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LECTURE LINEAIRE n°4

Déclaration des Droits de la femme et de la citoyenne, d’Olympe de Gouges.

Préambule et articles I et II.

Préambule.

Les mères, les filles, les sœurs, représentantes de la nation, demandent d’être constituées en
Assemblée nationale. Considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de la femme, sont
les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, [elles] ont résolu
d’exposer dans une déclaration solennelle, les droits naturels, inaliénables 1 et sacrés de la femme,
afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social 2, leur rappelle
sans cesse leurs droits et leurs devoirs, afin que les actes du pouvoir des femmes, et ceux du pouvoir
des hommes pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en
soient plus respectés, afin que les réclamations des citoyennes, fondées désormais sur des principes
simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la constitution, des bonnes mœurs, et au
bonheur de tous.

En conséquence, le sexe supérieur en beauté comme en courage, dans les souffrances maternelles,
reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l’Être suprême, les Droits suivants de la
Femme et de la Citoyenne.

Article premier.

La Femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être
fondées que sur l’utilité commune.

II.

Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles 3 de la
Femme et de l’Homme : ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté 4, et surtout la résistance à
l’oppression.

1-Lisez le début du préambule et précisez quel en est le destinataire ainsi que la visée.

1
Fondamentaux, dont l’être humain ne peut être privé.
2
De la société.
3
Qui ne peuvent être supprimés.
4
La sécurité.
Le destinataire est l’Assemblée nationale. Le préambule vise à introduire la Déclaration, afin d’en
expliciter les intentions.

2-Quelle image des femmes le préambule donne-t-il ?

L’image donnée est celle de femmes citoyennes, responsables et engagées dans la nation. C’est une
image très positive et élogieuse.

3-Lisez le préambule de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Relevez les éléments
nouveaux figurant dans la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, d’ Olympe de
GOUGES. Ce texte est-il un pastiche, une parodie ou une réécriture du préambule de la Déclaration
des droits de l’homme et du citoyen ?

Les représentants du peuple français, constitués en Assemblée nationale, considérant que


l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics et
de la corruption des gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits
naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous
les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs ; afin que les actes
du pouvoir législatif, et ceux du pouvoir exécutif, pouvant être à chaque instant comparés avec le but
de toute institution politique, en soient plus respectés ; afin que les réclamations des citoyens,
fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la
Constitution et au bonheur de tous.

En conséquence, l'Assemblée nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Être
suprême, les droits suivants de l'homme et du citoyen.

Le préambule de la DDFC est une réécriture de la DDHC, au féminin. En effet, les termes renvoyant
à l’Assemblée, exclusivement masculine, ou aux hommes, laissent la place à leur équivalent
féminin. Les éléments nouveaux sont : « Les mères, les filles, les sœurs, représentantes de la
nation » à la place de « Les représentants du peuple français » ; « le mépris des droits de la
femme » à la place de « de l’homme » ; « le sexe supérieur en beauté comme en courage dans les
souffrances maternelles » à la place de « l’Assemblée ».

INTRODUCTION :
En 1789, le peuple se révolte et revendique, avec la Déclaration des droits de l’homme et
du citoyen, l’égalité entre tous. Olympe de Gouges, écrivaine des Lumières et porte-parole des
femmes, critique ce texte car les femmes n’y sont pas mentionnées. Aussi décide-t-elle de rédiger
une nouvelle déclaration, la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, afin de réclamer
des droits pour les femmes. Le texte que nous allons étudier est le préambule et les deux premiers
articles ; le préambule figure après les textes introductifs et juste avant les dix-sept articles
composant la Déclaration, afin d’en exposer les enjeux. Entre style officiel et discours argumentatif,
ce préambule indique le destinataire de la Déclaration et les objectifs poursuivis par Olympe de
Gouges. Comme les deux premiers articles, il donne le ton des articles qui vont suivre.

MOUVEMENTS DU TEXTE :

MOUVEMENT 1 : 1er paragraphe-UNE REECRITURE POLEMIQUE ET SATIRIQUE

MOUVEMENT 2 : 2ème paragraphe + les deux articles-UNE REECRITURE AU FEMININ

PROBLEMATIQUE : EN QUOI LA REECRITURE DU PREAMBULE DE LA DDHC par Olympe de Gouges


PEUT-ELLE APPARAITRE COMME POLEMIQUE ?

COMMENT LE PREAMBULE ET LES DEUX PREMIERS ARTICLES TRADUISENT-ILS L’EGALITE ENTRE LES
HOMMES ET LES FEMMES ?

EN QUOI LE PREAMBULE ET LES DEUX PREMIERS ARTICLES DEFINISSENT-ILS (PRESENTENT-ILS) LA


VISEE DE L’ŒUVRE D’O de G ?

MOUVEMENT 1 :
PROCEDES EFFETS DE SENS
Emploi du lexiquedu pouvoir législatif : Le texte se présente comme un véritable texte
« l’Assemblée nationale », « représentantes de loi, qu’O de G voudrait voir appliquer.
de la nation », « gouvernements », Les destinataires sont les députés de
« déclaration solennelle », « droits », l’Assemblée nationale.
« membres du corps social », « devoirs »,
« actes du pouvoir » (2 fois), « institution
politique », « citoyennes », « Constitution »,
« articles » …
Enumération au pluriel qui privilégie les O de G prend en compte toutes les femmes
relations familiales + répétition du mot françaises, quel que soit leur statut. Elle
« femmes ». valorise leurs revendications communes par
l’emploi du pluriel.
Les mères, les filles, les sœurs, sont reliées par
les liens du sang.
Elle exclut le terme d’épouse et en
conséquence les liens du mariage qui sont des
liens imposés au XVIIIème siècle.
Groupe nominal « représentantes de la Le GN met en évidence le fait que les femmes
nation ». sont membres à part entière de la nation. Elle
instaure une forme de solennité.
Verbe « demandent ». Le verbe place le texte dans le genre judiciaire
du réquisitoire. Le préambule sert à asseoir la
légitimité de la demande.
Emploi du participe présent « considérant » + Il introduit le contexte d’écriture en présentant
énumération + emploi du verbe les inégalités entre les femmes et les hommes
d’état « sont » = Sujet (énumération) + verbe qu’elle présente comme les raisons des
d’état = attribut du sujet (« les seules causes dysfonctionnements sociétaux.
des malheurs publics et de la corruption des
gouvernements »).
La 2ème phrase est particulièrement longue et La structure de la phrase met en évidence un
comporte un sujet implicite : en effet, le sujet ton officiel et solennel.
implicite du verbe de la proposition principale
est l’énumération de la phrase précédente :
« Les mères, les filles, les sœurs ».
Gradation : « l’ignorance, l’oubli ou le Elle instaure une forme de solennité.
mépris ».
Dans la 2ème phrase, anaphore de « afin que » Les subordonnées introduisent les différents
qui introduit trois propositions subordonnées buts de cette déclaration et permettent ainsi
conjonctives compléments circonstanciels de d’asseoir la légitimité du texte.
but. Elle instaure une forme de solennité.
Périphrase « membres du corps social ». Cette déclaration rappelle sans cesse les droits
et les devoirs des femmes à toute la société.
Parallélisme « les actes du pouvoir des femmes Elle donne une portée universelle à sa
et ceux du pouvoir des hommes ». déclaration.
Lexique mélioratif utilisé à la fin de la phrase Ce lexique met en évidence le but recherché
«au maintien de la Constitution, des bonnes par O de G.
mœurs et du bonheur de tous ».
Antithèse entre le début et la fin de la 2 ème L’antithèse met en valeur l’opposition entre
phrase. -le malheur public d’un côté : « l’ignorance,
l’oubli ou le mépris des droits de la femme »,
« causes des malheurs publics et de la
corruption »,
-le bonheur de tous de l’autre : « maintien de
la Constitution, des bonnes mœurs, et au
bonheur de tous. »
Selon O de G, les « malheurs publics » sont dus
au manque de considération des femmes et au
« mépris » de leurs droits. Elle accuse
indirectement les hommes d’en être
responsables.
Dès lors, la solution proposée pour retrouver
une nation unie est simplement de reconnaître
les droits des femmes et de les inscrire dans la
Constitution afin qu’ils soient toujours
respectés.

MOUVEMENT 2 :
PROCEDES EFFETS DE SENS
Le dernier paragraphe s’ouvre sur la locution Cette locution souligne la construction
adverbiale « En conséquence ». rigoureuse du texte et de l’argumentation.
« En conséquence » exprime une conséquence
logique, ici une induction.
Périphrase hyperbolique : « le sexe supérieur, Cette périphrase élogieuse affirme la
en beauté comme en courage, dans les supériorité des femmes, par leur beauté et leur
souffrances maternelles ». capacité à donner la vie. Elle glorifie la femme.
Référence à « l’Etre suprême ». Il s’agit d’un argument d’autorité.

Dans les deux articles, emploi du présent de Ces éléments donnent une dimension juridique
vérité générale, de la 3ème personne du au texte.
singulier + recours à la parataxe La parataxe confère une simplicité et une
(juxtaposition). sécheresse au propos : le style laconique (qui
s’exprime en peu de mots) s’efforce de traduire
la sévérité de la loi, qui ne tergiverse pas mais
respecte les principes de justice.
L’article I affirme l’égalité des sexes. Il est très
important car il est le pilier sur lequel
s’appuient les autres articles énumérant les
droits des femmes.
Dans l’article II, emploi du déterminant Cela donne un caractère assertif (qui exprime
« toute » + énumération (« la liberté, la une vérité) à l’article.
propriété, la sûreté, et surtout la résistance à A partir de l’article II, O de G énumère les
l’oppression ».) « droits naturels » des hommes et des
femmes.
CONCLUSION :

Ce préambule permet à Olympe de Gouges d’expliciter les enjeux et la visée de la Déclaration,


véritable projet politique. Il s’agit de revendiquer la reconnaissance officielle des citoyennes, en
faisant ratifier les articles de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, c’est-à-dire
en inscrivant l’égalité de droits entre les hommes et les femmes dans la Constitution. Jouant sur
l’implicite, le texte fait aussi entendre, de manière polémique, un blâme des hommes et un éloge
des femmes. Aujourd’hui, l’égalité des sexes figure dans la Constitution grâce à une loi
constitutionnelle de 200_ complétant l’article 1er et un amendement de 2018 qui réécrit l’article 1 er :
« Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction de sexe, d’origine ou de
religion ».

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