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Explication 1: Olympe de Gouges, « Le préambule », DDFC (1791)

INTRODUCTON:

Née en 1748, Olympe de Gouges est une femme de lettres française qui s’inscrit dans le
mouvement des Lumières par ses oeuvres qui militent pour l’égalité. Elle participe
pleinement à la Révolution française en promouvant notamment l’égalité entre les hommes et
les femmes et en devient une figure singulière du fait de son féminisme combatif. Le 14
septembre 1791, alors que Louis XVI prête serment à la Constitution, Olympe de Gouges
publie un texte qui la consacrera comme grande pionnière du féminisme, la DDFC. Il s’agit
d’un pastiche de la DDHC, publié deux ans auparavant. Après avoir dénoncé les massacres
menés au nom de la Révolution, la militante meurt guillotinée en 1793.
Le préambule de cette déclaration polémique expose les buts de sa démarche.
LECTURE
On s’attachera ici à dégager la signification de la réécriture évidente du préambule de la
DDHC.
Tout d’abord nous verrons la demande de reconnaissance et de représentativité des femmes
en tant qu’Assemblée Nationale, puis nous étudierons la cause de cette déclaration, ensuite
nous analyserons le contenu et la qualité de cette déclaration, puis nous parlerons des buts de
cette déclaration, enfin nous nous intéresserons à la synthèse et à l’ouverture aux articles de
la DDFC.

I- Demande de reconnaissance et de représentativité des femmes en tant qu’Assemblée


nationale, ligne 1 à 2:

Alors que la DDHC s’ouvre sur un fait accompli, la DDFC elle s’ouvre au contraire
polémiquement sur une réclamation « Les mères, les filles, les soeurs, représentantes de la
nation, demandent d’être constitué en Assemblée nationale », c’est à dire d’avoir part au
pouvoir législatif. Les femmes sont toutes prises en comptent dans cette énumération et sont
d’emblée affirmées comme « représentante de la nation » sans majuscule aux mots ce qui
tend a les représenter « concrètement ». On remarque que les épouses ne sont pas prises en
compte, ce sont les femmes en tant qu’individus non dépendantes de leur mari qu’Olympe de
Gouges prend en compte. C’est une déclaration implicite d’indépendance et de refus de la
tutelle masculine. Le fait de demander à être constitué en Assemblée nationale souligne un
paradoxe, en effet pourquoi ne le sont-elles pas déjà comme les hommes?

II: Motif de cette Déclaration, ligne 3 à 5:

Là aussi, O.G fait un calque ironique et polémique de la DDHC, elle reprend au mot près
l’énumération en gradation de ce qui cause les « malheurs publics et la corruption des
gouvernements », « ignorance », « oubli », et encore pire car il s’agit de sentiment de
supériorité et de manque de respect, « le mépris ». Mais le complément du nom « les
femmes » présent dans la DDFC change tout, de manière très polémique cela suggère que les
droits de la femme ne sont pas vraiment inscrits dans les droits de l’Homme puisqu’il faut en
faire une Déclaration dédiée. D’autre part, selon Olympe de Gouges, ce n’est pas la non
observance des Droits de l’Homme en général qui crée tous ces malheurs publics mais la
seule non observance des Droits de la femme. Il s’agit ici de dire que tous les
dysfonctionnements socio-politiques découlent de cette non reconnaissance et observance.
C’est une Déclaration de féminisme radical.

III- Contenu et la qualité de cette Déclaration, ligne 5 à 7:

Après avoir exposé ce qui a amené les femmes à cette Déclaration, OG, comme dans la
DDHC, en précise le contenu et la qualité. On observe à nouveau un calque de la DDHC pour
affirmer la détermination qui a fait naître la DDFC et la solennité de cette déclaration. A la
ligne 6, « elles ont résolu d’exposer dans une déclaration solennelle » met en valeur la
déclaration décrite comme « solennelle » qui signifie « qui a une gravité propre aux grandes
occasions ». Ligne 6 à 7, O.G dit « exposer les droits naturels, inaliénables et sacré de la
femme », cette énumération est très solennelle et valorisante, elle qualifie les droits de la
femme comme « naturels », une notion chère aux philosophes des Lumières. Mais aussi
comme « inaliénables », qui ne peuvent donc pas être changés ou transformés. Ou encore,
« sacrés », c’est à dire d’ordre religieux, donc ces droits de la femme ne peuvent être
profanés.

IV- Buts de cette Déclaration, ligne 7 à 16:

Les buts sont donnés en trois temps, le rythme est ternaire et éloquent, il est crée par
l’anaphore de « afin que » suivit donc de trois propositions circonstancielles finales de but
pour préciser les fins de cette DDFC. De la ligne 7 à la ligne 9 il n’y a aucun détournement de
la DDHC, c’est une reprise exacte. Cette reprise reprend donc que le but est que la
déclaration imprime leurs « droits et leurs devoirs » de citoyens et citoyennes dans les esprits
de tous, cela est montré à travers la métaphore des « membres du corps social » et renforcé
par l’adjectif indéfini « tous ». Et cela, constamment « constamment présente, sans cesse »
pour lutter contre « l’oubli » évoqué plus haut « leur rappelle ». De la ligne 10 à 13, O.G
remplace « le pouvoir législatif » et « le pouvoir exécutif » par « pouvoir des femmes » et
« celui des hommes » ce qui prend alors un tour polémique en affirmant l’existence d’un
pouvoir des femmes qui s’exprime en « actes » mis en parallèle avec celui des hommes et
l’expression « plus respecté » prend alors un tour plus ironique. D’autre part il n’est pas exclu
que l’on retrouve ici cette même rêve diction de pouvoir législatif qui ouvrait ce préambule.
De la ligne 13 à 16, il ne s’agit plus des organes du pouvoir mais des simples citoyens et
citoyennes et non plus « d’actes de pouvoir » mais de « réclamations ». Il s’agit maintenant
d’une pratique de la démocratie à son échelon le plus large auquel le texte s’ouvre en se
voulant fondé sur des « principes simples ». Sur le plan de l’idée on note la soumission de
l’individu aux lois de la Nation et au collectif avec « au bonheur de tous » qui est une idée
neuve en Europe au 18ème siècle. L’idée exprimé est donc qu’en s’appuyant sur cette
Déclaration que les femmes auront constamment dans l’esprit, les « réclamations » des
citoyennes entendront respecter la Constitution et contribuer au bonheur collectif. O.G ajoute
un troisième terme pour définir le but de ces réclamations, il faudra aussi qu’elles « tournent
au maintien (…) des bonnes moeurs » ceci est un ajout assez surprenant car, en tant qu’ajout
à une DD de la femme, il sous-entend que le maintien des « bonnes moeurs » revient aux
femmes, ce qui est très traditionnelle.

V- Synthèse du Préambule et ouverture aux articles de la Déclaration qui suivent:


O.G réaffirme en synthèse consécutive « en conséquence » de ce qui a été dit, la position de
toutes les femmes comme « déclarantes ». Pour cela elle appuie leur légitimité à parler, sur
une périphrase cliché « le sexe supérieur en beauté comme en courage dans les souffrances
maternelles » qui réduit les femmes à une image très traditionnelle et réductrice. Il n’est pas
exclu qu’il y ait de sa part une certaine ironie, mais de toute façon elle les infléchit en les
appliquant à des femmes qui s’éloignent de cette vision réductrice dans cette réclamation de
pouvoir législatif qu’elle met dans leur bouche, car ici ce sexe « reconnaît et déclare ». Puis
elle reprend à la DDHC la même valorisation de cette déclaration qu’elle annonce comme
placé « en présence et sous auspices », c’est à dire sous la protection de l’Etre Suprême, il y a
ici une allusion au culte révolutionnaire destiné à doter la vertu révolutionnaire de spiritualité,
ce qui tend bien entendu à sacraliser la déclaration.

CONCLUSION:

Ce préambule se fonde beaucoup sur la DDHC, pour souvent s’en écarter. Elle donne sa
méthode à elle qui est celle d’une adaptation revendicatrice. A travers motifs et buts de cette
déclaration, il s’agit pour elle ici de clamer haut et fort l’oubli et le mépris des droits de la
femme et donc de lutter contre cela et de dire la nécessité de la DDFC qui sera donc un texte
de référence pour les citoyennes.

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