taux de
prothrombine Déficit en vitamine
Lésions hépatiques aigües ou chroniques K (secondaire à une
(11,1-13,1
Diminution de la (ne répondant pas à la vitamine K). malabsorption, dénutrition,
secondes)
capacité de synthèse Obstruction biliaire (réponse à la vitamine antibiotiques)
INR (International
K). Coagulopathie de
Normalized Ratio)
consommation
(0,9-1,2)
Syndrome néphrotique
Diminution de la Entéropathie exsudative
Albumine capacité de synthèse
Insuffisance hépatique Dénutrition
(40-60 g/1) Augmentation du
catabolisme Cancer
États inflammatoires
Tableau 2: Syndromes lésionnels hépatiques en fonction des principaux tests fonctionnels hépatiques
Hépatopathie Infiltration
Cytolyse hépatocellulaire Obstruction biliaire Cirrhose
congestive hépatique
Ischémie/
Âgent causal Virus Alcool Complète Incomplète
toxines
Paracétamol, Carcinome
Hépatite primitif ou
Foie de choc, Adénocarcinome
virale Tumeur hilaire métastatique,
Exemple Insuffisance Foie cardiaque
(VHA, pancréatique partielle, CSP tuberculose,
hépatique VHB) sarcoïdose,
aiguë amylose
Transaminases 50-100 X 5-50x 2-5x 1-5x 1-5x "ou 1-5x 1-3x
Phosphatases
1-3 X 1-3x 1-10 X 2-20x 2-10 X "ou 1-5x 1-20 X
alcalines
1-5x
Bilirubine 1-5 X 1-30 X 1-30 X 1-30 X 1-5x 1-3x (souvent
normale)
Temps de Prolongé et absence de réponse à la Souvent prolongé et réponse à la Idem (nécrose Idem (nécrose Habituellement
prothrombine vitamine K en cas de forme sévère vitamine K parentérale hépatocellulaire) hépatocellulaire) normal
Diminuée
Diminuée notamment dans les formes Diminuée dans les formes dans les Diminuée chez Habituellement
Albumine
subaigües ou chroniques avancées (ex. cirrhose biliaire) formes environ 50 % normale
avancées
CSP: cholangite sclérosante primitive; BHA : virus de l'hépatite A; VHB : virus de l'hépatite B.
l
r- Facteurs de risque de CHC
7
Antécédent de néoplasie maligne
Altération de l'état général
!
I 7
r
OUI
7
NON
l ('incide talome')
l
l
l 7
TDM/IRM dynamique
(si non réalisée avant) Hémangiome
l Lésion Lésion
solide kystique
Métastase 1
CHC €) Autre +
Cholangiocarcinome€) Tumeur maligne TDM/IRM
primitive du foie dynamique Asymptomatique, Symptomatique,
Simple Complexe
l 7
l i
r 7
Cicatrice Observation lnvestlguer
centrale
Contexte
'
Infectieux
OUI
Hyperplasie
'
NON
A. Carcinome hépatocellulaire
1. Définition, Épidémiologie, Étiopathogénie
Le CHC est la plus fréquente des tumeurs malignes primitives du foie. Le CHC représente
le s• cancer le plus fréquent chez l'homme et le 7' cancer le plus fréquent chez la femme et
occupe le second rang de cause de mortalité par cancer dans le monde avec plus de 700 000
nouveaux cas diagnostiqués chaque année. Les facteurs de risque majeurs du CHC incluent
la cirrhose, les infections virales B et C, l'alcool et la stéatohépatite non alcoolique. Chez
le patient cirrhotique, le risque cumulé à 5 ans de CHC varie de 5 à 30 % en fonction de
l'étiologie de la cirrhose.
Les principales anomalies moléculaires décrites dans le CHC portent sur les voies suivantes :
signalisation angiogénique, méthylation des promoteurs des gènes et acétylation des
histones, Growthfactor-stimulated receptor tyrosine kinase, signalisation JAK/STAT,
PI3-kinase/AKT/mTOR, p53 et régulation du cycle cellulaire, Ubiquitine-protéasome et
Wnt/{3-caténine.
2. Diagnostic et dépistage
a. Alpha-foetoprotéine
Les marqueurs tumoraux sériques ne permettent pas de poser à eux seuls le diagnostic
de CHC. Ils doivent être associés à l'imagerie. À l'heure actuelle le marqueur tumoral
le plus utile dans le CHC est l'alpha-foetoprotéine (AFP). L'AFP est une alpha-globuline
normalement présente en forte concentration dans le sérum fœtal mais en quantité
minime chez l'adulte. Dans les populations à forte incidence de CHC (Chine, Afrique
subsaharienne) l'AFP utilisée à un seuil très bas (10 ng/ml) présente une sensibilité
de 80-90 % et une spécificité de 90 %. Dans les populations à faible incidence, l'AFP
présente une moins bonne performance diagnostique avec une sensibilité de 25-65 %
et une spécificité de 79-95 % pour des seuils variants entre 16 et 200 ng/ml. Une
164 Hépatomégalie et masse abdominale
concentration d'AFP > 500 ng/ml est hautement suggestive d'un CHC, néanmoins
ces valeurs peuvent s'observer en cas d'hépatite virale aiguë.
Chez un patient cirrhotique, la présence d'un nodule hépatique de plus de 2 cm à l'imagerie
en association à une AFP > 200 ng/ml évoque fortement le diagnostic de CHC. Une
augmentation croissante de l'AFP chez un patient cirrhotique est également associée à un
risque accru de développement du CHC. Chez le patient cirrhotique, l'AFP est recommandée
dans le dépistage du CHC à raison d'un dosage tous les 6 mois en combinaison avec une
échographie hépatique. Une analyse de synthèse de la littérature (méta-analyse) publiée
en 2018 (Gastroenterology 2018,154: 1706-1718) a démontré que la stratégie basée sur
l'échographie seule était moins sensible que celle basée sur l'échographie couplée au dosage
de l'AFP pour le diagnostic précoce du CHC avec un risque relatif de 0,81 (IC 95 % : 0,71-
0,93) et des sensibilités respectives pour les deux stratégies de 45 % (IC 95 %: 30-62) et de
63 % (IC 95 %: 48-75).
En dehors du contexte de la cirrhose, l'AFP est recommandée chez les patients présentant
une hépatite chronique à VHB quel que soit le stade de la fibrose, chez les patients
présentant un portage chronique du VHB et un antécédent familial de CHC; chez les
patients présentant une hépatite chronique à VHC ou ceux présentant une stéatohépatite
non-alcoolique au stade de fibrose F3. Le dépistage du CHC reste recommandé après
guérison virologique du VHC ou après extinction de la charge virale B.
b. Autres biomarqueurs
D'autres marqueurs biochimiques sont en cours d'évaluation mais ne sont actuellement
pas recommandés en clinique de routine (a-Jetoprotein-L3 ou AFP fucosylée, dés-y
carboxyprothrombine ou prothrombin produced by vitamin K absence or antagonist IL
PIVKA II). Au cours des dernières années, une nouvelle génération de biomarqueurs basés
sur les acides nucléiques circulants afait son apparition. Ces biomarqueurs sont basés sur
l'ADN tumoral circulant ou sur les marques épigénétiques portées par l'ADN circulant
{méthylation de l'ADN). Les biomarqueurs basés sur l'ADN circulant sont évalués dans
le cadre du diagnostic, du suivi et du pronostic. Ces biomarqueurs sont toujours en cours
d'évaluation et ne sont actuellement pas recommandés dans le cadre du CHC.
Score de Child-Pugh
Points par critère 1 2 3
Encéphalopathie Absente Confusion Coma
Ascite Absente Discrète Abondante
Albuminémie (g/I) > 35 28-35 <28
Bilirubinémie (mg/I) <20 20-30 > 30
Score de Child-Pugh: Grade A: 5-6 points; Grade B: 7-9 points; Grade C: 10-15 points
MELO score (Madel for End Stage Liver Disease), site web de calcul: http://www.mdcalc.
com/meld-score-model-for-end-stage-liver-disease-12-and-older/
Chapitre 4. Biologie digestive - ITEM 273 165
B. Cholangiocarcinome intrahépatique
1. Définition, Épidémiologie, Étiopathogénie
Le cholangiocarcinome est un carcinome épithélial avec des caractéristiques histopathologiques
d'épithélium biliaire. Le cholangiocarcinome peut provenir de l'arbre biliaire intra- ou
extra-hépatique. Le cholangiocarcinome représente la seconde cause de tumeur primitive
maligne du foie après le CHC. Son incidence ne cesse de croître depuis les années 1970
dans les pays occidentaux. En France, ce cancer représente 3 % des cancers digestifs avec
2 000 nouveaux cas par an. Le cholangiocarcinome intra-hépatique représente 15 % des
cholangiocarcinomes.
Lesfacteurs de risque identifiés pour le cholangiocarcinome sont la cholangite sclérosante
primitive qui expose à un risque annuel de 0,6 à 1,5 %. Les autres facteurs de risque sont: 1)
les infections biliaires par Opisthorchis viverrini et Clonorchis sinensis qui sont endémiques
en Asie de l'Est; 2) les malformations biliaires telles que la maladie de Caroli et les kystes du
cholédoque, associés à un risque de 10 à 15 % de développement du cholangiocarcinome; 3)
les cholangites bactériennes récurrentes (10 % de risque); 4) l'exposition à l'agent de contraste
radiologique anciennement utilisé, Thorotrast et à la dioxine; 5) enfin, l'hépatite C et la
cirrhose sont considérées comme des facteurs de risque potentiel du cholangiocarcinome.
Du point de vue étiopathogénique, plusieurs anomalies ont été décrites sur diverses voies
moléculaires qui incluent la prolifération (Jnterleukine-6, Hepatocyte growth factor
(HGF/c-Met, ErbB2, K-ras, BRAF); lëchappement à l'apoptose (COX-2, Caspase-9, Mcl-1,
bcl2, Bel-XL); la dérégulation du cycle cellulaire (cycline Dl, p21wafl/cipl, p27kipl, p53);
l'invasion et la métastase (E-cadhérine, a/f3-caténine, métalloprotéases); et l'angiogenèse
(VEGF, TGF-f3).
'
dans le cadre d'une
cholangite sclérosante primitive
I
CA 19-9
Cholangiographie
endoscopique �
!
(cytobros age, FISH)
�
l 7
Positivité de la biopsie Négativité de la biopsie,
cytobrossage ou FISH cytobrossage
r l
1
IRM
l
_j
J
Observation
Masse
Prise en charge du
cholangiocarcinome 1
Risque
n�ve
Risque
r
clinique clinique
significatif minime
l
PET-scan l
Fixation PET-scan
'hotspot' négatif
Sténose d'allure maligne+ CA 19-9 > 129 U/ml en l'absence de cholangite bactérienne
Masse tumorale à l'imagerie de coupe
Cytologie conventionnelle positive
Histopathologie positive des biopsies biliaires transluminales
Sténose et polysomie à la FISH (fluorescence in situ hybridization)
C. Abcès du foie
1. Définition, Épidémiologie, Étiopathogénie
Dans le passé, l'abcès du foie à pyogènes était la conséquence d'une appendicite compliquée
d'une phlébite portale chez un patient jeune. Cette présentation est actuellement moins
fréquente du fait du diagnostic précoce et de !'antibiothérapie efficace. La plupart des cas
d'abcès hépatiques à pyogènes sont cryptogéniques et surviennent chez le sujet âgé avec une
pathologie biliaire sous-jacente. Les facteurs de risque de l'abcès du foie sont les suivants :
cancer, immunosuppression, diabète, antécédent de chirurgie biliaire ou d'endoscopie
interventionnelle. On distingue trois formes cliniques de l'abcès du foie : 1) l'abcès du foie
à pyogènes (80 % des cas dans les pays occidentaux); 2) l'abcès amibien lié à une infection
par Entamoeba histolytica (10 % des cas); 3) Abcès fongiques le plus souvent liés à une
infection par Candida species (< 10 % des cas).
Chapitre 4. Biologie digestive - ITEM 273 167
2. Diagnostic clinico-biologique
Cliniquement, l'abcès du foie à pyogènes se manifeste par une fièvre, une hépatomégalie
avec une sensibilité du quadrant supérieur droit qui est accentuée par les mouvements ou
la percussion. La splénomégalie est rarement observée en dehors des formes chroniques. La
présence d'un ictère permet d'évoquer en premier lieu une origine biliaire de l'abcès. Des
signes d'hypertension portale, se manifestant par une circulation veineuse collatérale peuvent
apparaître au décours d'un abcès du foie en cas de complication par une thrombose porte.
a. Syndrome inflammatoire
Les anomalies biologiques sont peu spécifiques, reflétant un sepsis bactérien. La
numération formule sanguine montre une anémie normocytaire inflammatoire
par trapping du fer dans le système réticulo-endothélial, une thrombocytose et une
hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles. Du point de vue biochimique le
syndrome inflammatoire prédomine avec une augmentation de la protéine C-réactive
et accessoirement de la vitesse de sédimentation, dont la prescription est inutile en
phase aiguë. Il s'accompagne d'une hyperbilirubinémie (notamment dans les étiologies
biliaires), d'une augmentation des transaminases (ALAT) et des phosphatases alcalines
(PAL). L'hypoalbuminémie est expliquée par la dépression de la synthèse hépatique induite
par les cytokines pro-inflammatoires notamment l'interleukine-6 (IL-6), l'IL-1 et le TNFa.
Un mauvais état nutritionnel peut contribuer à l'hypoalbuminémie. Le fibrinogène est
augmenté en phase d'état, néanmoins sa cinétique d'augmentation lente et sa demi-vie
longue en font un mauvais marqueur en phase aiguë mais plutôt de résolution du processus
inflammatoire.
b. Procalcitonine
La procalcitonine (PCT) est un marqueur systémique précoce de l'infection bactérienne.
Elle consiste en une protéine de 116 acides aminés dont le précurseur est la calcitonine.
À l'état basal, la procalcitonine est sécrétée par les cellules parafolliculaires C de la thyroïde.
Lors des états infectieux, la production de procalcitonine est ubiquitaire ce qui permet
son augmentation exponentielle et rapide. La demi-vie de la procalcitonine est de 25 à
30 heures. La valeur de référence de la procalcitonine est inférieure à 0,05 ng/ml (percentile
97,5°). La valeur cliniquement pertinente pour évoquer un état infectieux débutant est de
0,5-0,7 ng/ml. Au cours des états septiques, notamment avec une hémoculture positive à
bactéries gram-négatif, la PCT peut atteindre 2-3 ng/ml. Au cours de l'abcès hépatique à
pyogènes la procalcitonine est augmentée dans la majorité des cas avec une valeur moyenne
atteignant 25 ng/ml.
c. Lactates
Le lactate est un métabolite produit dans les tissus à partir du glucose en condition
d'apport insuffisant en oxygène (acidose lactique de type A). En conditions physiologiques,
le lactate est éliminé par le foie et le rein et ses valeurs de référence sont comprises entre
1 et 1,5 mmol/1. Une concentration en lactates supérieure à 2 mmol/1 est un indicateur
de mauvais pronostic. Chez les patients présentant un abcès hépatique à pyogènes, des
lactates > 2 mmol/1 sont associés à un risque significatif de survenue d'un choc septique
(odds ratio= 4,92; IC 95 % : 2,51-9,64).
168 Hépatomégalie et masse abdominale
Biochimie
Protéine C-réactive augmentée (utile en phase aiguë)
Procalcitonine augmentée (utile en phase aiguë)
Lactates (utilité pronostique)
Hyperbilirubinémie (causes biliaires)
Cytolyse {ALAT)
Phosphatases alcalines augmentées
Hypoalbuminémie (protéine négative de la phase aiguë de l'inflammation)
VS (inutile en phase aiguë)
Fibrinogène augmenté (inutile en phase aiguë, idem que VS)
Hématologie
Anémie inflammatoire normocytaire (trapping du fer)
Thrombocytose
Hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles
Bactériologie
Hémoculture positive dans 50 % des cas
Culture du liquide d'aspiration
ITEM 275
ICTERE
Abderrahim OUSSALAH
1. PRÉAMBULE
La présente question s'articule avec l'item 275 «Ictère» traité dans le Référentiel d'Hépato-gastroentérologie
de la Collégiale des Universitaires en Hépato-gastro-entérologie (CDU-HGE). Les détails en lien avec les
aspects cliniques, anatomopathologiques, radiologiques et thérapeutiques ne sont pas systématiquement
repris et ce afin de simplifier la lecture des objectifs tels qu'énoncés par le Collège National de Biochimie
Biologie Moléculaire Médicale (CNBBMM) et d'éviter les redondances d'informations. Certains contextes
sémiologiques ou cliniques sont volontiers développés afin d'illustrer les principaux concepts et objectifs
de l'item en lien avec la discipline de Biochimie et de Biologie Moléculaire.
Il. DÉFINITION
L'ictère correspond à une coloration jaune de la peau, des conjonctives et des muqueuses en lien avec un
dépôt de bilirubine. Bien que l'ictère puisse faire penser en premier lieu à une pathologie de la sphère
digestive, il peut être causé par diverses étiologies, ce qui souligne toute l'importance d'une démarche
diagnostique systématisée basée sur la clinique, la biologie et l'imagerie. La compréhension du métabolisme
170 Ictère
A. Production de la bilirubine
La bilirubine est un tétrapyrrole qui représente le produit de dégradation de l'hème
(Ferriprotoporphyrine IX) (Figure 1). L'hème correspond à un anneau tétrapyrrolique
qui lie un atome de fer présent dans l'hémoglobine, la myoglobine et les cytochromes.
Chaque jour, un adulte sain produit environ 4 mg/kg de bilirubine, soit environ
0,5 mmol pour une personne de 70 kg. La majeure partie de la bilirubine (70-80 %)
provient de la dégradation des globules rouges sénescents. Une partie minime provient
de la destruction prématurée des érythrocytes nouvellement formés dans la moelle
osseuse ou dans la circulation: c'est l'érythropoïèse inefficace. Les 20-30 % de bilirubine
restants sont issus de la dégradation des hémoprotéines (catalase, cytochrome oxydases
hépatocytaires). Les protéines non-hémoglobiniques extra-hépatiques contenant de l'hème,
telles la myoglobine contribuent faiblement au pool global de bilirubine du fait de leur
faible turnover.
NADPH + tr NADP+
Hème Biliverdine
oxygénase réductase
HOOC COOH
Adele
Glucuronyl
glucurvnfque
transférase
Dlglucuronide de
bllfrubine
•..
Hépatocyte._______
_
REL
Rate
Bllfrubfne
�
• _.. /
1
UGT1A1
/
(UGT1A1)
' Btlfrublne
.-
BIiirubine non • mono-
conjuguée glucuronlde
Globlne + Hème
Bllfrubfne -
dlglucuronlde ,
1
I
l'
Érythrocyte
..
, __..........
Recapture
La bilirubine libre rentre dans l'hépatocyte par la membrane sinusoïdale qui est opposé
au pôle canaliculaire biliaire (Figure 2), par deux mécanismes : 1) un mécanisme passif de
diffusion; 2) un mécanisme d'endocytose dépendant d'un récepteur (OATPlBl, Organic
anion transporting polypeptide lBl; codé par le gène SLCOlBl). La captation de la bilirubine
par l'hépatocyte est inhibée de façon compétitive par certains anions organiques tels que
la bromosulfophtaléine (BSP) et l'indocyanine.
C. Conjugaison de la bilirubine
Une fois dans l'hépatocyte, la bilirubine libre est dirigée par des protéines cytosoliques
(ex. glutathion S-transférase) vers le réticulum endoplasmique lisse où elle devient
le substrat de l'enzyme appelée glucuronyl-transférase (UGTIAI codée par le
gène UGTlAl). Cette enzyme catalyse l'estérification des chaînes latérales d'acide
propionique de la bilirubine avec l'acide glucuronique, afin de produire essentiellement
du diglucuronide de bilirubine, correspondant à la bilirubine conjuguée qui est
hydrophile (Figures 1 et 2).
20-1----+----l--+---+---+--!---+----+----l--+---+---+--+342
Hyperbtlirublnémte libre
l
Anémie / hémolyse ?
i i --+
- Haptogloblne, LDH, Frottis sanguin (schlzocytes),
Non Oui Test de Coombs direct, Notion de transfusions?
Taux de rétlculocytes, lma,erle (hématome)
[ Principaux diagnostics
- Hémolyse
Médicament? - Transfusions
Hépatotoxlques? - Hématome
1
- Erythropdi'èse Inefficace (anémie méploblastlque,
anémie ferrlprtve sévère, porphyrle)
l
Non
l
Oui
Principales molécules
Cirrhose? - Rlfampldne
Hépatopathle chronique? - Cyclosporlne
- lndlnavlr, Atazanavlr
1 Non Oui
l __,. - Bilan de l'hépatopathle
- Cf. Items 273, 276
l
- TSH, T3, T4 libre
- Echocardlographle
1
Principaux diagnostics
- HyperthyroYdle
- Insuffisance cardiaque congestive
- Maladie de Gilbert �
- Maladie de Grtgler-Najjar 4)
- Ictère physiologique du nouveau-né
Hyperblllrublnémle
conjuguée Isolée Hyperblllrublnémle conJuauée
'
- Maladie de Dubln.Johnson 0 Au1mentatlon minime des PAL, GGT, 5'N
- Maladie de Rotor 0 Cytolyse minime
TQ / INR normaux ou auamentés
l
Processus obstructif Pathologies lntra-hépatlques avec
(cholestase) dysfonction hépatique prédominante
l
Échoaraphte / TOM /
! l
- Sérologie de l'hépatite
8111-IRM / CPRE - Echoaraphie-doppler du foie
- Rechercher un éthylisme ou une Ischémie
Patholoales lntra-hépatiques (hypotension)
Pathologies extra-hépatiques - Toxiques (médicaments, champianons, autres
avec cholestase prédominante
hépatotoxiques)
- Céruléoplasmlne, cuivre urinaire des 24 heures
Principaux diagnostics Principaux diagnostics - Anticorps anti-nucléalres, anti muscle lisse,
- Pathologie lithiasique biliaire - Processus infiltratif diffus hépatiques : Taux d'llG
o Granulomatose: tuberculose, sarco'îdose,
- Pathologies inflammatoires des voies biliaires : lymphome Weaener;
o Amylose; Principaux diagnostics
- Cholangite sclérosante primitive;
- Cholangiopathie du SIDA; o Lymphome. - Contexte aigu ou subaigu :
- Chimiothérapie artérielle hépatique; o Virus;
- Sténoses post-opératolres; - Lésions du cholangiocyte : o Toxique (alcool, paracétamol, Amanlta
- Ascaridiose biliaire. o Cholan<e biliaire primitive; phallo'îdes);
o Maladie du greffon contre l'h6te; o Médicaments (Isoniazide, phényto'îne);
- Pathologies néoplasiques des voies biliaires : o Médicaments: érythromycine, co-trlmoxuole; o Vasculaire (Ischémie, obstruction vasculaire
ex. cholangiocarclnome o Mucoviscidose. sus-hépatique);
o Désordres métaboliques (maladie de Wilson,
- Compressions extrinsèques des voies biliaires: - Autres pathologies : Syndrome de Reye, stéatose hépatique alaUe
o Cancer (pancréas, CHC, ampullome, - Médicaments (œstroaènes, stéro'îdes gravidique Ci), pré-éclampsie C,).
lymphome, lymphadénopathle) ; anabolisants);
o Pancréatite; - Nutrition parentérale totale; - Contexte chronique :
o Compression vasculaire (Cavemome porte, - Sepsis bactériens; o Virus;
anévrysme). - Insuffisance cardiaque; o Alcool;
- Syndromes paranéoplaslques ; o Hépatite auto-Immune;
- Cholestase aravldique. 0 o Désordres métaboliques (hémochromatose,
maladie de Wilson, NAFLD, déficit en a1•
antltrypslne)
VII. CHOLESTASE
La cholestase est définie par une diminution du flux biliaire due à une altération
de la sécrétion hépatocytaire ou à une obstruction à l'écoulement biliaire dans les
canaux biliaires intra ou extra-hépatiques. Les marqueurs de la cholestase incluent
les phosphatases alcalines (PAL), la gamma-glutamyl transpeptidase (GGT) et la
5'-Nucléotidase (5'N). Une cholestase n'est pas obligatoirement associée à un ictère,
c'est la cholestase anictérique parfois observée dans les pathologies pancréatiques, les
métastases hépatiques, les granulomatoses, la cholangite biliaire primitive, la cholangite
sclérosante primitive ou la cholestase gravidique. Inversement une hyperbilirubinémie à
prédominance conjuguée peut survenir de façon isolée et en dehors de tout contexte de
cholestase. C'est le cas des hyperbilirubinémies conjuguées d'origine génétique (Figure 4).
176 Ictère
Maladie de Maladie de
Maladie de Maladie de Dubin- Maladie
Crigler-Najjar Crigler-Najjar
Gilbert Johnson de Rotor
de type Il de type 1
Gène SLC01B1 et
UGT1A1 UGT1A1 UGT1A1 ABCC2
impliqué SLC01B3
Fréquence Fréquent (6-12 %) Rare Très rare Rare Très rare
Altération de
Diminution
Baisse de la Absence de Altération de l'export la recapture
Anomalie importante de la
conjugaison de la conjugaison de la canaliculaire de la sinusoïdale de
métabolique conjugaison de la
bilirubine bilirubine bilirubine conjuguée la bilirubine
bilirubine
conjuguée
Habituellement Classiquement
,:; 30 mg// en < 200 mg// > 200 mg/I
Bilirubine Classiquement Classiquement
l'absence de jeOne
(mg/1) Valeurs possibles : Valeurs possibles : < 70 mg// < 70 mg/I
ou d'hémolyse
60-450 mg/I 170-500
Hyperbilirubinémie Hyperbilirubinémie
Type d'hyper- Hyperbilirubinémie Hyperbilirubinémie Hyperbilirubinémie
Mixte (50 % de Mixte (50 % de
bilirubinémie libre libre libre
conjuguée) conjuguée)
Maladie de Maladie de
Maladie de Maladie de Dubin- Maladie
Crigler-Najjar Crigler-Najjar
Gilbert Johnson de Rotor
de type Il de type 1
Augmentation de
la concentration de Augmentation
la bilirubine après minime du
exposition aux ratio des
Amélioration de œstrogènes coproporphyrines
Autres Amélioration de Absence de
l'hyperbi I irubinémie urinaires 1/11
critères l'hyperbi I irubinémie réponse au Augmentation
sous
distinctifs sous phénobarbital phénobarbital marquée du ratio des Très faible
phénobarbital
coproporphyrines cinétique
urinaires 1/111 d'élimination de
Faible cinétique la BSP
d'élimination de la BSP
Décès si pas de
Pronostic Bon Habituellement bon Bon Bon
traitement
Phénobarbital Photothérapie
Aucun
dans le cas d'une en attente de la
Traitement Aucun Éviter les œstrogènes traitement
hyperbilirubinémie transplantation
disponible
majeure hépatique
BSP: bromosulfophtaléine; UGT1A1 : UDP glucuronosyltransferase family 1 member A1; ABCC2: ATP
binding cassette subfamily C member 2; SLC01B1 : Solute carrier organic anion transporter family member 1B1;
SLC01B3: solute carrier organic anion transporter family member 1B3. (Adapté de, Sleisenger and Fordtran's
gastrointestinal and li ver disease: pathophysiology, diagnosis, management/ledited by] Mark Feldman, Lawrence S.
Friedman, Lawrence J. Brandt.-9th ed}.
L-Low
Plaquettes< 150 G/1
P-Platelets
ITEM 276
CIRRHOSE ET COMPLICATIONS
Aberrahim OUSSALAH
1. PRÉAMBULE
La présente question s'articule avec l'item 273 « Item 276: Cirrhose et complications» qui est traité dans le
Référentiel d'Hépato-gastroentérologie de la Collégiale des Universitaires en Hépato-gastro-entérologie (CDU
HGE). Les détails en lien avec les aspects cliniques, anatomopathologiques, radiologiques et thérapeutiques
ne sont pas systématiquement repris et ce afin de simplifier la lecture des objectifs tels qu'énoncés par le
Collège National de Biochimie et de Biologie Moléculaire Médicale et d'éviter les redondances d'informations.
Certains contextes sémiologiques ou cliniques sont volontiers ,développés afin d'illustrer les principaux
concepts et objectifs de l'item en lien avec la discipline de Biochimie et Biologie Moléculaire.
180 Cirrhose et complications
A. Définition
La cirrhose est définie histologiquement comme une atteinte hépatique pathologique
diffuse associant une fibrose hépatique etdesnodulesde régénération. La désorganisation
nodulaire des lobules hépatiques, la mauvaise vascularisation des hépatocytes et la
diminution de la quantité d'hépatocytes fonctionnels entraînent l'apparition progressive
d'une insuffisance hépatocellulaire et d'une hypertension portale qui représentent
les deux éléments physiopathologiques majeurs de la cirrhose.
Tableau 1 : Évaluation de première ligne chez le patient présentant une suspicion de cirrhose
Évaluations
Hématologie
NFS (recommandation HAS)
Taux de prothrombine (recommandation HAS)
Facteur V
INR
Biochimie
Bilan rénal (urée, créatinine)
lonogramme sanguin (Na, K)
Bilirubine (totale, directe, indirecte) (recommandation HAS)
Transaminases : ASAT, ALAT (recommandation HAS)
Phosphatases alcalines (recommandation HAS)
Gamma-glutamyl transpeptidase (recommandation HAS)
Électrophorèse des protéines sériques (recommandation HAS)
lmmunoélectrophorèse des protéines sériques
Glucose, triglycérides, cholestérol (recommandation HAS)
Ferritine et coefficient de saturation de la transferrine (recommandation HAS)
Anticorps anti-nucléaires, anti-muscle lisse, anti-mitochondrie
Sérologies virales B, C (recommandation HAS)
Alpha-foetoprotéine (recommandation HAS)
Si ascite présente : urines des 24 heures et excrétion du Na
Sérologies virales
Antigène HBs, anticorps anti-HBs, anticorps anti-HBc (recommandation HAS)
Anticorps anti-VHC (recommandation HAS)
Endoscopie œso-gastro-duodénale (recommandation HAS)
Imagerie du foie (échographie abdominale couplée au doppler, effectuée par un opérateur
expérimenté, recommandation HAS); TDM/IRM.
Biopsie hépatique selon le contexte étiologique et les tests de crase sanguine
(non obligatoire)
Électroencéphalogramme à discuter selon le contexte (points d'appel psychiatriques?)
Adapté de Sherlock, Shiela, and James Dooley. Diseases of the liver and biliary system.
John Wiley & Sons, 2008; Les recommandations de la Haute Autorité de la Santé
sont issues du document : Critères diagnostiques et bilan initial de la cirrhose non
compliquée (Actualisation de décembre 2008), accessible sur : https://www.has-sante.
fr/portail/upload/docs/application/pdfIfs_cirrhose_web.pdf.
(Temps de Quick allongé) et ne se normalise pas après traitement par vitamine K (facteur
V diminué). La moelle osseuse est macro-normoblastique.
2. Biochimie
Les différents tests biochimiques hépatiques sont développés dans l'Item 273 : Hépatomégalie
et masse abdominale, (cf. Tableau 1). Les signes biologiques évocateurs de cirrhose
regroupent les anomalies suivantes : hypoalbuminémie, hyperbilirubinémie,
augmentation modérée des transaminases, augmentation modérée des phosphatases
alcalines et hypogammaglobulinémie. L'ionogramme sanguin peut montrer une
hyponatrémie de dilution.
L'insuffisance hépato-cellulaire est définie biologiquement par les anomalies suivantes
isolées ou associées :
1. Diminution de la concentration sérique des facteurs de la coagulation responsable
d'un allongement du temps de Quick (non corrigé par l'administration parentérale de
vitamine K); le taux de facteur V est considéré comme la donnée la plus significative;
■ 2. Hypoalbuminémie;
3. Hyperbilirubinémie.
L'électrophorèse des protéines sériques met en évidence, hormis l'hypoalbuminémie, un
bloc beta-gamma (Figure 1). Le bloc beta-gamma est lié à une augmentation polyclonale
des gammaglobulines. Cette augmentation polyclonale est causée par l'insuffisance
hépatique de la cirrhose qui cause un défaut de clairance des antigènes intestinaux. Les
patients cirrhotiques ont un titre élevé d'anticorps dirigés contre les antigènes intestinaux,
notamment contre Escherichia coli. Les antigènes intestinaux shuntent le foie, à cause de
l' hypertension portale et des dérivations porto-systémiques et entraînent une réaction
immunitaire notamment dans la rate. Les IgA polymérisées et les complexes IgA-antigène
d'origine intestinale peuvent également atteindre la circulation systémique. La fonction
suppressive des lymphocytes T est diminuée au cours de la cirrhose ce qui entraîne une
levée d'inhibition sur les lymphocytes B producteurs d'anticorps.
L'exploration biochimique des urines peut retrouver un taux d'urobilinogène augmenté.
La bilirubine urinaire peut être détectée chez les patients ictériques (ictère à bilirubine
conjuguée). En cas d'ascite, l'excrétion du sodium est diminuée. Dans les formes
sévères, la natriurie peut être inférieure à 5 mmol/1.
Albumine Albumine
Critère
Test
Paramètres diagnostique
non-invasif
de la cirrhose
Haptoglobine; Bilirubine totale; Gamma-glutamyl transpeptidase;
Fibrotest® Score> 0,75
a2-macroglobuline; Apolipoprotéine A1 ; Âge; Sexe
ASAT, ALAT; Bilirubine totale; Gamma-glutamyl transpeptidase;
FibroMètre® Urée; a2-macroglobuline; Acide hyaluronique; Numération des Score> 0,98
plaquettes; Taux de prothrombine
Bilirubine totale; Gamma-glutamyl transpeptidase; a2-macroglobuline;
HepaScore® Score> 0,84
Acide hyaluronique; Âge; Sexe
Mesure par ultrasons de la vitesse de propagation dans le foie d'une
Fibroscan® > 13-15 kPa
onde mécanique permettant d'estimer un coefficient d'élasticité
100
g 80
60
,..,...,E
CIi 40
20
0
0 10 20 30 40 50
Score MELO (Mode/ for End Stage Liver Disease)
Figure 2. MELO score (Mode/ for End Stage Liver Disease). Les patients cirrhotiques
avec un MELO score< 15 ont une meilleure survie sans transplantation hépatique
qu'avec une transplantation hépatique (Adapté de Wiesner R, et al. Gastroentero/ogy
2003; 124: 91-6).
Score de Child-Pugh
Points par critère 1 2 3
Encéphalopathie Absente Contusion Coma
Ascite Absente Discrète Abondante
Albuminémie (g/I) >35 28-35 <28
Bilirubinémie (mg/I) <20 20-30 >30
Taux de prothrombine (%) >50 40-50 <40
MELO score
MELD(initial)= 0,957 x ln(Créatinine, mg/dl)+ 0,378 x ln(Bilirubine, mg/dl)+ 1,120 x ln(INR) + 0,643.
Le résultat du calcul doit être arrondi à la première décimale puis multiplié par 10.
En cas de MELD(initial) >11, réaliser le calcul suivant du score MELO:
MELO= MELO(initial) + [1,32 x (137 - Na}]- [ 0,033 x MELO(initial) x (137 - Na)]
Score de Child-Pugh: Grade A: 5-6 points; Grade B: 7-9 points; Grade C: 10-15 points
MELD score (Mode/ for End Stage Liver Disease), site web de calcul : http://www.mdcalc.
com/meld-score-model-for-end-stage-Iiver-disease-12-and-older/
A. Encéphalopathie hépatique
L'encéphalopathie hépatique (EH) correspond à un ensemble de manifestations neurologiques
et psychiatriques habituellement transitoires et réversibles, observées chez les patients
cirrhotiques ou ceux présentant une insuffisance hépatique aiguë. L'EH se développe chez
50-70 % des patients cirrhotiques. Sa survenue est de mauvais pronostic avec des taux de
survie respectifs de 42 % et 23 % à 1 et 3 ans.
Les manifestations cliniques de l'EH vont de l'altération neurologique minime au coma.
L'EH est le plus souvent déclenchée par un évènement qui entraîne une augmentation de la
concentration sérique d'ammoniaque. Les mécanismes physiopathologiques précis de l'EH
sont mal connus. Les bases physiopathologiques du traitement de l'EH ciblent l'élimination
de la cause déclenchante et l' élimination de l'excès d'ammoniaque. La transplantation
hépatique permet de lever l'EH.
Chapitre 4. Biologie digestive - ITEM 276 185
Le test le plus couramment utilisé chez un patient cirrhotique présentant une suspicion
d'EH est le dosage de la concentration plasmatique de l'ion ammonium (NH4•). Les
conditions pré-analytiques du dosage de l'ammoniémie imposent un prélèvement
veineux sans garrot et un transport du prélèvement dans la glace dans la demi-heure qui
suit le prélèvement. Chez le patient cirrhotique, le dosage de l'ammoniémie artérielle
n'offre pas d'avantage sur le dosage veineux pour le diagnostic de l'EH.
Une hyperammoniémie chez un patient cirrhotique présentant une altération du statut
mental doit faire suspecter une EH. L'hémorragie digestive chez le patient cirrhotique
peut entraîner une élévation de l'ammoniémie en l'absence d'EH. En dehors de la cirrhose,
l' hyperammoniémie peut s'observer en présence d'une encéphalopathie hépatique en
rapport avec un désordre métabolique : cycle de l'urée; métabolisme de la proline.
B. Ascite cirrhotique
Cirrhose ClrrhoN
compensée décompensée
Temps
Circulation hypenlynamlque
Rétention de sodium
t ADH et hyponatrémle
SHRdetype2
SHRcletype 1
C. Syndrome hépatorénal
Le syndrome hépatorénal correspond au développement d'une insuffisance rénale chez un
patient présentant une hépatopathie chronique, une hypertension portale et une ascite. Au
moins 40 % des patients cirrhotiques avec une décompensation ascitique développent un
SHR au cours de l' évolution de leur maladie. Au cours du SHR, les reins ont une apparence
normale et reprennent un fonctionnement normal après transplantation hépatique.
En cas de suspicion de SHR, les sociétés savantes internationales (European Association
for the Study of the Liver, EASL et American Association for the Study of Li ver Diseases,
AASLD) recommandent la réalisation d'une échographie abdominale, une paracentèse
diagnostique et une culture du liquide d'ascite.
Le diagnostic de SHR est un diagnostic d'exclusion reposant sur le dosage de la créatininémie.
Le diagnostic de SHR est basé sur la réduction du taux de filtration glomérulaire en
l'absence d'insuffisance rénale chez le patient cirrhotique. Les critères de !'International
Ascites Club (1996) aident au diagnostic du SHR.
D. Carcinome-hépatocellulaire
Cf item 273 : Hépatomégalie et masse abdominale.
ITEM 277
ASCITE
Abderrahim OUSSALAH
1. PRÉAMBULE
La présente question s'articule avec l'item 277 «Ascite» traité dans le Référentiel d'Hépato-gastroentérologie
de la Collégiale des Universitaires en Hépato-gastro-entérologie (CDU-HGE). Les détails en lien avec les
aspects cliniques, anatomopathologiques, radiologiques et thérapeutiques ne sont pas systématiquement
repris et ce afin de simplifier la lecture des objectifs tels qu'énoncés par le Collège National de Biochimie
Biologie Moléculaire Médicale et d'éviter les redondances d'informations. Certains contextes sémiologiques
ou cliniques sont volontiers développés afin d'illustrer les principaux concepts et objectifs de l'item en lien
avec la discipline de Biochimie et de Biologie Moléculaire.
Il. DÉFINITION
Le terme ascite provient du grec « askos », qui signifie sac. L'ascite correspond à une accumulation
pathologique de fluide dans la cavité péritonéale. On parle de liquide d'ascite.
188 Ascite
Ill. ÉTIOLOGIE
L'ascite est causée par plusieurs situations pathologiques qui couvrent un large panel de
diagnostics différentiels. Les mécanismes suivants peuvent conduire à l'apparition d'une
ascite : une hypertension portale associée à une insuffisance hépatocellulaire dans le cadre
d'une cirrhose, une pathologie péritonéale (inflammatoire, infectieuse, néoplasique), une
hypoalbuminémie ou une rupture d'un conduit liquidien (ex. biliaire, urinaire) (Tableau 1).
Du point de vue épidémiologique, dans les pays occidentaux, les principales causes d'ascite
sont la cirrhose (75 %), les atteintes malignes primitives ou secondaires du péritoine (12 %),
l'insuffisance cardiaque (5 %) et la tuberculose péritonéale (2 %).
Hypertension portale
Cirrhose* (75 %)
Hypertension portale non-cirrhotique
► Sus-hépatique (congestion hépatique)
• Insuffisance cardiaque congestive* (5 %)
• Péricardite constrictive
• Obstruction du retour veineux sus-hépatique (ex. thrombose de la veine sus-hépatique)
► Pré-hépatique (thrombose de la veine porte)
► lntra-hépatique
• Pré-sinusoïdale: hyperplasie nodulaire régénérative; granulomatose (schistosomiase,
sarcoïdose); maladie de Rendu-Osier; polykystose; etc .
• Sinusoïdale: fibrose sinusoïdale (ex. hépatite alcoolique aiguë, méthotrexate, amiodarone);
thrombophilie; infiltration sinusoïdale (ex. mastocytose, amylose).
• Post-sinusoïdale: Maladie veino-occlusive (ex. 6-thioguanine, azathioprine); sclérose des veines
hépatiques; envahissement malin; granulomatose (ex. sarcoïdose, mycobactéries)
Cancer* (12 %)
Carcinose péritonéale
Carcinome hépatocellulaire
Mésothéliome
Métastases hépatiques
Pathologies malignes intra-abdominale
Infection
Péritonite bactérienne spontanée (contexte de cirrhose)
Péritonite bactérienne secondaire
Tuberculose péritonéale* (5 %)
Péritonite à Chlamydia
Autres causes
Ascite d'origine pancréatique (ex. pancréatite)
Ascite d'origine biliaire
Hypoalbuminémie (ex. entéropathie exsudative, syndrome néphrotique)
Fuite lymphatique (ascite chyleuse)
Fuite urinaire
Myxœdème
Chapitre 4. Biologie digestive - ITEM 277 189
Les causes les plus fréquentes d'ascite sont annotées d'un astérisque; le pourcentage
indique la part de l'étiologie parmi les différentes causes d'ascite (Adapté de: Oey RC, et
al. Neth J Med. 2016; 74: 330-335).
A. Ascite cirrhotique
L'ascite cirrhotique résulte d'une succession d'évènements physiopathologiques regroupés
sous l'hypothèse de la « vasodilatation artérielle périphérique». L' étiopathogénie de l'ascite
cirrhotique est détaillée dans l'item 276 : Cirrhose et complications (Complications de la
cirrhose).
B. Ascite non-cirrhotique
Du point de vue physiopathologique, l'ascite peut être provoquée par l'un ou plusieurs des
mécanismes suivants : 1) une augmentation de la pression hydrostatique intravasculaire
(ex. insuffisance cardiaque congestive); 2) une diminution de la pression oncotique
intravasculaire (ex. syndrome néphrotique); 3) une exsudation péritonéale (ex. carcinose
péritonéale, tuberculose).
Au cours de l'insuffisance cardiaque, l'ascite est liée à l'augmentation de la pression dans
les veines sus-hépatiques et les veines qui drainent le péritoine. Dans le contexte d'une
insuffisance cardiaque, l'ascite reflète une évolution chronique. Au cours du syndrome
néphrotique, l'ascite est une manifestation inconstante et s'intègre habituellement à un
tableau d'anasarque (épanchement pleural, ascite, épanchement péricardique). L'ascite
du syndrome néphrotique est secondaire à la baisse de la pression oncotique vasculaire
liée à l'hypoalbuminémie. L a baisse de la pression oncotique entraîne une hypovolémie
efficace, une activation du système rénine-angiotensine-aldostérone et du système nerveux
sympathique, conduisant à une rétention hydrosodée.
Au cours de la carcinose péritonéale, l'ascite provient de la production d'un liquide riche
en protéines par les cellules tumorales qui tapissent le péritoine. L e liquide extracellulaire
est attiré vers la cavité péritonéale afin de compenser la balance oncotique. En cas de
métastases hépatiques massives, l'ascite est secondaire à une hypertension portale (sténose
de la veine porte, compression extrinsèque par les métastases, emboles de la veine porte).
Chez les patients présentant un carcinome hépatocellulaire, l'ascite peut être causée par la
cirrhose sous-jacente, une thrombose de la veine porte ou par les deux mécanismes associés.
L'ascite chyleuse entrant dans le cadre d'un lymphome malin est causée par une obstruction
tumorale lymphatique ou bien par une rupture lymphatique.
Dans une étude prospective, la classification basée sur le GASA en utilisant le seuil
décisionnel de 11 g/l (� 11 g/l vs. < 11 g/1) permettait de classer correctement l'étiologie de
l'ascite dans 96,7 % des cas en comparaison à seulement 55,6 % des cas lorsque l'algorithme
exsudat(� 25 g/l de protéines= ascite riche) versus transsudat(< 25 g/l= ascite pauvre) était
utilisé (Runyon BA et al. Ann Intern Med. 1992; 117: 215-20). Un GASA � 11 g/1 (ascite à
190 Ascite
gradient élevé) indique la présence d'une hypertension portale comme mécanisme sous
jacent de l'ascite. Un GASA < 11 g/1 (ascite à gradient bas) implique que l' hypertension
portale n'est pas impliquée dans la survenue de l'ascite. Il est important de noter que lorsque
l'ascite présente une double composante (ex. hypertension portale liée à une cirrhose et
une carcinose péritonéale compliquant un cancer digestif ), le score GASA sera ;c: 11 g/1
car l'hypertension portale est présente.
Tableau 2 : Tests utilisés pour l'exploration d'un patient présentant une ascite
ASCITE
Routine Optionnels Inutiles
Glucose
Albumine LDH PH
Protides totaux Amylase Lactates
Compte des hématies, poly- - Triglycérides Cholestérol
nucléaires et lymphocytes Bilirubine Fibronectine
Bactériologie (flacons d'hé- - Adénosine désaminase Antigène carci
moculture) BK (direct, culture, PCR) no-embyonnaire
Cytologie (cellules néoplasiques)
SERUM
Albumine Peptide natriurétique de type B
BK: Bacille de Koch; LDH : lactate déshydrogénase.
1. Ascite
a. Protides totaux
Le dosage des protides totaux permet de classer le liquide d'ascite comment exsudatif
(� 25 g/1) ou transsudatif (< 25 g/1). Cette classification, utilisée seule ne permet pas une
orientation diagnostique pertinente devant une ascite. L'orientation diagnostique devant
une ascite repose sur le calcul du GASA et le dosage des protides totaux (cf. Chapitre ci
dessous : « Approche diagnostique en pratique chez un patient présentant une ascite»).
b. Albumine
(Cf. chapitre 'Classification des ascites', gradient d'albumine entre le sérum et l'ascite)
c. Glucose
La molécule de glucose est de petite taille et peut diffuser facilement dans le liquide
péritonéal. Dans l'ascite cirrhotique non compliquée, la concentration de glucose dans le
liquide d'ascite est similaire à la glycémie. Au cours de la péritonite bactérienne spontanée
ou de la péritonite secondaire, le glucose est consommé par les globules blancs, notamment
les neutrophiles et la concentration de glucose dans le liquide d'ascite chute de façon
significative.
d. LDH
La taille de la molécule de lactate déshydrogénase (LDH) empêche sa diffusion entre
le sang et le liquide péritonéal. Dans le cas d'une ascite cirrhotique non compliquée, la
Chapitre 4. Biologie digestive - ITEM 277 191
e. Amylase/lipase
Dans l'ascite cirrhotique non compliquée, la concentration d'amylase dans le liquide d'ascite
est égale à la moitié de l'amylasémie ("' 50 U/1). Chez les patients atteints de pancréatite aiguë
ou de perforation intestinale, la concentration en amylase du liquide d'ascite est augmentée
(habituellement > 2 000 U/1). En cas de rupture d'un canal excréteur du pancréas dans le
péritoine (pancréatite aiguë nécrosante, pancréatite chronique avec hyperpression d'un canal
pancréatique), le liquide d'ascite est riche en enzymes pancréatiques, notamment la lipase.
f. Triglycérides
Le dosage des triglycérides dans le liquide d'ascite doit être demandé lorsque le liquide
présente un aspect lactescent ou opalescent. Par définition, une ascite chyleuse présente
une concentration de triglycérides supérieure à 2 g/1 (2,26 mmol/1) et supérieure à la
concentration sérique. Habituellement, dans les ascites chyleuses, la concentration en
triglycérides est supérieure à 10 g/1 (11,3 mmol/1).
g. Bilirubine
Le dosage de la bilirubine dans le liquide d'ascite doit être demandé lorsque le liquide
d'ascite présente un aspect brun-noirâtre. Une concentration de bilirubine dans le liquide
d'ascite supérieure à 60 mg/1 (103 µmol/!) et supérieure à la bilirubinémie indique une
ascite biliaire ou une perforation intestinale proximale dans le péritoine.
h. Adénosine désaminase
L'adénosine désaminase est une enzyme nécessaire à la maturation et à la différentiation
des cellules lymphoïdes. Une méta-analyse publiée en 2014 a rapporté qu'une concentration
augmentée d'adénosine désaminase (> 30-40 U/1) présente une sensibilité de 93 %, une
spécificité de 94 %, pour le diagnostic de tuberculose péritonéale (Tao L, Diagn Microbiol
Infect Dis 2014; 79: 102-7). Cependant, en cas de cirrhose sous-jacente, la sensibilité de
l'adénosine désaminase pour la détection d'une infection tuberculeuse n'est que de 30 %.
i. Créatinine
Une cause rare d'ascite est la fuite urinaire dans la cavité péritonéale. Les ascites d'origine
urinaires sont provoquées par des pathologies de la vessie ou des obstructions des voies
urinaires. Le rapport créatinine dans l'ascite/créatininémie est de 1. En cas d'ascite d'origine
urinaire, ce rapport est augmenté et peut atteindre 5. Les ascites urinaires peuvent faussement
évoquer un tableau d'insuffisance rénale du fait de la réabsorption péritonéale de l'urée.
2. Sérum
a. Albumine
(Cf. chapitre 'Classification des ascites', gradient d'albumine entre le sérum et l'ascite)
un BNP :,; 182 pg/ml permet d'exclure le diagnostic d'une ascite liée à une insuffisance
cardiaque (Farias AQ, et al. Hepatology 2014; 59: 1043-5).
Paracentm di•ll'lostlqu. :
7
1l
✓ Albumine
r ...... . ....-,
✓ Protides totaux
✓ Cytol01ie
✓ Bactérlol01ie (flacons d'hémoculture)
1 7
GASA l: 11 a/L GASA < 11 a/L
(...... r- ....,
Protides totaux l: 25 afL Protides totaux < 25 a/L Protides totaux i: 25 t/L Protides totaux < 25 t/L
(Ascite riche en protides) (Ascite pauvre en protldn) (Ascite riche en protides) (Ascite pauvre en protides)
1. INTRODUCTION
L'hyperthyroïdie constitue l'ensemble des troubles liés à l'excès d'hormones thyroïdiennes au niveau des
tissus cibles; on parle de syndrome de thyrotoxicose, auxquels s'associent des troubles variés selon l'étiologie.
La prévalence de l'hyperthyroïdie est estimée à 0,8 % en Europe et 1,3 % aux USA.
C'est l'association de plusieurs manifestations cliniques, listées ici, qui fait évoquer le diagnotic.
Cardiovasculaires: palpitations, tachycardie régulière, pouls vibrant, élévation de la pression artérielle
systolique.
■ Neuromusculaires: nervosité excessive, agitation psychomotrice et labilité de l'humeur, tremblement
fin et régulier des extrémités.
■ Fatigue générale.
Il Insomnie.
■ Amaigrissement rapide et souvent important contrastant avec un appétit conservé ou augmenté.
■ Hypersudation, mains chaudes et moites.
■ Gastrointestinale : augmentation de la fréquence des selles par accélération du transit avec parfois
une véritable diarrhée motrice.
■ Oculaire: rétraction de la paupière supérieure découvrant l'iris, avec asynergie oculopalpébrale, très
rare en dehors de la maladie de Basedow.
■ Gynécomastie chez l'homme et troubles des règles chez la femme, avec fertilité conservée.
Les HT, qui ont la particularité d'être iodées, sont au nombre de deux : la T3 ou tri
iodothyronine et la T4 ou tétra-iodothyronine plus couramment dénommée thyroxine.
Elles sont produites par les cellules folliculaires thyroïdiennes sous l'influence
positive de la TSH (hormone hypophysaire appartenant à la famille des hormones
glycoprotéiques avec la LH, la FSH et l'hormone placentaire hCG). La TSH exerce son
effet stimulant à plusieurs niveaux de la biosynthèse des HT : elle augmente la captation
des iodures au pôle basolatéral des thyréocytes, elle augmente l'organification de
l'iode et le couplage des iodotyrosyls en stimulant la TPO ou thyroperoxydase au pôle
apical, et elle augmente l'endocytose de la thyroglobuline (Tg) qui porte la T3 et la T4.
La TSH est libérée sous l'influence d'une hormone hypothalamique, la thyrolibérine
(TRH). En retour les HT, en particulier la T3, et uniquement leurs fractions libres,
exercent un retrocontrôle inhibiteur sur la libération hypophysaire de TSH. En raison du
fonctionnement de l'axe hypothalamo-hypophyso-thyroïdien, il existe une relation
inversement proportionnelle entre la concentration sérique de la TSH (exprimé en log) et
la concentration sérique de la fraction libre de la T4 ou FT4 (free T4}-(Fig. 1). En l'absence
d'anomalie de l'axe hypothalamo-hypophysaire, lorsque la FT4 s'élève au-delà de la limite
supérieure des valeurs normales, la TSH diminue. À l'inverse, lorsque la FT4 s'abaisse en
dessous de la limite inférieure de la normale, la TSH s'élève. En cas d'anomalie de l'axe
hypothalamo-hypophysaire anormal, cette relation disparaît.
------}--
' ---- -- - --- -
\,
,,(,� . \��
1 ..
1
0 5 10 15 20 25 30
Median free T4 (pmol/L)
A. Spécificités biologiques
1. Dosage de la TSH
Le dosage de la TSH est très répandu et les différentes techniques de dosages proposées
par les fabricants sont robustes (bonne sensibilité et bonne spécificité). Il faut
privilégier un dosage de 3• génération, capable de mesurer avec une précision suffisante
une concentration très faible de TSH : � 0,02 mUI/1. La plupart des dosages sont de
type immunométrique (ou sandwich) et font appel à deux anticorps monoclonaux
reconnaissant deux épitopes différents de la TSH. Le risque de reconnaissance erronée
d'hormones structurellement proches(LH, FSH ou hCG) est faible avec une réactivité
croisée négligeable(< 0,01 à 0,1 %). Le signal mesuré est directement proportionnel
à la concentration en TSH.
Les valeurs de référence de la TSH sérique sont usuellement comprises chez l'adulte
entre 0,4 et 3,6 mUl/1 avec un dosage de 3• génération. Elles doivent être adaptées dans
au moins deux situations particulières :
■ chez la femme enceinte : en raison de l'élévation progressive des concentrations
sanguines d'hCG qui a un effet TSH-like, on observe une diminution significative des
valeurs de TSH en particulier au 1er trimestre de la grossesse. Les limites supérieures
souhaitables sont ainsi de 2,5 mUl/1 au 1er trimestre et de 3,0 mUl/1 aux deuxièmes
et troisièmes trimestres;
■ chez le nouveau-né : les valeurs de TSH observées sont très élevées dans les 3
premiers jours de vie, liées au stress de la délivrance, puis retournent rapidement
vers les normales de l'adulte dès le 4• jour de vie.
2. Dosage des fractions libres de T3 (FT3) et de T4 (FT4)
Les principales difficultés sont :
■ la concentration très faible des analytes à mesurer, d'environ quelques pmoles par litre;
■ la méthode de référence par dialyse à l'équilibre est inapplicable en biologie de routine;
■ il existe des méthodes utilisant la chromatographie liquide couplée à la spéctrométrie
de masse qui sont très spécifiques et très sensibles mais d'utilisation difficile vu le
grand nombre d'échantillons à traiter;
■ la faible masse moléculaire de ces hormones impose l'utilisation d'immunodosages
compétitifs n'utilisant qu'un seul anticorps monoclonal, ce qui expose au risque de
réactions croisées;
■ toute altération quantitative ou fonctionnelle des protéines de transport (protéine
mutée ou influence d'un médicament sur la liaison hormone-protéine) est susceptible
d'entraîner des erreurs de dosage des fractions libres;
■ beaucoup de systèmes analytiques actuellement commercialisés utilisent des réactifs
marqués à la biotine. La présence defortes concentrations de biotine d'origine exogène
dans les échantillons biologiques de patients (traitement de la sclérose en plaques, de
maladies métaboliques, ou présents dans les compléments alimentaires) risque d'en
traîner des résultats erronés, par exemple un profil biologique d'hyperthyroidie avec
TSH effondrée, FT3 et FT4 augmentés chez des patients cliniquement euthyroidiens;
■ une interférence par des anticorps hétérophiles (anticorps humains dirigés contre des
immunoglobulines animales) ou des auto-anticorps (Facteur Rhumatoïde) est possible;
■ compte tenu de ces difficultés, il faut privilégier l'utilisation des dosages en deux
étapes consistant en une extraction de lafraction libre de l'hormone par des anticorps
immobilisés sur une phase solide puis, en une mesure secondaire des sites anticorps
restés libres avec un analogue marqué de l'hormone. Le signal mesuré est inversement
proportionnel à la concentration en fraction libre;
■ par ailleurs, il est recommandé pour la FT3 et la FT� d'utiliser les valeurs de
références proposées par le laboratoire pour la méthode qu'il utilise. Ces valeurs,
198 Diagnostic d'une hyperthyroïdie
généralement établies chez l'adulte, doivent être adaptées lorsque l'on fait face
à deux situations particulières : la femme enceinte et l'enfant. Chez la femme
enceinte, on observe, du fait d'une élévation progressive de la concentration
de la TBG et d'une demande fœtale croissante; à une diminution importante
d'environ 15 % des valeurs médianes de FT3 et de FT4 à partir du 2nd trimestre
de la grossesse, et jusqu'à son terme. Chez l'enfant, les valeurs de FT3 sont plus
élevées à l'âge de 7 ans qu'à l'âge adulte, avec environ 25 % des enfants ayant une
FT3 au-dessus de la limite. On observe une chute progressive de la FT3 entre
7 ans et 15 ans, mais 10 % des adolescents conservent une FT3 supérieure à la
limite haute de l'adulte.
de Basedow, les TRAKs sont du type stimulant, c'est-à-dire qu'ils miment l'action de la
TSH. On parle de TSI pour Thyroid stimulating immunoglobulin ou de TSA pour Thyroid
stimulating antibody. Le caractère stimulant ne peut toutefois être démontré in vitro qu'en
utilisant des techniques spécialisés basées sur la mesure de l'AMPc produit. La recherche
des TRAKs est utile à la phase diagnostique mais aussi pour prédire le risque de récidive
en fin de traitement, et le risque de dysthyroïdie fœtale chez une femme enceinte atteinte
d'une maladie de Basedow. En effet les TRAKs peuvent passer la barrière placentaire.
À l'inverse, l'absence d'anticorps anti-récepteurs de la TSH conduit à éliminer une maladie
de Basedow et à rechercher les autres étiologies d'hyperthyroïdie (nodule toxique, goitre
multinodulaire secondaire toxique, hyperthyroïdie postthyroïdite ou cause iatrogène, à
partir des données cliniques et d'imagerie (scintigraphie, échographie).
1. INTRODUCTION
L'hypophyse est une glande endocrine intracrânienne située dans la selle turcique de l'os sphénoïde.
Son organisation anatomique, histologique et fonctionnelle distingue deux parties : le lobe antérieur
ou adéno-hypophyse et le lobe postérieur ou post-hypophyse.
Glande
ntommaire
f�
• V1tr11li:pride ++
Antidépreueun
• Tricydiques +
• lr>hiliite111s •électif� da r11<11p we de la s<irot4>nine + I•
• lr>hibiievn N1<11ptvNI sèrohlni.ne et r>oralfùnalir>e + I•
13. Anti-nau,Nux Cin!ülllilial'I dopominu9q1a)
• ll<tr>zamidtt, mé adopramid'a 10.m114ri119M.,.,implfo,."'1 + +
l
• D · rivés dtt• phénalhiazir>u +++
4. Ant,hypert■nHUH
• Vénipamil (h,aptino", 1art11� ++
• M<ithyld!apa +
signal
(fraction liée)
1o'
5.103
Ac liant Acmarqu&
Signal
(fraction Uée)
10 102 10' 10• 10' 106 [Ag]
C)JI
(Ag]
CJ
A] B]
n'est exigé pour interpréter le test et c'est donc le nadir de GH, quel que soit le moment au
cours du test, qui est pris en compte.
Il est important de savoir que le dosage d'IGF-1 est d'interprétation difficile dans certaines
situations.
► enfin, si en dépit des tests précédents il persiste un doute entre une sécrétion
hypophysaire ou ectopique d'ACTH, la réalisation d'un cathétérisme des sinus
pétreux inférieurs avec dosage d'ACTH, sensibilisé par le CRH et comparé à
un dosage veineux périphérique, peut être préconisé (recherche d'un gradient
centro-périphérique).
FICHE FLASH
O Tout diagnostic d'un adénome hypophysaire doit s'accompagner d'un hypophysiogramme statique à
8 heures comprenant: ACTH/cortisol, TSH/FT3 et FT4, GH et IGF-1, LH/FSH et testostérone (homme)
ou 17�-œstradiol (femme sauf si ménopause) et enfin prolactine.
O Une hyperprolactinémie doit faire rechercher en priorité une grossesse et/ou une cause médicamenteuse.
O Outre l'IGF-1, l'hyperglycémie par voie orale à 75 grammes de glucose est souvent utile dans le diagnostic
d'une acromégalie ainsi que pour le suivi sous traitement.
O Le diagnostic d'une maladie de Cushing cherche à démontrer successivement, l'existence d'un état
d'hypercortisolisme, son caractère ACTH-dépendant et enfin son origine hypophysaire. Toute exploration
incomplète pourra se solder par un traitement inadéquat de la situation clinique du patient.
ITEM 243
1. INTRODUCTION
L'insuffisance surrénale chronique est une pathologie relativement rare (1/10 000 pour l'IS primaire, 1/5 000
pour l'IS secondaire hors corticothérapie). Néanmoins, le risque d'une décompensation avec la survenue
d'une insuffisance surrénale aiguë est permanent, avec des conséquences létales en l'absence d'une prise
en charge rapide et adaptée.
Le suivi d'une insuffisance surrénale chronique et l'adaptation du traitement permettent de prévenir la
décompensation, et d'assurer une substitution adéquate en évitant les effets secondaires, afin de conserver
la qualité de vie des patients.
Le dosage du cortisol est perturbé par la prise de certains médicaments ou par certaines
situations pathologiques. Les hépatopathies sévères, le syndrome néphrotique, l'inflammation,
diminuent les protéines porteuses du cortisol dans le sang, et donc la cortisolémie liée et
totale. Au contraire, certaines prises de médicaments inducteurs enzymatiques comme
les œstrogènes augmentent la concentration de protéines porteuses, et par conséquent la
cortisolémie liée et totale. C'est aussi le cas de la grossesse où l'augmentation des œstrogènes
s'associe à une augmentation de la cortisolémie mesurée.
Méthodes de dosage du cortisol : Plusieurs méthodes de dosage sont utilisées pour la
mesure du cortisol total, basées sur une séparation chromatographique suivie d'une détection
par spectrométrie de masse ou les immunodosages. La spectrométrie de masse est utilisée
comme référence pour la calibration et la validation du dosage du cortisol. Néanmoins, pour
l'instant, cette méthode n'est pas accessible dans la majorité des laboratoires en France.
Les techniques les plus répandues sont les immunodosages, carfacilement automatisables.
Leur principe utilise une compétition entre du cortisol marqué (avec une molécule
luminescente) et le cortisol de lëchantillon du patient, pour un anticorps (polyclonal ou
monoclonal) dirigé contre le cortisol. L'utilisation récente des anticorps monoclonaux,
permet de réduire significativement les interférences (avec des composés d'une structure
proche), tout en donnant des résultats équivalents à ceux de la méthode de référence et plus
faibles que ceux utilisant un immunodosage avec des anticorps polyclonaux. Cependant,
la plupart des seuils de cortisolémie, notamment le seuil élevé, ont été établis en utilisant
l'immunodosage à anticorps polyclonaux, donc ils sont en cours dëvoluer, à la baisse, avec
le passage progressifaux immunodosages à anticorps monoclonaux et/ou spectrométrie de
masse, sans qu'un seuil consensuel nouveau soit établi pour l'instant.
L'ACTH : Une valeur d'ACTH élevée (> 100 pg/ml soit deux fois la normale) associé
à un cortisol bas conforte le diagnostic d'IR primaire. Par ailleurs, un taux d'ACTH
normal et donc inadapté au taux abaissé de cortisol suggère une IR secondaire.
Le dosage du cortisol libre urinaire n'a pas d'intérêt pour le diagnostic d'insuffisance
surrénale primaire du fait du chevauchement important entre les valeurs des sujets normaux
et celles des insuffisants surrénaliens.
Aldostérone et rénine activé. Dans l'IS primaire une aldostérone basse est associée à une
rénine élevée (position couchée et orthostatisme). Dans l'IS secondaire (corticotrope), la
rénine et l'aldostérone sont normales ou légèrement abaissés. Néanmoins, la sensibilité
et la spécificité de ces dosages pour le diagnostic d'IS est faible, aucun seuil n'est établi au
niveau international et leur rôle est accessoire dans le diagnostic de l'IS primaire.
Le sulfate de DHEA (DHEA-S). Chez l'adulte, les concentrations plasmatiques de
DHEA et DHEA-S sont abaissées au cours de l'insuffisance surrénale primaire et
corticotrope, rapportés aux seuils de normalité de l'âge et du sexe. Notamment, un
taux normal de DHEA-S a une forte valeur prédictive négative pour exclure une
insuffisance corticotrope.
Le test au Synacthène•. Le Synacthène est un analogue de l'ACTH qui active les récepteurs
MC2 corticosurrénaliens. Le test consiste en l'injection de 0,25 mg de Synacthène, suivi
du dosage du cortisol à 30 minutes et/ou 1 heure.
Le test au Synacthène est très utile dans le diagnostic d'IS primaire car il permet de mettre
en évidence une réponse insuffisante de la glande corticosurrénale, qui est déjà stimulée
par l'ACTH endogène. Dans l'insuffisance corticotrope, ce test n'explore la sécrétion d'ACTH
que de façon indirecte. En effet, il explore l'atrophie corticosurrénale secondaire au déficit
en ACTH: si le déficit en ACTH est suffisamment sévère et ancien, il provoque une atrophie
surrénale secondaire, et la stimulation par le Synacthène ne donnera pas une réponse
normale. Si par contre le déficit en ACTH est récent ou modéré, l'atrophie corticosurrénale
est incomplète, et la stimulation par le Synacthène peut montrer une réponse normale alors
que le patient est en réalité déficitaire.
Si le test au Synacthène montre une stimulation insuffisante du cortisol, avec un taux
mesuré 30 ou 60 min après l'injection en dessous de 500 nmol/l (18 µgldL), le diagnostic
216 Diagnostic d'une insuffisance surrénale aiguë et d'une insuffisance surrénale chronique
d 'insuffisance surrénale peut être retenu et il n'est pas nécessaire de réaliser d'autres tests.
Lorsque les valeurs du test sont supérieures à ce seuil et la suspicion clinique persiste,
d'autres tests spécialisés sont nécessaires (test à la Métopirone ou hypoglycémie insu/inique
en milieu hospitalier).
B. Cas particuliers
Chez le nouveau-né et le nourrisson, il est difficile d'interpréter le dosage du cortisol
plasmatique. Il n'existe pas de rythme circadien de sécrétion du cortisol jusqu'à 4 mois de vie.
Une immaturité fonctionnelle de l'axe corticotrope est supposée devant des valeurs
basales basses du cortisol et de l'ACTH, associé même à un test au Synacthène normal.
Dans le doute, une supplémentation par l'hydrocortisone sera proposée même en
absence de données biologiques (voir IS aiguë).
Dans les situations cliniques qui élèvent le taux de cortisol sanguin : prise d'œstrogènes,
grossesse, et toute pathologie aiguë intercurrente, le diagnostic d'IS doit s'appuyer
sur des valeurs-seuils de cortisol plus élevées et/ou sur un faisceau de présomptions
(clinique, taux d'ACTH et de rénine). Comme le dosage d'ACTH apporte les mêmes
renseignements au cours ou en dehors de la grossesse, c'est donc l'examen à privilégier
en cas de suspicion d'insuffisance surrénale primaire, surtout si la cortisolémie est
apparemment normale.
L'insuffisance surrénale aiguë est une affection grave dont la fréquence est estimée entre
6 et 8 épisodes/100 patients/an. Les infections en particulier gastro-intestinales sont les
facteurs déclenchants les plus fréquemment rapportés chez l'adulte et chez l'enfant suivies
par les infections bactériennes ou virales (pneumopathies, infections des voies urinaires,
septicémie, syndrome grippal). Elle complique aussi bien l'insuffisance surrénale primaire
que l'insuffisance corticotrope. C'est une affection grave qui met en jeu le pronostic
vital : elle est la cause du décès dans 6 à 15 % des cas chez les patients avec insuffisance
surrénale.
Le diagnostic est clinique, supporté par les examens biologiques standards lorsque
l'insuffisance surrénale est connue. Le diagnostic peut être difficile si le déficit est partiel
ou en cas d'insuffisance surrénale aiguë inaugurale.
Les signes cliniques les plus fréquemment observés sont : une asthénie, souvent majeure,
somnolence, ou au contraire, confusion, agitation pouvant évoluer vers des troubles de la
conscience voire un coma; anorexie, nausées, vomissements, diarrhée, douleurs abdominales
diffuses pseudo-chirurgicales; hypotension artérielle, hypotension orthostatique,
tachycardie, déshydratation globale; pâleur, sueurs; hyperthermie; crampes; insuffisance
circulatoire aiguë secondaire à l'hypovolémie et à une vasoplégie.
B. Cortisol et ACTH
Un prélèvement pour dosage du cortisol et de l'ACTH doit alors être réalisé
immédiatement en cas de suspicion d'IS, mais le traitement doit être initié sans
attendre les résultats.
Si le cortisol plasmatique est inférieur à 138 nmol/1 (50 ng/ml,) le diagnostic d'IS est
confirmé. Le dosage d'ACTH permet alors de déterminer s'il s'agit d'une insuffisance
surrénale primaire (augmenté) ou d'une insuffisance corticotrope (ACTH normal
ou diminué). Si le cortisol plasmatique est compris entre 138 nmol/1 et 500 nmol/1
(50 ng/ml, et 180 ng/ml), le traitement par hydrocortisone est poursuivi et le test au
Synacthène• sera réalisé à distance de l'épisode aigu.
L'évolution favorable après l'administration parentérale d'hémisuccinate d'hydrocortisone
est le meilleur critère diagnostique.
jusqu'aux doses habituelles. Chez les patients adultes avec IS primaire, le traitement par
fludrocortisone est repris lorsque les doses d'hydrocortisone sont inférieures à 50 mg/jour.
FICHE FLASH
O Les signes de 1'15 sont déterminés par un déficit en hormones surrénaliennes: glucocorticoïdes (cortisol)
± minéralocorticoïdes (aldostérone).
0 Deux catégories d'l5 : primaire (atteinte bilatérale des surrénales) et secondaire (hypophysaire, déficit
corticotrope).
□ La gravité de 1'15 chronique est dictée par le risque de décompensation en 15 aiguë (urgence vitale).
:J Les signes biologiques généraux les plus fréquentes sont: l'hyponatrémie, l'hyperkaliémie et l'hypoglycémie
(l'hyperkaliémie est absente dans 1'15 secondaire, l'hypoglycémie plus fréquente chez l'enfant).
Cl Le diagnostic biologique repose sur une cortisolémie matinale basse (8 heures).
ü Le diagnostic est associé à une ACTH haute (15 primaire) ou basse (15 secondaire); Les valeurs d'ACTH
explique aussi la mélanodermie (15 primaire) ou la pâleur cutanée (15 secondaire).
:i Le test au Synacthène est nécessaire en cas de doute (valeurs intermédiaires, assez fréquent), montrant
une réponse insuffisante de sécrétion du cortisol. Il peut être normal dans 1'15 corticotrope récente.
O En cas de suspicion clinique d'l5, le traitement doit être initié sans attendre le bilan les résultats des
dosages hormonaux (en raison du risque de décompensation).
0 Les causes le plus fréquentes d'l5 primaire chez l'adulte sont: auto-immune (anticorps anti-21 hydroxylase),
la tuberculose et l'adrénoleucodystrophie (sexe masculin) Chez l'enfant s'y rajoute l'hyperplasie congénitale
des surrénales (déficit en 21-hydroxylase, nourrisson).
0 La plupart des formes classiques de déficit en 21-hydroxylase sont diagnostiquées lors du dépistage
systématique à J3, par le dosage de la 170H-progestérone sur papier buvard.
Cl Les causes le plus fréquentes,d'l5 secondaire (corticotrope) sont: post-corticothérapie prolongée,
adénomes hypophysaire et hypophysite (notamment iatrogène).
a Le traitement de l'IS chronique est essentiellement substitutifassociant l'hydrocortisone (glucocorticoïde)
et la fludrocortisone (minéralocorticoïde) Dans 1'15 secondaire (corticotrope), la fludrocortisone n'est
pas nécessaire.
:l Il s'associe le traitement de la cause si elle est connue.
Cl Le dosage du cortisol et de l'ACTH est inutile pour adapter les doses d'hydrocortisone. La cortisolémie
présent un intérêt (base et/ou après 5ynacthène) uniquement dans les 15 réversibles (post corticothérapie,
hypophysite iatrogène).
::.l L'insuffisance surrénale aiguë est dans la majorité des cas liée à un défaut d'éducation d'un patient avec
une 15 chronique (sauf crise inaugurale).
0 L'IS aiguë est une urgence, potentiellement mortelle, nécessitant un démarrage du traitement de
la suspicion diagnostique. Le diagnostic est clinique et soutenu par les signes biologiques généraux:
hyponatrémie, hyperkaliémie, hypoglycémie, hémoconcentration.
W Le traitement d'urgence de l'IS aiguë est l'hydrocortisone en IV (100 mg tous les 6-8 heures), ainsi que
la correction des troubles hydroélectrolytiques et hémodynamiques.
Chapitre 5. Biologie endocrine - QRM
QRM
► 1. Devant une suspicion d'insuffisance surrénale primaire, quelle(s) est (sont) le(s) para
mètre(s) biologiques qui affirment le diagnostic :
A Une hyponatrémie
B. Une hypokaliémie
C. Une hypoglycémie
D. Une cortisolémie basse
E. Une rénine basse
Réponses : A, C, D
1. INTRODUCTION
Au niveau du compartiment sanguin, le calcium se répartit sous trois entités différentes:
environ 50 % du calcium est sous forme ionisée: Ca2•;
Ill! environ 10 % du calcium est sous forme complexée: phosphate, citrate, sulfate;
environ 40 % est liée à la sérum albumine.
La calcémie totale mesurée en routine biologique est la somme de ces trois entités.
Le calcium ionisé Ca2 • est la forme biologiquement active capable de se lier au récepteur sensible au
calcium ou CaSR. L'acidose libère le calcium de sa liaison à la sérum albumine et accroît le calcium
ionisé. À l'inverse, l'alcalose diminue la concentration de calcium ionisé. L'hyperprotidémie majore
la calcémie totale en favorisant la redistribution du calcium des liquides extra-cellulaires vers le
compartiment sanguin.
La calcémie totale est sous la dépendance de trois flux calciques qui sont contrôlés par deux hormones
essentielles, la parathormone ou PTH produite par les glandes parathyroïdes et le calcitriol ou 1,25(0H)
vitamine D3 élaborée à partir du 7-déhydrocholestérol. Les trois flux sont:
le flux digestif: apport en calcium dont l'absorption intestinale est contrôlée positivement par le
calcitriol;
Il le flux osseux bidirectionnel: la résorption osseuse ostéoclastique majorée par la PTH augmente la
calcémie alors que l'ostéoformation ostéoblastique la diminue;
■ le flux rénal sortant: la capacité de réabsorption tubulaire de calcium détermine le niveau de la
calciurie. La PTH réduit la calciurie et accroît la phosphaturie pour éviter l'accumulation de phosphate
tricalcique insoluble. Le calcitriol réduit la calciurie.
224 Hypercalcémie : diagnostic et examens complémentaires
Le calcium ionisé (forme biologiquement active) est reconnu par le récepteur sensible
au calcium ou CaSR qui est d'expression large (parathyroïdes, thyroïde, SNC, rein).
Au niveau des cellules parathyroïdiennes, la stimulation du CaSR par les ions Ca 2+
conduit à une réduction de la biosynthèse et de la sécrétion de PTH. Inversement la
chute du calcium ionisé plasmatique induit une libération de PTH. Il y a donc une
relation inverse entre la calcémie (calcium ionisé) et la concentration plasmatique de
PTH, comme illustré ci-dessous.
PTHI (pg/ml)
80
40
20
0
1.0 1.1 1.15 1.2 1.25 1.3 1.35 1.4 1.45
Ca 2+ (mmol/1)
A. Méthodes de dosage
En pratique clinique, le dosage du calcium total (dans le sang et les urines) peut être réalisé
par 3 types de méthodes.
1. Les méthodes colorimétriques
Elles utilisent différents réactifs (orthocrésolphtaléine, Bleu de méthyl thymol,
Arsenazo III) qui complexent le calcium en formant un dérivé dont la coloration est
proportionnelle à la concentration en calcium de l'échantillon à doser.
2. Les méthodes potentiométriques
Après acidification destinée à libérer le calcium de sa liaison aux protéines et de ses
complexes, le calcium total peut être mesuré en utilisant une électrode sélective.
Ces deux types de méthodes se prêtent bien à une adaptation sur les appareils automatiques
multiparamétriques de biochimie et sont utilisés en routine dans la plupart des laboratoires
de biologie clinique.
3. Les méthodes physiques
Les appareils utilisant les méthodes physiques (spectrophotométrie d'absorption
atomique, photométrie à émission de flamme) donnent de bons résultats mais sont
plus onéreux et plus rares d'utilisation en pratique courante.
Calcium en Calcium en
Diviser par 0.025
Millimoles/L Milligrammes/L
Ou
On parle donc d'hypercalcémie lorsque la calcémie totale (après correction éventuelle) est
supérieure à 2,6 mmol/1 soit 105 mg/1.
ITEM 95
DIAGNOSTIC
D'UNE POLYRADICULONEVRITE
AIGUE INFLAMMATOIRE
Franck STURTZ
1. INTRODUCTION
La polyradiculonévrite aiguë inflammatoire classique (PRNA) a été décrite en 1916 par Guillain, Barré et
Strohl et souvent appelée Syndrome de Guillain-Barré (GBS). Elle peut mettre en jeu le pronostic vital du
patient et doit donc être diagnostiquée le plus rapidement possible car des traitements de ses complications
existent (insuffisance respiratoire, tétraplégie flasque) et limitent d'éventuelles séquelles à long terme. Le
signe biologique majeur, la dissociation alhumino-cytologique, reste un élément très important de
la phase diagnostique initiale et permet d'éliminer d'autres diagnostics.
+ Amarenco P., Sauron B., Schuller E., Chain F., Castaigne P. Serum and CSF humoral
immunity in Guillain-Barré syndrome: clinical correlations. J. Neural. Sei. 1987 Sep;
80(2-3):129-42.
+ van den Berg B, Walgaard C, Drenthen J, F okke C, Jacobs BC, van Doorn PA. Guillain
Barré syndrome: pathogenesis, diagnosis, treatment and prognosis. Nat Rev Neural.
2014 Aug; 10(8):469-82. doi: 10.1038/nrneurol.2014.121.
QCM
► 2. Une patiente de 42 ans, consulte son médecin traitant car elle est très fatiguée et a du
mal à se mettre debout depuis plus d'une semaine. Cela survient 2 semaines après la
fin d'une forte rhinopharyngite. À l'examen clinique, on relève une baisse de la force
musculaire des releveurs et des extenseurs des pieds à 3/5 aux deux membres infé
rieurs. À l'ENMG, on relève des signes de démyélinisation avec baisse des vitesses
de conduction nerveuse. Une ponction lombaire est réalisée et montre les résultats
suivants:
► 3. Un patient de 24 ans, consulte son médecin traitant car il est très fatigué, a du mal à
se mettre debout depuis plus de 2 semaines. Il se plaint de paresthésies (brûlures,
décharges électriques) dans les pieds et les mains. Une ponction lombaire est réalisée
et montre les résultats suivants:
1. INTRODUCTION
La maladie d'Alzheimer (MA) est la pathologie neurodégénérative la plus fréquente et représente à elle seule
60 à 80 % des démences. La prévalence de la maladie est en constante progression avec le vieillissement
de la population lié à l'augmentation de l'espérance de vie. La MA touche plus de 900 000 personnes en
France (plus de 35 millions dans le monde) et plus de 200 000 nouveaux cas sont recensés chaque année
en France. Le diagnostic de la MA, préalable indispensable à la prise en charge des patients, constitue un
enjeu sociétal et économique important. Il n'existe pas actuellement de traitement curatif de la maladie
mais de nombreux essais thérapeutiques sont en cours. Ces derniers se focalisent sur les formes précoces
de la maladie et des traitements préventifs chez les personnes à risques sont même envisagés. C'est l'une
des raisons pour lesquelles le diagnostic biologique précoce est particulièrement important.
Protéine
APP Plaque ..
amyloïde
....--
I
a-sécrétase 13-sécrétase v-sécrétase Peptide
(P_s1_/_Ps_2, Al31-42
__ _
du comportement, la perte d'autonomie devient totale et le décès survient souvent par une
complication générale due à l'état grabataire.
En présence d'un trouble cognitif exploré initialement par un bilan neuropsychologique, il
faut dans un premier temps exclure les causes«curables» de démences. Au bilan biologique
standard devra être ajouté un dosage de thyréostimuline (TSH), de la vitamine Bl2, des
folates, et une sérologie syphilitique et VIH en fonction du contexte. Une IRM cérébrale est
indispensable pour écarter des causes non dégénératives (tumeurs cérébrales, hydrocéphalie
à pression«normale», hématome sous-durai chronique) et rechercher une atrophie cérébrale.
Le diagnostic de la MA repose ainsi sur des données multidisciplinaires (anamnestiques,
cliniques, d'imagerie et neuropsychologiques), mais aussi sur le dosage dans le liquide
céphalo-rachidien (LCR) de marqueurs biochimiques, en particulier chez les patients
jeunes et dans les formes atypiques. Il s'agit d'un diagnostic positif probabiliste, le
diagnostic de certitude étant apporté par l'examen neuropathologique, impossible
à réaliser du vivant du patient. Ce diagnostic fait souvent appel à des consultations
«mémoire» organisées par les 22 Centres de Mémoire de Référence et de Recherche
(CMRR) couvrant l'ensemble du territoire français.
+ McKhann GM, Knopman OS, Chertkow H, Hyman BT, Jack CR, Jr., Kawas CH, Klunk
WE, Koroshetz WJ, Man/y JJ, Mayeux R, et al: The diagnosis of dementia due to
Alzheimer's disease: recommendations from the National lnstitute on Aging
Alzheimer's Association workgroups on diagnostic guidelines for Alzheimer's
disease. Alzheimers Dement 2011, 7: 26 3-26 9.
+ Gabelle A, Touchon J, Lehmann S: Les biomarqueurs du LCR et du plasma:
utilisation diagnostique et pronostique dans la maladie d'Alzheimer et les
syndromes apparentés. Pratique Neurologique - FMC 2013, 4: 65-72.
+ Perret-Liaudet A, Pelpel M, Tholance Y, Dumont B, Vanderstichele H, Zorzi W, E/Moualij
B, Schraen S, Moreaud 0, Gabelle A, et al: Cerebrospinal fluid collection tubes: a
critical issue for Alzheimer disease diagnosis. Clin Chem 2012, 58: 787-789.
+ Lehmann S, Schraen S, Paquet C, Bambois S, Delaby C, Dorey A, Dumurgier J, Hirtz C,
Laplanche JL, Peoc'h K, et al: A diagnostic scale for Alzheimer's disease based on
cerebrospinal fluid biomarker profiles. Alzheimer's Research & Therapy 2014, 6:38.
Chapitre 6. Biologie neurologique - QCM
QCM
► 1. Une PL réalisée chez un patient de 70 ans anxieux qui présente des troubles mnésiques
modérés et une IRM cérébrale sans particularité. La PL retrouve les éléments suivants
► 2. Une PL réalisée chez un patient de 54 ans qui présente des troubles mnésiques d'appa
rition récente et une IRM cérébrale sans particularité. La PL retrouve les éléments
suivants:
► 3. Concernant l'examen du LCR réalisé dans le cadre du diagnostic d'une MA, indiquer
les réponses exactes, parmi les items suivants :
A. Il est réalisé avant toute imagerie ou examen neuropsychologique.
B. Il fait partie des recommandations internationales pour le diagnostic positif de la MA
C. Il permet, dans certains cas, de déduire la probabilité d'une MA< 10 %
D. Il permet dans certains cas de déduire la probabilité d'une MA> 90 %
E. Il permet de faire également le diagnostic positif de démence fronto-temporale
Réponses : B, C, D
CHAPITRE 7. BIOLOGIE RÉNALE
ITEM 255
ÉLÉVATION DE LA CRÉATININÉMIE
Nicolas PALLET
1. INTRODUCTION
L'élaboration de l'urine par les reins permet l'élimination de molécules issues des activités métaboliques
et cataboliques cellulaires de l'organisme. Le néphron est l'unité fonctionnelle du rein, et chaque rein en
contient environ 400 à 800 000.
La première étape de l' élaboration de l'urine est la formation de l'ultra-filtrat glomérulaire (urine primitive)
par le transfert d'eau et des constituants du plasma (électrolytes et petites molécules) à travers la barrière
de filtration glomérulaire. Cette barrière est formée d'un endothélium fenêtré reposant sur une membrane
basale glomérulaire, et limitée sur le versant urinaire par les prolongements cytoplasmiques (pédicelles)
des podocytes. Elle sépare le milieu sanguin (capillaire glomérulaire) du milieu urinaire (chambre urinaire).
L'urine primitive est produite par un phénomène de convection du plasma (c'est-à-dire transfert d'eau et
d'électrolytes en fonction d'un gradient de pression à travers la barrière de filtration glomérulaire) et un
phénomène de diffusion (transfert de molécules de taille intermédiaire selon un gradient de concentration).
La filtration des substances dissoutes dépend de leur taille et de leur charge (une molécule filtrable est de
petite taille et d'une charge positive), et d'un gradient de pression. Le passage des protéines dans l'urine est
négligeable au-delà d'une masse moléculaire correspondant à l'albumine (66000 Daltons), et les éléments
figurés du sang ne sont pas filtrés.
Le débit sanguin rénal représente 20 à 25 % du débit cardiaque, et le pourcentage du débit sanguin qui
est filtré est de l'ordre de 20 %. Ainsi, le Débit de Filtration Glomérulaire (DFG) est d'environ 180 l/j
soit 120 ml/min. Le meilleur indicateur de la fonction rénale est le taux de filtration du plasma au
travers des glomérules : c'est le débit de filtration glomérulaire (DFG). Ce dernier est conditionné par
le nombre de néphrons fonctionnels dans les reins.
La clairance de la créatinine, ou d'une autre molécule servant de traceur, est utilisée pour apprécier le DFG
car on ne peut pas le mesurer directement. La quantité de traceur (par exemple la créatinine) éliminé dans
244 Élévation de la créatininémie
les urines par 24 heures est identique (enfaisant abstraction de la sécrétion tubulaire de la
créatinine) à la quantité de traceurfiltré au travers de la barrière defiltration glomérulaire
par 24 heures. Ainsi, le volume de plasmafiltré pendant 24 heures (C) avec une concentration
donnée de traceur (P) sera identique au volume d'urine produit pendant 24 heures (V) avec
une concentration donnée de traceur (U). Ce volume de plasmafiltré pendant 24 heures (C)
est appelé « Clairance du traceur» : c'est un débit qui s'apparente auDFG.
Elle corrèle bien avec la clairance de la créatinine mesurée, et reste très utilisée sans
indexation sur la surface corporelle dans les recommandations d'adaptation de la posologie
des médicaments. Pour classer les patents selon le stade de DFG, elle devait être indexée
à 1,73 m2 de surface corporelle. Cependant, elle ne doit plus être utilisée pour l'estimation
de la fonction rénale car ses performances sont mauvaises chez le sujet âgé et obèse (l'âge
et le poids ne sont pas bien corrélés à la masse musculaire). De plus, elle a été développée
avec une méthode de dosage de la créatinine qui n'est plus utilisée.
3. Estimation du débit de filtration glomérulaire
Des formules ont été développées à partir de la fin des années 1990 estimant directement
le DFG, et non pas la clairance de la créatinine. Elles ont été établies en modélisant, à partir
d'une population d'individus présentant une IRC stade 3-4, la valeur du DFG obtenue par
une technique de référence, en utilisant l'âge, le sexe, la créatininémie et l'ethnie comme
variable explicatives. Le poids n'intervient plus. Ces formules rendent des DFG indexés à
la surface corporelle (soit pour 1,73 m2) :
laformule MDRD (du nom de l'essai clinique Modification of Diet in Renal Disease,
publiée en 1999, et simplifiée en 2006):
► MDRD (DFG estimé en ml/min/1,73 m2) = 175 x [Créatininémie (µmolll) x 0,885]-
1,154 x Âge-0,203 x (0,742 sifemme) x 1,21 si afro-américain;
Ces formules ne doivent pas être apprises par cœur: des calculateurs sont disponibles, par
exemple sur le site de la sociétéfrancophone de Néphrologie.
La formule CKP-EPI est recommandée par la Haute Autorité de Santé depuis 2012,
elle nécessite un dosage de la créatinine par méthode enzymatique. La formule MDRD
a été développée avec la méthode de Jaffé puis adaptée au dosage enzymatique de la
créatinine.
Globalement, leurs performances sont assez similaires à partir du stade 3 de l'IRC (à partir
d'un DFG < 60 ml/min/1,73 m2) mais la formule CKP-EPI est plus précise aux valeurs de
DFG supérieurs à 60 ml/min/1,73 m2 • MDRD a tendance à classer les patients au stade 3
d'IRC (DFG < 60 ml/min/1,73 m2), alors que ce n'est pas le cas.
Ces formules ne sont pas applicables dans les cas suivants
enfant (utiliser la formule de Schwartz, spécifique de l'enfant);
■ insuffisance rénale aiguë;
■ cirrhose hépatique décompensée;
■ grossesse;
dénutrition majeure, amyotrophie importante.
L'utilisation de formule MDRD reste recommandée pour l'évaluation du DFG d'un patient
transplanté rénal.
246 Élévation de la créatininémie
Les formules d'estimation du DFG ne s'appliquent pas dans les cas d'IRA.
Une anurie est l'absence de diurèse avec vessie vide (absence de filtration glomérulaire), à
ne pas confondre avec une rétention aiguë d'urine (obstacle urologique compliqué d'IRA).
Le DFG est effectif si la pression d'ultrafiltration glomérulaire est positive, c'est-à-dire
si la pression hydrostatique intra-capillaire est supérieure à la pression hydrostatique
dans la chambre urinaire. Une baisse aiguë du DFG se produira lorsque :
248 Élévation de la créatininémie
Na U < 20 mmol/1;
fraction d'excrétion du Na < 1 %;
- \ Na/KU < 1 (hyperaldostéronisme secondaire);
Chapitre 7. Biologie rénale - ITEM 255 249
• noter que le dosage de l'urée urinaire n'est plus remboursé par la Sécurité
Sociale;
► si !'IRA fonctionnelle est trop sévère et/ou prolongée, elle peut aboutir à une
nécrose tubulaire aiguë ischémique (IRA organique);
Ill rechercher enfin une cause organique (atteinte parenchymateuse) pouvant motiver
la réalisation d'une biopsie rénale
Atteinte artériolaire
(Hypertension artérielle, Protéinurie faible ou absente
médicaments ...)
Protéinurie faible
Atteinte artérielle (Athérome,
Alcalose hypokaliémique
fibrodysplasies...)
Reins de taille asymétrique(petit rein du côté de la sténose artérielle)
251
FICHE FLASH
□ Le meilleur indicateur de la fonction rénale est le débit de filtration glomérulaire (DFG).
0 Le nombre de néphrons dans chaque rein conditionne le DFG.
U La créatininémie est un marqueur peu sensible et peu spécifique de la fonction rénale et ne doit pas être
utilisée pour évaluer la fonction rénale.
U Une élévation de la créatinémie ne signe pas nécessairement une insuffisance rénale.
U Une insuffisance rénale peut s'accompagner d'une créatininémie normale.
0 La créatininémie est un paramètre servant à estimer le DFG dans les formules MDRD et CKD-EPI.
□ La formule de Cockcroft et Gault ne doit pas être utilisée pour estimer la fonction rénale.
□ La formule CKP-EPI est recommandée par la Haute Autorité de Santé depuis 2012 pour estimer le DFG,
mais n'est pas applicable dans certaines situations médicales.
□ Les formules MDRD et CKD-EPI incluent l'âge, le sexe et l'origine ethnique, mais pas le poids.
□ Considérer que toute élévation de créatininémie est due à une insuffisance rénale aiguë (en raison de
l'urgence thérapeutique) jusqu'à preuve du contraire.
□ Devant une insuffisance rénale aiguë il faut rechercher une cause obstructive (post-rénale), fonctionnelle
(pré-rénale) puis organique (parenchymateuse) pouvant motiver une biopsie rénale.
□ Une insuffisance rénale chronique est évoquée devant une anémie normochrome normocytaire
arégénérative, une hypocalcémie, et des reins de petite taille.
□ Une élévation de la créatininémie doit s'accompagner d'un ionogramme sanguin (Na, K, Cl, bicarbonates)
et urinaire, d'une glycémie, d'une électrophorèse des protéines sériques, d'une protéinurie, d'un examen
cytobactériologique des urines et d'une échographie des reins et des voies urinaires.
252
1. INTRODUCTION
Pour une protidémie de 60 g/1, et un débit de filtration glomérulaire de 180 litres par jour, environlO Kg
de protéines transitent par les glomérules et les reins tous les jours. Or, la protéinurie physiologique est
inférieure à 0,2 g/1 (soit 0,3 g/24 heures, ou 0,3 g/g créatinine urinaire).
Cette protéinurie physiologique est constituée pour moitié environ de protéines produites et secrétées
par le tubule et l'urothélium : protéine de Tamm Horsfall (uromoduline), urokinase, lgA sécrétoire, et
pour moitié de protéines de faible masse moléculaire (béta-2 microglobuline, lyzozyme, chaînes légères
d'immunoglobulines). L'albumine est aussi présente mais toujours à une faible concentration < 15-
30 mg/24 heures.
Le faible débit de protéinurie physiologique, contrastant avec le débit de protéines sériques transitant
dans les glomérules est lié à l'imperméabilité de la barrière de filtration glomérulaire aux protéines d'une
moléculaire (>70 kDa). De plus, l'épithélium tubulaire proximal réabsorbe et dégrade la quasi-totalité des
protéines filtrées.
La barrière defiltration glomérulaire est constituée de trois éléments :
Un endothélium fenêtré sur le versant capillaire au travers duquel le plasma vient au contact de la
membrane basale glomérulaire.
■ La membrane basale glomérulaire est issue de l'assemblage de molécules sécrétées par les cellules
endothéliales et les podocytes formant un maillage serré. Elle est constituée de collagène de type IV,
de, laminine et de protéoglycanes.
254 Protéinurie et syndrome néphrotique de l'adulte et de l'enfant
■ Les podocytes reposent sur laface externe de la membrane basale glomérulaire par des
prolongements appelés pédicelles. L'une des protéines membranaires des podocytes,
la podocalyxine, est riche en acide sialique chargé négativement.
La barrière de filtration glomérulaire oppose deux obstacles à la filtration des molécules
plasmatiques d'une masse moléculaire élevée : la structure de la membrane basale
glomérulaire, et l'électronégativité de ses composants restreignent lafiltration des protéines
plasmatiques porteuses d'une charge électrique, comme l'albumine.
L'épithélium tubulaire proximal est en contact immédiat avec l'ultrafiltrat au pôle tubulaire
du glomérule et est doté de grandes capacités de réabsorption des solutés et d'endocytose
des protéines de faible masse moléculaire filtrées librement. Le pôle apical est doté d'une
bordure en brosse démultipliant la surface de contact avec l'ultrafiltrat. Des récepteurs
(mégaline, cubuline) y sont fortement exprimés, ainsi qu'un appareil d'endocytose et un
pool mitochondrial important, permettant de produire l'énergie nécessaire à ces activités
de réabsorption et d'endocytose.
Il existe des cas de protéinuries transitoires, sans lien avec une anomalie de la membrane
de filtration glomérulaire :
protéinurie orthostatique, en période pubertaire, et qui disparaît avant l'âge de 20 ans.
Elle est caractérisée par la disparition de la protéinurie en clinostatisme (urines
recueillies après 2 heures de repos en décubitus dorsal). La protéinurie orthostatique
n'est pas pathologique;
■ protéinurie d'effort, observée au décours d'un exercice physique intense et prolongé;
fièvre élevée;
■ infections urinaires;
Ill insuffisance ventriculaire droite, polyglobulie.
A. La bandelette urinaire
C'est la technique semi-quantitative de dépistage recommandée. Elle détecte l'albumine
à un seuil de 50 à 100 mg/l (c'est-à-dire une microalbuminurie, voir Tableau). Elle est
basée sur la mise en évidence d'albumine grâce au virage de couleur d'un indicateur
de pH.
Elle ne détecte pas les chaînes légères d'immunoglobulines, ni les autres protéines de
faible masse moléculaire. Des faux positifs s'observent avec l'utilisation d'antiseptiques,
de polyvinylpyrrolidone, ou lorsque les urines sont alcalines.
Résultat normal ou non significatif: absence, traces ou 1+(< 0,3 g/1),
Résultats anormaux : 2+ (1 g/1) ou 3+ (3 g/1).
Un résultat positif doit être confirmé par une mesure de la protéinurie.
2 grammes par jour. L'hématurie microscopique n'interfère pas avec la protéinurie. Une
pyurie peut également gêner l'interprétation de la protéinurie.
D. Microalbuminurie
Le terme de microalbuminurie désigne l'excrétion urinaire d'albumine en quantité très
faible, intermédiaire entre les valeurs physiologiques qui sont d'environ 30 mg/24 heures
et les protéinuries franches, supérieures à 300 mg/24 heures.
256 Protéinurie et syndrome néphrotique de l'adulte et de l'enfant
Le dosage spécifique de l'albumine fait appel à des techniques spécifiques et très sensibles
avec un seuil de détection de l'ordre de 5 à 10 mg/l, soit sous le seuil diagnostic de la
microalbuminurie qui est de 20 mg/l environ (30 mg/24 heures).
La microalbuminurie est principalement utilisée pour évaluer la néphropathie du
diabétique de type 1, liée à une augmentation de la perméabilité de la membrane
basale glomérulaire, et/ou une hypertension intraglomérulaire. Elle est d'abord labile
puis devient permanente, mais précède toujours les signes cliniques de la néphropathie.
Dans le cas du diabète du type 2, la microalbuminurie est un marqueur de mortalité
prématurée. Elle reflète une dysfonction endothéliale systémique. C'est l'accumulation de
plusieurs facteurs de risque pouvant chacun induire une microalbuminurie qui explique
son association au risque cardiovasculaire.
Dans la population générale, on retrouve une microalbuminurie chez 5 à 10 % des sujets.
Elle constitue un facteur prédictif de mortalité précoce en association avec les déterminants
du risque cardiovasculaire.
La microalbuminurie diminue souvent et disparaît parfois après mise en route d'un
traitement, notamment par les inhibiteurs de l'enzyme de conversion ou les antagonistes
des récepteurs de l'angiotensine 2. Une normalisation de l'albuminurie est un signe
d'efficacité thérapeutique.
A. Définition et mécanismes
Le syndrome néphrotique répond à une définition biologique qui associe :
■ une protéinurie supérieure à 3 g/24 heures chez l'adulte(> 50 mg/kg/j chez l'enfant);
■ et une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/1.
Le syndrome néphrotique est pur en l'absence :
■ d'hématurie microscopique ou;
■ d'hypertension artérielle ou;
■ d'insuffisance rénale organique.
En cas de positivité d'un de ces 3 paramètres, le syndrome néphrotique est impur.
La distinction «pur»/«impur» oriente vers certaines pathologies : la néphropathie à lésions
glomérulaires minimes, la glomérulonéphrite extra-membraneuse ou l'amylase donnent
volontiers des syndromes néphrotiques purs. À l'inverse, de nombreuses glomérulopathies
produiront en général des syndromes néphrotiques impurs (diabète, hyalinose segmentaire
et focale, syndrome d'Alport, glomerulonéphrites avec prolifération endo capillaire...).
La définition du syndrome néphrotique est syndromique et artificielle sur le plan du diagnostic
histologique. Les pathologies glomérulaires responsables d'un syndrome néphrotique peuvent
être responsables de syndromes néphrotiques «incomplets» ou de protéinuries de haut débit
sans répondre à la définition stricte du syndrome néphrotique. Toute protéinurie de débit
« glomérulaire », néphrotique ou non, doitfaire discuter la réalisation d'une biopsie rénale.
Par contre, le risque de survenue de complications métaboliques causées associées à une
fuite protéique urinaire seront corrélées à la sévérité de lafuite, et afortiori, à la présence
ou non d'un syndrome néphrotique.
L'apparition d'une fuite d'albumine dans les urines est la conséquence d'altérations d'une
ou de plusieurs composantes de la barrière de filtration glomérulaire, aboutissant à une
augmentation de la perméabilité glomérulaire :
une altération de l'endothélium;
■ une perte des charges électronégatives de la barrière de filtration glomérulaire;
■ une anomalie de la structure de la membrane basale glomérulaire;
■ des dépôts de protéines au contact de la membrane basale;
■ des lésions podocytaires.
En conséquence d'une hypoalbuminémie par perte urinaire, insuffisamment compensée par
la synthèse hépatique, la baisse de pression oncotique dans le secteur vasculaire vafavoriser
unefuite d'eau et de sodium vers le secteur interstitiel, et produire les œdèmes. Il va se créer
une hypovolémie relative qui active le système rénine angiotensine, etfavorise la réabsorption
du sodium dans le tubule rénal, et ainsi créer un cercle vicieux. En outre, dans le cas des
néphropathies à lésions glomérulaires, il existe une anomalie de la perméabilité capillaire
intrinsèque qui vafavoriser lafuite d'eau et de sodium vers l'interstitium, indépendamment
de l'hypoalbuminémie.
■ Un épanchement des séreuses de type transsudatif peut être observé, réalisant une
anasarque.
■ La prise de poids est constante.
■ Une oligurie peut survenir si le syndrome œdémateux est brutal (en lien avec une
franche hypovolémie relative).
■ Le niveau de pression artérielle va dépendre du type de glomérulopathie responsable
du syndrome néphrotique.
■ L'œdème pulmonaire est exceptionnel.
Les diagnostics différentiels sont les états œdémateux liés à une hypovolémie relative et/ou
hypoalbuminémie profonde : insuffisance cardiaque, cirrhose, dénutrition, entéropathie
exsudative...
b. Biologie
Les anomalies biologiques associées au syndrome néphrotique sont les suivantes :
■ Hypoalbuminémie < 30 g/1 et hypoprotidémie inférieure à 60 g/1;
■ L'électrophorèse des protéines sériques révèle une élévation des a-2-globulines,
des �-globulines et du fibrinogène, ainsi qu'une diminution des gammaglobulines;
■ Dyslipididémie mixte;
■ Hypocalcémie totale avec diminution de la fraction de calcium liée à l'albumine;
■ La créatininémie varie en fonction de la cause du syndrome néphrotique, avec
risque d'une insuffisance rénale aiguë fonctionnelle;
■ Protéinurie permanente et abondante (> 3 g/24 heures);
■ Diminution de la natriurèse (habituellement < 20 mmol/1).
c. Traitement symptomatique
Le traitement symptomatique des œdèmes repose sur:
■ repos non strict au lit;
■ la restriction sodée (2-4 g de sel par jour);
■ la restriction hydrique n'est pas nécessaire hors hyponatrémie;
■ la prescription de diurétiques de l'anse:furosémide/bumétadine en 2-3 prises par jour,
avec surveillance du poids et de la diurèse a.fin d'éviter une hypovolémie brutale;
■ en cas de résistance aux diurétiques de l'anse, il est possible d'ajouter: un diurétique
du tubule collecteur (amiloride) ou du tube contourné distal (diurétique thiazidique).
d. Infections
L'hypogammaglobulinémie induite par la fuite protéique urinaire favorise les infections à
germes encapsulés (Pneumocoque, Hœmophilus, Klebsielle).
On observe en particulier des érysipèles favorisés par les érosions cutanées dues aux œdèmes
des membres inférieurs.
Chez l'enfant, des péritonites primitives peuvent survenir après translocation de germes
du tube digestif.
Il faut discuter les vaccins antigrippaux et anti-pneumocoque. L'antibioprophylaxie au
long cours n'est pas indiquée.
e. Dénutrition
La dénutrition protidique estfréquente au cours des syndromes néphrotiques chroniques,
et peut s'accompagner d'un retard de croissance chez l'enfant. La corticothérapie prescrite
dans le traitement de certains syndromes néphrotiques participe également à l'amyotrophie
et au retard de croissance staturo-pondéral.
La perte de protéines porteuses (Vitamine-D binding protein, thyroxin binding globulin
céruléoplasmine, transferrine) peut entraîner des carences.
f. Dyslipidémies
Le syndrome néphrotique induit la synthèse de triglycérides et de cholestérol (dyslipidémie
mixte qui augmente le risque cardiovasculaire), avec une élévation significative du LDL
cholestérol.
Un traitement par statine peut être proposé pour traiter l'hypercholestérolémie si le syndrome
néphrotique persiste (> 6 mois).
D. Diagnostic étiologique
L'identification la lésion histologique glomérulaire en cause dans la survenue d'un syndrome
néphrotique nécessite la réalisation d'une ponction biopsie rénale.
Dans les cas particuliers suivants, le diagnostic étiologique est souvent évident, et il est
possible de surseoir à la biopsie :
syndrome néphrotique de l'enfant. Entre 1 et 10 ans la survenue d'un syndrome
néphrotique brutal est lié dans 90 % des cas à une néphropathie à lésions gloméru
laires minimes (« Néphrose lipoidique »), qui donne un syndrome néphrotique pur;
syndrome néphrotique du patient diabétique;
■ maladie rénale héréditaire identifiée dans la famille;
Il syndrome néphrotique dans un contexte d'Amylose;
■ en cas de contre-indication à la biopsie, y compris par voie trans-jugulaire.
On distingue les syndromes néphrotiques primitifs et secondaires.
Les syndromes néphrotiques primitifs sont classés en fonction de leur type histologique, et ne
sont pas liés à une maladie systémique. Les plus fréquents dont dus à une glomérulonéphrite
extramembranseuse et à la hyalinose segmentaire et focale. On retrouve ensuite les lésions
glomérulaires minimes, la glomérulonéphrite lupique, !'amylose, la néphropathie diabétique,
la glomérulonéphrite membranoproliférative.
Les syndromes néphrotiques secondaires sont liés à une atteinteglomérulaire d'une maladie
identifiée et pouvant toucher d'autres organes.
Diabète.
Ill Lupus érythémateux disséminé.
li Cryoglobulinémie.
11 Amylose AL ou AA.
■ Virus de l'hépatite B ou de l'hépatite C.
Ili VIH
■ Glomérulonéphrite aiguë post-infectieuse.
Il Tumeurs solides (cancer bronchique).
■ Hémopathies (myélome multiple, lymphome non-hodgkininen).
Ill Gammapathie monoclonale isolée.
Il Antiinflammatoires non stéroïdiens.
Il Thérapies anti-VEGF.
261
FICHE FLASH
□ Une protéinurie pathologique est> 0,3 g/24 heures (0,3 g/g).
□ Toute protéinurie permanente doit être explorée sur le plan néphrologique car elle témoigne d'une
atteinte parenchymateuse rénale.
□ Une protéinurie peut être tubulaire (protéines de faible masse moléculaire), en général< 1 g-1,5 g/1;
glomérulaire (protéines de masse moléculaire> 70 kDa); ou mixte.
D La présence d'albumine dans les urines témoigne d'une atteinte de la barrière de filtration glomérulaire.
D Définition du syndrome néphrotique: protéinurie> 3 g/j (50 mg/kg/j chez l'enfant) et albuminémie< 30 g/1.
D Doit toujours faire discuter la réalisation d'une biopsie rénale.
D Les complications majeures sont l'insuffisance rénale aiguë par hypovolémie, les thromboses artérielles
ou veineuses, et le risque athérogène.
262
QCM
► 3. Chez un patient porteur d'un syndrome néphrotique, l'apparition brutale d'une douleur
lombaire gauche, quel(s) diagnostic(s) devez vous suspecter?
A. Appendicite aiguë
B. Insuffisance rénale aiguë
C. Thrombose de la veine rénale gauche
D. Nécrose paillaire
E. Rupture de rate
LITHIASE URINAIRE
Nicolas PALLET
1. INTRODUCTION
La lithiase urinaire touche 5 % à 10 % de la population dans les pays industrialisés, et la lithiase calcique
représente plus de 80 % des lithiases urinaires.
La lithiase calcique (oxalate de calcium surtout, et phosphates de calcium), est idiopathique dans 90 % des
cas, et favorisée par des anomalies métaboliques, témoins d'habitudes alimentaires fortement lithogènes.
La correction de ces facteurs métaboliques est à la base du traitement médical préventif. Il s'agit d'une
pathologie hautement récidivante, avec un taux de récidive de plus de 50 % à 4 ans.
La lithogenèse est l'ensemble des mécanismes qui conduisent de la sursaturation urinaire à la rétention
cristalline et à la formation des calculs. Le processus de lithogenèse comporte les étapes suivantes :
■ présence de solutés aptes à cristalliser (lithogènes);
■ saturation des urines : obtention de la concentration maximale en solutés lithogènes au-delà de laquelle
ils précipitent;
■ sursaturation des urines : la concentration maximale en solutés lithogènes au-delà de laquelle les
solutés précipitent est dépassée. Il s'agit d'un rapport entre concentration et solubilité;
■ cristallisation à partir d'un support préexistant ou nucléation par rétention des cristaux (taille, adhé
sion à l'urothélium);
■ croissance exponentielle des cristaux (Phénomène de « boule de neige»);
■ formation et rétention des calculs;
migration des calculs provoquant les symptômes cliniques (colique néphrétique).
Chapitre 7. Biologie rénale - ITEM 262 265
■ Autres (S %) :
► cystine;
► médicaments.
Enfin, les calculs sont classés selon leur morphologie et leur structure (aspect macroscopique),
ce qui oriente précisément vers un processus physiopathologique. On observe souvent la
combinaison de plusieurs types de minéraux au sein d'une même lithiase, avec un noyau
d'une composition donnée, et une section d'une autre composition. Voir « Pour en savoir
plus» : tableau détaillé des types de lithiases.
A. La colique néphrétique
La colique néphrétique est la complication principale d'une lithiase urinaire du haut
appareil. Colique néphrétique et lithiase du haut appareil ne sont pas synonymes :
80 % des coliques néphrétiques sont dues à une lithiase (20 % le sont par atteinte de
la paroi urétérale), et toutes les lithiases ne provoquent pas de colique néphrétique.
La douleur de la colique néphrétique est secondaire à la mise en tension des parois de l'arbre
urinaire en amont de l'obstacle : en réponse à l'augmentation de pression dans les voies
urinaires, les fibres musculaires de la paroi urétérale se contractent, et libèrent de l'acide
lactique, qui va stimuler des fibres nociceptives. La production rénale de prostaglandines
en réponse à l'augmentation de pression dans les cavités urinaires augmente le débit de
filtration glomérulaire. Ceci et explique l'efficacité des anti-inflammatoires non stéroïdiens.
Les caractéristiques de la colique néphrétique sont :
facteur déclenchant : trajet, voyage, chaleur...;
■ début brutal;
■ douleur très intense, à type de torsion, avec des paroxysmes;
■ localisation dans l'angle costo-diaphragmatique, irradiant vers les organes génitaux;
■ apyrexie;
Ill signes fonctionnels urinaires : pollakiurie, impériosités;
Il signes digestifs possibles : nausées, vomissements...;
■ hypertension artérielle;
■ agitation car absence de position antalgique;
l'examen clinique est négatif (pas de signe d'urgence chirurgicale).
Il faut rechercher une colique néphrétique compliquée, situation médicale nécessitant une
dérivation des urines en urgence :
fièvre, infection urinaire : rétention d'urines infectées en amont d'un obstacle, et
risque de sepsis voire de décès;
■ anurie : obstacle sur rein unique, ou sur un obstacle bilatéral. Il existe alors une
insuffisance rénale aiguë obstructive;
■ colique néphrétique hyperalgique : les douleurs ne cèdent pas malgré les AINS IV
et les antalgiques morphiniques;
rupture des voies excrétrices : la douleur cède brutalement, et un urinome se constitue
Les diagnostics différentiels de la colique néphrétique sont nombreux. L'examen clinique
et l'interrogatoire ont une forte valeur d'orientation et un scanner non injecté rectifie
souvent le diagnostic :
pathologies digestives : colique hépatique; cholécystite aiguë; pancréatite aiguë;
diverticulite; appendicite aiguë; hernie inguinale étranglée;
Chapitre 7. Biologie rénale - ITEM 262 267
A. Biologie
■ Devant une colique néphrétique, il faut réaliser:
► bandelette urinaire : recherche une hématurie ou une infection urinaire
(nitrites; leucocytes). Seuil de détection : 5.103 globules rouges/ml; 104 leuco
cytes/ml; 105 bactéries (entérobactéries réduisant les nitrates)/ml;
► examen cytobactériologique des urines : il doit toujours être prescrit si la
bandelette urinaire est positive;
► ionogramme sanguin, créatininémie et une numération sanguine;
► le cas échéant, des hémocultures.
B. Radiologie
Selon les disponibilités du plateau technique local, une colique néphrétique s'explore
avec un cliché d'abdomen sans préparation couplé à une échographie rénale et des voies
excrétrices ou bien d'un scanner sans injection. En cas de doute diagnostique avec un
problème abdominal aigu, il convient de réaliser un scanner non injecté. Un uroscanner
(avec injection de produit de contraste et prise de temps tardifs pour visualiser l'excrétion
dans les voies urinaires) doit être effectué si un geste urologique invasif est proposé afin
de connaître précisément l'anatomie des voies urinaires.
Abdomen sans préparation
► simple, rapide peu coûteux;
► peu sensible et peu spécifique;
► visualise uniquement les calculs radio opaques;
► ne renseigne pas sur les complications possibles;
► permet de suivre la progression du calcul;
► ne doit pas être utilisé seul.
■ Uroscanner
► permet de confirmer un obstacle lors d'un retard d'excrétion;
► nécessaire avant un geste urologique pour connaître la morphologie des voies
urinaires et les caractéristiques du calcul (taille, forme, topographie).
Composition Interprétation
Type Morphologie
chimique clinique
Hy percalciurie, - Rugueux ou pommel
é
IVd Brushite hyperparathyroïdie, - Légèrement translucid
e
hyperphosphaturie Crèm
e
Vb C st n e
y i
- Cystinurie traitée - Plus ou moins liss
e
+carbapatite par alcalinisation Crème à jaun
e
P o
r -
t é Pyélonéphrite chr o -
Via ines+pho s - Souvent mou, lisse, blanc à bru
nique n
phates
Rugueux, écaill
Vlb vers const i- menteuses é
Brun à noi
tuants Proté nurie
i r
P o é - Lisse
Vic r t Lithiase du dialys
ines+whewe ite
l é Brun no r
i
Chapitre 7. Biologie rénale - QCM
QCM
► 1. Quels sont les deux composants principaux des lithiases urinaires dans les pays
occidentaux?
A. Acide urique
B. Oxalate de calcium
C. Phosphate de calcium
D. Cystine
E. Struvite
► 3. Parmi les facteurs suivants, lequel (lesquels) est (sont) un(des) facteur(s) favorisant la
survenue de lithiase urique?
A. Un diabète de type 2
B. Des urines concentrées
C. La maladie de Cacchi-Ricci
D. Un syndrome métabolique
E. Une infection urinaire
► 4. La lithiase calcique :
A. Représente 10 % des calculs urinaires
B. Est radio-transparente
C. Survient souvent chez un patient atteint d'un syndrome métabolique
D. Est riche en oxalate
E. Peut être prévenue par un régime alimentaire équilibré
HEMATURIE
Nicolas PALLET
1. INTRODUCTION
Une hématurie est la présence de globules rouges dans les urines émises lors d'une miction. Elle
témoigne d'une communication entre les vaisseaux de l'arbre urinaire et un conduit urinaire; ou
entre les capillaires glomérulaires et la chambre urinaire des glomérules.
Elle est macroscopique lorsqu'elle est visible, en général à partir de 5.105 globules rouges/ml {500/mm3).
Les urines sont rosées, rouges, ou brunâtres, avec ou sans caillots.
Elle est microscopique lorsqu'elle n'est pas visible, et se définit par une concentration de globules
rouges supérieure à 104/ml (10/mm3). L'hématurie microscopique est souvent diagnostiquée de manière
fortuite sur un examen de dépistage (médecine du travail notamment).
Il n'y a pas de corrélation entre le type d'hématurie et la sévérité de la maladie sous-jacente, et la démarche
diagnostique doit être la même pour les deux types d'hématurie.
Il. DIAGNOSTIC
A. Faux positifs
La bandelette urinaire détecte l'activité péroxydase catalysée par les hémoprotéines (en premier lieu
l'hémoglobine), à un seuil> 5 globules rouges/mm3 •
La sensibilité est bonne (90 %) avec des faux négatifs induits par la prise de Captopril, un pH acide (pH < 5),
la prise de vitamine C à forte dose, ou des urines très concentrées.
Il existe des faux positifs dus à la présence d'hémoprotéines dans les urines: myoglobinurie (rhabdomyolyse),
porphyrines (porphyries), hémoglobine (hémoglobinurie), bilirubine, ou contact avec des antiseptiques (avec
activité peroxydase comme l'eau de Javel).
Une coloration rouge des urines sans hématurie (et bandelette urinaire négative) s'observe lors de :
prise d'aliments: betterave, mûres, myrtilles, choux rouge, rhodamine B (colorant alimentaire);
■ prise de médicaments: rifampicine++, érythromycine, métronidazole, certains anti-inflammatoires,
la vitamine B12.
La présence d'hématies dans les urines sans hématurie peut s'observer lors d'une contamination génitale
(menstruations, métrorragies, hémospermie) ou une urétrorragie (saignement persistant en dehors des
mictions).
Chapitre 7. Biologie rénale - ITEM 257 277
B. Diagnostic positif
La recherche d'hématurie avec une bandelette doit être effectuée en dehors d'une
période menstruelle, sur les urines du matin, fraîchement émises, après toilette génitale.
L'examen cytobactériologique des urines permet de confirmer ou d'infirmer le
diagnostic, de quantifier l'hématurie, et d'orienter vers une origine possible (leucocyturie
orientant vers une infection urinaire; cylindres hématiques et hématies déformées
orientant vers une hématurie glomérulaire).
Le compte d'Addis-Hamburger ne doit plus être utilisé.
B. Caractéristiques de l'hématurie
Une hématurie macroscopique évoque plutôt une atteinte urologique (cancer, lithiase,
infection). La présence de caillots signe une origine urologique de l'hématurie. L'hématurie
d'origine parenchymateuse rénale ne produit pas de caillots en raison de la présence d'un
anticoagulant physiologique des urines, l'urokinase produite par les tubules.
278 Hématurie
C. Examens complémentaires
L'ECBU élimine les fausses hématuries et les infections urinaires. Demander la recherche
de tuberculose et de biharziose le cas échéant.
De manière systématique, en cas de confirmation de l'hématurie, on demandera : un
ionogramme sanguin avec créatininémie; un ionogramme urinaire avec protéinurie;
une analyse du culot urinaire (cylindres, hématies déformées, cristaux); une numération
globulaire; une échographie des reins et de l'appareil urinaire.
Complétée par l'interrogatoire et l'examen clinique, l'orientation se fait en général vers
une cause urologique, néphrologique, ou bien l'hématurie est isolée:
orientation urologique (douleurs, caillots, signes fonctionnels urinaires, anomalies
à l'échographie): réalisation d'un uroscanner (ou uro-IRM si contre indiqué), puis
le cas échéant d'une cystoscopie, d'une cytologie urinaire, voire d'une urétéroscopie
(suspicion de tumeur urétérale);
► NB. : la cytologie urinaire est un test sensible pour détecter des tumeurs vésicales
de haut grade, mais par pour les tumeurs de bas grade. Ainsi, une cytologie urinaire
normale nëlimine pas la possibilité d'une tumeur vésicale.
Diagnostic d'élimination:
atteinte prostatique: cancer, adénome, infection;
► l'hématurie d'effort s'observe après un effort physique intense et prolongé, et est
liée à des microtraumatismes associés à une augmentation de la perméabilité
glomérulaire. Doit être explorée si elle persiste;
► un traitement coagulant n'est pas a priori une cause d'hématurie, et doit faire
rechercher d'autres lésions sous-jacentes.
FICHE FLASH
0 Une hématurie est la présence de sang dans les urines au cours d'une miction.
U La bandelette est très utile au dépistage, mais est peu spécifique.
□ Un examen cytobactériologique des urines doit toujours confirmer le diagnostic d'hématurie.
U Le seuil pathologique est défini par un nombre de globules rouges > 10/mm3 •
0 Les hématuries micro et macroscopiques ont la même signification étiologique.
□ Les causes sont urologiques (cancer, lithiase et infections) et néphrologiques (glomérulopathies).
□ La présentation de l'hématurie, l'interrogatoire, et l'examen clinique permettent en général d'orienter
vers une cause urologique ou néphrologique.
□ Les examens de première intention à réaliser devant une hématurie: ECBU, créatinine sérique, protéinurie,
numération globulaire, échographie rénale et des voies urinaires.
□ Une hématurie chez un fumeur doit faire rechercher un carcinome urothélial.
□ Une biopsie rénale est discutée devant une suspicion d'hématurie de cause néphrologique.
Chapitre 7. Biologie rénale - QCM
QCM
► 1. Parmi les éléments suivants accompagnant une hématurie, quel(s) est (sont) celui
(ceux) qui oriente(nt) vers une origine néphrologique?
A. La présence de caillots dans les urines
B. La présence de cellules anormales dans les urines
C. La présence de cylindres hématiques dans les urines
D. Une douleur lombaire unilatérale
E. Une protéinurie à 0,3 g/1
► 3. Une bandelette urinaire est positive pour les globules rouges en cas :
A. De porphyrie
B. De syndrome néphrotique
C. De tuberculose urogénitale
D. D'hémoglobinurie paroxystique nocturne
E. De la prise de rifampicine
► 4. Devant une hématurie de découverte fortuite, chez un fumeur de 63 ans, que prescri
vez-vous en première intention?
A. Une cytologie urinaire
B. Une cystoscopie
C. Un écho-doppler des artères rénales
D. Une protéinurie des 24 heures
E. Une biopsie rénale
ITEM 22
GROSSESSE NORMALE
DIAGNOSTIC ET SUIVI BIOLOGIQUE
Nicolas DE ROUX, Leila DRIRA, Clémence DELCOUR, Sophie DREUX
à 48 heures). Mais attention, un doublement du taux d'HCG toutes les 48 heures est
possible en cas de grossesse extra-utérine (et en général, le taux va stagner dans un
second temps). C'est la raison pour laquelle l'échographie est décisive pour différen
cier une grossesse extra-utérine d'une grossesse intra-utérine évolutive ou stoppée.
Les grossesses multiples sont difficiles à identifier par ce simple dosage car l'amplitude
des valeurs de référence est grande, cependant une valeur très élevée peut parfois être un
signe précoce du développement de plusieurs embryons.
Les môles hydatiformes et les choriocarcinomes s'accompagnent habituellement d'une
élévation très importante du taux sérique d'hCG.
3. Sérologie de la rubéole
Le risque de rubéole congénital dépend du terme auquel survient l'infection il est
majeur avant 12 SA et devient presque nul après 18 SA. La vaccination est indispensable
chez toute femme qui a un désir de grossesse. Si elle est négative, la sérologie de la
rubéole doit être répétée jusqu'à 18 SA.
4. Sérologie de la toxoplasmose
La survenue d'une toxoplasmose congénitale est un risque majeur lorsque les femmes ne
sont pas immunisées. En France, 50 % des adultes sont immunisés. Le risque de transmission
augmente avec le terme de la grossesse alors que les conséquences cliniques diminuent
en fin de grossesse. La majorité des enfants qui ont une toxoplasmose congénitale sont
286 Grossesse normale : diagnostic et suivi biologique
3. Le dépistage de la trisomie 21
Le diagnostic de certitude d'anomalie chromosomique repose sur l'analyse du caryotype fœtal
réalisé à partir d'un prélèvement de villosités choriales, de cellules amniotiques ou de sang
fœtal. Le dépistage consiste à cibler des patientes à risque accru d'anomalie chromosomique
chez lesquelles le prélèvement pour caryotype fœtal sera réalisé. Le facteur de risque
d'anomalie chromosomique le mieux établi est l'âge maternel. Actuellement, les
progrès liés au développement de l'échographie ont contribué à mettre en évidence
des anomalies fœtales permettant le dépistage des anomalies chromosomiques chez
les femmes plus jeunes, et enfin, l'existence de marqueurs biochimiques dans le sérum
maternel au 2• trimestre de la grossesse puis au 1•• trimestre, ce qui a finalement permis
une extension du dépistage à toutes les femmes enceintes qui le désirent.
Le dépistage de la trisomie 21 a fait l'objet de nombreux débats. En effet, pendant
de nombreuses années, ce dépistage entraînait un nombre élevé de gestes invasifs
(amniocentèses ou choriocentèses) et donc de complications iatrogènes. La stratégie
de dépistage officialisée en décembre 2018 a permis d'initier un nouveau test de
dépistage (ADN fœtal libre circulant) afin de sélectionner la population de femmes
nécessitant un geste invasif et de réduire ainsi le risque iatrogène.
Le principe du dépistage de la trisomie 21 fœtale par les marqueurs sériques maternels
repose sur le calcul d'un risque individuel de trisomie 21 en pondérant le risque lié
à l'âge maternel par un facteur de correction lié aux valeurs des concentrations des
biomarqueurs dosés dans le sérum maternel.
La relation entre marqueurs sériques maternels et trisomie 21 a été découverte de façon
fortuite. En 1984, une première étude montrait que l'alpha-foeto-proteine (AFP) était plus
basse dans le sérum maternel lorsque le fœtus était atteint de trisomie 21. En 1987 et 1988
l'intérêt de l'hCG, de sa fraction 13 libre et de l'œstriol non conjugué (E3) était démontré.
Différentes associations combinant l'âge maternel et un ou plusieurs de ces marqueurs ont
été proposées pour améliorer leur valeur prédictive. En 1988, Wald proposait un calcul de
risque utilisé actuellement dans tous les logiciels validés en France.
Les marqueurs de la trisomie 21 utilisés au premier trimestre de la grossesse ne sont pas
les mêmes que ceux du deuxième trimestre, l'hCG totale, l'AFP et l'œstriol n'étant pas ou
peu utiles avant 14 SA. Seule la 6-hCG libre est un bon marqueur lors des deux premiers
trimestres. La protéine plasmatique A associée à la grossesse (pregnancy-associated plasma
protein A ou PAPP-A), synthétisée par le trophoblaste et diminuée en cas de trisomie 21,
est utile avant 14 semaines. Les études ont démontré l'association utile des dosages de
PAPP-A et 6-hCG libre comme marqueurs prédictifs.
En plus des marqueurs biologiques, l'utilisation de marqueurs échographiques a
progressivement été intégrée dans les stratégies de dépistage. En effet l'échographie
du premier trimestre (entre 11 SA et 13 SA + 6 jours) s'est progressivement imposée
comme un test de dépistage de la trisomie 21 par la mesure de la clarté nucale avec
une excellente sensibilité et spécificité.
Le principe du dépistage de la trisomie utilise un calcul de risque qui associe des signes
échographiques et la concentration des biomarqueurs maternels. La Haute Autorité de
Santé a émis des recommandations en juin 2007. Un test réalisé entre 11 + 0 SA et 13
+ 6 SA, intégrant les données échographiques (mesure de la clarté nucale enfonction de la
longueur crânio-caudale) et biologiques (PAPP-A et fraction libre de la b-hCG) doit être
proposé aux femmes enceintes quel que soit leur âge.
Ce calcul de risque combiné n'est possible que si la clarté nucale est mesurée à partir d'un
cliché échographique de qualité indiscutable, nécessitant une standardisation et un contrôle
de qualité de ces mesures.
Le développement de nouvelles techniques de biologie moléculaire utilisant le séquencage
haut débit a ouvert de nouvelles perspectives par le dosage de l'ADNfœtal circulant chez
la mère. Le principe de cette méthode est d'étudier la sur-représentation du chromosome
21 dans l'ADN circulant chez la mère. La présence de l'ADN circulant augmente avec
288 Grossesse normale: diagnostic et suivi biologique
le terme de la grossesse. En cas de recherche positive, l'analyse doit être confirmée par
la réalisation d'un caryotype fœtal après amniocentèse ou choriocentèse. Avec un taux
de détection supérieur à 99 % et un taux de faux positifs inférieur à 1 %, ce test permet
d'affiner l'évaluation du risque de trisomie 21 et de limiter le recours aux examens invasifs
de confirmation (amniocentèse ou choriocentèse).
Suite aux recommandations de la HAS, un arrêté publié le 20 décembre 2018 intègre un
nouvel examen dans le dispositif de dépistage de la trisomie 21 (T21) fœtale. Le test ADN
est désormais pris en charge par l'assurance maladie et est proposé à toutes les femmes
enceintes dont le niveau de risque estimé est compris entre 1/1 000 et 1/51 après un dépistage
combiné du 1er trimestre (ou à défaut des marqueurs sériques du 2' trimestre). Auparavant,
le caryotype était proposé aux femmes ayant un risque de 1/250.
Dans tous les cas, la place du caryotype fœtal reste inchangée : seul cet examen permet
de poser le diagnostic de trisomie 21.
De manière générale, plusieurs recommandations pratiques sont apparues pour le dépistage
des anomalies fœtales :
une information adaptée doit être donnée en consultation obstétricale, pour éviter de
pousser des parents àfaire un diagnostic prénatal contre leur volonté, et pour limiter
l'anxiété induite par le dépistage;
a la qualité des tests biologiques doit être contrôlée. c'est vrai en particulier pour le
diagnostic et le dépistage des maladies infectieuses comme la toxoplasmose et pour
le dépistage sérique des anomalies chromosomiques;
les échographies doivent être réalisées non seulement au bon terme mais aussi par un
opérateur suffisamment expérimenté.
Conclusion : il est indispensable que les structures de dépistage fonctionnent en
partenariat avec un ou plusieurs centres spécialisés (CPDPN : centre pluridisciplinaire
de diagnostic prénatal) qui auront pour mission de confirmer ou d'infirmer les
anomalies détectées et de programmer la prise en charge obstétrico-pédiatrique.
Comme toutes les autres activités concernant les examens sur l'enfant à naître, la
biochimie prénatale ne peut être réalisée que dans des laboratoires autorisés. À ce jour,
moins de trente laboratoires sont autorisés pour cette activité spécifique de biochimie.
Cette autorisation est distincte de celle concernant l'utilisation de marqueurs sériques
maternels et de celle utilisée pour les analyses d'immunologie et d'hématologie.
La répartition des maladies étudiées dans chaque laboratoire est disponible dans deux
répertoires qui recensent ces activités : ORPHANET (http://orphanet.infobiogen.fr) et le
répertoire de l'Association Française pour le Dépistage des Handicaps de !'Enfant. Il s'agit
donc d'une activité très spécialisée.
Bibliographie
1. Uniquement si première grossesse et si la patiente ne possède pas de carte de groupe sanguin complet.
2. Si détermination non réalisée.
3. Si négatif: à poursuivre pendant la grossesse.
4. Si négatif: sérologie jusqu'à 18 SA.
5. Marqueurs sériques du 1" trimestre (11 à 13 SA) combinés à la mesure de la clarté nucale.
6. Marqueurs sériques du 2e trimestre (15 à 18 SA).
7. Pris en charge par la sécurité sociale à partir du 6e mois de grossesse.
290 Grossesse normale : diagnostic et suivi biologique
1 er trimestre de la grossesse
proposition de dépistage de la trisomie 21
> échographie + prise de sang + âge ➔ calcul du risque
----�------ ---���--111111
est inférieur est compris entre est supérieur ou égal
à 1/1000 1/1000 el 1/51 à 1/50
Résultat
NÉGATIF
Résultat
NÉGATIF
POSSIBILITÉS
➔ Poursuivre la grossesse
et accooilllr l'enfant 811 mettant
811 place un suivi adapté
➔ Demander une interruption
Suivi habituel de la grossesse médicale d8 grossesse
+ HAS: www.has-sante.fr.
ITEM 24
DIAGNOSTIC D'UNE GROSSESSE
EXTRA-UTERINE
Ingrid PLOTTON et Delphine MALLET
1. INTRODUCTION
Le diagnostic précoce d'une Grossesse Extra-Utérine (GEU) doit être évoqué très rapidement lors
de la prise en charge d'une patiente susceptible d'être enceinte, car il met en jeu son pronostic vital.
C'est la première cause de mortalité liée à la grossesse au cours du premier trimestre dans les pays
industrialisés. C'est une urgence chirurgicale et le traitement sera d'autant plus conservateur si le
diagnostic est précoce.
Il. DÉFINITIONS
La Grossesse Extra-Utérine ou nidation ectopique est l'implantation et le développement de l'œuf en
dehors de la cavité utérine.
Les différentes parties anatomiques de la trompe peuvent être concernées. L'embryon peut se développer
dans l'ampoule tubaire (75 %), dans l'isthme (20 %), dans le pavillon(3 %) et dans l'ovaire voire dans la
cavité abdominale(< 1% des cas).
Ill. ÉPIDÉMIOLOGIE
Sa fréquence en France est de l'ordre de 14000 cas/an soit 1,7 % à 2 % des grossesses.
A. Diagnostic
1. Terrain et facteurs de risque
■ L'interrogatoire devra rechercher dans les antécédents :
► GEU antérieures(risque de GEU x 10);
► salpingites(risque de GEU x 6), à chlamydia trachomatis qui peut être à l'origine de lésions tubaires;
Chapitre 8. Biologie féminine, biologie du couple et de la grossesse - ITEM 24 293
2. Symptômes
Les symptômes surviennent chez une femme en âge de procréer.
On retrouve la notion de retard des règles.
Associée à:
des métrorragies peu abondantes, classiquement sépia voire noirâtres parfois
mélangées à du sang rouge, intermittentes avec paroxysme, calmées par l'émission
d'un peu de sang: les coliques salpingiennes. L'association à des douleurs scapulaires
témoigne de l'existence d'un hémopéritoine accompagné de lipothymies et de malaises;
■ des douleurs unilatérales sus-pubiennes dans une des fosses iliaques;
■ les signes sympathiques de grossesse (nausées, seins tendus);
■ vertiges, lipothymies à rechercher comme signes de gravité.
3. Examen clinique
À l'état initial, l'état général est conservé: TA et pouls normaux, conjonctives sans
particularité.
L'examen gynécologique révèle:
repérer les cicatrices;
■ abdomen souple, douleur à la palpation de la région hypogastrique;
■ au spéculum: col fermé, sans glaire, présence de sang d'origine endo-utérine;
■ au toucher pelvien:
► toucher vaginal: utérus un peu augmenté de volume, mais plus faible que le
volume attendu avec l'âge de la grossesse;
► rechercher une sensibilité au niveau du cul de sac de Douglas;
► le toucher peut parfois déclencher une douleur vive témoignant d'une irritation
péritonéale;
► douleur à la mobilisation utérine.
4. Examens complémentaires
a. Dosage de l'hCG
L'hCG ou hormone Chorionique Gonadotrope humaine est produite principalement
par les cellules syncytiotrophoblastiques du placenta au cours de la grossesse. Cette
294 Diagnostic d'une grossesse extra-utérine
hormone est synthétisée et secrétée par l'œuf fécondé dès le stade 4/8 cellules et est
détectée dans le sang dès le 9° jour de grossesse.
Le pic d'hCG est atteint à la 8 ° semaine d'aménorrhée (environ 100000 UI/l) puis va
redescendre vers 18/20 semaines d'aménorrhée (SA) pour atteindre un plateau aux environs
de 5 000 UI/l jusqu'à l'accouchement. L'hCG se négative 5 jours après l'accouchement.
Lors d'une grossesse normalement évolutive, le taux d'hCG double toutes les 48 heures
au cours des 8 premières SA.
Lors d'une GEU, il est habituel d'observer une cinétique perturbée en raison de
l'absence de doublement du taux d'hCG en 48 heures. Il faut deux dosages à 48 heures
d'intervalle pour affirmer l'évolutivité de la GEU.
b. L'.échographie pelvienne
■ Réalisée par voie endovaginale (ou abdominale si nécessaire).
■ Doit prendre en compte l'âge gestationnel, les résultats de l'échographie ainsi que
le taux d'hCG plasmatique.
■ Dans la GIU normale, on note aux examens successifs :
► à 5 semaines : sac trophoblastique;
► à 6 semaines : sac trophoblastique + écho embryonnaire;
► à 7 semaines : sac trophoblastique + écho embryonnaire + battements cardiaques
(BC).
■ Cas particuliers
► hCG > 1500 UI/l avec une vacuité utérine sans signe clinique et sans autre signe :
contrôle à 48 heures et avis spécialisé.
c. Autres bilans
■ NFP, groupe Rhésus, bilan de coagulation.
■ Bilan pré-thérapeutique en fonction du traitement médical (si méthotrexate : faire
un bilan rénal et hépatique) et chirurgical.
5. Diagnostic positif
La cœlioscopie, pratiquée sous anesthésie générale, est l'examen clé du diagnostic.
Elle confirme la localisation anatomique de la GEU.
Elle permet le traitement par cœlioscopie de la GEU.
Chapitre 8. Biologie féminine, biologie du couple et de la grossesse - ITEM 24 295
6. Évolution
1. Hématocèle rétro-utérin.
■ 2. Rupture dans le péritoine avec inondation péritonéale (pâleur, accélération
du pouls, état de choc), avec urgence de la prise en charge.
Il 3. Formes pseudo-abortives: persistances des douleurs malgré un éventuel curetage
et persistance ou augmentation des concentrations d'hCG.
Il 4. Formes fébriles (le dosage de l'hCG orientera vers une grossesse).
■ 5. Formes pauci-symptomatiques: risque d'évolution vers une rupture et une inon
dation péritonéale.
6. Association GIU-GEU: rare, 1/30000 grossesses.
7. Traitement
Objectifs:
traiter la GEU avant la survenue de l'hémopéritoine;
■ préserver la fertilité;
■ limiter la récidive;
■ limiter la morbidité thérapeutique;
éviter une immunisation rhésus chez les patientes de groupe rhésus négatif.
P rincipaux moyens thérapeutiques
Médical:
► Méthotrexate 1 mg/kg (antinéoplasique cytostatique) en intra-musculaire ou per
cœlioscopie ou sous contrôle échographique, plus rarement par voie veineuse:
• grossesse pauci-symptomatique;
• hCG < 5000 UI/l;
• hématosalpinx de petite taille sans hémopéritoine;
• bilan préthérapeutique (NFP, coag, bilan rénal et hépatique);
• bilan à une semaine (NFP, coag, bilan rénal et hépatique);
• élévation transitoire à J2 de l'hCG;
• taux d'échec: 10-20 %.
■ Chirurgical:
► la cœlioscopie avec chirurgie radicale ou chirurgie conservatrice:
► laparotomie:
• pas d'indication pour les GEU non compliquées;
► abstention thérapeutique:
• GEU asymptomatique;
• hémodynamique et hématocrite stable;
• hCG initial < 1 000 UI/1;
• surveillance médicale rapprochée+ dosages itératifs d'hCG.
296 Diagnostic d'une grossesse extra-utérine
STÉRILITÉ DU COUPLE
Ingrid PLOTTON et Delphine MALLET
1. INTRODUCTION
L'infertilité d'un couple est considérée comme un problème important de santé publique, car il
a un retentissement à la fois sur le plan financier mais peut aussi altérer la qualité de vie avec de
potentielles conséquences sur l'équilibre psychologique. Il est actuellement estimé que 15 % des
couples rencontreront dans leur vie des difficultés pour procréer.
Il. DÉFINITIONS
La fertilité est l'aptitude biologique des couples à obtenir une naissance vivante.
Le taux de fécondité à un âge donné désigne le nombre d'enfants nés d'une femme de cet âge au cours
de l'année, rapportée à la population moyenne de l'année des femmes du même âge
La fécondabilité correspond à la probabilité mensuelle (ou par cycle menstruel) de grossesse pour des
couples n'utilisant pas de méthode contraceptive.
L'infertilité de couple est définie par l'absence de grossesse après un an de rapports sexuels réguliers
et non protégés.
Cette définition est à distinguer de celle de la stérilité qui correspond à l'incapacité totale de procréer,
terme employé si la situation d'infertilité est définitive.
Ill. ÉPIDÉMIOLOGIE
La connaissance du délai nécessaire pour concevoir (DNC) est une notion intéressante à lëchelle d'une
population. Seul 25 % des couples obtiennent la grossesse désirée au cours du 1 er mois, il faut en moyenne
sept mois à un couple pour concevoir un enfant.
298 Stérilité du couple
Lafertilité d'un couple dépend de lafécondité des deux partenaires. Pour un couple infertile,
les données actuelles montrent qu'une cause féminine est identifiée dans 1/3 des cas, une
cause masculine pour 1/3 et qu'elle est partagée dans le 1/3 des cas restants. Il sera donc
indispensable de mener en parallèle les explorations clinico-biologiques chez les deux
membres du couple. On distinguera 3 étapes : une étape d'interrogatoire, un bilan clinico
morphologique et une exploration biologique.
IV. INTERROGATOIRE
A. Du couple
La durée de vie commune, fréquence des rapports, arrêt de la contraception.
■ Les traitements antérieurs ou en cours et les explorations antérieures.
B. De la femme
■ Âge:
► est un élément essentiel du pronostic, on observe une augmentation nette du délai
pour concevoir après 35 ans.
• On s'intéressera également à l'âge de la puberté, l'âge des premières règles
et leur durée, la régularité des cycles (en faveur d'une ovulation).
■ Ancienneté de l'infertilité:
► la durée, son caractère primaire (pas de naissance ou grossesse antérieure avec
le même ou un autre conjoint) ou secondaire (absence de nouvelle grossesse);
► les antécédents de fausses couches spontanées, d'interruption médicale de gros
sesse, ou d'interruption volontaire de grossesse (antécédents).
C. De l'homme
■ Ancienneté de l'infertilité, grossesse avec une autre partenaire.
■ Antécédents d'infections génitales (orchites, épididymites, prostatites).
■ Antécédents médicaux: bronchites à répétitions.
Il Pathologies testiculaires et génitales: cryptorchidie (uni ou bilatérale), abaissement
après traitement médical ou chirurgical, âge lors du traitement, antécédents d'hy
pospade, de micropénis.
Il Antécédents chirurgicaux: intervention pour hernie inguinale bilatérale.
■ Traitements antérieurs: radiothérapie pelvienne ou hypophysaire, chimiothérapie
gonadotoxique.
Ill Hygiène de vie: stress, sport (quantité, compétition, jogging), régime restrictif,
addictions (tabac, alcool, cannabis, testostérone et anabolisants).
Chapitre 8. Biologie féminine, biologie du couple et de la grossesse - ITEM 37 299
V. EXAMEN CLINIQUE
A. Chez la femme
■ Âge.
■ Paramètres morphologiques : Taille, Poids, IMC, tour de taille/tour de hanche.
■ Pression artérielle.
Il Examen cutané : Pilosité, acanthosis nigricans.
■ Galactorrhée.
■ Examen gynécologique : trophicité vaginale, inspection de la glaire.
■ Touchers pelviens : inspection du col, présence de fibromes.
Il Courbe de température : une courbe biphasique est un bon témoin de l'existence
d'une ovulation.
■ Si aménorrhée : penser à rechercher une galactorrhée, un hirsutisme, des troubles
du comportement alimentaire, des bouffées de chaleur (insuffisance ovarienne).
B. Chez l'homme
■ Paramètres morphologiques : Taille, Poids, IMC, tour de taille/tour de hanche, aspect
gynoïde ou eunuchoïde.
■ Pression artérielle.
■ Pilosité visage et pubienne.
■ Gynécomastie.
■ Cicatrices de gestes chirurgicaux.
■ Varicocèle (Tableau 1).
Grade Critères
1 Palpable seulement en manœuvre de Valsalva
2 Palpable au repos, mais non visible
3 Visible et palpable au repos
■ La palpation des cordons spermatiques avec palpation des canaux déférents, des
épididymes.
■ Toucher rectal pour examen de la prostate.
A. Chez la femme
1. Échographie Ovarienne
Réalisée par voie endovaginale.
■ À réaliser en début de cycle 03-JS).
■ Précise la taille et l'aspect des ovaires, évalue le compte de follicules antraux (ou
CFA) qui sont les follicules sélectionnables et permet de donner des indications sur
la réserve ovarienne:
► CFA< 5 follicules/ovaire: diminution de la réserve ovarienne;
► CFA> 12 follicules/ovaire: évocateur d'ovaires polykystiques.
4. Explorations Hormonales
1!11 En cas d'aménorrhée : prévoir le bilan étiologique :
► penser à évoquer une grossesse : dosage d'hCG;
► en cas de galactorrhée, rechercher une hyperprolactinémie : dosage de la
prolactine;
Chapitre 8. Biologie féminine, biologie du couple et de la grossesse - ITEM 37 301
► en cas d'hirsutisme:
• doser la testostérone totale et la SHBG, et calculer la testostérone
libre ou biodisponible;
• doser la 17-hydroxyprogestérone en début de phase folliculaire le
matin entre 8 heures et 10 heures ou réaliser un test au synacthène
pour éliminer formellement une forme non classique de déficit en
21-hydroxylase;
• doser la déhydroépiandrostérone sulfate (DHEAS) en cas de suspicion
de tumeur corticosurrénalienne, en général associée à une testosté
rone totale très élevée;
B. Chez l'homme
Exploration de 1 ' intention.
0
1. Spermogramme et spermocytogramme
Cet examen est essentiel et systématique chez tout homme s'interrogeant sur sa fertilité.
Réalisation: au laboratoire après 2 à 5 jours d'abstinence sexuelle.
Sur le compte rendu des résultats sera noté le délai d'abstinence et les paramètres
spermatiques selon les références OMS de 2010 (tableau 2), il sera également précisé
si le patient a rencontré des difficultés pour réaliser le prélèvement.
Anomalies Nomenclature
Paramètres Valeurs normales
du sperme des anomalies
Oélai
3-5 jours
abstinence
Volume < 1,5 ml Hypospermie
> 1,5 ml
éjaculé Nul Aspermie
pH 7,2 à 8,0 ml
< 15 millions/ml
Nul Oligospermie
Concentration > 15 millions/ml Nul mais présence - Azoospermie
de spermatozoïdes - Cryptozoospermie
après centrifugation
302 Stérilité du couple
Anomalies Nomenclature
Paramètres Valeurs normales
du sperme des anomalies
> 32 % mobilité
progressive (a+b)
Mobilité < 32 % mobiles Asthénospermie
(a : fléchant rapide,
B : fléchant progressif)
>58 % spermatozoïdes
Vitalité <58 % Nécrospermie
vivants
> 4 % de forme typique
{classification de - <4%
Morphologie Kruger) Tératospermie
>24 % <23 %
Classification de Davis
Leucocytes < 1 million/ml > 1 million/ml Leucospermie
Rechercher la
Agglutinats + présence d'auto
anticorps
Si le résultat met en évidence des anomalies, il sera alors nécessaire de le vérifier sur un 2 °
spermogramme à 3 mois d'intervalle (durée de 74 jours de la spermatogenèse).
2. Explorations hormonales
À réaliser systématiquement en cas d'oligo- ou d'azoospermie.
L'exploration hormonale simple de l'homme comporte:
FSH et LH plasmatiques:
► des niveaux abaissés (habituellement FSH < 1 Ul/1, LH < 0,6 Ul/1) permettent
d'évoquer le diagnostic de déficit gonadotrope;
A. Chez la femme
1. Anovulation et dysovulation
Anovulation
► Très fréquent, 20 % des cas d'infécondité du couple.
► Aménorrhée ou irrégularité menstruelle (Item 40).
► Des cycles réguliers n'éliminent pas une anovulation, la courbe de température
ou le dosage de progestérone en 2• partie de cycle orienteront vers ce diagnostic.
2. Obstacles mécaniques
■ Anomalies du col utérin et insuffisance de glaire cervicale (sténose après conisation,
curetage).
■ Obstacles et anomalies utérines (cloisons, synéchies).
Il Obstacles tubaires: cause majeure d'infertilité feminine, le plus souvent secondaire
à une salpingite (à chlamydia), traumatisme chirugical, ou endométriose.
3. Endométriose
Des lésions d'endométriose sont retrouvées chez 50 % des femmes consultants pour
infertilité idiopathique.
B. Chez l'homme
1. Azoospermie
Prendre en considération le volume testiculaire, la FSH, les signes d'hypogonadisme et les
antécédents.
Azoospermies sécrétoires ou non obstructives:
► diagnostic:
• volume testiculaire< 15 ml;
• FSH augmentée;
• inhibine B abaissée:
syndrome de Klinefelter;
microdélétion du chromosome Y;
chimiothérapie, radiothérapie.
■ Oligoasthénothératospermie (OAT)
Chapitre 8. Biologie féminine, biologie du couple et de la grossesse - ITEM 37 305
► diagnostic:
► étiologies:
• varicocèles;
• infectieuses;
• cryptorchidie;
• mode de vie: tabac, canabis, profession (toxiques);
• génétiques;
• idiopathiques.
VIII. TRAITEMENTS
A. L'homme
■ Chirurgie réparatrice.
■ Perméabilisation des canaux éjaculateurs.
■ Cure de varicocèle.
■ Assistance médicale à la procréation :
► insémination;
► FIV ICSI;
► TESE si azoospermie suivie d'une ICSI.
B. La femme
• Chirurgie tubaire.
• Myomectomie.
• Insémination.
• Induction de l'ovulation .
• FIV/ICSI.
310 AMÉNORRHÉE
■ Inhibine B
► Peptide inhibant la sécrétion de la FSH par les cellules gonadotropes. Elle est
synthétisée par les cellules de la granulosa sous l'effet de la FSH.
► Un bon indicateur du pool de cellules de la granulosa.
■ Caryotype :
► Rechercher une dissociation entre le sexe chromosomique et le phénotype sexuel.
► Rechercher une mosaïque, ou une anomalie des gonosomes.
Ill. CONCLUSION
L'aménorrhée est le symptôme d'un dysfonctionnement de l'axe hypothalamo-hypophysaire,
des gonades ou de l'utérus. En dehors de la grossesse et de la ménopause, l'aménorrhée
est toujours pathologique et justifie un bilan chez l'adolescente et la femme adulte. Il est
courant de différencier les aménorrhées primaires des aménorrhées secondaires. Un bilan
clinique est essentiel mais c'est le bilan biologique qui évalue l'activité de l'axe gonadotrope.
Il faudra toujours éliminer une cause tumorale notamment de la région hypothalamo
hypophysaire. Les causes ovariennes sont dominées par les ovaires micropolykystiques.
Chez la jeune adolescente, les causes génétiques doivent systématiquement être recherchées.
Aménorrhée Primaire
Absence de règle après 16
ans
Tumeur Hyperthyroïdie
hypothalamo Maladies
hypophysaire Hypogonadisme
chroniques
hypogonadotrope congénital
Hyperprolactinémie
Chapitre 8. Biologie féminine, biologie du couple et de la grossesse - ITEM 40 311
Aménorrhée Secondaire
Si déficit antéhypophysaire
associé : syndrome de
Sheehan
CHAPITRE 9. BIOLOGIE DU VIEILLISSEMENT
ITEM 115
VIEILLISSEMENT NORMAL
ASPECTS BIOLOGIQUES
Manuel SANCHEZ, Matthieu LILAMAND, Cédric VILLAIN et Eric PAUTAS
1. DÉFINITIONS ET CONCEPTS
A. Le vieillissement
Le vieillissement est un phénomène continu et progressif, résultant d'interactions entre des facteurs
génétiques, sociaux ou environnementaux auxquels sont soumis un organisme tout au long de sa vie. La
fonction des organes tend à décliner au fil du temps. Néanmoins, cette perte de fonction doit être distinguée
des maladies qui surviennent lors de l'avancée en âge.
B. Biologie du vieillissement
L'espérance de vie à la naissance en France a quasiment doublé au cours du xx• siècle, atteignant en 2019
85,4 années pour les femmes et 79,2 pour les hommes. L'espérance de vie est encore d'environ 27 ans pour
une femme de 60 ans et 23 ans pour un homme du même âge.
On distingue les effets du vieillissement normal sur le fonctionnement des organes, du vieillissement
pathologique lié aux pathologies aiguës ou chroniques. Cette évaluation permet d'estimer l'âge
«physiologique» d'un individu, qui conditionnera notamment le degré d'intensité de la prise en
charge de certaines pathologies ou encore les stratégies de prévention primaire et secondaire à
envisager. La recherche en biologie du vieillissement obéit aux mêmes principes, à l'échelle cellulaire
ou moléculaire. Au fil des années, des lésions de l'ADN s'accumulent. Ces dommages résultent de
mécanismes endogènes (défaut de réplication cellulaire, production de radicaux libres) et exogènes.
En parallèle, on observe une diminution des capacités de régulation et de réparation de l'organisme,
qui potentialise le nombre et la sévérité des altérations. Cet équilibre, qui détermine la cadence du
vieillissement à l'échelle cellulaire, dépend de facteurs génétiques et environnementaux.
314 Vieillissement normal : aspects biologiques
B. Altérations épigénétiques
Ces altérations consistent en des modifications de méthylation de l'ADN, de l'acétylation des
histones ou encore du remodelage de la chromatine. La méthylation de l'ADN sur certains
sites est d'ailleurs perçue comme une « horloge biologique» du vieillissement, c'est-à-dire
un marqueur de l'âge biologique d'un organisme. Il s'agit donc de modifications réversibles
de l'activité des gènes pouvant se transmettre au cours des mitoses. Elles jouent un rôle
important dans les rythmes du vieillissement biologique et la longévité.
Chapitre 9. Biologie du vieillissement - ITEM 115 315
A. Appareil cardio-respiratoire
1. Cœur et vaisseaux
Le vieillissement cardiaque, notamment la fibrose myocardique, entraîne une diminution
de la compliance ventriculaire et donc du remplissage passif au cours de la diastole. En
revanche, en l'absence de pathologie surajoutée, la fraction d'éjection du ventricule gauche
et le débit cardiaque demeurent préservés. Le risque d'insuffisance cardiaque déclenchée
par un facteur exogène (hypertension, syndrome coronaire, anémie) augmente avec l'âge.
Les modifications structurelles du myocarde favorisent également la survenue de troubles
du rythme ou de la conduction.
Sur le plan vasculaire, on observe une augmentation de la rigidité de l'arbre artériel et
un épaississement de la média des artères avec l'âge. Ces modifications s'accompagnent
d'une dysfonction endothéliale. La rigidité artérielle augmente la post-charge soumise
au ventricule gauche et diminue la perfusion coronarienne. Il en résulte un risque accru
d'événements cardiovasculaires (AVC, syndrome coronaire aigu).
Sur le plan du risque thrombotique, artériel comme veineux, le vieillissement physiologique
est associé à un état d'hypercoagulabilité lié notamment à l'état inflammatoire chronique
et à une dysfonction endothéliale mais aussi à un certain nombre de pathologies ou de
situations aiguës à haut risque thrombotique plus fréquemment rencontrées dans le grandâge.
Anomalies biologiques.
► Les dosages des peptides natriurétiques : Brain Natriuretic Peptide (BNP)
et N-Terminal pro-brain natriuretic peptide (N T pro-BNP), sécrétés par les
cardiomyocytes sont prescrits dans les symptomatologies atypiques d'insuf
fisance cardiaque. Chez le sujet âgé, leur production augmente de façon
physiologique. Des seuils de 400 ng/1 et 1800 ng/1 ont été proposés pour les
sujets de plus de 75 ans. Néanmoins, du fait de l'existence d'autres paramètres
pouvant fausser l'interprétation du dosage (insuffisance rénale, obésité) il
n'est pas recommandé de se fier exclusivement à ces valeurs; c'est l'examen
clinique qui guide la thérapeutique.
► Les D-dimères sont des produits de dégradation spécifiques de la fibrine,
dont l'augmentation du taux circulant traduit un processus de fibrinolyse
réactionnelle à une activation de la coagulation, comme en cas d'évènement
thromboembolique veineux (ETEV). Ils sont utilisés dans les arbres diagnos
tiques d'exclusion de thrombose veineuse profonde ou d'embolie pulmonaire
avec un seuil d'exclusion fixé à 500 ng/ml pour la plupart des techniques de
dosage. Les situations à l'origine d'une augmentation de la production de
D-dimères (processus inflammatoire ou néoplasique, insuffisance rénale,
hématome) sont plus fréquentes chez le patient âgé expliquant une mauvaise
spécificité de ce seuil pour l'exclusion d'un ETEV dans cette population.
Un seuil ajusté à l'âge a été validé pour garder une bonne valeur prédictive
négative dans cette situation : seuil d'exclusion = âge x 10 ng/ml (par exemple,
pour un sujet de 80 ans, le seuil est de 800 ng/ml).
2. Appareil respiratoire
Le vieillissement de l'appareil respiratoire est caractérisé par une rigidification de la cage
thoracique et un affaiblissement des muscles respiratoires. Les voies aériennes distales
(bronchioles) voient leur diamètre diminuer et tendent à se collaber. Les volumes pulmonaires
mobilisables (capacité vitale, débit expiratoire de pointe) diminuent avec l'âge alors que le
volume résiduel augmente. Les échanges gazeux se modifient avec une baisse linéaire de
316 Vieillissement normal : aspects biologiques
la PaO2 jusqu'à l'âge de 70 ans et une diminution des échanges gazeux, notamment de la
capacité de diffusion du monoxyde de carbone.
Anomalies biologiques.
► La gazométrie artérielle s'interprète de la même façon que chez le sujet
jeune, à l'exception de la PaO2 : N > 73 mmHg chez le sujet jeune; N > 105 -
(âge/2) mmHg chez le sujet âgé.
B. Reins
Le vieillissement rénal est caractérisé par une diminution du nombre de néphrons
fonctionnels (néphrosclérose), une diminution de la taille des reins et une diminution du
débit sanguin rénal. Ainsi, le débit de filtration glomérulaire (DFG) diminue d'environ
10 ml/min tous les 10 ans après l'âge de 40 ans.
Un défaut de régulation du stock sodé apparaît également au cours du vieillissement :
défaut d'adaptation en cas de restriction sodée avec un risque accru de déshydratation
extra-cellulaire et un défaut d'élimination d'une surcharge sodée exogène avec risque accru
de surcharge volémique. En outre, il existe une perte de la capacité de concentration et
de dilution des urines avec l'âge aboutissant à une moindre adaptation aux variations du
bilan de l'eau. Associé à la diminution de la sensation de soif avec l'âge, il existe un risque
accru de dysnatrémie. Une diminution de l'activité du système rénine angiotensine est
également observée avec l'âge aboutissant à un risque accru d' hyperkaliémie.
Anomalies biologiques.
► Tout comme chez le sujet jeune, les formules MORD (Modification ofDiet in Renal
Disease) et CKD-EPI (Chronic Kidney Disease - Epidemiology Collaboration)
sont recommandées pour l'estimation du DFG dans le diagnostic de maladie rénale
chronique. Les mêmes seuils sont retenus chez le sujet âgé pour la classification
de la maladie rénale chronique.
► La clairance de la créatinine peut être estimée par la formule de Cockcroft et
Gault qui prend en compte le poids et n'est pas indexée sur la surface corporelle.
Cette formule n'est pas recommandée pour le diagnostic de maladie rénale chro
nique mais elle reste actuellement recommandée par la Haute Autorité de Santé
pour l'adaptation posologique des médicaments à élimination rénale.
► Les valeurs seuils de protéinurie sont inchangées avec l'âge tout comme les
normes de la natrémie [135-145] mmol/1.
C. Prostate
Le vieillissement s'accompagne d'une augmentation du volume prostatique. De plus, 80 %
des hommes de 80 ans développent une hypertrophie bénigne de prostate, sous l'effet des
androgènes. Celle-ci peut être responsable d'un obstacle par compression circulaire de
l'urètre entraînait une réaction vésicale, qui se traduit par des signes fonctionnels irritatifs
et obstructifs.
L'âge est également un facteur de risque de cancer de la prostate. Il s'agit du cancer masculin
le plus fréquent, atteignant environ un homme sur six au cours de son existence. D'évolution
lente, il ne fait pas l'objet d'une politique de dépistage de masse en France.
Anomalies biologiques.
► La concentration de l'antigène prostatique spécifique (PSA, prostate specific
antigen) augmente en cas d'adénome et a fortiori en cas de cancer de la prostate.
De nombreux facteurs (sondage urétral, prostatite, toucher rectal) peuvent
entraîner une élévation transitoire du PSA qui doit motiver un contrôle, à
distance du dosage.
Chapitre 9. Biologie du vieillissement - ITEM 115 317
2. Thyroïde
On observe avec le vieillissement une baisse du volume fonctionnel de la thyroïde
(fibrose, nodularisation, infiltrat lymphocytaire) et une élévation physiologique modeste
de la thyréostimuline TSH. L'hypothyroïdie est une pathologie fréquente de l'adulte âgé;
l'hyperthyroïdie est plus rare et volontiers iatrogène (amiodarone).
Anomalies biologiques.
► Les signes d'hypothyroïdie sont souvent atypiques chez les sujets âgés devant
faire proposer un dosage de la TSH devant une altération de l'état général ou
un déclin cognitif par exemple.
► Une élévation modérée de la TSH (< 10 mUI/1) est fréquente chez les personnes
âgées et ne nécessite généralement pas de traitement.
► En cas de suspicion d'hypothyroïdie, le dosage de T4 libre n'est recommandé
qu'en cas d'élévation significative de la TSH.
► Les perturbations de la TSH associées à des hormones thyroïdiennes normales sont
fréquentes en situation de stress (baisse de la TSH) et de convalescence (élévation
de la TSH). On parle de dysthyroïdie infra-clinique en cas de persistance de ces
anomalies à 3 mois.
3. Bilan phospho-calcique
L'hypercalcémie est une anomalie fréquemment rencontrée chez le sujet âgé. Les deux
causes principales (correspondant à 90 % des cas) sont l'hyperparathyroïdie primitive et les
cancers (myélome, cancer solides avec métastases osseuses ou sécrétion de parathormone
related-peptide). Néanmoins certaines précautions doivent être prises.
Anomalies biologiques.
► L'hypoalbuminémie est fréquente chez la personne âgée et la calcémie doit donc
être constamment corrigée à la concentration d'albumine.
► Le diagnostic d'hyperparathyroïdie repose sur un dosage de Parathormone 1-84
(PTHl-84) sur un prélèvement, simultanément au dosage de la calcémie en raison
des fluctuations importantes de sa sécrétion.
► Les carences en vitamine D entraînent une élévation de la PTHl-84 ce qui
peut conduire à un diagnostic abusif d'hyperparathyroïdie primitive. Le dosage
calcium-PTH doit être alors contrôlé après recharge en vitamine D.
318 Vieillissement normal : aspects biologiques
E. Appareil digestif
Les modifications du tube digestif au cours du vieillissement sont susceptibles d'impacter
la prise alimentaire, la digestion et l'absorption des nutriments, favorisant ainsi le risque
de dénutrition. L'anorexie est fréquente chez les personnes âgées, et favorisée par une
diminution de la perception des goûts et des odeurs. La diminution du flux salivaire
retarde la digestion des aliments et participe à l'altération de l'état buccodentaire et aux
troubles de la déglutition.
Le péristaltisme intestinal est diminué, et l'excès de réabsorption d'eau au niveau colique
favorise ainsi la constipation, la pullulation microbienne et l'inconfort intestinal.
Anomalies biologiques.
► L'hypochlorhydrie gastrique limite la digestion des protéines et l'absorption de
certains micronutriments (vitamine Bl2, calcium, fer).
► Une diminution de la masse et du débit sanguin hépatique serait observée au cours
du vieillissement. Néanmoins aucune modification notable des tests hépatiques
n'est observée au cours du vieillissement hépatique normal.
■ Anomalies biologiques
► Les anémies sont souvent multifactorielles et nécessitent un bilan complet :
• la carence martiale est fréquente, y compris en absence <l'anémie ou de
microcytose. Le bilan de carence martiale repose sur les dosages du coef
ficient de saturation de la transferrine et de la ferritinémie, couplés à
celui de la CRP pour rechercher une étiologie inflammatoire(ferritinémie
alors augmentée);
• les carences en vitamine B12 et folates sont fréquentes, sans qu'il n'y ait
forcément de retentissement hématologique;
• une hypothyroïdie doit être recherchée;
• l'insuffisance rénale chronique ( généralement avec un DFG
estimé < 40 ml/min/1,73 m2 ) peut causer une anémie par carence en
érythropoïétine(EPO). Le dosage d'EPO n'est pas recommandé en pratique
clinique;
• un syndrome myélodysplasique est suspecté en cas d'atteinte des autres
lignées hématopoïétiques et d'anomalies cytonucléaires au frottis sanguin
après correction des carences vitaminiques ou d'une dysthyroïdie. Le
myélogramme confirme le diagnostic.
2. Système immunitaire
Le vieillissement s'accompagne également de modifications du système immunitaire.
L'augmentation du compartiment mémoire et la baisse du nombre de cellules naïves
est à l'origine d'une restriction du répertoire T. On observe également une baisse des
concentrations et de l'affinité des anticorps. Cette immuno-sénescence entraîne notamment
une réponse vaccinale diminuée nécessitant l'adaptation du calendrier vaccinal à partir
de 60 ans.
■ Anomalies biologiques.
► L'électrophorèse des protéines plasmatiques peut retrouver des anomalies
notamment des gammapathies, souvent de manière fortuite.
• Les gammapathies monoclonales de signification indéterminée ou MGUS
(3-4 % des patients après 50 ans), sont définies par des pics monoclonaux
de faible importance (gammaglobulines < 30 g/1) sans signe clinique ou
biologique(anémie, hypercalcémie ou insuffisance rénale), ni radiologique,
évocateurs d'un myélome. Le myélogramme retrouve alors un taux de
plasmocytes < 10 %. Les facteurs pronostiques d'évolution d'un MGUS vers
un myélome sont une hypergammaglobulinémie > 15 g/1, un clone IgA ou
IgM et un rapport de chaînes légères kappa/lambda anormal.
• Une hypogammaglobulinémie doit également faire rechercher un
myélome à chaînes légères.
• Une hyperlymphocytose B(à une concentration de lymphocytes CD19+
5xl09/1) associée à une autre cytopénie doit faire évoquer une leucémie
lymphoïde chronique. Elle s'accompagne d'un syndrome tumoral clinique
(adénopathies et splénomégalie). Un mauvais pronostic repose en partie sur
l'importance de l'anémie(< 10 g/dL) et de la thrombopénie(< 100000/mm3)
ou l'élévation de la �2-microglobuline plasmatique.
ITEM 123
HYPERTROPHIE BÉNIGNE
DE LA PROSTATE
Virginie VLAEMINCK-GUILLEM
1. INTRODUCTION
L'hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) se caractérise par une augmentation du volume de la
prostate, liée à la fois à une augmentation du nombre de cellules prostatiques et une augmentation
de leur taille. Tous les composants cellulaires du tissu prostatique sont habituellement concernés : les
cellules épithéliales et les cellules stromales (fibroblastes et cellules musculaires lisses). Elle se manifeste
initialement comme une hyperplasie nodulaire; la coalescence des nodules d'hyperplasie aboutissant à la
constitution d'une tumeur bénigne, l'adénome de la prostate. Les nodules hyperplasiques se développent
dans la zone transitionnelle de la prostate (zone centrale péri-urétrale, sous-vésicale). Du fait du caractère
difficilement extensible de la capsule prostatique, l'augmentation du volume prostatique s'accompagne d'une
compression de l'urètre dans sa partie intra-prostatique. La perte d'élasticité de l'urètre participe aussi à
l'apparition et au développement des symptômes.
Les symptômes sont essentiellement les symptômes urinaires du bas appareil, incluant un retard au démarrage
de la miction, une dysurie, une faiblesse du jet, des gouttes retardataires, une pollakiurie diurne et nocturne,
et des urgenturies (impériosités urinaires), avec parfois des brûlures mictionnelles. Il n'y a pas forcément de
corrélation entre les symptômes et l'importance de l'hypertrophie prostatique. Une forte dégradation de la
qualité de vie est possible. La complication aiguë est la rétention aiguë d'urine. Les complications chroniques
apparaissent aux dépens de la vessie (vessie de lutte par hypertrophie du detrusor, calcul urinaire, diverticule
vésical) et du haut appareil urinaire (insuffisance rénale chronique obstructive).
L'HBP est un phénomène universel de l'homme vieillissant, survenant à partir de 45 ans. On estime
que 50% des hommes de 50ans ont une HBP et que la proportion augmente avec l'âge : 70% à 60ans,
90% à 80ans.
Chapitre 9. Biologie du vieillissement - ITEM 123 321
Sur le plan physiopathologique, les androgènes (testostérone et son métabolite actif, la di
hydro-testostérone) jouent un rôle fondamental. Ils sont responsables du développement
de la prostate embryonnaire et sont nécessaires à son maintien ultérieur en agissant sur la
prolifération des cellules-souches, leur différenciation en cellules épithéliales et leur mort
par apoptose. Les androgènes stimulent aussi la production, par les cellules stromales, de
facteurs de croissance. D'autres facteurs interviennent dans la physiopathologie de l'HBP
comme la dérégulation des facteurs de croissance, des anomalies de l'interaction entre
l'épithélium et le stroma et une inhibition de l'apoptose.
A. ECBU
Cet examen vise à éliminer une infection urinaire qui serait un diagnostic différentiel
pour les symptômes urinaires du bas appareil ou une rétention urinaire chronique ou
aiguë dues à l'HBP.
B. CREATININEMIE
Cet examen vise à détecter une insuffisance rénale chronique obstructive, compliquant
l'HBP.
le sang est augmenté avec une concentration sanguine trois plus importante que dans
le tissu normal (c'est trente fois plus dans le cancer de la prostate car la désorganisation
architecturale y est encore plus marquée).
Le PSA est présent dans la prostate et les fluides biologiques sous plusieurs formes.
Dans le sang, on distingue la forme majoritaire (70-90 %), correspondant à un
complexe du PSA avec des inhibiteurs de protéases (l'al-antichymotrypsine surtout,
l'a2-macroglobuline, l'al-protease inhibitor ou al-antitrypsine) et une forme libre,
non complexée. L'immunodosage du PSA total mesure les formes complexées et la
forme libre. La forme libre peut être dosée séparément.
L'importance de la concentration sérique du PSA peut être utilisée pour prédire la rapidité
d'évolution d'une HBP et ainsi choisir la meilleure stratégie thérapeutique possible.
L'association d'un PSA supérieur à 1,5 ng/ml à un volume prostatique élevé et des
symptômes urinaires du bas appareil est évocatrice d'une HBP évolutive qui nécessite
un traitement plus incisif: inhibiteurs de la Sa-réductase plutôt qu'alpha-bloquants.
FICHE FLASH
ù Le diagnostic d'hypertrophie bénigne de la prostate est essentiellement clinique.
CJ Le dosage sérique du PSA est utile au diagnostic de cancer de la prostate.
D Un toucher rectal suspect (nodule ou irrégularité) et/ou un PSA sérique supérieur à 4 ng/ml doivent
conduire à la réalisation de biopsies prostatiques même si un contexte d'HBP est présent ou hautement
probable.
D Associé à un volume prostatique élevé et des symptômes du bas appareil urinaire, un PSA supérieur à
1,5 ng/1 est un indicateur d'une HBP évolutive, pouvant être traitée par un inhibiteur de la Sa-réductase.
o La prise d'un inhibiteur de la Sa-réductase réduit le PSA sérique de moitié et cette réduction doit être
prise en compte dans la confrontation avec le seuil de décision de la réalisation des biopsies.
CHAPITRE 1 Ü. BIOLOGIE DE L'INFLAMMATION, BIOLOGIE OU FER
INTRODUCTION GENERALE
I' I'
Jean-Claude LECRON
L'inflammation constitue l'ensemble des réactions locales provoquées par divers agents (physiques
ou chimiques), par des germes pathogènes ou encore des cellules tumorales et déclenchées par les
tissus en réponse à une agression. L'objectif est d'éliminer les «agents inducteurs», protéger les tissus
environnants puis nettoyer et réparer le tissu lésé. C'est un mécanisme très général, dont les symptômes
«Chaleur-Rougeur-Tuméfaction-Douleur» décrits avec pertinence il y a 2000 ans, restent d'actualité
aujourd'hui.
Bien que certaines de ses manifestations puissent être délétères, l'inflammation est un système de défense, et
non une maladie en soi (ange ou démon). C'est en décrivant les phagocytes (polynucléaires et macrophages)
et la phagocytose» à la fin du xrx• siècle, qu'Elie Metchnikoff initia la compréhension des mécanismes
sous-jacents de l'inflammation.
Dans cette continuité, les nombreux processus associés à l'inflammation décrits au cours du xx• siècle:
vasodilatation des capillaires, extravasation de fluides, chimiotactisme, augmentation du débit sanguin
rendirent compte des manifestations cliniques. Une étape importante fut aussi la découverte des facteurs
solubles responsables de l'induction et du contrôle de la réponse inflammatoire, comme les médiateurs
dérivés de l'acide arachidonique, les amines vasoactives et des protéines messagères de l'inflammation:
les cytokines proinflammatoires (en particulier IL-la et �, IL-6, TNF, IL-17 et IL-22) et les chimiokines,
produites localement, qui vont recruter les cellules de l'immunité innée sur le site inflammatoire.
Comment des situations aussi variées que des infections, des lésions, ou encore des tumeurs peuvent conduire
à un mécanisme aussi général qu'une réponse inflammatoire. Dans les années 1990, C Janeway prédisait que
la détection des pathogènes pouvait passer par des voies indépendantes des lymphocytes T et B, responsables
de l'immunité spécifique. Ce regain d'intérêt pour l'immunité innée a permis d'identifier de multiples
molécules inductrices de l'inflammation (exogènes: pathogen associated molecular patterns/PAMPS tels
les lipopolysaccharides bactériens ou LPS) ou endogènes (danger associated molecular patterns/DAMPS, ou
alarmines, telle l'IL-la). Ces facteurs, en condition physiologique, ne sont pas en contact avec leurs «senseurs».
En parallèle furent décrit de nombreux récepteurs à ces facteurs, membranaires ou cytoplasmiques, les
récepteurs de reconnaissance de motifs ou PRR (pattern recognition receptors), tel les NLR (Nod-Like
Receptor) ou les TLR (Toll-Like Receptor).
Depuis, fut caractérisé l'inflammasome, un complexe protéique dont l'activation conduit à une inflammation
(liée en particulier à l'IL-1�), et au concept de maladies auto-inflammatoires (qui n'implique pas l'immunité
adaptative, contrairement aux maladies auto-immunes), et occupe une importance croissante dans la
classification actuelle des pathologies inflammatoires.
À la lumière de ces différentes avancées, on peut étudier la réaction inflammatoire en différentes
phases successives :
l'induction, par exemple par du LPS ou des alarmines;
Il la réception des signaux, par exemple par un TLR, ou l'inflammasome;
■ l'amplification et la synchronisation de la réponse, en particulier liées aux cytokines proinflam
matoires (phase exponentielle de mise en place de la réaction inflammatoire);
■ la phase effectrice, via le recrutement sur le site inflammatoire des polynucléaires, de peptides
antibactériens, de protéases tissulaires et de protéines sériques telles les opsonines (c'est cette
326 Chapitre 10. Biologie de l'inflammation, biologie du fer
phase que l'on pourra identifier en biologie, par exemple en dosant la CRP
(C-Réactive Protéine) sérique;
la phase de contrôle et la résolution de l'inflammation, par exemple la cicatrisation.
Selon le contexte, l'inflammation aiguë non résolue évoluera vers une inflammation
chronique, qui pourra se pérenniser. Il sera donc important de pouvoir caractériser et suivre
l'évolution de la réponse inflammatoire. Si une réponse inflammatoire est souvent bénéfique,
une réponse exacerbée, non contrôlée, systémique conduira à un « orage cytokinique»
délétère (Syndrome de réponse inflammatoire systémique ou SIRS, choc septique)
Selon les signaux inducteurs présents ou encore l'insuffisance de la réponse innée de
«première ligne», la réponse inflammatoire pourra associer une réponse adaptative, mettant
en jeu une activation antigénique des lymphocytes T et B et leurs réponses effectrices.
L'inflammation est avant tout un mécanisme tissulaire. Il n'existe donc pas de
marqueur(s) biochimique(s) systémique(s) universel(s) témoin de l'inflammation, son
origine, sa localisation, son intensité, ou son évolution. Toutefois, il existe plusieurs
effecteurs de la réaction inflammatoire, dont les protéines dites « de l'inflammation »,
comme la CRP, produite par le foie et véhiculée dans le sang. La sensibilité, la spécificité
ainsi que la facilité de son dosage en urgence en ont fait aujourd'hui le marqueur
sérique de choix de l'inflammation.
L'électrophorèse des protides sériques (EPS) constitue aussi le témoin d'un syndrome
inflammatoire, ainsi que le dosage d'autres protéines de l'inflammation, telles que le
sérum amyloïde protéine (SAA), la procalcitonine (PCT), le fibrinogène, l'haptoglobine,
les fractions du complément, ou encore l'albumine qui sera diminuée.
Les caractéristiques de la production de la CRP associées à sa demi-vie permettent de suivre
aisément la cinétique de la réponse inflammatoire, incluant la réponse au traitement. La
sensibilité et la spécificité de la CRP sont excellentes pour détecter l'inflammation, mais
elle ne permet pas d'en préciser l'étiologie. En associant le dosage d'autres marqueurs
biochimiques (PCT, l'albumine), ou l'EPS, il est possible d'affiner l'analyse.
Rappelons que l'étude biologique de l'inflammation a été marquée depuis environ un
siècle par la mesure de la vitesse de sédimentation (VS) du sang, accélérée en conditions
inflammatoire. Cette mesure de la VS a été automatisée et reste très pratiquée. Elle est
supplantée aujourd'hui par le dosage sérique de la CRP.
L'inflammation est un mécanisme très général, transversal, lié à différents cadres
nosologiques. Pour illustration, 1/3 des ITEMS de l'ECN relèvent plus ou moins
directement de l'inflammation. Cela comprend les maladies infectieuses, les maladies
auto-immunes et auto-inflammatoires, les allergies, les cancers, les traumatismes,
les maladies neurodégénératives, les maladies cardio-vasculaires, des maladies
génétiques. La présence d'un SI est un point d'appel important, et sa caractérisation doit
pouvoir être établi en urgence (exemple: le choc septique). La partie inflammation de ce
chapitre sera principalement consacrée à l'apport du biochimiste à l'UE7 « Inflammation
Immunopathologie-poumon-sang», en particulier l'item 181 «Réaction inflammatoire:
aspects biologiques et cliniques, conduite à tenir», mais également l'item 217 «amylose»,
pour lequel des examens biochimiques supplémentaires seront requis.
Au-delà des marqueurs évoqués ci-dessus, d'autres marqueurs sont modifiés par
l'inflammation. Par exemple, la biologie de l'inflammation et biologie du fer peuvent être
liées dans le cadre de l'anémie inflammatoire (ou ferriprive).
ITEM 181
REACTION INFLAMMATOIRE :
ASPECTS BIOLOGIQUES
ET CLINIQUES. CONDUITE A TENIR
Jean-Claude LECRON
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Protéines totales = 156,1 g/1 Protéines totales = 59,4 g/1 Rapp. A/G m 1,08
Nom % Normales% g/1 Normales g/1 Nom % NOrmales% g/1 Normales g/1
Albumine 60,9 55,8 • 66,1 40,3 40,2 • 47,6 Albumine 52,0 < 55,8 • 66,1 30,9 40,2 • 47,6
Alpha 1 4,2 2,9 • 4,9 2,8 2,1 • 3,5 Alpha 1 7,6 > 2,9· 4,9 4,5 2,1 • 3,5
Alpha 2 10,3 7,1 • 11,8 6,8 5,1 • 8,5 Alpha 2 16,6 > 7,1 • 11,8 9,9 5,1 • 8,5
Beta 1 6,6 4,7 • 7,2 4,4 3,4 5,2 Betal 5,2 4,7 • 7,2 3,1 3,4 • 5,2
Beta 2 5,2 3,2 • 6,5 3,4 2,3 4,7 Beta2 6,3 3,2 · 6,5 3,7 2,3 · 4,7
Gamma 12,8 11,1 · 18,8 8,5 8,0 · 13,5 Gamma 12,3 11,1 · 18,8 7,3 8,0 · 13,5
Le fibrotest est un index de fibrose non invasif calculé à partir des concentra
tions sériques de l'haptoglobine, de l'a2 -macroglobuline, de la bilirubine, de
l'apolipoprotéine Al et des yGT). Il est proposé comme alternative à la ponction
biopsique hépatique chez les patients atteints d'hépatite C non traitée (HAS,
2008). L'index calculé est de O à 1, avec des correspondances pour les stades de
fibrose (score Métavir).
■ Marqueurs d'auto-immunité, si l'on suspecte que le SI est dû à une maladie de système.
Il Tryptase et histamine, si l'on suspecte un choc anaphylactique.
Fiche flash
o L'inflammation est un mécanisme général de défense, non spécifique et le plus souvent tissulaire.
o L'inflammation met en jeu l'immunité innée, associée ou non à une réponse acquise/adaptative.
O La présence d'une inflammation ne préjuge pas de son étiologie.
o Le dosage sérique de la CRP est le marqueur de choix de l'inflammation, de son intensité et de son
évolution (suivi du traitement, résolution).
O L'électrophorèse des protéines sériques (EPS) permet d'évaluer un syndrome inflammatoire.
□ L'association du dosage de la CRP à l'EPS renseigne sur le caractère chronique ou aigu du SI.
D Le dosage des protéines de l'inflammation (en particulier albumine, haptoglobine, l'a1 anti-trypsine,
orosomucoïde, fibrinogène) peut apporter des indications complémentaires sur des mécanismes associés
(hémolyse, insuffisance hépatique, syndrome néphrotique).
O Associée à celui de la CRP, le dosage de la procalcitonine contribue à distinguer les infections bactériennes,
où elle est augmentée, des infections non bactériennes ou d'une inflammation non associée à une infection.
D Intérêt du dosage de la SAA chez les patients atteints d'amylose AA, une complication possible d'une
inflammation chronique.
O Les traitements anti-inflammatoires ciblent directement ou indirectement les médiateurs de l'inflammation
(glucocorticoïdes, AINS, biothérapies anti-cytokines).
334
□ Cytokines pro-inflammatoires (en particulier IL-6 et IL-8). Leur dosage est facile aujourd'hui
dans le plasma et a suscité de nombreux espoirs, en particulier pour les SI aigus en pédiatrie
et en réanimation médicale. Cependant, leur intérêt est très limité car leur demi-vie est
courte. De plus, notons que TNF et IL-1 sont détectés de façon aléatoire dans le plasma.
O Une exception: le dosage des IL-6 et IL-10 dans les liquides oculaires (liquide de vitrée ou de
la chambre antérieure): un rapport IL-10/IL-6 > 1 est en faveur d'une localisation oculaire
d'un lymphome (en évaluation pour les lymphomes à localisation cérébrale).
□ Une étude transcriptomique ciblée ou systémique du tissu inflammatoire peut être très
informative, mais invasive et dépendante de l'accessibilité du tissu.
D En particulier, on peut évaluer la réponse inflammatoire limitée à une réponse innée
(IL-6, IL-8, TNF, IL-1) ou associée à une réponse adaptative. On peut alors caractériser le
profil de lymphocytes Th1 (immunité cellulaire), Th2 (immunité humorale), Th17 (cibles
tissulaires non-immunes).
□ Le contrôle et/ou la résolution de l'inflammation peut être évalué, en étudiant la production
d'IL-10 par les lymphocytes Treg, et d'IL-1RA par les monocytes.
D Étude ex vivo: il est possible d'étudier la production de cytokines spontanée ou induite des
cellules mononucléées du sang périphérique. Par exemple, la production d'IL-1 (3 oriente
vers des maladies auto-inflammatoires liées à un dysfonctionnement de l'inflammasome.
□ Pour les fièvres récurrentes héréditaires (FRH) qui sont des maladies auto-inflammatoires,
une étude génétique s'impose pour préciser leur nature. Cette analyse pourra orienter
vers un traitement spécifique.
D J.-M. Cavaillon, La Flamme Salvatrice, 2017.
D Medzhitov R., Nature, 2008.
U M. G. Netea et al., Nat lmmunol, 2017.
U Broderick et al., Ann. Rev. Pathol, 2015.
Chapitre 10. Biologie de l'inflammation, biologie du fer - QCM
QCM
► 3. Préciser les protéines qui sont augmentés au cours de la phase aiguë de l'inflamma
tion:
A. La CRP
B. IJnsuline
C L.:albumine
D. L.:haptoglobine
E. La ferritine
1. INTRODUCTION - GÉNÉRALITÉS
Le fer physiologique existe sous forme d'ions Fe2+ (fer ferreux) ou Fe3+ (fer ferrique). Le fer sous forme
libre (Fe2+) participe à des réactions d'oxydoréduction conduisant à la formation de radicaux libres et
au stress oxydatif en endommageant les constituants cellulaires. Pour éviter cette toxicité du fer libre,
l'organisme développe des systèmes protéiques compartimentés pour: -1) transporter le fer à travers les
membranes cellulaires ou dans le plasma associée à la transferrine, une protéine plasmatique de transport
vers les cellules: compartiment de transport; -2) le stocker sous une forme non toxique et facilement
mobilisable au sein de la ferritine, protéine majeure de réserve intracellulaire: le compartiment de réserve;
-3) l'utiliser sous une forme héminique (dans l'hémoglobine, la myoglobine et les enzymes respiratoires),
Chapitre 10. Biologie de l'inflammation, biologie du fer - ITEM 215 337
sous une forme de centres fer/soufre (Fe-S) assemblées dans la mitochondrie, ou sous une
forme de cofacteurs intégrés à plusieurs protéines mitochondriales et cytosoliques : le
compartiment fonctionnel (figure 1).
:;::::�:es
(3F:4S [
---.,,....,__,-• ydrogenases
eshydrogenases
,.,
Lipoxygenase
Phosphatase acide
Ribonucléotide réductase
- Hemoproteines :
Heme
[
--'.f'.f1-"-l.f�"'i�-..!. Hemoglobine
Myoglobines
Cytochromes
Enzymes oxyde-réduction
Figure 1. Compartiment fonctionnel du fer : Le fer pour quoi faire? Implication dans
le transport, le stockage du dioxygène et les réactions d'oxydo-réduction.
/
1 Tt
••
(1!)
Macro1,hugc
MT
F_,.
FI
B. Érythropoïèse
L'activité érythropoïétique de la moelle osseuse joue un rôle prépondérant dans le
contrôle de l'homéostasie du fer, du fait de la grande quantité de fer nécessaire à la
production journalière de 200 milliards de nouveaux globules rouges. Ce fer (environ 25-
30 mg/J), provient essentiellement du recyclage du fer héminique par les macrophages,
suite à l'érythrophagocytose et au catabolisme des globules rouges sénescents. Ce recyclage
est principalement contrôlé par l'hepcidine plasmatique.
Les précurseurs érythropoïétiques de la moelle osseuse acquièrent leur fer par endocytose
du complexe Fer(3 •)-Transferrine fixé sur le récepteur à la transferrine (RTf). Une fois dans
l'endosome, le fer est libéré de sa liaison à la Tf, puis dans le cytosol, la majorité du fer est
adressé à la mitochondrie pour participer à la synthèse de l'hème et à l'assemblage des
centres Fe-S.
Fe 2+ Fe 3+
H
F : N plus basses 10%
] à l'interprétation :
...!:!._)
csT• = (Tlx2S x 100
(. 2S-3S"
)
Figure 4 : Exploration Biologique du métabolisme du fer en pratique courante.
* : coefficient de saturation de la transferrine.; ** : récepteur soluble
de la Transferrine
Exploration biologique du compartiment de transport : fer sérique, transferrine,
calcul du coefficient de saturation de la transferrine (CST)
Le dosage du fer sérique circulant est d'un intérêt modeste. Les valeurs sont environ 10 %
plus basses chez la femme que chez l'homme et présentent d'importantes variations
nycthémérales, avec un maximum le matin et un minimum vers 20 heures. Le dosage du
fer sérique est cependant indispensable pour déterminer le coefficient de saturation
de la transferrine (CST). La Transferrine transporte le fer dans le plasma et les
liquides extracellulaires et peut fixer deux atomes de fer. Après avoir effectué le
dosage pondéral de la transferrine, on peut calculer la capacité totale de fixation de
la transferrine (CTF ou TIBC) :
340 Pathologie du fer: diagnostic d'une carence ou d'une surcharge en fer
Valeurs de références :
fer sérique : 12 à 30 µmol/l;
■ C TF : 45 à 65 µmol/l;
CST : 25 à 35 %.
Exploration biologique du compartiment de réserve : ferritinémie
La ferritine est une protéine de stockage du fer dans les tissus sous une forme disponible
pour la cellule. Le taux de ferritine, reflet des réserves tissulaires, est donc le meilleur
indicateur des réserves de fer de l'organisme. À titre indicatif les valeurs de référence sont
homme : 30 à 300 µg/l;
femme : 20 à 200 µg/l.
Les valeurs normales de ferritine pour des sujets sains dépendent de l'âge et du sexe.
Si la transferrine est une protéine "négative" de la réaction inflammatoire, (abaissée en cas
de syndrome inflammatoire, comme l'albumine), en revanche, la ferritine est une protéine
"positive" de la réaction inflammatoire, et augmente en cas de syndrome inflammatoire. Il
convient donc de coupler le dosage de la CRP à celui de la ferritine pour évaluer la présence
d'un syndrome inflammatoire majeur.
Ferrltlnémte t
CST<26%
l
,, 26% < CST< 45%
l
,1 CST >45%
CRP
augmentée
1 1 Normal f mais < 45%
Fer sérique
augmenté
l l l
Transaminases t
l
Inflammation Fer sérique normal :
et Hépatites, clrrose,
· Hépatosldén,.. Hémochromatoses
fer sérique " Myolyse (+CPK) HFE ou non HFE
dysmétabollque Hémolyse
- Ac:é<uloplasminémie
(+ RsTf) congénitale (rare) (+réticulocytes,
Haptoglobine)
A. Carence martiale
La carence en fer est la principale cause d'anémie dans le monde(cf. Item 109 : Anémie
chez l'adulte). Il faut distinguer la carence martiale absolue d'une carence fonctionnelle.
Une carence martiale est absolue lorsque les stocks de fer tissulaire sont insuffisants
ainsi que son utilisation, l'organisme étant en situation globale de carence. Le dosage
de la ferritine sérique est le marqueur de référence. Un taux de ferritine abaissé(< 15-
20 µg/1) permet à lui seul d'affirmer la carence martiale absolue. Elle peut-être la
conséquence d'une insuffisance d'apport en fer, d'une augmentation de l'utilisation
du fer ou de pertes sanguines anormales.
■ Ferritinémie.
► Elle est très élevée, sauf chez la femme en période d'activité génitale ou chez les
donneurs de sang réguliers.
■ Cirrhose hépatique
► Toutes les causes de cirrhose hépatique peuvent être responsables de surcharge
en fer. La gravité de ces pathologies est liée à l'atteinte hépatique. Il est rare que
la déplétion en fer améliore la pathologie; il faut traiter la cause de l'hépatopathie
(virus C par exemple).
L'atteinte cardiaque liée à la surcharge ferrique domine le pronostic vital, causant 2/3
des décès par insuffisance cardiaque congestive, troubles du rythme, cardiomyopathie
av ec altération de la fraction d'éjection et dilatation ventriculaire, ou mort subite. La
surcharge est corrélée au nombre de concentrés érythrocytaires reçus. Les saignées
ne peuvent être utilisées dans les maladies hématologiques en raison de l'anémie. Le
traitement chélateur permet de prévenir les complications cardiaques, hépatiques et
endocriniennes. L'objectif est l'obtention d'un taux de ferritine < 1000 µg/l.
c. Syndrome métabolique
C'est le principal diagnostic différentiel de l'hémochromatose génétique. La ferritinémie
peut atteindre 800 à 1500 µg/l, et proportionnelle au taux d'insulino-résistance d'origine
multifactorielle. Habituellement le CST est normal. Le traitement consiste à corriger les
troubles métaboliques (hypercholestérolémie, diabète). La perte de poids améliore ces
perturbations et en particulier diminue l'hyperferritinémie. Les saignées de faible volume
peuvent être une alternative thérapeutique (leur indication reste ici cependant discutée).
345
FICHE FLASH
D La carence martiale peut être:
► absolue (stock martial bas: la ferritinémie est basse);
► fonctionnelle (stock martial normal voire élévé: la ferritinémie n'est pas abaissée), mais l'utilisation
périphérique du fer est limitée (inflammation).
□ La moitié des anémies sont liées à une carence martiale.
□ Les maladies chroniques, notamment inflammatoires sont fréquemment à l'origine d'une carence martiale
fonctionnelle.
D Les marqueurs de la carence martiale les plus performants sont la ferritinémie et le coefficient de
saturation de la transferrine.
D L'hémochromatose héréditaire de type 1 est la plus fréquente des maladies de surcharge en fer d'origine
génétique.
r
• Une ferritine sérique diminuée est synonyme de carence martiale
• Une ferritine normale ne permet pas toujours d'exclure une
COMMRTIMfNT
carence martiale (Inflammation, cytolyse.•. )
DE RESERVE
• Une ferritlne augmentée en dehors de tout contexte
inflammatoire ou cytolytique doit être explorée
Le dosage des RsTf est un dosage qui garde son intérêt, en zime
COMPARTIMENT
Intention, dans l'appréciation de la carence martiale lorsque la
FONCTIONNEL
ferritinémie est ininterprétable
.,/
346
+ Devant une anémie microcytaire et avant de conclure à une carence martiale (même
si c'est souvent le cas) , il faut s'assurer qu'il ne s'agit pas d'une béta-thalassémie
hétérozygote (ferritinémie non abaissée, caractère régénératif de l'anémie) .
+ Devant une carence martiale isolée inexpliquée, il est nécessaire d'interroger le patient
à la recherche de troubles du comportement alimentaire, et savoir évoquer une maladie
cœliaque (dont la carence martiale peut être l'unique manifestation) .
Lasocki S, Lefebvre T, Mayeur C, Puy H, Mebazaa A, Gayat E; FROG-ICU study
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independent risk factor for death and poor quality of life at one year : an obser
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Lasocki S, Baron G, Driss F, Westerman M, Puy H, Boutron 1, Beaumont C, Montravers
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Brasse-Lagnel C, Karim Z, Letteron P, Bekri S, Bado A, Beaumont C. Intestinal DMT1
cotransporter is down-regulated by hepcidin via proteasome internalization and
degradation. Gastroenterology 2011; 140: 1261-71 e1.
Chapitre 10. Biologie de l'inflammation, biologie du fer - QCM
OCM
► 1. Parmi les propositions suivantes concernant les besoins et les apports de Fer, laquelle
est fausse?
A. La majorité du fer est utilisé pour la synthèse d'hémoglobine
B. Le fer héminique est mieux absorbé
C. Le stockage est majoritairement splénique (rate)
O. L.:absorption intestinale est régulée
E. Les besoins de la femme enceinte sont plus importants
Réponse: C
ITEM 288
CANCÉROGENESE,ONCOGÉNÉTIQUE
Damien VASSEUR, Jean-Baptiste OUDART, Claire RODRIGUEZ-LAFRASSE et Jonathan LOPEZ
1. INTRODUCTION
La cancérogenèse est un processus séquentiel d'accumulation d'anomalies moléculaires au sein d'une
cellule somatique (toutes les cellules de l'organisme à l'exception des gamètes). Elle conduit à une population
cellulaire hétérogène présentant un génome différent du reste de l'organisme. La génétique moléculaire
des cancers vise à caractériser ces anomalies moléculaires propres à la tumeur.
Cette carte d'identité de la tumeur est essentielle pour
■ contribuer au diagnostic en complément de la clinique, de l'anatomopathologie et de l'imagerie;
■ établir le pronostic;
■ orienter la stratégie de traitement;
■ permettre l'accès à une thérapie ciblée ou une immunothérapie;
■ permettre de suivre la maladie résiduelle.
Ces analyses moléculaires permettent aujourd'hui de personnaliser la prise en charge des patients atteints
de cancers.
On parle de génétique somatique des cancers (sur la tumeur) par opposition à la génétique germinale
ou constitutionnelle qui vise à caractériser le patrimoine génétique de l'individu (en général sur du sang).
L'oncogénétique constitutionnelle s'intéresse aux gènes prédisposant aux cancers devant des tableaux
cliniques évocateurs : plusieurs cas familiaux, survenue précoce, cancers multiples chez un même
individu. Les analyses d'oncogénétique ont pour objectif d'identifier les gènes en cause et d'affirmer
le caractère héréditaire de leur transmission. Ces analyses visent à améliorer la prise en charge de la
descendance (détection précoce, chirurgie prophylactique).
Nous développerons ici les mécanismes de la transformation tumorale. Nous détaillerons également les
techniques et les indications des analyses de génétique moléculaire somatique.
350 Cancérogenese, oncogénétique
A. Cancérogenèse
1. Un processus séquentiel
Une cellule somatique peut accumuler de manière séquentielle des altérations de son
ADN conduisant à sa transformation cancéreuse.
Ces altérations vont conduire à l'activation d'oncogènes (gènes qui favorisent le
développement des cancers) et à l'inactivation de gènes suppresseurs de tumeur (gènes
qui s'opposent au développement des cancers). C'est par exemple le cas des cancers
digestifs (Figure 1) impliquant l'activation successive des voies de prolifération Wnt
et EGFR et aboutissant à la transformation d'un épithélium normal en un adénome
pré-cancéreux. Les cellules pré-tumorales acquièrent ensuite des altérations de leur
ADN conduisant à l'inactivation des voies suppressives de tumeurs TGF beta et p53,
et aboutissant à la transformation d'un adénome en un carcinome.
--l -- --
KRAS Smad2/4 p53
l l
Epilhélium Adénome Adénome Adénome Métastase
Carcinome
normal précoce intermédiaire tardif
parmi les plus élevées. Les facteurs environnementaux jouent le rôle d'accélérateur
de la tumorigenèse en amplifiant l'instabilité génomique. Ils peuvent être à l'origine
du développement de cancers professionnels, tels les cancers broncho-pulmonaires
liés au tabac et les mésothéliomes pleuraux liés à l'amiante.
....
altération moléculaire (Figure 2).
EVOLUTION
RAMIFIEE .... Clone 1
--+
Clone 2
Population
polyclonale
•
Clone 3 hétérogène
Temps • Clone4
•
Modèle stochastique
Modèle hiérarchique
•
EGFR-TKI EGFR-TKI
de 1ère de 3ème
génération génération
� �
1. Multiplex Ligation dependent Probe Amplification; 2. Fluorescent ln Situ Hybridization; 3. Reverse Transcriptase
Po/ymerase Chain Reaction; 4. Reverse Transcriptase-MLPA; 5. Whole Exome Sequencing; 6. Comparative Genomic
Hybridization Array; Whole Genome Sequencing.
Ces techniques vont permettre de caractériser des anomalies des gènes (ADN) ou
de leurs transcrits ARN (reflétant la manière dont les gènes sont exprimés). Elles
peuvent être ciblées sur une anomalie spécifique (ex : recherche d'une mutation BRAF
p.Val600Glu) ou étudier de manière plus large un grand nombre de gènes grâce aux
méthodes de séquençage haut débit. Ces techniques haut débit encore appelées Next
Chapitre 11. Les biomarqueurs des cancers - ITEM 288 355
% de patients
Pathologie Biomarqueur présentant une Molécules associées
altération moléculaire
A n t i - H E R 2
Cancer du sein Amplification d'HER2 19,7 % (Trastuzumab, Pertuzumab,
Lapatinib)
A n t i - H E R 2
Cancer de l'estomac Amplification d'HER2 23,5%
(Trastuzumab)
Mutation de KRAS 43,7% A n t i - E GF R
Cancer colorectal
Mutation de NRAS 5,2% (Panitumumab, Cetuximab)
Mutation de KIT 65,5% ITK
GIST
Mutation de PDGFRA 15,4% (lmatinib)
T K - E GF R
Mutation d'EGFR 13,4% (Gefetinib, Erlotinib, Afatinib,
Cancer du poumon Translocation d'ALK 3,1% Osimertinib)
Translocation de ROS1 - 1% I T K-AL K/ R OS1
(Crizotinib, Ceritinib)
A n t i-B RAF+a n t i-MEK
Mutation de BRAF
Mélanome 37,2% (Vemurafenib/Cobimetinib, Dabrafe
V600
nib/Trametinib)
I nhi b i t e u r d 'ABL
Transcrit BCR-ABL 16,7%
Leucémies (lmatinib, Dasatinib, Nilotinib, Bosu
Mutation d'ABL 22,4%
tinib, Ponatinib)
Leucémie Lymphoïde
Mutation de TP53 1% ldelalisib
Chronique
Mutation de BRCA1/2
- A n t i - P A R P
Cancer de l'ovaire somatique ou germi- 12,6%
(Olaparib, Niraparib}
nale
C'est ainsi que le trastuzumab (anticorps anti-HER2) est utilisé chez les patientes atteintes
de cancers du sein surexprimant le récepteur HER2. Les tests somatiques peuvent soit
indiquer soit contre-indiquer l'utilisation d'une molécule. Par exemple l'inhibiteur
d'EGFR gefitinib est indiqué dans les cancers du poumon présentant une mutation activatrice
d'EGFR, alors que l'utilisation de l'anticorps anti-EGFR cetuximab est contre-indiquée pour
les cancers colorectaux KRAS ou NRAS mutés.
Chapitre 11. Les biomarqueurs des cancers - ITEM 288 357
Le tableau 2 ci-dessus résume les biomarqueurs et les principales thérapies ciblées associées
disposant d'une AMM dans différents cancers (Source JNCa 2016).
Comme illustré dans ce tableau, la fréquence de tests positifs pour ces biomarqueurs
est généralement faible (ex : seulement 1,0 % des cancers du poumon présentent une
translocation de ROSI). Cela signifie qu'une faible proportion des patients testés
pourra bénéficier de traitements ciblés. L'exemple du cancer du poumon illustre bien le
démembrement moléculaire d'entités histopathologiques et une stratification des patients
en sous-groupes moléculaires conditionnant l'accès à un traitement personnalisé.
Plus récemment l'immunothérapie a pris une place centrale dans la prise en charge de
certaines tumeurs (mélanome, poumon, certains lymphomes, vessie...). C'est un traitement
qui a pour objectif de renforcer le système immunitaire du patient pour lutter contre son
cancer. Comme pour les thérapies ciblées, un nombre croissant de biomarqueurs prédictifs
de la réponse à l'immunothérapie sont mis en œuvre pour personnaliser le traitement. Citons
par exemple l'expression de PD-LI, la recherche d'instabilité microsatellitaire, l'évaluation
de la charge mutationnelle tumorale ou encore une caractérisation du micro-environnement
immunitaire par des approches de transcriptomique.
Dans certaines situations, il n'est pas possible d'accéder à du matériel tumoral. Il est
maintenant possible de réaliser les analyses de génétique tumorale sur l'ADN tumoral
circulant présent dans le plasma. Cette stratégie peu invasive est notamment recommandée
par le GFCO pour les adénocarcinomes du poumon traités au moment du diagnostic si
une biopsie de la tumeur n'est pas réalisable. Cette stratégie est aussi utile pour le suivi
du traitement par anti-EGFR et la détection précoce de l'émergence de clones résistants
(voir Figure 3).
C. Cancers professionnels
1. Principales étiologies professionnelles des cancers
Origine
Pathologie Facteurs de risques professionnelle
(%)
Amiante, arsenic, bis(chlorométhyl)éther, cadmium,
certains composés du chrome, goudrons, suies, dérivés
Cancer du poumon du charbon et huile de houille, nickel, poussières de cobalt 10 à 20 %
associés au carbure de tungstène, poussières et gaz
radioactifs, silice...
Mésothéliome Amiante 85 %
Goudrons, suies de combustion du charbon, brais de
Cancer de la vessie et
houille, arsenic et ses composés minéraux, amines 2 à14 %
des voies urinaires
aromatiques...
Leucémies Rayonnements ionisants, benzène... 5 à 18 %
Poussières de bois, aldéhyde formique, composés du
Cancers ORL 7à40 %
chrome
Arsenic et composés minéraux, goudrons, suies, dérivés
Cancers cutanés de combustion du charbon, huiles minérales dérivées du
pétrole, rayonnements UV. ..
Chlorure de vinyle monomère, arsenic et ses composés
Cancers hépatiques
minéraux, complication d'une cirrhose post-VHB ou VHC
Selon l'Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS), « un cancer est dit professionnel
s'il est la conséquence directe de l'exposition d'un travailleur à un risque physique,
biologique ou chimique ou si le cancer résulte des conditions dans lesquelles le travailleur
réalise son activité».
358 Cancérogenese, oncogénétique
La mise en évidence d'étiologies professionnelles des cancers est rendue difficile par
leur caractère multifactoriel. Néanmoins, on estime qu'entre 4 et 8,5 % des cancers
sont imputables à l'activité professionnelle.
Le tableau ci-dessus résume les principaux cancers d'origine professionnelle et leurs
facteurs de risques associés (source INRS)
Ces facteurs professionnels s'ajoutent aux facteurs liés au mode de vie (tabac, alcool,
alimentation) ou aux facteurs génétiques.
2. Principe de surveillance des cancers professionnels
En cas d'exposition à un produit chimique avéré ou présumé cancérogène, une
surveillance médicale renforcée doit être mise en œuvre, comprenant au minimum un
examen médical tous les 24 mois, la constitution d'un dossier médical, l'établissement
d'une fiche d'aptitude par la médecine du travail ainsi qu'une attestation de non
contre-indication.
FICHE FLASH
O La cancérogénèse:
► résulte de l'accumulation séquentielle d'anomalies génétiques au cours du temps;
► est accélérée par les facteurs environnementaux ou le terrain génétique qui favorisent l'instabilité
génétique;
► conduit à l'activation d'oncogènes et à l'inactivation de gènes suppresseurs de tumeurs, conférant aux
cellules tumorales un avantage sélectif, et leur permettant d'échapper aux barrières de protection
de l'organisme;
► conduit à l'émergence de populations tumorales hétérogènes. à l'origine des résistances aux traitements
ami-cancéreux.
O La génétique moléculaire des cancers ou génétique somatique des cancers:
► étudie les altérations moléculaires propres à la tumeur;
► met en œuvre des techniques d'analyse moléculaire variées;
► peut contribuer au diagnostic des cancers (voir item 289);
► permet de personnaliser la prise en charge thérapeutique des cancers dès la première ligne.
□ Les cancers professionnels:
► représentent 4 à 8 % des cancers;
► leur reconnaissance résulte soit d'une présomption de l'origine professionnelle, soit de la reconnaissance
d'un lien entre l'activité et le cancer par le CRRMP.
360
+ https://www.has-sante.fr/portai1/jcms/c_2606857/fr/mekinist-trametinib
inhibiteur-de-proteine-kinase.
+ https://www.has-sante.fr/portai1/jcms/c_2620147/fr/cotellic-cobimetinib-anti-mek
inhibiteur-de-proteine-kinase.
+ https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/les-therapies
ciblees/Medecine-de-precision-les-therapies-ciblees).
QCM
1. INTRODUCTION
Le cancer est une maladie fréquente, découverte face à des signes d'appel cliniques (altération de l'état
général, fièvre), radiologiques ou biologiques évocateurs. Le clinicien peut disposer d'une batterie d'examens
cliniques et paracliniques complémentaires pour confirmer le diagnostic de cancer, évaluer son pronostic
et instaurer une prise en charge thérapeutique personnalisée (voir item 288).
L'affirmation du caractère malin est posée sur l'examen histopathologique d'une lésion suspecte (pièce
d'exérèse chirurgicale, biopsie ou cytoponction). Dans certaines situations, le matériel tumoral n'est pas
accessible et on pourra alors avoir recours au dosage de marqueurs tumoraux sanguins ou urinaires voire à
une« biopsie liquide», c'est-à-dire à la recherche de matériel tumoral circulant (ADN ou cellules) dans le sang.
De nombreux marqueurs tumoraux sériques et moléculaires, détaillés dans ce chapitre, sont utilisés
en pratique courante en oncologie au moment du diagnostic mais également pour évaluer le pronostic
et suivre le patient durant son traitement. La place des examens biologiques est intégrée au tableau
clinique et paraclinique global indispensable à leur interprétation.
Chapitre 11. Les biomarqueurs des cancers - ITEM 289 363
On retrouve aussi souvent des signes biologiques liés à l'obstruction des voies d'excrétion
par la masse tumorale, comme une élévation de la créatinine dans les cancers de la
prostate ou une cholestase (élévation de la PAL, des GGT, de la bilirubine) dans les cancers
pancréatiques.
Syndrome paranéoplasique. Il est lié à la sécrétion tumorale d'hormones ou
pseudo-hormones se traduisant par des manifestations cliniques à distance du site
primitif. Citons la sécrétion de PTH-rp par les tumeurs pulmonaires, gynécologiques
ou rénales à l'origine d'une hypercalcémie, ou encore la sécrétion ectopique d'ACTH
par certaines tumeurs du poumon se traduisant par un syndrome de Cushing.
■ Certains cancers peuvent aussi être à l'origine d'une réponse auto-immune systé
mique. C'est le cas des cancers thymiques à l'origine d'auto-anticorps dirigés contre
le récepteur de l'acétylcholine qui conduisent au développement d'une myasthénie.
De nombreux paramètres biologiques «standards» peuvent donc être perturbés et
doivent alerter le clinicien devant un tableau évocateur de cancer.
■ Les enzymes
► Prostate Specific Antigen (PSA) : kallicréine sécrétée dans le liquide prostatique
et séminal par les cellules glandulaires prostatiques sous forme de pro-PSA qui
sera ensuite clivé pour donner la forme active de l'enzyme. Une faible fraction
de l'enzyme se retrouve dans le sang. 70 à 90 % du PSA circule sous forme liée
à des protéines de transport, surtout à l'alphal anti-chymotrypsine. Le reste du
PSA circule sous forme libre (fPSA). Le PSA est un marqueur spécifique de la
prostate mais n'est pas spécifique du cancer. Sa concentration est notamment
augmentée dans les hyperplasies bénignes de la prostate, les prostatites, ou en
cas de rétention urinaire. Cependant sa concentration est plus élevée en cas de
cancer. Pour des concentrations de PSA supérieures à 10 mg/1 le risque de cancer
est supérieur à 55 %. En revanche la sensibilité du PSA total (tPSA) est faible
pour des valeurs comprises entre 4 et 10 µg/1. On peut utiliser le rapport PSA
libre/PSA total, diminué en cas de cancer.
► Neuron Specific Enolase (NSE) : enzyme de la glycolyse dont !'isoforme gamma est
spécifique des cellules neuroendocrines. Elle est augmentée dans le neuroblastome
(sensibilité de 60 à 80 %) et le cancer anaplasique à petites cellules du poumon
(sensibilité supérieure à 90 %). Sa demi-vie courte en fait un bon marqueur de
suivi dans ces tumeurs. Avec une sensibilité moindre, la NSE est aussi élevée dans
les cancers médullaires de la thyroïde, les mélanomes, les tumeurs de la prostate
et du rein. Des pathologies bénignes pulmonaires et du système nerveux central
peuvent également augmenter sa concentration.
Il Les hormones
► Thyroglobuline : précurseur des hormones thyroïdiennes synthétisée par les
cellules folliculaires de la thyroïde. Elle est utilisée pour le suivi des cancers
différenciés de la thyroïde et doit être indétectable après thyroïdectomie totale
ou traitement par la thyroxine.
► Calcitonine : hormone hypercalcémiante sécrétée par les cellules C de la
thyroïde. Elle est augmentée dans les cancers médullaires de la thyroïde avec
une sensibilité au diagnostic de 70 % et une spécificité proche de 100 %. La
calcitonine peut également être augmentée dans les tumeurs neuroendocrines,
les phéochromocytomes et les cancers du poumon à petites cellules. Son taux
augmente également au cours de la grossesse, dans les thyroïdites chroniques et
chez les patients hémodialysés.
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Po'tiente sans évolution cl 9 CSIS AOK .......... ..._ [stod&mC): OQ>à1.J...,..
illustre deux scénari observés en clinique d'évolution du CA 125 dans le cancer ovarien
traité par chimiothérapie.
7. Place des marqueurs circulants au cours du suivi
Une remontée exponentielle du taux d'un marqueur tumoral après une phase de rémission
(même en dessous des valeurs normales) signe une récidive. Par exemple, une remontée
même faible du PSA chez un patient traité par prostatectomie radicale chez lequel le
PSA était indétectable, doit, si elle se confirme être considérée comme une rechute.
La cinétique du CA-125 ci-dessous est caractéristique d'une patiente atteinte d'un cancer
ovarien en rechutes multiples et décédée au bout de 22 mois. Les flèches indiquent les
changements successifs de ligne thérapeutique.
2500 �
I: j
l
n
: ,ooi
500 +
1 2 3 • 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 U1 19 20 21 22
Monll'I•
■ Traitement personnalisé
► Ces marqueurs moléculaires permettent également de caractériser plus
précisément le sous-type moléculaire de la tumeur, afin de personnaliser la
prise en charge thérapeutique. Un nombre important de thérapies ciblées font
aujourd'hui parties de l'arsenal de l'oncologue. Leur prescription est conditionnée
par la mise en évidence d'une altération moléculaire « ciblable » (voir item 288).
Ainsi l'identification d'une mutation de sensibilité d'EGFR dans un cancer du
poumon non à petites cellules avancé ou métastatique conditionne l'introduc
tion d'un inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) anti-EGFR (par exemple: gefitinib,
erlotinib, afatinib), contrairement à la présence d'une mutation de KRAS rendant
inefficace les ITI<. C'est également le cas avec les anti-BRAF dans les mélanomes
mutés BRAF p.Val600Glu ou les anti-EGFR dans les cancers colorectaux BRAF/N
RAS/KRAS non mutés.
► En hématologie, des anomalies chromosomiques ou des mutations de IgVH ou
de TP53 participent à l'orientation du traitement, tout comme les mutations de
FLT3, NPM et CEBPA dans les leucémies aiguës myéloblastiques. Dans la leucémie
myéloïde chronique, les analyses moléculaires jouent un rôle déterminant dans
la prise en charge des patients, et dans le cas d'une translocation de BCR-ABL,
ce résultat conduit à la prescription d'imatinib. De plus, le suivi de la maladie
résiduelle par quantification des transcrits permet d'objectiver la réponse et de
dépister précocement la rechute. En cas de récidive, l'identification d'une muta
tion de résistance sur ABL va permettre d'orienter le traitement de seconde ligne.
■ Pronostic
► Par ailleurs, Le sous-type moléculaire est souvent associé au pronostic de la
tumeur. Dans le cas d'un gliome, la détection d'une mutation d'IDH1/IDH2
oriente vers des astrocytomes de pronostic plus favorable que les glioblastomes.
De même, une amplification de MYCN dans un neuroblastome est un facteur
de mauvais pronostic qui conduira à une intensification thérapeutique. Il est
également bien établi que les cancers du sein surexprimant le récepteur HER2 ou
les triple négatifs (RE- RP- HER2-) présentent un risque de récidive et de décès
plus élevé que la forme luminale A classique, indépendamment de la réponse au
traitement.
► Plus récemment des signatures d'expression génique, permettant d'étudier le
transcriptome tumoral (reflet du phénotype tumoral) ont été proposées afin de
définir le pronostic de certains cancers. C'est notamment le cas de la signature
GCBIABC qui permet de différencier deux sous-groupes de patients atteints de
lymphomes B diffus à grandes cellules (DLBCL) dont le pronostic et la réponse à
certaines thérapies ciblées sont très différentes. De même, l'identification de sous
types moléculaires de cancers du sein et de gènes dont l'expression est associée à
un risque de récidive à distance a conduit au développement deplusieurs signatures
d'expression génique permettant de stratifier les patientes. Si le risque de récidive
estfaible, le bénéfice d'une chimiothérapie adjuvante est limité et peut être évitée.
Le tableau de synthèse ci-dessous reprend les différents tests réalisés par les plateformes
de génétique somatique des cancers (hors biomarqueurs permettant l'accès aux thérapies
ciblées: voir item 288) Source INca: http://lesdonnees.e-cancer.fr/Themes/Soins/les
tests-de-genetique-somatique/les-tests-de-genetique-somatique#ind3030l.
370 Diagnostic des cancers: signes d'appel et investigations paracliniques, caractérisation du stade, pronostic
Participe à /'orientation du
Myélome multiple Anomalies chromosomiques
traitement
Leucémies aiguës Participe à l'orientation du
myéloblastiques Mutations de FLT3, NPMet CEBPA
(LAM) traitement
Participe à l'orientation du
Neuroblastomes Amplification de MYCN
traitement
Quantification de transcrits de fusion
Quantification d'anomalies chromo
LAL/IAM Suivi de la maladie
somiques
Quantification WT1
Quantification du réarrangement des
LAL gènes du TCR ou des lg Suivi de la maladie résiduelle
Clonalité 8/T
Allogreffe de moelle Suivi de la prise de greffe et
Chimérisme postgreffe
pour les hémopathies du rejet
prise en charge des cancers du poumon non à petites cellules en l'absence de biopsie solide
(recommandations du GFCO 2016). En présence d'une mutation tumorale, la sensibilité
du diagnostic est de l'ordre de 50 à 80 % en fonction des stades.
De manière intéressante, lëtude du cfDNA semble mieux refléter l'hétérogénéité tumorale
qu'une biopsie tissulaire. Cette approche peu invasive est également indiquée pour le suivi
des patients sous traitement. Ainsi, le suivi de lëmergence de mutations d'une résistance
au cours du traitement par ITK anti-EGFR permet d'adapter rapidement la prise en charge
thérapeutique de ces patients (voir item 288). De la même manière, des mutations de KRAS
sont associées à une résistance aux anticorps anti-EGFR dans les cancers pancréatiques et
colorectaux. C'est également le cas avec lëmergence de mutations d'ESRl chez les patientes
présentant un cancer du sein traité par anti-aromatase.
372
FICHE FLASH
O Des perturbations du bilan biologique peuvent être évocatrices de cancer:
► syndrome inflammatoire et cachectique;
► syndrome de masse tumorale lié à l'altération de la fonction des organes atteints;
► syndrome paranéoplasique lié à la sécrétion par la tumeur d'hormones et/ou d'une réponse auto
immune.
□ Les marqueurs tumoraux sériques:
► peuvent être utiles au dépistage dans certaines populations à risque;
► peuvent aider au diagnostic en complément de l'anatomopathologie;
► sont recommandés pour évaluer la réponse initiale et suivre l'efficacité du traitement.
0 Les marqueurs moléculaires somatiques (spécifiques de la tumeur) :
► peuvent contribuer au diagnostic des cancers;
► permettent de définir des sous-types moléculaires dont le pronostic est différent;
► permettent de personnaliser la prise en charge thérapeutique;
► peuvent être utilisés pour suivre la maladie résiduelle.
□ L'étude de l'ADN tumoral circulant est utile:
► au diagnostic quand du matériel tissulaire n'est pas accessible;
► au cours du suivi des patients sous traitement.
Chapitre 11. Les biomarqueurs des cancers - QCM
QCM
► 1. À propos de la NSE :
A. Est un marqueur diagnostique dans le cancer médullaire de la thyroïde.
B. Est un marqueur pronostique du cancer de la vessie.
C. Est dosé dans le suivi des cancers du poumon non à petites cellules.
D. Est augmenté dans le neuroblastome.
E. Est souvent dosé en association avec le CA 125.
Réponses: C, D
1. INTRODUCTION
Les analyses d'oncologie moléculaire (OM) sont majoritairement réalisées sur 28 plateformes hospitalières
réparties sur l'ensemble du territoire. Ces dernières années, elles sont devenues indispensables pour le
diagnostic, la classification et le pronostic d'un bon nombre de cancers. La caractérisation moléculaire
d'une tumeur permet également d'orienter la première ligne de traitement, de préciser les mécanismes
de résistance et d'orienter les adaptations thérapeutiques dans le cadre de la médecine personnalisée.
Chapitre 11. Les biomarqueurs des cancers - ITEM 290 375
Anatomo-pathologiste Prescripteur
Identification du patient
Identification du pathologiste responsable
Date du prélèvement Coordonnées du prescripteur
Fixateur utilisé Type d'analyse demandée
Numéro d'identification du bloc dans le laboratoire Date de prescription
Organe et état tumoral (primitif, métastase) Contexte clinique
Type de prélèvement (biopsie, pièce opératoire, cytologie... ) Traitement en cours
Type histologique de la tumeur
Pourcentage de cellules tumorales
Ces informatb.ns guident le choix des techniques de biologie moléculaire (BM) à réaliser
sur chaque prélèvement. En particulier, le type histologique de tumeur, sa localisation, le
pourcentage de cellules tumorales, le contexte clinique et les traitements en cours vont avoir
une incidence forte sur les différentes mutations recherchées, les techniques utilisables et
les commentaires associés au rendu du résultat.
(
5'
3'
3'
5' 0) 95•c
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3'
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B
2. PCR digitale
La technique de PCR digitale est une technique récente basée sur une compartimentation
de l'échantillon. Dans les techniques en émulsion (appelées ddPCR pour droplet digital
PCR), l'échantillon d'ADN à analyser est dispersé dans une émulsion de milliers de
gouttelettes d'huile calibrées et d'un volume très faible (quelques picolitres). Idéalement,
chaque gouttelette contient uniquement un seul fragment d'ADN à amplifier. L'étape
suivante correspond à une amplification par PCR utilisant des sondes TaqMan
individuelles et en parallèle dans chaque gouttelette. La fluorescence libérée dans
chaque gouttelette est ensuite analysée par un détecteur. Il existe donc 4 possibilités :
■ absence de fluorescence : aucune amplification, absence d'ADN dans la gouttelette;
■ fluorescence correspondant à l'amplification de l'allèle sauvage;
■ fluorescence correspondant à l'amplification de l'allèle muté;
■ double fluorescence signant la présence de plusieurs fragments d'ADN dans la gout-
telette analysée (l'un sauvage, l'autre muté).
Cette compartimentation de l'échantillon permet une quantification absolue du nombre de
copies d'ADN, une estimation précise du rapport allélique d'une mutation et la détection
de variants rares et sa sensibilité est excellente. Cette technique est particulièrement
Chapitre 11. Les biomarqueurs des cancers - ITEM 290 379
12 13
fi\MfWI\N\!\f!:\NV{V'{\�r/V'f\�N\rvvJ\tvv
TAAACTTGTGGTAGTTGGAGCTGGTGGCGTAGGCAAGAGTGCCTT
IYW\fWI\N\!\f!:\NV{V'{\ANf'w{\J\dVX\�N\�
TAAACTTGTGGTAGTTGGAGCTGKTGGCGTAGGCAAGAGTGCCTT
t
G>T
► une amplification des différentes séquences d'intérêt du panel par PCR conven
tionnelle multiplexe, permettant d'obtenir des amplicons;
► une ligation d'adaptateurs spécifiques aux extrémités de chaque amplicon. Ces
adaptateurs contiennent une séquence d'ADN appelée « code à barre moléculaire»
spécifique de chaque échantillon et permettant de l'identifier;
► une immobilisation (ou purification) des amplicons sur une surface solide ou
par l'intermédiaire de billes aimantées, séparent lesfragments d'ADN d'intérêts
des contaminants.
• on obtient ainsi une librairie par échantillon regroupant l'ensemble des
amplicons d'intérêt à séquencer. L'ensemble des librairies sera ensuite
regroupé dans un seul et même tube;
E. Analyse de fragments
L'analyse de fragments est une technique permettant de séparer des séquences d'ADN
selon leur taille. Elle est basée sur une première étape de PCR conventionnelle utilisant
des amorces marquées par un fluorophore spécifique. Les produits de PCR (fragments)
sont ensuite séparés par électrophorèse capillaire. Elle consiste à faire migrer les fragments
d'ADN sous l'effet d'un champ électrique et à les séparer selon leur taille. À l'extrémité
du capillaire, la fluorescence est détectée par une caméra CCD. Cette étape, réalisée sur
un séquenceur est rapide et fiable. Elle présente également une résolution élevée car une
différence de longueur d'un seul nucléotide entre deux fragments peut être détectée.
L a principale application en pratique quotidienne est la détection d'une instabilité
microsatellitaire (phénotype MSI pour MicroSatellite Instability) dans les cellules tumorales,
principalement dans le cadre du syndrome de Lynch. Il est secondaire à des mutations des
4 gènes (MLHl, PMS2, MSH2 et MSH6) codant les 4 principales protéines de réparation
des mésappariements de l'ADN: le système MMR (MisMatch Repair). Ces mutations
sont responsables d'une perte d'expression de ces protéines de réparation induisant une
instabilité génétique, qui se manifeste préférentiellement au niveau de courtes séquences
répétées du génome appelées microsatellites. Dans la majorité des laboratoires d'OM, la
recherche d'un phénotype MS/ est réalisée par analyse defragments après amplification de
5 microsatellites mononucléotidiques. L'instabilité se manifeste, dans les cellules tumorales,
Chapitre 11. Les biomarqueurs des cancers - ITEM 290 381
'
FICHE FLASH
.J Le respect des conditions pré-analytiques joue un rôle capital dans la qualité et le rendu des résultats
d'oncologie moléculaire.
U Un examen anatomo-pathologique des prélèvements tissulaires est indispensable.
U Les informations cliniques sont nécessaires au bon choix des techniques et au rendu des résultats
d'oncologie moléculaire.
U La recherche de mutations fréquentes nécessite un délai de réponse rapide pour permettre le choix
d'une thérapie ciblée dans le cadre de la médecine personnalisée.
□ Les techniques de PCR en temps réel et PCR digitale sont particulièrement adaptées à ces recherches
ciblées de mutations fréquentes.
U La technologie de séquençage haut débit (NGS) permet le séquençage massif en parallèle de plusieurs
milliers ou millions de séquences après une compartimentation de l'échantillon.
U Le NGS réalisé sur un panel de gènes permet la recherche des principaux variants impliqués en oncologie.
U La détection d'une instabilité microsatellitaire par analyse de fragments est un critère diagnostique
important d'un syndrome de Lynch.
U Un avis positif d'un CPP et une déclaration au ministère de la recherche sont indispensables à la
constitution d'une collection d'échantillons biologiques humains.
383
+ https://www.e-cancer.fr/Expertises-et-publications/Catalogue-des-publications/Bonnes
pratiques-pour-la-recherche-a-visee-theranostique-de-mutations-somatiques-dans
-les-tumeurs-solides.
+ https://www.e-cancer.fr/Expertises-et-publications/Catalogue-des-publications/Tests
somatiques-recherchant-une-deficience-du-systeme-MMR-au-sein-des-tumeurs
du-spectre-du-syndrome-de-Lynch.
+ Décret n° 2016-1537 du 16 novembre 2016 relatif aux recherches impliquant
la personne humaine, disponible sur https://www.legifrance.gouv.
fr/eli/decret/2016/11/16/AFSP1621392D/jo/texte.
ITEM 317
MYELOME MULTIPLE
Jean-Baptiste OUDART
1. INTRODUCTION
Le diagnostic et la prise en charge des gammapathies monoclonales (GM) représentent un enjeu de santé
publique en France et dans le monde, avec une incidence dépassant 1,5 % de la population générale de plus
de 50 ans et plus de 6 % des personnes après 80 ans. Les GM correspondent à une synthèse dérégulée d'une
immunoglobuline (Ig) monoclonale par un clone plasmocytaire dystrophique. La majorité des GM sont
des pathologies asymptomatiques appelées Ig monoclonales de Signification Indéterminée (IMSI, ou MGUS
en anglais). Les autres pathologies associées à la production d'Ig monoclonales sont :
les hémopathies malignes (comme le myélome multiple (MM) ou la maladie de Waldenstrôm);
■ l'amylose AL;
■ les lg monoclonales transitoires (ou réactionnelles) à des infections bactériennes, parasitaires,
fongiques, ou à des maladies auto-immunes.
La place des analyses biochimiques dans le diagnostic, le pronostic et le suivi des patients reste à l'heure
actuelle très importante.
■ hypercalcémie;
■ insuffisance rénale;
■ anémie typiquement normochrome, normocytaire, arégénérative;
Il allongement de la vitesse de sédimentation (VS) à la première heure contrastant avec
une CRP normale;
Il augmentation inexpliquée de la protéinémie;
■ protéinurie inexpliquée;
■ anomalie de l'électrophorèse des protéines sériques (EPS).
Diagnostic Critères
lg monoclonale sérique< 30 g/1
IMSI Plasmocytose médullaire clonale< 10 %
Absence d'atteinte organique (critères CRAB)
lg monoclonale sérique lgG ou lgA� 30 g/1
MM Ou lg monoclonale urinaire� 500 mg/24 heures
asymptomatique Et/ou plasmocytose médullaire clonale comprise entre 10 % et 60 %
Absence d'atteinte organique (critères CRAB)
Plasmocytose médullaire clonale� 10 % (ou plasmocytose extra-médullaire
clonale)
Et au moins un des éléments suivants:
MM Présence d'une atteinte organique (au moins un critère CRAB)
Ou plasmocytose médullaire clonale� 60 %
Ou rapport des Chll impliquée/non impliquée> 100
Ou plusieurs lésions focales à l'IRM
Chi!: chaÎnes légères libres d'/g.
386 Myelome multiple
A Protéines
Conc.(1/L)
B
Protéines
Conc.(s/L)
64 54�
totales totales
Albumln• 31,6 � Albumine 22,5 �
al 3,3 al 3,5
a2 7,5 a2 5,o�
ai 3,4 a1 3,1 �
p2 2,1 a2 14,1 JI
) 1 ./\ J\ ./\.N
1 1 1 1
� V 16,1 JI V 5,7 �
C
Protéines
Conc.(s/L)
D Protéines
Conc.(s/L)
62 80
totales totales
Albumine 42 Albumine 32 �
al 2,8 al 3,8 JI
a2 5,6 a2 6,8
Pl 4,1 a1 3,8
a2 2,9 p2 3,4
) ./\ ./"---.. ./1.,;\ -------- V 4,6� ) � V 30,1 JI
A
- 1,
1
1 B
-eLP O A M 1< 1.
..
Ce score a été révisé en 2015 (Revised-ISS, ou R-ISS) (Tableau III) en incluant le dosage de la
LDH sérique et la recherche d'anomalies chromosomiques récurrentes dans le MM. Les
anomalies (del(l7p) et/ou translocations t(4;14 ) et t(l4;16)) détectées par technique FISH
(Fluorescent In Situ Hybridisation) sont associées à un pronostic plus sombre. Le R-ISS
apparaît mieux corrélé à la survie sans progression et à la survie globale des patients.
FICHE FLASH
D Les gammapathies monoclonales sont très fréquentes dans la population générale.
D L'électrophorèse des protéines sériques est l'examen biologique de première intention dans le diagnostic
des gammapathies monoclonales.
D La présence d'un pic étroit à l'électrophorèse des protéines sériques doit faire réaliser un immunotypage.
D Dans un contexte clinique compatible, une hypo-gammaglobulinémie doit faire rechercher un myélome
multiple à chaînes légères libres monoclonales ou un myélome non- ou pauci-sécrétant.
D Le dosage des chaînes légères libres d'immunoglobulines sériques doit être réalisé dans le diagnostic et
le suivi de l'amylase AL, des myélomes multiples pauci- ou non-sécrétants, des plasmocytomes et des
maladies à dépôt des chaînes légères libres d'immunoglobulines.
D Les gammapathies monoclonales nécessitent un suivi clinico-biologique à vie.
391
+ Fiche mémo HAS (janvier 2017) "quand prescrire une EP S et conduite à tenir en cas
d'immunoglobuline monoclonale».
+ Guide médecin sur le myélome multiple HAS (décembre 2010) "Tumeur maligne ,
affection maligne du tissu lymphatique ou hématopoïétique - Myélome multiple».
+ Rappot HAS (décembre 2006) "Dosage sérique des chaînes légères libres».
+ Palumbo A, Avet-Loiseau H , Oliva Set al. Revised international staging system for
multiple myeloma : a report from International Myeloma Working Group. J Clin Oncol
2015; 33: 2863-2869.
+ Moreau P, San Miguel J, Sonneveld P, et al. Multiple myeloma: ESMO Clinical Practice
Guidelines for diagnosis , treatment and follow-up. Annals of Oncology 2017; 28
( Supplement 4) : iv52-iv61.
ITEM 319
, ,
LA DECISION THERAPEUTIQUE
,
PERSONNALISEE : BON
, ,
USAGE
DE LA PHARMACOGENETIQUE
DANS DES SITUATIONS À RISQUE
Marie Anne LORIOT
1. INTRODUCTION
La réponse aux médicaments est extrêmement variable d'un individu à l'autre, tant sur
le plan pharmacologique (efficacité) que sur le plan toxicologique (effets indésirables). La
variabilité de cette réponse, souvent difficile à prévoir, est une limitation importante à leur
utilisation. En dehors d'erreurs d'indications ou de posologie participant pour une large
part à l'inefficacité et à la toxicité, les causes de la variabilité de réponse aux médicaments
peuvent être d'origine :
physiologique ou pathologique : âge, grossesse, sévérité de la maladie, pathologies
associées;
■ environnementale : interactions médicamenteuses, alimentation, tabagisme;
■ génétique : variations génétiques du métabolisme et du transport des médicaments,
ainsi que des cibles pharmacologiques (influence sur la pharmacocinétique (PK) ou
la pharmacodynamie (PD)) ou des gènes de l'immunité (sous-type HLA).
La pharmacogénétique étudie les mécanismes d'origine génétique intervenant dans
la variabilité interindividuelle de la réponse aux médicaments, et a pour objectif le
développement de tests permettant d'identifier les individus à risque de telles anomalies
de réponse.
Les applications thérapeutiques en routine concernent majoritairement les enzymes
du métabolisme des médicaments (EMM). Les EMM sont exprimés principalement
dans le foie et les organes en contact direct avec les xénobiotiques (œsophage, intestin,
peau, muqueuse nasale, poumon), mais on les trouve également dans presque tous les
autres organes en quantités plus faibles avec l'existence d'isoformes tissu-spécifiques.
Les gènes codant les EMM peuvent présenter des anomalies de séquences (ou mutations),
telles que des mutations ponctuelles ou SNP (Single Nucleotide Polymorphism), des
délétions partielles ou totales, ou encore des duplications ou amplifications de gènes. Ces
variations génétiques peuvent être responsables de variations d'expression et/ou d'activité
de ces enzymes, en entraînant un déficit ou une absence totale d'activité ou encore une
augmentation de l'activité. La fréquence de ces différents phénotypes est variable dans
la population en fonction de l'enzyme polymorphe et, pour un même enzyme, variable
en fonction de l'origine ethnique ou géographique des populations étudiées en raison de
différences dans la nature et la fréquence des polymorphismes rencontrés.
Les polymorphismes génétiques des EMM s'expriment dans la population générale sous
la forme de phénotypes définissant différents sous-groupes (figure 1)
■ les métaboliseurs rapides (activité enzymatique normale) porteurs d'un géno
type homozygote sauvage;
■ les métaboliseurs lents (déficit profond ou complet d'activité enzymatique)
porteurs d'un génotype homozygote muté ou hétérozygote composite entraînant
une perte de fonction du gène;
■ les métaboliseurs intermédiaires (activité enzymatique réduite) porteurs d'un
génotype hétérozygote;
Chapitre 12. Pharmacogénétique - ITEM 319 395
E4i/.ifJS
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Activité enzymatique
métaboliseurs
■IP!li:f!Wl!ll!I Plllll!I• métaboliseurs métaboliseurs
U?Wlt'4M RAPIDES ou métaboliseurs RAPIDES
LENTS ULTRARAPIDES
INTERMEDIAIRES
( C:==J )0 Amplification du gène actif; - Gène actif, « normal »; - Gène défectueux, « non fonctionnel » (délétion, mutation inactivatrîce)
A. Phénotypage
Le phénotypage est principalement applicable dans le domaine des polymorphismes
affectant la biodisponibilité des médicaments, et en particulier leur métabolisme. Les
méthodes de phénotypage reposent (i) sur une mesure directe de l'activité enzymatique
en utilisant un substrat endogène ou ex vivo sur un tissu facilement accessible (par ex.
lymphocytes ou érythrocytes isolés) ou (ii) sur l'administration d'un substrat-test (en
396 La décision thérapeutique personnalisée : bon usage de la pharmacogénétique dans des situations à risque
B. Génotypage
Les méthodes de génotypage permettant la prédiction du phénotype des individus
sont basées sur l'identification directe des anomalies génétiques à l'origine de la
variabilité d'expression et d'activité de l'enzyme étudiée. Des études de corrélation
phénotype/génotype, complétées parfois par l'analyse fonctionnelle des mutations à l'aide de
systèmes d'expression in vitro, sont en général un préalable nécessaire au développement de
ces tests de génotypage pour s'assurer d'une bonne prédiction du phénotype. En pratique, le
génotypage est plus largement utilisé que le phénotypage, puisqu'il est applicable à l'analyse
de l'ensemble des polymorphismes affectant non seulement la PK des médicaments, mais
également leurs effets pharmacologiques (récepteurs, cibles protéiques).
Les méthodes de génotypage reposent sur l'utilisation des outils issus de la biologie
moléculaire, la technique de PCR ou réaction de polymérisation en chaîne étant
généralement à la base des méthodes utilisées en routine (discrimination allélique,
analyse de fragments, séquençage). Ces méthodes nécessitent le recueil préalable d'un
échantillon biologique (généralement sang total ou frottis buccal), à partir duquel est
extrait et purifié l'ADN génomique de l'individu. La stratégie de génoty!)ige appliquée
est fonction d'un certain nombre de paramètres, en particulier la nature des mutations à
identifier (mutations ponctuelles, insertion, délétion ou amplification du gène) et le nombre
de mutations à identifier pour obtenir un taux d'efficacité de prédiction du phénotype le plus
élevé possible (fonction de la fréquence des polymorphismes dans la population étudiée).
Avantages: le génotype d'un individu est permanent et n'est pas soumis à l'influence de
facteurs confondants (administration concomitante de médicaments, pathologies associées).
Limites : une mauvaise corrélation entre génotype et phénotype (cas où il existe de nombreuses
mutations et/ou de faible fréquence) peut conduire à des interprétations erronées si le
génotypage repose sur un panel limité de mutations.
•• .. .
Facteur génétique
t médicament
inhibiteur
,
.
Métabolite Métabolite
actif inactif
l 1NEFFICACITE ou TOXICITE
Deux exemples (thiopurines et 5-fluorouracile) qui illustrent l'intérêt de ces tests dans
la prise en charge thérapeutique des malades sont détaillés ci-après.
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M.1..j- 1 __,
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lO% de la dose standard,
ÉJW-C Dose standard 30-70% de la dose standard
3fois par semaine
lil'ilEB!ll!l!I ,__________,
AZA : 2,0-2, 5 mg/kg/jour AZA : 1,0- 1, 5 mg/kg/jour AZA : 0,2-0,25 mg/kg/3 fois par sem.
6-MP: 1, 5 mglkg{JOUr 6-MP: 0,75 mg/kgf"JOUr 6-MP: préférer un autre traitement
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' f(,f.!
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s_u 1_v1_c_11n_ico_-1>_10_1oe_1q_ue_ h_a_b1t_ u_e 1
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_
6-TGN dans la zone
1 �
• • •
thérapeutique 2 semaines sprés chaque
...., =-
FICHE FLASH
D La réponse aux médicaments est extrêmement variable d'un individu à l'autre.
D Les causes de la variabilité de réponse aux médicaments peuvent être d'origine physio-pathologique,
environnementale ou génétique.
D La pharmacogénétique vise à identifier les individus à risque d'anomalies de réponse aux médicaments
afin d'anticiper l'inefficacité et la toxicité des médicaments.
O Les gènes majoritairement étudiés concernent ceux codant les enzymes du métabolisme des médicaments
(EMM).
0 Les polymorphismes génétiques des EMM s'expriment sous la forme de phénotypes et définissent
différents sous-groupes: métaboliseurs rapides, intermédiaires, lents et ultra-rapides.
D La capacité métabolique d'un individu peut être évaluée par phénotypage ou génotypage.
O La corrélation génotype/phénotype est importante à prendre en compte pour la stratégie mise en œuvre
pour la détermination du statut métabolique d'un individu.
□ La pharmacogénétique concerne prioritairement les médicaments à index thérapeutique étroit, ceux
dont l'efficacité est difficile à évaluer à court terme et les situations cliniques avec des alternatives
thérapeutiques présentant des profils de tolérance variables dépendant du statut génétique.
Cl Les conséquences thérapeutiques des polymorphismes génétiques sont dépendantes de l'importance de
la voie enzymatique polymorphe dans le devenir du médicament et de la forme active du médicament
(prodrogue ou parent actif).
O Les tests de pharmacogénétique concernent principalement les classes médicamenteuses suivantes :
anticancéreux, immunosuppresseurs, antidépresseurs et antipsychotiques, antalgiques, antithrombotiques.
0 Des médicaments (thiopurines, fluoropyrimidines, abacavir, éluglistat) font l'objet de recommandations
des autorités de santé en vue de l'utilisation des tests pharmacogénétiques.
401
Fréquence
Fréquence Médicaments
Gène métaboliseurs
métaboliseurs ou classe Conséquences
(EMM*) ultra rapides
lents (ML) thérapeutique
(MUR)
anticoagulants surdosage et risque
CYP2C9 3-5 NA
oraux (AVK) hémorragique chez ML
inefficacité chez ML
CYP2C19 1-3 20 clopidogrel
risque hémorragique chez MUR
antidépresseurs toxicité ou inefficacité
sous-dosage chez MUR ou
voriconazole surdosage et hépatotoxicité
chez ML
éliglustat**
diminution de doses chez ML
test obligatoire
tamoxifène Inefficacité chez ML
antidépresseurs toxicité ou inefficacité
fluoropyrimidines
mucite, neutropénie, aplasie
DPYD 0,1-0,3 ND (5FU, capécitabine)
Cl chez ML
test obligatoire
Thiopurines
toxicité hématologique chez ML
TPMT 0,5 10 test recommandé ou inefficacité chez MUR
(RCP)
Diarrhée, neutropénie chez ML
UGT1A1 15 NA irinotécan intensification de doses Cl
chez ML
NA: non applicable; ND: données non disponibles; MR: métaboliseurs rapides; Cl: contre-indication.
EMM = enzymes du métabolisme des médicaments.
** médicament prescrit dans la maladie de Gaucher.
Autres gènes concernés hors EMM
HLA (abacavir; carbamazépine): risque d'hypersensibilité, génotypage préalable
obligatoire pour l'abacavir en Europe (recherche allèle HLA B*5701};
VKORCl (warfarine): cible pharmacologique des AVK (hypersensibilité ou résistance).
Site web consultable: https:/lwww.pharmgkb.org/(données bibliographiques et
recommandations).
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